Summary:
Image réalisée par mes soins.
Vanille n'aime pas son prénom. D'ailleurs, c'est ce que vous apprendrez en premier sur elle.
Vanille, elle ne sait pas être attentive en cours, et ça lui vaut des coups de coudes réguliers de ses amies, qui veulent la remettre sur le droit chemin du sérieux et de l'attention.
Vanille, c'est un vrai livre ouvert. Quand son cerveau divague, tout le monde peut deviner à quoi elle pense.
Vanille, elle n'est pas vraiment seule dans sa tête. Souvent, elles sont au moins deux à y débattre.
Vanille, c'est l'élue d'une ancienne prophétie qui dit qu'elle sauvera le monde des sorc... non, non, attendez, pas du tout.
Pendant sa cinquième année, un mystérieux Club se présente. Il affirme pouvoir faire découvrir une magie différente, plus puissante. Et il n'a pas tort. Il oublie juste de préciser les embrouilles. Les mensonges. Les manipulations. Le danger.
Alors évidemment, personne ne s'en doutait, elle saute dedans à pieds joints. Et là, commencent les problèmes.
Bienvenue, lecteur. Bienvenue au Club des Créateurs.
Categories: Durant Poudlard Characters: Personnage original (OC)
Genres: Aventure/Action
Langue: Français
Warnings: Aucun
Challenges: Aucun
Series: Aucun
Chapters: 75
Completed: Oui
Word count: 339025
Read: 27986
Published: 17/06/2016
Updated: 16/07/2020
Story Notes:
Bienvenue au Club des Créateurs. Je suis Deanna, Dean' pour les intimes, et je serai votre hôte tout au long de cette histoire.
J'ai commencé à travailler sur le Club il y a six ans. A l'époque, j'écrivais peu et lisais beaucoup. J'ai publié les premiers chapitres avec un enthousiasme certain.
Il y a deux ans et demi, j'ai mis en pause la rédaction de l'histoire, j'avais besoin de changer d'air. Il y a un an et demi, après un an sans écrire un mot, j'ai décidé qu'il valait mieux ne pas insister : j'ai publié un ultime chapitre racontant, au travers d'une lettre de mon héroïne, tout la fin de l'histoire.
Et puis, un beau jour, j'ai tout relu, et l'envie a suivi. L'envie d'écrire, d'achever mon travail, de révéler toutes mes idées, et de retrouver la passion de l'écriture. C'était en juin 2019.
J'avais décidé de ne rien publier tant que je n'étais pas certaine de terminer cette histoire. Aujourd'hui, au jour 3 du NaNoWriMo 2019, j'ai compris que j'arrivais à un tournant. Je sais que je vais la terminer. D'ailleurs, elle l'est presque.
C'est avec un immense plaisir que je reprends la publication.
Oh, je sais que ce texte n'est pas parfait, surtout les début, mais la fin non plus. Je sais aussi que ceux qui me suivaient sont certainement passés à autre chose. Mais je publie pour le plaisir.
Merci à tous ceux qui auront le courage de relire ce texte dont les début, je l'avoue, me font un peu rougir. En vérité, je n'ai moi-même pas eu le courage de relire les premiers chapitres.
Toute mon amitié, et au plaisir de lire vos reviews,
Dean'
1. C'est quoi ce prénom ? by Deanna
2. Discrétion demandée by Deanna
3. La réunion by Deanna
4. Mais de qui parles-tu ? by Deanna
5. Les lettres by Deanna
6. Soirée dansante by Deanna
7. Décisions by Deanna
8. La cérémonie by Deanna
9. La magie des baguettes by Deanna
10. La vie au Club des Créateurs by Deanna
11. Un nouveau sortilège, un parchemin et une ébauche by Deanna
12. Les manifestations spontanées d'enfants magiques by Deanna
13. Repousse de cheveux s'abstenir by Deanna
14. L’enfant et l’oiseau by Deanna
15. Fiole et potion by Deanna
16. Le début des problèmes by Deanna
17. Des explications by Deanna
18. La dernière réunion by Deanna
19. Aveux de fin d'année by Deanna
20. Marcher dans l'herbe by Deanna
21. Des ours face à une Occlumens à l'envers by Deanna
22. Famille et analogies sportives by Deanna
23. Les voyages en train by Deanna
24. L'améthyste by Deanna
25. J'ai vu une grosse bête by Deanna
26. Contrôle F magique by Deanna
27. Le joug sorcier by Deanna
28. Revelavis 2.0 by Deanna
29. Aspirations by Deanna
30. La dignité des faibles by Deanna
31. Aux différentes façons d'aimer by Deanna
32. De l'importance que personne ne reste sur sa faim by Deanna
33. Juge, Maître et Novice by Deanna
34. Oui, c’est exactement ce à quoi vous pensez by Deanna
35. Chem-Cheminée by Deanna
36. La rencontre internationale annuelle du Club des Créateurs by Deanna
37. Un pas, un mur by Deanna
38. Le rêve by Deanna
39. Premier enseignement by Deanna
40. Tous pour un... by Deanna
41. Colère VS Vérité by Deanna
42. Le destin, cette facilité scénaristique by Deanna
43. Après un combat craint, la victoire a un goût de défaite by Deanna
44. Le retour d'un Maître by Deanna
45. Il n'y a pas de fin. Juste de nouveaux commencements. by Deanna
46. La menace by Deanna
47. La Trace by Deanna
48. Le Département des Surveillances des Usages Abusifs de la Magie by Deanna
49. La Maître Créatrice by Deanna
50. Les carnets by Deanna
51. La présentation by Deanna
52. La confiance by Deanna
53. Le pendentif by Deanna
54. Le ministre by Deanna
55. Le passé by Deanna
56. La trahison by Deanna
57. L'incendie by Deanna
58. L'allié by Deanna
59. Le camp by Deanna
60. La traque by Deanna
61. L'obstination by Deanna
62. La fondatrice by Deanna
63. Les Elfes by Deanna
64. La libération by Deanna
65. La LPO by Deanna
66. Le procès - partie 1 by Deanna
67. Le procès - partie 2 by Deanna
68. Le procès - partie 3 by Deanna
69. La chute by Deanna
70. L'académie de Beauxbâtons by Deanna
71. L'oubli by Deanna
72. Les jumelles by Deanna
73. La cabane by Deanna
74. Le Club des Créateurs by Deanna
75. L'épilogue by Deanna
C'est quoi ce prénom ? by Deanna
Author's Notes:
Chapitre de présentation, long et ch... Non attendez je dois vendre mon texte !
Ahem.
Bienvenue à Poudlard ! L'Ecole des sorcier a quelque peu changé. La guerre est finie depuis quelques années, nos héros ont déserté les bancs pour s'en aller vaquer à leurs vies d'adultes, place aux jeunes !
Vanille entre en cinquième année. Et soyons originaux (non), commençons ce texte avec... un banquet de rentrée ! Quoi de mieux pour exposer la situation?
Oui, bon, ça sera sûrement un peu plus sympa dans les chapitres d'après. Je vous souhaite (tout le bonheur du monde, et que quelqu'un vous...) (pardon) une bonne lecture !
Vanille n’aimait pas son prénom. C’était la cinquième fois qu’elle assistait au festin de début d’année à l’Ecole de Sorcellerie de Poudlard, cinq ans d’étude et elle n’avait jamais été capable de rester attentive, à quelle occasion que ce soit, cours, réunion, discours. Dès qu’il s’agissait de rester en silence à écouter un professeur parler, son cerveau désinvolte partait de lui-même dans des réflexions et des souvenirs.
Ce soir-là, venu de nulle part, Vanille se disait qu’elle n’aimait pas son prénom. Elle le trouvait trop facilement sujet aux blagues. Leanne, sa camarade de chambre de Serdaigle, dès le premier jour qu’elles avaient passé à Poudlard lui avait fait une remarque qui s’était voulue drôle. Au moins, se dit Vanille, ce prénom aura été un bon moyen se nous rapprocher. Même Ambre, elle si silencieuse et avare en plaisanterie, lui avait un jour dit de se calmer pour ne pas “virer chocolat”, ce qui avait au passage fait tourner des têtes à ceux qui n’avaient pas l’habitude de l’entendre.
Vanille secoua la tête et songea amusée qu’il valait mieux pour elle qu’elle continue à éviter les blagues.
Ne sachant pas d'où lui remontaient ces souvenir, Vanille leva les yeux vers la directrice de l'école qui s'apprêtait à faire son discours de rentrée.
Evelyne Roy avait succédé au professeur Rogue, immédiatement après la bataille de Poudlard.
Debout devant la table des professeurs, elle regardait ses élèves patiemment et souriante, attendant le silence. Les professeurs, comme tous les ans, étaient désolés de la voir si peu encline à imposer son autorité. Bientôt, le calme vint.
- Merci.
Elle leva sa baguette et fit apparaître un tabouret devant elle.
- Mesdemoiselles et Messieurs, je vous retrouve cette année pour mon plus grand plaisir, en forme et prêts à reprendre vos études, après deux mois de folles activités qui vous ont, j'en suis certaine, fait oublier la moitié de vos leçons de l'année passée. Mais il est temps de reconnecter nos petits cerveaux et de se plonger à nouveau dans l'univers des nouveautés et de l'apprentissage, et quoi de mieux pour commencer cette année qu'accueillir nos nouvelles têtes !
- Toujours aussi déglinguée, celle-là, murmura Oliver, un camarade de l'année de Vanille, assez fort pour faire retentir des ricanements autour de lui.
La porte de la grande salle s'était ouverte et une nuée de robes noire s'avançait prudemment dans l'allée centrale.
- Ils sont si petits c'est trop mignooon !
La plupart des filles assises autour de la tête blonde qui venait de s'écrier la même phrase que les deux années précédentes se tournèrent vers elle, le désespoir aux yeux, tandis que les garçons semblaient émus par cette phrase et la demoiselle qui l'avait prononcée.
Certaines choses ne sont pas faites pour changer, se dit Vanille.
En reportant son attention sur les nouveaux, son regard croisa celui d'un garçon assis à la table des Gryffondor qui la regardait fixement de ses grands yeux noirs. Gênée, elle se détourna vite mais croisa un autre visage qui la fixait, à l'autre bout de la salle. Elle se ratatina au maximum et rougit d'un coup.
"Mais d'autres changent au contraire, pensa-t-elle. Qu'est-ce qu'ils me veulent ?"
Leanne lui envoya un coup de coude. Elle fixait le fond de la grande salle où tout le monde regardait à présent.
Il y avait deux groupes d'élèves devant l'estrade, et sur le tabouret était maintenant posé le Choixpeau magique. La directrice reprit la parole :
- Bienvenue aux nouveaux première année. Puisse cette année vous apporter confiance et amitié, goût du travail et soif d'apprendre. Mais avant de nourrir une quelconque rivalité entre vous, il est de notre devoir de vous inculquer le respect mutuel, la bonne entente, et l'épanouissement personnel. Cette année sera donc commune à tous et vous serez, à chaque cours, répartis en quatre groupes, qui changeront aléatoirement. Un dortoir est également réservé à tous les première année, et vous avez le choix de votre table dans cette salle. Lorsque vous aurez assez de maturité et de personnalité, nous vous répartirons selon vos qualités, et ceci – elle tendis une main vers le groupe de gauche qui piétinait d'impatience – en seconde année.
Mme Roy leur demanda ensuite de de répartir sur les grandes tables, et le Choixpeau se mit à chanter. Vanille, comme à son habitude, n'écouta rien.
Elle se remémorait de sa première rentrée. Née moldue, elle n'avait jamais entendu parler ni de guerre ni de survivant. Hors, quand la directrice adjointe Minerva McGonagall était venue chez elle pour la rencontrer et lui expliquer ce qu'était le monde des sorciers, elle leur avait expliqué à elle et ses parents que ce monde sortait à peine d'une guerre. Sans entrer dans les détails, elle leur avait dit que la première année de Vanille serait une année de grands changements dans la communauté sorcière, mais qu'elle-même ne s'en rendrait pas compte, étant née-moldue en première année. Ensuite, elle avait demandé à parler à ses parents, seuls. Elle avait rejoint son frère aîné à l’étage et n’avait pas pu entendre discrètement ce dont ils avaient parlé.
Ensuite, le professeur était parti. Ses parents, pendant quelques temps, avaient refusé de reparler de cette rencontre. Mais un jour, ils avaient expliqué à Vanille ce qu’ils avaient appris.
Les sorciers sortaient d’une guerre due à une prise de pouvoir de sorciers n’acceptant pas ceux qui étaient nés comme elle, nés moldus. Ils revendiquaient l’autorité et la supériorité de ceux issus de sorciers depuis plusieurs générations. Pendant cette guerre, les sorcières et sorciers issus de moldus avaient dus se cacher pour ne pas être enfermés ou pire, être assassinés. Heureusement, certains d’entre eux, sang-purs comme sang-mêlés, s’étaient levés contre cette dictature, et, guidés par un jeune sorcier, avaient triomphé cette guerre.
Evidemment, cette histoire avait bouleversé les parents de Vanille. Le professeur McGonagall leur avait assuré que les risques étaient aujourd’hui révolus, et que la communauté sorcière avait besoin de retrouver confiance en ses membres. Ils ne devaient pas se replier sur eux-même, et les nés-moldus étaient de nouveaux les bienvenus parmi eux. Mais malgré tout cela, ses parents avaient peur.
Mais Vanille était une sorcière, c’était indéniable. Ses parents lui apprirent que, selon le professeur McGonagall, refuser à sa magie de s’exprimer pouvait comporter de gros risques. Il fallait qu’elle apprenne à la canaliser et à s’en servir, pour ne pas se laisser submerger par elle. Son père avait pris cette information pour une menace et s’en était indigné, avant de comprendre qu’il s’agissait d’un avertissement.
Ils n’avaient donc pas eu le choix. Leur dernier espoir de ne pas voir leur fille partir était qu’elle-même refuse. Et, bien évidemment, Vanille avait exprimé son souhait d’apprendre la magie.
Le premier jour, dans le train qui l’emmenait dans une nouvelle vie, une petite fille maigrelette aux cheveux frisés, avec deux yeux partant dans des directions opposées et à l’air terrorisé lui avait fait une blague maladroite sur son prénom après qu'elle se soit présentée. D'abord vexée, Vanille avait été sur le point de renvoyer une remarque cinglante et terriblement méchante sur le physique de la fillette, mais elle avait vu ses yeux s’humidifier de timidité, et exprimer une envie maladroite de faire connaissance avec ceux qui l'entouraient. Vanille avait rit et s'était liée d'amitié avec Leanne. Elles étaient restées ensemble toute l'année.
L’Ecole avait subit un changement majeur dans la répartition de ses élèves. Affligés par les événements de la guerre, les conseils de sorciers avaient mis en place une série de nouvelles lois (après avoir abrogé celles qui avaient été rédigées pendant la guerre) visant à mieux intégrer les sorciers sang-purs et sang-mêlés, et à diminuer les rivalités. C’était une tâche ardue et subtile, les moeurs étant ce qu’ils étaient, et même reconnaissant l’atrocité et l’absurdité de la guerre, certaines familles de sang-purs restaient très attachées à leur statut social prétendument supérieur.
Et donc, à Poudlard, une décision importante avait été prise : la répartition se ferait en début de deuxième année. C’était le professeur McGonagall qui avait appuyé cette requête, invoquant un souhait inavoué de feu professeur Dumbledore
La Gazette du Sorcier en avait fait un article, dans lequel McGonagall avait été interviewée :
“Le professeur Dumbledore a souvent exprimé son regret de voir les jeunes sorciers être répartis si tôt dans leurs études. Il disait que pour la plupart, ces jeunes découvraient pour la première fois un monde magique et une liberté relative, vis-à-vis de leurs parents. Malheureusement, beaucoup d’élèves ont été répartis selon leur ascendance, à onze ans, ils n’exprimaient que rarement une opinion divergente de celle de leur famille. Je soutiens entièrement cette décision de repousser la répartition, et ai déjà commencé à mettre en place une organisation différente avec l’aide des autres professeurs.
Bien évidemment, nous ne souhaitons pas supprimer tout esprit de compétition, qui peut être bénéfique dans le cadre des points, de la Coupe des Quatre Maisons et de la compétition de Quidditch. En revanche, nous souhaitons, et moi la première, voir disparaître ces querelles et inimitiés qui n’ont pas d’autre raison d’être que la différence de maison. Nous voudrions voir apparaître une entraide entre les élèves, quelle que soit leur maison, et ceci pourra être aidé par l’année commune que passeront les premières années non répartis.”
Cette décision n’avait pas été très bien accueillie par les sorciers et les sorcières, et durant les premières années, les parents et autres sorciers avait vivement protesté. Mais au bout de quelques années, les bénéfices de cette décision avaient été démontrés, les élèves nourrissaient bien moins de mésentente et d’antipathie les uns envers les autres. Evidemment, chaque élève était attaché à sa maison, mais s’étant tous côtoyés pendant un an, ils acceptaient plus facilement de se tendre la main mutuellement entre différentes maisons. Le Choixpeau, sans que l’on ne sache vraiment comment, avait compris l’intérêt de cette nouvelle façon de faire, et ne tenait plus compte de l’ascendance ni de la famille de l’élève. Parfois même, il semblait répartir à l’opposé du caractère : des ambitieux se retrouvaient à Poufsouffle, des loyaux à Serdaigle et des généreux à Serpentard. Les élèves se respectaient bien plus, même si cela pouvait être dû, évidemment, aux retombées de la guerre.
Mais malgré cela, encore aujourd’hui, des opposants à ce nouveau système se faisaient régulièrement connaître et entendre via la presse.
Et c’est donc en deuxième année que Vanille fut envoyée à Serdaigle. Elle avait pendant un an découvert avec émerveillement la magie et ses possibilités illimitées, et, bien que distraite en cours, elle travaillait studieusement le soir. C’était ce côté studieux et cette envie de connaître et comprendre que le Choixpeau avait lu en elle.
Son amie Leanne fut également envoyée à Serdaigle, pour leur grand plaisir.
Le premier soir dans leur nouveau dortoir, Vanille et Leanne avaient rencontré Ambre, une jeune fille silencieuse à la peau brune et yeux cheveux coupés au carré. Rarement encline à discuter, celle-ci participait parfois aux discussions et partageait son savoir lors de travaux en groupe. Ni Vanille ni Leanne ne la connaissaient vraiment, bien que toutes les premières années aient eu des cours ensemble à un moment ou à un autre. Mais le mutisme d’Ambre contrebalançait avec la loquacité de Leanne, et Vanille trouvait que les deux filles se complétaient parfaitement, ce que l’une pensait, l’autre le disait. Ce que l’une n’arrivait pas à exprimer, l’autre l’expliquait. Et au milieu, Vanille, à qui elles reprochaient de trop se prendre la tête, et de toujours être dans ses pensées.
Dans leur dortoir, il y avait également deux autres filles, avec qui elles ne s’entendaient pas spécialement bien.
Leanne lança un nouveau coup de coude dans les côtes de Vanille (plus par habitude que par reproche), qui sursauta. Elle avait manqué la moitié de la répartition.
- Miwenlead, Jean ! s'écriait la directrice Roy, le sourire aux oreilles.
La perspective de répartir les seconde année semblait la mettre en joie, comme tous les ans. Une fillette s'avança vers le Choixpeau, qui prit tout son temps pour réfléchir. Vanille se demanda comment toute la salle pouvait rester attentif à ce genre de cérémonie interminable. Après tout ils verraient bien les nouvelles têtes qui se répartiraient à leur table pendant toute l'année. Son regard se perdit une nouvelle fois dans les méandres des bougies, et elle partit une nouvelle fois dans ses rêveries.
Vanille entrait en cinquième année. Elle était certaine que pour ses professeurs, cela n'aurait qu'une seule signification : BUSEs. Ils la surchargeraient sûrement de travail, mais cette perspective ne l'effrayait pas. Même si en cours, l'attention de Vanille laissait à désirer, pendant les heures de révisions, au contraire, rien ne pouvait la faire sortir de ses cours. Elle s’était découvert une soif de rendre le meilleur d'elle-même, soif d'apprendre toutes les facettes possibles de la magie. Elle préférait néanmoins de loin découvrir toutes ces choses par elle-même, dans les livres de cours ou de la bibliothèque. Les professeurs ne lui tenaient plus rigueur de son manque d'attention en cours, puisqu'ils avaient compris au fil du temps que son travail personnel était plus appliqué que son attitude.
Vanille aimait la magie. Sous toutes ses formes, les potions, les enchantements, la métamorphose... Et même les créatures magiques, la divination et l'histoire de la magie. Elle avait très vite pris conscience de la chance qu'elle avait d'être née sorcière dans un monde de moldus. Comme tous les enfants dans son cas, elle avait été émerveillée par les possibilités qu'offrait sa nouvelle vie, et avait voulu en tirer le maximum, mais beaucoup d'entre eux s'étaient habitués à cet univers. Pas Vanille. Et même si le monde magique pouvait aussi traverser des crises et des guerres, les sorciers étaient dans de bien meilleures conditions que les moldus, elle essayait de toujours se souvenir de cela. Elle se considérait chanceuse. Après tout, personne dans sa famille n'était sorcier.
Vanille releva la tête pour compter les nouveaux restants. Tandis que son regard fouillait l'extrémité de la grande salle, elle se sentit soudain mal. Autour d'elle, six, sept visages la fixaient. Elle tenta de les ignorer, mais partout où elle regardait, une paire d’yeux était braquée sur elle.
Un coup de coude de Leanne la sortit de sa torpeur, et les regards disparurent.
- Tu as tout manqué, encore une fois !
Vanille balbutia, choquée. Elle essaya de mettre des mots sur ce qu'il s'était passé pour en parler avec Leanne, mais celle-ci avait commencé à manger en discutant autour d'elle.
Le reste de la soirée se déroula dans l'opulence et l'allégresse commune à ces festins de débuts d'année, Leanne abreuvant son entourage de ses histoires de vacances, Ambre offrant son silence et son calme, et Vanille, pour ne rien changer, était plongée dans ses pensées, quand elle ne renversait pas de pichet d'eau ou de bol de sauce sur ses camarade par pure maladresse.
End Notes:
Eh bien eh bien. C'était long et fastueux non ?
Héhé. La suite sera un peu plus vivante, promis juré !
Merci d'avoir lu ! N'oubliez pas la review des familles qui fait toujours plaisir (même pour écrire "sympa" ou "fait gaffe à ceci-cela", ça fait toujours plaiz' maggle!)
Pluie de bisous. (Vous en aurez des pluies de ce genre avec moi.) A la prochaine !
Discrétion demandée by Deanna
Author's Notes:
Comme promis, il se passe un peu plus de choses dans ce chapitre. Tout ça se met doucement en place !
Bonne lecture
Vanille reprit ses habitudes bien vite dans les quartiers de la maison Serdaigle. Au bout de quelques jours seulement, elle se remit à perdre des plumes et des parchemins entre deux cours, et elle passait déjà des fins de journées à rédiger des devoirs.
Ses professeurs lui firent chacun leur discours de rentrée, certains s'attardant sur Vanille lorsque venait le conseil d'être attentif au cours. N'y croyant que peu, ils avaient haussé les épaules devant son acquiescement vigoureux. Seul le professeur Greenhat, qui enseignait la Défense Contre les Forces du Mal, insista longuement en s’adressant particulièrement à elle, ce qui fut une expérience déplaisante et embarrassante.
Les couloirs de Poudlard, maintes fois visités au cours de ses dernières années, n'avaient plus de mystère pour la jeune fille qui les traversait nonchalamment pour arriver à ses cours suivants. Son évasion habituelle lui fit rentrer plusieurs fois dans les élèves qui se trouvaient sur sa route. Son corps avait acquis des réflexes de ramassage de sacs qu'elle faisait tomber alors que son esprit restait au loin.
Un jour, dans la deuxième semaine de la rentrée, absorbée dans ses pensées (de cours... ou tout autre sujet bien moins sérieux), elle se dirigeait vers son cours accompagnée de sa classe quand elle se heurta contre quelqu'un plus violemment qu'à l'habitude.
Elle allait s'excuser négligemment et passer à autre chose, mais en levant les yeux, elle reconnu la personne qu'elle avait bousculé. Le jeune homme, grand, à la peau noire d'ébène et aux yeux sombres, faisait partie des personnes qui l'avaient fixée le jour de la rentrée. Pourtant, aucun de ces regards ne lui était restés en tête, mais là, elle fut certaine qu’il en faisait partie. Il s’était arrêté et la fixait.
Elle resta un instant sans voix et figée devant son air réprobateur. Son regard glacial, sévère, la gelait. Il semblait vouloir la faire disparaître, ou même exploser sur place. Elle le regarda, perdue, les yeux levés vers lui.
- Ne t’avise plus de me heurter.
Il avait dit cela d’une voix particulièrement lente et grave, comme s'il voulait que chacun de ses mots s’imprègnent en elle. Elle frissonna. Sans réfléchir, elle hocha lentement la tête. Il la contourna pour partir, prenant soin de ne pas même la frôler.
Vanille resta un instant interdite, puis réalisa qu’il n’y avait plus personne dans le couloir.
Elle se précipita dans sa salle.
- Il te voulait quoi ?
Leanne lui avait gardé la place près de la fenêtre. Vanille haussa les épaules. Elle n'en savait rien. La plupart des élèves qu'elle bousculait l'ignoraient, peut-être par habitude. A force, tout le monde savait ignorer Vanille. Pourquoi celui-là avait-il si mal réagit ?
Elle y pensait encore lorsque, le soir venu, Leanne et Vanille virent qu'une note sur le panneau d'affichage de leur salle commune les attendait.
“Aux élèves de cinquième année.”
(Le mot cinquième était écrit si gros qu’il devait attirer tous les regards.)
“Une réunion obligatoire se déroulera ce vendredi, à 18h, dans la salle des sortilège numéro quatre, couloir Est, second étage.
Discrétion demandée.”
- Discrétion ? se demanda Vanille tout haut tandis que certains de ses camarades la rejoignaient. Pourquoi être discret quand on nous demande publiquement de venir à une réunion ?
- Regarde les autres années, murmura alors Leanne.
Autour d'eux, les élèves des années précédentes regardaient le regroupent autour du panneau d'affichage, l'air étonné. Il passaient à côté d’eux sans même jeter de regard au panneau.
- On dirait qu'ils ne voient pas le feuille. Elle est peut-être enchantée, pour que nous soyons les seuls à la voir.
La curiosité de Vanille s'accentua d'un cran. Une réunion secrète, certainement pas organisée par les professeurs, au vu de l'aspect non officiel du papier écrit à la plume. Les jours suivant allaient être un calvaire d'attente.
Pendant les trois jours qui les séparaient de la mystérieuse réunion, les cinquième année semblèrent avoir complètement oublié la dernière partie du papier. Partout où elle croisait des cinquième année, de sa maison ou des autres, elle n'entendait parler que de ça. En revanche, dans les autres année, personne n’y faisait référence.
Elle-même ne voyait pas l'intérêt d'en discuter autant, vu le peu d'information dont ils disposaient, ce qui ne l'empêchait pas d'y penser.
Toujours retournée par l’agressivité du garçon qui l’avait bousculé, Vanille tenta de se concentrer lorsqu’elle se déplaçait, pour ne plus heurter qui que ce soit. Cette tentative fut un échec, comme toutes les fois où elle avait tenté de se concentrer en cours, et bien vite, elle bouscula encore des épaules sur son chemin.
Vanille ne pouvait s’empêcher de revoir ce regard glacial qu’il lui avait lancé. C’était la première fois qu’elle s’était sentie rabaissée ainsi, avec quelques mots et un coup d’oeil, il avait réussi à la déstabiliser. Elle était persuadée que, au mieux les autres élèves l’aimaient bien, au pire ils l’ignoraient, et les autres ne la connaissaient pas.
Et puis, elle se souvenait de ces yeux noirs, c’était ceux qui l’avait observée le soir du festin, lorsqu’elle avait ressenti ce trouble. Cette idée la rendait mal à l’aise.
Il arriva plusieurs fois à Vanille, pendant les jours qui suivirent, de recroiser ce garçon.
Un soir, dans la grande salle, il était assis presque face à elle sur la table d’en face. Il lui jeta un regard dédaigneux quand il s’aperçut qu’elle le regardait, et Vanille n’avait pu s’empêcher de le fixer plus ou moins discrètement pendant tout le repas. Elle demanda à Leanne ce qu’elle en pensait, mais bien qu’ayant repéré de qui il s’agissait, elle ne remarqua rien de spécial. Elle demanda à Ambre son avis, qui ne se priva pas :
- Je suis certaine que c’est dans ta tête. Ou alors, il te plaît, et tu inventes des histoires avec lui inconsciemment.
Vanille rougit et nia en bloc en secouant la tête.
Et ainsi jusqu’au vendredi. Heureusement, les cours et la perspective de la mystérieuse réunion réussirent en partie à lui faire penser à autre chose qu’à cet énergumène à qui son cerveau accordait bien trop d’importance.
Le vendredi soir, la classe de Vanille quitta son dernier cours et se dirigea ensemble vers la fameuse salle numéro quatre. Ils furent rapidement rejoints par les cinquième année de Poufsouffle, Serpentard et Gryffondor.
En attendant que les organisateurs se montrent, les élèves faisaient part de leurs théories sur le sujet de la réunion (Leanne avait été particulièrement productive en la matière et avait élaboré pas moins de sept hypothèses, qu’elle présentait à qui voulait l’écouter). Ils n’en avaient que peu d’information (la note écrite à la main, le fait que ce soit obligatoire) et personne ne semblait avoir réussit à trouver quelqu’un pour les informer un peu plus.
- Vous pensez à quoi vous ? demanda Olivier, un des amis Serdaigle de Vanille. Nous on penche sur un test surprise pour faire des prédictions sur les BUSE.
- Ou une présentation clandestine de métiers non-officiels, ajouta Octave, son camarade de chambre.
- Aucune idée, s’amusa Vanille, ou alors peut-être une réprimande générale sur une première semaine catastrophique ?
Olivier pâlit.
- Tu crois ? J’ai raté mes premiers devoir de métamorphose…
Vanille s’apprêtait à le rassurer quand elle remarqua qu’Ambre, qui était jusque là adossée au mur l’air indifférente, s’était soudainement redressée, et semblait alerte et attentive, regardant derrière la foule.
Celle-ci s’écartait pour laisser passer trois élèves, qui semblaient plus âgés qu’eux.
Le premier était assez petit et blond, et avait une clé en argent dans la main. Derrière lui, une grande rousse à la démarche légère le suivait, et, fermant la marche, le garçon à la peau sombre et au regard froid.
Vanille n’en cru pas ses yeux : c’était lui qui était derrière cette réunion ? Mais qui était-il à la fin ? Pourquoi continuait-il à apparaître autour d’elle et semblait-il toujours vouloir la faire disparaître en retour ? Encore une fois, elle essaya de l’ignorer, mais quand il passa près d’elle pour passer la porte que le blond avait ouverte, elle leva les yeux et vit un rictus qui ressemblait presque à de la haine.
Encore une fois, elle chercha Leanne du regard pour s’assurer qu’enfin elle aurait vu la même chose qu’elle, mais celle-ci haussa les épaules ; si elle avait bien reconnu le garçon, elle n’avait rien remarqué de spécial. Vanille soupira, se dit, finalement, qu’elle se faisait peut-être des idées. Elle se laissa emporter par la foule qui se pressait pour entrer. Elle ne savait pas à quoi s'attendre. Mais une chose était sûre, cette réunion ne serait pas une partie de plaisir.
End Notes:
Qui est donc ce garçon ? Que va nous révéler cette fameuse réunion ? (Je vous spoile si je vous rappelle le titre de cette fic?)
Alors il y a eu un peu d'action non ?
Une petite review pour me dire ce que vous en avez pensé ?
Pluie de magie sur vous ! Merci d'avoir lu !
Author's Notes:
Voici la suite du Club des Créateurs ! Ayant du temps, de la motivation et beaucoup de chapitres d'avance, je vais en publier plusieurs aujourd'hui.
Bonne lecture :)
La pièce ne contenait que des chaises, tournées face à une petite estrade devant le tableau. Vanille en visa une en plein milieu de la salle, pour se noyer dans la foule, et s’y rendit en observant devant elle. Sur l’estrade se tenaient debout et alignés une dizaine d’élèves, tous immobiles et observateurs.
Le blond, au milieu, se tenait droit comme un chef, le menton relevé. Il avait une mâchoire carrée, un visage doux et, malgré sa taille, sa prestance était frappante. Les mains jointes derrière son dos, sa posture annonçait qu’il dominerait la réunion.
La grande rousse se tenait juste à sa droite, sa baguette à la main, souriante. Elle avait un nez fin, des tâches de rousseur, et dépassait aisément en taille le blond. Elle dévisageait chacun des élèves qui s’installaient, comme si elle essayait de tous les garder en mémoire. Ses yeux passaient régulièrement d’un élève à un autre, imperturbables. Elle était placée assez près du chef pour que l’on puisse deviner une certaine proximité entre les deux, leurs coudes se touchaient presque.
Encore à droite, deux filles presque identiques, aux cheveux noirs tirant sur le bleu fusillaient du regard ceux qui n’étaient pas encore assis. Elles faisaient penser à deux soeurs siamoises, tant leurs mouvements se suivaient, leurs yeux s’arrêtaient sur les mêmes personnes, et les expressions qui défilaient sur leurs visages étaient identiques. Vanille leur trouva un air mauvais.
Derrière elles se tenait le garçon à la peau noire et aux yeux froids. Il regardait droit devant lui, les bras croisés, sans chercher à rencontrer le regard de quiconque, ce qui rassura Vanille. Elle ne savait toujours pas qui il était, et pourquoi il l’avait ainsi autant croisée et perturbée ces derniers jours, et espérait pouvoir le découvrir aujourd’hui. Mais malgré tout ça, elle n’arrivait pas à s’empêcher de lui trouver un attrait indescriptible. Cette fascination la troublait, plus encore à ce moment précis, où elle allait enfin savoir qui il était. Pourquoi était-il si attirant ? Exerçait-il sur elle un quelconque sortilège ? Elle frissonna à cette pensée. Puis, elle se demanda si, tout simplement, Ambre n’avait pas mis le doigt sur quelque chose. Son cerveau devait inventer toute sortes de scénarios pour se cacher d’une attirance banale. Se rendant compte qu’elle le fixait, encore une fois, elle détourna le regard et se concentra sur les autres.
A gauche du chef, une fille avec une queue de cheval trop haute et des lunettes bleues écrivait sur un parchemin qui se tenait magiquement droit et solide devant elle. De temps en temps, elle relevait les yeux vers le groupe d’élève qui commençait enfin à s’asseoir.
Un garçon, derrière elle, aux épaules larges et à la carrure de brute, lisait avec intérêt ce qui était écrit sur le parchemin.
Encore à gauche, un garçon et une fille, qui ne pouvaient être qu’en couple au vu de leurs mains serrées, discutait en riant. Le garçon avait des boucles claires et des cils interminables, et la fille portait un serre-tête orné de fleurs et des boucles d’oreilles en plume. Les regards complices qu’ils se lançaient laissaient paraître leur évidente affection.
Et tout à gauche, un garçon qui rappelait vaguement quelque chose à Vanille soutint son regard.
Elle sursauta.
Prise d’un étrange et soudain sentiment de flagrant délit, elle détourna les yeux, essayant de se souvenir d’où elle connaissait ce garçon. Il avait l’air plus jeune que les autres, était brun avec des mèches qui tombaient sur les côtés de la tête. Vanille osa le regarder à nouveau, et vit qu’il était pâle et cerné, et qu’il arborait un sourire rieur sans la lâcher du regard. Regard qu’ils échangèrent, pendant plusieurs secondes, lui amusé, elle incertaine.
Les bavardages et installations ayant laissé place à un silence poli et curieux, le chef s’avança au devant de l’estrade, coupant court aux réflexions de Vanille, qui lui porta son attention.
- Bonsoir à tous, merci de votre présence ici ce soir. Je m'appelle Jules Wincher, septième année, Serpentard.
Il balaya de la main le groupe qui se tenait derrière lui.
- Nous sommes ici pour vous présenter un Club.
Un murmure s’éleva dans les rangs, une réunion pour présenter un club, ce n’était pas courant. Toutes les associations étaient plus ou moins connues et faisaient l’objet d’un affichage au début de l’année pour les inscriptions, pas de réunions de présentation énigmatiques.
- Il s’agit d’un club créé il y a presque cent-cinquante ans, poursuivi-t-il d’une voix lente et mystérieuse, qui réunit cinq des plus grandes écoles de sorcellerie du monde - Poudlard, Beauxbâtons, Durmstrang, Mahoutokoro et l’Institut des Sorcières de Salem. Ce Club existe dans chacune de ces écoles, indépendamment. Il a traversé et survécu à plusieurs guerres, a compris dans ses membres les plus grands sorciers de notre ère, et travaille en collaboration avec le ministère de la magie, plus précisément avec le Département des Mystères.
Il laissa un temps, balayant du regard l’ensemble des élèves. Son visage reflétait toute sa fierté d’être dans ce club. Fierté teintée de suffisance, semblait-t-il à Vanille.
- Un club secret, dont toute personne n’en faisant pas partie ne peut en connaître l’existence.
Une deuxième vague de murmure monta. La rousse eut un petit geste de baguette qui attira l’attention de Vanille, et elle vit la serrure de la porte se refermer. Etonnée et passablement inquiète, elle lança un coup de coude à Leanne, qui l’ignora, absorbée par ce qui se disait.
- Aussi il m’est imposé, ce que je comprends et respecte, de vous prévenir maintenant, continua le chef. Avant de vous expliquer ce en quoi consiste ce club, vous devez savoir que nous tenons à ce qu’il garde sa discrétion. Aussi, et en toute légalité, je vous demanderai de signer ce papier.
Il inclina la tête vers la fille aux lunettes bleues qui, la plume relevée, semblait satisfaite de son parchemin.
- Signer un papier pour nous retrouver recouverts de boutons ? s’éleva une voix grincheuse derrière Vanille. Merci, on connaît le truc !
En effet, l’histoire du club secret de Harry Potter continuait à faire parler de lui à Poudlard.
- Ce papier vous enchantera, en effet, répondit honnêtement le chef, pour que lorsque vous parlerez du club entre vous, aucune personne n’ayant pas participé à cette réunion ne puisse vous comprendre. Il n'entendra qu'un charabia.
- Mais si on décide de ne pas faire partie de votre Club, après cette réunion nous le connaîtrons bien, osa une petite voix du fond de la salle.
La fille à la gauche du chef, celle aux lunettes et au parchemin, s’avança.
- Je suis Oreste, septième année, Serdaigle. Je suis secrétaire du club et chargée des relations avec le Ministère de la Magie. Il sera exercé sur vous, dans le cas où vous ne voudriez pas entrer dans le club, un sortilège d’Oubliette très contrôlé et en présence d’un agent du ministère de la magie.
Un grondement mécontent s’éleva dans la salle.
- Ce sortilège vous sera appliqué avec votre pleine conscience, par un Oubliator expert, qui s’assurera de votre parfait état de santé mentale après le sort, assura-t-elle d’une voix forte pour recouvrir les protestations. Seuls cette réunion et vos discussions entre vous à ce propos seront effacées. Une fois le sortilège appliqué, nous vous dirons qu’un groupe secret dont vous ne voulez pas faire partie tient à rester secret. Aussi, ce sortilège nous permet de nous assurer que dans le cas où vous écririez à notre sujet, vous ne pourriez pas relire vos notes après l’Oubliette.
- Avez-vous un document officiel nous prouvant que ce vous faites est légal ? s’exclama Olivier, le camarade de Serdaigle de Vanille.
Le fille aux lunettes - Oreste - se pencha sur son sac et en sorti un rouleau de parchemin.
- Vous êtes invités à consulter ce document à la fin de la réunion.
Le silence se fit. Vanille était partagée entre le sentiment frustrant d’avoir été piégée, et une envie irrésistible de savoir en quoi consistait ce Club. Pour la première fois en quatre ans, son attention était à son maximum. Ou du moins, bien plus haute que d'habitude.
- Nous savons que ces informations peuvent être difficiles à accepter, poursuivit Jules, le chef. Aussi, je vous invite à une réflexion : si le ministère lui-même, depuis plus de cent ans, envoie un Oubliator au sein de notre club, c’est qu’il s’agit là d’un intérêt qui le concerne et qui peut vous dépasser. Si vous ne faites pas partie de ce club, vous n’avez pas à en connaître l’existence.
La tournure fit tiquer Vanille. Ce club était donc d’intérêt public, assez important pour que le ministère lui-même en régule les informations. Et il s’autorisait même à mépriser les droits fondamentaux les plus basiques des sorciers, en leur imposant un sort, non seulement sans leur demander leur avis, mais en l’ignorant lorsqu’il était émis. Vanille trouva le terme parfait qui les définissait à cet instant : l’arrogance.
Que se passait-il dans ce club pour avoir autant de pouvoir et d’autorité ?
Le parchemin passait de main en main, sous le regard d’Oreste, la fille aux lunettes bleues, qui le suivait. Quand tout le monde eut signé, l’attention fut reportée sur le chef, mais celui-ci s’était écarté. Un des garçons du club, celui aux épaules larges qui lisait le parchemin au début, avait brandit sa baguette sur le tableau noir, et sur celui-ci apparut un tracé qui prenait toute la hauteur du tableau.
C’était un blason, au fond violet et bordé de noir, sur lequel étaient croisées deux baguettes, au-dessus d’un chaudron. Sous ce chaudron, un feu animé illuminait la salle, faisant à Vanille se rendre compte que la lumière des chandeliers de la pièce s’était atténuée.
Au-dessus du dessin était écrit : “Club des Créateurs”.
Les membres du Club, alignés et synchrones, détachèrent leur capes d'un unique geste et dévoilèrent chacun une cravate aux rayures obliques, violettes et noires, et l’écusson épinglé sur le torse.
Les murmures s’étaient tus, laissant place à l’admiration de la mise en scène. Peu épatée, Vanille ne put s'empêcher de rouler les yeux en remarquant les expressions de ses amies : Leanne était ébahie, à en voir son regard obnubilé et sa bouche entrouverte, et Ambre n'avait jamais eu l'air si concentrée, les lèvres pincées, les sourcils presque froncés. Vanille reporta son attention sur la présentation.
- Nous sommes membres du Club des Créateurs, annonça le chef. Il réunit des étudiants de cinquième, sixième et septième année inventant, créant des sortilèges et des potions. Notre passion commune pour la magie nous a réunit pour pouvoir l’étudier en finesse et en détail, nous améliorons des sorts et potions existants, nous poussons nos recherches dans des domaines encore méconnus, et repoussons certaines limites de la magie.
- Nos recherches sont validées et encouragées par le ministère, poursuivit Oreste, qui semblait avoir ce sujet à coeur, qui nous surveille également pour ne pas nous voir nous pencher vers des domaines dangereux et interdits. Aussi, lorsque nous créons quelque chose d’utilité publique, le ministère nous rachète les droits, nous recevons en échange un fond d’argent permettant au Club de vivre, et le droit de poursuivre les recherches.
Ils laissèrent sa place à la rousse, qui s’éclaircit la gorge :
- Je suis Morgane, septième année, Serpentard.
Elle dégageait la même prestance que le chef, qui la regardait en coin, un air indescriptible figeant son visage. Il sembla à Vanille qu'il remuait faiblement les lèvres quand elle parlait. Ils avaient certainement répété leur texte plusieurs fois.
- Le Club des Créateur est présidé par le Maître Créateur.
Elle se pencha vers le chef.
- Il est élu par les autres membres de septième année, les Grands Créateurs (la rousse qui parlait, le chef, la fille aux lunettes bleues et le garçon qui se trouvait derrière elle s'avancèrent), et ceux de sixième année, les Jeunes Créateurs (s'avancèrent à leur tour les deux jumelles diaboliques, le couple et le garçon à la peau sombre qui jeta un oeil à Vanille, ce qui la fit frissonner). Les membres de cinquième année sont les Novices.
Elle se tut et évalua l’assemblée. Tout le monde suivait avec attention ce qui se disait.
- Le directeur ou la directrice de l’Ecole, poursuivit-t-elle, possède les pleins pouvoir en ce qui concerne les admissions et les thématiques de recherches de Club, mais il ne se réserve ce droit qu’en cas extrême. En d’autres termes, il ou elle a le droit de radier un membre ou d’interdire des recherches qui ne lui semblent pas appropriées. En dehors de cela, le Club est géré entièrement en interne.
Le chef reprit la parole :
- Si votre magie est puissante, que vous aimez comprendre et découvrir, si vous aimeriez pousser vos connaissances dans un domaine au-delà de ce que disent les livre, songez à ce Club. Il existe des branches de la magie encore inexplorées à ce jour. Vous pouvez vous concentrer sur de la pratique, ou sur de la recherche. Le Club possède sa propre bibliothèque, très fournie, et il arrive que des entrevues avec des sorciers du Département des Mystères soient organisées.
Justement, Oreste, s’avança :
- Pour pouvoir prétendre à une admission au Club des Créateurs, il y a plusieurs conditions à respecter.
Elle tendit sa baguette vers le tableau où une liste s’inscrivit à côté du blason en même temps qu’elle parlait :
- Vous devez faire votre demande avant le 31 Octobre, sur papier. Vos professeurs doivent nous assurer que vous êtes sérieux, attentifs (Vanille déglutit), et avez de bonnes notes, voire excellentes. Nous vous réservons un entretien, et enfin choisirons qui accédera au Club. Evidemment, pour pouvoir y rester en sixième année, vous devez avoir toutes vos BUSEs, donc aucune notes sous Acceptable, avec deux Optimals en Potion et en Sortilèges.
Certains élèves eurent l’air choqués.
- Il est possible de déroger à cette règle. Si votre projet ne nécessite pas d'avoir de connaissance en Histoire de la Magie ou Divination, par exemple, il n'est pas obligatoire d'avoir ces BUSEs. Evidemment, rien ne vous empêche d'étudier la Divination au Club des Créateurs.
La Poufsouffle assise devant Vanille secoua ses longs cheveux l’air satisfait.
- Aussi, sachez que nous n’avons ni d’affectif minimum, ni maximum. Si aucun d’entre vous ne peut accéder à ce Club, nous ne vous accepterons pas pour remplir nos effectifs.
Un nouvelle fois, la tournure de la phrase fit tiquer Vanille.
“Et si personne ne VEUT accéder à votre Club ? Peut-être que ça n’intéresse personne de faire partie du Club des Crâneurs.” pensa-t-elle. L’arrogance qui se dégageait était de plus en plus palpable. Malgré ça, elle commençait à éprouver une forte envie de découvrir en détail ce sur quoi travaillait le Club. Des branches de la magie encore inexplorées ? C’était le genre d’idée qui la motivaient à étudier aussi durement.
Le chef reprit sa place, devant des autres. Il regarda l’assemblée d’un air satisfait.
- Avez-vous des questions ?
Leanne leva la main.
- Pouvons-nous accéder au Club sans avoir trouvé de thème sur lequel travailler ?
- Les Novices ne travaillent pas en autonomie sur leurs propres thèmes, répondit la rousse. Ils assistent les Jeunes et Grands Créateurs dans les leurs, cela permet d’apprendre la démarche expérimentale et d’aider dans les recherches. Un peu comme un rôle d’assistant. Mais rien ne vous empêche de réfléchir à ce sur quoi vous voulez travailler et à commencer à vous documenter pendant ce temps.
- Et pouvons-nous savoir sur quoi vous travaillez actuellement ? poursuivit Leanne.
- Non.
Le chef avait prononcé ce non d’un ton sans appel. Tout le monde comprit qu’il faudrait faire partie du Club pour savoir.
- Par rapport à l'entretien, demanda un Serpentard quand il fut désigné, est-ce qu’on aura des indications sur sa nature quand on aura posé notre candidature ? Ça sera un test, ou plus une entrevue pour analyser notre personnalité ?
- Vous pouvez juste savoir maintenant, dit la rousse après que Jules lui ait fait un signe de la tête, que ce ne seront pas des tests sur votre niveau de magie, vos connaissances ou vos capacités, il nous suffit pour cela d’avoir accès à vos notes.
Une Gryffondor leva la main :
- Et si on change d’avis après coup ?
Jules fronça les sourcils.
- Nous vous conseillons de bien réfléchir avant de poser votre candidature. Si vous hésitez, ne le faites pas. Unz fois intégrés dans le Club, vous le faire oublier sera plus difficile, il y aura beaucoup plus de souvenirs à passer sous le sortilège d’Oubliettes.
Personne d’autre n’eut de question, et ceci signa la fin de la réunion. Le chef leur demanda encore une fois de faire preuve de discrétion, et les pria de ne pas les aborder en groupe à chaque fois qu’ils croiseraient un membre du Club.. Ils désignèrent Oreste comme réceptrice des courriers, que ce soit les questions ou les demande d’adhésion.
Les élèves se levèrent alors pour partir. En passant devant l’estrade, Vanille observa l’écusson sur le torse de Jules, le chef, d’un peu plus près : des étoiles jaillissaient des deux baguettes croisées, et des gouttes de potion s’échappaient du chaudron.
Le blason des Créateurs est identique pour tous les Clubs des cinq écoles, lui dit Jules. Il a été créé par une étudiante de l'Institut des Sorcières de Salem.
Ambre, qui s’était arrêtée à côté de Vanille pour écouter Jules, s’étonna :
- Vous portez les cravates et l’écusson du Club en permanence ? Je suppose qu’ils sont invisibles pour les non-membres.
- Effectivement, sourit Jules.
Il lança un regard appuyé à Vanille, sans que celle-ci ne puisse comprendre pourquoi. Gênée, elle se tourna vers la porte et fit face au garçon qu'elle avait voulu éviter, celui qui l’avait troublée.
Elle essaya de le contourner, mais n’y arriva pas, doublée de chaque côté par les élèves qui sortaient. Elle essaya de faire demi-tour, mais fut encore bloquée, et tenta de s'infiltrer dans la file des élèves qui partaient, elle se prit les pied... dans ses propres pieds, et tomba sur les fesses.
« Je suis ridicule. »
Elle se sentit alors être soulevée par les épaules et remise debout. Elle osa alors lever les yeux et croiser le regard de celui qui l'avait aidée. Le regard de ce garçon qui lui avait dit de ne plus s'aviser de le heurter. Celui-ci avait perdu toute sa froideur des derniers jours. Sans préambule, dès qu’il fut certain d’avoir son attention, il lui dit :
- N’oublie pas de poser ta candidature. On ne voudrait pas manquer quelqu’un comme toi.
Son ton était clairement méprisant, tinté de sarcasme. Il lui tourna le dos. Complètement interloquée, Vanille ne répondit rien et sortit rejoindre les autres.
En chemin, elle se répéta dans sa tête ce qu’elle aurait pu lui répondre : “Non mais pour qui tu te prends?” “Qu’est-ce que tu sais de moi?” “Pourquoi je voudrais faire partie d’un Club de prétentieux?” “Pourquoi tu me lances des regards assassins et après tu me rabaisse ?” Frustrée de la lenteur de sa répartie, se dit que oui, elle voudrait peut-être faire partie du Club.
Si seulement ils avaient moins l’air de se prendre pour les réincarnations de Merlin lui-même.
End Notes:
Merci d'avoir lu :)
Mais de qui parles-tu ? by Deanna
Author's Notes:
Alors, qu'avez-vous pensé du Club ? N'oubliez pas de postuler sinon, un sortilège d'Oubliette et hop ! Vous ne vous souviendrez plus de rien ! Pas facile pour suivre l'histoire ^^
Bonne lecture !
Pendant le repas qui suivit la réunion , les discussions ne manquèrent pas de parler du Club, sans aucune discrétion malgré les demandes du chef. Vanille se dit qu’effectivement, pour garder leur existence secrète, ils faisaient bien de prendre des précautions.
- C’est inadmissible, nous faire subir ces sortilèges, alors qu’on n’a rien demandé à personne ! s’énervait Olivier.
- Le sortilège d’Oubliettes n’est pas un sortilège anodin. Toucher au cerveau peut avoir des conséquences graves. J’ai entendu parler d’un sorcier qui a finit à Sainte-Mangouste après avoir raté son sortilège qui s’est retourné contre lui, renchérit une fille du dortoir de Vanille.
- Si l’Oubliator refuse de retirer beaucoup de souvenirs d’un coup, c’est bien la preuve que c’est dangereux...
Les autres exprimèrent leur mécontentement et la discussion tourna autour des raisons de rejoindre ou non le Club. Vanille les écouta. Pour la plupart, ils n’étaient pas intéressés par un club de magie qui leur semblait être plus un club de devoir supplémentaire, tant le niveau demandé pour y accéder était haut. Ils en étaient d’autant plus énervés d’avoir dû signer ce parchemin.
Certains furent plus hésitants, comme Leanne, qui n’avait pas été spécialement rebutée par le coup du parchemin mais doutait de ses capacités à obtenir des Optimals à ses BUSE en potion et sortilège. Ambre, d’habitude discrète, fit quant à elle part de son enthousiasme.
- Non mais imaginez ! Créer de la magie ! Inventer des sorts ou des potions, ça peut être très utile et même sauver des vies.
