Summary:
DA de Adara Sanchez et montage de Saam
Il avait écrit la lettre. Il s'était excusé. Il avait raturé. Il avait laissé de l'encre, des larmes – des larmes de rage. Il avait recommencé. Encore et encore. Alors, il avait revu ses doigts. Ses doigts à elle, des doigts de fée qui l'avaient ensorcelé. Cette fois, il avait juste signé.
Categories: Après Poudlard Characters: Cho Chang, Personnage original (OC)
Genres: Aucun
Langue: Français
Warnings: Aucun
Challenges: Aucun
Series: Take a picture, Nous défierons le vent
Chapters: 1
Completed: Oui
Word count: 2907
Read: 1344
Published: 21/08/2013
Updated: 23/08/2013
Chapitre 1 by Eni-gwada
Author's Notes:
Sean, c'est quelqu'un qui n'a pas connu Cho à Poudlard, qui n'est pas au courant de ses histoires avec Cédric ou Harry. Sean, c'est la possibilité de la voir avec un regard neutre. Neuf. J'espère que ce n'est pas un effet de mode.
Evidemment, j'ai conscience que leur histoire risque de n'intéresser personne. Bien sûr, ça fait toujours mal au coeur de ne recevoir aucune critique sur son texte, aucun avis - qu'il soit positif ou négatif. Mais j'avais besoin d'écrire ça. Saam a posté son montage, j'ai eu un coup de coeur, et c'est tout. Merci à Saam, donc, de m'avoir permis d'écrire ce texte !
Il y a ces doigts, et c'est la première chose d'elle sur laquelle Sean pose son regard. De longs doigts fins aux ongles coupés assez courts. Il soupire intérieurement. Il n'aime pas les femmes qui mettent du vernis, même s'il est assez terne comme celui des doigts qui se tendent vers lui.
- Il y a encore trois jeunes sorciers qui ont survolé en balai un festival de musique moldu, et ils ont été aperçus par au moins cent cinquante personnes. Mon chef veut une excuse sur son bureau d'ici deux heures maximum.
Sa voix n'est ni aigüe ni haut perchée, et elle est sûrement jeune. Sean l'imagine de taille moyenne, avec un visage ovale et une crinière rousse – peut-être même qu'elle a les yeux verts. Mais il ne lève pas les yeux pour le vérifier, et il continue à trier la pile de dossiers qui s'entassent sur son bureau. S'il y a bien une chose dont il a horreur, c'est que les gens qui ne le connaissent pas se permettent de le tutoyer.
- Désolé, j'ai du travail. Le département des jeux et sports magiques est habilité à résoudre ce genre de cas, je crois.
La main qui lui tendait l'enveloppe frappée du sceau du Ministère tressaille. Mais elle ne se retire pas, et la voix reprend d'un ton légèrement ironique :
- Du travail ? C'est vrai, tout le monde sait bien que cet indispensable Comité des inventions d'excuses à l'usage des moldus est toujours débordé !
Sean sourit et garde la tête baissée. Il n'a que faire de ces ragots qui courent au Ministère. S'ils trouvent son boulot trop facile, qu'ils viennent prendre sa place. Les doigts se sont crispés et froissent un peu le papier. C'est une main de pianiste. Il en est sûr.
- Navré. Je ne peux rien faire pour vous.
Il attend. Que va t-elle faire, cette main ? Se fermer en un poing rageur et s'abattre sur son bureau ?Se figer et lui déposer l'enveloppe malgré tout ? Ou, sous la surprise de se faire renvoyer, s'ouvrir et laisser tomber le bout de papier ?
Elle ne fait rien de tout ça, la main. Elle disparaît simplement. Quand Sean relève les yeux, la jeune femme a déjà passé le seuil de la porte.
- C'était qui ? demande t-il en s'adressant aux collègues qui se trouvent dans la salle.
- Chang, des ligues de quidditch. Cho Chang, je crois, répond Lydie avec un petit sourire entendu.
Sean hausse les épaules. A vrai dire, il se fiche de son nom et il ne sait même pas pourquoi il l'a demandé. Cette fille dont il n'a pas vu le visage, il l'a déjà oubliée.
***
Il y a ces doigts, et c'est déjà la troisième fois qu'il en rêve. Ils courent et glissent sur les touches du piano, ils les caressent et se meuvent avec une sensualité qui envoie des frissons dans le creux de son estomac.
Sean est debout, à côte de la jeune femme dont le visage est mangé par les ombres. Elle se tourne, et elle lui tend la main.
Viens.
Il n'arrive pas à détacher son regard de ces doigts. Il les imagine, parcourant son corps à lui et l'embrasant tout entier. Il les imagine, agrippant ses cheveux et l'attirant à une bouche implacable qui se met à le dévorer. Il les imagine, enroulés autour de son poignet et ne lui laissant aucune possibilité de s'échapper.
Tu es mien.
Sean s'assoit brusquement dans son lit. Il est trempé de sueur et tremble comme une feuille. Que lui arrive t-il, par Merlin ? Pourquoi une telle obsession ? Un tel désir ?
Parce que oui, c'est du désir. Du désir pour cette femme dont il n'a vu que les doigts et qui lui a paru si désagréable. Et pourtant, elle est toujours là, quelque part, dans son esprit. Elle l'étouffe, elle l'oppresse et elle l'empêche de vivre. Il ne peut rien faire d'autre que penser à elle.
Tu es mien.
Non, c'est faux ! Il n'est la propriété de personne. Il veut rester libre. Il veut rester seul. S'il veut se draper de ténèbres, rien ni personne ne pourra l'en empêcher. Rien ni personne ne lui dira ce qu'il doit faire.
Elle est sûrement insignifiante. Pareille à n'importe quelle autre fille, lisse et vide. S'il la désire, c'est parce qu'il ne sait rien d'elle. Un nom, c'est tout. Et elle s'élève dans ses rêves. Elle se pare d'innombrables qualités. Elle brille là-haut, pareille à une étoile. Elle lui tend la main.
Viens.
C'est ça. C'est forcément ça. S'il la désire, c'est parce qu'il ne sait rien d'elle. Rien.
***
Il y a ces doigts, qui s'ouvrent de surprise. Et qui s'avancent, toujours plus proches, jusqu'à accrocher les siens.
Alors qu'ils se dirigent vers la piste de danse, Sean la détaille discrètement. Pas de rousse aux grands yeux verts, finalement. C'est une asiatique aux longs cheveux noirs et aux yeux marrons. Elle est petite et quand ils se mettent face à face, elle est obligée de lever la tête pour le regarder. Sean lui sourit. Il aime cette sensation de supériorité. Ça ne lui était jamais arrivé, mais face à elle il préfère être sûr de ne pas être à sa merci. C'est ridicule. Mais c'est ainsi.
Les doigts fins se posent sur son épaule. Ils sont légers, et Sean ne les sent presque pas à travers le tissu de sa chemise. Elle a l'air fragile, la demoiselle. Il la rapproche un peu de lui et se remet à scruter son visage. Est-il inconvenant ? Est-ce que ça la met mal à l'aise ? Il ne le sait pas, et il s'en fiche.
Les yeux de Cho sont remplis de questions. Sa bouche semble s'ouvrir sur un Pourquoi ? Pourquoi moi ? qui fait s'élargir le sourire de Sean. C'est vrai, pourquoi elle ? Maintenant qu'ils sont si proches l'un de l'autre, qu'il connaît autre chose que ses doigts et sa voix... Elle n'est même pas jolie. Elle est mince, presque frêle. Son visage est anguleux et ses pommettes trop prononcées. Pourquoi elle ?
Soudain, les doigts frôlent sa hanche, et le désir se réveille à nouveau dans le corps de Sean. Il se crispe, et serre la taille de la jeune fille. Il lui fait peut-être mal. Et si elle brisait entre ses mains, à la manière d'une brindille trop sèche ? Elle est fragile. Il la domine. C'est elle qui est son pouvoir.
Sait-elle l'effet qu'elle a provoqué ? Le haut de ses joues a rougi, mais elle le regarde hardiment. Effrontément.
Sean en oublie de respirer. Cho se cache derrière ses cils, et elle sourit. Est-elle innocente ? Ingénue ? Oui, s'il en croit la petite robe blanche, ou sa manière de danser et de parler. Mais il y a ce sourire levé, cette courbe dans les lèvres, et ce petit pétillement dans les yeux qui ne peuvent le tromper. Elle le met au défi. Jusqu'où iras-tu ? Elle a sûrement été à Serpentard.
Sean ne comprend plus. Il se rappelle cette journée au Ministère, sa voix autoritaire et impérative. Qui est-elle ? Qui est-elle vraiment ?
Les doigts quittent sa taille, et Cho s'éloigne sans un regard en arrière. Sean reste immobile sur la piste de danse. Il était sensé se débarrasser de cette obsession ridicule ! Il aurait dû remarquer mille et un petits défauts, les faire ressortir, les critiquer, se convaincre de la normalité de la jeune femme, de sa banalité, la faire descendre de son piédestal et l'oublier !