Tous les autres hochèrent la tête, utile oui, mais la plupart semblaient se dire que d’autres s’en chargeraient mieux qu’eux.
Le sujet du Club des Créateur revint régulièrement dans les jours qui suivirent. Curieusement, plus le temps passait, moins Vanille ressentait l’excitation de pouvoir appartenir à un club de création de magie. La perspective de découvrir les limites et les possibilités de la magie avait toujours été un sujet passionnant pour elle, depuis qu’elle avait appris qu’elle était une sorcière. Elle était poussée par une envie de connaissance, et malgré son problème d’inattention en cours, plus les années passaient et plus ce qu’elle apprenait l’enthousiasmait.
Malgré cela, un sentiment étrange la parcourait régulièrement, comme si au fond d’elle-même, elle savait qu’elle devrait oublier ce Club, ne pas chercher à en savoir plus, ou pire, à en faire partie. Cette sensation incommodante ne trouvait pas d’explication logique. Peut-être était-ce les membres, qui ne lui avaient pas inspiré confiance, ou bien le fait que cela pouvait nuire à ses BUSEs que de se concentrer sur autre chose… Elle ne savait pas.
Les semaines passèrent, pendant lesquelles Vanille changeait constamment d’avis. L’exaltante perspective de faire partie d’un Club de création l’emballait régulièrement. Vers la mi-octobre, un soir où elle travaillait en groupe dans la salle commune, pendant une énième discussion à propos du Club, Octave souleva un point qui revenait souvent dans ses réflexions :
- Vous n’avez pas trouvé que le Club semblait vraiment… Prétentieux?
Tandis que les autres hochaient les épaules, Vanille s’exclama :
- Oui, je suis entièrement d’accord !
Elle se souvenait de l’impression désagréable qu’ils lui avaient donnée.
- “Si vous ne faites pas partie du Club, vous n’avez pas à en connaître l’existence” imita-t-elle. “Si vous ne pouvez accéder à ce Club on ne vous acceptera pas par manque de membre.” Comme si on avait forcément tous envie d’en faire partie.
- Parce que toi, tu ne veux pas ? demande Leanne.
- Je n’en sais rien encore.
- Arrête ! A chaque fois qu’on en parle tu pars dans ta tête comme si tu essayais de te convaincre d’y aller, ça se lit sur ton visage. Je ne vois même pas pourquoi tu n’as pas encore envoyé ta demande.
- Ce qui n’a plutôt marqué, reprit Octave tandis que Vanille réfléchissait aux têtes qu’elle faisait, c’est le fait qu’ils mettent vraiment en avant leur appartenance à un grand Club, ça donne vraiment l’impression que c’est leur argument principal : le prestige. Ils se donnent à eux-même une importance immense, qui est floue quand on sait que le club est SECRET, et ça leur donne une pseudo-autorité sur tout le monde… Moi ça m’énerve. Se donner à soi-même une importance, il y a des fois où ça me fait presque penser aux théories sang-pur.
- Mais si tout ce qu’ils disent est vrai, ils la méritent peut-être cette autorité, souligna Leanne.
- Ce n’est pas parce que tu as une autorité, justifiée ou non, que tu dois t’en prévaloir pour dominer ceux qui ne sont pas comme toi, affirma sagement Ambre.
Tous replongèrent dans la sombre année qui avait précédé leur entrée à Poudlard. L’année du règne de Voldemort restait profondément ancrée dans leurs mémoires, malgré leur jeune âge.
Les discussions allèrent et vinrent au fil des réflexions de chacun. Les jours passèrent, avec toujours plus de devoirs et des cours de plus en plus difficiles. Le niveau exigé par les BUSEs était incroyablement haut. Vanille se surprenait même à écouter attentivement en cours pour ne pas avoir à comprendre par elle-même plus tard de quoi il s’agissait.
C’était la fin du mois d’octobre, le pluie tombait sans relâche depuis des jours, et le festin d’Halloween arrivait à grand pas. C’était aussi, et Vanille s’efforçait de pas pas y penser, l’approche de la date limite d’inscription au Club des Créateurs.
Elle était encore concentrée sur le sujet du cours qui venait de se finir quand, en sortant de la salle, elle pensa à quelque chose qu’elle avait oublié.
- Il y a un des membres qui ne s’est pas avancé, pendant la réunion. Je me demande en quelle année il était, fit-elle en regardant Leanne et Ambre.
Elles la fixèrent , déconcertées, en continuant à avancer.
- Mais si, pendant la réunion du Club des Créateurs. Vous vous souvenez, ils ont présenté tous les membres mais pas celui qui était tout à gauche, un brun à l’air jeune.
- Il n’y avait pas de brun, fit prudemment Leanne, les sourcils froncés. Pas dont je me souvienne.
Vanille regarda Ambre, qui secoua négativement la tête.
- Si, je suis certaine de l’avoir vu, il souriait en nous regardant.
- Peut-être as-tu vu un des élèves pendant l’installation qui faisait le malin ? Un élève de notre année, puisqu’il avait l’air jeune.
Vanille réfléchit.
- Non, il était là quand on est entrés dans la salle.
- Et après ? Pendant la présentation ?
- Je le sais plus, hésita Vanille en se concentrant.
- S’ils avaient oublié de le présenter, on l’aurait remarqué, ils n’étaient pas si nombreux.
- Oui, peut-être...
Vanille n’arrivait pas à se rappeler de l’avoir vu après le début de la réunion, quand ils avaient échangé un regard.
Ayant un temps libre et bien trop de devoir à faire, elles décidèrent de se rendre à la bibliothèque.
Après une heure studieuse, Vanille se déconcentra. Son devoir commençait à l’agacer. Pour se changer les idées, elle se leva et parcouru les rayons de livres à la recherche d’un ouvrage capable de la distraire un moment. En retournant à leur table, elle remarqua que la table en face d’elle était occupée : le garçon du Club, le brun aux yeux cernés était assis et étudiait.
Rassurée de ne pas l’avoir inventé, elle se rassit et posa son livre devant elle, assez relevé pour qu’il cache sa bouche. Elle fixait le garçon et pris une inspiration pour le désigner discrètement à Leanne et Ambre quand il releva la tête et plongea ses yeux dans les siens.
Vanille se figea. Lentement, il fit non de la tête, sans la lâcher du regard. Puis, il retourna à son parchemin.
Vanille retenait son souffle. Comment avait-il pu déceler qu’elle allait parler de lui ? Pourquoi avait-il ainsi hoché la tête, pour la faire taire ? Comment avait-il fait pour lever les yeux exactement au moment où elle comptait parler ? Une coïncidence ? Comment…
- Van ?
Leanne la regardait, étonnée.
- Est-ce que ça va ?
- Oui oui, murmura-t-elle. Ca va, j’ai… trouvé un livre sympa.
Elle vit Leanne, suspicieuse, en lire le titre : Métamorphose et Temporalité Chapitre 1 : Faire durer un sort.
Vanille eu un gloussement incontrôlé (et ridicule), ce qui acheva de déconcerter Leanne, et fit semblant de lire son livre pour cacher sa gêne.
Du coin de l’oeil, elle vit le garçon tenter vainement de retenir un rictus moqueur.
Décidément, ce Club commençait à vraiment lui courir sur le haricot. Déjà, le sortilège d’Oubliettes obligatoire qu’elle allait sûrement subir contre son gré. Ensuite, ce club aux membres si prétentieux alors qu’ils pourraient attirer bien plus de monde en restant humble. Et puis, ce garçon à la peau noire et au regard glacial qui avait commencé par la fusiller du regard pour ensuite lui dire de rentrer dans le Club comme si de rien n’était, juste pour se moquer d’elle, et qui continuait encore aujourd’hui à revenir régulièrement dans ses pensées, irrémédiablement. Et puis cet autre garçon moqueur qui apparaissait et disparaissait au gré du vent, sans que personne ne semble l’apercevoir en dehors de Vanille. Et qui avait réussit à la dissuader de parler de lui sans qu’elle ne comprenne comment. Rien de l’obligeait à obéir. Et pourtant, elle s’était tu.
Grommelante, Vanille se rendit à son dernier cours de la journée. Elle tenta vainement de se concentrer, retrouvant à son grand désarroi ses vieilles habitudes. Le professeur McGonagall se montra déçue face à sa déconcentration, elle avait sans doute commencé à avoir un certain espoir pour l’attention de Vanille.
A la fin du cours en sortant de la salle, elle se retrouva soudainement nez à nez avec le garçon brun. Il ne la vit pas, ou peut-être l’ignora-t-il, et passa derrière elle rapidement. Elle fonça sur Leanne pour s’agripper à elle et chercha Ambre des yeux, elle n’était pas là, tant pis, elle se retourna vers là où était parti le garçon et avança rapidement dans cette direction, sans lâcher Leanne qui protestait.
- Lâche-moi, je peux avancer seule !
- Je voudrais te montrer… commença Vanille.
Mais elle l’avait perdu. Il n’y avait pourtant pas grand monde dans ce couloir, et le prochain croisement était trop loin pour qu’il l’ait déjà dépassé. Elle fouilla du regard l’autre côté du couloir, la foule se dissipait, mais pas de trace du garçon brun. Les élèves qui étaient sortis des autres salles de cours étaient sans doute des premières ou deuxième année, ils les aurait dépassée d’une tête au moins.
- C’était lui, celui que vous n’avez pas vu pendant la réunion !
- Encore cette histoire !
Vanille, il n’y avait personne de plus que ceux qu’on nous a présentés, affirma Ambre qui les avait rejointes.
- Je vous dit que si, affirma Vanille, furieuse. Il était même à la bibliothèque tout à l’heure.
- Ah ? Pourquoi tu ne nous l’as pas montré à ce moment-là ?
- Il...
Vanille hésita. Elle se sentait bête de n’avoir rien dit, d’avoir fait ce qu’il semblait vouloir.
- Il avait l’air de vouloir être tranquille et ne pas être dérangé...
Les deux autres se regardèrent, interloquées.
- Tu es étrange en ce moment, Vanille.
Celle-ci ne répondit rien.
Oui elle était étrange, étrange et agacée d’être dérangée ainsi dans ses actes et ses pensées. Ce qui aurait dû être le début d’une année studieuse, difficile mais passionnante, s’était avérée être surprenante et prise de tête.
Elle en venait à espérer être enfin tranquille quand l’Oubliator lui ferait oublier ce fichu Club.
End Notes:
Merci d'avoir lu jusqu'ici au moins !
Est-ce que ça plaît au moins à certains ? :p
Pluie de bisous sur vous !
Author's Notes:
Allez hop, un nouveau chapitre.
Et merci à mes premiers reviewers !
Edito : Chapitre modifié , originellement en deux parties, rien d'important n'a été ajouté. Quelques phrases, tournures, fautes d'orthographes ont aussi été changées.
Les événements du début d’année avaient fait oublier à Vanille d’envoyer des nouvelles à sa famille. Etant Moldus, ils n’avaient pas de moyen de la contacter directement (et avaient refusé l’idée de Vanille de s’acheter une chouette). Ils attendaient toujours une lettre de Vanille pour pouvoir lui donner de leurs nouvelles et lui envoyer des cadeaux.
D'un certain côté, cela lui permettait aussi de recevoir des lettres seulement quand elle le voulait.
Se disant qu’il était temps, elle se dirigea vers la volière, une chouette du soir arriverait au petit-déjeuné.
Elle s’installa sur un des bancs devant la porte de la volière et sorti parchemin et plume. Elle hésita et décida d’écrire à ses parents que tout allait bien. Après tout, ils ne pourraient pas comprendre son écriture si elle parlait du Club, à cause du sort. Elle rédigea donc une lettre rassurante à ses parents, et une seconde, un peu plus véridique et détaillée, à son frère. Autant elle voulait que ses parents ne s’inquiètent pas trop pour elle, autant elle répugnait mentir à son frère. Ils se soutenaient beaucoup l’un l’autre, ayant été très proches avant le départ de Vanille pour Poudlard, et cette séparation les avait beaucoup touchés. Son frère savait tout de sa vie à Poudlard, et connaissait même la théorie de beaucoup de sortilèges, et elle suivait avec attention tout ce qui se passait dans le monde moldu, les modes, la politique, internet, la culture.
Elle se sentait déçue d’avoir aujourd’hui un sujet qu’elle ne pourrait partager avec lui. C’est avec une certaine rancoeur qu’elle ferma les lettres et alla les remettre à sa chouette. Puis, elle la regarda s’envoler au loin.
Elle ressortit de la volière en essuyant la larme qui venait de tomber sur sa joue. Elle s’apprêtait à partir quand elle s’aperçut que quelqu’un était assis sur un des bancs du couloir.
Elle aurait sans doute continué son chemin s’il ne s’agissait pas du fameux garçon brun aux cernes et à la peau blanche.
Elle le fixa un instant, complètement malpolie. Il était maigre, ses cheveux tombaient tristement sur le côté de sa tête, et il n’était pas vraiment beau.
Le garçon ne l’avait pas remarquée. Il avait posé ses coudes sur ses genoux, et semblait profondément plongé dans ses réflexions. Saisissant l’opportunité, et usant de son culot qui passait souvent pour de l’assurance, alors qu’il s’agissait seulement de cacher une timidité banale, elle s’approcha de lui et s’assit sur le banc. Avant qu’elle n’aie pu trouver quoi dire, le garçon parla :
- Salut Vanille.
Wow! Elle sursauta, d’une part parce qu’il n’avait pas levé les yeux vers elle, et ensuite parce qu’elle était persuadée de ne pas connaître ce garçon.
Comment connaissait-il son nom ?
- Comment connais-tu mon nom ?
Après tout, pourquoi formuler différemment ce qui se passe dans notre tête.
- C’est une école, pas un repère d’agents secrets.
Un point pour lui.
- Mais moi je ne te connais pas.
- Je suis peut-être un agent secret, alors.
Vanille resta bouche bée.
- Tu n’aimes pas l’humour ? C’est dommage. Je m’appelle Nathan.
- Et tu fais partie du Club des Créateurs, alors ?
Il soupira.
- Oui, j’en suis membre.
Le ton qu’il avait prit dégageait une pointe de déception. Vanille se demanda pourquoi, mais sa curiosité avait besoin d’être épanchée.
- Pourquoi ne t’ont-ils pas présenté ?
- Parce que je n’en avais pas envie.
- Pourquoi ?
- Je préfère garder ma discrétion.
- Pourquoi ?
- Parce que je préfère être tranquille.
- Oh.
Ce ne furent pas des réponses très satisfaisantes. Vanille changea d’angle d’attaque :
- Comment ça se fait que mes amies ne t’aient pas remarqué ?
- Je te l’ai dit, j’aime garder une certaine discrétion.
- D’accord, mais comment tu as fait pour qu’elles ne te remarquent pas ?
- Personne ne me remarque vraiment.
- Pourquoi ?
- Parce que je préfère.
Vanille comprenait très bien qu'il jouait avec ses réponses.
- Est-ce que tu es un fantôme ?
Cette fois, la remarque fit réagir Nathan, qui releva la tête vers elle et explosa dans un rire joyeux. Loin d’être frustrée, car ce n’était pas un rire méprisant, Vanille se prit au jeu et pouffa.
- D’accord, c’était une question idiote.
- Tu en as d’autres ?
Ce n’était pas une remarque lassée ni même ennuyée ; le ton qu’il avait employé laissait entendre que les questionnements de Vanille étaient les bienvenues. Même, qu’il les attendait.
- Pourquoi moi je te vois, mais pas les autres ?
Ils me voient, mais ne me remarquent pas. Comme quand tu vois un plat que tu n’aimes pas dans un buffet. Tu l’ignores, mais tu le vois, et à la fin tu l’as oublié.
Quel étrange garçon, qui se compare à un mauvais dessert.
- Mais tu ne m’as pas tant remarqué que ça. Tu ne t’es rendu compte de ma présence que depuis la réunion. Mais avant, j’étais pour toi comme pour tous les autres, inexistant.
- Oui mais je ne fais pas attention à tous les élèves de l’école, encore moins ceux des années supérieures. C’est normal.
- C’est là que tu te trompes. Je suis en cinquième année, à Serdaigle.
Vanille resta sans voix. Elle dévisagea son interlocuteur, qui gardait un air très sérieux.
- Non, tu n’es pas...
Elle se concentra, essaya de visualiser les élèves de sa classe. Elle pouvait évidemment tous les nommer.
Alors, Nathan, se tourna vers elle et la regarda dans les yeux pour la première fois, des yeux tristes et cernés. Ils avaient quelque chose… Quelque chose de captivant. Vanille n’arrivait pas à se détacher de son regard. Quand il cligna des yeux, elle se rappela.
Au fond de la classe, non loin de là où Vanille s’asseyait, un jeune homme silencieux rédigeait ses exercices. Le professeur Slughorn passant devant une potion parfaitement réalisée, félicitant son préparateur, mais sans en faire profiter la classe, malgré ses habitudes. Le professeur Flitwick rendant des copies, glissant un mot à chaque élèves, sauf à un en particulier… Il avait été là, toutes ces années, caché aux yeux, où plutôt à la conscience de tous, mais bien là. Elle s’en souvenait.
- Comment tu as fait ça?
Il haussa les épaules.
- Je l’ai fait, c’est tout.
- C’est un genre de… manipulation mentale ? Tu exerces ça sur tout le monde ?
Elle se leva, furieuse.
- Tu me fais peur.
- Il n’y a pas de quoi, sourit-il, ce n’est rien de dangereux, c’est juste… moi.
Il avait gardé son sourire mais sa voix était devenue triste en prononçant ces derniers mots.
- Tu n’as pas vraiment répondu à ma question. Pourquoi moi j’ai pu te voir, à la réunion ?
- C’est à mon tour de te poser des questions, l’ignora-t-il.
- Mais…
- Comptes-tu t’inscrire au Club des Créateurs ?
Vanille se rassit sur le banc. Elle réfléchit un instant.
- Je ne sais pas. Je ne pense pas, puisque votre chef, Jules, a dit que si on hésitait, il valait mieux s’abstenir.
- Il a dit ça pour décourager ceux qui ne sont pas vraiment motivés. Et ceux qui n’ont pas de magie particulièrement puissante. Il ne veut que de grands sorciers sans son club.
- Qu’est-ce qui te fait dire que j’ai une magie puissante ? demanda Vanille en fronçant les sourcils.
- Rappelle-toi que je suis avec toi en cours depuis la première année. Je sais les notes que tu as eues, et puis…
- La plupart des notes ne sont pas énoncées à haute voix. Et tout le monde sait que je n’écoute rien en classe. Je ne vois pas comment quelqu’un à qui je n’ai jamais parlé peut savoir quoi que ce soit sur moi et mes capacités magiques. Quand on fait des essais en cours, je rate tout le temps.
Nathan resta silencieux.
- Qu'est-ce qui te fais dire que je suis si douée ?
- Je le sais, c’est tout.
- Ca a à voir avec ta manipulation mentale de tout à l’heure ?
Vanille sentait une pointe d’agacement, mais ce fut Nathan qui prit les devants :
- Ecoute, je ne répondrai pas à ces questions-là. Sache juste que je sais que tu es faite pour ce Club. Peut-être même que ce club est fait pour toi. C’est tout, c’est comme ça, tu verras bien. Inscrit-toi.
Et il se leva, fourra ses mains dans ses poches et lui tourna la dos.
- Oh ! Pour qui tu te prends ? Tu n’as pas le droit de me dire des choses comme ça pour ensuite me laisser en plan !
Elle se leva, et marcha derrière lui tandis qu’il tentait de s’éloigner.
- Si tu es en genre de voyant, c’est tout dit-le, il n’y a pas de honte. Par contre si tu fouilles volontairement dans mon cerveau, là ça ne va pas !
Elle s’arrêta, voyant qu’elle n’aurait plus de réponse. Lorsqu’il fut éloigné de quelques mètres, elle s’écria :
- Ta magie bizarre ne te donne pas tous les droit!
Crétin.
Bougonnant, elle alla récupérer son sac resté sur le banc, près de la volière. Elle resta un moment immobile, indécise, près de la porte. Elle se laissa le temps de réfléchir, toujours en colère, et…
- Oh et puis merde !
Elle extirpa un parchemin et une plume de son sac pour rédiger une lettre - sa demande d’inscription.
- Quoi ? Il va y avoir un bal pour Halloween ?
- Atterrit, Van, la directrice Roy en a parlé plusieurs fois déjà. Elle dit qu’elle voudrait qu’on renoue avec les vieille traditions. Enfin, je pense qu’elle veut surtout organiser une fête.
L’expression ne faisait vraiment pas sérieux, mais elle reflétait bien la personnalité de la directrice.
- Mais ça va se passer comment ?
- T’es fatigante, quand tu t’y mets Van, soupira Ambre.
Allongée dans l’herbe, elle fit léviter un caillou avec sa baguette.
Les cinquième année de Serdaigle avaient eu exceptionnellement un après-midi de libre, et Ambre, Leanne et Vanille profitaient du pâle rayon de soleil d’automne. Elles n’avaient pas eu de nouveau devoir, et avaient fini ceux de la semaine. Comme à leur habitude, les trois filles ne perdaient pas de temps pour les rédiger.
La pluie avait cessé, et le parc était, pour la dernière fois de l’année sûrement, foisonnant d’élèves. Les trois filles s’étaient assises près du lac, Vanille avait fait sécher l’herbe environnante pour pouvoir s’y allonger.
Ambre s’exerçait à quelques sortilèges sur son caillou, et Leanne écrivait dans son journal qu’elle traînait partout.
Vanille, quant à elle, se demanda encore une fois ce qu’elle pourait bien faire de sa vie avec une capacité d’attention si faible.
- Bon, pardon de n’avoir encore rien écouté. Vous m’expliquez ?
Leanne jeta un regard à Ambre qui haussa les épaules, l’air de dire “débrouille-toi”.
- Alors, fit Leanne en se redressant, ce qu’on sait, c’est qu’il y aura un petit festin, un gros repas quoi, en début de soirée. Ensuite, les tables seront bougées, il y aura une piste de danse, un groupe de musique, et un buffet.
- J’imagine qu’il faut bien s’habiller.
- Cela n’a pas été précisé, mais oui, c’est mieux..
Vanille songea à ses quelques robes, qu’elle pourrait sans problème métamorphoser pour une soirée.
- Il faut venir accompagné ?
Ambre leva subitement la tête.
- Ca n’a pas été mentionné… hésita Leanne. Et personne n’a l’air d’avoir de cavalier de prévu.
Vanille était moyennement emballée par ce bal. Déjà, parce qu’elle l’apprenait à l’instant (“Merci, cerveau débile.”), et ensuite parce qu’elle ne connaissait pas de danse sorcière.
- On dansera des danses typiques sorcières ?
- Non, tu sais ça sera juste un petit bal. Un gros repas où on pourra danser, si tu préfères. Rien à voir avec ce qu’on peut voir à d’autres occasions à Poudlard, précisa Leanne.
- Quelles occasions ?
- Mes parents m’ont raconté qu’il y a quelques années, il y a eu un grand tournoi magique à Poudlard. C’était quand Harry Potter y était. Il y avait eu un grand bal de Noël, très organisé avec des danses en groupe, les garçons devaient inviter les filles et on ne pouvait y aller qu’à partir de la quatrième année.
Vanille savait que Leanne était issue de sorciers. Elle connaissait le monde magique bien mieux que Ambre, qui était de sang-mêlé, et Vanille, qui l’avait découvert à ses onze ans.
Les parents de Leanne étaient de grands sorciers, reconnus dans la société. Sa mère était guérisseuse à Ste-Mangouste depuis des années, et elle avait pour ambition de remplacer le directeur de l’établissement quand il partirai. Son père était Directeur de Département au Ministère de la Magie, de quel département Vanille n'en savait rien, mais elle se doutait qu'il finirait par se présenter pour devenir Ministre de la Magie.
La famille Pepper était très aimée dans la communauté sorcière. Ils n’avaient qu’une fille, Leanne, et celle-ci semblait toujours en peine à vouloir satisfaire ses parents. Vanille avait toujours trouvé dérangeant le fait que son amie passe son temps à se rabaisser et à dire que ses parents ne seraient pas fiers d’elle. Elle avait été persuadée qu’ils avaient mis une pression énorme sur leur fille, jusqu’au jour où elle les avait rencontrés. Ses parents étaient adorables et attentionnés, et devant eux, Leanne se recroquevillait spontanément. Vanille avait réussit à lui faire avouer qu’elle ne se sentait pas à la hauteur de ses parents. Elle se trouvait un physique inaproprié, avec son oeil divergent et son léger boitement, par rapport à la grande et puissante guérisseuse qu’était sa mère, et au charismatique et élégant politicien qu’était son père. C’était pour cela qu’elle misait tout sur ses études, pour avoir une carrière digne de son ascendance.
- J’ai envoyé ma demande d’inscription pour le Club des Créateurs, annonça Leanne, satisfaite.
La coïncidence voulu qu’elle en parle au moment où Vanille y songeait. Leanne devait, inconsciemment sans doute, vouloir encore une fois faire partie des meilleurs, coûte que coûte. Vanille se demanda si son amie aurait vraiment voulu faire partie de ce club sans la pression imaginaire de ses parents.
Vous avez aussi postulé ? demanda alors Leanne en se tournant vers Ambre et Vanille, les yeux pleins d’espoir.
- Oui, sourit Vanille. J’ai envoyé ma lettre hier.
- Ca m’étonne de toi, avoua Ambre de sa voix tranquille. Bizarrement, j’avais commencé à penser que tu ne le ferais pas. Tu n’as plus fait de drôle de tête quand on se lançait sur le sujet depuis quelques semaines.
Encore cette analyse sur les expressions de son visage ! Etait-elle si prévisible ?
- Tu es un livre ouvert quand tu réfléchis. On dirait que chacune de tes réflexions est ponctuée par un mouvement de sourcil différent.
- C’est vrai, renchérit Leanne, tandis qu’Ambre l’imitait honteusement en bougeant ses sourcils, c’est pour ça que tu ne sais pas mentir. Quand tu essayes, ton regard dit “Allez, crois-moi, s’il te plaît!”
- C’est exactement ça !
Tandis que les deux filles pouffaient de rire, Vanille bougea ses sourcils. Elles avaient peut-être raison, ces mouvements lui semblèrent trop familiers. Mais ce n’était pas une raison de se moquer !
Elle fit tourner délicatement sa baguette entre le lac et elle en murmurant une formule, et les deux filles se retrouvèrent arosées de le tête aux pieds.
- Héhé, ça vous apprendra.
Les deux autres se vengèrent et elles bataillèrent de longues minutes.
- Qu’est-ce qui t’as fait changer d’avis, alors ? demande Leanne, une fois leur affrontement terminé (et gagné haut la main par Vanille qui les avait pris en traître avec un nouveau sortilège tiré d’un livre).
Vanille hésita. Elle ne voulait pas leur parler encore une fois de ce garçon qu’elles pensaient imaginé.
- J’ai envoyé une lettre à mon frère. Je n’ai pas aimé lui mentir, même par omission. Ca m’a poussé à m’inscrire, un peu sur un coup de tête. De toute façon, s’ils ne m’acceptent pas, je n’aurais plus à me poser de question.
- Oh, et comment il va ton frère ? demanda Ambre, subtilement.
Tellement subtilement que Vanille ne remarqua rien ; si elle avait levé les yeux vers son amie, elle aurait vu son teint rosir.
- Bien. Il a quitté le lycée où il était. Il va partir avec mon père.
Ambre et Leanne se regardèrent, attristées. Vanille avait pris une petite voix.
- Je ne serai qu’avec ma mère maintenant.
Ses deux amies constataient régulièrement depuis plusieurs années que sa famille manquait beaucoup à Vanille. Tout d’abord elles apprirent que son frère et elles étaient très proches, ce qui a rendu la séparation difficile. Puis, en troisième année, elle leur annonça que son frère avait décidé de partir en pension, parce qu’il ne supportait plus ses parents. Six mois plus tard, ceux-ci divorcèrent.
La nouvelle choqua grandement Leanne, qui n’était pas habituée à ce genre de moeurs, il n’y avait pas de divorce dans le monde des sorciers, un couple pouvait tout au plus décider de ne plus vivre ensemble, mais on n’officialisait jamais cela autant que chez les moldus.
Ambre et Leanne avaient très bien compris la détresse de Vanille, qui s’était sentie responsable de leur séparation, chacun des deux parents accusait l’autre d’avoir fait s’éloigner leur fille. Ceci en oubliant leur fils.
Mais Vanille continuait à n’envoyer que deux lettres, une au domicile familial, aux deux noms de ses parents, et une à son frère (qu’il recevait royalement directement dans sa chambre). Sa manière à elle de refuser et de s’excuser à la fois.
- Et toi, Ambre ? s’exclama presque Vanille, souhaitant changer de sujet. Tu as postulé ?
- Oui. J’ai envoyé ma demande deux jours après la réunion.
Les deux autres restèrent bouche bée.
- Tu étais sûre de toi à ce point ?
- Oui, j’étais très emballée pendant la réunion et je n’ai pas trouvé de raison d’hésiter. Alors j’ai préféré ne pas attendre.
- Tu penses que tu auras plus de chance d’être acceptée en ayant fait ta demande en première, c’est ça ?
Ambre rosit encore. Cette fois-ci, Vanille le remarqua, plutôt satisfaite d’avoir percé à jour ce que pensait Ambre, après avoir été démasquée, sourcilement parlant.
- De toute façon tu as toutes tes chances. La seule personne meilleure que toi, c’est moi, annonça Vanille, hautaine, le menton relevé.
Elle se prit une nouvelle giclée d’eau du lac, et la bataille reprit.
End Notes:
Merci d'avoir lu !
Plein de câlins en attendant la suite.
Soirée dansante by Deanna
Author's Notes:
Bonne lecture à tous :)
Edito : Chapitre modifié , originellement en deux parties, rien d'important n'a été ajouté. Quelques phrases, tournures, fautes d'orthographes ont aussi été changées.
Le 31 au soir, Vanille était prête pour le bal. Créer sa tenue de soirée fut relativement simple, ne visant pas le détail. Elle avait transformé une de ses robes de sorcière noire en robe plus longue et plus légère, avec un col doré et de courtes manches, avec une fine ceinture aussi dorée. La robe, toute classique, s’envolait autour de ses chevilles quand elle tournait. Elle espérait qu’elle ne fasse pas trop moldu.
Leanne avait reçu de ses parents une robe typique sorcière, bleue, avec les manches cuivrées. Vanille se moqua d’elle : “Tu veux réincarner Serdaigle ce soir ?”
Ambre avait profité d’une sortie à Pré-au-Lard pour se trouver une robe d’occasion, ocre et brillante. La couleur faisait magnifiquement ressortir ses yeux jaunes orangés. Vanille s’était toujours demandé s’il s’agissait d’yeux naturels. Venant du monde non-magique, rien ne l’aurait étonnée, et une métamorphose permanente pour changer la couleur des yeux non plus.
Mais quand elle avait rencontré son frère et sa soeur, deux jumeaux inséparables de deux ans de moins, le doute n’était plus permis. Sa soeur, Jade, avec des yeux d’un vert plus brillant et plus clair qu’un arbuste au printemps, et son frère, Kyan, les avait bleus azur, avec des reflets verts. Les trois frère et soeurs ne pouvaient se jalouser sur l’éclat de leurs yeux.
Elles se rendirent dans la salle commune où deux de leurs amis, Octave et Olivier, les rejoignèrent. Après quelques moqueries de circonstance (“Vous n’avez pas vu Vanille ? Elle a été remplacée par une moldue!” “On verra sur la piste de danse qui s’envolera le plus haut, avec une robe pareil”), ils se rendirent dans la Grande Salle.
Elle avait été parée de grande rideaux et de lustres muraux, les bougies flottantes avaient été remplacées par des Jack’O Lantern dispatchées sur les tables. Les professeurs s’étaient installés aux extrémités des tables des élèves, car le fond de la salle était caché d’un grand rideau, derrière lequel étaient sûrement rangés les instruments de musique.
Tous les élèves s’étaient mis sur leur trente-et-un, et Vanille fut soulagée de constater que beaucoup d’entre eux portaient également des robes non-traditionnelles sorcières, avec une pointe de mode moldue. Soulagée de ne pas faire tâche, Vanille prit son repas sereine.
Les discussions tournèrent beaucoup autour du Club des Créateur ce soir-là. Ce sujet exclu les autres élèves des autres années, et sur chacune des tables, il semblait y avoir une bande qui ne parlait qu’entre elle, les autres élèves ne pouvant les comprendre.
Ambre, Leanne, Vanille, Octave et Olivier avaient tous postulé. Les deux autres fille du dortoir, avec qui Vanille n’avait aucune affinité, et les autres garçons de cinquième année de Serdaigle, n’eurent pas envie d’expliquer pourquoi ils n’avaient pas voulu essayer. Alors, les cinq discutèrent entre eux et commencèrent à élaborer des théories sur l'entretien qu'ils auraient à passer. Ils énumérèrent ensuite les différents sujets de la magie qu’ils aimeraient avoir le droit d’approfondir.
A la fin du repas, une musique se fit entendre en fond sonore. Les têtes se tournèrent vers le fond de la salle, où le grand rideau était tombé à terre : un groupe de musique commença à jouer. Petit à petit, les élèves se levèrent, et les quatre grandes tables se séparèrent en plusieurs petites, qui se dispersèrent contre les mur. Les assiettes et les couverts furent remplacés par des plats de hors-d’oeuvre, petits gâteaux et confiseries, pour le reste de la soirée. Au centre de le salle apparut un petit cercle de bois, qui s'agrandit pour former un immense parquet de danse. Peu timides, car c’était selon les souhaits de la directrice une soirée sans formalités, des élèves et certains professeurs se mirent à danser.
Curieusement, tous dansaient en couple, ou du moins en duo. Il y avait deux ou trois élèves qui dansaient seuls, mais quand ils se rendirent compte de leur solitude, ils abandonnèrent et cherchèrent des cavaliers.
Vanille allait se retourner vers Leanne pour lui demander si aucune danse sorcière ne se faisait seul, quand elle s’aperçut que, dans la foule de danseurs, Ambre tournoyait avec un cavalier. Il s’agissait d’un des membres du Club des Créateurs, le blondinet qui avait semblé être en couple avec une des filles. Elle n’eut pas le temps de se demander comment cela se faisait, ni même de poser sa question à Leanne, car un jeune homme s’était posté devant elle, droit comme un I.
Vanille leva la tête, et vit ce beau garçon à la peau noire et aux yeux de glace, membre du Club.
Elle recula par réflexe, surprise, mais il tendit sa main vers elle. Elle le dévisagea.
- Voudrais-tu bien danser avec moi ?
« Quoi ? » Elle ne s'était vraiment, vraiment pas attendu à ça. Trop hébétée pour réfléchir, peut-être trop timide sur le moment pour refuser, elle accepta en lui tendant la main, sans rien dire. Sa main était calleuse, forte et froide. Elle détesta cette sensation sans la sienne. Mais, avec plus de douceur qu’elle n’aurait pu l’imaginer, il pressa sa main et l’attira contre elle, en l’emmenant sur le parquet de danse.
Elle ne connaissait même pas son nom.
Vanille ne ressentit aucune ambiguïté, aucune gêne à cette proximité soudaine. L’attitude du garçon était tout à fait protocolaire. Il la fit danser tranquillement, sans doute avait-il décelé le manque de talent de sa partenaire. Elle ne comprenait vraiment pas pourquoi il l’avait invitée à danser. Ce garçon avait des attitudes étranges. Elle avait tenté de ne pas penser à lui, cet dernières semaines, car elle avait été presque choquée de l’abondance de pensées le concernant, juste avant la réunion.
Elle tentait d’éviter son regard, pour cacher son trouble (alors qu’au contraire, cela le trahissait), mais lui l’ignorait complètement. Il regardait par dessus sa tête, ne souriait pas, il gardait sa mains (toujours sèches et froides) dans la sienne et l’autre posée dans son dos. Il ne chercha pas à se rapprocher. Il n’ouvrit pas la conversation, et la danse dura longtemps.
La musique changea et une autre commença, plus calme. Vanille tenta de se libérer poliment pour retourner au buffet, mais il la tint fermement. La lenteur de la musique lui permi de se serrer un peu plus à elle et d’approcher sa joue de la sienne. Vanille comprit soudain pourquoi ce manège : il voulait lui parler discrètement, sans être entendu, sans être remarqué. Au milieu de la foule, si on ne cherchait pas quelqu’un en particulier, on ne remarquerait pas deux élèves qui ne se connaissent pas discuter entre eux.
Elle sentit qu’il était sur le point de parler, et le devança :
- Fin stratagème. Pourquoi tant de secret ?
- J’ai une vie en dehors du Club, et je ne souhaite pas que tu en fasses partie.
Outch. Etrange façon de faire comprendre à Vanille qu’il voulait parler du Club, et donc rester discret par principe. Maladroit, voire même méchant.
- Nous avons reçu ta lettre de candidature, récita-t-il d’une vois monotone, et tu es acceptée pour passer l'entretien.
Vanille ne répondit rien. Elle ignorait qu’il y avait une pré-sélection. Ils continuèrent un instant à tourner sans un mot.
- Pourquoi as-tu mis autant de temps à faire ta demande ?
- Qu’est-ce que ça change ? Si je suis acceptée.
Il le regarda, un peu étonné de son ton froid.
- Je suis curieux, c’est tout. Ce n’est pas un test.
- J’ai hésité, et votre chef a dit qu’on ne devait pas.
- Maître Créateur.
- C’est pareil.
- Non. C’est son titre.
- Il est à la tête du Club non ? C’est votre chef.
Il ne répondit que par un grognement à peine perceptible.
Ils tournoyèrent encore un moment, et Vanille se dit que c’était sûrement l’occasion de mettre quelques détails au clair.
- Je n’ai pas aimé la façon ton tu me toisais, au début de l’année.
Son cavalier fit un faux pas, et reprit le rythme presque immédiatement. Vanille se rendit compte qu’il souriait.
- Je n’étais même pas sûre que tu m’aies remarqué.
- C’est quoi ton problème ? Qu’est-ce que tu me voulais ?
Il mit un moment avant de répondre :
- Te marquer pour que la réunion de présentation du Club te marque encore plus.
- Et tu as fait ça avec toutes les cinquième année je suppose.
- Non. Juste avec toi.
Vanille ressentit la même frustration qu’avec Nathan.
- Je vais me répéter, mais c’est quoi ton problème ? Votre problème, avec Nathan, et même les autres au festin de rentrée ? Vous me voulez quoi ?
La chanson s’arrêta bien trop tôt et son cavalier prit un air ironiquement désolée, avant de relâcher sa main. Vanille ne comptait pas se laisser faire, et avant même que la suivante ne se lance, elle resserra la sienne et amorça un début de danse. Amusé, il la suivit. La musique suivante, plus vive, les sépara légèrement, et ils durent pour se comprendre complètement lire sur les lèvres l’un de l’autre, la discussion devenant de plus en plus privée.
Vanille le fixait, tentait de prendre un air irrité, et attendit qu’il parle. Il gardait son sourire narquois sans ouvrir la bouche, mais au bout de trois écrasements de pied totalement volontaires, il avoua :
- Selon nos… sources, tu as une magie relativement puissante, et tu aurais parfaitement ta place dans le Club.
- Quelles sont vos sources ? Comment voulez-vous mesurer la magie de quelqu’un ?
- Des sortilèges, entre autres. N’oublie pas que nous créons ce que nous voulons.
- Entre autre ?
- Il y a le petit médium aussi.
- Le petit médium ?
- Un membre du Club qui n’est là que parce qu’il voit des choses que nous ne voyons pas.
- Nathan ?
- Oui, je crois, Nathan.
Une question frappa soudainement Vanille : si Nathan était en cinquième année, quand et comment était-il entré dans le Club des Créateurs ?
- Comment l’avez-vous recruté ?
- Qui ça ?
- Nathan, fit-elle, exaspérée.
- Je n’en sais rien. Je n’étais pas encore membre.
Vanille resta songeuse. Si lui était en sixième année, et qu’il n’avait pas été recruté en même temps que lui, alors il était entré dans le Club en troisième année ?
- Et qu’est-ce qu’il vous a dit sur moi ?
Encore une fois, sur la bouche de son cavalier se dessina un sourire presque ironique tant il sonnait faux :
- Ca, tu vas devoir lui demander toi-même.
A ce moment précis, la musique s’arrêta.
Ils se lâchèrent instantanément. Ils s’écartèrent d’un pas, et se regardèrent. Ce garçon, dont elle ne connaissait pas le nom, avait l’air plus humain, maintenant qu’ils avaient discuté, et moins d’une statue de glace méprisante. En revanche, c’était un humain tout à fait détestable. Prétentieux, ça sûrement. Fier, oui, comme un paon. Et puis beau, aussi, malgré tout. Froid et distant, mais distingué et séduisant.
Il lui fit un immense sourire évocateur qui rappela à Vanille un point important : son visage était un livre ouvert.
Elle fut affreusement gênée, persuadée qu’il avait tout à fait comprit le fil de ses pensées, et s'enfuit d’une façon tout à fait ridicule, en courant à moitié.
Arrivée près du buffet, elle chercha du regard quelqu’un à rejoindre. Elle aperçut la chevelure carrée et noire d’Ambre, discuter avec le garçon du Club avec qui elle avait dansé, puis Leanne, virevolter au milieu de la piste avec… la rousse du Club ? Les deux filles dansaient ensemble joyeusement, un peu maladroitement mais toujours en rythme.
Ensuite, elle croisa le regard d’un jeune homme blond, au visage carré et doux. Le chef du Club. Il discutait avec le professeur Flitwick.
Ne sachant pas si elle devait le saluer ou l’ignorer, elle fit semblant de s’étouffer avec un mini-cake et se tourna vers le buffet pour boire un bien trop grand verre de jus de citrouille.
« Ridicule »
L’instant d’après, elle entendit sa voix derrière elle qui la fit sursauter :
- J’ai cru que vous n’arrêteriez jamais de danser, avec Alexandre.
Elle renversa la moitié de son verre sur sa robe. Galant, le chef sortit sa baguette magique pour la nettoyer.
- Heu…
- Jules.
- Oui pardon, Jules, fit-elle, honteuse d’avoir oublié son nom. Eh bien… ça va ?
Il paru amusé de la voir aussi timide.
- Je vais bien. Alexandre t’a-t-il parlé de ton inscription ?
Alexandre Alexandre Alexandre. C’était son nom.
- Oui il m’a dit que vous aviez accepté que je passe les épreuves.
Elle s’approcha de lui et murmura :
- Il ne faudrait pas qu’on aille danser, pour être plus discrets ? On pourrait nous voir...
Jules éclata d’un grand rire :
- Il t’a invité à danser en utilisant pour prétexte de vouloir être discret ?
Vanille resta bouche bée.
- Mais… Si des élèves nous voient discuter alors qu’on est rien censé n’avoir en commun ?
- Il n’y a aucun risque que qui que ce soit se pose des questions… Tiens, regarde là-bas, fit-il en pointant du doigt deux personnes qui discutaient de l’autre côté de la scène, l’un a l’air d’être en première année, et l’autre en cinquième. Ils ne se ressemblent pas du tout, alors pourquoi discutent-ils ? Tu suspecterais qu’ils aient des projets secrets ou soient membres d’un Club mystérieux ?
- Non…
- Non, parce que tu t’en fiches. Les seuls qui les remarqueront seront leurs amis. Et pour ceux de nos amis qui nous remarquent, nous avons certains moyens de nous faire ignorer d’eux.
- Grâce à Nathan ? demanda soudainement Vanille.
- Oh, tu connais Nathan ?
- Oui, il m’a… convaincue de m’inscrire.
- C’est bien, sourit-il.
Vanille s’apprêta à lui poser des questions sur le sujet, mais Jules sembla comprendre avant même qu’elle n’ait commencé :
- Tu devras lui poser toi-même tes questions. En attendant, il y a dans ton sac une lettre qui t’expliquera comment se dérouleront nos tests. J’imagine qu’Alexandre ne t’en as pas parlé…
Elle hocha négativement la tête.
- J’aurais dû m’en douter. Il n’a fait que profiter de sa danse avec toi, fit-il avec un clin d’oeil.
Vanille se sentit rougir, et Jules lui adressa un vague signe de la main avant de partir.
Comment auraient-ils pu mettre une lettre dans son sac, qui se trouvait sans son dortoir ?
Au bout d’une demi-heure, quelques danses et trop de jus de citrouille, Vanille décida qu’il était temps pour elle de retourner dans sa salle commune. Elle ne s’amusait pas tant à cette soirée, et pensait beaucoup trop au contenu de cette lettre.
Elle partit sans réussir à trouver Ambre ou Leanne, mais arrivée chez les Serdaigles, elle repéra Ambre, assise sur un des fauteuil, seule. Elle tenait une enveloppe dans une main, et lisait un parchemin dans l’autre, l’air satisfait.
Quand elle aperçut Vanille, son expression changea. Son regard était plein de question, et sans dire un mot, Vanille hocha la tête et se précipita dans son dortoir.
Elle revint un instant plus tard, avec une large enveloppe où il était écrit “Vanille Ocean, maison des Serdaigle”. Elle s’installa près d’Ambre.
- On a été acceptées, lui sourit-elle.
- On n'a pas encore été acceptée, on a passé des pré-sélection qui n’étaient pas prévues, bougonna Vanille.
- Si, on savait qu’ils comptaient demander à nos professeurs nos niveaux dans chaque matière. Ils ne nous ont juste pas dit quand. Ils t’ont travaillée toi ?
- Comment ça ?
- Eh bien, Florent m’a posé plein de questions, sur moi, sur ma façon de voir les choses. C’est Morgane qui m’a ensuite posé ses questions, et à la fin, elle m’a dit que j’étais acceptée, et qu’une lettre m’attendrait sur mon lit.
Vanille s’étonna :
- Alexandre m’a dit directement que j’étais acceptée. C’est bizarre non ?
- Ah ? Mais tu as dansé longtemps avec lui, non ?
- J’essayais de le faire parler. Il ne voulait pas dire grand-chose.
- Sur le Club ?
- Non, sur...
Vanille hésita. A ce moment-là, la porte s’ouvrit pour laisser entrer Leanne, essoufflée.
- Bah alors ? fit-elle. Il est encore tôt, je vous ai cherchées mais vous étiez déjà montées, pourquoi ?
Les deux filles levèrent leurs enveloppes, souriantes.
- Qu’est-ce que c’est ?
Leanne s’approcha d’elles, curieuse. Vanille eut un mauvais pressentiment.
- C’est de la part de qui, ces lettres ?
- Heu… hésita Ambre.
- Du Club des Créateurs.
Vanille voulu être sûre, vite. Mais malheureusement…
- De quoi ?
- Le Club, Leanne. Le Club des Créateurs, pour lequel tu as postulé.
- Je ne comprends pas de quoi tu parles. Articule !
- Le Club, Leanne, ne me dit pas que tu ne comprends pas, le Club !
Elle s’était levée et s’apprêtait à la secouer.
- Mais arrête de parler comme ça, tu es bizarre ! Ambre, dit-lui d’arrêter !
- Vanille, c’est trop tard, elle a oublié. Le sortilège s’est appliqué sur elle.
Vanille regarda son amie, une boule se forma dans son ventre.
Pourquoi avaient-ils refusé Leanne ?
Vanille et Ambre réussirent à convaincre la qu’elles étaient fatiguées, et qu’elles ne comptaient pas retourner au bal. Cette dernière reparti, laissant les deux postulantes seules.
Vanille ne comprenait pas pourquoi le Club avait refusé une fille comme Leanne. Elle était pourtant brillante, et voulait vraiment faire partie du Club. Pour le coup, elle aurait plutôt pensé qu’elle-même n’aurait pas été acceptée, elle avait posé sa candidature deux jours avant la date limite, ce qui témoignait soit d’un manque de motivation, soit d’un oubli, ce qui était pire.
Elle regarda Ambre qui avait gardé les yeux fixés sur la porte de la salle commune après le départ de Leanne. Elle semblait aussi en proie à une profonde réflexion.
- Ca ne peut pas être par manque de place dans le Club, murmura-t-elle. Ils ont bien précisé n’avoir pas de limite de place, et tu as envoyé ta lettre bien après elle.
- Leanne a le même niveau scolaire que nous. Elle a des ambitions de carrière bien plus hautes. Elle en veut. Ce n’est pas juste.
La boule au ventre de Vanille s’était mue en une boule de colère.
Ambre l’avait remarqué :
- On ne peut rien y faire, si ce n’est leur demander.
- Oui, tu as raison, fit prestement Vanille en se levant. J’y vais.
- Attends, non. Ce n’est pas le bon moment. Tu es fâchée, et ils n’ont peut-être pas fini de prévenir tout le monde. Ils le prendront mal que tu débarques maintenant pour les engueuler de ne pas avoir accepté ta copine.
Le visage de Vanille s’éclaira :
- Alors c’est ça, ils ne l’ont pas encore prévenue !
- Van, Leanne a oublié l’existence du Club. Elle ne comprenait pas ce que tu disais. L'Oubliator est passé.
Vaincue, Vanille s’affala sur son fauteuil.
- Lit ta lettre, ça te changera les idées.
- Hm.
Elle leva à ses yeux cette enveloppe qu’elle avait été si enthousiaste d’obtenir quelques instants auparavant. L’idée de faire partie du Club faisait décidément faire des montagnes russes à ses émotions. Enthousiaste, démotivée, pressée, soulagée… Et maintenant dégoûtée. Elle aurait aimé faire partie de ce Club avec ses deux amies. Leanne méritait d’en faire partie.
Elle ouvrit l’enveloppe et en sortit la lettre.
“Vanille.
Nous avons étudié tes notes et questionné tes professeurs, et nous avons le plaisir de t’accepter en entretien oral pour faire partie du Club des Créateurs.
Tu as rendez-vous dimanche, quinze heures, dans la salle numéro numéro quatre du second étage, couloir Est.
Jules, Maître Créateur du Club des Créateurs de Poudlard.”
Vanille n’arrivait pas à se sentir emballée. Malgré tous les efforts du Club pour se faire passer pour LE Club, le prestige et l’importance incarnés, elle n’arrivait plus à penser autrement qu’à un Club qui avait sans raison repoussé son amie.
Et au fond d’elle, elle savait pourquoi, elle y avait pensé dès le début et n’avait pas de doute, et cela la rendait encore plus furieuse. Une boule de colère dansait dans son ventre alors que ses soupçons se faisaient de plus en plus grand. C'était une raison injuste. Grossière. Mais elle ne voyait que ça.
Le Club avait refusé Leanne dans ses rangs parce qu’elle était laide.
End Notes:
Merci de votre lecture
Author's Notes:
Bonne lecture !
Edito : Chapitre modifié , originellement en deux parties, rien d'important n'a été ajouté. Quelques phrases, tournures, fautes d'orthographes ont aussi été changées.
Le lendemain matin, Vanille se leva tôt. Elle ne voulait discuter ni avec Ambre, ni avec Leanne.
Elle descendit prendre son petit-déjeuner seule. Elle traînait des pieds et était d’une humeur bougonne. En la voyant, on aurait pu croire à une bonne gueule de bois. Dans la Grande Salle, réarangée après la soirée de la veille, il n’y avait presque personne, à cause de l’heure matinale et de celle du coucher de la plupart des élèves.
Elle fut surprise, après s’être installée, d’être rejointe par les deux garçons de son année à Serdaigle, Octave et Olivier.
- Matinale, dit-moi. Une raison particulière ?
- Serais-ce à cause d’un certain entretien magique qui aurait lieu demain ?
La remarque fit sourire Vanille, ce qui n’était pas évident vu son humeur.
- Vous n’êtes pas très subtiles. Et si je n’avais pas été acceptée ? Je n’aurais rien compris et vous auriez eu l’air bête.
- Toi tu aurais eu l’air bête ! s’écria Octave, en brandissant un toast, la bouche plein d’oeuf. Tu es meilleure que nous, et nous, on a été acceptés.
Vanille tiqua, elle regarda les deux autres en sentant sa colère remonter.
- Leanne a été refusée, annonça-t-elle de but en blanc.
Tous les deux stoppés dans leur mouvements, ils ouvrirent de grands yeux.
- Leanne ? Pourquoi ? Elle est au moins aussi douée que toi.
- Je ne sais pas, mentit-elle. Ils doivent avoir leur raison.
- Tu es sûre qu’elle a posé sa candidature ?
- Evidemment.
- Non parce que moi, j’avais oublié, avoua Olivier.
Vanille, surprise, eut un hoquet.
- Mais… Comment tu as fait alors ?
- Je me suis précipité sur Jules dès que je l’ai vu dans la grande salle. Il m’a dit qu’il y réfléchirai. Je l’ai vu discuter avec plusieurs professeurs pendant la soirée, et puis il est revenu me voir à la fin pour me dire que c’était bon.
En temps normal, Vanille aurait rejoint Octave dans le rire moqueur qu’il retenait avec peine. Mais là, cela lui penser à la façon dont son amie avait été injustement écartée.
- Alors dit-nous, à ton avis, quels… Hé !
Elle s’était levée précipitamment, en voyant sortir de la salle quelqu’un qui pouvait répondre à ses questions.
Arrivée dans le couloir, elle rattrapa cet élève qu’elle fit se retourner en touchant son épaule :
- Salut.