Qui est-elle ? Qu'a t-il fait ?
***
Il y a ces doigts, et ils pianotent impatiemment sur une table. Cho est déjà arrivée au Chaudron Baveur et Sean la regarde discrètement de loin.
C'est lui qui lui a proposé ce rendez-vous, il doit aller la rejoindre. Mais il reste planté là, et ses pieds semblent s'enraciner dans le sol. Ses mains tremblent et il trouve brusquement que l'attache de sa cape lui serre douloureusement la gorge. Sean a envie de rire bêtement. Il ne serait pas plus agité s'il était sur le point de se jeter dans le vide.
Se jeter dans le vide... Peut-être que c'est exactement ça, après tout.
Sean sait qu'il peut avancer, faire cinq mètres et aller s'asseoir sur la chaise qui fait face à la jeune employée du Ministère. Il peut lui prendre une main et se mettre à la caresser avec son pouce – non, pas maintenant, c'est trop tôt ! Il va plutôt lui dire bonjour, lui demander si elle a passé une bonne journée et essayer de ne pas montrer que son estomac fait des sauts périlleux dès qu'elle le regarde avec ce sourire dans les yeux. Ils se mettront à discuter, il orientera la discussion sur sa famille, ses amis, et ses années à Poudlard. Ou sur ses goûts en matière de vêtements, de cuisine, de couleurs et de prénoms pour bébé – non, ça aussi c'est trop tôt, que va t-elle en penser ? Il apprendra à mieux la connaître. Il saura qui elle est. Et quand le dessert arrivera, il pourra entrelacer leurs doigts.
Il se sera jeté dans le vide, et il se sera envolé.
Mais Sean sait aussi qu'il peut reculer, sortir du Chaudron Baveur et rentrer chez lui comme si de rien n'était. Il peut aller s'enfouir sous sa couette, et se préparer mentalement à affronter le regard déçu de Cho. Il peut décider de ne pas chercher à devenir son ami, ou quoi que ce soit de plus. L'éviter serait peut-être une bonne solution ? Tenter de la faire disparaître de son esprit, de ne plus penser à elle, à ses doigts, à ses yeux, à ses lèvres et à son parfum discret. Il pourrait alors retrouver le sommeil, ne plus lui donner la place de choix dans ses rêves. Retourner à sa petite vie tranquille, stable et sans désir dévastateur.
Une vie triste, en somme. Une vie sans elle... Est-ce toujours possible, à présent ? Et si, si jamais il ne va pas s'asseoir en face d'elle, là, tout de suite, maintenant, et qu'il ne parvient pas à l'oublier, à la faire sortir de sa tête ? Il se sera jeté dans le vide, certes. Mais il se sera écrasé.
Les doigts se sont mis à déchiqueter une petite serviette en papier. Cho a l'air de perdre patience. Sean sourit, il a encore deux minutes pour se décider. Ça lui semble déjà bien trop.
***
Il y a ces doigts, et ils sont mutins sur sa peau. Sean n'est pas endormi. Il ne rêve pas. Contre son torse, les seins de Cho sont fermes et bien réels.
Il n'a pu déshabiller la jeune femme que d'une main malhabile et son coeur cabriole dans sa poitrine. Tout sera bientôt fini. Il sera délivré de son obsession. Il sera libre, enfin !
Cho pousse un petit soupir. Ses yeux sont voilés et elle adresse un faible sourire à Sean. Mais il ne la regarde pas. Il se concentre sur un point au-dessus de son épaule, et il vit déjà l'avenir.
Il sait qu'elle ne pleurera pas. Elle est fière. Ses doigts se crisperont peut-être sur sa chemise et elle s'arrêtera un moment de respirer, mais ce sera tout. Les filles comme elle ne pleurent pas. Elles se redressent avec un port altier et vous regardent avec indifférence. Elles ne sont satisfaites que lorsqu'elles ont vu le remords danser dans vos yeux, les regrets, et alors elles se tournent et claquent la porte bien fort.
Lui, il n'en éprouvera pas, des regrets. Il n'est pas allé la chercher et il sera heureux seul. Seul avec ses pensées qui tourbillonnent et lui donnent mal à la tête. Elles sont pareilles à son obsession pour Cho, d'ailleurs, il ne peut pas les contrôler. Mais il les a acceptées. Elles sont sa pénitence, et elles font partie de lui. Il n'y a de la place pour personne d'autre.