Nathan, ses yeux cernés et tristes et son teint pâle se retournèrent vers lui.
- Bonjour Vanille. Comment vas-tu ? Pas trop fatiguée de ta courte soirée ?
- Non je…
Il va encore me frustrer, se dit-elle.
- Je vais oublier le fait que tu saches que j’ai quitté la soirée tôt. Dis-moi…
- Je t’ai juste vue quitter la Grande Salle une heure seulement après la fin du repas. Tu n’es pas revenu après. Je n’ai rien fait de mal.
- Bien sûr, prend-moi pour une idiote, on était nombreux à cette soirée au cas où tu n’aurais pas remarqué. Tu aurais pu me rater. D’ailleurs, moi je ne t’ai pas vu.
Il fit une moue boudeuse.
- Je ne t’espionnais pas.
- J’espère. Déjà que tu peux savoir des choses avec ta tête, je ne sais même pas comment. Et puis, Alexandre m’a avoué que tu...
- Tu as beaucoup dansé avec Alexandre, la coupa-t-il, les sourcils froncés. Je ne l’aime pas trop.
Vanille fit les gros yeux, éberluée :
- Sérieusement ? Mais vous êtes tous dingues dans ce Club, ma parole. Ca y est, tu as gagné, je refuse de participer. D’abord l’autre qui me toise sans raison, toi qui lit dans ma tête puis qui me dit ça… Et vous faites même de la discrimination.
Elle tourna les talon en levant les mains :
- J’abandonne. Oubliez-moi. Dit à ton chef que je ne viendrai pas.
- Pourquoi tu penses que Leanne a été discriminée ? lança-t-il, avant qu’elle ne s’en aille.
Vanille, qui avait essayé de garder son calme jusqu’ici, sentit sa colère monter. Elle décida de ne pas la contenir :
- Parce qu’il n’y avait aucune raison, aucune! s’écria-t-elle en se retournant et postillonnant vers Nathan, que Leanne ne soit pas acceptée. Elle est aussi douée en magie qu’Ambre ou moi ou même que ces deux… Et elle a de l’ambition, elle vise Sainte-Mangouste ou même le ministère, et je suis sûre qu’elle y arrivera. Avec ou sans vous !
Elle avait tapé du pied en lâchant cette dernière phrase. Nathan, choqué par la colère soudaine de Vanille, n’avait pas bronché un mot, à peine avait-il eut une expression un peu étonné. Au vu du peu d’expressions faciales dont il semblait doté, c’était certainement une preuve de grand choc.
Avant qu’il n’ait pu répliquer, même s’il ne semblait pas vouloir le faire, Vanille était partie.
Elle savait qu’elle devait contrôler sa colère. Cela lui arrivait de temps en temps. D’ici quelques heures, elle le savait, elle regretterait de s’être emportée et se trouverait bête d’avoir crié sur Nathan. Bête d’être énervée pour un Club stupide qui prenait tout le monde de haut. Qui se vantait d’être le meilleur de tous, alors qu’au final personne ne se doutait de son existence.
Elle passa la journée à bougonner en travaillant. Ambre et Leanne la retrouvèrent dans la bibliothèque, mais elles n’osèrent pas lui parler. Elles connaissaient ses sautes d’humeurs, rares mais explosives. Sans doute se confierait-elle plus tard, se dirent ses amies, même si Ambre se doutait de la raison de son emportement.
Leanne était, évidemment, loin de se douter de ce qui se tramait. Elle semblait en forme, de bonne humeur, comme si rien de grave n’était arrivé. Elle essaya de détendre l’atmosphère toute la journée. Pour elle, il n’y avait aucune raison d’aller mal. Vanille ne pu s’empêcher de se dire qu’au moins, ayant oublié la totalité des informations concernant le Club, elle ne pouvait pas ressentir la déception d’y avoir été refusée.
Donc Vanille était déçue pour elle. Elle avait senti que ce Club lui tenait à coeur, lorsqu’elle avait anoncé qu’elle voulait en faire partie. Lui en refuser le souvenir n’était pas si bénéfique, elle n’aimait vraiment pas le principe : peut-être n’aurait-elle plus jamais l’idée de créer des choses, maintenant.
Le lendemain, Vanille ne se présenta pas à la fameuse salle numéro quatre. Elle resta à la bibliothèque avec Leanne, et Ambre les quitta vers quatorze heures, prétextant avoir quelqu’un à voir. Celle-ci ne lui avait pas reparlé de l’entretien. Elle avait sans doute compris que la colère de Vanille n’était pas redescendue. Vanille ne lui avait pas raconté son altercation avec Nathan, ni même ses réflexions sur l’attitude d’Alexandre, alors la seule raison qu’Ambre connaissait, c’était sa déception pour Leanne.
Vanille grattait son parchemin quand l’horloge sonna quinze heures. Elle s’efforçait de ne pas penser au test qu’elle manquait. Evidemment, au plus elle se forçait à ne pas y penser, au plus elle se déconcentrait sur son devoir. Agacée, elle décida de combattre le mal par le mal, elle posa sa plume et croisa les bras.
Pourquoi avait-elle eu envie d’être membre du Club des Créateur.
Déjà, la principale raison, la découverte de la magie, l’exploration des branches les moins connues - mais pas forcément les plus obscures, comme la magie noire, étaient des idées palpitantes. Les sorciers eux-même savaient peu de chose sur la magie. Ils savaient comment l’utiliser, comment créer des sorts. Mais on ne savait pas ce qu’était réellement la magie. Enfin, le Département des Mystères en savait sûrement plus que la plupart des sorciers. Mais pourquoi ne pas démocratiser cela. Beaucoup de questions venaient souvent dans son esprit : la magie a-t-elle des limites ? Après tout, les lois de Gamp ont été rédigées par lui-même, donc par un sorcier. Mais il existait d’autres formes de magies : les magies plus anciennes, les magies des autres cultures de sorcier dans le monde, et même la magie des autres créatures. Au delà des créatures dites “magiques”, il y avait celles qui savaient s’en servir, comme les gobelins ou les elfes. Ce Club lui aurait permis non seulement d’apprendre des choses qui n’étaient pas connues du grand public, mais également de les découvrir elle-même. Même en deux ans et demi, il y avait moyen d’approfondir un domaine particulier, et ensuite de continue sur sa lancée au Département des Mystère. Ou ailleurs encore si le ministère du Royaume-Uni sorcier était trop limité dans le domaine, rien ne l’empêchait de visiter les hautes autorités des autres pays.
Et pourquoi avait-elle refusé d’en être membre ?
Parce que certains membres du Club lui avaient paru prétentieux, hautains, fiers. Mais après tout, ce n’était pas seulement la fierté d’être membre du Club, comprit-elle. Après toutes ses réflexions, elle ne pouvait ignorer le fait que si elle-même avait découvert des choses incroyables sur la magie, elle aurait peut-être elle-même pris un air supérieur. Et leurs propres personnalités les poussaient à se comporter comme ça, sans que le Club n’entre forcément en compte. Et puis, tous n’avaient pas eu cet air supérieur. En fait, certains avaient juste l’air fiers sans prétention.
Parce qu’Alexandre l’avait énervée, et que Nathan semblait abuser de ses pouvoir, aussi étranges et inconnus pour elle soient-ils. Mais ce n’étaient que des altercations personnelles. Le Club en lui-même ne poussait pas ses membres à agir d’une certaine façon. Si elle était entrée dans le Club, elle et ses amis, peut-être l’ambiance générale aurait été différente. Et que savait-elle vraiment de l’ambiance de ce Club…
Et parce qu’ils avaient refusé Leanne. Son amie, qui travaillait en face d’elle sans remarquer son immobilisme étrange, méritait d’entrer dans ce Club. Les critères d’entrée étaient simples : être bons en magie, et vouloir en découvrir les mystères. Leanne les remplissait.
Vanille avait déjà vu Leanne subir des moqueries sur son physique. Ses yeux, trop petits et divergents, n’étaient pas agréables à regarder. Quand on la voyait se déplacer, on remarquait qu’elle boitait. Ses cheveux bouclés avaient surtout l’air emmêlés. Mais dès qu’elle avait eu treize ans, ses parents l’avaient jugée assez grande, et lui avaient expliqué que si elle le désirait, il pouvait exister des sortilèges permanents pour modifier - améliorer son aparence. Et Leanne avait refusé. Parce qu’avec Vanille, puis Ambre, Leanne avait réussi à s’accepter. On continuait à se moquer d’elle régulièrement, mais plutôt que de subir les moqueries, elle en avait rit avec eux. En grandissant, elle avait acquis une voix douce, un humour malicieux, et une répartie pleine d’auto-dérision. Il lui restait encore beaucoup de chemin, mais c’était acquis pour tous les cinquième année, et certains des années en dessous, que Leanne Pepper ne méritait pas d’être moquée.
Et Vanille n’arrivait pas à s’empêcher de penser que tous les membres du Club - à l’exeption de Nathan, mais il était lui-même une exception au Club - étaient beaux. Il y avait un manque de diversité flagrant au niveau de l’esthétique physique.
Dans ses réflexions, Vanille ne vit pas que Leanne avait relevé les yeux. Elle ne regardait pas Vanille, mais au-dessus d’elle, la bouche entrouverte. Elle lui donna un petit coup de pied discret, sans lâcher des yeux ce qu’elle fixait.
Vanille tourna la tête et sursauta. Quelqu’un était debout, juste derrière Vanille. Elle dû lever le tête pour reconnaître Jules, qui lui souriait.
- Je peux te parler ?
Vanille regarda l’heure : il était la demie.
- D’accord. Je te rejoins dehors.
Il sortit de la bibliothèque en attendant qu’elle range ses affaires.
- C’est qui ? Il me semble l’avoir déjà croisé…
- Un ami de… Ambre, mentit Vanille.
- Il est bien resté comme ça deux minutes, chuchota Leanne quand Vanille eut mis son sac sur son épaule, et il souriait bêtement. Il ne regardait ni toi ni moi, juste droit devant lui.
Vanille haussa les épaules et rejoignit Jules dans le couloir. Il lui proposa d’aller marcher dehors, pour être tranquilles.
- Vous faites comme ça avec tous ceux qui refusent le Club ? Une balade, un sort d’Oubliettes et quel beau temps, tu crois qu’on mange quoi ce soir ?
- Je ne vais pas te lancer de sort, Vanille.
- Oui, c’est un Oubliator qualifié qui vient spécialement du ministère, blablabla, je sais.
- Je ne vais pas te faire oublier le Club. Je voudrais juste discuter avec toi.
Elle soupira.
- J’imagine que tu veux savoir pourquoi je ne suis pas venue.
- Non. Je sais déjà à peu près.
- Nathan t’a raconté ?
- Non.
- Qui alors ?
Jules s’arrêta et se tourna vers Vanille. Il était plus petit qu’elle, malgré ses deux ans de plus.
Malgré tout, sa posture et sa façon de parler faisait de lui quelqu’un qu’on avait envie d’écouter.
- Je voudrais m’excuser d’avoir fait ce que j’ai fait il y a quelques instants. Je me doutais que tu ne voudrais pas m’expliquer les raisons de ton choix. Ce n’est pas moral et sûrement repréhensible, et pour le coup je m’en veux un peu. Je voulais vraiment savoir.
Vanille ouvrit la bouche de stupeur. Se pourrait-il qu’il ait…
- Tu es Legilimens ?
- Non, contredit-il. Je n’ai aucun don pour la legilimencie. J’ai usé d’un sortilège de ma création. Il ne dure que très peu de temps, et je voyais beaucoup moins de détails que dans le cas de legilimencie.
Vanille grogna dans sa barbe.
- Du coup, tu es bien tombé. Je faisais justement le point en ce qui concernait le Club.
- Oui…
Cette nouvelle n’étonna pas Vanille. Elle s’habituait, à contre-coeur, aux libertés que prenait le Club avec son libre-arbitre et sa vie privée.
- Tu es venu me voir pour me dire que tu es désolé d’avoir fait... ce que tu as fait en venant me voir ?
- Non, je voulais te convaincre de venir au Club.
- Je pensais qu’un absentéisme aurait été éliminatoire. Je ne compte pas passer cet entretien.
- Tu as lu dans la lettre qu’il ne s’agissait pas vraiment d’un test. En vérité, nous t’aurions posé une série de questions sur tes motivations pour entrer dans le Club. Et, pour tout te dire, c’est séparé en deux parties, les raisons pour lesquelles vous voulez entrer dans le Club, et celles qui vous pousseraient à ne pas le faire.
- Est-ce que tu as manipulé le fil de mes pensées ?
Il eu l’air gêné, et se gratta la tête en regardant ailleurs.
- C’est… un effet du sortilège.
Encore une fois, Vanille ne fut ni étonnée, ni fâchée. Bizarre Peut-être avait-elle utilisé tout son quotat de colère inutile pour le mois. Elle se sentait plutôt lassée.
Jules la regarda dans les yeux, le visage plus déterminé.
- Il faut que tu saches que nous n’avons pas refusé Leanne pour son physique. Nous n’avons pas ce genre de mentalité. Cela n’a pas sa place dans le Club.
Intéressée, Vanille attendit qu’il continue.
- Florent a beaucoup discuté avec Leanne. Elle vit beaucoup trop pour satisfaire ses parents. Au fond d’elle, faire partie de ce Club était une étape de plus pour être à la hauteur de leurs attentes. Elle projette sa réussite scolaire et sa carrière en fonction du niveau social que ça pourrait lui apporter, dans le seul but de ne pas les décevoir. Elle ne vit pas pour elle. Et je pense que ça n’aurait pas été une bonne idée qu’elle fasse partie du Club. Cela aurait été une pression supplémentaire pour elle, elle a encore beaucoup de mal à garder son niveau aux votre, à ton amie et toi.
- Je ne savais pas qu’elle peinait à garder le niveau. Mais il y a une chose que vous ne savez pas : ses parents ne lui demandent rien. C’est elle qui s’invente ces attentes. C’est elle qui se met des but dans sa vie, pour les satisfaire certes, mais jamais ils ne lui en voudraient d’échouer quelque part. Je la connais depuis plus de quatre ans, je sais qui elle est. Elle mérite sa place dans le Club. Après cette discussion, ce n’est pas elle qui a décidé de se retirer n’est-ce pas ?
- Non, c’est nous qui avons décidé de la refuser.
- Alors changez d’avis. Je suis certaine qu’elle vous épatera. Tu as l’air de vouloir que j’intègre le Club à tout prix, je ne sais pas pourquoi mais tant pis,après tout moi aussi je voudrais en faire partie. Alors, voilà mon prix. Si vous acceptez Leanne, j’intègre le Club.
Jules plongea dans ses réflexions. Ils se remirent en marche, contournant les serres, et une pluie fine vint se coller à leurs visages. Cela ne dérangea ni l’un, ni l’autre.
- Nous ne pouvons pas faire cela, annonça-t-il finalement. Le sortilège d’Oubliettes est peut-être réversible, mais ça ne fonctionne jamais complètement. Il y a toujours des dommages. D’ailleurs, des membres du Club au Japon planchent là-dessus depuis quelques années. Nos décisions sont toujours définitives.
- Pourquoi ne pas lui réexpliquer ? Lui redonner envie d’adhérer à ce Club ? Elle en a eu envie une fois, pourquoi pas deux ? Je suis certaine qu’elle vous épatera.
- J’y réfléchirai.
- Tu es leur chef. Oui, dit-elle en le voyant ouvrir la bouche, le Maître Créateur. Tu prends les décisions finales. Et moi, je t’affirme que je n'adhérerai pas au Club des Créateurs sans elle.
Le mois de Novembre passa sans que Vanille n’aie de nouvelle de Jules. Elle ne demanda pas à Ambre des nouvelles de son test, et celle-ci ne lui en parla pas ; elle devait être persuadée que Vanille avait tout oublié. Ce qu’elle ne tenta pas de contredire.
Si Jule avait décidé de refuser Leanne et Vanille, elle aurait oublié le Club. Et ce n’était de toute évidence pas le cas.
Et puis, un matin, dans la Grande Salle où tout le monde prenait son petit-déjeuner, Leanne, Ambre et Vanille reçurent une lettre chacune. Sur les enveloppes était dessiné un petit blason violet.
- Yes ! chuchota Olivier, un peu plus loin.
Il tenait la même enveloppe dans les mains. Discrètement, tous ceux qui l’avaient reçue se cherchèrent du regard à travers la Grande Salle. Vanille croisa la regard d’Olivier et Octave, d’une fille de Poufsouffle qu’elle avait vue à la réunion, et de deux autres élèves qui observaient la salle, le nez relevé et un sourire aux lèvres.
En lisant la lettre quelques heures plus tard, entre deux cours, dans un coin de couloir, Vanille apprit qu’elle était invitée à se rendre dans une salle des cachots du château, où prendrait place une cérémonie d’entrée au Club des Créateurs, quelques jours plus tard.
Plus de retour en arrière, maintenant.
End Notes:
Merci d'avoir lu, à la prochaine :)
Author's Notes:
Hop hop la suite !
Bonne lecture :)
Edito : Chapitre modifié , originellement en deux parties, rien d'important n'a été ajouté. Quelques phrases, tournures, fautes d'orthographes ont aussi été changées.
- Je pensais que tu avais abandonné, s'étonna Ambre, lorsque Vanille brandit sa lettre.
- Je n’étais pas certaine d’y être jusqu’à aujourd’hui, dit Vanille. Je leur ai donné une condition, et ils ont apparemment accepté.
Elle regardait Leanne.
- Vous en avez parlé quand ? demanda cette dernière. Vous en avez parlé sans moi ?
- Et toi, comment ça se fait que tu es acceptée ? Je croyais que tu avais… oublié, répliqua Ambre.
- Oublié quoi ?
- Ils lui ont proposé de rejoindre le Club après les tests, annonça Vanille. C’était ma condition pour que j’entre dans le Club.
- Et ils ont accepté ? Pourquoi ils auraient fait ça pour toi ?
- Je ne comprends rien, fit Leanne.
Vanille et Ambre se tournèrent vers elle. Ambre leva les deux mains en l’air, comme elle le faisait souvent. “Débrouille-toi”, disait son regard à Vanille
- On nous a présenté le Club en Septembre, soupira-t-elle. Ils nous ont dit que si nous n’y entrions pas, nous subirions un sortilège pour l’oublier.
- En Septembre ? Jules m’a parlé il y a une semaine.
- Tu as participé à cette réunion comme nous. Tu as posé ta candidature comme nous. Tu as juste… Oublié.
- J’ai refusé d’entrer dans le Club ? Mais pourquoi ? Et pourquoi me l’ont-ils re-proposé ?
- Ce n’était pas ton choix. Tu as été refusée.
Leanne ouvrit la bouche, étonnée.
- Mais pourquoi ?
- Tu devrais en discuter avec eux.
- Et pour quelle raison sont-ils revenus vers moi ? Ils ont changé d’avis ? Ils m’ont fait perdre la mémoire et maintenant ils changent d’avis ?
- Non, dit Vanille. Comme je l’ai expliqué à Ambre, c’est moi qui ai insisté pour que tu en fasses partie. Ils voulaient que je rentre dans le Club, et j’ai émis une condition : que tu sois acceptée.
Leanne resta silencieuse. Elle relu sa lettre, qu’elle n’avait pas quitté des mains depuis le début de la conversation.
- De toute façon maintenant c’est réglé ! fit vanille, l’air enjoué, pour essayer d’égayer un peu la situation. Tu voulais entrer dans le Club, et ça y est !
- Oui...
Ambre gardait sur Leanne un regard triste et empathique. Elle posa sa main sur son bras :
- Tu leur demanderas de t’expliquer. Et si tu apprends qu’ils doutaient de tes capacités, alors montre-leur qui tu es.
Leanne haussa les épaules et passa le reste de la soirée dans son mutisme, et cela énerva Vanille. Cela valait bien la peine d’insister, si maintenant elle n’était pas contente d’être acceptée !
Jusqu’au jour de la cérémonie d’entrée, Leanne garda son silence songeur, peu reconnaissante des efforts de Vanille. Les deux filles ne se parlaient plus vraiment. Ambre, elle, avait de plus en plus de mal à cacher son excitation. Le dernier jour, elle subit un crescendo d’émotions. Elle secouait ses jambes sous sa table, et son écriture devenait fébrile, c’en était perturbant de voir Ambre, d'habitude si calme, témoigner d’autant d'énergie. Vanille n’était pas si impatiente, mais l’état de son amie était communiquant. Tous les Serdaigle promis au Club l’attrapèrent.
Leur dîner fut vite expédié, et ils foncèrent dans les cachots une demi-heure avant le rendez-vous.
Sur le chemin, ils rencontrèrent la blonde de Poufsouffle accompagnée d’un garçon. Puis, deux Gryffondor les rejoignirent et tous retrouvèrent un Serpentard devant la porte.
Il tenait son enveloppe à la main :
- Vous êtes tous là pour…
- Evidemment, coupa la blonde en secouant ses cheveux. Pour quoi d’autre.
Vanille se promit de compter le nombre de fois qu’elle la verrait secouer ses cheveux. Immédiatement, la fille entra en conversation avec les Gryffondor, elle secoua ses cheveux, trois fois, et Vanille décida qu’elle ne l’aimait pas.
Lentement et dans un faible grincement, la porte s’ouvrit. La tête d’une fille aux grosses lunette bleues, la fille du Club, apparu :
- Vous êtes tous là ? Bien, alors...
Elle ouvrit la porte d’un grand geste.
- Bienvenue !
Elle s’écarta pour laisser passer les cinquième année impatients. Et quand ils virent l’intérieur de la salle, ils furent tous déçus.
Ce n’était qu’une salle de classe basique, avec des chaudrons contre les murs, des bocaux et fioles éparpillés sur les poutres et sur les tables, sombre et poussiéreuse. Une fois à l’intérieur, ils furent surpris du froid qui régnait. Pas si basique, se dit Vanille, puisque la plupart des salles du château étaient entretenues, et celle-ci semblait avoir été abandonnée depuis des siècles.
- Installez-vous sur les tables de devant ! fit la brune. Les autres arrivent.
Ils s'exécutèrent, fouillant chaque recoin du regard pour y trouver un signe positif.. Il y avait des placard brisés remplis de vieux livre de cours contre les murs qu’ils longèrent pour s’asseoir, et Vanille aperçut un aquarium vide et plein de crasse. Une odeur âcre s’en échappait, la poussant à s’en asseoir le plus loin possible. La fille du Club avait disparu par la porte du fond, laissant seuls les élèves, un peu perdus.
- C’est ça, la salle de travail du Club des Créateurs ? s’exclama la blonde d’un air dédaigneux. C’est miteux, je m’attendais à mieux.
- Tais-toi donc, aboya le Serpentard.
Il semblait lui aussi déçu des lieux.
- C’est évident qu’on ne va pas travailler ici.
- Qu’est-ce que tu en sais ? contra une Gryffondor, une petite brune aux cheveux courts à la garçonne. Rien ne nous prouve que le Club est ce qu’il prétend être. Tant qu’on n’y est pas, on ne sait rien.
- Eewk ! s’écria Vanille.
Sa chaussure venait de rencontrer une masse informe et gluante qui stagnait au sol. Elle souleva le pied pour s’en dégager, mais la substance s’était collée à sa semelle.
- C’est immonde ! s’écria-t-elle. Qu’est-ce que c’est ?
- On dirait que ça vient de là-haut… murmura la Gryffondor.
Tous levèrent les yeux.
- Non ! Non non non, s’écria un des garçons en s’éloignant vers la porte à reculons. Hors de question que je reste ici.
- C’est… un nid d’araignées ?
- Ca ressemble plus à des vers, proposa Vanille en scrutant une des poutres du plafond. Un amas de… vers gluants ?
- Attend, reste, dit Olivier au garçon qui était en train de partir. C’est trop bête de laisser tomber maintenant !
- On te protégera contre les vers sauvages s’il le faut, fit la petite Gryffondor avec un clin d’oeil.
Vanille lança un sort sur sa chaussure et la substance gluante disparu de son pied. Elle s’éloigna le plus possible de la zone.
- Ca commence à être long, avoua Olivier.
Vanille se pencha vers lui.
- Je suis certaine que c’est encore un test. Quelque chose comme “Si vous voulez vraiment faire partie du Club, acceptez de rester dans un endroit miteux en croyant que c’est là que vous travaillerez, parce que but, ce sont les recherches, pas le confort”.
Tous s’étaient tournés vers elle, certains acquiescèrent, convaincus.
La porte s’ouvrit à la volée en les faisant tous sursauter.
- Exactement ! s’écria une voix joyeuse en entrant dans la salle par la porte du fond.
Tous se retournèrent et virent l’intégralité des membres du Club des Créateurs entrer, devancés par leur chef, Jules. Celui-ci lança un clin d’oeil à Vanille quand il passa à côté d’elle.
Ils se placèrent devant les nouveaux, alignés, comme lors de la présentation.
- Vous n’aurez pas mis longtemps à comprendre notre petit stratagème. On avait disposé d’autres cadeaux des les placards mais tant pis pour vous.
“Super esprit, ils ont quel âge ?”
Jules leva sa baguette et la salle s’illumina d’un coup, puis petit à petit la température remonta vers des niveaux acceptables. Les cinquième années regardèrent autour d’eux l’air excité, s’attendant à ce que les murs se nettoient et les étagères se réparent, mais il n’en fut rien. Ils se retournèrent vers le chef, déçus.
- Ce n’est pas notre salle de travail, avoua le Chef. Nous n’y allons que pour manipuler ou faire des recherches. Y rester sans raison peut parfois détériorer des potions ou des sortilèges en cours, alors nous préférons aller dans une salle adjacente pour ce genre d’évènement.
Il marqua une pause pour les observer.
- Je suis ravi de tous vous voir ici, fit-il. Vous avez certainement dû nous oublier, alors présentons-nous : je suis Jules, septième année, Serpentard, Maître Créateur.
La rousse s’avança :
- Je m’appelle Morgane, septième année, Serpentard, Grande Créatrice.
Les deux s’échangèrent un regard explicite. Cela ne manqua à aucun que les deux étaient en couple et dirigeaient le Club à deux.
- Je suis Oreste, fit la brune aux lunettes bleues, septième année à Serdaigle, Grande Créatrice.
- David, s’avança un des garçons, septième année à Serdaigle et Grand Créateur également.
Les deux filles identiques dont Vanille se souvenait leur avoir trouvé l'air mauvais, s’avancèrent.
- Alva.
- Alya.
- Sixième année, Serpentard.
- Jeunes Créatrices.
Vanille frissonna. Leur voix crissaient à ses oreilles.
- Je m’appelle Alexandre, dit ce dernier. Sixième année Gryffondor, Jeune Créateur.
Il avait parlé chaleureusement, affichait un sourire sincère et accueillant, n’avait plus rien à voir avec le garçon froid du début d’année. Vanille en resta bouche bée. Il était encore plus beau, avec ses yeux pétillants et son attitude avenante, comme s’il souhaitait la bienvenue de toute son âme.
- Je m’appelle Iris, annonça la dernière fille de sa voix douce de poupée, je suis en sixième année à Poufsouffle, et je suis une Jeune Créatrice.
Elle battit de ses longs cils et recula pour laisser avancer le dernier :
- Et moi Florent, aussi en sixième année à Poufsouffle, Jeune Créateur.
Il recula dans un sourire timide et Iris lui prit la main.
Avant que Jules ne reprenne la parole comme il semblait en avoir l’intention, Vanille repéra Nathan, dans le fond. Encore une fois, ils l’avaient oublié. Cela ne semblait pas le gêner, il gardait les bras croisés, observant avec curiosité la scène. Quand il la vit, il lui offrit un demi-sourire amusé, et Vanille reporta son attention sur ce qui se passait.
- Voulez-vous bien vous présenter ? demanda Jules. Juste vos prénoms et maisons, nous apprendrons tous à nous connaître vraiment au fils du temps.
Il tendit la main vers Vanille, qui était à sa gauche. Elle s’éclaircit la voix :
- Je m’appelle Vanille, je suis à Serdaigle.
Ambre prit la parole :
- Ambre, Serdaigle également.
- Leanne, Serdaigle, fit cette dernière d’une petite voix.
- Lorelei, Poufsouffle, fit celle aux longs cheveux blonds d’un air assuré.
“Secoue tes cheveux !” Elle secoua ses cheveux. “Ton destin est scellé, Lorelei. Je ne t’aime décidément pas.”
- Enguerrand, Poufsouffle, dit celui qui avait faillit quitter la salle..
- Kerwan, Serpentard, fit le garçon qui les avait attendus devant la porte.
- Olivier, Serdaigle.
- Octave, Serdaigle.
- Annabelle, Gryffondor, dit la petite aux cheveux courts.
- Leire, Gryffondor, dit la dernière.
Ils étaient donc dix nouveaux. Vanille se concentra sur chacun d’entre eux pour repérer un petit quelque chose qui la ferait se souvenir d’eux. Elle avait déjà oublié la moitié des prénoms.
Jules, après ça, sortit de son sac une pile de parchemins enroulés, qu’il fit distribuer.
- Voici le règlement du Club, simplifié, sans détail. Je vous demanderais de bien le connaître. Il n’y a qu’un exemplaire du règlement entier, tenu par Oreste (la fille aux lunette bleues secoua la main), qui contient tous les détails protocolaires à suivre, ainsi que les obligations administratives et la liste exhaustive de toute ce qui a été créé et recensé par le ministère depuis la création du Club de Poudlard. C’est très long, c’est compliqué à garder à jour et à connaître par coeur, et il y a un autre adjectif que je n'emploierai pas mais que je pense très fort, qui explique pourquoi vous n’êtes pas obligés de le lire tout de suite. De toute façon, vous ne ferez rien seul la première année, et vous imiterez ceux des années au dessus pour les protocoles.
Son regard resta sur Vanille un moment. Chaque fois qu’il la regardait, elle souhaitait ne pas avoir voulu entrer dans le Club. Non pas que son regard était gênant - il n’y avait ni mépris ni envie dans ses yeux - mais à chaque oeillade, il semblait vouloir faire comprendre quelque chose à Vanille. Ou plutôt, il semblait savoir des choses qu’elle ignorait. Comme s’il jaugeait ses réactions.
- On ne va pas pas attendre plus longtemps. Levez-vous, et placez-vous devant moi, en demi-cercle.
Tous s’exécutèrent d’un coup, arrivant à se bousculer malgré leur nombre, repoussant les tables au passage. Ils formèrent ce demi-cercle, Vanille se retrouva sur le côté.
Jules, au centre, leva sa baguette, imité par les membres du Club qui s’étaient placés tout autour des nouveaux. Il fit apparaître devant lui une sphère lumineuse, comme composée d’un liquide mauve qui bouillait sur elle-même, vivante, lugubre, envoûtante.
Vanille n’arrivait pas à en détacher son regard, si bien qu’elle ne vit pas tout de suite que la salle s’était assombrie. Mais ce n’était pas une obscurité oppressante. Vanille eu l’impression de se tenir debout au milieu du vide, du rien. C’était parfaitement apaisant. Ils étaient seuls, debout dans le néant, accompagnés de cette sphère liquide qui semblait bouillonner sur elle-même.
- Le lien qui se créera ce soir entre vous sera immuable, incontestable, incorruptible. Vous avez souhaité être membres du Club des Créateurs. Nous vous avons acceptés. Chacune et chacun d’entre vous sera le gardien d’une longue tradition d’inventions, de cohésion, de soutien. Il y aura des inimitiés, il y aura des désaccords. Ils seront surmontés. Et ainsi liés, nous nous pousserons vers le haut.
“Amen.”
Jules murmura ensuite quelques incantations rythmées, et plusieurs filaments s’échappèrent de la sphère pour se diriger vers les nouveaux, fascinés.
- Levez vos baguettes.
Ils s’exécutèrent tous, même les membres du Club. Le filament de lumière devant Vanille toucha la bout de sa baguette, qui s’alluma d’une vive lumière violette. Puis, d’autres filaments en sortirent et vinrent à la rencontre des autres baguettes, qui avaient fait de même. Quand tous les nouveaux furent reliés par les filaments de magie, ceux-ci se dirigèrent vers les anciens et leurs baguettes levées.
Enfin, la dernière baguette être être illuminée fut celle de Jules, qui la leva : un immense réseau de lumière, semblable à une grande toile d’araignée mauve, s’éleva au dessus d’eux, puis se disloqua et dans un éclair, disparu en une pluie lumineuse.
La salle revint autour d’eux. Ils ne l’avaient évidemment jamais quittée.
Vanille se sentait pleinement satisfaite de ce qui venait de se produire, elle sentait dans son ventre une nouvelle sensation, une espèce de bien-être. A côté d’elle, Ambre n’arrivait pas à cacher sa joie, quand elle croisa le regard de Vanille, elle lui fit les gros yeux, l’air de dire “je passe le meilleur moment de me vie”.
En revanche, à côté d’Ambre, Leanne était parfaitement concentrée sur Jules. Son visage n’exprimait pas de joie, ni même de sentiment, il restait fermé.
Jules quant à lui paru satisfait en regardant un à un les élèves devant lui.
- Vous faites maintenant tous partie du prestigieux Club des Créateurs. A partir d’aujourd’hui et jusqu’à la fin de votre vie, vous pourrez vous revendiquer comme tels. Vous êtes les Novices. Vous portez déjà les insignes.
Vanille baissa la tête : en effet, épinglé sur son torse, un insigne d’une petite dizaine de centimètres de hauteur représentait le blason du Club : le chaudron bouillonnant surmonté de deux baguettes magiques. Elle vit son nom gravé sur le dessus. “Vanille Ocean - Novice” Et sur le fond, de temps en temps, une forme blanche traversait le fond du badge. Comme le dessin d’un oiseau.
Elle portait également une cravate noire et violette parfaitement nouée sur son cou.
- Les cravates ne sont pas obligatoires, avoua Jules, mais elles vont avec le sortilège. Seuls les membres - et anciens membres - peuvent voir vos insignes et cravates.
Il leur demanda à tous de s’asseoir, et lui-même prit une chaise.
- Vous n’êtes plus sous l’emprise de quelconque sortilège. Parlez du Club à qui vous le souhaitez - mais ne l’ébruitez pas. En vérité, beaucoup de sorciers le connaissent, car il y a eu beaucoup de membres au fil des années. Faire partie du Club des Créateurs peut vous ouvrir des portes - au ministère ou partout ailleurs. Il vous suffit de rencontrer quelqu’un qui saura voir votre insigne.
Il continua ainsi à expliquer les détails de l’histoire du Club, des relations internationales et de quelques protocoles. Vanille sentit son attention partir. Cette fois, personne ne lui donna de coup de coude, et ce fut à la fin du monologue interminable de Jules qu’elle se réveilla :
- Demain soir, après vos cours, venez devant la salle juste en face. Vous découvrirez enfin à quoi ressemble le Club. Nous vous expliquerons sur quoi nous travaillons et vous choisirez qui vous voulez assister.
Il se leva.
- Je vous souhaite encore une fois la bienvenue.
En sortant de la salle, Vanille croisa le regard d’Alexandre, furtivement. Il passa en une seconde de méprisant à bienveillant. “Bienvenue dans le Club des Sorciers Flippants.”
Sans se concerter, les cinq nouveaux Novices de Serdaigle se regroupèrent dans leur salle commune pour parler de ce qu’ils venaient de vivre.
Ils étaient tous emballés et excités (à part Leanne qui se faisait toujours discrète, mais Vanille n’insista pas), mais Ambre ne participa pas à la conversation : elle examinait son insigne.
- Montre-moi le tien, dit-elle en tendant la main vers Vanille.
Elle examina les deux. Puis, quelques instant plus tard, au milieu d’une phrase de Olivier, elle se leva sans prévenir, leva sa baguette et dit :
- Expecto patronum.
Du bout de sa baguette, une silhouette blanche et lumineuse s’extirpa élégamment et atterrit avec souplesse sur le sol. Vanille connaissait cet enchantement pour en avoir lu la théorie dans des livres, mais ils n’avaient pas encore appris à les maîtriser en cours.
Ambre se pencha, les yeux brillants : son patronus chat s’enroula autour de ses jambes, puis sauta sur sa chaise, s’enroula sur lui-même, et disparu.
- Regardez, fit Ambre, émue, sur mon insigne, il y a une forme qui se balade. Sur celui de Vanille, ce n’est pas le même : ce sont nos patronus.
Vanille reprit son insigne : la forme d’oiseau continuait à aller et venir.
D’un même geste, tous sortirent leur baguette et murmurèrent l’enchantement.
Vanille essaya pendant de longues minutes, et après des essais brumeux et infructueux, une forme d’oiseau aux longues ailes argentées se forma dans la brume et disparu presque aussitôt.
Vanille avait reconnu l’oiseau : un albatros. Un oiseau des mers. Elle le connaissait pour en avoir observé des heures entières avec ses parents, à la mer, quand ils étaient encore tous les quatre. Une vague d’émotion l’envahit, un mélange de nostalgie, de tristesse et de joie de retrouver avec son patronus une partie de son enfance heureuse.
Le sort n’avait pas duré longtemps, mais elle fut tout de même fière d’elle, car ni Octave, ni Olivier, ni Leanne ne réussirent à créer leur patronus. Déçus, il montèrent tous se coucher.
Le lendemain matin, au réveil, Vanille eut soudain conscience qu’elle faisait réellement partie du Club. C’était comme si, pendant la nuit, tout s’était mis en place et la scène qui s’était déroulée la veille avait pris soudainement tout son sens : elle faisait magiquement partie d’un club qui avait la possibilité de créer de la magie.
Elle n’avait qu’une hâte, voir sur quoi travaillaient les membres.
End Notes:
Merci d'avoir lu!
J'en profite pour remercie les personnes qui ont reviewé : vous êtes adorables et vous me motivez ! J'avais peur de sortir une fanfic pas top et au final ça a l'air de vous plaire. Bon je suis consciente que ce n'est pas parfait, ni exceptionnel, mais je progresse :)
D'ailleurs entre les premiers chapitres et ceux que je suis en train d'écrire aujourd'hui (autour du 20-25e, ce n'est pas encore découpé), j'ai l'impression d'avoir évolué dans mon style d'écriture.
Bref vous me direz ce que vous en pensez !
La magie des baguettes by Deanna
Author's Notes:
Bonne lecture !
Edito : Chapitre modifié , originellement en deux parties, rien d'important n'a été ajouté. Quelques phrases, tournures, fautes d'orthographes ont aussi été changées.
En se préparant ce matin-là, les trois filles se jetaient des regards explicites ; elles aussi étaient impatientes que la soirée arrive. Même Leanne semblait avoir réussit à mettre sa déception de côté et à se satisfaire de la situation. Elle regardait son insigne avec insistance, voulant sans doute découvrir son animal, son patronus.
La journée fut longue. Le cours de métamorphose dura des heures et des heures, et celui d’histoire de la magie bien plus encore.
Elle croisa dans l’après-midi quelques-uns des autres Novices. Ils se sourirent d’un air entendu, mais ne savaient pas quoi se dire. La petite aux cheveux courts de Gryffondor, Annabelle, leur avait fait un signe de main joyeux en sautillant sur place, et avait dit :
- A ce soir !
L’ambiance générale, lorsqu’ils se retrouvèrent le soir dans le couloir menant à la salle du Club, était presque euphorique.
Arrivés devant la fameuse porte, ils furent tous éberlués.
Elle n’était pas ainsi la veille, cela devait être dû au sortilège. En face de la porte de la salle miteuse où ils étaient devenus des Novice, il y en avait une si grande qu’elle atteignait presque le plafond. Composée de deux parties, elle était en bois taillé de fins dessins ornementaux qui s’emmêlaient et se croisaient sans cesse. Ils paraissaient bouger, vibrer, comme si cette porte était vivante. La poignée était en métal forgé, rougeoyante. Les dix Novices étaient tous devant la porte, ébahis, le nez en l’air pour l’observer dans son entièreté.
Puis, sans prévenir, la porte s’ouvrit des deux battants à la fois. c’était Jules qui, de l’intérieur, tenait à rendre le moment grandiose.
- Bienvenue, dit-il pendant qu’il tirait la porte, au Club des Créateurs.
“On le saura qu’on est les bienvenus.”
Les Novices s’avancèrent lentement, observant tout ce qu’ils pouvaient.
La salle était grande et carrée. Haute de plafond, des fenêtres en hauteur composées d’un vitrail grossier mais élégant devait sûrement offrir une lumière colorée en pleine journée, lorsque le soleil était levé.
Au milieu de la pièce, une table ronde entourée de tabourets était recouverte de livres, parchemins, plumes, tout un capharnaüm, et au-dessus, un lustre immense descendait pour l’éclairer de bougies.
Quelques membres y étaient assis, lisant et rédigeant, et stoppés dans leur travail pour regarder les nouveaux entrer.
Au fond, de l’autre côté de la table, il y avait deux rangées de bibliothèques, débordants de livres.
Certains étaient même posés en piles sur le sol et sur des chaises.
A droite de la salle, plusieurs chaudrons étaient alignés sur des tables basses en pierre, dans lesquels étaient creusés des trous pour y allumer des feux. Au-dessus, contre le mur, et tout autour, des dizaines et des dizaines de boites, flacons et fioles regorgeaient d’ingrédients. Des chaudrons de toutes tailles et des herbes sèches étaient suspendues au plafond, offrant à la salle une odeur provençale.
Iris et Florent, les deux Jeunes Créateurs de Poufsouffle, mélangeaient des ingrédients dans un des chaudrons.
Sur la gauche, d’autres tables de travail étaient disposées : sur l’une d’elle, plusieurs baguettes étaient alignées, et Oreste était en train de les analyser, griffonnant au fur et à mesure sur un parchemin. Elle leva la tête furtivement pour observer l’entrée des nouveaux.
Tout au fond, sur la droite, se trouvait un mannequin en bois de taille humaine et présentant des séquelles d’existence, des brûlures et griffures entaillaient le bois. L’espace autour du mannequin était vide.
L’endroit était vraiment parfait, songea Vanille, un sourire béat sur le visage, pour étudier la magie. Celle-ci semblait s'émaner de chacun des recoins de la salle.
Les Novices s’assirent autour de la table du centre. Un à un, les Créateurs vinrent leur expliquer brièvement le contenu de leurs travaux.
Florent et Iris travaillaient sur diverses potions, en ce moment ils travaillaient sur des maladies magiques. Ils espéraient comprendre comment elles fonctionnaient afin de pouvoir en recréer des versions affaiblies pour pouvoir en trouver l’antidote, et ainsi continuer jusqu’à la version la plus virulente. A leur manière, ils réinventaient le concept de vaccin, côté magique.
Jules créait des sortilèges utiles, simples, dont certains étaient implicitement demandés par le ministère.
Morgane, la grande rousse, travaillait avec le bureau des Aurors. Ses sortilèges concernaient les informations, magiques ou non, que l’on pouvait extraire d’un objet ou d’un sorcier. Elle pouvait analyser d’un coup de baguette n’importe quel cape ou parchemin et en dire long sur son histoire.
Oreste, la fille aux lunette bleues, leur explique vivement et sans détail qu’elle travaillait sur les baguettes magiques, et sur leur fonctionnement, et à terme comptait étudier la magie sans baguette.
Elle leur précisa que ce n’était pas, pour l’instant, de la création, tant qu’elle n’avait pas atteint son but, faire de la magie sans baguette.
David, l’autre Serdaigle Jeune Créateur, était également membre du Club de Duels, il inventait et perfectionnait des sortilèges offensifs et défensifs. Il lui arrivait également de vendre directement au bureau des Aurors.
Alva et Alya ne leur expliquèrent pas vraiment leur travaux, elles se concentraient sur le moment sur des phases de recherches, en effet, elle restèrent derrière leurs livres et ne dirent rien de plus. C’était évident qu’elles ne souhaitaient pas être encombrées d’un Novice.
Alexandre travaillait également sur des potions, bien qu’il ne soit pas en ce moment sur la conception. Il souhaitait trouver des potions d’atouts particuliers pour les sorciers, il avait inventé des potions d’insensibilité à la chaleur (et de protection, évidemment), au froid, et à beaucoup de potions. Un antidote préventifs, en quelque sortes.
Ils ne parlèrent pas de Nathan, encore une fois, qui apparemment se contentait de lire dans un coin. Encore une fois, Vanille se sentit être la seule à le remarquer.
Ils discutèrent ensemble de la répartition des Novices, en fonction des souhaits de chacun.
Le travail d’Oreste la tentait beaucoup. Les baguettes magiques étaient un sujet intéressant et l’idée de pouvoir faire de la magie sans baguette était extraordinaire, si elle réussissait à aller au bout de son projet, cela serait une avancée importante dans le monde de la magie.
Vanille demanda donc à travailler avec Oreste. Et avec elle vint une autre Novice. La blonde de Poufsouffle lui fit un sourire charmant et niais. Evidemment, elle secoua ses cheveux.
“On va s’amuser toutes les trois.”
Leanne alla avec Jules et ses sortilèges.
Ambre souhaita travailler avec David sur les sortilèges de duel, et elle y alla avec Kerwan, le Serpentard un peu arrogant.
Les autres Novices se répartirent, sauf Annabelle, la petite Gryffondor, qui demanda à travailler seule, pour commencer dès à présent ses recherches. Aucun Créateur ne fut contre.
Quand chacun eut trouvé son ou ses partenaires, chacun se remit au travail. La salle fut emplie d’un brouhaha, très vite réglé par des sortilèges d’atténuation sonores qui furent lancés ça et là.
L’atmosphère était envoûtante. Chaque membre, nouveau et ancien, s’accordait parfaitement avec le reste. Chacun était à sa place.
Vanille était à sa place. Et elle s'y sentit bien.
Oreste était une fille très organisée. Toutes ses fiches étaient classées, datées, annotées pour pouvoir les retrouver facilement, ce qui arrangea beaucoup ses Novices, qui débarquaient au beau milieu d’une recherche, déjà bien avancée et au sujet complexe.
- Je vais vous expliquer les grandes lignes de ce que je fais ce soir, c’est assez compliqué de rentrer dans le détail comme ça, sans première approche. Je vais vous laisser lire la totalité de mes notes.
Elle mit un coup de baguette sur son énorme carnet débordant, qui se divisa en trois.
- Les deux autres disparaîtront d’ici quelques jours, le temps de pouvoir les lire. Après, je vous laisserai consulter mes notes. Lisez juste les grandes lignes, les sujets importants, ce que j’ai déjà fait.
Elle tendit les deux nouveaux carnets vers les deux filles. Vanille en saisit un en observant Oreste.
Elle était bien plus autoritaire qu’elle ne l’aurait cru. Il y avait une grande assurance dans sa voix. Elle parlait comme un professeur l’aurait fait, distribuant les devoirs.
- Et puis ne les perdez pas.
Vanille rangea le sien dans son sac, mais Lorelei le garda contre elle. Elle buvait les paroles d’Oreste, et son air déterminé signifiait clairement son intention d’être à la hauteur de ce qu’on attendait d’elle en tant que Novice. Vanille se demanda si elle n’ lavait pas jugée un peu vite. Son air cruche n’était peut-être qu’une façade.
D’ailleurs, elle avait attaché ses cheveux.
Oreste pris une des baguettes posées sur son bureau et la leva :
- Les baguettes contiennent deux éléments principaux : le bois qui la compose et le coeur. Le bois peut provenir de presque tous les arbres, et chaque arbre possède des propriétés qui lui sont propres. Certains vont favoriser la magie de certains sorciers, en fonction de leur tempérament ou leur aptitudes, d’autres vont plutôt favoriser certains types de sortilèges, informulés, métamorphose, magies de l’esprit… Il y a une liste complète dans mes notes. Le coeur quant à lui provient de créatures ou de plantes magiques. La licorne, le phoenix et le dragon sont les créatures les plus puissantes que l’on connaisse, c’est pourquoi la plupart des baguettes en contiennent. On peut cependant placer au coeur d’une baguette les poils, crins, plumes ou fibres de n’importe quelle créature magique. On peut retrouver des cheveux de Vélane, du crin de Sombral, ou encore de la moustache de Fléreur... Le coeur influe la puissance, bien plus que le reste. Bien sûr, c’est l’association des deux éléments qui donne à la baguette ses capacités. Sa taille et sa souplesse joue également sur le type de magie, l’endurance, la puissance qu’elle aura, et donnera à son propriétaire.
Elle prit deux baguettes et lança un sort de métamorphose avec chacune d’entre elles sur deux verres posés sur la table. Le premier verre se transforma en une petite figurine de cristal finement taillée, représentant une petite fille qui dansait doucement. Le second devint une poupée de bois plus grande, plus grossière mais exécutant des gestes plus impressionnants, elle sauta sur la table et réussit à atteindre une pile de livres. Les deux métamorphoses étaient vraiment différentes.
- J’ai jeté le même sortilège, qui n’est pas précis, ce qui explique la différence entre les deux poupées. Ce sont les baguettes qui ont… “décidé” de faire ces différences.
- Ces deux baguettes t’appartiennent ? demanda Lorelei, subjuguée par la petite poupée de cristal qui continuait à tourner sur elle-même.
- Oui, j’ai de bonnes relations avec Ollivander, et il me permet d’être en contact avec des sorciers qui souhaitent changer de baguette. je leur rachète leurs anciennes, et m’arrange pour en être la propriétaire.
Le grand fabriquant de baguette de Grande-Bretagne Ollivander avait prit une retraite bien méritée après la guerre. Il continuait néanmoins à conseiller ses successeurs, deux sorciers doués qui avaient repris le flambeau de sa boutique. Oreste avait réussi à prendre contact avec lui, sans doute grâce à son statut de Créatrice.
- Donc toutes ces baguettes sont à toi ?
- Leur allégeance me revient. En revanche, aucune d’elle ne me convient mieux que ma propre baguette, évidemment.
- Il parait qu’Ollivander racontait que la baguette choisit son sorcier, demanda Vanille.
Oreste se renfrogna légèrement. D’un geste, elle stoppa les sortilèges des poupées.
- C’est un sujet sur lequel nous sommes en désaccord. Au début, c’est lui qui m’a tout appris sur les baguettes, et je n’avais aucune raison de douter de ce qu’il disait. mais il ne s’est jamais intéressé à d’autres fabriquants de baguettes que lui. Je suis allée voir d’autres fabriquants, dans les pays des autres Clubs. Chacun a son avis, et je les ai tous écoutés pour me faire le mien,.Vous vous ferez votre propre avis, mais pour travailler avec moi, il vous faudra me faire confiance. Je pense que selon la baguette et ses propriétés que lui confèrent son bois, son coeur, sa taille et sa souplesse, c’est notre propre magie qui s’exprime en elle. Notre magie personnelle est unique, comme l’est la baguette. Il existe des corrélations, des liens entre notre magie et les propriétés de la baguette, et ces liens font que, tout simplement, notre pouvoir est à son maximum lorsque nous trouvons une baguette qui sied parfaitement à ce que nous sommes.
Les questions se bousculèrent dans la tête de Vanille, mais c’est Lorelei qui posa sa question :
- Mais cela ne revient pas au même ? La baguette choisit le sorcier ou la sorcière dont la magie lui correspond à elle.
- Non, parce qu’elle implique que la baguette a une forme de conscience, ce que je ne crois pas. Je pense qu’il s’agit de quelque chose de plus fort. Quelque chose comme… si la magie elle-même se retrouvait, se reconnaissait dans ce lien, et ainsi permettait la connexion.
- Donc tu penses que notre magie est quelque chose d’indépendant de nous ? demanda Vanille.
- Non, pas forcément, et ce n’est pas pour l’instant le domaine dans lequel je travaille. C’est un sujet particulièrement compliqué, et je ne compte pas m’y atteler maintenant, et peut-être même jamais. Moi, je cherche à comprendre comment la magie passe d’un sorcier à une baguette, puis à une troisième chose, un objet, un sorcier, ou autre. Je voudrais étudier la magie sans baguette. Donc, je m’intéresse de près à la magie des baguettes, et de loin à celle des sorciers.
Subjuguée, Vanille sentit en elle monter quelque chose de nouveau : la magie elle-même attendait d’être étudiée. La magie qui composait les sorciers, celle qui leur permettait de faire tout ce qu’ils faisaient… C’était ça. C’était le domaine qu’elle voulait étudier, découvrir. Répondre à cette grande question : qu’est-ce que la Magie.
Et les études d’Oreste étaient un point de départ parfait. Etudier les transferts de magie d’un sorcier à quelque chose, en passant par une baguette ou non, puis comprendre d’où venait cette magie, chez le sorcier.
- Je suis rassurée de voir que vous avez l’air intéressées, j’avais peur que le sujet soit un peu trop vague et trop complexe. Je crois que dans le Club, c’est moi qui suis partie vers le plus compliqué. Je ne suis même pas sûre d’obtenir des résultats. Pour l’instant, après un an, j’ai surtout acquis beaucoup de connaissances. Comme je l'ai dit, je ne fais pas de la création. Pas encore. Surtout de la compréhension.
Vanille et Lorelei aquiécèrent.
- J’aimerais faire de la divination mon sujet d’étude, avoua Lorelei, et c’est une branche de la magie qui ne demande pas de baguette. Tes études pourraient être un bon début de réflexion pour moi.
- Tu as raison de penser dès maintenant à ce sur quoi tu voudras travailler. N’hésite pas à faire tes recherches de ton côté. Je suis sensée vous garder près de moi pour vous montrer comment le système fonctionne, mais personne ne garde ses Novices jusqu’à la fin, vous partez de votre côté quand vous le voulez. De toute façon, moi ou les autres, on pourra toujours vous expliquer comment fonctionnent les relations avec le ministère, même si vous ne travaillez pas avec nous.
Oreste ferma ses notes.
- Mais pour l’instant, je vais vous initier à l’art de la recherche ! Potassez mes notes, on se revoit demain soir.
La pièce était entièrement vide, mais concentrée sur Oreste, Vanille n’avait vu personne partir. Il devait être tard.
- Au fait, si vous avez des devoirs ou si vous êtes vraiment fatiguées, ne vous forcez pas à venir. Ce n’est pas un cours.
Les trois filles se dirigèrent vers la porte d’entrée.
- Personne ne peut voir cette porte en dehors des membres du Club. Elle n’a pas de clé. Vous pouvez venir quand bon vous semble, évitez seulement de toucher aux travaux des autres membres.
Vanille sortit la dernière et cru entendre un bruit dans la salle. Elle y jeta un dernier coup d’oeil, mais il n’y avait personne. Elle lança un sort pour éteindre les bougies, et referma la grande porte.
End Notes:
Merci d'avoir lu, plein de bisous !
La vie au Club des Créateurs by Deanna
Author's Notes:
J'arrive, je publie et je repars !
Ce chapitre est plus long que d'habitude, je n'ai pas réussi à le couper plus tôt. Mais ça vous va peut-être mieux ainsi ?
Vanille fait maintenant pleinement partie du Club. Il est temps qu'il s'y passe des choses ! Quelques réflexions, et quelques actions... J'espère que ça vous plaira !
Bonne lecture !
Les notes d’Oreste étaient beaucoup plus conséquentes qu’elles n’y paraissaient. Vanille essaya de lire le plus possible avant de dormir, mais elle n’arriva pas à un quart quand minuit sonna. Elle tombait de fatigue, et décida de remettre sa lecture au lendemain.
Entre ses cours, pendant la pause du midi et même en plein cours d’histoire de la magie, Vanille étudia le livre d’Oreste. Elle était tellement impatiente, et subjuguée par le Club qu’elle ne vit pas Ambre et Leanne qui, plusieurs fois dans la journée, essayèrent de parler avec elles. Elle prit tout de même le temps de rédiger quelques devoirs urgents, et le soir, se précipita dans la salle du Club des Créateurs.
Quand elle se fut installée au bureau d’Oreste, prête à travailler, elle entendit quelqu’un toquer à la porte de la salle. Lorelei, qui s’installait également, lança un regard étonné. Les membres du Club allaient et venaient comme bon leur semblait, et aucun non-membre ne pouvait voir la porte.
Jules, le plus naturellement du monde, se dirigea vers la porte. Celle-ci s’ouvrit sur une longue robe pourpre brillante, avec un col blanc et d’énormes boutons d’argent, portée par la directrice de l’Ecole, Evelyne Roy. Elle s'avança dans la grande salle du Club, balançant son regard d’un élève à l’autre. Jules referma la porte derrière elle, et retourna s’asseoir, poli, attendant qu’elle parle.
Evelyne Roy était une grande et belle femme au visage sérieux mais sympathique. Elle attachait ses cheveux blonds dans un chignon si serré qu'il entrait en concurrence avec celui du professeur McGonagall, et portait toujours la même robe. Elle était bien jeune pour sa fonction, moins de quarante ans, ce qui expliquait peut-être sa tendance à l’inconvenance et à la désinvolture. Malgré cela, elle était bonne conseillère et remplissait son rôle de directrice sans bévue ni présomption.
Elle n’avait pas fait l’unanimité dans la communauté sorcière à son arrivée.
Ses deux parents étant nés-moldus, ils prirent peur lors de la première guerre et décidèrent de s’expatrier en France. La future directrice avait deux ans à cette époque-là. Elle fit ses études à Beauxbâtons, et se lança dans une carrière de duelliste professionnelle avant même d’avoir fini son cursus. Puis elle entra à Beauxbâtons en tant que professeur de sortilèges, ayant acquis de grandes compétences durant sa courte carrière. Mais lors du retour de Voldemort, ayant de la famille en Angleterre, elle décida de retourner là-bas pour assurer leur protection. Elle devint connue de la communauté sorcière britannique en participant à la bataille de Poudlard.
Et c’est donc à trente-cinq ans que, poussée par des amis qu’elle avait protégé pendant la guerre, Evelyne Roy proposa son aide à la reconstruction du monde sorcier et posa sa candidature à l’Ecole de Poudlard. Le professeur McGonagall ne souhaitait pas prendre le poste de directrice, le conseil des sorciers nomma à titre temporaire Mme Roy Directrice de Poudlard.
Il y eu beaucoup de lettre adressées au ministère et à Mme Roy elle-même cette année-ci, beaucoup de sorciers critiquaient sa jeunesse, son arrivée trop récente sur l’île de Grande-Bretagne, ils l’accusèrent de manipulation sur le conseil et les autres professeurs, et la traitèrent d’arriviste ambitieuse.
Néanmoins, la première année se déroula sans problème. Le nouveau système (la répartition en seconde année) ne posa pas de soucis à la directrice, n’ayant pas vécu l’ancien. Les élèves l’appréciaient, les professeurs aussi, puis les parents. Ils s’habituèrent à son humour, sa légèreté, et furent satisfaits de la voir consciencieuse devant des situations sérieuses.
Et bien qu'elle ait habitué ses élèves à son attitude désinvolte, c'est le visage particulièrement sérieux, bien que satisfait, qu'elle se présentait à eux, au Club des Créateurs, ce soir-là.
- Bonjour, dit-elle d’une voix calme et sérieuse, et bienvenue à tous les Novices. J’imagine que vous le savez, en tant que directrice de Poudlard, c’est à moi que reviennet certains pouvoirs dans ce Club. Je ne les exercerais qu’en cas de nécessité, bien entendu, si l’un de vous en fait la demande ou si j’estime qu’il est important d’intervenir. Votre Club a une capacité d’auto-gestion impressionnante, comparé aux autres. Sachez que j'en suis membre, je l'ai intégré à Beauxbâtons il y a plusieurs années maintenant. J’y ai étudié des sorts complexes de défense et d’attaque pour m’entraîner aux duels.
Elle se pencha vers David, avec qui Ambre travaillait, qui lui rendit son signe de tête. Les deux avaient dû beaucoup échanger, puisqu’il s’agissait précisément du domaine d’étude de David aujourd’hui.
- Je suis également dans l’obligation de vous faire quelques remarques et avertissements de vive voix, comme l’exige votre règlement. Il vous est interdit de pratiquer de la magie expérimentale sans mon aval ou celui d’un membre du ministère de la magie, après que lui ou moi ayons pris connaissance des théories de vos recherches. Vous connaissez les personnes à contacter directement. Sachez également que certains domaines, sans être interdits, sont tabous, et très déconseillés. Vous n’êtes interdits d’aucune recherche. Mais sachez tout de même vous tenir éloignés de la magie noire.
Une ombre passa dans ses yeux, mais elle se reprit bien vite. Elle devait avoir vu beaucoup d’horreurs lors de la guerre. Elle balaya du regard toute la salle :
- Vous êtes très nombreux, cette année, c’est une très bonne chose. J’espère que chacun d’entre vous saura pousser son art jusqu’au bout.
Elle s’inclina légèrement, et sans attendre de réponse, se retourna pour partir.
- Oh, au fait Mr. Wincher, dit-elle en se retournant vers Jules, l’ami dont je vous ai parlé m’a fait parvenir les livres dont il a hérité. Je vois que vos bibliothèques sont pleines, mais vous trouverez bien une place pour les ranger...
Jules se leva, et accompagna la directrice jusqu’au couloir pour discuter avec elle.
Vanille était étonnée. Cette femme, la directrice, lui avait toujours paru bien trop immature pour son poste, bien qu'elle-même n'ait aucune qualification pour juger une telle personne. Mais l'aura d'assurance, de sûreté qui s'était émané d'elle à ce moment-là, pendant son discours, l'avait décidément scotchée. Elle était donc le genre de sorcière capable de cacher son jeu, ou du moins, pour des raisons qui ne regardaient pas Vanille, capable de passer pour ce qu'elle n'était pas forcément. A savoir, une trop jeune sorcière que l'on avait placé à un poste trop haut.
Peut-être méritait-elle amplement son poste de directrice d'une grande école de magie. Les apparences étaient bien trompeuses.
Quand la directrice fut sortie, chacun se remit à ses occupations. Vanille et Lorelei avaient toutes les deux fini de lire les notes d’Oreste. Elle s’était surtout concentrée sur les baguettes elles-mêmes, leur composition et leurs propriétés. Elle avait répertorié toutes les informations connues sur les éléments qui les composaient, et s’était renseigné auprès de fabricants pour connaître l’art de la création de baguette. Bien sûr, ces recherches devaient rester entre elles, car les fabricants tenaient beaucoup aux secrets de leur artisanat.
Oreste n’avait pas cherché à savoir pourquoi les autres créatures magiques ne possédaient pas de baguette, ce que Vanille proposa vaguement d’étudier. Sans doute au fond d’elle-même ne voulait-elle pas avoir l’air de demander de l’aide à des créatures qui, depuis des siècles et sans que cela soit beaucoup remis en question, étaient considérées comme inférieures. Vanille cru voir une sorte de fierté sorcière quand elle aborda le sujet.
Les filles faisaient pour l’instant un travail de recherche. Tous les soirs ou presque, elles venaient au Club, parfois après avoir emprunté des livres à la bibliothèque qui n’étaient pas dans leur collection.
Elles expérimentèrent les utilisations de leurs baguettes. Sur la base de sortilèges simples, comme la lévitation, ou de petites métamorphoses, elles tentèrent de faire réagir leur baguette sans les toucher. Leurs résultats ne furent pas très concluants. Il leur fallait toucher la baguette pour parfois arriver à un résultat simple, mais il fallait la prendre en main pour exécuter avec précision le sortilège. Elles testèrent toutes les baguettes ; leur propres baguettes réagissaient normalement, les autres montraient des résultats moindres et changeant selon leur composition. Cependant, elles étaient plus efficaces avec Oreste.
- Comment expliques-tu la légitimité d’une baguette ? demanda vanille.
- Comment ça ?
- Si c’est une connexion entre la magie du sorcier et celle de la baguette qui fait la possession et l’accès au maximum des capacités du sorcier, comment expliques-tu que le fait de désarmer quelqu’un fait que l’allégeance de sa baguette se tourne vers toi ? Même si vos magies ne sont pas entièrement compatibles ?
Oreste se gratta le menton, embêtée.
- Je ne l’explique pas. Je ne crois simplement pas en la conscience des baguettes, je ne prétends pas avoir réponse à tout.
- C’est peut-être une autre forme de magie que la simple compatibilité, proposa Lorelei. Peut-être que notre magie, à l’intérieur de nous, fait que nous possédons ou pas une baguette. Un lien magique qui se crée, en plus du fait d’être compatible. Et qui serait accessible uniquement après un désarmement.
- C’est possible, mais ça ne va pas être facile à prouver.
- De toute façon, on ne pourra jamais vraiment comprendre la magie, fit Vanille.
Les deux autres se tournèrent vers elle.
- C’est vrai, comment voulez-vous qu’on sache un jour ce qu’est vraiment la magie ? On n’a pas de moyen de l’étudier, juste de la représenter, et encore. On l’utilise. On dit que c’est en nous, mais pas en d’autres, on ne sait pas pourquoi des moldus engendrent des sorciers, ni pourquoi les cracmols existent. Et est-ce que la magie est elle-même quelque chose que l’on peut considérer ? Est-ce que ça existe, ou est-ce qu’il s’agit juste de la manifestation d’autre chose ? De quelque chose de plus grand ? Est-ce qu’on pourra un jour voir de la magie, autrement que dans des représentations, ou des éclairs de lumière ? On ne sait pas non plus d’où ça vient. Si ça a toujours existé. Si on peut la créer, ou plutôt créer des sorts donc l’utiliser, est-ce qu’on peut la détruire ? L’annihiler ? Est-ce qu’on peut la transférer quelque part, sur quelqu’un ? Est-ce qu’on aura un jour les moyens de comprendre tout ça ? On ne sait rien au final.
La voix de Vanille s’était faite de plus en plus forte, au fur et à mesure qu’elle exprimait ses doutes. La salle était devenue silencieuse. Tous les membres la regardaient, tantôt amusés, tantôt songeurs, ils avaient tous écouté sa tirade. Quand elle se rendit compte de cela, elle baissa la tête et rougit. Oreste posa sa main sur son bras :
- Eh bien, dit-toi que tu viens de trouver ton domaine de recherche pour l’année prochaine… Sauf si tu veux que tout ça reste un mystère.
Gênée, Vanille ne répondit pas et se plongea dans un livre, espérant que tous passeraient à autre chose.
Les semaines passèrent ainsi. Oreste, Lorelei et Vanille recherchaient des informations, trouvèrent des théories, réfléchirent à haute voix. Elle avançaient par à-coup. Parfois, elles stagnaient sur la même idée pendant des jours, puis une nouvelle réflexion, un nouveau sujet arrivait et elle l’exploitaient à fond. Oreste voulait être sûr d’avoir cherché tous les recoins du domaine de la magie des baguettes avant de se lancer dans les études et expériences sans baguettes.
Mais Vanille ne se rendait plus vraiment compte de ce qui se passait autour d’elle. Elle ne pensait plus qu’à ses recherches au Club et à réussir en cours pour obtenir ses BUSEs. En dehors des moments dans le Club, elle passait de moins en mois de temps avec ses amis.
Elle continuait à parler avec Leanne et Ambre mais le soir, fatiguée, elle s'endormait souvent tôt. Au final, leur discussions se limitaient à se demander mutuellement comment avançaient leurs recherches respectives, et parfois des travaux de groupe pour leurs devoirs.
Mais la plupart du temps, dès qu'elle avait un moment de libre, elle allait dans la salle du Club, avec ou sans Oreste, et elle travaillait.
Les autres membres du Club ne se contentaient pas de faire de la théorie. Iris, Florent et Alexandre mijotaient des potions presque tous les soirs avec leurs Novices. Créer des potions ou des sortilèges était très différent des études que faisait Oreste.
Ceux qui créaient des potions devaient surtout connaître les propriétés magique de chaque ingrédient, leurs effets mis ensemble, les effets de la température ou de la façon de mélanger. Selon l’effet qu’ils cherchaient, ils modifiaient leur potion tous les jours, et devaient recommencer des dizaines et des dizaines de fois pour arriver à un résultat satisfaisant, s’ils y arrivaient.
Jules et Morgane, qui créaient des sortilèges, pratiquaient également tous les jours. La création de sortilèges n’impliquait pas de recommencer tous les jours la même chose jusqu’à réussir, mais surtout d’essayer encore et encore à avoir le moindre petit résultat. Et parfois, créer un sortilège par hasard n’était pas une grande réussite. Des sortilèges simples étaient créés régulièrement par des sorciers un peu aventureux. Là, il s’agissait de potions de soins ou de révélation magique, qui étaient des sorts complexes et précis.
C’était David qui faisait le plus de bruit, et bien qu’il soit constamment dans sa bulle insonorisée, certains sortilèges dépassaient cette limite et sifflaient aux oreilles des autres. Avec Ambre et Kerwan, ils se livraient régulièrement à des combats en duels. Parfois, pour tester de nouveaux sortilèges, ils s’attaquaient au pauvre mannequin en bois qui, malgré une animation magique, n’arrivait jamais à se défendre. Il était sans cesse réparé, mais gardait des séquelles de chaque nouveau sortilège. Ambre se sentait apparemment parfaitement à sa place. Parfois, Vanille l’observait quand elle se battait, et frissonnait à chaque sortilège manqué. Elle excellait dans les sortilèges de défense, elle en avait déjà inventé elle-même certains. Elle esquivait comme un chat se mouvait.
Ils ne faisaient jamais de duels entiers, ils avaient le club de duels pour s’entraîner à l’endurance, mais s’exerçaient dans leurs nouveaux sortilèges pour bien en comprendre les subtilités, et souvent trouver des contre-attaque avant même d’avoir totalement maîtrisé le sort. Ambre s’était inscrite au bout d’une semaine au club de duels, y ayant pris goût.
David était un batailleur, Ambre, quelques jours après leur arrivée au Club, avait raconté à Vanille qu’il était entré dans le club de duels pour canaliser son énergie, et dans le club des Créateurs pour être le meilleur aux duels. Il manquait souvent de subtilité dans ses réflexions et dans sa répartie, mais son côté rentre-dedans lui permettait de comprendre vite les sortilèges sans se soucier des détails et de pouvoir les modifier et en créer d’autres. Parfois, Ambre et Kerwan apportaient une nuance au sortilège plus subtile, moins grossière. Novices et Créateur formaient un groupe idéal.
Un soir, une explosion plus forte qu’à l’accoutumée retentit dans la salle, et tout le monde sursauta. Deux potions furent instantanément ratées.
Dans le coin des duels, un panache de fumée empêchait de voir ce qui se passait.
Vanille fut soudainement mal à l’aise. Elle se précipita dans la fumée, cherchant Ambre en tâtonnant. La fumée disparut d’un coup, un membre du Club avait trouvé la formule idéale, et Vanille vit ce qu’elle redoutait : Ambre était allongée au sol, les bras en croix, les yeux grand ouverts. Elle se précipita sur elle.
- Ambre!
Kerwan était assis près du mannequin et toussait, semblant reprendre connaissance. David était debout, la baguette à la main, face à Ambre. Il bégayait :
- Je n’ai… C’était...
Ambre ne bougeait pas. Malgré ses yeux ouverts, elle semblait inconsciente, ce qui mit les autres mal à l’aise. Vanille la secoua doucement pour la faire reprendre conscience.
Morgane se précipita sur Ambre dès qu’elle vit ce qui se passait. Elle passa plusieurs fois sa baguette au-dessus d’elle, invoquant plusieurs éclairs de couleurs différentes.
- Elle n’a rien de cassé, physiquement tout va bien. Elle respire normalement… Comme si elle dormait. On devrait l’emmener à l’infirmerie.
Debout derrière elle, David se rongeait les sangs :
- J’aurais dû tester plus de fois sur le mannequin, je ne sais pas ce qui m’a pris, on s’est emballés sur ce sort...
Il suivit Morgane, qui avait soulevé Ambre avec sa baguette, Jules, Vanille et Leanne jusqu’à l’infirmerie.
- Que faites-vous à cette heure là ? s’écria l’infirmière en sortant de son bureau dès qu’ils eurent poussé les portes. Il est neuf heures passées !
Elle vit Ambre flottant au milieu du groupe et la récupéra de sa baguette, elle la posa doucement sur un lit et commença à marmonner dans sa barbe.
- Je vous jure… Qu’est-ce qu’ils font… Il se passe tout le temps...
Elle appliqua plusieurs sortilèges rapides sur Ambre, qui ferma les yeux doucement.
- Vous ! dit-elle en pointant du doigt Jules. Allez chercher la directrice. Les autres, près de la porte.
- Est-ce qu’elle va bien ? supplia Leanne.
Vanille se tourna vers elle et remarqua soudainement qu’elle était en larmes. Elle posa sa main sur l’épaule de son amie, qui se dégagea vivement. Choquée, Vanille sentit une boule gonfler dans son ventre. Elle baissa la tête, sans comprendre pourquoi Leanne l’avait repoussée.
- Oui, Miss Pepper, votre amie va bien, malgré le fait que vous me l’ayez amenée dans un sale état en pleine nuit. Je ne veux pas savoir ce que vous faisiez, mais compte tenu de l’heure, je suppose que ce n’était pas autorisé. Maintenant, près de la porte, tous.
Ils s’exécutèrent en silence. L’infirmière n’était à l’évidence pas membre du Club, elle aurait vu les insignes. Elle les imaginait sûrement se battant en duels au milieu des couloirs bien après l’heure autorisée.
En attendant la directrice, pendant que l’infirmière s’agitait autour d’Ambre après avoir tiré les rideaux, Vanille regardait Leanne. Elle était certaine qu’Ambre se remettrait, c’était le rejet de Leanne qui la perturbait le plus. N’était-ce pas elle qui avait tout fait pour qu’elle soit accepté dans le Club ? Leanne devrait lui en être reconnaissante. Sans Vanille, elle n’aurait pas vécu ces moments au Club, elle serait restée seule presque tous les soirs dans le dortoir, elle n’aurait jamais pu créer de magie. Sa tristesse se transforma en amertume.
Jules revint avec la directrice. Elle ne semblait pas paniquée, elle alla directement voir Ambre et l’infirmière qui continuait de veiller.
Vanille les entendit discuter, mais ne comprit que quelques mots, comme “règlement”, “milieu de la nuit” et “autorisations”.
Enfin, ils entendirent la voix d’Ambre, et tous se dirigèrent vers le lit. Ils furent arrêtés en chemin par la directrice.
- Miss Grinlow s’en remettra. Elle passera la nuit à l’infirmerie. Puis-je discuter avec vous Mr Swey ? demanda-t-elle à David. Les autres, vous pouvez repartir. Comme d’habitude, je vous fait confiance pour vos horaires de coucher.
Tous s’exécutèrent, non sans jeter un dernier coup d’oeil à Ambre, qui était assise sur son lit et parlait d’une voix forte à l’infirmière.
Ils retournèrent au Club, sans un mot. Jules et Morgane ne semblaient pas choqués, mais Leanne avait toujours une mine renfrognée.
Vanille ne resta pas longtemps au Club, elle décida de retourner dans son dortoir, sans Leanne. Elle se coucha seule, médita quelques instants sur ce qui s’était passé, puis repensa à ses travaux.
Leanne arriva dans la dortoir peu après, et les deux filles s’ignorèrent.
End Notes:
Merci d'avoir lu !
Le prochain chapitre sera publié dans la semaine qui vient normalement. Je ne peux malheureusement pas être régulière pour l'instant, les ordinateurs et la wifi se font rares !
Un grand merci à ceux qui me lisent et pour les reviews ! Plein de bisous !
Un nouveau sortilège, un parchemin et une ébauche by Deanna
Author's Notes:
Un nouveau chapitre, un ! J'ai décidé de faire tourner mes chapitres autour de 3000 mots, le précédent était déjà plus long que la moyenne. Je n'ai pas eu de retour mais comme on dit, pas de nouvelle, bonne nouvelle !
J'ai été assez prise malheureusement ces derniers temps, et ça n'ira pas en s'arrangeant : je vais publier régulièrement cette semaine puis il y aura un laps de temps assez long. Donc pas de publication en aout, malheureusement.
Mais je l'ai promis (à vous comme à moi-même), je n'arrêterai pas cette fanfiction ! Elle me tient beaucoup à coeur. J'espère que je m'améliore au fil du temps.
Je tiens aussi compte des remarques que vous me faites, et je vais retoucher les défauts que vous m'avez signalés.
Anyway, bonne lecture à vous
Ambre les retrouva au petit-déjeuner le lendemain matin, en pleine forme et pas du tout choquée des événements de la veille. Au contraire, elle affirmait que c’était pour eux une grande avancée :
- Il y avait juste un peu trop de puissance, c’est un sortilège qui met les gens dans une sorte de transe, comme s’ils dormaient. Il est sensé être facile à contrer sans baguette, à annuler ou à atténuer, par la simple force de la pensée, de la concentration. Mais là on l’a poussé un peu… On va encore le modifier et on le soumettra avec les autres qu’on a inventés. J’ai même trouvé un sortilège informulé qui permet de le retourner contre le lanceur.
Après avoir rassuré ses camarade Novices et quelques Créateurs qui étaient venus s’enquérir de son état, Ambre fit un signe discret à Vanille, qui se pencha vers elle.
- On pourra se parler toutes les deux ? Tranquillement ? A midi par exemple.
Vanille acquiesça. Elle se demanda si Ambre comptait lui parler de Leanne, qui était devenue froide.
Plus que froide, Leanne ne répondait plus à Vanille. Elle ne répondait plus à grand monde d’ailleurs, Vanille se rendit compte ce matin-là qu’elle participait peu aux conversations générales, contrairement à ses habitudes. Elle l’avait en revanche entendue discuter avec les deux autres filles du dortoir la veille, alors qu’elles ne s’étaient jamais adressé la parole.
A midi, Ambre et Vanille se trouvèrent un coin du château isolé pour pouvoir discuter.
- Tu es sûre que tu n’as pas mal ? demanda Vanille, en regardant le front d’Ambre. Tu as toujours un bleu.
- Je suis tombée directement sur le sol en pierre, ça n’a rien à voir avec le sortilège. Ca a juste du mal à partir, je ne sais pas pourquoi. Mais je voulais parler de toi.
- Ah oui ?
- Oui.
La mine d’Ambre s’assombrit légèrement.
- Je te connais Vanille, et je sais que si tu avais remarqué ce qui se passe, tu aurais essayé d’arranger les choses. Mais là, clairement, tu ne te rends compte de rien, c’est pour ça que je ne t’en veux pas, que je t’en parle.
Vanille sentit une pointe de vexation avant même de comprendre de quoi il était question.
- Tu as changé, depuis qu’on est au Club. Tu es devenue plus… renfermée. Ce n’est pas que tu ne parles plus, c’est que tu ne parles plus que de toi. Tu parles du Club, de tes recherches, d’Oreste. Tu n’écoutes pas quand nous te parlons d’autre chose. Je sais que tu te souviens de ce que je t’ai dit sur David, sur nos sortilèges. Mais je suis sûre que tu ne te souviens pas quand j’ai essayé de te parler de Leanne. Ou de Jules. Tu ne t’en es peut-être pas rendu compte, mais tu as changé de sujet immédiatement.
- Bien sûr que je t’écoute quand tu parles, qu’est-ce que je fais, là ?
- Oui je sais, mais tu ne fais plus attention à ce qui se passe autour de toi.
Vanille ne répondit rien. Oui, le Club prenait une grande place dans sa vie, mais elle n’avait plus le temps de parler de choses futiles, de ragots ou autre. Elle préférait se concentrer sur ce qui était important.
- Vanille, tu es en train de perdre tes amis. Quand as-tu parlé à Octave ou Olivier pour la dernière fois ? A part en groupe ? Ou à Leanne, seule ? Ou à moi ? Si je n’avais pas eu cet accident hier, est-ce qu’on aurait pu discuter comme ça ? Tu n’aurais pas prétexté être pressée et devoir aller travailler ?
Vanille se leva d’un coup. Elle allait répliquer quand Ambre dit :
- Quand as-tu pour la dernière fois envoyé une lettre à ton frère ?
- Mon frère est parti à l’autre bout du monde, je n’ai aucun moyen de savoir où il est, coupa-t-elle, furieuse.
- C’est faux et tu le sais. Tu n’as même pas essayé. Tu sais très bien que les chouettes long-courrier retrouvent leur destinataires, surtout les moldus.
La phrase fit mouche, Vanille resta sans voix pendant un instant.
- Tu avais l’habitude d’envoyer des lettre à Tim toutes les semaines. Là, d’accord, il est loin. Mais tu peux continuer à lui parler.
- Je ne peux pas lui parler du Club.
- Si tu peux. Plus aucun sortilège ne l’exclut. S’ils nous font confiance, ce n’est pas parce qu’ils savent qu’on ne dira rien, c’est parce qu’ils savent qu’on ne le dira qu’à des personnes de confiance. Tu fais confiance à ton frère.
- Si tu sais tout mieux que moi, tu peux lui envoyer toi-même de mes nouvelles, grogna Vanille.
Elle partit sans se retourner, énervée.
D’abord Leanne qui refusait de voir ce qu’elle avait fait pour elle, qui refusait de comprendre que sans Vanille, elle n’aurait pas la chance d’être Novice au Club des Créateurs et maintenant Ambre qui l’accusait de “trop travailler”. Elle avait dans sa vie une chose passionnante, prenante, qui la forçait à travailler dur et à toujours s’améliorer, qui lui ouvrirait des portes, qui lui permettait de rencontrer des gens… Et c’était mal ? Ambre ne comprenait rien. Vanille commençait à avoir de l’ambition, elle voulait finir son année avec Oreste et ses baguettes, et ensuite se lancer dans les plus grandes recherches jamais faites : elle voulait savoir ce qu’était la magie, la vraie.
Vanille rumina cette conversation pendant des jours. Elle se plongea de plus en plus dans ses travaux, et à l’approche de Noël, elle commençait à accumuler des retards de devoirs. Ca n’allait pas. Elle devait apprendre à diviser son temps entre les deux, elle ne devait surtout pas rater ses BUSEs.
Oreste lui apprit qu’elle comptait rester à Poudlard à Noël. Vanille hésita. Rester deux semaines lui permettrait de rattraper tout son retard et de commencer à réviser pour les BUSEs. Elle n’avait pas envie de rentrer pour se retrouver seule face à sa mère. Rentrer sans voir son frère lui laisserait un sentiment de vide. Vide qu’elle ressentait déjà.
Ambre avait eu raison sur un point, elle l’avait délaissé pendant trop longtemps. Elle savait qu’il existait des chouettes long-courrier, qu’il serait facile à retrouver. Ce qu’elle ne savait pas vraiment, c’était pourquoi elle avait tant attendu avant de lui envoyer une lettre.
Peut-être avait-elle été plus affectée par son départ qu’elle ne le prétendait. Qu’elle ne se l’avouait.
Elle décida de lui écrire une longue lettre, pour tout lui raconter.
Elle lui expliqua ce qu’était le Club, pourquoi elle n’avait pas pu lui en parler avant. Elle détailla les recherches d’Oreste, tout en lui précisant qu’il devait garder ces informations pour lui. Elle lui raconta leurs avancées, les quelques sortilèges qu’elle avait déjà trouvé, ce qu’elles comptaient faire ensuite.
Elle lui parla d’Oreste et Lorelei, de Jules, d’Alexandre et de Nathan. Puis elle lui expliqua en quoi Ambre et Leanne avaient changé, et pourquoi leur relation n’était plus comme avant.
Elle lui avoua qu’elle s’était peut-être trop concentrée sur les recherches du Club, et qu’elle délaissait les cours, et que c’était la raison pour laquelle elle allait rester à Poudlard pour Noël. Que de toute façon, rentrer sans le voir n’aurait pas la même saveur.
Elle s’excusa également de ne pas avoir pris le temps de lui écrire avant. Il devait comprendre à quel point les recherches la passionnaient. Et elle lui avoua que le savoir aussi loin était difficile pour elle.
Enfin, elle lui demanda de ne rien dire de tout ça à ses parents.
Et elle en profita pour envoyer une lettre à sa mère. Prétexta devoir réviser pour ses BUSEs, sans lui avouer qu’elle aurait très bien pu le faire chez elle.
Elle saisit la première occasion pour aller à Pré-au-Lard et envoya une chouette long courrier. En la regardant s’envoler, elle se sentit libérée d’un poids.
Pendant les semaines qui suivirent et jusqu’à la fin des vacances, Vanille se concentra sur ses cours. Elle expliqua brièvement à Oreste qu’elle avait prit du retard, celle-ci ne vit pas d’inconvénient à moins la voir travailler avec elle. Elle pu ainsi, bien plus vite qu’elle ne l’avait pensé, rédiger tous ses devoir, annoter tous ses cours, et commencer à tout apprendre.
Puis elle passa Noël tranquillement, à Poudlard.
Quand les vacances furent finies, la salle des Créateurs où elle avait passé quelques soirées avec les membres restants se remplit de nouveau, et Vanille retrouva avec grand plaisir l’ambiance conviviale et studieuse du club. Les chaudrons bouillonnaient de nouveaux, les explosions du mannequin de bois reprirent, et Oreste présenta une nouvelle piste de recherche.
- Je pensais me mettre à la recherche d’un sortilège permettant de repérer le flux de magie lors d’un sortilège. J’en ai discuté avec Morgane, qui maîtrise la création de sortilège bien mieux que moi. Nous travaillerons ensemble.
En effet, Morgane et Octave vinrent les retrouver quelques jours plus tard, et ils s’installèrent à cinq sur une table plus grande.
- Je cherche à savoir comment passe la magie de moi à un objet, par la baguette. J’aimerais savoir l’effet de ma baguette dessus, si elle l’accélère, si elle la canalyse, ou si elle la crée en partie. J’ai donc besoin de pouvoir visualiser mon sortilège. Je me doute que ça sera compliqué…
- Pas si on se concentre sur un sort particulier, dit Morgane. Tous les sorts ne se valent pas. Par exemple, on sait facilement repérer les traces de magie noire. On n’aura pas besoin d’en arriver à ces extrêmes, il suffira de trouver un sortilège à tracer puissant mais sans effet dommageable. Ensuite, on se concentrera sur ce sortilège particulier et sur une façon de le représenter. Je n’ai jamais tenté de chose comme ça, ça promet d’être intéressant !
Ils se lancèrent ensemble à trouver un sortilège à analyser, ce qui n’était pas évident. Ils voulaient un sort qui ne soit pas facile à exécuter, qui demande une forte puissance magique, mais qui ne soit ni destructeur, ni en rapport avec la manipulation mentale.
- Pourquoi pas le sortilège du Patronus ? proposa Lorelei. Il est puissant, ça pourrait fonctionner.
- Il nous faudrait un sortilège qui agit sur un objet, pour pouvoir l’observer jusqu’au bout. Un Patronus est trop volatile pour être observé facilement.
Ils se décidèrent sur un sortilège de métamorphose qui impliquait de modifier la taille, la nature et la vivacité de l’objet, en essayant de le garder le plus longtemps possible. Morgane, qui était des cinq la meilleure en sortilège, transforma une feuille de parchemin en un immense bloc de pierre mouvant, comme un troll d’un mètre de hauteur. Elle réussit à tenir la métamorphose pendant quelques minutes, mais dû y mettre toute sa concentration.
Ensuite, ils se lancèrent dans des études de ce sortilège, qui était une forme légèrement différente d’un sort déjà existant.
Ces recherches leurs prirent plusieurs jours. Ensuite, sous la direction de Morgane, après avoir comprit toutes les ficelles du sortilège, ils réfléchirent à un moyen de le rendre visible, de le matérialiser pour l’observer. Ce fut la partie la plus difficile.
Vanille, Lorelei et Octave, les trois Novices, se rendirent compte qu’ils n’aidaient pas. Ils n’avaient jamais eu à créer de sortilège, ce domaine était rarement abordé en cours, et impliquait des connaissances de sixième année. Alors, pour ne pas faire perdre de temps dans des explications, ils décidèrent de les laisser travailler seules.
Vanille hésitait. Il lui fallait trouver quoi faire pendant ce “temps libre” au Club des Créateurs.
L’idée qui lui vint spontanément lui sembla alors évidente : elle commencerait ses propres recherches.
Elle s’installa sur une table vide de tout travaux, sortit un parchemin vierge et écrivit en en-tête : “La Magie : étude de ses origines et de sa nature.” Elle resta un instant en suspens, incertaine. C’était un titre bien ambitieux. Elle devait commencer plus petit, y aller pas à pas, quitte à faire un pas de côté, comme Oreste le lui avait appris. Tout comme l’étude de la magie sans baguette pouvait passer par l’étude d’un sortilège de métamorphose.
Elle raya son titre le remplaça par : “Les différentes manifestations de magie”. C’était un bon début.
Elle y regrouperait d’abord une grande partie des recherches d’Oreste. Elle pensait ensuite concilier toutes les manières qu’avait la Magie de s’exprimer : par les sortilèges bien sûr, principalement et de manière très diverse, mais aussi chez certains sorciers comme les métamorphomages, qui avaient des capacités magiques uniques, celles de modifier son apparence à volonté. Il y avait également les créatures magiques, qui étaient un vaste sujet à eux seuls.
Ses études commencèrent donc par une fouille méthodique des points qu’Oreste avait abordé dans son compte-rendu de recherche, qu’elle lui empruntait régulièrement, et des notes prises dans des livres de leur bibliothèque.
Elle prit plaisir à se plonger seule, en aveugle, dans les prémices de ce qui lui semblait être un projet bien trop aventureux, bien trop grand pour elle, simple sorcière de cinquième année. Elle trouvait de nouvelles idées à creuser régulièrement, ses notes commençaient à peine et reflétaient déjà ce qui serait sans doute l’intégralité de ses recherches sur la magie au Club des Créateurs : un sacré bordel.
Et un soir, une semaine après que les trois Novices se soient écartés du projet, Morgane et Oreste les firent revenir :
- Le sort est prêt. Oreste va le tester, Vanille, j’ai vu que tu t’étais entraînée pour une grosse métamorphose, tu lanceras le sort. Si ça ne fonctionne pas, j’essayerai.
Vanille ressentit une vague de fierté. Elle s’était en effet entraînée à métamorphoser de la façon la plus complexe possible des parchemins, plumes et autres petits objets, afin de pouvoir prendre la relève quand Morgane et Octave repartiraient de leur côté.
- D’accord.
- On se met en place.
Oreste mit le parchemin en évidence sur le sol, et prévint Vanille :
- Je vais lancer le sortilège juste avant toi. Il est informulé. Dès que tu te sentira prête, dit-moi, et attend quelques secondes pour lancer ton sort.
Vanille se positionna près du parchemin, et tendit sa baguette, déterminée.
- Je suis prête.
Elle attendit quelques instants, et lança son sortilège de métamorphose. En l’espace d’un instant, elle sentit dans son bras une sensation étonnante, l’impression que de l’eau tiède coulait de son épaule jusqu’à sa main. Elle vit une fumée, fine mais opaque, blanche, lui parcourir le bras et descendre jusqu’à sa main. Là, tout disparut dans la baguette, et réapparu à son extrémité, puis partit dans le parchemin comme un jet d’eau qui jaillissait d’un tuyau d’arrosage. Le parchemin, dès qu’il fut touché par la fumée, se transforma en un pantin de pierre grossier, volumineux et mouvant. La transformation s’acheva au moment où le dernier panache de fumée le pénétra.
Tout cela n'avait duré qu'une seconde.
Vanille ne s'était pas attendu à ça, et elle lâcha l’enchantement presque immédiatement.
- Ca a marché ? demanda-t-elle. C’était ça, le sortilège ?
- Oui, affirma Morgane. Maintenant, à vous de comprendre ce qui s’est passé, c’est votre recherche.
Elles échangèrent encore quelques informations avec Oreste, puis Morgane et Octave repartirent à leurs propres travaux.
- Je ne m’attendais pas à ça, avoua Lorelei. Qu’est-ce que ça nous a prouvé, à part que ce sortilège sort bien du sorcier qui le lance ?
- Peut-être rien, avoua Oreste. Mais on va recommencer, et on va continuer de chercher. Je veux savoir à quoi sert la baguette dans ce processus.
Elle s’aperçut que ses deux Novices étaient un peu désapointées.
- C’est une avancée, n’en doutez pas ! Et puis si on perfectionne ce sortilège, on pourra lui trouver beaucoup d’utilités, j’en suis sûre.
Les deux autres acquiescèrent et elles se remirent au travail.
Et en effet, à partir de ce moment-là, elle avancèrent vite dans leurs recherches. En modifiant et améliorant le sort, ce qu’elles purent faire à trois maintenant que Lorelei et Vanille connaissaient les bases, elles firent plusieurs expériences et arrivèrent à différentes conclusions.
Elles tentèrent de lancer le sortilège sans baguette après avoir subit le sortilège de révélation, répétèrent plusieurs fois ce fameux sortilège de métamorphose à haute voix, tentant de le réaliser. Des fines apparitions de fumée opaque s’émanaient parfois d’elles à leur invocations.
Elle conclurent que les sortilèges, enchantements et métamorphoses prenaient leur sources au coeur du sorcier. Sans baguette, ils ne pouvaient pas sortir convenablement. Ils restaient bloqués, et disparaissaient dans l’air.
La baguette canalisait le sort. Elle permettait de viser l’objet. Et selon la baguette, le sortilège pouvait se révéler de différentes manières. L’opacité, la couleur, la fluidité de la fumée qui reflétait le sortilège changeait selon la baguette, et selon le sorcier. Elles purent remarquer des relations entre cette fumée et l’efficacité du sortilège, et cela ne les étonna pas.
En revanche, si le sorcier ne voyait pas l’objet, et s’il ne savait pas où il était, le sortilège avait moins de chance de fonctionner. Elles tentèrent de lancer le sort avec les yeux bandés, mais dirigeant tout de même leur baguette vers le parchemin. La fumée était bien moins précise, bien plus hésitante, et s’évanouissait souvent avant d’arriver au parchemin. C’était donc le sorcier qui dirigeait le sort, pas seulement en visant avec sa baguette, mais aussi avec sa propre concentration.
Ces avancées enthousiasmaient grandement les Novices et Oreste. Même si elles ne voyaient pas encore le bout, elles savaient que ce qu’elle faisaient aurait un sens lorsqu’elle réussiraient à faire de la magie sans baguette. Car elle allaient réussir, elles commençaient toutes les trois à le sentir au plus profond de leurs tripes.
End Notes:
J'espère que ça vous a plu, merci d'avoir lu !
Les manifestations spontanées d'enfants magiques by Deanna
Author's Notes:
Allez hop, l'écriture avance plus vite que la publication je vais rattraper mon coup en publiant plusieurs chapitres dans la semaine. Après ça, il y aura une grande pause, indépendante de ma volonté.
Chapitre relationnel aujourd'hui. Ce ne sont pas les plus marrants, mais certaines choses doivent être faites, d'autres doivent être dites.
Bonne lecture !
Vanille réussit à prendre un rythme de travail qui conciliait à la fois les cours, les révisions, et le Club. Elle se sentait parfaitement en accord avec elle-même, et avec ce qu’elle faisait. Tout allait bien, si on omettait le seul point noir du tableau, Ambre et Leanne ne lui parlaient plus.
Elle s’y était habituée, se laissant dire qu’elle n’avait pas le temps de régler des querelles idiotes.
C’est avec étonnement qu’un jour, dans la salle commune de Serdaigle, Vanille vit Leanne s’approcher d’elle, et s’asseoir à la table où elle travaillait. Elle la regarda droit dans les yeux, attendant son attention.
Au début, Vanille fit semblant de l'ignorer. Elle était concentrée sur son devoir et ne comptait pas le lâcher avant d’en avoir fini. Mais après plusieurs minutes de silence, pendant lesquels Leanne ne sembla pas vouloir s’introduire plus dans sa sphère d’intimité,Vanille se demanda laquelle des deux était plus plus ridicule, celle qui s'assoit sans rien dire en attendant de l’attention, ou celle qui fait semblant de ne rien voir pour ne pas en donner.
Elle posa un point sur son parchemin, essaya de mémoriser à quelle idée elle s’était arrêtée de rédiger, et enfin, daigna lever les yeux.
Cela faisait longtemps qu’elles ne s’étaient pas retrouvées assises ainsi, l’une face à l’autre. Vanille prit conscience à ce moment-là de l’éloignement qui s’était opéré avec son amie, et du coût de cette absence. Cette pensée la traversa en un instant.
L’idée même d’être en querelle avec Leanne lui sembla ridicule. Qu’importe le début des hostilités, si c’était l’une ou l’autre qui avait initié le conflit. Vanille ressentit à ce moment un élan envers son amie, une envie, un besoin de partager avec elle, de retrouver ce qu’elles avaient perdu.
Elles se regardèrent ainsi pendant plusieurs secondes. Vanille savait à présent qu’on pouvait deviner à quoi elle pensait, juste en observant ses yeux. En revanche, elle n’arrivait pas à lire en Leanne autre chose que… de la tristesse.
- Si tu as un instant à m’accorder, je voudrais te parler de quelque chose.
- Bien sûr que j’ai le temps de …
- Je sais que c’est difficile pour toi de daigner offrir de ton temps à quelqu’un d’autre qu’à Oreste en ce moment, alors je vais faire court.
Vanille fronça les sourcils, de la jalousie ?
- Je quitte le Club des Créateurs.
Ses sourcils firent demi-tour et allèrent se loger dans le haut de son crâne.
- Tu quoi ?
- Je vais partir. On m’a dit de te prévenir. Pour que tu n’accuses personne de m’avoir virée.
Vanille repoussa ses plumes, parchemins et encriers sur le côté pour pouvoir se pencher en avant, se rapprocher de Leanne :
- Mais pourquoi ? murmura-t-elle.
Leanne hésita.
- Je ne pensais pas que ça t’intéresserait. Je ne me sens simplement pas à ma place.
- Tu n’apprécies pas de créer des sortilèges ?
- Ce n’est pas ça. Je ne me sens pas à ma place dans ce club. Et puis, peut-être qu’ils avaient raison, la première fois, de me refuser.
- Tu as su pourquoi, finalement ?
- Oui. Jules m’a tout expliqué.
- Et même…
- Même le fait que tu aies insisté pour que je sois acceptée. Je sens bien que tu attends des remerciements de ma part à ce propos, mais ça serait un peu déplacé maintenant que tu sais que tu as fait cela pour rien.
- Pas pour rien…
- Si. Je vais partir et oublier le club, oublier d’avoir été Novice, oublier d’avoir eu la possibilité de créer des sortilèges. Je vais aussi oublier pourquoi je t’en veux, et je vais sûrement revenir vers toi en me demandant pourquoi on ne se parle pas beaucoup en ce moment. J’en profite alors pour te dire que oui, Vanille, je t’en veux. Tu as été pendant longtemps mon amie, je te considérais comme quelqu’un sur qui je pouvais compter, quelqu’un de fondamentalement généreux et loin de toute méchanceté. Mais tu m’as montré que tu pouvais aussi délaisser tous ceux qui comptaient pour toi, et pour qui tu comptais, juste pour pouvoir faire partie d’un club, pour pouvoir te prouver à toi-même et aux autres que tu étais la meilleure. J’ai même eu l’impression que c’est aussi pour avoir un statut social élevé. Je te rassure tout de suite, Vanille. Tu as toutes tes chances pour devenir Maître Créatrice, dans deux ans.
Vanille reçu ces paroles comme une douche froide, et Leanne la laissa là, sans lui donner la possibilité de répondre. Elle lui tourna le dos sans lui accorder un regard, et sortit de la salle commune. Ce fut la dernière fois qu’elle parla du Club des Créateurs.
Ebranlée de cette discussion, Vanille n’arriva pas à se replonger dans son devoir. Elle tenta tant bien que mal de noter dans un coin toutes les idées qu’elle aurait aimé rédiger, puis s’enquit de ranger ses affaires dans son sac pour aller au Club. Et pour une fois, elle n’avait pas vraiment envie d’y aller.
Elle était encore hésitante, la main sur son sac et les yeux dans le vide, quand quelqu’un s’assit sur la chaise en face d’elle. Ambre affichait une mine sombre.
- Leanne m’a dit qu’elle t’avait mise au courant de sa décision.
Vanille hocha la tête.
- Elle m’a demandé de ne pas la laisser retrouver vers toi trop vite quand elle aura perdu la mémoire.
Cette fois, elle ressentit comme un coup de couteau dans son ventre.
- Je ne pense pas que tu mérites ça. On ne t’a pas laissé la chance de t’expliquer, ni elle ni moi n’avons pris le temps de venir te voir et te faire comprendre que tu étais en train de changer. Après tout, jusqu’à aujourd’hui, si tu étais notre amie c’est bien parce que nous t’aimons et que tu es quelqu’un de bien.
Vanille n’aimait pas la tournure que prenait la discussion.
- Mais je crois aussi que Leanne a reposé toute la faute de son mal-être de ces dernières semaines sur toi, parce qu’elle ne voyait pas d’autre coupable. Après tout, sans toi, elle aurait été tranquille à partir du moment où elle a oublié le club.
- Pardon d’avoir estimé qu’elle méritait sa place dans le club !
- Ce n’est pas à moi que tu dois dire ça, et ce n’est pas à moi de te dire ce que tu aurais dû faire ou ne pas faire. Après tout, tu pensais ne pensais pas à mal. Seulement, ça a raté de son côté, et maintenant elle se voit obligée de subir un Oubliette bien plus conséquent, en sachant qu’elle est magiquement liée au club, et qu’elle a déjà subit une première fois le sort. L’Oubliator va devoir être très consciencieux.
- Mais… elle allait si mal que ça ?
Vanille commença - enfin - à s’inquiéter de son amie. Ambre soupira.
- Je pense que maintenant, elle ne m’en voudra pas de te le dire. Depuis le début, elle se demandait pourquoi le club l’avait refusée. Quand Jules le lui a expliqué, il lui a dit qu’il pensait que son désir d’être forte et reconnue n’était que pour ses parents, ça lui a ouvert les yeux sur beaucoup de choses. Elle a sentit qu’elle n’avait pas sa place dans le club, qu’elle ne le souhaitait pas autant que les autres, qu’ils avaient eu raison et mis le doigt sur quelque chose d’important sur elle. On lui avait déjà dit la vérité sur ses parents toi et moi, mais il a fallu qu’un groupe de personnes qui ne la connaissait pas vienne lui mettre le nez dedans pour qu’elle l’admette. Bref. Il y a eu ça, et puis… disons que ça ne se passait pas très bien avec Jules. Elle n’a pas voulu m’expliquer précisément, mais elle ne se sentait pas à l’aise avec lui. Apparemment, il ne se comporte pas toujours comme on le voit en public, souriant, avenant… Je n’ai pas vraiment compris, elle n’a pas voulu entrer dans les détails, je pense que c’était surtout un ressenti plus que des agissement étrange. Je crois qu’il doit être un peu… manipulateur. Il doit sûrement faire d’autres recherches que ce qu’il fait quand tout le monde est là. En tout cas, ça plus ses doutes sur son envie de faire partie du club, elle a finit par craquer.
Ambre plongea ses yeux dans ceux de Vanille.
- Tu sais, on en a souvent parlé elle et moi. Et toi qui t’éloignais toujours plus, tu ne parlais que de toi, de tes recherches, de la magie, les rares fois où tu nous adressais la parole. On sentait que tu ne voulais pas perdre de temps à parler de sujets comme le relationnel, les problèmes d’insertion, le malaise… Et critiquer le club, ça aurait été difficile pour toi de l’entendre. Mais peut-être qu’aujourd’hui, ça va changer. On verra quand Leanne reviendra.
Elle se leva.
- Tu fais ce que tu veux, de toute façon. Si tu préfères consacrer ton temps à tes études et au club, libre à toi. Après tout, celle qui avait le plus besoin de toi a réglé ses problèmes sans toi.
Et elle s’en alla. Pour la seconde fois en une heure, Vanille s’était pris une douche froide. Il était peut-être temps de revoir ses agissements… Ou ses amitiés.
Le lendemain matin, en se préparant, Vanille ne put s'empêcher de lancer des regards à Leanne. Celle-ci était en train de chercher des affaires dans sa valise quand elle se stoppa d'un coup.
- Les filles ? Murmura-t-elle.
Ambre sorti la tête de la salle de bain, sa brosse à dent dans la bouche, et Vanille s'arrêta en plein boutonnage de robe.
- Vous ne trouvez pas qu'on... enfin...
Elle chercha ses mots. Vanille retenait sa respiration.
- Qu'on s'est un peu éloignées ces derniers mois ?
Ambre lança un regard appuyé à Vanille avant de reprendre son brossage de dents.
Vanille soupira doucement. C'était le moment ou jamais de renouer avec Leanne. Ses amies avaient eu raison de lui en vouloir, mais... Mais rien du tout. Leanne lui manquait. Ce n'est pas quand on perd quelque chose qu'on se rend compte de ce qu'il représente, mais bien quand on le retrouve.
Leanne s'était levé et regardait Vanille qui faisait tourner son bouton de robe autour du trou sans y arriver, la tête bien ailleurs.
- J'ai l'impression d'avoir... d'avoir passé des semaines dans le brouillard. Je me suis peut-être... peut-être trop concentrée sur les cours. J'avais vraiment peur de... d'échouer et... Oh !
Vanille s'était précipitée dans les bras de son amie.
- Dit pas n'importe quoi !
Elle se séparèrent.
- On ne s'éloigne pas. Même si on passe parfois des moments sans se parler. C'est ça l’amitié ! On peut passer des jours, des semaines, des mois sans se parler mais rien n'a changé, et on peut tout reprendre là où on l’a laissé.
Vanille se dégoûtait un peu de jouer la comédie. Mais tout lui raconter ne servirait à rien, sinon à lui faire du mal. Et surtout elle tournerait en boucle.
Leanne sembla satisfaite et les filles reprirent leur préparation. En sortant du dortoir, Ambre regarda Vanille droit dans les yeux. Son regard, profond, semblait à la fois être satisfait et un peu désaprobateur. Les deux filles ne se dirent rien. Vanille ne regrettait pas d'avoir agit ainsi. Si Ambre lui en voulait, elle irait raconter elle-même à Leanne la vérité. Mais elle ne le ferait pas. Elle allait rarement à l'encontre des choix des autres, quand ça ne la regardait pas.
Le soir, au Club, personne n'évoqua l'absence de Leanne. Jules se mit à travailler seul, ce qui ne semblait pas le déranger.
Vanille et Lorelei continuaient leurs travaux avec Oreste. Après avec retourné leur sortilège d'analyse dans tous les sens, elles arrivèrent à plusieurs conclusions.