Les doigts de Cho agrippent les draps. Sean la regarde, abandonnée, soumise, les paupières fermées et la bouche entrouverte. Il n'y a qu'avec elle qu'il a envie de se comporter ainsi, d'abandonner un instant son rôle de pantin et endosser celui de marionnettiste. Il la domine, n'est-ce pas ? Il est celui qui joue de ce corps offert comme d'un instrument de musique, qui le fait vibrer et chanter. Il est celui qui module les soupirs qu'elle exhale – pianissimo ou allegro. Et il est aussi celui qui décide de quand reposer l'archet, pour tourner la page d'une autre partition.
Ça y est, tout est fini.
Mais à cet instant encore, la tête lui tourne. Il se sent ivre de pouvoir, aussi ivre qu'ont dû l'être les détenteurs de la baguette de sureau. Il contrôle, il maîtrise, il est capable de détacher les doigts fins de son épaule et d'ordonner d'une voix froide. Et elle est sûrement froide, sa voix, parce que la peau de Cho s'est hérissée, qu'elle a pâli et que son souffle s'est arrêté.
Ramasse tes affaires.
***
Il y a ces doigts, et ils ne font pas un geste pour saisir la lettre qu'il lui tend. Cho lève un sourcil, et Sean baisse les yeux. Il se balance avec maladresse d'un pied sur l'autre. Il y a des mots d'excuse, dans cette lettre. Pas de supplications mais des sentiments à coeur ouvert.
Il a continué à la voir dans ses rêves. Les doigts n'avaient rien perdu de leur sensualité, et Sean se réveillait toujours en sueur, le coeur battant à mille à l'heure. Mais pas de désir. De colère.
Il aurait voulu mordre ces doigts, ces doigts qui couraient sur des épaules qui n'étaient pas les siennes. Et après il les aurait embrassés pour se faire pardonner, ou alors il les aurait enfermés dans sa main à lui pour ne plus les laisser s'échapper.
Sean en était là, naviguant avec son petit canot sur les vastes mers de l'absurde, quand il s'était figé avec les yeux exorbités. Combien de temps cela faisait-il qu'il ne s'était pas retrouvé plongé dans l'obscurité, dans cet enfer de sons, de cris, de gémissements et de baguette qui s'abat ? De quand datait la dernière fois qu'il avait dû se recroqueviller, se plaquer les mains sur les oreilles pour ne pas entendre les hurlements qui déchiraient sa propre gorge ?
Il était tranquille, à présent. Instable, menaçant de plonger la tête la première à tout moment, mais tranquille. Combien de temps, depuis quand ? Depuis qu'il avait posé le regard sur ces doigts, ces longs doigts fins et pâles.
Qu'avait-il dit, déjà ? Il n'y a de la place pour personne d'autre. Et c'était ça. C'était exactement ça ! Cho, Cho aux longs cheveux noirs et à la taille gracile, Cho aux regards glacés et aux gémissements rauques, Cho emplissait tout et avait chassé les pensées noires, les sombres et les dépressives. Il n'y avait de la place pour personne d'autre.
Sean l'avait aimée, alors. Il avait voulu la rappeler, courir après elle et se glisser dans son étreinte réconfortante. Il s'était retenu. Parce qu'il s'était demandé, Est-ce que je l'aime parce que j'ai besoin d'elle ? Ça l'avait fait réfléchir. Il ne voulait pas d'une telle relation, basée sur l'utilité que chacun pouvait apporter à l'autre. Il ne voulait pas être capable de donner une raison à cette question, mais se retrouver simplement à dire, Parce que.
Et si ça n'avait pas été Cho ? Si ça avait été quelqu'un d'autre ?
Il n'arrivait pas à se l'imaginer. Ça ne pouvait qu'être Cho. C'était évident. Il avait écrit la lettre. Il s'était excusé. Il avait raturé. Il avait laissé de l'encre, des larmes – des larmes de rage. Il avait recommencé. Encore et encore. Alors, il avait revu ses doigts. Ses doigts à elle, des doigts de fée qui l'avaient ensorcelé. Cette fois, il avait juste signé. Il n'avait pas relu la lettre, et l'avait glissée dans l'enveloppe.
Maintenant, Sean attendait.
Il y a ces doigts qui hésitent, qui se tendent et se replient. Ils cherchent à comprendre, à savoir ce qui se cache, dans cette enveloppe. Et s'ils se brûlaient ? Si le papier était une illusion, un mirage et que lorsqu'ils le toucheraient il se désintégrerait en cendres ?
Finalement, ils décident. Ils se posent. Ils décachètent.
End Notes:
Merci d'avoir lu !
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