- On récapitule, dit Oreste, une plume dans la bouche, après avoir réessayé plusieurs version du sortilège sur chacune des baguettes qu'elle possédait.
Lorelei prit ses notes.
- Le sortilège prend forme dans le sorcier, et non dans la baguette.
- Sans la baguette, le sortilège ne fonctionne pas...
- Mais il arrive qu'on puisse l'observer quand même, sur le sorcier.
En effet, les trois filles purent observer pendant une demi-seconde leur sortilège ayant prit forme sortir de la poitrine d'Oreste, comme un flash. Il n'avait eu aucun effet.
- Il sort du coeur. J'aurais pensé qu'il sortirait plutôt du centre de gravité, vers le nombril, mais ça ne change rien, marmonna Oreste.
Lorelei et Vanille se regardèrent, puis haussèrent les épaules, Oreste lançait souvent ainsi des idées sorties de nulle part.
- En sortant du sorcier, le sortilège a toujours la même forme à chaque fois qu’il le lance.
- Mais quand il passe dans la baguette, il en ressort différemment.
- Plus dense, plus rapide, ou au contraire plus doux.
- Et ce en fonction de la baguette et de ses propriétés.
Elles avaient comparé les résultats de chaque baguette avec leur composition, et avaient fait des observations intéressantes. La baguette en cerisier, bois réputé pour sa dangerosité, accentua le sort qui en ressorti dense et foudroyant, métamorphosant de façon brutale et vive. La baguette en bois de charme quant à elle fit ressortir le sortilège de manière élégante et douce, et le sortilège fut, bien que puissant, beaucoup plus raffiné.
- La baguette modifie le sort, elle modifie la magie qui la traverse. Elle ne fait donc pas que la canaliser.
- Le sortilège qui sort du sorcier est donc en quelque sorte « brut », et la baguette le modifie, l'adapte, en le canalisant dans une direction, conclut Vanille.
Les deux autres hochèrent la tête.
- Il faut qu'on avance de ce côté-là. Du côté du sortilège sans baguette. Maintenant qu'on sait qu'il sort du sorcier – et qu'on a vu ce qui s'est passé quand j'ai voulu lancer le sort sans baguette, il faut qu'on parte là-dessus.
Vanille bailla : il était tard, mais elle n'avait pas cours le lendemain.
- Voilà ce que je vous propose, leur dit Oreste. Je vais tenter de créer un sortilège pour révéler de la magie, mais sur quelque chose qui se fait déjà sans baguette.
- Comme quoi ? Demanda Lorelei.
- Je ne sais pas encore. Peut-être le transplanage, mais c'est compliqué parce qu'on ne peut pas transplaner ici. Et on ne peut rien analyser si on bouge sans arrêt. Je trouverai quelque chose et je chercherai à le mettre en évidence. De votre côté, si vous voulez bien, j'aimerais vous demander de faire vos propres recherches sur un autre sujet.
Elle sortit des notes. Vanille regarda une des feuille : c'était une série d’une dizaine de noms.
- Qui est-ce ?
- Ce sont des enfants. Des familles que je connais et qui ont accepté de m'aider dans mes recherches. Je voudrais que vous vous penchiez sur la magie spontanée des jeunes sorciers.
Elles n'avaient jamais évoqué le sujet, mais maintenant, Vanille se dit que c'était une effet une bonne piste à creuser. Les enfants sorcier faisaient souvent des manifestations spontanées de magie, sans baguette évidemment.
- Comment tu veux qu'on analyse des enfants qui ne contrôlent pas leur magie ? Demanda Lorelei.
- Pour l'instant demandez-leur juste des témoignages, avec le plus de précision possible, sur les ressentis de l'enfant, son état de santé, ses émotions, des choses comme ça. Et puis, il doit y avoir des informations dans des livres aussi, enfin j'espère. Je vous laisse faire vos recherches. Si vous trouvez d'autres pistes, n'hésitez pas.
Elle rangea ses affaires.
- On se retrouve d'ici quelques jours pour faire le point ? Même si on se recroisera ici, histoire d'avancer le plus possible chacune de notre côté.
Les deux Novices acquiescèrent.
Lorelei partit avec Oreste mais Vanille, profitant du fait de ne pas avoir cours le lendemain matin, resta dans la salle du Club pour commencer ses recherches.
Elle fit de la place sur une des tables et entreprit de trouver chaque livre qui pourrait lui apporter quelque chose.
Les autres membres du Club partaient au fur et à mesure. Certains lui adressèrent des petits signes d'encouragement. Vers neuf heures, Vanille vit Enguerrand, le Novice de Serpentard, lui faire un vague signe de la main en sortant. Il était seul, ce qui signifiait que...
- Bonsoir, jeune demoiselle, dit Alexandre en s'asseyant sur une chaise près de Vanille.
Elle leva les yeux vers lui, un peu étonnée.
- Tu n'es pas obligée de travailler aussi tard. Est-ce qu'il faut que j'aille taper sur les doigts d'Oreste de te faire faire des recherches jusqu'à tard dans la nuit ?
Vanille allait protester quand elle se rendit compte par le sourire de son interlocuteur qu'il plaisantait. Il avait un sourire magnifique, sincère. Elle se surpris à le regarder dans les yeux, et s'aperçut qu'il n'y avait plus aucune froideur. Le regard assassin qu'il lui avait lancé au début de l'année n'était plus qu'un souvenir.
Elle le trouva bien plus beau.
« Le livre ouvert, Vanille, le livre ouvert », se dit-elle soudain en replongeant le nez dans son livre. Elle rougit sans rien dire. « Ridicule. »
- Sur quoi tu travailles ? demanda Alexandre d'une voix lente.
Grave, profonde, hypnotisante. Ce garçon maîtrisait parfaitement sa voix. Vanille fit les gros yeux, le visage toujours tourné vers son livre. Il la draguait ouvertement... Ou alors elle se faisait des films.
- Sur les manifestations spontanées d'enfants magiques... débita-t-elle très vite.
Il haussa les sourcils.
- Heu... Hm. Les manifestations de magie, je veux dire, reprit-elle plus lentement, se sentant rougissante. Celles des enfants. Quand ils s'envolent ou font pousser leurs cheveux.
- Oh je vois, fit-il, apparemment amusé de la voir si mal à l'aise (elle sentait une chaleur intense sortir de son crâne). Parce qu'ils font de la magie sans baguette.
- C'est ça.
Vanille essaya discrètement de respirer profondément pour se calmer.
- Est-ce que je te mets mal à l'aise ?
Elle vit qu'il n'y avait étonnamment pas de sarcasme dans sa remarque. Il semblait véritablement étonné, voir embêté.
Elle décida de jouer la carte du culot, celle qui dit « je fais semblant de ne pas être mal à l'aise, comme ça, j'arrêterai peut-être au moins de rougir ».
- Oui. Je ne sais jamais comment me comporter avec toi, une fois tu me détestes, une fois tu m'encourages, et là tu me parles comme si de rien n'était. Alors qu'on n'a jamais discuté. J'ai l'impression que tu m'as détesté de base alors qu'on ne se connaissait même pas. Du coup là, oui, je suis complètement perdue et mal à l'aise parce que je ne sais pas ce que tu veux.
Etonnée de son courage, elle prit un air assuré et le fixa sans ciller. Sa jambe était secouée de spasmes.
Alors il lui tendit la main.
- Alexandre Legrand, sixième année, Jeune Créateur. Enchanté.
Vanille lui prit la main prudemment.
- Heu… Vanille Ocean... cinquième année, Novice.
- Alors Vanille, dit-il en croisant les bras et en s'affalant sur sa chaise, nonchalant, est-ce que tu te plais au Club ?
- Oh, heu... oui.
Alexandre prit son carnet de notes et commença à lire en diagonale. Vanille n'avait pas très envie qu'il lise toutes ses notes, Oreste n'apprécierait peut-être pas.
- Est-ce que tu pourrais... commença-t-elle en tendant la main.
- Oh pardon ! (il referma le carnet et le lui tendit), je voulais juste voir comment tu prenais tes notes. Tu as l'air très organisée, dit-il avec un clin d'oeil.
- Merci, souffla-t-elle.
Il se leva.
- Je pense que je te dérange. Que dirais-tu d'aller faire un tour du parc demain avec moi ?
- Hein ? Pourquoi ?
Vanille avait lâchés ces mots sans réfléchir. « Il te drague Vanille, voilà pourquoi. » « Merci de te réveiller maintenant, cerveau stupide »
- Je veux dire... J'ai beaucoup de devoirs à rattraper.
Piètre mensonge, mais efficace.
- Je vois, dit-il en baissant les yeux, feignant la déception. Alors, la prochaine fois peut-être. On pourra peut-être fait un peu mieux connaissance.
Il hésita.
- Je crois qu'on est partis sur de mauvaises bases toi et moi. Mais j'aimerais vraiment apprendre à te connaître, Vanille. Belle nuit à toi.
- Bonne nuit... souffla-t-elle, tandis qu'il sortait de la salle.
End Notes:
Merci pour les super reviews que vous me laissez : ça me fait super plaisir et surtout ça me donne une méga-motivation pour m'améliorer.
Bisous à tous !
Repousse de cheveux s'abstenir by Deanna
Author's Notes:
Bonjour bonjour ! Un nouveau chapitre, un. Je fais un peu avancer des choses de tous les côtés, j'espère ne pas vous perdre :)
Bonne lecture !
Quand il eu refermée la porte, son cerveau se ralluma enfin entièrement.
« C'est quoi mon problème ! Pourquoi je me laisse draguer par cet espèce de... ce... Prétencieux ! J'y crois pas d'être autant influençable. Juste parce qu'il est pas moche !
« Il n'est pas « pas moche », il est super beau.
« Peut-être, mais insuportablement sûr de lui. Et n’oublie pas comment il te toisait au début d’année.
« Justement ça serait l'occasion de lui demander pourquoi.
« Sauf si je perds complètement mes moyens. Pourquoi je perds mes moyens ?
« Parce qu'il est carrément à ton goût ?
« Argh... Prise au piège par mes stupides hormones. C’est stupide.
Vanille bougonna de s'être laissée embarquée dans ce « plan drague » à trois sous et se replongea corps et âme dans ses livres, pour se changer les idées.
Pendant une heure, elle feuilleta, nota des informations, trébucha sur un livre et somnola même quelques instants. En réalité, elle n’était pas très productive et copiait souvent deux fois les mêmes informations.
Puis un bruit se fit entendre dans la salle, un bruit de chaise raclée au sol qui la fit sursauter et faire tomber une pile de livre posée en équilibre précaire sur le sol. Elle pensait être seule depuis longtemps. Mais, caché derrière ladite pile, Nathan était assis sur la même chaise où était Alexandre.
Vanille sursauta de plus belle en se rendant compte de sa présence.
- Qu'est-ce que tu fais là ?
Rien que son apparition était énervante.
- J'aimerais discuter avec toi.
“C’est ma soirée.” Elle observa Nathan qui avait toujours cet air triste et fatigué, et se souvint de ce qu'il était capable de faire.
- Tu vas lire dans ma tête et me faire me rappeller que je te dois de l'argent ou quelque chose comme ça ?
- Ne sois pas si vexée, murmura Nathan, en fronçant les sourcils, je ne fais rien de mal.
- Tes pouvoirs sont bizarres ! Tu...
Vanille fit une connexion dans sa tête. Oreste cherchait de la magie sans baguette. Nathan exerçait un genre de... pouvoir spécial, sans baguette.
- Hors de question que je sois ton cobaye.
- De toute façon tu m'énerverais trop à lire dans mes pensées ! bougonna Vanille en se tournant vers son parchemin.
Il resta silencieux. Vanille décidé de l'ignorer, et espérait qu'il finisse par partir. Le présence de ce garçon la mettait mal à l'aise.
Ce n'était pas le même genre d'inconfort qu'avec Alexandre. Ce n'était pas un d'être avec quelqu'un d'impressionnant, de plus âgé et plus beau, quelqu'un qui avait l'air mystérieux et semblait s'intéresser à elle d'une façon bien étrange. Non, c'était un malaise différent. Presque viscéral. Comme si chaque fibre de son être lui disait de rester éloignée de lui, de Nathan. Comme s'il était capable de lui faire du mal, consciemment, mentalement, et qu'elle ne pouvait rien faire pour s'en protéger.
- Tu ne m'aimes pas.
Décidée à l'ignorer, Vanille ne répondit pas, confirmant sans le vouloir.
- J'aimerais quand même te parler.
- Mais pourquoi ? lâcha Vanille.
Elle ferma les yeux, agacée de ne pas réussir à simplement l'ignorer. Tant pis, se dit-elle, autant aller à la confrontation.
- Pourquoi tu tiens tant à me parler ? Je me fous de ce que tu veux me dire. Tu... Tu me fais peur, voilà. Tu es bizarre. Tu débarques d'un coup et tu me dis des choses étranges, puis tu t'en vas. On dirait...
- Je ne fais pas ça pour t'impressionner tu sais.
- Quoi « ça » ? Apparaître d'un coup, parler de façon mystérieuse, manipuler l'esprit des personnes autour de toi ?
- En fait, pour tout te dire, je ne contrôle pas forcément.
Vanille fit les gros yeux. Il se confiait maintenant ? Alors qu'elle essayait de l'envoyer balader ?
- Il y a des choses que je sais, que je sens. Et ça me semble assez important de t'en parler.
- Assez important ?
- Parce que ça te concerne et parce que certaines... conséquences pourraient être graves.
- Si je t'écoute tu me laisseras tranquille ?
- Jusqu'à ce que j'ai autre chose à te dire.
Résignée, elle abdiqua et lui offrit le sourire le plus faux qu’elle avait en réserve.
- Que veux-tu donc me dire, Nathan ?
- Tu vas me détester, murmura-t-il amusé. J'aimerais te dire, continua-t-il avant qu'elle ne puisse répliquer, de faire attention à tes fréquentations. Certaines personnes ne sont pas ce qu'elles semblent. Il se passe des choses au Club, et tu n'as pas l'air très... perspicace pour comprendre les gens qui t'entourent. Fais attention. Et garde tes amies.
Il se leva et partit, laissant Vanille éberluée de ce qu'elle venait d'entendre.
- J'ai au moins compris que tu étais un crétin ! s'écria-t-elle alors qu'il venait de refermer la porte.
Impossible après ça de se remettre à ses recherches, déjà peu efficaces.
Le mois de mars passa à une vitesse folle.
Vanille avait réussit à ne pas s'embourber dans sa masse de devoirs à rendre et arrivait même à réviser pour ses BUSEs, à renouer des liens – assez bancals mais c'était déjà ça – avec Leanne, en plus à aller un soir sur deux au Club des Créateurs.
Malheureusement, les recherches d'Oreste étaient au point mort.
Elle n'arrivait pas à trouver de sortilège à créer, ni à analyser. Elle n’y arrivait plus et entra dans une spirale infernale : elle n’avançait pas dans ses recherches, tentait de trouver une autre voie, revenait toujours au sortilège, qu’elle n’arrivait pas à créer, pas même à imaginer, donc elle n’avançait pas. Un soir, à bout, elle laissa le stress l'envahir, tandis que Lorelei et Vanille essayaient de la faire relativiser.
- Tu nous l'as dit toi-même, les recherches prennent du temps. Et parfois elle n'aboutissent même pas ! affirma Vanille.
Lorelei lui jeta un regard désespéré.
- Ce n'est pas forcément ce qu'il fallait dire, murmura-t-elle.
- Non, elle a raison, et ça me tue ! Cette recherche, c'est toute ma vie.
- Tu n'exagères pas un peu ?
- Non ! J'ai rencontré des personnes du ministère il y a quelques mois, quand j'avançais bien, et ils m'ont – presque – dit que si mes recherches étaient concluantes, elles seraient un sésame pour travailler au Département des Mystères.
En effet, elle avait mis la barre bien haut.
- Peut-être devrais-tu prendre une pause ? Penser à autre choses. A tes ASPICs par exemple, proposa Vanille.
Lorelei lança un second regard désespéré.
- Mais quoi ?
- Arrête d'essayer de donner des conseils, coupa Lorelei. Oreste, quand partez-vous pour les Etats-Unis ?
- Qui part aux Etats-Unis ?
Cette fois, même Oreste lança un regard désespéré à Vanille.
- On a parlé de ça plusieurs fois déjà. Et Jules vous l'a dit dès votre premier jour.
- Pardon, j'ai tendance à être un peu... inattentive, parfois, avoua Vanille.
- Parfois ? souffla Lorelei.
Vanille se demanda depuis quand sa partenaire de travail agissait d'une manière aussi condescendante avec elle.
- Dans tous les cas, nous partons la première semaine de Pâques.
- Qui ?
- Si tu veux nous laisser travailler sur ton projet pendant que tu seras partie, tu pourras prendre une pause. En revenant, tu auras l'esprit clair et prêt à repartir, proposa Lorelei en ignorant superbement Vanille.
- Vous avez déjà bien avancé avec la magie spontanée.
- Vous partez où ?
- Non, on a juste reçu quelques réponses, et rien de bien intéressant. On pourra approfondir pendant les vacances. Rencontrer directement des enfants de sorcier, par exemple.
Oreste hésita et Vanille était perdue.
- Oh ! s'écria-t-elle, vous rendez visite au Club des Créateurs des Etats-Unis ? A l'Institut des Sorcières de Salem ?
- Très bien, on va faire ça. Je suspends mes travaux jusqu'à notre retour. Vous pouvez continuer les recherches de votre côté, ou alors commencer les vôtres. J'ai vraiment besoin d'une pause sur la magie sans baguette.
- D'accord. Pense à autre chose. On aura le temps de finir avant la fin de l'année, on est de plus en plus proches du but. Essaye de ne pas te mettre la pression.
Les deux filles s'étreignirent devant Vanille qui se sentit complètement inutile. Depuis quand étaient-elles aussi proches ?
Tandis que les filles rangeaient leur affaires, Vanille alla voir Ambre, qui rédigeait un roman sur un immense parchemin.
- Tu t'en sors avec tes recherches ? demanda Ambre sans lever les yeux.
- Non, on... elles ont décidé de faire une pause jusqu'au retour d'Oreste. Tu sais où elle va ?
Ambre trempa délicatement sa plume dans son encrier, concentrée.
- Tu veux dire après la rencontre annuelle ?
- La rencontre annuelle ?
Vanille se sentait un peu bête.
- Tu n'as rien écouté, encore une fois, comprit Ambre.
- Non, c'est vrai, pardon. Tu m'expliques ?
Une sensation de déjà-vu passa dans l'air.
- Pas la peine de t'excuser, je te connais. Donne-moi deux minutes.
Vanille tint quinze secondes.
- Qu'est-ce que tu rédiges ?
Ambre s'arrêta au milieu d'un mot et leva les yeux vers Vanille.
- Pourquoi on est amies, au fait ?
- Parce que tu fais partie des seules personnes à me supporter, sourit Vanille.
- Ça doit être ça, avoua Ambre en posant précautionneusement sa plume pour éviter que l’encre ne bave. J'écris un compte-rendu de nos sortilèges pour le ministère, avec des demandes d'autorisation pour en créer d'autres. Et j'essaye de leur faire comprendre que j'aimerais reprendre les même recherches après le départ de David.
- Oh, tu sais comment rédiger ce genre de document ?
- Oui, David m'a expliqué. Oreste ne l'a pas fait ? Pourtant, c'est elle qui connaît le sujet, ici.
- Elle doit tout vouloir faire toute seule je suppose.
Ou alors elle avait commencé à expliquer le cerveau de Vanille s'était envolé. Après tout, la paperasse...
- Bon, et cette rencontre, qu'est-ce que c'est ?
- Si tu as lu le règlement du Club, à défaut d'avoir écouté Jules, tu sais que dans cinq des écoles de sorcellerie du monde, il y a un Club des Créateurs. Tous les ans, les membres se réunissent dans une des écoles. Cette année, ils vont à l'Institut des Sorcières de Salem.
- Nous y allons aussi ?
- Non, les Novices n'y vont pas.
- Et qu'est-ce qu'ils y font ?
- Ils échangent des nouvelles des Clubs, ils parlent de leurs recherches, ils créent des liens. Officiellement. Je suppose qu'ils font la fête aussi.
- Oh.
Vanille comprenait en quoi cet événement permettrait à Oreste de penser à autre chose. Elle laissa Ambre à sa lettre et alla récupérer ses affaires pour s'en aller.
Sur le chemin du dortoir, Vanille repensa à Lorelei et Oreste. Elle avait dû manquer beaucoup de conversations, à rester dans ses propres pensées. De quoi avaient-elles pu parler qu'elle n'avait pas écouté ? Combien de sujets avait-elle ainsi évité sans le vouloir ? Ce n'était pas étonnant que les deux filles se soient rapprochées. Même Ambre était plus proche de David que Vanille ne l'était d'Oreste.
Elle savait que ce défaut prenait beaucoup trop de place dans sa vie. Cela faisait-il d'elle une personne égoïste ? Nombriliste ? Peut-être. Merlin sait qu'elle avait essayé de changer, pourtant. Elle avait autorisé, supplié même Leanne de la faire revenir au moment présent dès qu'elle la verrait ailleurs, d'où les coups de coude répétés.
Mais rien n'y faisait, elle n'arrivait pas à se concentrer sur quelqu'un qui parle. Que ce soit un discours, un cours ou une simple discussion, si elle n'était pas seule avec son interlocuteur, elle s'envolait. En revanche, si les informations étaient écrites, elle captivaient beaucoup plus facilement son attention. Les lettres de son frère ne l'avaient jamais ennuyée, même lorsqu'il tentait de lui parler de son monde.
Devait-elle demander un compte-rendu écrit, une lettre, un article dans la Gazette du Sorcier après chaque conversation ?
Une lettre, dans la Gazette...
- J'ai une idée !
- Et qu'est-ce que c'est ?
Au milieu d'un couloir sombré éclairé à la torche, Vanille émergea de ses songes pour faire face à Alexandre.
Cela faisait presque un mois qu’il avait tenté d’ouvrir la discussion avec elle, ce fameux soir.
Elle tourna sur elle-même pour essayer de voir où ils se trouvaient. Ses pas la menaient toujours à bon port, mais elle ne réalisait pas toujours où elle en était.
- Tu es perdue ? s'étonna Alexandre.
- Non, non. Je me repère.
- Comment vas-tu ? lui demanda-t-il.
- Bien ! Heu... et toi ?
Ils n'avaient pas vraiment reparlé depuis leur dernière discussion, celle après laquelle Nathan lui avait ouvertement dit de faire attention à ses fréquentations. Tout juste quelques signes polis en se croisant, quelques banalités lorsqu'ils se croisaient au Club. D'ailleurs, elle n'avait presque pas recroisé Nathan. Il devait sûrement se re-faire discret. Peut-être avait-il compris que Vanille ne voulait pas sympathiser avec lui.
- Bien aussi, dit-il en la ramenant sur terre. Quelle est donc cette merveilleuse idée qui vient de te traverser l'esprit ?
- Oh, c'est pour les recherches d'Oreste.
- C'est donc un secret ?
- Non, bien sûr que non. Enfin je ne pense pas. En fait elle voudrait des témoignages et nous a donné une liste de ses connaissances qui avaient accepté de nous parler, mais ils n'étaient pas bien nombreux et, en vérité, pas très intéressants. Alors je viens de penser à mettre une petite annonce sur la Gazette du Sorcier, pour toucher plus de monde.
- Tu crois qu'Oreste acceptera de parler publiquement ainsi de ses recherches ?
- L’annonce n’a pas besoin d’être trop explicite.
Alexandre la jaugea du regard un instant.
- Ca peut être une bonne idée, si elle est au point mort.
- Oui j'aimerais l'aider. C'est elle qui t'a dit qu'elle n'avançait plus ?
Il eu un infime sursaut du regard, que Vanille ne remarqua absolument pas.
- On en a discuté, en effet.
Vanille attendit un instant, se demanda s’il voulait lui dire quelque chose de particulier.
- J’ai l’impression que ce n’est pas encore le bon moment pour te proposer une sortie au parc ?
Elle hésita quelques secondes de trop.
- Je n’insiste pas. Mais tu ne pourras pas refuser mon offre éternellement, fit-il avec un clin d’oeil. Je te souhaite une belle soirée, Vanille.
- Merci. A toi aussi.
Et elle reprit son chemin, ressassant sa conversation.
Elle n'avait pas rougit, pas bégayé, pas dit de stupidité. Elle ne s'était pas sentie mal à l'aise en sa présence. C'était bien plus rassurant d'être en bon terme avec les membres du Club.
« Plus rassurant d'être en bon termes avec lui surtout.
« Peut-être, oui, peut-être. Rassurant de ne pas se sentir détestée par quelqu'un comme lui.
« Mais il n'empêche qu'il se comportait étrangement, avant.
« Oui mais si tout va mieux, peut importe.
« Il faudra bien accepter sa proposition un jour. Ne serait-ce que pour lui demander des explications.
« Oh oui. Et puis pour le plaisir de me balader avec lui.
« Et je devrais voir un médicomage pour lui expliquer que je résouds mes conflits internes en dialogues avec moi-même.
« Non, ne raconte à personne que tu es folle.
Le lendemain, Vanille demanda à Oreste l'autorisation de publier une demande de témoignage sur la Gazette du Sorcier. Oreste lui demanda seulement de lui montrer le mot avant de l'envoyer au journal.
Lorelei lui lança d'ailleurs un mauvais regard, qui rappela à Vanille qu'elles avaient décidé qu'Oreste ferait une pause dans ses recherches, et donc implicitement qu'il fallait arrêter de lui en parler. Elle comprit alors pourquoi elle n'avait pas trouvé la Grande Créatrice au Club, mais dans un couloir du château. Elle se demanda vaguement ce qu'elle et Lorelei faisaient ensemble, seules dans ce couloir, mais pensa vite à autre chose. En l’occurrence, au contenu de son annonce.
Elle tenta plusieurs tournures avant de se concentrer sur celle-ci :
« Recherche de témoignages
Dans le cadre d'une étude sur les sources de magie, nous recherchons des témoignages de Sorcières et Sorciers ayant vécu des manifestations de magie spontanée lors de leur jeunesse, avant l'obtention de leur baguette. Nous cherchons des manifestations relativement puissantes (repousse de cheveux s'abstenir). Soyez s'il vous plaît aussi précis que possible sur la situation et les sentiments.
Aucun des témoignages ne sera rendu public.
Merci de vous adresser à Oreste Pear, maison de Serdaigle, Poudlard. »
Elle soumit l'annonce à Oreste qui lui demanda de changer le nom et de prendre réception des lettres à sa place.
Vanille envoya l'annonce dans une lettre adressée au journal, en leur expliquant plus en détail les raisons d'une telle demande (en prétendant faire des recherches pour un cours avancé de magie). Le journal lui répondit qu'ils publieraient dans la semaine l'annonce.
En effet, quelques jours plus tard, une semaine avant les vacances de Pâques et le départ du Club – ou du moins de ses membres plus âgés – son billet fut publié dans la gazette, au beau milieu de la page « Petites annonces ». Vanille était satisfaite : elle ressortait bien.
Dès le lendemain et étalés sur plusieurs jours, elle reçu des hiboux venus de partout au Royaume-Uni de personnes témoignant sur leur jeunesse ou sur les exploits de leurs enfants.
Malheureusement, le concept de « manifestation relativement puissante » ne devait pas être similaire à toute la communauté sorcière, puisqu'elle reçu plusieurs lettres de personnes ayant guérit des bobos et bosses diverses, lévité sur trois marches d'escaliers et, évidemment, ayant vu leurs cheveux repousser.
Malgré tout elle fut impressionnée par cette personne ayant fait exploser la porte de la pièce où elle s'était enfermée étant enfant, et par la lettre de ce papa dont le fils de deux ans avait rempli sa chambre de tous les jouets et toutes les sucreries qu'il avait exigé lors de leur passage en boutique.
Mais une lettre retint particulièrement son attention.
Le sorcier qui racontait son histoire n’était plus un enfant et possédait déjà une baguette pendant cette anecdote, mais il ne l’avait pas sur lui. Il racontait avoir été particulièrement en colère contre une personne, et après un échange houleux, il avait fait gonfler cette personne au point de la faire s'envoler. Il disait aujourd'hui reconnaître un simple sortilège de gonflement, simple mais puissant, car faire gonfler un humain était le plus avancé du sortilège, et avouait également ne pas connaître le sortilège à l'époque.
Ce cas intéressait énormément Vanille. Elle voulu lui renvoyer une lettre, pour lui poser plus de questions, mais il n'y avait pas d'adresse sur l'enveloppe, et à la fin de la lettre, la signature indiquait uniquement « H.P. »
Elle était un peu déçue, mais heureusement pour elle ce sorcier avait bien lu l'annonce et avait détaillé au maximum ses sentiments et le déroulement de la scène.
End Notes:
Merci d'avoir lu :)
Est-ce que la longueur des chapitres comme les derniers publiés vous convient ? J'ai reçu quelques retours à ce sujet, c'est vrai que je suis plus à l'aise finalement avec des chapitres plus longs. Du coup je vais essayer de fusionner certains premiers.
A la prochaine ! Des bisous !
Des infos, des détails et des bonus sur mes fanfics : http://laplumededeanna.blogspot.fr !
L’enfant et l’oiseau by Deanna
Author's Notes:
Hey hey hey ! I'm back in town baby ! Alors, Vanille vous a manqué ? Moi j'ai passé mes vacances à rédiger des notes sur ses aventures (mais sans internet, difficile de publier quoi que ce soit), vous allez être gâtés !
Je reprends un rythme de publication plus soutenu, après cette petite pause estivale.
Bonne lecture !
La période de Pâques arriva. Les Jeunes et Grands Créateurs partirent comme c'était prévu à l'Institut des Sorcières de Salem, et Vanille rentra chez elle.
Ce ne furent pas des vacances très agréables. L'absence de son frère, qui était parti au bout du monde avec leur père au début de l'année, se fit difficilement ressentir. Sa mère était très heureuse de la voir, et ne pouvait s'empêcher de parler à longueur de temps. Comme pour combler un vide qui s'était installé dans la maison. Vanille se surprit à vouloir repartir le plus vite possible, quand elle se rendit compte que sa mère était entièrement seule le reste du temps. Alors qu'elle avait prévu de rendre visite à Leanne et Ambre, elle décida de rester avec sa mère.
Elle se plongea dans ses révisions pour les BUSEs, qui s’annonçaient bien, elle n’avait de difficulté dans aucune matière.
Elle ne put travailler ni sur les travaux d’Oreste, ni sur ses propres recherches. Cela faisait un bout de temps qu’elle bloquait. Elle avait épluché les travaux d’Oreste et une partie des livres de leur bibliothèque, et ne savait pas encore comment continuer, quel sujet choisir. Elle se disait qu’elle avait le temps pour trouver, mais elle voulait au moins arriver en sixième année avec des idées précises, des plans, des thèmes à approfondir. Avoir au moins préparé le terrain. Surtout si elle acceptait un Novice avec elle.
Le dernier jour des vacances, Filéone, sa chouette, arriva avec une lettre, ce qui était étonnant car elle était restée à Poudlard. L'auteur de la lettre connaissait donc sa chouette et avait réussit à l’envoyer.
En ouvrant l'enveloppe, Vanille resta bouche bée en découvrant son expéditeur.
C'était Nathan.
Elle sentit une vague de colère passer dans son dos. Ce garçon n'en avait-il pas marre d'essayer de parler avec elle ? Elle finissait toujours par lui crier dessus. Et, Vanille rit jaune, il avait trouvé un excellent moyen de communiquer avec elle sans se faire rembarrer.
Elle hésita à déchirer la lettre sans la lire, mais c'était trop bête, cela pouvait être important.
« Vanille.
J'ai réussi à convaincre ta chouette d'envoyer ma lettre, j'espère que cela ne te dérange pas. »
Cela commençait bien. Comment pouvait-il avoir écrit cela avant d'envoyer ladite lettre ?
« J'imagine que tu m'en as voulu au moment même où tu as vu mon nom, et que tu t'es dit que j'avais trouvé un moyen détourné pour pouvoir te parler sans que tu ne m'ignores. »
Touchée.
« Et ce n'est pas complètement faux. »
Ah !
« J'ai manqué de tact avec toi. Je ne pensais pas que tu réagirais de manière aussi vive. Je ne te connais pas vraiment. »
Contrairement à ce qu'il prétendait.
« Je n'ai jamais eu la prétention de dire que je te connaissais, Vanille, je t'ai simplement dit ce qu'il me semblait important pour toi de savoir. »
Non mais oh ! Même par lettre il était insupportable !
« Je te présente mes excuse si je t'ai agacée, manqué de respect, apeurée par mon comportement. »
Ah.
« Tu me trouves étrange, et je le suis. »
Au moins un point sur lequel ils étaient d'accord.
Et si elle arrêtait de faire des remarques et lisait cette fichue lettre jusqu'au bout ?
« Mais je ne suis pas mauvais. Je ne te veux aucun mal, ni à toi ni à personne. »
Venait-elle de s'engueuler elle-même ?
« Si tu le veux bien, repartons sur de bonnes bases. Je suis Nathan, cinquième année, Serdaigle. Et je suis prêt à répondre à tes questions. »
Etait-elle vraiment seule dans sa tête ? Ou était-ce commun d’avoir des débats avec sa voix intérieure ? Et son cerveau qui partait à la dérive, pourtant ce n'était pas un discours mais bien une lettre qu'elle lisait.
Une seconde. Qu'a-t-il écrit ?
« Et je suis prêt à répondre à tes questions.”
Elle savait parfaitement quel genre de réponse, évasive et frustrantes, il pouvait donner.
“Et si tu ne souhaites plus m’en poser, alors je m’écarterai de ton chemin.
Nathan”
Elle se dit que c'était la deuxième fois que quelqu'un lui proposait de repartir sur de bonnes bases. Et avec le même genre de propos, qui plus est, avec cette présentation typique du Club « Je suis untel, de telle année, dans cette maison. »
Bravo pour l'originalité.
Elle hésitait à lui répondre. Si elle ne lui répondait rien, il penserait sûrement qu'elle refusait cette main tendue. Mais d'un autre côté, elle ne savait pas si elle voulait vraiment sympathiser avec ce garçon étrange. Il avait tout de même réussit à la mettre plutôt mal à l'aise avec une simple lettre.
Elle décida d'aviser au moment voulu. Même si improviser ne lui réussissait pas toujours, avec sa tendance à ne pas tout comprendre et à s'emballer, elle détestait se prendre la tête sur des décisions.
Avoir hésité des semaines avant d'entrer au Club lui avait particulièrement tapé sur le système.
Vanille retourna à Poudlard le lendemain, laissant à sa chouette le choix de rentrer quand elle le voulait. De toute façon, elle n'avait pas sa cage sur elle.
Elle retrouva Leanne et Ambre dans le train et leur expliqua pourquoi elle n'était pas venue les voir pendant ces vacances. Au delà du fait d'avoir pu travailler pour ses BUSEs, cela avait rassuré sa mère de la voir rester chez elles. Elle ne regrettait pas son choix.
Elles échangeaient des banalités depuis quelques heures de voyage quand Leanne lâcha :
- J'ai parfois l'impression que vous me cachez quelque chose, toutes les deux.
Ambre et Vanille se regardèrent, sans savoir comment réagir. Aucune des deux ne répondit.
- Vous savez, quand vous gardez le silence, ça me prouve que je n'ai pas tord.
Une nouvelle fois, Leanne compliquait les choses. Elle avait voulu faire partie de ce Club, s'était inscrite, puis après en avoir discuté elle avait changé d'avis sans l'expliquer à Vanille, qui était à l’origine de sa réinscription, puis elle avait encore changé d'avis.
Et aujourd'hui, Vanille savait que si Leanne apprenait qu'elles faisaient partie d'un Club de création de magie, elle voudrait en être, de nouveau.
Puis, si on lui réexpliquait tout ce qui s'était passé, elle changerait d'avis. Encore une fois. Elle ne devait pas être au courant pour le Club.
- D’accord. Oui, il se passe quelque chose. Mais tu dois le garder pour toi.
Ambre lança un bref regard à Vanille, à la fois étonné et dissuasif. Vanille improvisa :
- Je sors avec un garçon.
Elle n'avait rien trouvé de mieux ?
Ambre pouffa tandis que Leanne s'exclamait :
- Mais pourquoi tu ne m'as rien dit ? Comment Ambre est-elle au courant ?
- Elle nous a surpris tous les deux, dans un couloir, il y a quelques semaines.
Belle improvisation, se félicita Vanille intérieurement.
- Ça dure depuis plusieurs semaines ? Qui est-ce ?
- Hem... Un septième année.
- Oh, le garçon qui était venu te voir la dernière fois à la bibliothèque ? L'ami d'Ambre ?
Vanille mit quelques secondes à se remémorer de qui elle parlait. Quand Ambre était partie à son entretien, Jules était venu la voir pour lui parler. Leanne prit son silence pour une affirmation.
- C'est lui alors ? Mais pourquoi tu veux garder le secret ? Parce que c'est un ami d'Ambre ? Oh, tu es sortie avec lui aussi ? demanda-t-elle à cette dernière.
Ambre fit un petit bruit de cochon en cachant son visage avec sa main, Vanille se rendit compte qu'elle retenait son rire depuis le début de la discussion.
« Ne m'aide pas surtout. »
- Voilà pourquoi l'ambiance était aussi bizarre. Vous vous êtes disputées parce que Vanille sort avec ton ex-petit-ami, Ambre, et maintenant vous essayez de sauver les apparences, parce que c'est ridicule de s'en vouloir pour des histoires de garçon.
Vanille ne savait plus quoi dire. Leanne créait elle-même cette histoire de toute pièce.
- Mais pourquoi tu ne m'en as pas parlé, Ambre, quand tu sortais avec lui ?
Ambre, dont la lèvre était secouée de soubresauts, lança un regard profond à Leanne, qui signifiait « Tu me connais » - mais Vanille lu plutôt « Si je te réponds, j'explose de rire ».
- Oui tu n'es pas du genre à étaler ta vie sentimentale.
Elle lâcha un long soupir rassuré.
- Je suis contente qu'on ait eue cette discussion les filles ! Je me demandais où vous passiez votre temps. Maintenant je comprends mieux, fit-elle avec un clin d'oeil appuyé à Vanille.
Ambre se leva d'un coup, prétextant devoir aller aux toilettes, et sortit en un quart de seconde du compartiment. Un bruit rettentit dans le couloir – Vanille reconnu un rire, mais Leanne cru à un sanglot.
- Oh, je n'aurais peut-être pas dû...
- Tu ne savais pas. A vrai dire, moi-même je ne savais pas qu'il avait été son petit ami avant de sortir avec lui, se justifia-t-elle du crime qu'elle n'avait pas commis.
- Comment s'appelle-t-il ?
Autant mettre un peu de vérité dans ce mensonge.
- Jules. Il est à Serpentard.
- Je me souviens de lui, quand il est venu te voir à la bibliothèque. Il est très mignon.
Vanille rougit.
- J'imagine qu'il ne faudra pas en parler. En tout cas pas devant Ambre.
- Ni devant personne, se précipita Vanille. Lui aussi de son côté, c'est compliqué.
Leanne acquiesca d'un air entendu tandis qu'Ambre revenait dans le compartiment.
Elles avaient évité les dégâts. L'alibi était très bon, au final. Vanille espérait seulement ne pas avoir à embrasser Jules pour se justifier.
Quoique l'idée ne la rebuta pas.
L'Oubliator avait très bien fait son travail, Leanne ne se souvenait absolument pas d'avoir côtoyé Jules pendant plusieurs semaines.
La rentrée vit revenir les membres du Club des Créateurs plus motivés et soudés que jamais. Ils avaient dû passer de très bons moments ensemble. Vanille se surprit (enfin) à en éprouver un peu d'envie, et avait hâte d'être à l'année prochaine, pour pouvoir participer à ce fameux voyage. Les autres membres ne leur en avaient pas tant parlé, ou en tout cas n'avaient pas décrit les détails (Vanille demanda la confirmation à Ambre), sûrement pour que les Novices ne se sentent pas laissés pour compte. Pour ne pas trop les rendre envieux.
Mais aujourd'hui c'était certain, le voyage de rencontre des Clubs était un événement important.
Oreste avait bien repris du poil de la bête. Plus motivée que jamais, elle n'avait pas trouvé de sortilège à analyser et avait décidé de partir sur une autre piste.
Elle commença par demander à ses Novices si elles avaient avancé. Lorelei avait trouvé quelques informations supplémentaires dans des livres à propos des baguettes et des enfants magiques, et avait commencé à creuser la piste des créatures magiques.
- Par exemple, les Elfes de maison font de la magie, c'est indéniable, mais ils n'ont pas de baguette. Et les Centaures et les Gobelins ont toujours fait comprendre aux Sorciers qu'ils désiraient des baguettes malgré leur pouvoirs déjà très puissants. Du coup j'ai un peu creusé de ce côté-là, je suis descendue voir les Elfes dans la cuisine mais...
- Je ne vois pas très bien l'intérêt de partir sur cette piste-là, coupa Oreste.
Lorelei fut étonnée.
- Mais pourtant, ils lancent des sortilèges qui sont similaires aux nôtres, ils...
- Rien de prouve qu'il s'agit du même type de magie. Je veux étudier la magie des Sorciers pour pouvoir leur permettre de faire de la magie sans leur baguette. Pas étudier les Elfes. Leur magie est différente de la nôtre.
- Qu'est-ce que tu en sais ? contra Vanille.
- Comment ça ?
- Qui a dit que les Elfes avaient une « magie » différente ? Qui a vraiment étudié les Elfes ? Est-ce que ça veut seulement dire quelque chose, une magie différente, quand tu ne sais même pas ce qu'est la magie ? Si ça se trouve, les Elfes sont la clé de tes recherches, tu passerais à côté ?
Oreste la calcula du regard pendant plusieurs secondes.
- Ecoute. Je vois bien que ce sujet te tiens à cœur – la nature de la magie, ces choses-là. Rien ne t'empêche de te lancer dans tes propres recherches. Mais sur mon sujet, dans mes recherches, je n'étudie pas les Elfes, j'étudie les Sorciers. Je ne te retiens pas d'aller étudier ça, mais je ne te vire pas non plus.
Les deux filles se jugèrent un instant. Vanille tenta de déceler l'expression d'Oreste. Y avait-il de la froideur dans sa voix, dans ses yeux ? Oreste en avait-elle marre de sa Novice tête en l'air ? Non, ce qu'elle voyait dans les yeux d'Oreste, ce n'était qu'un désir ardent de maîtriser son domaine et de se donner à fond dans ses projets.
- Ton domaine, tes recherches. Je ne te lâche pas tant que je peux t'aider.
Elle se promit mentalement de noter sur son carnet de recherches “la magie des Elfes”. Elle tenait là une nouvelle piste à creuser pour ses recherches.
Oreste la gratifia d'un sourire rassuré – peut-être eut-elle peur d'avoir été trop brusque – et reprit :
- En revanche, j'ai une autre piste que j'aimerais creuser un peu : la formulation des sortilèges. Pendant la rencontre avec les autres écoles, une amie japonaise m’a fait remarquer que nous n’invoquions pas nos sortilèges avec les mêmes formules, bien que les effets soient similaires. La plupart de nos sortilèges occidentaux sont en latin, mais dans d’autres régions, sur d’autres continents, ce n’est pas le cas. J’ai déjà écrit quelques notes sur ces recherches.
“Quelques” signifiait cinquante centimètres de parchemin.
- Si les formules ne sont pas les mêmes, cela signifie qu’elle ne sont pas indispensables. C’est une conclusion un peu rapide, je sais, mais voilà où je veux en venir…
Elle montra le milieu de son parchemin où il était écrit : sortilèges informulés.
- Quand on maîtrise parfaitement un sort formulé, on peut le lancer en pensant seulement à la formule. Mais j'aimerais savoir si on peut en lancer un en pensant seulement à son effet.
- Si c'est le cas, alors la formule elle-même serait un catalyseur. Une manière de préciser ce à quoi on pense, pour que le sortilège soit précis, continuait Lorelei.
- Exactement. Malheureusement, je n'ai pas encore trouvé beaucoup de chose là-dessus. (Vanille écarquilla les yeux : pas encore beaucoup ?) Il va nous falloir fouiller notre bibliothèque de fond en comble, et peut-être même celle du château.
- Est-ce qu’on ne s’éloigne pas du sujet ? se demanda Vanille à haute voix.
- Je pense que nous explorons une branche parallèle, mais qui pourrait bien converger vers notre point central. Etudier la magie sans baguette, c’est aussi plus largement étudier les sortilèges. Comment ils sont lancés, comment ils fonctionnent. Et donc, les sortilèges informulés peuvent être intéressants à étudier.
Vanille aquiesca et se rappela d’une chose :
- Oreste, j'ai fait un compte-rendu des témoignages que j'ai reçus, il y en a beaucoup mais la plupart sont inexploitables. En revanche, l'un d'entre eux devrait te plaire.
Elle se pencha sur son sac pour récupérer toutes ses notes, et les posa sur la table.
- Tu as fait tomber un papier de ton sac, lui signala Lorelei en commençant à lire le compte-rendu.
Vanille regarda sous sa chaise où, en effet, se trouvait un bout de parchemin plié en deux. Elle le ramassa, se dit qu'elle n'avait pas utilisé ce genre de papier, l'ouvrit et le lu.
« Je sais quelles recherches tu projettes de faire, quelle branche de la magie tu veux étudier.
Suis mon conseil : abandonne. Tu le regretterais. Il y a des secrets qu'il serait trop dangereux que tu découvres. Tu es prévenue.»
...
- Vanille, ça va ?
Elle sursauta et replia prestement le parchemin. Oreste et Lorelei l'observaient.
- Oui oui, pourquoi ?
Elle se sentit pâlir légèrement et rangea le parchemin dans sa poche.
- Tu es restée un moment fixée sur ce parchemin... Qu'est-ce que c'est ? Rien de grave ?
- Non ce n'est rien c'est juste... Un parchemin sur... les cours. Pour les BUSEs.
Ses camarades ne la crurent pas mais eurent le bon goût de ne pas insister. Oreste remit le bon sujet sur la table :
- Quel est le témoignage que tu voulais me montrer ?
- Oh, oui, le témoignage.
Vanille se mit à le chercher fébrilement en se demandant qui, et pourquoi elle venait d'être ainsi menacée.
Elle devait essayer de ne pas y penser pour l'instant. Mettre cette information dans un coin de sa tête, et le faire ressortir plus tard. Focus.
- Là, je l'ai trouvé. C'est un sorcier qui a fait gonfler une personne avec qui il était apparemment en train de se disputer.
Oreste lu la lettre en diagonal.
- En quoi est-il différent des autres ?
- Premièrement, il avait déjà une baguette mais ne l'avait pas sur lui. On s'éloigne du sujet des manifestations spontanées mais du coup, on se rapproche de ta piste sur les informulés. D'autant plus qu'il s'agit d'un sortilège qui existe.
Oreste réfléchit un instant, plongée dans la lettre.
- Et deuxièmement ?
- Deuxièmement, il ne connaissait pas ce sortilège quand il l'a lancé. Il l'a donc fait spontanément... et en ne pensant qu'à son effet.
- Non, coupa Lorelei, d'après sa lettre il ne pensait même pas à cet effet en particulier, il souhaitait juste « lui faire du mal, lui donner ce qu'elle méritait ».
- Quel âge avait-il ? demanda Oreste.
- Treize ans.
- Comment un gamin de treize ans peut-il être en colère à ce point, murmura Oreste.
- Dans tous les cas, continua Vanille sans s'émouvoir, on a plusieurs points réunis dans une même situation : le sortilège sans baguette, informulé et guidé par une volonté, un but, non pas un effet particulier.
- Guidé par une émotion intense, précisa Lorelei. La colère, ici. Dans la plupart des témoignages sur tu as reçu – c'était vraiment une bonne idée – les enfants étaient en proie à des émotions fortes, souvent négatives mais pas toujours : la peur, la déception, le regret.
- Ou même la joie, il y a cette petite qui est apparue en robe de princesse le jour de son anniversaire.
- Je me souviens d'une fois, c'était par... commença Vanille.
Elle se stoppa en se rendant compte qu'on ne lui avait rien demandé. Oreste et Lorelei l'encouragèrent en la regardant poliment.
- C'est un peu ridicule.
- Non vas-y.
- Je n'étais pas vraiment en proie à une émotion intense. J'étais dans mon jardin et deux oiseaux ont atterrit devant moi. Ils étaient énormes, par rapport à ma taille. Deux albatros. Ils se battaient, assez violemment. J’ai eu peur qu’ils ne se blessent, alors j'ai couru vers eux et je les ai grondés. Ils m'ont regardée et ils ont baissé la tête, comme s'ils savaient que je les grondais. Quand j'y pense, ça aurait pu être dangereux, ils étaient presque aussi grands que moi.
Elle se tu et se dit que décidément, cette anecdote était inutile. Elle leur fit un sourire d'excuse, qu'Oreste ne remarqua pas, elle fixait son badge.
- Ton patronus, c'est un albatros n'est-ce pas ?
- Oui, avoua Vanille en soulevant son insigne.
- Quel est le rapport avec... Oh, tu veux dire que la forme du fond, c'est ton patronus ? demanda Lorelei en empoignant le sien.
- Oui, ce badge te représente plus qu'il n'en a l'air, lui dit Oreste. Tu as déjà réussit à lancer un patronus ?
- Jamais corporel, avoua Lorelei.
- Tu verras, quand tu y arriveras, la forme sera la même que celle au fond de ton badge.
- Tu nous montres le tien ? demanda Lorelei à Vanille.
Cette dernière hésita. Elle ne l’avait pas très bien réussit, la dernière fois. Et puis ça n'avait rien à voir avec les recherches qu'elles étaient censées faire. Mais devant le regard quémandeur de Lorelei et celui moitié amusé, moitié curieux d'Oreste, elle s'exécuta.
- Expecto patronum !
Une nuage brillant sortit de la pointe de sa baguette et s'envola tout en prenant la forme attendue, l'albatros.
Tous les membres du Club présents s'arrêtèrent de travailler un instant pour regarder l'oiseau voler. Il y avait un côté fascinant à l'apparition d'un patronus. On ne pouvait le trouver que beau. Vanille vit Ambre suivre des yeux l'animal, les yeux brillants, Jules souriait franchement, l'air heureux, presque soulagé, tous les autres étaient également emportés par la sérénité qui se dégageait de l'oiseau qui décrivait simplement des tours dans la pièce, élégant. Puis il s'arrêta près de Vanille (qui ne contrôlait rien, et laissait son sortilège se dérouler tout seul), tel un véritable albatros, stabilisé par un vent qui ne soufflait pas. Puis il disparu.
Tout le monde regardait Vanille, tous un peu perdus dans leur pensées. Elle croisa le regard d'Alexandre, qui haussa les sourcils l'air de dire « pas trop mal comme sortilège ».
Elle se sentit rougir et dit :
- Hem... Pardon pour... la déconcentration.
Certains l'excusèrent d'un signe de main et chacun retourna dans son travail.
Vanille ne remarqua pas qu'un des membres garda les yeux fixés sur elle bien plus longuement que les autres.
End Notes:
Tadaa ! Ca fait tellement plaisir de continuer à écrire après ces longues semaines. J'espère que ça vous plaît toujours !
Plein de bisous !
Des infos, des détails et des bonus sur mes fanfics : http://laplumededeanna.blogspot.fr !
Fiole et potion by Deanna
Author's Notes:
Et deux d'un coup ! Ce chapitre est un peu plus court mais je ne voulais pas couper après. Bonne lecture !
Oreste décréta qu'elles avaient assez discuté et lista les différents sujets à chercher, des sortilèges informulés aux émotions influençant la magie, en mal ou en bien, en passant évidemment par les seuls acteurs de magie sans baguette – pour l'instant – les enfants sorciers.
La fin de l'année se faisait doucement sentir. Il ne restait qu'un bon mois avant les BUSEs et les ASPICs, et les Novices et Grands Créateurs furent un peu plus rares qu'à l'accoutumée. Un peu.
Un soir où il n'y avait presque personne – Vanille, Oreste, Kerwan – le Novice d'Alexandre – et ce dernier, et une autre Novice avec qui Vanille ne discutait que peu, Annabelle, la Gryffondor aux cheveux courts, qui travaillait seule discrètement dans son coin, ce soir-là donc, on toqua à la grande porte du Club.
Ce n'était arrivé qu'une seule fois, lorsque la directrice Roy avait souhaité la bienvenue aux Novices. Elle pouvait voir la porte mais avait voulu faire comprendre qu'elle ne se considérait pas comme membre du Club, en attendant qu'on lui ouvre pour entrer.
Alexandre se leva pour ouvrir.
Entrèrent alors trois personnes : la directrice, vêtue son habituelle robe pourpre au col blanc, suivie d'un vieil homme aux cheveux et à la barbe blancs et d'un autre homme, plus jeune, au visage sec et plutôt mal rasé.
- Bonsoir, M. Legrand, c'est précisément vous que nous venons voir.
Vanille resta concentrée sur son livre et essayait – vaguement – de ne pas écouter ce qui se disait. Oreste, au contraire, s'était relevée et fixait les arrivants.
- Je vous attendais. Voulez-vous vous asseoir ? demanda Alexandre de sa voix profonde.
- Voulez-vous que nous allions discuter de tout cela dans un endroit plus calme ?
La pièce étant silencieuse au possible, il voulait certainement dire « loin des oreilles indiscrètes ».
Vanille jeta un regard à la dérobée sur Alexandre, qui balaya la salle du sien.
- J'ai entièrement confiance dans les personnes qui sont ici. Nous pouvons nous installer là, dit-il en tirant une des chaises de la grande table ronde centrale.
- Fort bien.
Alexandre, son Novice et les trois invités s'assirent.
Le vieil homme tira de sa mallette en cuir des rouleaux de parchemins, un encrier et une longue plume.
- Nous avons bien examiné vos échantillons de potions et vos notes, M. Legrand, nous devons maintenant discuter des termes de la vente.
C'était donc ça, se dit Vanille, qui continuait d'écouter, un œil en coin. Le Jeune Créateur avait réussit à inventer des potions susceptibles d'intéresser les sorciers. Les deux hommes devaient être des apothicaires.
Alexandre lança un regard vers Oreste, qui, à côté de Vanille, continuait de les fixer. Elle comprit son indiscrétion et se pencha sur ses propres affaires.
- Qui est-ce ? murmura Vanille à Oreste.
- L'apothicaire M. Wiggs et son associé. Ils possèdent plusieurs magasins au chemin de Traverse, à Pré-au-Lard, et dans d'autres villages sorciers. Mais ils ne vendent pas, il ne font que les gérer. Ils sont, pourrait-on dire, à la tête d’un grand réseau de vente de produits sorciers. C’est quelqu’un d’importants, et je suppose qu'ils étaient membres du Club pour qu'Alexandre les ait invités ici.
Les deux filles écoutèrent discrètement ce qui se disait. La directrice était silencieuse, tout comme Kerwan, le Novice. Les trois autres débattaient du prix et de informations sur chacune des potions.
- L'année dernière, quand il était Novice, Alexandre a commencé à travailler seul dès janvier, dit Oreste. Il a vendu une douzaine de potions. C'est énorme. Cette année, je crois qu'il en a au moins vingt. Mais ça ne plaît pas à l'apothicaire. Tu vois comment il réagit ?
Vanille observa discrètement le fameux M. Wiggs. Sa barbe blanche s'agitait furieusement tant il parlait avec fougue, bien qu'assez bas.
- Il estime que ce n'est pas à nous, dans cette école, de créer des potions. Ses employés aussi créent, mais lui a une limite d'achat. Il ne peut pas vendre une cinquantaine de nouvelles potions par an. Et d'un autre côté, s'il ne les achète pas, ses concurrents les prendront à sa place.
- C'est étrange de raisonner comme ça, pour un ancien membre du Club, s'étonna Vanille.
- Les gens changent après Poudlard. Ils s'adaptent au système, au marché... et renient parfois ce qu'ils étaient. La création est une chose fabuleuse. Elle ne devrait pas être limitée par des lois de marché ou des décisions ministérielles. C'est pour ça que le Club est aussi fabuleux. Nous n'avons pas de limite.
- Je croyais que le ministère approuvait les recherches du Club.
- Officiellement. En fait, il les tolère, car de temps en temps ressort une idée qu'ils n'avaient pas eue, et ça leur permet de faire avancer certaines choses. Pour le reste – les sortilèges, les potions qu'on leur vend, ils essayent de contrôler au maximum. Mais nous avons toujours eu le directeur ou la directrice de Poudlard de notre côté. Ils nous fournissent les autorisations dont nous avons besoin.
- Je ne savais pas tout ça.
Oreste baissa encore plus la voix :
- Garde ça pour toi, ou pour tes amies. Je voudrais te donner un conseil. Si le ministère refuse tes recherches au Club, et s'il n'y a pas de raison logique, alors passe outre. C'est qu'il s'agira d'une histoire de Gallions ou de pouvoir politique, et tu n'as rien à voir là-dedans. Je pense qu'ils ne voudront pas te voir étudier la magie originelle ou quels que soient tes projets.
Vanille hésita un instant à lui parler de la lettre de menaces qu'elle avait reçue et qui lui trottait toujours dans la tête, mais elle se doutait qu'Oreste ne saurait pas de quoi en en retourne.
La Grande Créatrice fit un mouvement de tête vers Annabelle, la Novice de Gryffondor. Elle était penchée sur un parchemin et griffonnait doucement, ses cheveux courts cachant ses yeux.
- Regarde la petite Annabelle. Elle travaille seule. Nous ne savons pas ce qu'elle fait. Jules s'est seulement assuré que ce n'était pas dangereux pour elle. Et officiellement, elle est la Novice d'Alva et Alya. Ce qu'elle étudie est peut-être illégal, nous n'en savons rien. Elle est membre du Club des Créateurs. Nous la soutiendrons. Et s'il le faut, nous l'aiderons en cas de conflit avec le ministère.
- Alors le Club est vraiment... soudé.
- Oui. A la fin de l'année, nous reparlerons de tout ça avec les Novices, pour que la tradition perdure.
- Et les anciens membres ? Je croyais qu'il y avait des Créateurs partout dans la communauté sorcière, y compris au Ministère de la Magie. Ils doivent bien savoir que nous leur cachons des choses.
Oreste ria doucement.
- S'il se souviennent de leurs années au Club, alors ils ne diront rien. Les membres actuels sont plus important que les anciens. La cohésion est toujours la plus forte. Et pour certains sorciers... Nous gardons les archives de ce qu'ils ont pu faire lors de leur passage au Club. Un genre d'assurance.
- Un genre de chantage implicite plutôt.
- Plutôt un rappel de ce qui est important. Le Club a ses secrets. Chaque membre respecte ça.
Un bruit de chaises attira l'attention des deux filles, les apothicaires avaient dû trouver un terrain d'entente avec les Créateurs, ils se serrèrent la main. L'air satisfait, ils se saluèrent, et les trois invités partirent.
Oreste se leva vers Alexandre qui rangeait ses parchemins.
- Comment ça s'est passé ?
- Moyennement, répondit Alexandre qui avait perdu son sourire dès le départ des apothicaires. Ils ont pris la moitié de mes potions, et je n'ai pas le droit de vendre les autres ailleurs pendant six mois. Ensuite, ils reviendront me les acheter, et je pourrai vendre le reste s'ils ne prennent pas tout.
- Quels arguments ils ont donné pour faire ça ?
- Des histoires bidons d'autorité, de loi du ministère et de marché. La bonne nouvelle, c'est que malgré son côté pingre, il a été honnête. Il reconnaît mon talent, et m'a proposé de réfléchir à travailler pour lui à la sortie de Poudlard.
- C'est super ! s'exclama Vanille qui s'était approchée.
Alexandre lui offrit un grand sourire.
- Merci.
- Mais tu es bloqué maintenant. Tu ne peux plus faire de potions, si dans six mois il arrive et que tu en as de nouvelles...
- Je continuerai à créer des potions quoi qu'il arrive, coupa-t-il.
Il lança un regard indescriptible à Oreste, puis un, plus furtif, à Vanille, qui ne comprit pas de quoi il en retournait. Elle n'insista pas, cela ne la regardait pas.
Depuis la rentrée, Vanille n'avait pas recroisé Nathan. Ou plutôt, elle ne l'avait pas remarqué. Elle n'avait pas répondu à sa lettre, et il avait dû prendre ce silence pour un refus de sa main tendue. Pourtant, Vanille n'était pas contre le fait de discuter avec lui – mais discuter de manière honnête, sans qu'il ne s'impose à elle sans prévenir, et sans user de ses étranges pouvoirs.
Elle ne cherchait pas non plus à le voir. Elle se disait qu'au moment voulu, elle le recroiserait, il se laisserait remarquer et là, ils discuteraient.
Vanille n'avait de toute manière pas le temps de s'appesantir sur le sujet. Tout d'abord, elle devait rester concentrée sur ses BUSEs. Ses cours se passaient bien, elle avait de bonnes notes et révisait régulièrement. Elle n'avait pas de soucis à se faire sur ses épreuves, et savait déjà qu'elle pourrait rester au Club des Créateurs l'année prochaine.
Ensuite, elle devait se montrer prudente lorsqu'elle évoquait ses idées de futur recherches. Elle n'avait encore rien commencé, juste effleuré quelques pistes lors de discussions. Mais depuis la lettre, depuis cette menace qu'elle avait reçue, elle n'évoquait plus le sujet. Elle ne savait pas comment interpréter les mots qui y étaient écrits. « Tu le regretterais », cela voulait-il dire que ses propres recherches la mèneraient à des secrets dangereux... où à des personnes dangereuses ? Etait-ce quelqu'un qui étudiait les origines et les sources de la magie et qui ne souhaitait pas la voir débarquer sur ses plates-bandes ? Ou la vérité sur la Magie était-elle en elle-même un danger ?
Elle ne savait rien de tout cela. Elle n'avait aucun indice. Elle n'avait pas spécialement peur, mais préférait jouer la prudence : elle n’évoquerait plus ses recherches.
Et surtout, ce qui prenait la majorité de l'attention de Vanille, et qui l'excitait bien plus que des BUSEs ou ses futures recherches, c'était celles d'Oreste : elles touchaient au but.
Leur persévérance commençait à payer.
L'idée des informulés était une excellente piste. Beaucoup de sorciers s'étaient plongés dans l'étude des informulés et elles purent trouver un grand nombre de livres qui en expliquaient le principe.
Un des auteurs avait même poussé plus loin, exactement dans la direction des recherches d'Oreste : il avait analysé et décrit comment utiliser un informulé sans utiliser la formule dans sa tête. Il affirmait avoir réussit à utiliser des sortilèges mineurs de métamorphose et de lévitation juste avec une volonté très forte.
Les trois filles analysèrent longuement le livre et testèrent pendant plusieurs soirée cette idée.
Elles eurent des résultats concluants au bout de la quatrième soirée. Oreste réussit à lancer un sortilège de lévitation, avec sa propre baguette, dans s'être dit « Wingardium Leviosa » dans sa tête. Une question de volonté. Et Oreste en avait à revendre.
Vanille se demandait encore si elles ne s'étaient pas un peu éloignées du sujet.
- Pas forcément, contredit Oreste. La volonté et les émotions ont une part importante dans les sortilèges, et je suis persuadée qu'ils sont la clé de la magie sans baguette. Pour pouvoir faire un « entièrement informulé » (elles avaient décidé de les nommer ainsi, à défaut de pouvoir dire simplement « informulé »), c'est la volonté qui est de mise. Les enfants magiques nous prouvent que les émotions fortes sont l'autre partie du problème. Quand on aura les deux ensemble, on pourra lancer des sortilèges sans baguette. J'en suis persuadée.
- Que fais-tu de la partie « baguette » justement ? Le fait de canaliser et d'adapter le sortilège, via un objet magique ?
Oreste leur lança un regard mystérieux et conquérant.
- C'est exactement ce que nous allons faire ce soir. Nous allons essayer de lancer des sortilèges avec d'autres objets que des baguettes.
Elles réunirent toutes sortes d'objets, du plus logique au plus farfelus : Lorelei alla chercher des branches de différents arbres dans le parc, Oreste et Vanille trouvèrent des plumes, des livres, un mélange-chaudron (sorte de grosses cuillères en bois magique), des lunettes, un balai magique et une batte de Quidditch, une fourchette, un chapeau de sorcier, un téléscope, une fiole en verre, un trousseau de clés, une pièce de jeu d'échec et une bougie.
Tous les objets furent disposés sur la table et testés un par un. Ce fut Oreste qui obtenu des résultats. Sa volonté semblait inébranlable et c'était exactement ce dont elle avait besoin pour ce genre de magie.
Elle testa ensuite les informulés, les « entièrement informulés », ce qui fut plus difficile, seuls certains objets répondirent à ses essais. Les objets magiques, le balai et la pièce de jeu d'échec version sorcier , furent les plus efficaces. Evidemment, rien à voir avec la magie des baguettes.
Les branches de bois se révélèrent plutôt efficaces, bien plus que le trousseau de clé et la bougie. Les bois dont les propriétés magiques étaient les plus fortes donnèrent évidemment de meilleurs résultats.
Elles lançaient, ou du moins essayaient, le même sortilèges depuis des heures. La salle des Créateurs était vide, il ne restait plus qu'Oreste, Vanille et Lorelei. Minuit était sûrement passé.
Entre chaque changement d'objets ou de méthode, elles essayaient sans baguette, sans rien. Mais cela ne marchait pas.
Elles s'affalèrent sur leurs chaises après un énième essai. Il était plus de minuit. Leurs ventres commençaient à gargouiller, elles avaient manqué le repas sans s’en rendre compte. Mais aucune d’elles n’envisageait de partir.
- La volonté tu l'as, décréta Lorelei en massant les épaules d'Oreste qui commençait à désespérer. Tu l'as plus que jamais.
- Et si tu essayais avec ton doigt ? proposa Vanille.
Les deux autres se tournèrent vers elle, l'air blasé.
- C'est un objet magique, qui peut canaliser, et plus ça a la forme adéquate.
- C'est ridicule, décréta Lorelei.
- Ça ne coûte rien d'essayer, contra Oreste, qui se releva pour faire face à la table.
Elle respira profondément et fixa la fiole de verre qu'elle essayait de faire s'envoler depuis des heures. Elle pointa son doigt dessus, sembla y mettre toute sa volonté et procéda comme pour les autres objets : elle tenta de le faire voler par simple volonté, sans le mouvement, puis avec (on tourne et on abaisse !). Puis elle formula la formule dans sa tête, plusieurs fois (Wingardium Leviosa!). Enfin, après une profonde respiration, elle s'écria :
- Wingaridum Leviosa !
Les trois filles, debout devant la table, fixèrent la fiole de verre intensément. Rien ne se passa.
Oreste laissa son bras retomber, dépitée.
- Ca ne marche pas.
Lorelei lui prit le bras pour la réconforter.
- Ca ne marche pas. C'est peut-être tout simplement impossible.
Son visage s'assombrit.
Vanille ne voulait pas voir Oreste renoncer si près du but. Elles avaient travaillé trop dur. Elle réfléchit intensément en faisant les cent pas tandis que Lorelei et Oreste gardaient le nez baissé.
- Qu'est-ce qu'on a dit, qu'est-ce qu'il nous fallait... On a la volonté. Tu es la volonté incarnée. Il nous faut les émotions. Tes émotions ne sont peut-être pas assez fortes. Mais on ne va pas t'insulter ou casser tes plumes pour te rendre en colère. Il te faut un autre genre d'émotion. Une émotion forte et positive. Tu...
Vanille s'arrêta de faire les cent pas. Elle regardait Lorelei et Oreste, qui avaient trouvé un moyen de décupler leurs émotions.
Elle s'embrassaient.
Vanille les dévisagea, un peu choquée. Elle n'avait rien vu venir. Lorelei avait posé sa main sur la joue d'Oreste et la caressait avec son pouce. Oreste entourait la taille de Lorelei avec ses bras. Elles s'embrassèrent tendrement pendant de longues secondes.
Vanille commença à être un peu gênée quand elle détourna le regard. Autour d'elles, les objets avaient commencé à bouger.
Sur la table, la bougie, les livres, les plumes flottaient à quelques centimètres de hauteur. Les longs cheveux de Lorelei s'éparpillèrent dans les airs. Même la chaise à côté d'Oreste commençait à tanguer.
- Hm... les filles ?
Oreste et Lorelei ouvrirent les yeux d'un coup, se rappelant sûrement de la présence de Vanille et s'écartèrent. Tous les objets retombèrent alors, d'un coup, les faisant sursauter.
- Pardon de vous couper mais... C'est le moment où jamais.
Oreste comprit de quoi il en retournait en voyant sa chaise tomber à la renverse.
D'un geste assuré, un grand sourire sur lèvres et le rose aux joues, elle tendit la main vers la fiole de verre et murmura « wingardium leviosa ». La fiole s'éleva lentement dans les airs, et se plaça au dessus de la main d'Oreste, qui la souleva à la hauteur de son visage.
Vanille ne put s'empêcher de serrer les poings pour exprimer sa satisfaction pour cette victoire. Lorelei joint ses mains devant sa bouche.
La fiole tournait lentement sur elle-même devant les yeux d'Oreste, qui, avec un regard de conquérant, annonça lentement :
- Voici, mesdames, la magie sans baguette.
Et soudain, un énorme fracas retentit dans un coin de la pièce, dans l'ombre, les faisant sursauter.
La fiole tomba au sol et se brisa.
End Notes:
Tadaaa ! Enfin, Oreste voit le bout du tunnel avec ses recherches !
A bientôt et merci d'avoir lu !
Des infos, des détails et des bonus sur mes fanfics : http://laplumededeanna.blogspot.fr !
Le début des problèmes by Deanna
Author's Notes:
Mazette, enfin un peu d'action dans ce Club. Vous me direz ce que vous en pensez ? C'est mon premier essai de scène d'action !
Bonne lecture !
- Qui est là ? s'écria Oreste.
Le silence lui répondit. La salle était trop sombre pour distinguer quoi que ce soit, les bougies éclairaient seulement leur lieu de travail.
- J'ai vu tout le monde partir il y a des heures de ça... murmura Lorelei.
Elles sortirent leurs baguettes.
- Qui est là ? répéta Oreste. Flambios !
Le grand lustre du centre de la pièce s'alluma sous le sortilège d'Oreste. Quelque chose bougeait de l'autre côté de la grande table ronde, mais leurs yeux mettaient du temps à s'habituer à la lumière.
Elles s'approchèrent lentement, baguettes tendues.
Quelqu'un était agenouillé par terre, près des chaudrons, dont un était renversé à ses côtés. Des boîtes jonchaient le sol, et une chaise gisait. La silhouette se balançait doucement au sol d'avant en arrière. Une silhouette avec une dense chevelure rougeoyante.
- Morgane ! s'écrièrent les trois filles en même temps.
Elles se précipitèrent. Morgane ne semblait pas vraiment les avoir remarquées. Elle regardait dans le vide. Lorelei essaya de lui prendre les épaules pour la stabiliser, mais Morgane se débattit.
- Laissez-moi !
Elle se mit à ramasser les boites une par une et à les mettre dans ses bras. Sous les yeux éberlués des trois filles, elle se leva commença à les ranger avec des gestes violents. Qu'est-ce qu'il lui prenait ? Elle était si calme d'habitude.
Oreste tenta de la raisonner.
- Morgane c'est moi, Oreste... calme-toi, dit-nous ce qui se passe.
Elle essaya vainement de lui prendre les mains, de la calmer. Des larmes coulaient sur les joues de Morgane. Elle semblait apeurée.
- J'ai du faire quelque chose de mal... Ce n'était pas prévu... J'ai...
Vanille entendit un clac ! vers la porte. Elle se retourna prestement. Celle-ci était entrouverte.
- Hé ! s'écria-t-elle.
Quelqu'un les observait du couloir. Vanille se précipita mais la personne avait disparu dans la pénombre.
Que se passait-il ? Qui s'en était pris à Morgane ?
- Aide-moi à l'immobiliser, il faut la calmer...
Oreste et Lorelei perdaient le contrôle de Morgane, qui s'agitait dans des gestes de plus en plus brusques en psalmodiant :
- Il n'est pas venu, il aurait dû venir, ce n'était pas prévu...
Ses yeux étaient exorbités et elle pleurait de plus en plus.
- Il va me punir, je le sais, j'ai manqué quelque chose, j'ai mal fait, j'ai mal fait...
Lorelei et Oreste tentaient vainement de retenir ses grands gestes, elle se débattait. Vanille retourna vers elles, réfléchit un instant, posa sa baguette sur la poitrine de Morgane et dit :
- Pardon Morgane mais c'est la seule solution que nous ayons. Stupefix.
Morgane s'évanouit dans les bras d'Oreste.
- On l'emmène à l'infirmerie, décida cette dernière.
Elles la soulevèrent d'un sort et se dirigèrent vers la porte.
- Il y avait quelqu'un dehors, dans le couloir. Je devrais peut-être surveiller.
Le couloir était vide, sombre et froid. Oreste soulevait Morgane de son sortilège, Lorelei lui tenait la main en essayant de calmer ses soubresauts (malgré le Stupefix), et Vanille surveillait les alentours, la baguette levée.
Elles avancèrent lentement dans le couloir, en direction de l'infirmerie.
Vanille n'était pas rassurée du tout. Morgane avait clairement été victime d'un sortilège, elle n'était pas dans son état normal. Elle ne la connaissait pas bien mais c'était une fille très douce et avenante en temps normal. Et la personne qui s'en était pris à elle était sûrement en train de les suivre, dans l'ombre. Elle devenait paranoïaque et croyait voir des silhouettes lui sauter dessus dans chaque croisement.
Après quelques virages, Vanille entendit distinctement quelqu'un murmurer derrière elle.
- Protego ! S'écria-t-elle en se retournant.
Un sortilège fut arrêté par son bouclier. Elle fixait la noirceur devant elle, un lumos au bout de la baguette, celle-ci tendu au bout de son bras qui tremblait. Personne.
Oreste et Lorelei, qui s'occupaient de Morgane, décidèrent de continuer à avancer, malgré leur angoisse apparente.
Vanille scruta un instant les moindres recoins qu'elle pouvait apercevoir, mais ne vit rien, ni personne, et recula pour les suivre. Qui était là ?
« Dans quoi je me suis embarquée ? Je ne suis pas une Gryffondor moi. »
Leurs pas se faisaient de plus en plus rapides, tout en essayant de maintenir Morgane.
Et à une vingtaine de mètres de l'infirmerie, après le dernier virage, quelqu'un sauta violemment sur Vanille.
Elle tomba ventre à terre et tenta de se débattre un instant, mais son assaillant lui avait pris sa baguette. Il lui asséna un coup de poing sur la tempe qui l'assomma à moitié.
Choquée, allongée au sol, elle vit les ombres de Lorelei et Oreste lâcher Morgane qui effondra lourdement. Lorelei fut expulsée violemment contre un mur d’un sortilège informulé, sa tête heurta la pierre et elle s'évanouit. Vanille cru voir du sang rougir ses cheveux. Oreste perdit sa baguette d'un sort de désarmement, mais l’agresseur garda le sienne pointée vers elle sans attaquer. Il sembla avoir les gestes un peu hésitants face à Oreste. Il resta immobile quelques secondes.
Vanille tenta de se relever mais tomba à genoux au sol, des étoiles devant les yeux, le cerveau embrumé, tandis que la silhouette, encapuchonnée, se rapprochait d'Oreste qui se tenait debout devant Morgane, dans une posture de protection, sans baguette.
Vanille, qui n'arrivait vraiment pas à se relever, roula alors jusqu'aux jambes de l'assaillant qui trébucha. Elle se sentit alors expulsée d’un sortilège et glissa au sol jusqu'à Lorelei, son épaule ripa contre le dallage qui lui arracha quelques couches de peau.
L'assaillant s'était relevé et tendait de nouveau sa baguette vers Oreste, qui elle, tendait sa main vers lui. Vanille, malgré son état de choc, pu sentir la peur et la colère s'émaner d'Oreste, de son regard et de sa voix, quand elle s'écria « Expelliarmus ! »
La baguette de l'autre s'envola. Du sol, Vanille le vit sursauter. Sa capuche se souleva brièvement, et elle reconnu son visage.
Jules.
Oreste, qui l'avait également reconnu, s'immobilisa d'étonnement. Elle entrouvrit la bouche, choquée.
Jules comprit qu'il était démasqué. Il profita du choc pour se précipiter sur sa baguette, tombée plus loin.
Vanille comprit qu'Oreste ne réagirait pas assez vite. Qu’elle ne réagirait plus. Elle se retourna sur Lorelei, toujours évanouie contre le mur, lui arracha sa baguette des mains et la pointa vers Jules qui avait eu le temps de trouver la sienne.
- Oubli...
- Bloclang ! Expelliarmus ! Petrificus totalus !
Les trois sorts eurent l'effet escompté et Jules, désarmé et muet, tomba lourdement au sol.
Vanille baissa la baguette, essoufflée. Oreste tomba à genoux.
Pendant plusieurs secondes, personne ne dit rien. Le couloir, silencieux, était éclairé uniquement des baguettes d'Oreste et de Vanille, tombées plus loin, allumées d'un Lumos.
Vanille commença à trembler. Elle reprit ses esprit et se releva. Le visage fermé, elle alla chercher les baguettes, récupéra celle de Jules et lui lança un Incarcerem pour la forme. Elle se tourna vers Oreste, toujours sur les genoux. Ses lèvres tremblaient. Elle fixait la silhouette de Jules.
Une boule se forma dans son ventre. « Focus, Vanille. »
Elle s'approcha de Lorelei et vérifia qu'elle ne saignait plus, du sang séché collait à ses cheveux blonds et une bosse témoignait de sa brutale rencontre avec le mur.
- Enervatum.
Lorelei prit alors une immense inspiration, comme si elle sortait d'un rêve étouffant. Paniquée, elle tenta de se relever. Vanille la retint par l'épaule.
- Calme. Tout va bien.
- Qu'est-ce qu’il s'est passé ?
Lorelei n'était pas la seule à avoir prononcé ces mots. Derrière la silhouette toujours stupéfiée et tremblotante de Morgane se tenait Mme Pomfresh, l'infirmière.
Enfin, Vanille pleura.
Vanille était assise sur un lit dans l'infirmerie, adossée à de gros coussins confortable. Le confort rassurant post-stress. Elle buvait une solution calmante, chaude et sucrée. Brûlante et écoeurante. Enroulée dans une couverture, elle regardait droit devant elle. Sur le lit d'en face, Morgane était allongée, endormie. Calme. Sauve.
L'infirmière, qui s'affairait à ses côtés, lui avait donné une forte potion, pour qu'elle dorme et reprenne des forces. Elle n'était plus secouée d'aucun soubresaut. En revanche, on avait remarqué une tâche sombre sur son bras, sous son épaule. Comme si on avait injecté de l'encre sous sa peau, et qu'elle avait suivit les veines. Vanille frissonna à ce souvenir. C'était sans aucun doute un maléfice de magie noire.
Sur le lit d'à côté se tenait Lorelei, et Oreste était dans le lit à côté de Vanille. Toutes les trois buvaient leur potion comme on buvait une tisane du soir. Ordre de l'infirmière. Du calme.
Oreste gardait les yeux fixés sur le lit du fond, caché par des rideaux. Jules y avait été allongé. Il était éveillé et avait reçu pour instruction de ne pas bouger. On ne l'entendait pas, mais Oreste n'arrivait pas à regarder ailleurs. Elle buvait lentement, comme si chaque gorgée était un rappel que ce qui s'était passé cette nuit-là était réel. Elle n'en avait pas parlé. D'ailleurs, elle n'avait plus parlé du tout, dès qu'elle avait vu le visage de son ami sous la capuche de l'assaillant.
Près du bureau de l'infirmière, la directrice, Mme Roy, discutait avec deux hommes. Des aurors.
Quand l'infirmière eut prévenu la directrice, après s'être précipitée à l'encontre du vacarme qui l'avait éveillée, celle-ci, après avoir compris de quoi il en retournait selon les dires d'Oreste et Lorelei, les avait appelés immédiatement.
Vanille s'était mise à pleurer de manière incontrôlable. Elle était en état de choc. S'être battue avec Jules l'avait retournée. S'être battue tout court à vrai dire. Elle ne comprenait toujours pas le pourquoi de ces événements, et s'imaginait les pires scénarios. Elle ne savait pas non plus comment elle en était venue à se battre. Elle qui pensait avoir un instinct plutôt lâche, elle s'était surprise elle-même à lancer tous ces sortilèges. Elle avait tremblé comme si elle s'était retrouvée nue dans la neige. L'infirmière avait eut du mal à la remettre debout pour les quelques mètres qui la séparait de l'infirmerie.
Assise sur son lit, elle s’était rendu compte que sa tempe gauche la lançait terriblement. Elle s’arracha à elle-même une grimace en y posant sa main. La peau de son épaule était écorchée, mais rien qui ne puisse être réparé d’un habile coup de baguette.
La potion calmait lentement la douleur et le choc. Peu à peu, son poul reprenait une vitesse normale. Sa respiration, un peu douloureuse, ne témoignait plus des évènements que par des longs soupirs incontrôlés. La directrice et les aurors avaient demandé à les interroger avant qu'elles ne dorment, mais l'infirmière avait insisté pour que leur choc soit un peu passé.
Les aurors s'approchèrent du lit de Vanille, accompagnés de la directrice. Elle les regarda distraitement. L'un d'eux portait les marques de dures années de service, si le stress et la fatigue avaient dû avoir un visage, ç'aurait été le sien. Ses yeux semblaient porter une éternelle colère.
L'autre était bien plus jeune, il avait des cheveux ébouriffés d'un noir jais, des lunettes rondes et n'avait qu'une seule cicatrice, sur son front, en forme d'éclair.
Vanille fut à peine choquée de rencontrer Harry Potter en personne. Comme si tout était normal. Elle venait d'être attaquée - et d’attaquer - un ami, et le Survivant, celui qui avait abattu le plus grand mage noir de tout les temps, venait pour l'interroger.
La situation devait être plus grave qu'elle ne le réalisait. Avait-elle seulement comprit ce qu'elle avait vécu ?
- Bonsoir, mademoiselle... Ocean ? Vanille Ocean, c'est cela ? demanda le plus âgé.
Vanille aqcuiesca, tandis que Potter fronçait les sourcils, l'air passablement étonné, en prenant des notes.
- Pourriez-vous nous raconter en détails ce qui s'est passé ce soir ?
Elle s'exécuta, comme un automate. Elle se remémora tous les détails de sa soirée et les débita, sans émotion, sans vie. Elle avait dû évacuer toutes ses larmes.
Elle expliqua qu'elles étaient restées tard pour travailler sur un projet personnel (et affirma avoir l'autorisation de rester aussi tard dans le château, ce que la directrice confirma), et qu'elles avaient trouvé Morgane dans un état inquiétant. Elle leur raconta que quelqu'un les avait suivit tout le long du chemin. Que cette personne les avait agressées. Qu'elles avaient reconnu Jules, un ami commun. Qu'elle avait comprit qu'Oreste n'arrivait pas à réagir face à son ami, et qu'elle avait donc décidé de le désarmer seule. Puis qu'elle avait essayé de réanimer Lorelei et Morgane.
- Et quand l'infirmière est arrivée... Je...
Elle détourna les yeux. Ne pas revivre, ne pas repleurer. C'était inutile.
- Merci. Nous ne vous embêterons pas plus.
Ils inclinèrent légèrement la tête pour lui faire passer un message, sûrement quelque chose comme « Courage ». Un brin de compréhension se lut dans leurs yeux. Elle se sentit soudain si jeune. Toute petite. Et puis, Harry Potter eut un début de geste, comme un réflexe, celui de poser sa main sur son épaule. Un élan de compassion sans doute. Lui avait vécu tellement pire. Et tellement plus jeune qu’elle. Ce geste, cet élan ne dura qu'une demi seconde, puis il se ravisa, professionnel.
Ils se dirigèrent vers le lit d'Oreste pour entendre sa version. Dès que Vanille fut seule, l'infirmière se précipita sur elle et la força à boire une potion en lui enfonçant le goulot d'une fiole presque jusqu'à la glotte, dans un geste possiblement énervé, qui la plongea instantanément dans un profond sommeil.
Le lendemain, en se réveillant, son premier réflexe fut de se relever et de chercher Jules du regard. Son lit était vide. Il avait dû partir pendant la nuit. Il n'avait certainement pas dû dormir ici. Ils ne l'auraient pas laissé seul dans l'infirmerie avec les quatre personnes qu'il avait attaquées.
Elle se rallongea. Elle n'avait pas pu entendre les versions d'Oreste et Lorelei, et n'avait pas non plus entendu l'interrogatoire de Jules, s'il y en avait eu un.
Elle ne comprenait toujours pas pourquoi.
Qu'avait-il fait à Morgane? Comment avait-il pu lui faire du mal de la sorte? Dans quel but, depuis quand, y avait-il seulement une raison... Tenait-il tant à ses secrets pour avoir attaqué trois de ses consoeurs, trois membres du Club des Créateurs avec qui il était lié à vie ? Avec qui des liens profonds, magiques et émotionnels s'étaient forcément créés, même si Vanille n'avait jamais vraiment eu de discussion profonde ni avec lui ni avec Morgane. Pour les avoir attaquées et avoir tenté de leur faire oublier leurs souvenirs ?
Usait-il de son sortilège d'Oubliettes depuis longtemps ? Qui l'avait déjà subit à son insu ?
Tout cela en avait-il vraiment valu la peine ?
Etait-il donc si mauvais ?
Et Vanille était-elle donc si naïve de n'avoir rien vu venir ?
Toutes ces pensées tournoyaient dans son esprit sans relâche. Elle se sentait à la fois trahie et pathétique.
Etait-ce cela, le mauvais pressentiment qu'elle avait eu au début de l'année, lorsqu'elle avait hésité à entrer dans le Club ? Cette sensation, ce cri dans ses propres tripes qui lui disaient d'éviter à tout prix de se lancer là-dedans. Elle n'avait pas écouté cette petite voix. Pourquoi l'aurait-elle fait.
Que se serait-il passé si les trois Créatrices n'avait pas voulu poursuivre leurs travaux jusqu'à tard dans la nuit ? Qui aurait découvert Morgane ? Jules aurait pu entrer dans la salle. Il aurait fait... ce qu'il comptait faire. Quoi que ce soit. Et on n'aurait peut-être jamais découvert les maux de Morgane. Peut-être subissait-elle des mauvais traitements depuis des jours, des semaines ou des mois, peut-être oubliait-elle tout, tous les matins au réveil.
Et si Vanille n'avait pas réussit ses sortilèges ? Si la peur avait bloqué sa gorge, comme le choc avait bloqué celle d'Oreste, qu'aurait-il fait ? Se seraient-elle réveillées toutes les trois, dans leur dortoir, avec la vague impression d'avoir fait quelque chose la veille, mais sans plus ?
Qui aurait pu prévoir tout cela ? Qui aurait pu deviner que Jules était le genre de Sorcier à attaquer les autres, et au nom de quoi ? Elle n'en savait toujours rien, et c'était peut-être le pire, elle l'imaginait baigné dans la magie noire, créant de nombreux sortilèges terribles et usant de Morgane comme sujet...
La marque noire sur son bras, cela venait-il d'un sort noir, cela venait-il de la baguette de Jules ?
Elle regarda Morgane qui dormait encore profondément. Irait-elle mieux ?
Dans ces sombres pensées, Vanille songea à Leanne. Elle avait quitté le Club des Créateurs, et Vanille n’avait jamais vraiment comprit pourquoi. Leanne avait été la Novice de Jules. Se pourrait-il qu’elle aussi ai subit ces horreurs ? Qu’elle se soit faite manipuler ? Il lui semblait se souvenir qu’Ambre avait vaguement évoqué Jules, lorsqu’elles avaient parlé du départ de leur amie.
Mais Vanille avait été aveugle. Non, elle avait fermé les yeux. Elle avait ignoré la détresse de son amie, elle ne l’avait pas écoutée. Peut-être aurait-elle pu essayer d’arranger la situation bien plus tôt, peut-être même avant que Leanne ne s’en aille, si seulement elle l’avait écoutée.
Une vague de culpabilité lui rongeait la gorge. Ses mains tremblaient légèrement sous ses draps. Leanne n’était pas la seule personne qu’elle avait refusé d’écouter.
Elle pensa à Nathan. « Fais attention. » « Il se passe des choses au Club. » Il savait. Ou du moins il se doutait de quelque chose. Il savait et il n'avait rien fait, rien dit à personne.
Si, il avait tenté de prévenir Vanille. Il lui avait justement dit de faire attention à ses fréquentations. Il lui avait tendu la main, avait tenté une autre approche pour passer ce mur que Vanille avait instantanément hissé entre eux, pour lui faire comprendre ce qu'il savait. Et elle l'avait ignoré.
Pourquoi n'avait-il pas tenté de prévenir les autres ?
L'auraient-ils seulement cru. Jules était très aimé. Pour preuve, le choc d'Oreste quand elle l'avait reconnu.
Ses yeux suivirent ses pensées et se tournèrent vers Oreste. Elle était éveillée. Assise, les bras autour des genoux, elle rendit à Vanille son regard.
Triste, un peu amère. Rougit par des larmes nocturnes et silencieuses.
- Comment vas-tu ?
Vanille ne savait pas vraiment. Elle allait bien, elle n'était pas blessée, elle n'était plus fatiguée.
Elle voulait juste des réponses.
Réponses qui viendraient en temps voulu, elle le savait. Il le fallait.
- Tu as fait de la magie sans baguette. Comment cela peut-il aller mal ?
Le visage d'Oreste s'éclaira.
- J'ai fait de la magie sans baguette. De la magie volontaire, précise, dosée. Il faudra que je prenne des notes sur...
Elle s'interrompit. Vanille savait à quoi elle venait de penser.
- C'était un magnifique sortilège de désarmement.
Oreste s'assombrit légèrement.
- Quand tu réussiras à mettre le contexte de côté, quand tout ceci ne sera qu'un souvenir et plus une source d'émotions, tu réaliseras ce que tu as fait. Et ce que tu as fait, c'est lancer un sortilège parfaitement efficace, sans entraînement, et sans baguette.
- Depuis quand es-tu experte en réconfort ? s'amusa Oreste.
Ce fut au tour de Vanille de s'assombrir. « Peut-être depuis que j'ai compris que ma naïveté pouvait être une faiblesse. Et qu'elle aurait pu coûter cher. »
Elle ne répondit rien.
- Tu as également lancé de très bons sortilèges. Et je pense que tu l'ignores, mais la baguette de Lorelei, que tu as utilisée, est en frêne. Le frêne fait des baguettes très fidèles à leur propriétaire. Tu as dû l'impresionner pour qu'elle te réponde aussi bien.
- Tu n’es pas censée ne pas croire en la volonté propre des baguettes ?
- Oh, tu sais, dit Oreste en haussant les épaules ironiquement, maintenant que j'ai trouvé comment faire de la magie sans baguette, il faut bien que j'ouvre mon esprit à de nouvelles choses.
- Eh bien pendant que tu te reconvertiras dans la conscience des baguettes, j'irai postuler pour devenir auror, je crois que j'ai un don naturel de sorcière d’action.
- Tu prends la grosse tête. On en reparle de ta roulade comme attaque surprise ?
Les deux filles rirent de concert.
Cela leur fit du bien.
End Notes:
Tadaa ! ça sent la fin de l'année ou c'est moi ? D'ici quelques chapitres on aura fini la cinquième année de Vanille... Je commence à rattraper mon avance dans l'écriture, ça ne va pas du tout. Allez au boulot, hop hop on sort ses plumes.
Merci d'avoir lu jusqu'ici ! Une petite review pour le moral ? :D
Des infos, des détails et des bonus sur mes fanfics : http://laplumededeanna.blogspot.fr !
Des explications by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous !
Tout d'abord un immeeeense merci pour vos review, en soi c'est déjà super d'avoir des commentaires mais en plus vous êtes vraiment gentils, ça m'encourage vraiment de savoir que l'histoire vous plaît. Vous êtes géniaux !
Ensuite je viens faire ma pub ! J'ai ouvert un blog sur mes textes, pour l'instant il n'est pas très rempli mais je compte y mettre des infos supplémentaires sur ce que je publie (mes fanfics et mes originaux), des détails que je ne compte pas mettre dans l'histoire (le règlement du Club, un article de la gazette, des fiches de personnages...). (J'ai mis cette pub dans les notes des chapitres précédents mais j'officialise ici)
http://laplumededeanna.blogspot.fr/
Et donc, voici un nouveau chapitre ! Comme son nom (Des explications) l'indique, il n'y aura pas d'action, beaucoup de blabla, mais je pense que la dernière partie plaira à certains d'entre vous qui aimez... certains personnages ;)
Dernière petite chose et je vous laisse, je pense avoir trouvé mon rythme de publication, tous les mercredi. Je ne promets rien mais je vais essayer de rester régulière.
Bonne lecture !
Mme Roy ouvrit grand les bras, comme si elle voulait enlacer les élèves devant elle.
- Merci d'être tous venus. Ce qu'il s'est passé hier est très grave, et vous devez être mis au courant.
La directrice affichait un air sobre, mais quelque chose dans ses yeux brillait. C'était peut-être de la peine.
Tous les membres du Club étaient présents. Autour de la grande table ronde, ils attendaient, stoïques. Ils ne savaient rien, mais se doutaient, en effet, de la gravité de la situation. Ils étaient silencieux et immobiles.
Seuls Jules et Morgane manquaient.
- Mr Wincher, votre Maître Créateur, a été interrogé et arrêté hier par les Aurors. Il pratiquait des activités illicites, et dangereuses, particulièrement envers Miss Brave .
Il y eut des exclamations étouffées. Plusieurs Créateurs plaquèrent leurs mains devant la bouche.
Ce n'était pas possible, se disaient-ils. Elle devait se tromper. Seules Vanille, Oreste et Lorelei restèrent de marbre, fixées sur leur directrice. Elles n'attendaient qu'une chose. Des explications.
Ce fut de la compassion qui passa dans ses yeux.
- Mr Wincher travaillait depuis plusieurs mois sur des sortilèges de magie noire. Des sorts de manipulation, de contrôle, de destruction. Miss Brave était... sa cobaye. Elle était consentante, au début, puis il l'a convaincue autrement lorsqu'elle a commencé à émettre des doutes. Il lui faisait subir un sortilège d'amnésie régulièrement. Nous avons retrouvé sur son corps plusieurs marques de sortilèges dont personne ne connaissait l'existence. Elle en gardera des séquelles, peut-être à vie. Elle n'est plus en danger aujourd'hui, mais a été transférée à Ste Mangouste.
Alors c'était cela. C'était aussi bête, aussi simple que cela. Une envie soudaine de créer des sortilèges dangereux, l'idée toute bête que si Morgane ne voulait pas aider, elle méritait d'être maltraitée.
Vanille serra les poings. Ses phalanges craquèrent. Tout ça pour ça.
La directrice le remarqua et son regard se transforma. Indescriptible.
- Hier soir, vos camarades ici présentes (elle tendit la main vers les trois filles qui étaient parfaitement immobiles) ont trouvé Miss Brave dans un état critique et l'ont emmenée à l'infirmerie. Sur le chemin, Jules les a attaquées, pour préserver son secret. Elles l'ont immobilisé.
- Je n'ai rien fait, murmura Lorelei, le regard flamboyant de colère. Il m'avait assommée. Oreste et Vanille lui ont réglé son compte seules.
Un sanglot retentit autour de la salle après cette affirmation. La petite Annabelle avait du mal à y croire. Elle était proche de Jules. Vanille lança un regard à Ambre, qui gardait le visage fermé. Vanille lui avait tout expliqué.
Mme Roy décida d’ignorer la remarque de Lorelei. L’heure n’était pas à savoir qui était le héro de l’histoire.
- Je me dois d'expliquer aux autres élèves pourquoi Mr Wincher a été renvoyé de Poudlard. Je vous demanderai de bien vouloir suivre la version officielle. Il va de soi qu'il est définitivement radié du Club – et que vous n'avez dorénavant plus de Maître Créateur. Il vous reste quinze jours avant les examens. Si vous le souhaitez, vous pouvez en réélire un, provisoirement, pour les protocoles et réunions.
Elle se tourna vers Oreste, Vanille et Lorelei.
- Mesdemoiselles, je suis navrée que vous vous soyez retrouvées dans cette situation. Et même si c'est difficile, peut-être même inapproprié, j'aimerais vous féliciter pour votre sang-froid et votre efficacité. Vous lui avez sans doute évité beaucoup.
Elle s'adressa ensuite à tout le Club :
- Je sais que ce sont des moments difficile. Votre club est très soudé, vous aimez votre ami. Je connais aussi les règles implicites, les non-dits. Vous souhaiteriez peut-être soutenir Mr Wincher, ce que je comprendrais, tant que vous ne lui avez pas parlé, vous ne pouvez comprendre ses motivations. Moi-même je ne les ai pas comprises, bien que je les ai entendues.
Elle balaya la table du regard, s'arrêtant sur chacun des membres du Club, tous le visage fermé.
- Le Club est et reste bon. Votre liberté d'action vous permet de faire des recherches incroyables. Mr Wincher a simplement décidé de prendre des mauvaises décisions, il s'est embarqué sur une mauvaise pente. Il ne faut pas pardonner, il faut accepter. Et surtout, il faut continuer dans votre lancée. Je connais le potentiel de beaucoup d'entre vous.
Son regard s'attarda sur Oreste un instant. Puis, elle observa Vanille. Cette dernière vit briller quelque chose d'autre dans ses yeux – ni de la peine, ni de la compassion. Vanille ne savait pas très bien lire le regard des gens, aussi, elle crut se tromper quand elle y vit une lueur de défi. Cela ne dura qu'une seconde.
- Je vais vous laisser entre vous. Je vous donnerai des nouvelles de Morgane aussi régulièrement que possible.
Elle se retourna dans un mouvement gracieux et sorti de la pièce en silence.
Personne ne bougea. Ils ne se regardaient pas. Vanille pouvait sentir le choc et le désarroi de chacun des membres de son Club. Elle ne se sentait pas fière d'elle, au contraire, elle sentait monter en elle une culpabilité grandissante. Elle n'avait rien vu venir. Elle aurait dû essayer de comprendre ce que Nathan voulait lui dire, elle aurait dû se souvenir de ce que Ambre lui avait dit. « Leanne se sent parfois étrange avec Jules. » Elle aurait dû voir les changements de comportements de Morgane, mais comment l'aurait-elle pu ? Elle était renfermée sur elle-même.
Ambre avait entièrement raison. Elle s'était détourné de ses amies, détourné de ceux qui l'entouraient, elle s'était fermée à toute nouvelle rencontre. Elle s'était concentrée sur les études, les recherches, Oreste, la magie. Rien d'autre.
Elle avait perdu Leanne, et même si elles discutaient encore aujourd'hui, rien n'était pareil. Evidemment. Elle aurait dû lui parler de tout, lui expliquer, la convaincre elle, et non pas manipuler Jules pour le forcer à faire entrer Leanne au Club. Elle ne valait pas mieux que lui. Sur le moment, elle s'était dit qu'ils lui devaient bien cela, après tout, ils ne lui disaient pas tout. Elle ne savait toujours pas pourquoi Jules voulait tellement l'avoir dans le Club. Au final, cela ne lui aura pas été bénéfique.
Et même si elle était entourée, elle n'était proche de personne. Elle n'avait pas vu le rapprochement entre Lorelei et Oreste, alors qu'elle travaillait avec elles depuis des mois ! Personne autour de la table n'avait l'air étonné de les voir l'une à côté de l'autre, main dans la main.
Elle était seule et même si elle avait arrêté Jules, elle se sentait responsable de tout. Et surtout, elle se sentait présomptueuse de se sentir responsable.
Vanille Ocean. Aveugle, naïve, prétentieuse.
Elle se leva. La tension qui s'était accumulée se dissipa, et l'attention qui s'était évaporée se recentra. Elle cru un instant voir de l'espoir dans les yeux des autres membres du Club. Dans les yeux de ses... amis. L'espoir qu'elle dise quelque chose de rassurant, qu'elle leur annonce que ce n'était qu'une blague. Ou qu'elle avait prit une décision qui remettrait le Club sur une bonne voie. Elle lu tout ça et se sentit plus mal encore, si c'était possible, de ce qu'elle allait dire.
Mais elle n'en pouvait plus.
- Je vais quitter le Club.
Ambre eut soudain un rire bref et incontrôlable, dénué de toute bonne humeur.
- Je pensais que tu te présentais pour être Maître Créatrice.
- Quoi ? Non !
- J'avoue que j'y ai aussi cru, lança Annabelle.
- Moi aussi, murmura Oreste.
Il n'y avait pas de moquerie dans leurs voix. Elle se rassit.
- N'importe quoi.
- Pourquoi veux-tu quitter le Club ?
Alexandre avait le visage grave.
- Je ne me sens pas... bien. Ici. Je veux dire... je n'ai rien vu venir. Avec Jules. J'aurais dû...
- Et nous alors, tu crois qu'on a vu quelque chose ? demanda Oreste.
- Quand tu m'as parlé de ce soutien qu'on devait avoir entre nous... Je veux dire, je n'aurais jamais cautionné ça. Et pourtant, c'était mon Maître Créateur. J'avais confiance en lui.
- Personne n'était au courant.
Oreste lança un regard autour de la table, pour s'en assurer. Ils affirmèrent tous.
- Et je n'aurais pas cautionné non plus. Tu n'as rien fait de mal.
Vanille n'arrivait pas à mettre des mots sur ce qu'elle ressentait.
- Ce que tu ressens est normal. Tu as vécu des moments difficiles. Tu n'as pas à te sentir responsable de quoi que ce soit, lui dit Oreste en posant sa main sur son épaule.
- On avait tous confiance en lui.
- Après ce qui tu as fait hier, tu crois que tu n'as pas ta place dans le Club ?
Elle regarda autour d'elle. Ils avaient tous l'air étonnés de la voir incertaine.
- Hors de question que tu partes ! s'exclama Ambre.
- Ca ira mieux, on traversera ça tous ensemble, renchérit Annabelle. Tu as vécu l'événement plus frontalement que nous. Mais on ne te laissera pas seule.
- Tu ne te rends pas compte de tout ce que tu as accomplis ici ? Et tu as des projets il me semble, dit Oreste.
- Je n'ai pas fait grand-chose.
- Tu plaisantes ? Tu m'as été d'une grande aide. Sans toi, je n'aurais jamais réussi, aujoud'hui grâce à toi – et à Lorelei – je vais pouvoir intégrer le Département des Mystères. C'est dans la poche.
- Attend, s'exclama Florent, tu as fini tes recherches ?
- J'ai atteint le point culminant, j'ai réussi mon pari. J'ai réussi à lancer des sortilèges sans baguette. Je ne vais pas avancer plus loin, du moins pas ici. Je vais soumettre mon projet au Département des Mystères, je continuerai là-bas.
Les autres l'acclamèrent.
- On savait que tu y arriverais, la congratula Iris.
L'ambiance commençait à se réchauffer doucement. Ils tentait tous du mieux qu'ils pouvaient de passer à autre chose. Du moins, de penser à autre chose.
Vanille se sentait soulagée d'un poids. Elle avait été soutenue par les autres membres, ils voulaient la voir rester. Ils lui pardonnaient – du moins ne lui en voulaient pas. Elle se sentit alors pleinement heureuse, mais d'une manière différente du début d'année.
Le premier jour, elle s'était sentie à sa place, dans ce cadre d'études sur la magie. Le Club, la salle, les recherches d'Oreste, la magie qui suintait des murs, c'était là qu'elle s'était sentie à sa place.
Mais aujourd'hui, un autre sentiment l'habitait. Elle n'était plus seulement chez elle. Elle avait trouvé des amis. Une famille dans ce Club. Elle se sentit faire part de quelque chose de plus grand qu'elle, qui l'incluait totalement. Elle faisait partie de ce tout qu'était le Club. Et sans elle, le Club ne serait pas le même. Il en allait de même pour chacun de ses membres.
Chacun d'entre eux, qu'elle connaissait, dont elle appréciait la compagnie. Mais si un seul d'entre eux – même les jumelles – s'était retrouvé mal, avait des soucis, elle les soutiendrait.
Puis, au milieu d'un brouhaha timide, David se leva.
- Quoi, toi aussi, tu veux partir ? plaisanta Ambre.
- Ne dit pas n'importe quoi. Non, je voudrais me présenter comme Maître Créateur pour les deux semaines restantes. Je sais bien que je n'ai aucune expérience, mais si ça peut aider le Club à retomber sur ses pieds. Et puis – il se tourna vers Oreste – nous sommes les deux derniers Grands Créateurs.
- Je vote pour toi, s'exclame Kerwan, l'autre Novice de David.
- Les Novices ne votent pas, contra Iris.
- Est-ce que cela convient à tout le monde ? demanda David.
Il s'adressait particulièrement à Oreste.
- Tu t'y connais bien mieux que moi en paperasse. Mais après ce que tu as vécu, je pensais essayer de t'éviter ce stress.
- Merci, lui souffla Oreste. Je t'aiderais, bien entendu.
Il fit le tour de la table du regard. Tous acquiescèrent, même les Novices, n'en déplaise à Iris. Vanille également, n'ayant évidemment aucune raison de refuser.
- Parfait.
Il avait le sourire un peu crispé de celui qui ne savait pas vraiment dans quoi il s'était lancé.
- Dans deux semaines, nous passons les ASPICs et les Novices passeront leurs BUSEs. Puis, dans les jours qui séparent les épreuves du retour, nous auront une dernière réunion. Les Novices y seront invités, cette fois-ci.
Vanille avait en effet tiqué à « dernière », elle ne savait pas – ou avait oublié qu'ils tenaient des réunions régulières. C'était logique.
Elle se reprit. Focus. Plus d'évasion.
- Nous pourrons vous passer le flambeau, vous expliquer quoi faire, où trouver certaines informations. Les relations avec le ministère, l'élection du Maître Créateur, la présentation, on vous expliquera tout. Je crois que pour l'instant, tout est dit.
Il s'assombrit.
- Je voudrais juste vous dire, et je vous le répéterai, que nous sommes tous unis, ici, dans cette salle. Ainsi que dehors. Nos relations vont perdurer dans le temps. Et ce même temps saura nous faire surmonter l'épreuve à laquelle nous avons à faire face. Mais soyons honnêtes. Du moins, je vais l'être avec nous. J'aime Jules. Il est mon ami, et je ne comprends pas pourquoi il a fait... tout ce qu'il a fait. Je ne l'en croyais pas capable, et j'en suis encore choqué. Mais je l'accepte.
Certains sursautèrent.
- Je sais, je sais, laissez-moi m'expliquer. Je ne lui pardonne pas ce qu'il a fait à Morgane, elle aussi est mon amie. Mais quand j'aurais parlé avec elle, quand j'aurai parlé avec lui – parce que je le ferai, et si vous le voulez aussi, faites-le – là, je déciderai de mon jugement. N'en déplaise à Roy, n'en déplaise au ministère. Nous sommes liés, quoi qu'ils disent. Vous pouvez le haïr, vous pouvez lui en vouloir, ne jamais lui pardonner, ne jamais lui reparler. Vous pouvez tous faire ce choix. Mais surtout, surtout, respectez chacun les choix des autres. C'est le plus important, pour rester unis. Pour rester dignes d'être membres du Club des Créateurs.
Ce discours accrocha à Vanille un immense sourire. Il avait trouvé les bon mots. David aurait été un excellent Maître Créateur.
Elle oscillait entre tristesse et satisfaction. Et finalement, entourée du Club des Créateurs, elle choisit d'avancer.
Les jours qui suivirent furent étranges entre les murs du Club. Les travaux peinaient à reprendre. Certains membres s’étaient remis à leurs Créations mais finissaient toujours, au bout d’une heure, par s’asseoir quelque part pour discuter, incapables de se concentrer.
Vanille n’avait plus rien à y faire, plus rien en tant que Créatrice. Elle ne voulait pas reprendre ses propres recherches. Le mot de menaces tournoyait dans ses pensées dès qu’elle se projetait, dès qu’une idée apparaissait. A peine notait-elle cette idée sur son parchemin pour ensuite le fourrer dans son sac. Une sorte de méfiance l’accompagnait parfois, la poussant à se cacher pour sortir ses recherches.
Oreste n’avait plus besoin d’aide. Elle avait fait le tri sur ses dernières découvertes dès qu’elle en eu le courage, puis avait contacté le ministère. Elle ne se montrait presque plus au Club. Lorelei n’était pas revenue une fois depuis l’incident.
Vanille si. Dès qu’elle avait un temps libre, elle s’y était rendue. Elle fuyait la solitude de la bibliothèque, et le sérieux de la salle commune pour venir réviser ses BUSEs au Club, même si l’endroit n’était pas indiqué. Elle s’en fichait. Elle mettait en évidence ses livres, comme pour signifier à tous ceux présents qu’elle n’étudiait pas la magie.
C’en était ridicule de paranoïa, mais elle n’arrivait pas à s’en empêcher. La lettre avait finalement eut l’effet escompté. Elle avait peur de faire ce qu’elle voulait. Décidément, le courage était bien éphémère chez elle. Peut-être, sûrement même, que l’histoire de Jules l’avait poussée dans ce sens. Vers la méfiance. Quelqu’un l’avait menacée, quelqu’un qui l’avait entendue parler de ses études. Quelqu’un du Club donc. Mais elle ne voulait pas se méfier d’eux. Comment pouvait-elle avancer si ceux avec qui elle était le plus liée étaient dans sa tête une potentielle menace ? Elle les considérait tous incapables de faire du mal.
Mais Jules lui avait prouvé le contraire. Jules était toujours là, dans son esprit, à lui rappeler que malgré tous ses bons sentiments, malgré leurs liens, leurs promesses, malgré l’entraide et les sourires, ils n’étaient pas à l’abris de la stupidité, de la vanité, de l’égoïsme…
Elle ne devait pas se dire qu’ils étaient tous potentiellement dangereux ou mauvais. Elle devait surtout se souvenir que n’importe qui pouvait avoir des secrets.
Vanille sortit de ses réflexions, assise dans un coin d’où elle pouvait voir toute la pièce. Elle regarda un à un les quelques membres présents. Avaient-ils des secrets ? Annabelle, qu’étudiait-elle, seule, sans demander l’aide ne serait-ce que d’un Jeune Créateur ? Arya et Alya, pourquoi lui inspiraient-elles autant d’antipathie, alors qu’elle n’avaient jamais prononcé une seule mauvaise parole ? Elle regarda Octave, Olivier, Ambre et Kerwan discuter. Auraient-ils un jour eux aussi leurs propres idées de ce qu’était le Club ? Au point d’en venir à renier tout bon sens ? Avaient-ils déjà des secrets, sombres et inavouables ?
Elle sortit de sa contemplation en sentant quelqu’un s’asseoir à ses côtés. Nathan s’adossa au mur contre lequel elle avait elle-même échoué son dos depuis maintenant plus d’une heure. Vanille resta silencieuse. Elle ne savait pas quoi lui dire. Lui aussi avait des secrets, bien plus que n’importe qui.
Lui non plus ne dit rien. Ils restèrent un moment là, sans se regarder, les yeux dans le vide.
Elle tourna la tête vers lui, et comprit pourquoi il restait ainsi, muet. Elle se souvenait de ces quelques fois où ils avaient discuté. Lui qui avait comprit, anticipé, deviné ce à quoi elle pensait. Elle qui s’était énervée. A chaque fois. Puis il lui avait tendu la main, lui avait proposé de parler, mais elle n’avait jamais répondu.
C’était à elle de faire un pas.
- Tu savais n’est-ce pas ?
Elle le vit baisser les yeux sur ses mains blanches et osseuses.
- Pas tout. Je savais qu’il était… capable de choses terribles. Qu’il mentait, pas dans ses paroles mais dans ses actes.
- Tu as essayé de me prévenir. Je ne t’ai pas écouté.
- Ta culpabilité ne te mènera à rien. Tu n’aurais rien pu changer. Je n’aurais rien pu changer non plus. Et tu étais la seule à avoir une faible chance de me croire.
Vanille le dévisagea, impoliment mais sans aucun ressentiment.
- Comment est-ce que tu sais tout ça ? Comment est-ce que tu ressens toutes ces choses ?
Vanille s’était rendu compte que tout ce qu’il semblait comprendre, toutes ces choses qu’il savait sur elle et sur les gens qui l’entouraient devait être un poids pour lui. Même si elle ne la comprenait pas, sa situation ne devait pas être facile.
Il se tourna à son tour vers elle et lui sourit.
- Merci de ta compassion. Je n’ai jamais mis de mot dessus. Je ressens certaines choses. Quand je regarde les personnes autour de moi, quand je les écoute, je devine… non, je sais, je comprends leurs ressentis. Je ne lis pas dans leurs pensées, je comprends leurs émotions, je les interprète, et je sais à quoi ils pensent. Je comprends leurs visages, leurs paroles, mais parfois ça va plus loin que ça, je peux voir vers qui sont dirigées leurs pensées sans qu’ils ne disent un mot, je sais leurs ambitions quand ils rêvassent. Pour certains, j’arrive à deviner ce qu’ils seront.
- Et le fait d’être “discret”, comme tu me disais ? Comment fais-tu ?
- Je le décide. Si je veux que personne ne me voit, alors on m’ignore. Et je peux englober d’autres personnes avec moi.
- Comme là, devina Vanille, qui voyait autour d’elle certaines personnes s’agiter sans lui offrir le moindre regard, alors que depuis l’incident, ils venaient tous à tour de rôle s’enquérir de son état.
- Comme là. J’espère que ça ne te dérange pas.
- Tu sens très bien que ce n’est pas le cas.
Elle soupira.
- Pardonne-moi d’avoir été aussi… autant… sur la défensive. Je suis un peu lâche, et je ne te comprenais pas, tu me faisais peur. Et plutôt que d’essayer, je me suis braquée et je t’ai engueulé. Ce n’était pas vraiment juste.
- Je te comprends. Je ne savais pas à quoi m’attendre, alors je n’ai pas été déçu de ta réaction. Tu étais la première personne à qui j’en parlais.
- Vraiment ? Mais, et… et…
Le nom n’arrivait pas à sortir de sa gorge.
- Jules ne savait rien. Il pensait que j’était un médium. Un devin.
- Tu es bien plus que cela n’est-ce pas ?
Il hésita.
- Je ne sais pas ce que je suis. Je ne sais pas pourquoi je sais faire toutes ces choses.
- Il y a d’autres choses que tu… Non, laisse, changea d’avis Vanille.
Elle sentait que le moment était lourd en émotions pour lui. Il ne s’était apparemment jamais confié ainsi. Il avait toujours gardé pour lui toutes ces choses, et aujourd’hui, il les lui confiait, à elle, sans raison. Elle ne savait pas trop si elle méritait tous ces aveux. Elle était bien plus prête à les recevoir qu’en début d’année lorsqu’il était venu lui dire de s’inscrire au Club.
Un instant passa, dans un calme apaisant. Puis, elle sentit sur sa main se poser celle de Nathan. Elle fut tentée de la retirer, gênée par ce rapprochement soudain auquel elle n’était pas du tout préparée, quand quelque chose vibra entre eux, littéralement.
“Je peux faire ça aussi.”
Elle sursauta et retira brusquement sa main. Elle n’avait pas entendu ces mots avec ses oreilles. Elle les avait entendus directement dans sa tête.
- C’est… tu as…
- Il faut qu’il y ait un contact physique.
Il lui prit le bout des doigts.
“Je peux communiquer avec les gens que je touche. Tu peux aussi me parler.”
“Woaw comment il arrive à faire ça… C’est dingue ! Heureusement que c’est ça, un instant j’ai cru que…”
Elle retira vivement ses doigts et rougit. Il lui lança un regard amusé, et ses yeux pétillaient. Ils n’évoquaient aucune tristesse. Pour la première fois, Vanille su lire dans le regard de quelqu’un. Nathan était soulagé. Il avait du garder ces secrets pour lui bien longtemps pour se sentir libéré ainsi.
Mais elle se demanda comment, puisqu’il semblait avoir gardé ces secrest pour lui, il savait qu’il pouvait communiquer ainsi.
- Mon frère, murmura doucement Nathan.
Il ne dit rien de plus à ce sujet. Vanille eut le bon goût de ne pas insister. Elle laissa un moment passer, digérant les informations.
- J’ai une dernière question.
- Une dernière vraiment ? se moqua-t-il.
- Oui, j’en ai plein. Mais il n’y en a qu’une que j’aimerais te poser. Ju… Alexandre m’a parlé de toi, il m’a dit que tu avais quelque chose à voir avec le fait d’accepter ou non des élèves comme Novices. Qu’est-ce qu’il voulait dire ?
- Le Club fait un pré-repérage, le soir de la rentrée, tu en sauras plus pendant la dernière réunion. Depuis que je suis au Club, quand ils hésitent devant les demandes malgré leurs… techniques, ils me demandent. Ils pensent que je vois dans le futur et que je sais si les prétendants seront des sorciers puissants, dignes du Club. En réalité, je vois surtout leur potentiel.
- Ils t’ont demandé pour moi je suppose. C’est pour ça que Jules… qu’il voulait que j’entre dans le Club ?
- Il n’avait aucune raison de te refuser, au contraire. Encore une fois, tu sauras comment ils devinent certaines choses pendant la dernière réunion, je n’ai pas le droit d’en parler. Je ne voudrais pas te gâcher la surprise. Mais oui, ils m’ont demandé de… t’analyser.
Il grimaça à ce mot. Vanille attendit patiemment qu’il lui avoue ce qu’il leur avait révélé.
- Je ne te le dirai pas. Pas aujourd’hui.
Frustrée, Vanille détourna les yeux. Puis elle comprit qu’il devait avoir une bonne raison. Son sourire laissait entendre qu’il n’y avait pas de quoi s’inquiéter. Et il lui avait fait comprendre qu’elle saurait bien un jour.
Elle se souvint de quelque chose qui l’avait étonnée :
- Quand es-tu entré dans le Club ?
“Note à moi-même : ne jamais annoncer qu’on a une dernière chose à faire.”
- En troisième année. Le sortilège du Club ne fonctionne pas sur moi. Je les voyais tous. J’ai dit à la Maître Créatrice… certaines choses, qui lui ont fait se dire que j’aurais ma place dans le Club. J’y suis entré discrètement en milieu d’année. C’est pour ça que je n’ai pas de cravate ni d’insigne.
- Et du coup, tu fais quoi dans le Club ? Concrètement ? demanda Vanille, épatée de ce qu’elle apprenait.
- Concrètement ? J’adore vous observer créer.
“Oh… creepy*.”
Il lui lança un regard vexé et elle se rendit compte que leurs petits doigts se touchaient. Elle éclata d’un grand rire.
End Notes:
*Pour les non-anglophone, creepy signifie étrange, louche, glauque, effrayant… Mais aucun de ces mot ne traduit parfaitement. Du coup, creepy reflète ce que je veux dire, mais je ne peux pas le traduire.
Des infos supplémentaires sur http://laplumededeanna.blogspot.fr/ ! (J'en fais trop ?)
Merci d'avoir lu ! A la prochaine !
Edit : Si vous êtes intéressé.es par le bêta-reading et mon histoire, moi ça me dirait bien d'avoir un retour avant publication. Sur des incohérences, des fautes d'orthographe. Et sur la suite même, pourquoi pas.
La dernière réunion by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous ! On est mercredi, jour de notre réunion hebdomadaire du Club !
Et même si le texte n'arrive pas mercredi, ça reste hebdomadaire ;) J'en profite pour remercier les modos qui font un boulot super sur le site pour que nous autres petits auteurs puissions publier ! Big Up
Le dimanche soir, veille de la semaine de BUSEs, Vanille, Leanne et Ambre étaient toutes trois assises sur leurs lits, à réviser une ultime fois avant les épreuves. Vanille se sentait moyennement prête. Elle avait eu du mal à se concentrer sur ses révisions ces derniers jours. Elle n’était pas déprimée, elle était distraite. Les yeux souvent dans le vide. Ambre avait décidé de la soutenir à sa manière : en silence avec de temps en temps une main sur l’épaule, des regards encourageants et quelques accolades réconfortantes. Mais Leanne, qui n’était évidemment au courant de rien, avait également perçu son changement d’attitude, et n’avait pas lié cela au stress des épreuves.
- Vanille, je vois bien que tu n’as pas envie de parler mais… Je veux que tu saches que je suis de tout coeur avec toi.
- Pardon ?
- Je suis ton amie et rester sans en parler… Enfin je ne sais pas si tu en as parlé avec d’autres, mais sache que je suis là pour toi.
Vanille se demanda de quoi Leanne était au courant. Elle-même n’était pas présente le soir où la directrice avec annoncé le départ de Jules de l’Ecole. Elle ne connaissait pas la version officielle.
- Merci, Leanne, lui dit-elle, sincère et méfiante.
- La directrice nous a seulement dit que Jules avait été renvoyé à cause d’”usage dangereux et graves de magie noire”, ou un pléonasme comme ça, intervint Ambre, l’aidant ainsi à connaître la version officielle.
- Du coup comme tu n’étais pas là ce soir-là, et que tu as l’air assez mal, je me suis demandée si… tu n’avais pas été impliquée dans cette histoire. Je veux dire, ajouta Leanne précipitamment en voyant Vanille s’étonner, tu sortais avec lui depuis un bout de temps, je me demandais si tu n’étais pas celle qui l’avait découvert et dénoncé… malgré ton affection pour lui.
Leanne était encore une fois complètement à côté de la plaque, et si proche de la vérité. Vanille se demanda comment une fille si perspicace avait pu croire à son histoire de couple.
Heureusement, elle pouvait encore une fois l’utiliser pour justifier son état. Leanne s’assit à côté d’elle et lui prit la main.
- Je ne sais pas ce qu’il s’est passé entre vous. Je ne sais pas si tu l’aimais… Si tu l’aimes encore. Mais tu dois passer à autre chose, l’oublier.
Elle serra un peu plus fort les mains de Vanille dans les siennes.
- Et tu ne dois pas t’en vouloir. Peu importe à quel point vous étiez proches, tu ne pouvais pas deviner. C’est entièrement de sa faute. Il est le seul responsable, tu m’entends ? Tu n’as rien à voir là-dedans.
Vanille resta bouche bée. Ambre, qui s’était approchée également, regardait maintenant Leanne l’air plus suspicieux que jamais.
- Comment fais-tu pour tout deviner si facilement ? demanda Vanille.
- Je te connais depuis des années maintenant. Je crois que je te connais plutôt bien.
Vanille ne put retenir une petite larme solitaire en pensant à tout ce qu’elles auraient pu partager encore aujourd’hui. A tout ce que son amie avait oublié. A ce qui aurait pu être si elle-même avait su agir différemment. De nouveau, elle ressentit une vague de culpabilité.
- Arrête donc de t’en vouloir pour n’importe quoi. Tant que tu seras un livre ouvert, je serai là pour te le rappeler. On devrait dormir maintenant. Ca ne sert plus à rien de réviser. Tu n’as pas intérêt de rater tes BUSEs à cause de ça !
Vanille la remercia d’une chaleureuse étreinte, et se retourna dans son lit.
Elle entendit Ambre et Leanne discuter un moment entre elles. Elle les entendit parler de Jules, et se rappela que pour Leanne, Ambre avait eu des sentiments pour lui avant Vanille. Elle écouta son amie se démener à trouver comment expliquer ce qui n’était pas arrivé et s’endormit.
Vanille se démena toute la semaine pour passer ses épreuves de BUSEs le mieux possible. Elle restait constamment concentrée. Il fallait qu’elle réussisse. Pour les BUSEs en elles-même bien sûr, pour passer en sixième année, mais surtout pour ne pas avoir vécu cette année pour rien.
Avoir été happée dans un Club à la fois mystérieux et rebutant, par ses membres prétentieux. Avoir rencontré des élèves, des amis, avec qui des liens forts et magiques s’étaient créés. Avoir failli perdre certains. S’être intégrée dans une équipe de travail et y avoir découvert les secrets de la magie sans baguette. Avoir été repoussée, toisée, moquée, draguée par une seule personne. Avoir été énervée, embêtée, gênée, puis être devenue amie avec une autre. S’être éloignée pour mieux revenir vers ses amies.
Avoir compris ses erreurs, avoir grandi, avoir été aveugle et naïve, s’en être voulu, avoir été lentement rongée par la culpabilité, pour sortir la tête de l’eau grâce encore une fois à toutes ces personnes. Avoir été trahie. Avoir fait semblant d’être amoureuse. Avoir protégé ses amies dans un moment de courage. Avoir eu un soutien quand elle voulait fuir. Avoir trouvé ses ambitions.
Avoir trouvé sa voie.
Avoir trouvé sa place.
Pour tout ça, elle devait réussir.
Et à la fin de la semaine, quand elle sortit de sa dernière épreuve, Vanille savait. Elle savait qu’elle resterait dans le Club des Créateurs.
Le monde se ralluma. Les élèves autour d’elle recommençaient à rire, à discuter, à respirer. On se rendait soudain compte de l’état d’apnée générale qui s’était imposé à eux pendant cette semaine si importante. Vanille était assise dans l’herbe au milieu des élèves de cinquième année de Serdaigle et des autres maisons, elle riait, elle oubliait. Comme si l’année n’avait été qu’une parenthèse. Comme si le Club pouvait tout simplement être oublié, à ce moment précis où le soleil les réchauffait tous, une bande, un groupe, une maison, une famille. Elle flottait dans ce moment au milieu des autres, se nourrissant de leur énergie, de leur joie. Tout allait bien, mais elle n’était pas vraiment là. Elle ne suivait pas les conversations. Elle avait juste suivit le mouvement après la fin des épreuves.
Elle croisa le regard d’Ambre et elles se comprirent instantanément. Elles se levèrent et partirent en courant, provoquant la surprise puis l’hilarité, quand d’autres se mirent à les suivre.
Elles déboulèrent dans la salle du Club des Créateurs et s’écrièrent d’une seule voix :
- Les nouveaux Jeunes Créateurs sont arrivés !
Rejointes par ceux qui les avaient suivis, les autres anciens Novices, ils improvisèrent une fête au milieu de la salle du Club, qui était vide de tout autre élève.
Ils amenèrent boissons, nourriture et musique, ils dansèrent, jouèrent, rirent. Ici, Vanille ne flottait plus, elle vivait. Avec les autres nouveaux Jeunes Créateurs, elle discuta, débattit, rit aux éclats.
A un moment, ils lancèrent tous leur patronus, tous réussirent, et leur joie fut plus grande encore.
Au diable les mauvais souvenir, au diable les erreurs, au diable le passé : ils étaient membres du Club des Créateurs, ils allaient créer, par Merlin. Vanille, Ambre, Octave, Olivier, Lorelei, Enguerrand, Kerwan, Annabelle, Leire, les nouveaux Jeunes Créateurs.
Ils levèrent leur baguettes et un éclat violet vint inonder la pièce.
Au milieu du tumulte, la porte s’ouvrit pour laisser entrer les autres membres. Soulagés de les voir ainsi liés, satisfaits de les voir faire la fête, car sans rien expliquer on comprenait que cela signifiait leur réussite scolaire, ils se joignirent à eux pour la fin de soirée.
Les anciens, du moins ceux qui étaient encore là, David et Oreste, évoquèrent leur regret de quitter le Club.
Les futur Grand Créateurs promirent de bien s’en occuper.
Les nouveaux Jeunes Créateurs, qui refusaient à présent le titre de Novices, promirent de garder la cohésion qui les liait.
Puis ils se quittèrent, au milieu de la nuit, en se donnant rendez-vous le lendemain pour la dernière réunion. Celle des explications.
Vanille se réveilla le lendemain après-midi avec la gueule de bois. La langue pâteuse et la bouche sèche, elle glissa lourdement jusqu’à la salle de bain pour caler sa tête sous le robinet. Comme cela ne l’aidait pas, et que son crâne explosait à chaque battement de coeur, elle se dénuda et s’assit dans la douche, laissant l’eau fraîche couler sur sa tête.
Elle fut réveillée en sursaut une bonne demi-heure plus tard par quelqu’un qui frappait sur la porte.
- Vanille ouvre ou on défonce la porte !
Roulée en boule dans la douche, nue, de l’eau coulait sur elle. Que faisait-elle là ? Elle s’agrippa sur la tuyauterie pour se relever, ferma l’arrivée d’eau et s’écria :
- J’arrive !
Sa voix était cassée et enrouée.
- C’est bon prend ton temps, on voulait vérifier si tu étais vivante.
Vanille s’appuya sur le lavabo et se repassa les souvenir de la veille. Après les épreuves, elle avait fui le parc où les cinquième année s’étaient réunis pour se détendre et avait organisé un fête avec les autres Novices, puis avec tous les autres membres du Club. Elle avait bu, trop bu, et parlé, dansé, ri. Elle ne se souvenait pas de tout. Elle se regarda un moment dans le miroir. Ses cheveux blonds avaient foncé pendant ces longs mois passés dans la semi-obscurité des cachots. Mais surtout, ils étaient bien plus courts que la veille.
*Le rythme de la musique trop forte battait dans ses oreille, et, décuplée avec les conversations, l’obligeait à crier dans l’oreille d’Annabelle pour se faire entendre :
- Un changement de vie ça passe par un changement de style !
- D’accord, s’écriait Annabelle, d’accord. Mais ne vient pas t’en plaindre demain!
La petite brune fit apparaître une paire de ciseaux argentés qui semblaient bien trop aiguisés, pointus et brillants pour être inoffensifs. Vanille déglutit.
- Ne t’inquiète pas, ils sont enchantés, je les utilise depuis des années ! Assied-toi là…
Elle tira une chaise pour que Vanille s’y installe. Elle suait à grosses gouttes, était-ce la chaleur, ou bien la peur de voir des ciseaux passer aussi près d’elle ? La salle était encore en pleine ébullition quand Annabelle commençait à lui couper les cheveux.*
Vanille soupira en observant le résultat. Au moins maintenant, elle savait deux choses : être ivre lui donnait des idées stupides. Et les cheveux courts ne lui allaient pas du tout. Elle tenta vaguement un sortilège pour améliorer tout ça mais rien ne fonctionna. Pour cause : elle n’avait pas sa baguette avec elle.
“Je n’ai pas encore la dextérité d’Oreste sur les Sans-baguette, apparemment.”
Dans le dortoir, Ambre et Leanne étaient plongées dans une intense discussion, et ne la virent pas débarquer à moitié nue. Elle s’habilla en vitesse une première fois, puis une seconde, plus lentement, essayant de ne pas confondre jupe et t-shirt.
- Réveil difficile ? s’amusa Ambre.
- M’en parle pas. C’est ma première gueule de bois. Je ne me souviens presque pas de…
Elle s’immobilisa un instant en fixant Leanne. Elle n’était pas au courant pour la fête du Club.
- On était justement en train de parler de ça, annonça Ambre. J’en ai eu marre de mentir à Leanne. Je lui ai tout raconté.
- Tout ?
- Presque tout. Je voulais ton aval pour certaines parties te concernant.
Vanille réfléchit une demi-seconde, avant d’être arrêtée par un mal de tête. Elle s’assit sur le lit où ses amies débriefaient, s’effondra sur le dos les bras en croix, et lâcha :
- Vas-y, balance tout, mais ne m’oblige pas à participer. Pas tout de suite.
Elle posa une main sur ses yeux :
- Et si vous pouviez baisser un peu la lumière…
Elle écouta vaguement Ambre expliquer patiemment à Leanne tout ce qui s’était passé cette année. Elle loupa certains détails en s’endormant un peu, mais de ce qu’elle pu suivre, elle ne releva aucune coquille. Au moment où Ambre évoqua Jules, Vanille se leva pour aller mettre de l’ordre dans ses affaires. Ambre racontait avec justesse, objectivité et empathie. Il apparut à Vanille que son amie avait une haute opinion d’elle. Elle faisait presque passer Vanille pour une victime de son caractère et lui pardonnait d’avance tout ce qu’elle racontait. A tel point que, sans mentir ni omettre de vérité, elle fit en sorte que Leanne n’ait aucune colère envers Vanille.
Leanne comprit pourquoi elles lui avaient menti. Elle n’en tira aucune amertume, et n’en voulu pas à ses amies. Au contraire, elle était rassurée de comprendre enfin pourquoi Vanille avait “perdu cet éclat” dans son regard.
- Par contre je ne comprends pas comment tu as perdu tes cheveux.
Vanille grogna en se souvenant de ce détail et passa sa main dans sa courte crinière.
- C’est une longue histoire.
- Pas tellement, contra Ambre. Dans l’euphorie de la fête, tu as demandé à Annabelle de te faire la même coupe qu’elle parce qu’elle était “trop mignonne avec ses cheveux courts” et que tu voulais changer de style pour prendre un nouveau départ dans ta vie.
Malgré tout le sérieux qu’avait essayé de faire passer Ambre dans sa voix, elle et Leanne éclatèrent d’un grand rire.
- Ca me va si mal que ça ?
- Disons que… ça repoussera. Sauf si les ciseaux étaient enchantés.
Vanille déglutit.
Les heures qui suivirent, Vanille tentait de réveiller son esprit. Cela passa par une marche au parc, un repas dans les cuisines bien mérité (et étrangement accompagné d’un grand nombre d’élèves l’oeil hagard ayant aussi manqué leur déjeuner), une bataille d’eau dans les couloir et un argument avec un professeur qui passait par là, et qui ne comprenait rien à l’euphorie d’une fin d’année réussie. A croire qu’il n’avait jamais étudié.
Dans la soirée, emportées par ce je-ne-sais-quoi de magique des vacances méritées, Vanille et Ambre en oublièrent de regarder l’heure, et c’est précipitamment qu’elle lâchèrent Leanne pour se rendre, en retard, à leur réunion.
La dernière réunion.
Toutes les chaises étaient occupées autour de la table ronde du Club des Créateurs. Morgane avait quitté Ste-Mangouste pour le temps d’une soirée. La directrice Roy, assise à ses côtés, discutait avec elle.
Vanille et Ambre, essoufflées, s’excusaient auprès des autres pour leur retard.
David était debout devant sa chaise, pointant du doigt un parchemin d’organisation posé devant Oreste.
Celle-ci lui affirma discrètement quelque chose et il se tourna vers les membres du Club.
- Bien ! Pouvons-nous commencer ? Tout le monde est arrivé ?
Il balaya la table du regard. Tous se turent et le regardèrent poliment.
- Ceci est notre dernière réunion de l’année du Club des Créateurs. Je souhaite la bienvenue, pour la dernière fois, à nos Novices, pour qui il s’agit de la première réunion.
Les cinquième année se regardèrent un peu gênés : ils se souvenaient avoir réclamé avec bien trop de véhémence de ne plus être appelés Novice, la veille au soir, lors de la soirée. Non pas qu’ils avaient honte, mais David venait d’insister sur le mot “Novice”, provoquant quelques sourire amusés et bienveillants.
- Il s’agit d’une réunion classique, je vais vous faire un bref sommaire : nous évoquerons les détails importants à connaître pour diriger le Club, l’organisation et le ministère par exemple. Nous ferons le point sur les créations de l’année, et nous devrons aussi évoquer Jules. Enfin, Mme Roy présentera sa potion Revelavis.
Revelavis ? Vanille n’avait jamais entendu parler de cette potion.
David leur expliqua - ou plutôt lu sur son parchemin, l’air hésitant, et pardonné par ses pairs qui savaient qu’il n’avait pas l’âme d’un chef mais qu’il l’était par circonstance - David leur expliqua donc comment organiser la vie au sein du Club des Créateur.
Il évoqua les dates - la première cérémonie de l’année lors du retour du Club à Poudlard, la réunion de présentation, la cérémonie d’entrée des nouveaux Novices, la rencontre annuelle, et la dernière cérémonie de l’année. Il donna une multitude de détails, et Vanille fut subjuguée par la quantité d'événements et de travail qu’impliquait la gestion d’un tel Club. Elle se félicita de ne pas avoir une once d’ambition de devenir Maître Créatrice : la paperasse l’avait toujours ennuyée.
Il leur parla des réunions régulières, des protocoles à respecter avec le ministère, du fait d’avoir avec soi un Novice.
Puis il leur fit la liste des Créations - sortilèges et potions - créés cette année. Il félicita Oreste, acceptée au Ministère de la Magie, au Département des Mystères, pour y continuer ses recherches sur la magie sans baguette. Il parla des potions d’Alexandre et de sa rencontre avec M. Wiggs, l’apothicaire.
Iris, Florent et lui-même avaient également créé. Il leur expliqua comment les Créations avaient été vendues au ministère, et combien de Gallions ils en avaient obtenus. Ensuite, comment ils avaient utilisés ces Gallions : des ingrédients, chaudrons, livres… Ils gardaient une petite partie de côté au cas où un besoin urgent au milieu de l’année se présentait, mais dépensaient tout le reste, le Club n’avait aucunement le but de s’enrichir.
Il s’arrêta un moment. Vanille sentit l’atmosphère changer brusquement. Jusqu’ici, tous étaient relativement attentifs, prenaient des notes, rebondissaient sur les sujets, riaient. Là, elle pouvait presque sentir le prénom de Jules dans l’air.
- Il ne faut pas mentir aux prochain Novices. Pendant la présentation, il faudra évoquer Jules, dire qu’il faisait partie du Club. Qu’il en ait été Maître Créateur n’a pas d’importance, pour peu que la hiérarchie ne soit pas ce qui nous représente ici. Commencer l’année en étant honnêtes vous permettra de bâtir de solides relations avec les nouveaux membres.
- Personne n’acceptera d’entrer dans un Club dont un ancien membre en torturait un autre, grogna Vanille, les poings serrés.
Torturait. Le mot était lancé. Jusqu’ici, on parlait d’incident, d’horreur, de mensonge. De manipulation, tout au plus. Elle lança un regard de défi autour d’elle, qui oserait la contredire ? Elle se sentait incapable de pardonner, elle avait encore tant de colère en elle, tapie, maladroitement refoulée derrière une bonne humeur de circonstance. Puis elle vit Morgane, qui la fixait, le visage étrangement calme, doux. Vanille sentit un grand désarroi s’emparer d’elle. Elle avait manqué de tact, elle avait oublié sa présence. Ses yeux s’ouvrirent de stupeur d’avoir osé lancé le mot. Les larmes lui montèrent aux joues alors qu’elle échangeait ce long et étrange regard.
Morgane, sans la quitter des yeux et sans quitter son faible sourire, se leva et releva les manches de sa robe de sorcière. Ses bras révélèrent des marques noires, comme celle que Vanille avait remarqué à l’infirmerie. Elle en avait une demi-douzaine, grosses comme des Vifs d’or, recouvertes d’un cataplasme jaunâtre.
- Il s’agit des résidus du sortilège de contrôle mental de Jules. Les marques ne s’effaceront jamais. Il reste encore un peu de magie noire en moi, que les Médicomages essayent de résorber avec cette pâte.
Puis elle se retourna et souleva délicatement ses longs cheveux rouges. Vanille retint un haut-le-coeur. La base de son crâne était rasée, la peau y était abîmée, presque sanglante, à vif.
- Je me suis fait cela en tentant de résister. Un choc à cet endroit réveillait ma conscience pendant quelques instants, et j’étais plus lucide. Je pouvais refuser les ordres les plus dangereux. C’est pour ça qu’il a graduellement augmenté la dose de potion et la force de ses sortilèges. Il voulait un contrôle total.
Vanille bouillonnait, mais les autres étaient bloqués de stupéfaction. Aucun d’entre eux n’avaient réalisé l’ampleur de ce qu’avait fait Jules. Elle sentit sur sa main se poser celle d’Ambre, qui lui fit comprendre silencieusement qu’elle était désolée de ne pas avoir compris pourquoi Vanille avait été tant choquée. Mais Vanille ignorait les détails jusqu’ici. Pour une fois, elle avait seulement mieux compris quelque chose.
- Je voulais que vous sachiez la vérité.
Morgane se rassit. Un moment de silence s’imposa à eux, comme un recueillement. Vanille eut l’impression que le Club faisait son deuil de l’un des leurs.
- Ce que je vous ai dit la dernière fois, avoua David d’une voix faussement assurée, tient toujours.
- Et vous devez continuer à vous faire confiance. Vous devez continuer à vous soutenir. A travailler ensemble. Vous êtes le Club des Créateurs, dit Mme Roy.
- Le lien magique qui nous unis ne se brisera jamais, mais il ne sera jamais aussi fort que lorsque vous êtes à Poudlard. Nous nous soutenons, quoi qu’il arrive. Ce que j’entends par là, continua-t-il en voyant certains cinquième année froncer les sourcils, c’est que vos recherches sont plus importantes que le ministère. Parfois, nous ne respectons pas le règlement.
Vanille fut surprise, mais pas de ce que venait d’avouer David (Oreste l’avait briefée), mais qu’il l’avoue devant la directrice de l’Ecole, et surtout que celle-ci n’avait pas le moins du monde l’air étonnée.
- Faites les recherches que vous voulez. Faites des expérimentations, même sans l’aval du ministère. Il arrive bien trop souvent que celui-ci tienne à garder le monopole d’une étude, pour des raisons financières, politiques même. La Création de magie ne devrait pas être cloîtrée dans un seul bâtiment, réservée seulement à certains sorciers.
- Mais évitez de vous approcher trop près de la magie noire, dit Oreste. Et ne faites rien de dangereux, du moins pas seuls.
L’atmosphère s’allégea. David se rassit et fit un signe de tête vers la directrice.
- Comme chaque année, annonça-t-elle, je vais vous donner de la potion Revelavis pour la rentrée. J’ai créé cette potion pour que le Club des Créateurs puisse trouver les meilleurs sorciers. En prenant une gorgée, vous serez capable de voir la puissance magique des personnes que vous regardez. Ainsi, vous pouvez choisir les meilleurs.
- Pourquoi ne pas donner sa chance à tout le monde ? demanda Vanille.
Elle n’aimait pas le principe de cette potion.
- Le Club des Créateurs est un Club prestigieux, lança Mme Roy, un peu cassante. Vous êtes et serez tous de grands sorciers. Je vous ferai passer la potion le premier septembre.
Vanille comprit soudain ce qu’il s’était passé le soir de la rentrée. Ils avaient bu cette potion et l’avaient fixée, parce qu’ils avaient vu quelque chose en elle. Elle était sceptique quant à l’utilité de cette potion, mais ne contre-argumenta pas.
- Il est temps, dit David.
Il se leva et fut imité par Oreste et Morgane.
- Place aux nouveaux !
Tous se levèrent et se mirent face aux trois, qui levèrent leurs baguettes. David marmonna un enchantement, qui provoqua un éclair violet, similaire à celui de la cérémonie de rentrée.
- C’est tout ? demanda Octave, un peu déçu après un moment de silence. Je m’attendais à quelque chose de plus… spectaculaire ? Que s’est-il passé ?
- On ne porte plus nos cravates ! s’étonna Lorelei en se tenant le cou.
- Parce que tu continuais de la porter ? se moqua Kerwan.
- Regardez vos insignes, dit David.
Ils s’exécutèrent. Vanille remarqua qu’il n’était plus écrit Novice sur celui-ci. Mais il n’y avait rien d’autre.
- Le jour de la rentrée, vous reviendrez ici lancer ce sortilège. Ce sera votre Club. Prenez-en soin.
Emue par la conclusion de cette réunion, réalisant qu’elle ne travaillerait plus avec Oreste, Vanille s’approcha d’elle pour l’enlacer. Lorelei les rejoigna. Ambre et Enguerrand discutèrent avec David, Octave remercia Morgane. La directrice s’était éclipsée. Ils restèrent tous un long moment dans la salle.
Contrairement à la veille, l’ambiance ne fut pas festive mais lourde en émotions. Les anciens contemplèrent la salle une dernière fois, donnèrent quelques ultimes conseils de départ. On se remerciait, on se félicitait, on présentait des idées de projets pour l’année suivante.
Puis peu à peu la salle se vida. Vanille se dit qu’il était temps de quitte la pièce à son tour, du moins pour cette année. Elle prévint Ambre et se dirigea vers la grande porte.
- Tu me dois toujours une balade.
Alexandre avait surgi devant elle.
- Vraiment ? Je ne me souviens pas avoir promis, lança-t-elle.
Il décela sûrement le sourire qu’elle essayait de retenir et prit une moue déçue.
- D’accord, dit-elle. Allons nous balader !
Satisfait, il lui ouvrit la porte pour la laisser passer.
End Notes:
Eh non ce n'était pas le dernier chapitre de l'année ! J'ai conscience que certains passages sont assez particuliers, mais j'ai décidé de les laisser. J'expérimente un nouveau style !
/!Attention teasing ! La semaine prochaine, on finit l'année. Et on aura fini un tiers de la fic !
Et on saura enfin ce que veut Alexandre... c'est pas trop tôt.
Plus d'infos sur http://laplumededeanna.blogspot.fr/
Merci d'avoir lu, dites-moi ce que vous en pensez dans les reviews ! Bises !
Aveux de fin d'année by Deanna
Author's Notes:
C'est mercredi, vous avez rendez-vous au Club des Créateurs !
Allez, un dernier chapitre pour cette année scolaire. On retrouve Vanille où on l'avait laissée... J'espère que ça vous plaira !
Comme d'ab, j'ai fait un blog (que je vais fournir un peu plus, promis), avec des infos supplémentaires, des fiches perso, des détails.
http://laplumededeanna.blogspot.com/
Bonne lecture !
Tandis qu’ils avançaient le long du lac, profitant du silence, Vanille réalisa tout ce qu’il s’était passé cette année dans ses relations. Il y avait eu des bons moments et des très mauvais. Des moments de doute et de colère, de surprise et d’amitié. Mais à aucun moment elle ne s’était sentie comme à celui-ci.
Elle savait qu’elle ne laissait pas Alexandre indifférent. Que ce soit au début quand il l’avait détestée directement, ou quand il avait essayé de se rapprocher d’elle. Et pourtant, ils n’avaient jamais eu l’occasion de discuter. Jamais vraiment, du moins.
De ce fait, elle ne le connaissait que peu. Elle connaissait sa façon de parler, quelques-unes de ses réactions. Sa voix, grave et envoûtante, ses yeux noirs profonds, souvent froids.
Mais elle ne savait rien sur sa vie. Sur ses idées, sa façon de penser. Elle ne connaissait pas ses amis, n’avait jamais été avec lui lorsqu’il n’était pas dans le cadre du Club. Bref, il restait un mystère pour elle.
Alors pourquoi, n’arrêtait-elle pas de se demander, pourquoi avait-elle le coeur qui battait aussi fort ? Pourquoi ne pouvait-elle s’empêcher de l’imaginer s’arrêter pour lui dire… certaines choses ? Pourquoi voulait-elle lui prendre la main, le bras, se rapprocher de lui le plus possible ?
Elle voulait lui poser mille et une questions, mais aucune ne convenait à ce qu’elle éprouvait. Alors elle se taisait et continuait de marcher.
Des élèves autour d’eux profitaient eux aussi des douces soirées d’été à Poudlard. Au croisement entre la rive du lac et la lisière de la forêt, Alexandre se dirigea vers une petite butte verte et s’y assit, face au lac. Vanille le rejoint. Le château au bout du lac était éclairé par le soleil orangé du soir.
Vanille se demanda si l’effet romantique à outrance était prévu. Elle l’accepta et s’apprêtait à tourner nonchalamment son visage vers lui tout en posant sa main sur la sienne (une vision très organisée de la spontanéité), mais il la coupa dans son élan en lançant :
- J’étais jaloux.
Il gardait son regard plongé dans le lac noir. Sa voix grave et profonde était un peu tremblante. Vanille annula ses plans pour se tourner sincèrement vers lui.
- De quoi ?
- De toi. De ce que la potion Revelavis impliquait. De ne plus être le prodige du Club.
Un peu déconcertée, Vanille lui laissa le temps de trouver ses mots.
- Depuis toujours, j’étais au centre de l’attention, lâcha-t-il. J’étais l’aîné de la famille. J’ai très vite fait de la magie spontanée. J’ai toujours été premier en cours. J’ai vendu des potions dès ma première année au Club. Tout le monde me félicite, m’encourage, me pousse à aller plus loin.
Il soupira.
- Mon père est un homme très important. Il fait partie de la haute société sorcière. Avant même que je sois né j’étais promis à une vie glorieuse. Il m’a envoyé dans cette école pour que j’entre dans le Club des Créateurs, qui a une forte réputation dans les coulisses de la vie politique sorcière.
Vanille cru comprendre à cette phrase qu’il n’était pas originaire de Grande-Bretagne, mais n’osa pas l’interrompre. Il émit un petit rire.
- J’étais à la hauteur de ce qu’on attendait de moi. Je suis vraiment doué, affirma-t-il sans aucune modestie. Et j’aime ça. Etre le premier, le meilleur. Etonner autour de moi. J’aime me dire que j’aurais une place importante dans la société sorcière. Je me suis fait à cette idée qu’on m’impose depuis tout petit. J’ai essayé de ne pas devenir trop hautain, trop condescendant. Mon père me disait de savoir ce que je valais, pas de le faire savoir.
Il ramassa un caillou et le fit tourner dans ses doigts. Un geste inconscient qui semblait lui servir à évacuer un certain stress.
- Quand je suis entré au Club, j’ai voulu faire mes preuves le plus vite possible. Je voulais me faire un nom au Club et au sein du ministère. J’ai même rendu mon badge de préfet pour pouvoir consacrer plus de temps au Club, un prestige pour un autre, j’ai fait mon choix. J’ai très vite créé mes propres potions, et même quelques sortilèges. Dès la réunion de présentation, j’avais décidé que je serai Maître Créateur. Puis, quand j’ai appris pour la potion Revelavis, j’ai pensé à ce qu’elle devait révéler de moi, quelque chose d’intense, puissant, ambitieux. Mais Jules n’a pas voulu me le dire. Donc j’ai pris la potion en avance, et j’ai vu dans le miroir que je brillais d’une forte lumière orange. Comme un feu ardent. J’étais fier de moi, de ce que ça représentait, mais ensuite j’ai vu les feux de tout ceux autour de moi : tout le monde en possédait. Pas autant, pas tout a fait le même, le mien était juste un peu plus haut. Et pendant le discours de rentrée, on a tous vu le tien. Tu ne brillais pas. Tu exhalais. Tu implosais et explosais de magie, comme un coeur doré flamboyant qui battait autour de toi. Tous les feux autour du tien s’en trouvaient grandis, plus intenses à ton contact. C’était magnifique.
Il marqua une pause pour s’assurer que Vanille l’écoutait toujours. Elle absorbait toutes ces informations les yeux grands ouverts, sans aucune réaction - aucune apparente du moins.
- Et le soir même, Nathan a dit à Jules que tu avais le potentiel d’un grand destin dans cette école. Alors j’ai été jaloux. Immédiatement, sincèrement, profondément. J’étais jaloux de voir débarquer quelqu’un qui avait tout ce potentiel, qui suscitait autant d’attention - Jules parlait beaucoup de toi, il était assez excité de t’avoir dans le Club - alors que tu avais l’air tellement… blasée. Pendant le discours de rentrée, pendant la présentation du Club, à chaque fois tu affichais - peut-être inconsciemment - un air las, ennuyé, ailleurs. Même méprisant à certains moments. (Vanille songea immédiatement à Lorelei qu’elle avait décidé de détester sans raison, pour ensuite travailler avec elle comme si de rien n’était.) Ca me mettait hors de moi. Puis Jules a demandé aux professeurs des avis sur les Prétendants, et ils ont tous affirmé que tu passais tes cours à ne pas écouter, mais que tu travaillais énormément à côté, et donc tu avais le plus souvent les meilleurs résultats. Après ça je me suis dit que j’allais essayer de rattraper le coup, honteux de mes piques et mes regards assassins. Mais j’étais encore en colère et quand on a dansé au bal, je n’ai pas pu m’empêcher de faire ressortir le mépris que j’emmagasinais et que tu ne méritais pas. Après, les quelques fois où on a discuté, tu étais toujours sur la défensive.
Il jeta son caillou dans le lac d’un grand geste.
- J’ai été un peu lâche en n’essayant pas vraiment de t’expliquer, en essayant de faire comme si de rien n’était. Mais j’ai bien vu que l’histoire de Jules t’a profondément touchée. J’ai compris que tu étais quelqu’un de sincèrement bon, et que la manière dont je t’avais traitée au début d’année avaient due t’affecter. C’est pour ça que je te proposais cette balade. Je ne voulais pas te pousser. J’attendais que tu sois prête.
- Prête à t’écouter ?
- Prête à me pardonner.
Le coeur à nu, Alexandre la fixait dans une obscurité grandissante qu’ils n’avaient pas vu venir. Il attendait une réponse à la question qu’il n’avait pas posée. Vanille se promit de repenser plus tard à toutes ces informations elle-même qu’elle avait apprises, et se contenta de se poser la question toute seule : voulait-elle lui pardonner ?
Pour toutes les fois où elle avait mal jugé, tous ceux qu’elle avait détesté sans raison, et ceux à qui elle avait donné sa confiance à tord, pour toutes les fois où elle n’avait pas su comprendre, anticiper, où elle n’avait simplement rien vu de ce qui se passait vraiment. Pour toutes ces fois, Vanille se demanda sincèrement si elle jugeait bien Alexandre. Elle aurait tendance à tester, au cas où cela fonctionnerait mieux, à faire l’exact opposé de ce que son instinct lui disait. Pour voir si ça la menait à moins de soucis.
Mais elle ne voulait pas le faire. Elle ne voulait pas le repousser. Elle n’en avait pas la moindre envie, pas un soupçon d’étincelle.
Il commençait à s’inquiéter de ce long silence songeur, pendant lequel elle croisa plusieurs fois son regard.
Alors elle lui sourit, se pencha légèrement vers lui et lui dit en murmurant, comme un secret :
- Je te pardonne.
Et pour sceller ses mots, elle posa ses lèvres sur les siennes.
En embrassant Alexandre, elle se souvint de ses mains lors du bal, des mains forte, sèches et désagréables dans les siennes. Elle s’en souvint puisque là, au contraire, la main qui lui caressa la joue alors qu’il répondait à son baiser était douce et délicate. Agréable.
De timide et un peu hésitant, leur baiser devint un peu plus ardent pendant quelques secondes, et d’un coup, ils se séparèrent d’un même geste. Vanille réalisa ce qui venait de se passer. Ils se regardèrent un instant, hésitants sur les intentions l’un de l’autre. La Lune s’était levée, leur permettant de se voir, de se comprendre sans se parler.
C’était le genre de moment où il fallait bien choisir ses mots, et où lesdits mots ne sortaient jamais. Ce genre de moment où deux personnes n’osent pas, justement, mettre des mots, des phrases simples sur ce qu’ils voulaient, ce qu’ils pensaient, et ce qu’ils voulaient demander à l’autre. Toutes les phrases auxquelles pensait Vanille sonnaient ridiculement dans sa tête. Alors elle utilisa le moyen de communication le plus sûr depuis la nuit des temps : elle lui sourit.
Il semblait avoir eu le même cheminement de pensée, car il lui offrit au même moment un sourire un peu crispé, qui signifiait “je ne sais pas ce que tu veux, moi j’ai bien aimé”.
Ils éclatèrent alors dans un grand rire, puis d’un coup étouffèrent leur rire en pouffant, les mains sur la bouche, réalisant le silence de la nuit, qui les accusait d’être encore dehors après le couvre-feu.
- On devrait rentrer.
- Attend, j’ai quelque chose à te dire d’abord, dit Vanille, peu soucieuse du règlement.
Il lui prit la main et attendit poliment.
- C’est à propos de cette histoire de Revelavis, de potentiel de magie. Je ne sais vraiment pas comment ça marche, mais je n’y crois pas vraiment. Ou plutôt, je pense qu’il ne faut pas tenir trop compte de ce qu’on y voit. C’est pareil pour les prédictions de Nathan. Si Revelavis, mon destin ou une prophétie m’annonce que je dois faire quelque chose, je ne le ferai pas pour faire plaisir. Je veux dire, même si vous avez vu une aura plus grande que les autres chez moi, et même si Nathan a annoncé que j’avais un grand potentiel de magie, si je ne veux pas devenir une grande et puissante sorcière, je ne le ferai pas. Après tout, c’est ce que potentiel veut dire.
Elle haussa les épaules en continuant :
- En l'occurrence, j’ai très envie de me lancer dans des recherches intenses et compliquées, qui me mèneront vers des secrets dangereux et puissants, lança-t-elle en plagiant sa lettre de menace. Et je ne le ferai pas parce que c’était écrit, mais parce que je le veux. Je pense qu’on ne devrait pas utiliser Revelavis au Club. Que n’importe qui de motivé devrait pouvoir entrer, quelle que soit sa puissance et son potentiel, puisque de toute façon s’il n’a pas ses Optimals il ne restera pas dans le Club.
- J’y réfléchirai.
- Tu vas donc te présenter pour être Maître Créateur, l’année prochaine ?
- Oui. Tu voteras pour moi ?
- Peut-être, dit-elle avec un regard malicieux.
Ils se levèrent pour retourner au Château.
Deux jours plus tard, les élèves de Poudlard se préparèrent à rentrer chez eux pour les vacances. Les valises encombrèrent les couloirs, l’effervescence gagna même les tableaux qui, d’habitude mornes, devinrent sentimentaux devant tous ces départs. Vanille avait passé sa dernière journée avec Ambre et Leanne. Elle avait croisé Alexandre quelques fois et ils s’étaient contentés de signes de main complices, profitant chacun de leurs amis. Vanille se força à ne pas se poser de question sur leur relation. Elle verrait bien. Même si à chaque fois qu’elle le voyait, elle se demandait ce qu’il lui fallait faire, aller le voir, l’ignorer, l’embrasser…
Quand elle le croisa près des diligences, ils hésitèrent un moment puis Alexandre, courtois et apparemment désireux de ne pas la forcer, déposa un baiser sur sa joue, l’aida à monter dans le carrosse et la laissa avec ses amies pour retrouver les siens. Ambre et Leanne lui lancèrent des regard moqueurs.
Sur le quai de la gare, attendant que le flux d’élèves diminue pour entrer dans le train (où Leanne s’était précipitée en jouant des coudes pour s’accaparer un compartiment libre), Vanille entendit un cri de chouette. Elle se demanda un moment si elle n’avait pas oublié Filéone, la sienne. Le cri venait d’une chouette effraie qui tournait autour du quai, apparemment à la recherche de son destinataire. Elle se demanda quel parent pouvait envoyer une lettre à son enfant quelques heures avant de le revoir. La chouette sembla se décider et plongea au ras de la foule, fonça vers Vanille et lança la lettre dans ses mains, puis se redressa prestement et disparut derrière les hauts sapins.
Etonnée de recevoir du courrier, surtout à ce moment précis, elle lu sur le dos de l’enveloppe que la lettre venait du ministère de la magie, du bureau des aurors.
Elle fourra la lettre dans sa poche et se précipita dans le train qui était libre d’accès.
Elle trouva rapidement le wagon où Leanne et Ambre étaient installées avec d’autres élèves de leur année, et le train prit son départ. Du tumulte de ses camarades, Vanille préféra le calme du couloir, face aux paysages défilants aux fenêtres, pour ouvrir enfin sa lettre.
Elle ne put s’empêcher de chercher le nom de l’expéditeur et lu qu’elle était signée Harry Potter. Vanille écarquilla les yeux. Pourquoi Harry Potter lui écrirait une lettre ? Allait-elle être arrêtée par les aurors ?
“Melle Ocean,
Veuillez pardonner mon manque de professionnalisme. Je vous écris après les évènements que vous avez subis, même si en tant qu’enquêteur je ne devrais pas entretenir de correspondance privée avec vous.
Je voulais savoir comment vous alliez. Ce qu'il s’est passé avec vos amis a dû être très difficile pour vous, et j’ai conscience de parler de choses qui ne me regardent pas. Mais sachez que vous avez été très courageuse pour votre âge. Il est terrible d’avoir été confrontée à ça alors que vous êtes arrivée dans notre monde au début d’une ère de paix.
Je souhaitais également vous avouer que je vous ai envoyé un témoignage anonyme en réponse à votre annonce. Celui avec la grosse tante, signé H.P. J’espère avoir pu vous être un tant soit peu utile dans vos recherches. Et si vous avez besoin d’aide pour vos autres recherches, je peux vous proposer de vous offrir la mienne, dans la limite de mes capacités bien entendu.
Cette lettre doit vous sembler étrange, et je m’excuse d’entrer comme ça dans votre vie. Je vous promets que je ne profite pas de ma notoriété pour me mêler de ce qui vous regarde. Seulement, j’ai moi-même eu à affronter des épreuves étant jeune, et c’est pour cela que je vous offre mon soutien, pour le peu qu’il vaille.
Je vous souhaite de bonnes vacances et bon courage pour vos recherches sur la magie.
Harry Potter”
Vanille replia sa lettre avec une certitude qui l’avait déjà frôlée à l’infirmerie : ce Harry Potter était une personne simple. Il semblait seulement avoir du mal avec la célébrité. Mais malgré le sentiment d’avoir reçu la lettre d’un sorcier qui ne demandait qu’à être comme les autres, elle ne put s’empêcher de sautiller sur place en serrant sa lettre contre elle : “Harry Potter m’a écrit !” Puis elle réfléchit un moment, et réalisa : “Je n’oserai jamais lui répondre.”
FIN de la première année
End Notes:
Et voilà, il aura fallu 19 chapitres pour arriver à la fin de cette année scolaire. Moi qui m’attendais à finir mon histoire en une vingtaine, et je n’en suis qu’au tiers.
Vous vous en doutez, il reste deux années, la sixième et la septième année de Vanille à Poudlard.
Je suis un peu déçue du rendu de cette année, car j’aurai voulu y mettre beaucoup plus d’action. Aussi, en relisant, je trouve que les événements ne s'enchaînent pas assez vite. J’ai énormément d’idées, mais je n’ai trouvé aucun moment pour les caser dans cette année-là. Au final, tous ces premiers chapitres auront été des prémices aux suivantes. Comme une entrée en matière.
Faisons l’analogie jusqu’au bout : cette année, c’est l’entrée. souvent froid, pour mettre en appétit, et on a toujours faim quand ça finit. En gros, il ne se passe pas grand chose.
La sixième année de Vanille, ça sera le plat principal. Quelque chose de plus intense, avec plus de saveurs différentes, plus d’actions, de mystères. A la fin, vous aurez (j’espère) un sentiment d’accomplissement, même si vous aurez encore faim, parce que vous saurez qu’il y a une suite.
Et enfin, la septième sera le dessert. Le climax. La dernière note sucrée que même si vous n’avez plus faim, il vous reste de la place, vous la mangerez jusqu’au bout, pour finir ce repas. Promis, je vous prépare un dessert du tonnerre.
C’était complètement stupide non ?
Merci d’avoir suivi Vanille jusqu’ici. Merci, merci pour vos reviews, vos encouragements, vos compliments. Je suis vraiment touchée du fond de mon humble petit coeur qui n’aime pas trop ce qu’il écrit. Je sais que le début était un peu long et pas spécialement accrocheur, j’ai l’impression d’avoir changé au fur et à mesure de l’écriture. Si c’était à refaire, je changerais beaucoup de choses.
Bref, pour la suite, attendez-vous à plus de mystères, plus de rebondissements, plus de secrets et d’action. Un chouia de romance (mais pas plus, je ne sais pas écrire de romance, ni l’apprécier à sa juste valeur), des belles amitiés.
On retrouvera Ambre, fidèle à elle-même, et Leanne, même si vous ne l’aimez pas beaucoup, Alexandre, qui prendra pas mal de place le coquin, Nathan, qui s’imposera pas mal aussi au grand dam de Vanille (non ça va, elle commence à l’apprécier), et bien d’autres encore.
Je vous fais à tous plein de câlins. Plein plein. J’aime écrire et vous me faites aimer partager ce que j’écris. Merci à vous, et merci aux modos, merci au site.
On dirait que j’écris une fin de fanfic là, ça va pas du tout.
La suite mercredi prochain !
N’oubliez pas de checker http://laplumededeanna.blogspot.fr/ pour plus de détails sur la fic.
Dabisous.
Marcher dans l'herbe by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous et bienvenue à notre vingtième réunion du Club des Créateurs ! J'espère que l'année précédente vous a été propice en découvertes et Créations magiques.
J'ai le déplaisir de vous annoncer une mauvaise nouvelle. L'année ne recommencera pas aujourd'hui. Un certain contre-temps nous oblige à nous intéresser aux Vacances de Vanille (oui, avec des majuscules, ça fait une belle allitération et un magnifique titre de "Martine va à la plage" version sorcier).
Je m'égare. Au programme de cette réunion, de la poussière, du vent, un sac avec un joli dessin dessus et une portion de salade.
Je vous souhaite une bonne lecture.
Assise sur son lit, un livre ouvert sur les genoux, Vanille regardait dans le vide. La chambre de son enfance n’avait plus la même chaleur. Les peluches et les jeux sur l’étagère étaient incrustés d’une fine couche de poussière, les couleurs des affiches étaient devenues fades. Lointaine était l’époque où les vacances lui procuraient la joie d’être chez elle.
Pendant qu’elle était à Poudlard, sa mère avait changé les meubles et les peintures des couloirs et du salon, pour en faire l’appartement classique d’une quarantenaire célibataire avec deux chambres à coucher de trop, sans enfant pour les occuper.
Vanille était seule chez elle, comme chaque jour ou presque depuis le début des vacances. Son frère n’était pas encore rentré de son voyage. Son retour n’était pas encore prévu. Leur père était avec lui, tous les deux lui manquaient. Elle se surprit à éprouver un brin de jalousie.
Et sa mère s’était trouvé un ami. Un copain. Elle passait ses journées chez lui, “pour ne pas te l’imposer ma chérie”. Elle rentrait des fois le soir dîner avec elle, puis repartait dans la nuit.
Et donc, Vanille s’ennuyait. Elle pensait à sortir, à aller au cinéma, au théâtre. Des activités moldues qui ne l’intéressaient plus.
Ambre et Leanne étaient toutes les deux occupées mais leurs activités n’avaient pas tenté Vanille.
Elle pensait parfois à Alexandre. Après quelques jours elle avait reçu une lettre de sa part, il lui souhaitait simplement de bonnes vacances. Il ne lui proposait pas de se revoir avant la rentrée, ce qui la soulagea : se voir directement en dehors de l’école aurait peut-être été trop pour elle. Les jours passaient et elle se demandait si, sans l'atmosphère magique dans laquelle ils s’étaient embrassés, elle ressentirait encore ces émotions. Après un an de relation froide et compliquée, elle aurait besoin de temps pour se sentir vraiment bien avec lui. Si cela arrivait un jour.
Les vacances avaient commencé depuis dix jours et elle avait déjà lu plus de la moitié des livres qu’elle avait empruntés à la bibliothèque de l’école et celle du Club pour ses recherches personnelles. Mais elle était limitée par un manque d’information - et peut-être aussi d’inspiration. Pourtant, la motivation elle était bien là.
Elle avait bien entendu ramené ses notes. Dedans était consignée une grande partie des conclusions d’Oreste, qui l’avait aidée à étoffer ce qui concernait la matérialisation de la magie et lui avait expliqué le principe du sortilège.
Puis elle avait cherché de nouvelles pistes. Elle avait retrouvé sa note “étudier la magie des Elfes” et l’avait élargie en “étudier la magie des créatures magiques”. Malheureusement, elle n’avait pu que concilier ses propres connaissances, aucun des livres qu’elle avait emprunté n’avaient pu l’aider.
Elle baissa les yeux sur celui qu’elle était en train de lire, un peu barbant, mais il fallait bien qu’elle le lise. Elle n’avait rien d’autre à faire. Au détour d’un paragraphe, qu’elle lisait en diagonale sans en retenir le moindre sens, son regard s’accrocha sur le mot Mahoutokoro. Intriguée de voir le nom d’une école de son Club, elle lu le paragraphe. Il était question de capacités en Quidditch supérieures à la normale, en raison de différentes façons d’étudier la magie.
“Décidément, même dans un livre intitulé Lire dans les étoiles et sortilèges potagers, les sorciers sont bien incapables de ne pas parler de Quidditch.
“Pourquoi j’ai un emprunté un livre de divination et cucurbitacées ?
“Je pensais peut-être aider maman dans son jardin avec un peu de magie quand j’aurai le droit de pratiquer en dehors de l’école.
“Et pourquoi j’ai l’impression d’avoir pensé à quelque chose d’important ?
Elle retourna en arrière dans ses pensées. Le Club des Créateurs de Mahoutokoro, qu’elle rencontrerait certainement l’année prochaine. Lorsqu’Oreste était revenue de ce voyage, elle avait trouvé une nouvelle motivation et des idées grâce à des discussions avec ces sorciers qui avaient “différentes façons d’utiliser la magie” selon son livre. Oreste avait aussi parlé de sortilèges. Elle lui avait appris qu’au Japon, les sortilèges n’étaient pas invoqués avec les mêmes formules.
Une lumière s’alluma dans sa tête. Et si elle tentait d’en savoir plus sur les différentes cultures magiques ? Elle réfléchit à toute vitesse. Il n’y avait aucun livre chez elle pour commencer ces recherches, et elle ne savait même pas à quoi elle pensait vraiment. Mais cela faisait deux fois que la magie d’Asie venait à elle, s’imposant maintenant par ses différences avec la magie occidentale.
Découvrir les origines et la nature de la magie, qui était son premier et principal but, pouvait débuter par l’étude des différentes manières de l’utiliser. Et quoi de plus différent que la culture d’un autre continent ?
Mais comment faire ces recherches en étant coincée ici ? Ses livre ne parlaient pas plus d’Asie que de créatures magiques. Mais il y en aurait certainement chez Fleury & Bott, pourquoi ne pas s’organiser une journée dans le Londres sorcier, après tout. Elle espérait seulement que sa mère accepterait de la laisser y aller seule.
Mais au fond de ses pensées, quelque chose la bloquait. L’image d’elle-même ne recopiant que des extraits de livres pour compléter ses recherches s’imposa à elle. C’était comme avancer sur des routes déjà tracées en espérant un jour découvrir un nouveau monde.
Elle repensa au Club et des possibilités immenses qu’il offrait. La chance qu’était celle de pouvoir créer, et de pouvoir échanger. D’être en contact avec des sorciers du monde entier.
L’évidence la frappa ; elle se précipita sur son bureau pour rédiger une lettre à Oreste. Elle lui demanda de lui donner un contact du Club des Créateurs de Mahoutokoro auquel elle pourrait poser ses questions.
Fini les routes tracées, elle allait commencer à marcher dans l’herbe.
Elle en profita pour préciser où en étaient ses recherches, et s’enquérit de l’entrée d’Oreste au ministère de la magie. Elle se sentait fière de son amie, qui avait été comme un premier mentor pour Vanille.
Elle envoya sa lettre et replongea dans un ennui quasi instantané.
L’attente ne fut heureusement pas longue, Oreste, d’une écriture un peu précipitée, lui répondit par retour de chouette. Elle lui proposait de se voir quelques jours plus tard au Chemin de Traverse autour d’une bièraubeurre pour discuter.
“Le hasard te sourit à pleines dents. Mon amie japonaise du club de Mahoutokoro passe ses vacances en Europe, et viendra passer deux jours à Londres. Elle sera là ce samedi, tu pourras lui poser toutes tes questions. Je vais lui envoyer un hibou pour la prévenir, la connaissant, elle se fera un plaisir de te préparer un petit exposé sur nos différences magiques culturelles.”
En effet, Vanille était épatée de la coïncidence qui se présentait devant elle.
Le soir même, sa mère rentra pour manger. Pendant le repas, Vanille lui demanda la permission de se rendre à Londres le samedi.
- A Londres ? Mais tu as tout ce qu’il faut ici, en ville ! Et puis si tu t’ennuies, tu peux toujours accueillir tes amies, c’est pour ça qu’on a relié notre cheminée.
- Elles sont occupées, tu le sais. Laisse-moi y aller s’il te plaît, si je prends le Magicobus, j’y suis en une heure et il me déposera exactement aux bons endroits. Je retrouverai directement Oreste.
- Tu n’as jamais été aussi loin toute seule…
- Si, je suis allée à Poudlard. Ce n’est qu’un trajet en Magicobus, avec la magie tout est plus proche que dans le monde moldu. Je l’ai déjà pris, la première fois que je suis allée au Chemin de Traverse avec le professeur McGonagall.
Sa mère se mordit un instant les lèvres.
- Vanille, je suis désolée de ne pas être à la maison souvent tu sais…
- Ne le sois pas, je sais que c’est plus arrangeant pour vous, avec vos horaires, votre intimité… Mais tu dois au moins me laisser organiser ma vie ici. Me laisser étendre mes ailes et m’envoler vers mon destin. Sinon j’aurais l’impression d’être comme une princesse dans son donjon.
- Bon, je t’arrête là, sinon d’ici deux minutes je suis un terrible dragon.
Vanille et sa mère se sourirent, complices.
- Allez vendu, tu ne rentres pas après dix-neuf heures, et tu prends le portable de ton frère.
- Je ne pense pas que le réseau passe chez les sorciers, mais merci, dit Vanille.
En entrant dans sa chambre, Vanille s’adossa à sa porte un instant. Sa mère ne lui avait pas demandé pourquoi elle comptait se rendre à Londres. Elle s’y était pourtant attendue, préparée même, puisque sa mère n’était pas au courant pour le Club des Créateurs, ni de ses recherches. Vanille avait pensé lui en parler dès le premier jour des vacances, mais celui-ci s’était avéré être le jour où sa mère lui avait présenté son ami. Après ce jour, elle n’avait pas senti de bon moment pour évoquer le sujet. Et comme cela lui faisait taire une grande partie de son année, sa mère ressentit que Vanille ne lui racontait pas tout comme elle en avait l’habitude. Elle prit cela pour un rejet, et mère et fille tombèrent dans une spirale infernale, chacune croyant que l’autre voulait de l’espace, et chacune respectant la volonté de l’autre, en s’éloignant.
Le samedi, Vanille sortit devant chez elle et empoigna sa baguette qu’elle brandit devant elle. Quelques instants passèrent, pendant lesquelles elle se demanda si elle avait le droit de faire ça en étant mineure. Puis déboula dans un grand bruit un bus à double impériale violet qui s’arrêta exactement là où Vanille se serait tenue sur elle n’avait pas reculé d’un bon pas une demi-seconde plus tôt.
“C’est peut-être le moyen de transport le plus dangereux finalement… quand on n’est pas dedans.”
- Bienvenue dans le Magicobus ! beugla le contrôleur à qui elle acheta un billet pour Londres, Chemin de Traverse. C’pas souvent qu’on s’arrête dans des coins aussi sympas. Merci d’avoir pensé au Magicobus pour votre trajet. Ern ! lança-t-il soudain alors que Vanille s’asseyait sur le premier fauteuil pour profiter de la vue (et pouvoir voir la route, ça aide pour ne pas être trop malade), on fait un détour pour voir la mer ?
- On voit la mer à chaque fois qu’on passe chercher la vieille Mrs Parkson, cinq fois par semaine, répondit le conducteur.
- La mer d’ici, l’est bien plus belle !
Le conducteur lança un regard désolé à Vanille, qui haussa les épaules. Finalement, le bus passa par des routes qui n’étaient sûrement pas les plus directes car ils longèrent la mer de longs moments alors que la route de Londres s’enfonçait vers les terres.
Ce détour plu beaucoup à Vanille, qui aimait profondément les côtes, la mer, les falaises. Plusieurs fois, des oiseaux marins s’approchèrent pour voler près d’eux. Le bus sautait d’à-pic en presqu’îles, roulait quelques instants à chaque fois pour profiter des paysages. Il était déstabilisé par ses deux étages de prise au vent, et du vent, il y en avait. Quand le teint de Vanille commença à tirer sur le jaune, le contrôleur accepta qu’ils arrêtent là leur balade.
Ils déposèrent une Vanille titubante sur le chemin de Traverse une demi-heure plus tard, et lui offrirent un sac en papier (avec un joli dessin du magicobus dessus) pour pouvoir vomir sans crainte.
Oreste était déjà assise avec son amie sur la terrasse d’une brasserie. Vanille jeta son sac (plein) et les rejoint.
- Vanille ! Je me demandais quand tu arriverais. Ca va ? On dirait que tu viens de prendre le Magicobus.
- Précisément.
- Assied-toi, je te présente Mai Ishii.
Vanille prit place face à la japonaise qui lui tendit la main, souriante. Elle avait de longs cheveux noirs brillants, et le regard sérieux, qui lui rappelait beaucoup celui d’Oreste.
- Ohayô gozaimasu ! O-genki desu ka ? lui lança Mai en lui serrant la main.
- Oh, tu ne parles pas anglais ?
- Tiens, bois une gorgée de ça, dit Oreste en lui tendant une petite bouteille bleue.
Vanille s’exécuta.
- Est-ce que tu me comprends maintenant ? demanda la japonaise.
- Oui ! Ouahou, c’est super comme potion ! s’étonna Vanille en la rendant à Oreste, qui la posa au milieu de la table.
- Il a bien fallu qu’on trouve des solutions pour pouvoir communiquer, apparemment pendant des années il fallait qu’on apprenne les langues les uns des autres.
- Enfin c’était surtout à Beauxbâtons, Durmstrang et Mahoutokoro d’apprendre l’anglais, lança Mai dans un faux regard de reproche. Du coup on a créé cette potion. Elle fait partie des rares créations communes à toutes les écoles, qui en plus n’a été vendue à aucun des gouvernement. C’est notre bijou.
- Comment ça marche ? demanda Vanille.
- Une gorgée par heure, et tu peux comprendre toutes les langues que tu entends.
- Ouahou… répéta Vanille. C’a dû être un casse-tête à créer. C’est une traduction directe ? Ou est-ce que - c’est notre cerveau qui comprends les idées principales et les interprète ?
Oreste lança un regard à Mai qui fit rougir Vanille, c’était un regard plein de fierté.
- Je t’avais dit que c’était une créatrice dans l’âme. Tu entends très bien qu’il ne s’agit pas d’anglais, expliqua-t-elle, mais ton cerveau te le fais croire, parce que tu comprends parfaitement ce qu’elle dit.
- C’est bien une interprétation de ton cerveau, qui comprends parfaitement les émotions qui passent dans mes mots, et les traduit dans des mots qu’il connaît. Avec le temps, on peut s’entraîner à remarquer qu’il ne s’agit pas de sa langue natale. Là, tu m’entends parler anglais. Mais mettons que tu t’entraînes : tu finis par m’entendre en japonais mais tu comprends parfaitement. Une fois l’effet de la potion terminé, il te reste forcément des traces, des souvenirs, et tu peux apprendre une langue facilement.
- C’est simplement génial.
La petite bouteille bleue trônait au milieu des trois filles, prête à être utilisée à tout moment. Elles commandèrent trois bièraubeurres. Mai se présenta comme une future Grande Créatrice, ce qui ne signifiait pas forcément septième année, mais qu’elle entrerait dans sa dernière année d’étude dans son école. Elles parlèrent du Club, et Oreste leur raconta son travail au Département des Mystère où elle poursuivait ses recherches.
- Je crois savoir que tu as des questions pour moi ? demanda alors Mai à Vanille.
- Oui. Je vais commencer à la rentrée mes propres recherches, j’aimerais étudier en profondeur la magie. Ce qu’elle est, sa nature ses origines.
Vanille se demande un instant s'il était bien sage de révéler ainsi le détail de ses projets à une fille qu'elle ne connaissait pas. Puis elle se dit que parmi tous les membres du Club, Oreste faisait partie de ceux en qui elle avait une confiance aveugle. Et il en allait de même pour ses amis.
- Elle poursuit un peu mon héritage d’être au Club des Créateurs pour ne rien créer mais simplement de comprendre des choses.
- Je ne sais pas si “simplement” est adéquat, répliqua Mai. C’est un énorme sujet auquel tu t’attaques, tu en as conscience j’imagine.
- Je sais surtout que je ne sais rien et que je ne sais pas vraiment où je vais, si j’aurais un résultat ou même si je finirai ces recherches un jour. Mais il y a des questions que je me pose et qui tournent toutes autour de ces même thèmes : la nature et les origines. Du coup, je pense que ce sera le nom de mon projet.
- Et comment dois-je intervenir ? demanda Mai poliment.
- J’ai lu il y a quelques jours qu’à Mahoutokoro, vous étudiez la magie “différemment”, je suppose que l’auteur a voulu dire différent de l’Europe. Est-ce que tu connais assez la culture sorcière Européenne pour avoir remarqué des distinctions ?
Mai prit un instant pour réfléchir, et Vanille sortit un petit carnet.
- Je crois que la principale différence se situe dans les tout premiers cours de magie, ensuite tout découle en suivant ces premières méthodes. Les enfants sorciers arrivent très jeunes à Mahoutokoro, et ils y développent leur… instinct magique. Leur spontanéité. Ils apprennent à sentir les sortilèges, presque à sentir la magie et à l’utiliser. Tout cela est très théorique, bien sûr. En cours, on nous apprend à trouver nous-même les sortilèges. Les professeurs nous donnent le plus souvent les bases, puis nous demandent de nous concentrer sur des effets de tel ou tel sort. Il en résulte souvent des sortilèges identiques avec des formules différentes. On essaye celles des autres, on voit laquelle nous convient le mieux. Il y a beaucoup plus d’informulé chez nous, mais on ne nous impose pas d’apprendre certains sort spécifiquement en informulés, simplement si ça marche mieux, on va l’utiliser. Pour résumer, je dirais que notre magie est spontanée. Sanguine. Instinctive. Comme si nous avions tous un sixième sens qui nous permet de déterminer le plus rapidement possible, et sans y réfléchir, quel sortilège sera efficace. J’aurais sûrement une centaine de détails, d’exemples à te proposer, je te les enverrai dans une lettre.
- Est-ce que tu avais déjà réfléchis à tout ça avant ?
- Pas avant d’avoir rencontré des sorciers d’autres cultures, non. J’ai baigné toute ma vie dans cette façon d'appréhender la magie et il ne me serait jamais venu à l’idée qu’il y ait d’autres manières de faire.
Vanille était en effet étonnée qu’il y ait autant de différences dans les manières d’apprendre la magie.
- Nos cultures ont des origines communes tellement lointaines, ce n’est pas étonnant qu’il y ait des différences majeures dans nos manières même d'appréhender la magie. Je suis certaine que chez les moldus, c’est la même chose, dit Oreste.
- J’espère pouvoir aller voir par moi-même ces différences un jour. Peut-être qu’en étudiant plusieurs cultures, je pourrais essayer de trouver des similitudes. Et si des peuples aussi éloignés tant dans le temps que dans l’espace que les nôtres ont des similarités dans leur magie, alors peut-être que celles-ci m’aideront à comprendre la nature de cette magie, à laquelle aucun peuple ne saurait échapper.
Oreste et Mai échangèrent le regard complice de ceux qui voient les jeunes prendre la relève.
- Pourquoi n’irais-tu pas voir un élève de Durmstrang ? proposa Mai. Un élève du Club. Là-haut, ils apprennent aussi la magie différemment d’ici où de chez moi.
- Aller là-bas ?
- Oui, les membres du Club sont des sorciers de confiance, ils t’accueilleront chaleureusement. Et je pense qu’il ne verraient pas de soucis à parler de leurs traditions à un autre membre du Club, affirma Mai.
- Mais c’est quand même… enfin, loin.
- Avec un aller-retour en Portoloin international, tu peux ne passer qu’une seule journée là-bas. Ce ne sont pas les plus chers, ceux qui vont au grand nord. Tiens, dit Oreste en récupérant le carnet de Vanille, je te donne les coordonnées de Peter. C’est, je pense, celui de Durmstrang avec qui je suis le plus proche. Je lui enverrai une lettre ce soir, envoie-lui en une aussi, quand tu te seras décidée.
- Merci, dit Vanille avec un sourire crispé.
- C’est l’idée de voyager aussi loin qui te fais peur ? demanda Mai.
- Et puis aller dans un endroit que je ne connais pas, chez des gens que je ne connais pas… Je suis encore mineure vous savez.
- Tu peux prendre un Portoloin seule pour l’étranger à partir de 15 ans, affirma Oreste, toujours au courant des lois.
- Tu vas adorer le grand nord, affirma Mai, qui ne devait pas être à son premier voyage. Même pour une journée. Les sorciers de là-bas sont incroyables.
Vanille les remercia pour leurs encouragements. Elles finirent leurs bièraubeurres et partirent faire le tour du chemin de Traverse. Elle passèrent l’après-midi ensemble, puis Vanille les quitta, son carnet de notes dans son sac, et un grande satisfaction dans son coeur.
Elle avançait. Et se dit que maintenant, elle ne marcherait plus dans l’herbe, elle marcherait dans la neige.
Le conducteur du Magicobus ne fit pas de détour en la ramenant chez elle, pour le plus grand plaisir de Vanille qui se sentait décidément bien mal dans ce bus, malgré les paysages.
Vanille hésita quelques jours avant d’envoyer de lettre à Peter, l’ami de Durmstrang.
Mai tint parole et lui envoya une lettre foisonnante de détails sur la Magie Asiatique, en particulier Japonaise.
Après tout ce qu’elle avait appris, Vanille ne voulait pas s’arrêter en si bon chemin. Elle voulait découvrir plus mais était bloquée par la peur de l’inconnu. Elle n’était encore jamais sortie du pays, encore moins seule.
Puis dans un bref élan de courage (elle n’était décidément pas une Gryffondor), elle osa envoyer sa lettre pour proposer une rencontre avec Peter. La réponse mit quelques jours à arriver, sans surprise, Peter acceptait avec plaisir de la recevoir. Il attendait sa lettre depuis qu’il avait reçu celle d’Oreste. Il lui proposa une date, l’informa qu’il avait déjà réservé un aller-retour en portoloin au cas où. Il lui disait qu’il était ravi d’aider les recherches d’une “petite nouvelle du Club”.
Il ne lui restait plus qu’une chose à faire : convaincre sa mère. Et pour cela, elle n’allait plus pouvoir se contenter de dire le strict minimum. Elle ne voulait ni mentir, ni lui parler du Club.
Elle décida d’y aller en douceur.
- Tu sais, lança Vanille en se servant de la salade (les repas sont d’excellents moments pour demander quelque chose), j’ai appris beaucoup quand je suis allée à Londres.
- Ah oui ? Sur quoi ?
- Eh bien, j’y ai rencontré deux amies à moi, et l’une des deux fait ses études à Mahoutokoro, l’école du Japon. On a beaucoup parlé de sa culture, de la magie de là-bas…
Sa mère avait l’air sincèrement étonnée :
- Je croyais que tu voulais aller à Londres pour voir quelqu’un ?
- Oui, c’est ce que j’ai fait.
- Eh bien j’imaginais, en fait, que peut-être il s’agissait de… d’un garçon, dit-elle en murmurant le dernier mot.
- Qu’est-ce que cela aurait changé que je rencontre des amis fille ou garçon ?
Elle ne s’attendait pas à cette tournure de conversation.
- Que ce soit un garçon, tu vois. Le garçon.
- Oh !
Vraiment pas.
- Non je… heu… non.
Elle rougit sous le regard tendre de sa mère.
- Ce n’est pas de ça dont je voulais te parler, maman.
Sa mère prit un air décontracté, l’air de dire “On n’en parle pas si tu ne veux pas”. Vanille se demanda par quel hasard sa mère voulait lui parler de garçon à ce moment-là. Elle pensait pourtant avoir agit normalement.
- Je voulais te parler, se lança-t-elle avant que sa mère ne lui pose plus de question, de cette amie qui connaît également un élève de Durmstrang, l’école du nord.
- Cette amie de Mahou… de l’école du Japon ?
- Oui et d’Oreste, mon amie de Poudlard.
Sa mère était un peu perdue.
- J’aimerais aller rencontrer Peter, un ami d’Oreste, qui va à l’école de Durmstrang.
- Bien sûr, ton premier trajet jusqu’à Londres s’est bien passé, je ne m’inquiète plus.
- Il n’est pas à Londres, il est au nord. Vers la Scandinavie. Je ne sais pas vraiment trop où en fait, il m’a déjà réservé des billets de Portoloin.
Sa mère ouvrit de grands yeux.
- Tu veux aller dans un pays que tu ne connais pas chez un garçon que tu ne connais pas ? Toute seule ?
- Je ne le connais pas mais on fait partie du même… groupe d’amis, je lui fais vraiment confiance et ça ne serait encore qu’une seule journée.
- Hors de question que je te laisse aller là-bas.
- Mais maman !
- Si je pouvais au moins voir chez qui tu veux aller, ça me rassurerait.
Vanille lui montra la lettre qu’elle avait reçue. En fait, il s'agissait d'un faux, fait avec une plume à réplication d'écriture, qu'elle avait reçu lors d'un Noël passé. Elle avait prit soin de cacher certaines parties, comme lorsqu'il évoquait le Club ou le fait de faire des recherches. Le résultat était assez bancal mais sa mère n'y vit que du feu. L'effet de la magie, sûrement. Elle se mordit l'intérieur des lèvres inconsciemment, se sentant coupable de manipuler ainsi sa mère.
- Il dit qu'il connaît bien tes amies... ils se sont rencontrés avec l'école ?
- Oui, c'est ça, affirma Vanille, vague.
Sa mère eu l’air suspicieux encore quelques instants et abdiqua à la condition que Vanille lui montre ses deux billets de Portoloin. Elle les commanda (en envoyant quelques Noises dans une bourse pour chouette, objet qu’elle n’avait encore jamais utilisé sur Filéone) et sa mère accepta de la laisser partir.
End Notes:
Notre Réunion s'arrête là. Merci d'avoir suivi jusqu'au bout, n'oubliez pas de laisser un mot dans la Boîte à Idées située juste en dessous. Toutes les suggestions pour améliorer la gestion interne du Club seront prises en considération.
Et avec beaucoup d'amour.
Lors de notre prochaine réunion Mercredi prochain, nous évoquerons un Bureau, beaucoup trop de Rrrr et des ours. Oui, des ours.
Je vous souhaite une excellente semaine.
Et beaucoup d'amour.
(Oui, ce n'est pas très professionnel. Que voulez-vous. Ecrire et lire vos Review me mettent en joie.)
Des ours face à une Occlumens à l'envers by Deanna
Author's Notes:
Bienvenue, chers membres du Club des Créateurs pour une nouvelle réunion !
Voici un nouveau chapitre de notre palpitante (non) histoire. C'est encore les vacances (double non), Vanille ne retrouvera pas encore les bancs de l'Ecole aujourd'hui.
J'ai pris du retard sur mon avance (?) et je dois essayer de passer la seconde pour pouvoir continuer à publier régulièrement.
Oh, et j'ai une nouvelle bêta-readeuse ! Je vous la présente la semaine prochaine et j'espère (je sais) qu'elle m'aidera à améliorer mon histoire le plus possible.
Sur ce, je vous laisser avec des Ours, une Occlumens à l'envers et des questionnements amoureux.
Bonne lecture !
Un échange de lettres avec Peter plus tard, vers fin juillet, la journée de voyage De Vanille dans le nord arriva.
Elle prit très tôt le Magicobus ce matin-là, pour ne pas manquer son Portoloin. Elle arriva au Chemin de traverse, malade, une heure avant son départ. Elle erra pour patienter, fit sans s’en rendre compte trois aller-retours de la rue. Elle était impatiente et stressée à la fois. A l’heure prévue, elle se rendit au Bureau des Voyages, à côté de la Grande Poste.
C’était un bâtiment tout en hauteur aux murs arrondis, sur lesquels étaient accrochés des centaines d’objets, chaussures, peignes et verres à pieds, montants jusqu’au plafond en vitre. Au sol, il y avait deux plateformes, rondes elles aussi, dont une avec une table haute au milieu. A gauche, des sorciers transformaient les objets en Portoloin et les accrochaient aux murs, à droite, d’autres les décrochaient pour envoyer des groupes de personnes. Une immense horloge tournait sur elle-même à plusieurs mètres du sol au centre de la pièce.
Un craquement sonore retentit, et la plateforme sans la table fut alors occupée par un groupe de sorciers. A leur accent, Vanille comprit qu’ils venaient de France.
On appela le numéro de son Portoloin, et elle se rendit sur l’autre plateforme en tendant son billet au contrôleur. Sur la table, il y avait une gourde en plastique. Elle fit semblant de savoir parfaitement ce qu’elle faisait, alors qu’elle n’avait jamais pris de Portoloin, et acquiesça l’air détendue, une petite goutte de sueur froide lui tombant dans la nuque, quand on lui expliqua quoi faire.
Les yeux fixés sur l’horloge, elle prit la gourde dans sa main (personne ne prenait ce Portoloin à part elle, Oreste l’avait prédit, ce n’était pas une destination très demandée), et attendit que la trotteuse atteigne son apogée. Au moment où elle atteint le douze, Vanille sentit quelque chose la tirer au niveau de son nombril, et elle se sentie happée en avant, incapable de contrôler le moindre geste.
C’était une sensation très désagréable que d’être ainsi traînée comme un pantin, dans un vide sans gravité ni air, de ne sentir que l’accélération, la vitesse puis, après ce qui sembla être une heure passée en une seconde, l'atterrissage inévitablement brutal.
Elle se releva, sonnée, sur une plateforme identique à celle qu’elle venait de quitter, la gourde à la main. Une sorcière à la voix rassurante mais incompréhensible lui prit la gourde et l’aida à s’asseoir, s’enquérant de son état, toujours dans sa langue. Vanille, qui n’avait pas réussi à reprendre assez ses esprits, s'agrippa à un seau qui traînait là par chance et se libéra dedans. Ce n’était pas facile d’avoir le mal des transports sorciers.
Elle laissa la sorcière vider le seau et le reposer à côté des autres (qui n’étaient pas du tout là par hasard, comprit Vanille), et se posa pour la première fois une question importante : comment allait-elle réussir à communiquer ? Elle essaya de demander à la sorcière où elle pouvait attendre quelqu’un, celle-ci lui répondit très vite dans sa langue, d’un ton qui laissait entendre que Vanille devait lui obéir, l’assit sur un banc en pierre près de la plateforme et repartit accueillir des gens.
Vanille sortit la lettre de Peter qui lui disait de l’attendre au Bureau des Voyages. Elle vérifia l’heure sur sa montre quand tout à coup les portes claquèrent en laissant entrer trois sorciers en longue robes rembourrées qui couraient à moitié en parlant très vite et très fort, même si Vanille ne savait pas ce qu’ils disaient, elle vit tout de suite qu’ils se disputaient. Ils avaient à peu près l’âge de Vanille, deux garçons et une fille, et ils s’approchèrent de Vanille d’un pas vif dès qu’ils la virent.
- Bonjourrr, tu es Vanille je prrésume ? demanda un des deux garçons avec un fort accent. Tiens, prrend ça.
Il lui tendit une petite bouteille bleue identique à celles de Mai et Oreste, Vanille comprit qu’il s’agissait de la potion de langage du Club. Elle en bu une gorgée.
- Tu comprends ce que je dis ? demanda alors le même garçon, sans aucun accent.
Elle hocha la tête et ils sortirent à l’air libre pour faire les présentations.
- Désolé pour le retard, dit la fille, ces deux idiots pensaient avoir le temps de voir les nouveaux balais avant de venir te chercher.
Ils étaient frères et soeur. Peter, l’aîné, était celui qui lui avait donné la potion. Il venait de finir sa dernière année à Durmstrang, il venait donc de quitter le Club. Son cadet, Piotr, allait devenir Grand Créateur, et leur benjamine Helga Jeune Créatrice. Les trois n’avaient qu’un an d’écart chacun et le Club semblait être une histoire de famille, car même leurs parents y avaient été. Pourtant, chacun était entré dans le Club persuadé d’être le seul de la fratrie, les membres du Club de Durmstrang avaient la coutume étrange de ne pas se montrer à visage découvert avant la cérémonie d’entrée.
Les trois étaient très liés et bombardaient Vanille de question sur son voyage, sur Poudlard, sur le Club. Peter était plutôt calme comparé aux autres, il semblait réserver ses questions pour plus tard. Helga comprit qu’elle allait faire sa première Rencontre Annuelle en même temps que Vanille et cela semblait la mettre en joie. Ils avançaient d’un pas tellement vif et parlaient avec tant d’enthousiasme que Vanille ne pensa même pas à admirer les lieux où elle se trouvait.
Ils la guidèrent dans les méandres des rues pavées et ils arrivèrent dans une petite auberge où ils achetèrent une poignée de Poudre à Cheminette chacun (Vanille se vit offrir sa poignée) pour se rendre dans leur maison.
Une fois arrivés, ils s’installèrent dans un petit salon, chacun sur un fauteuil, accompagnés de tasses de thé, et Vanille expliqua sa venue. Elle parla brièvement de ses recherches qu’elle avait à peine commencées, de ses quelques notes grâce à Oreste et de ce qu’elle avait appris de Mai. Elle parla uniquement de ses projets de connaissances sur la culture magique, et éluda un peu le sujet des origines de la magie.
- J’aimerais savoir comment vous apprenez la magie, à Durmstrang. Quelles sont les principales différences avec Poudlard, quelles sont vos forces.
- Seuls les plus forts sont à Durmstrang, dit sentencieusement Peter, c’est une phrase que nous répètent parfois nos professeurs. Il y a comme un culte de la puissance, ici. On apprend la magie de la manière forte, on nous apprend à appréhender chaque nouveau sortilège de façon brutale, frontale. Si on n’y arrive pas, on recommence, on ne nous apprend pas à essayer différemment, à avoir un doigté particulier. On rééssaye, encore et encore, tête baissée. Ca finit toujours par venir.
Il se tourna vers son frère et sa soeur qui acquiescèrent.
- Les sorciers du Nord sont vraiment puissants. Violents, même, nous avons une réputation bien méritée d’être un peu… tempétueux. Mais c’est une part de notre faiblesse, nous manquons de finesse et de raffinement. La résistance mentale est aussi très importante. Nous avons des cours d’occlumancie très tôt, avant même d’apprendre la leggilimencie. Et la résistance mentale ne pourrait être sans résistance physique, à Durmstrang nous entraînons notre endurance physique autant que magique et mentale. Nous nageons dans les lacs gelés, courons dans la neige pour endurcir nos corps en même temps que nos esprits.
Helga reprit le discours de son frère :
- Les relations entre sorciers du Nord reflètent cette éducation, cette manière d'appréhender la magie : nous sommes directs, francs. Nous ne nous embarassons que rarement de politesse inutile, d’hypocrisie. Nous sommes honnêtes et bienveillants entre nous.
Piotr s’appropria la conclusion :
- Tout ça peut nous donner un côté bestial, un peu ours. Evidemment, nous ne sommes pas que frontaux et têtes de mules. Mais cela serait mentir que de nier cette part de nous, les sorciers du Nord. Beaucoup de sorciers d’ici sont attirés par la la Magie Noire, car c’est indéniable qu’il s’agit d’une magie puissante, difficile à contrôler, et si on n’est pas assez fort, qui peut nous contrôler elle-même. C’en est presque un défi chez nous de réussir à manipuler un sort noir, acheva-t-il.
Une ombre était passée dans les yeux de ce garçon qu’elle venait de rencontrer, Vanille en eut des frissons. Elle n’était pas sûre de vouloir continuer à apprendre tout ça.
Son thé était froid et elle voulait rentrer chez elle. C’était comme si une journée entière s’était écoulée alors qu’elle n’était arrivée qu’une heure plus tôt.
Peter, son frère et sa soeur comprirent qu’elle était mal à l’aise. Malgré leurs dires sur la franchise et la politesse inutile, ils ne lui demandèrent pas pourquoi elle s’était d’un coup fermée comme une huître et ne posèrent aucune question. Ils décidèrent de la raccompagner plus tôt que prévu au Bureau des Voyages, discutant que tout sauf des recherches de Vanille.
Ils réussirent à avancer l’heure du départ de Vanille, et elle prit un Portoloin - ours en peluche.
- Je crois qu’on lui a fait peur, avoua Helga quand ils sortirent du Bureau.
Vanille rentra directement chez elle, bien en avance par rapport aux inquiétudes de sa mère. Elle s'assit sur le canapé du salon, seule, et se demanda ce qui avait pu se passer.
Elle avait ressentit un tel malaise chez ces personnes, mais n'arrivait pas à en comprendre les raisons. Ils avaient pourtant été adorables, accueillants, chaleureux, comme Oreste et Mai le lui avaient prédit. Mais c'était sans doute leur discours qui l'avait retournée. Pourtant, rien n'avait été dit de choquant. Certes, les sorciers du Nord avaient indéniablement une force de vie intense et un attrait pour la puissance magique. Mais ce n'était pas une raison pour s'enfuir ainsi !
Après une heure de réflexion à se poser des questions, Vanille alla tout de même rédiger un compte-rendu de ce qu'elle avait entendu pour ne pas oublier de détails importants. Elle avait presque fini quand quelqu'un sonna à la porte d'entrée.
Peu habituée à recevoir des visiteurs chez ses parents – chez sa mère, elle alla prudemment ouvrir, et vit avec surprise Oreste sur le pallier.
- Peter vient de me parler par cheminée, lança-t-elle sans préambule, il a eu peur que tu aies mal pris votre rencontre, il m'a dit que tu t'étais presque enfuie de chez eux !
- Bonjour à toi aussi, comment vas-tu ? Et comment as-tu trouvé ma maison ?
- Mes lettres ne sont que des retours de hibou mais tu as donné ton adresse à Mai. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? contra-t-elle. Tu me laisses entrer ?
Vanille invita son amie à prendre un thé dans le salon et lui expliqua sa journée – du moins ce qu'elle avait comprit.
- Tu sais, les sorciers du nord aiment impressionner. Ils aiment le spectacle, encore plus que nous. Tu verras bien comment ils sont pendant la Rencontre Annuelle. Ces trois-là, même si je ne connais que les deux aînés, sont exactement comme ça : ils ont vu une Novice anglaise débarquer et ont voulu paraître fort et puissants. Ils voulaient presque que tu les craignes – inconsciemment bien sûr, je te l'ai dit ils sont adorables. Mais c'était ta première rencontre avec des sorciers comme ça, seule en plus, tu n'étais pas préparée. Ils ont une aura intense, écrasante. Je ne pensais pas qu'ils s'en serviraient sur toi, ils l'ont sans doute fait sans y penser. Mais ils s'en veulent, Peter avait l'air très gêné.
Vanille se sentit elle aussi gênée d'avoir réagi ainsi. Une énième fois, elle se dit qu'elle n'avait pas été envoyée à Gryffondor à raison. Fuir quand la situation devenait stressante, elle ne supportait pas bien la pression, la difficulté. Du moins, les difficultés sociales, après tout, elle affrontait tête baissée les problèmes académiques.
Elle comprit alors pourquoi elle pensait si peu à Alexandre depuis le début des vacances : elle fuyait le stress de l'idée d'être en couple. Etait-elle en couple ? Le voulait-elle ? L'attirait-il ? Une centaine de question du même genre fusèrent d'un coup dans son esprit, questions qu'elle bloquait depuis des semaines. Le visage d'Alexandre, ses yeux profonds et glacés, son sourire moqueur, ses traits doux s'imposèrent devant ses yeux, et elle se sentit bien. Etrangement bien.
Oreste la regarda d'un air tendre. Vanille comprit qu'elle avait encore des efforts à faire pour cesser d'être ce fameux livre ouvert. Elle rougit en comprenant qu'Oreste savait à quoi elle pensait.
- J'ai une proposition pour toi, annonça Oreste, encore une fois pleine de tact en ne parlant pas de la soudaine gêne de Vanille. Ça va te plaire.
Vanille l'écouta, intéressée.
- Au ministère, mes études sur la magie sans baguette avancent bien, et elles ont fini par attirer l'attention de quelqu'un, un éminent sorcier du nom de Tim Kahindi, qui était en visite diplomatique en Angleterre. Tim Kahindi est l'équivalent d'un ministre sorcier en Afrique de l'est, et directeur adjoint de l'école de Uagadou, l'école africaine.
Vanille s'étonna de ne jamais avoir entendu parler de cette école.
- Il n’y a pas de Club là-bas, confirma Oreste, et ici, en Angleterre, on parle assez peu des sorciers en dehors de l’Europe. Les sorciers Africains ont pourtant une culture très ancienne et très forte, et leur magie est très différente de la notre. Entre autre, ils réfutent l’utilisation de la baguette magique.
- Ils font de la magie sans baguette ? Tous les sorciers d’Afrique ? Comment est-ce que ça a pu nous échapper pendant nos recherches ?
- Comme je te l’ai dit, les sorciers d’Europe, surtout les Anglais à vrai dire, sont très attachés à leurs propres racines, leur propre culture. Leur propre magie. C’est difficile pour un sorcier anglais d’admettre qu’ailleurs, il y a d’autres façons d’utiliser la magie, qui marchent au moins tout aussi bien. Parfois même mieux dans certains domaines.
Vanille sentit où Oreste voulait en venir. Des sorciers qui appréhendaient différemment la magie et qui, en plus, n’utilisaient pas de baguette, cela avait de quoi les intéresser toutes les deux. Mais après son fiasco avec les sorciers du nord, elle n’était pas sûre de vouloir tenter les sorciers d’Afrique.
- Je comprends ton inquiétude, dit Oreste qui avait parfaitement senti les craintes de Vanille. Mais laisse-moi te présenter le projet. J’ai discuté avec Mr Kahindi de mes recherches quand il est venu me voir, et mon chef de département, avec qui il est proche, a proposé que j’aille passer quelques temps là-bas pour comprendre réellement les ficelles de la magie sans baguette. Mr Kahindi est intéressé de savoir comment j’ai réussi à recréer cette magie malgré mon éducation magique occidentale, et moi je suis intéressée d’en connaître plus sur cette magie. Tout cela a évidemment des intérêts politiques et économiques. Un rapprochement entre nos ministères et nos Ecoles permettrait plus de commerce et d’alliances entre politiciens. Au fond, les vrais raisons de mon départ ne me concernent même pas. Quoi qu’il en soit, je vais passer du temps là-bas à étudier et échanger avec eux. Et vu la bonne entente qu’il y a en ce moment, parce que je ne suis pas certaine qu’elle dure avec les caractères de nos politiciens, j’en ai profité pour parler de toi à Mr Kahindi pour que tu puisses venir avec moi pour une journée, poser tes questions. Je lui ai expliqué que cela n’avait aucun rapport avec le ministère mais avec des recherches personnelles, et il a accepté de te parler de sa culture.
- Tu me proposes de partir avec toi, en Afrique ?
- C’est ça. Lui habite au Kenya, sur la côte Est. Le Ministère Magiques des Sorciers d’Afrique de l’Est se situe dans ce pays, mais l’Ecole se trouve ailleurs, sur ce qu’ils appellent la Montagne de la Lune, quelque part dans un pays limitrophe, l’Ouganda ou la Tanzanie. Comme Durmstrang, ils aiment garder cela secret. Je ne sais pas si tu pourras visiter Uagadou, en revanche.
- J’ai vraiment l’impression que je ne fais rien, pendant mes recherches. Tu m’as présentée à Mai, à Peter, et maintenant tu proposes de m’emmener voir les sorciers Africains.
Oreste posa sa main sur l’épaule de Vanille :
- Si cela n’avait pas été moi, ça aurait été quelqu’un d’autre. J’ai envie de t’aider alors dès que je le peux, je le fais. Tu verras, au fur et à mesure, au plus tu rencontreras de personnes, au plus tu te fera de contacts, plus tu seras aidée. Les sorciers, et c’est certainement pareil pour les moldus, aiment s'entraider, ça procure un sentiment de satisfaction que de se sentir utile.
Vanille songea à Harry Potter et sa lettre inattendue, dans laquelle il lui proposait son aide - venu de nulle part, sans raison. C’était presque incompréhensible d’avoir reçu cette offre. Peut-être Oreste tenait-elle là la raison, que tout simplement, Harry Potter aimait aider les gens.
- A quoi tu penses ? demanda Oreste.
C’était la première fois qu’elle lui demandait ouvertement dans quoi son cerveau s’était encore une fois plongé. Vanille s’en étonna.
- Tu as un air différent de d’habitude, expliqua Oreste, sans que Vanille n’ait prononcé un mot. Quelque chose qui te tracasse ? Si tu as besoin de conseils, je peux t’aider. Seulement si tu veux.
- Je pensais juste à… J’ai reçu une lettre à la fin de l’année. De quelqu’un qui me propose aussi son aide. Une lettre de Harry Potter, avoua Vanille, le nez baissé comme si elle était gênée.
Elle l’était vraiment. Elle ne savait pas vraiment pourquoi elle attirait l’attention ainsi. Cette histoire - ridicule - d’aura révélée par le Revelavis, Jules, Nathan, Alexandre et maintenant Harry Potter… Tous des sorciers, réalisa Vanille, rougissante.
- Est-ce qu’il t’a dit des choses qui te mettent mal à l’aise ? s'enquérit Oreste.
- Non, à part le fait d’avoir reçu une lettre du sorcier le plus connu de notre époque, moi, simple cinquième année à Poudlard…
- Tu n’es pas une simple cinquième année, Vanille, tu es une Novice du Club des Créateurs plutôt douée, excellente sorcière, qui a réussit presque toute seule à… stopper une tragédie.
Son regard se perdit dans le vide un instant, pendant que Vanille niait de la tête
- Et puis tu es plutôt mignonne, affirma Oreste avec un clin d’oeil.
Vanille sentit une bouffée de chaleur monter dans ses joues.
- C’est pour ça que tu attires l’attention autour de toi. Tu as un genre… d’aura. Une aura qui donne envie de t’aider. De venir vers toi.
Avant que Vanille n’ait pu répliquer sur la banalité de son physique dont elle avait parfaitement conscience, la porte d’entrée claqua, et la voix de sa mère s’éleva :
- Je suis rentrée !
Oreste se leva poliment.
- Est-ce que tu veux que je partes ? proposa-t-elle en chuchotant.
- Non, contra Vanille en reprenant ses esprits, non, je voudrais que tu sois là pour rassurer ma mère, seule je n’arriverai pas à la convaincre de me laisser aller en Afrique.
Oreste lui sourit :
- Alors tu es partante ?
- Evidemment !
Les deux filles se sourirent l’air entendu et allèrent se confronter à la mère de Vanille.
Qui finit par accepter, tant bien que mal, de laisser sa fille partir encore une fois.
C’était un matin d’août particulièrement chaud, et Vanille était prête pour cette journée importante. Oreste l’avait briefée de tout ce qu’il y avait à savoir : quelques coutumes à respecter, les vêtements à mettre pour la météo, le nom des personnes qu’elles pourraient rencontrer. Elles ne savaient pas comment se déroulerait cette journée, car Oreste allait rester plusieurs jours sur place, et certains secrets lui seraient révélés, des secrets dont Vanille n’aurait pas connaissance. Tim Kahindi avait été ravi de savoir qu’une demoiselle anglaise s’intéressait à sa culture, et avait proposé un déjeuner avec sa famille pour pouvoir en discuter tranquillement.
Vanille donc était prête mais Oreste, elle, était en retard. Il était convenu qu’elle passe à neuf heures pour un transplanage d’escorte vers Londres, et il était déjà neuf heures dix. Leur Portoloin partait à la demi.
Vanille commençait à tourner en rond dans son salon quand un crac! retentit devant sa porte. Elle l’ouvrit avant même d’entendre toquer. Oreste, un peu essoufflée, tenait un sac de voyage qui semblait peser une tonne sur son épaule et s’écroulait à moitié :
- Bonjour… souffla-t-elle, désolée pour… le retard. Problèmes d’organisation. Tu es prête ?
- Je suis prête, confirma Vanille en refermant à clé la porte derrière elle.
Oreste la fit patienter un instant et posa son sac à terre, il s’effondra sur le béton dans un grand bruit mat. Elle tendit sa baguette dessus et lança un sortilège d’allègement. Puis elle essaya de le porter par la sangle, qui menaça de craquer.
- Fichu sortilège, ça fait une heure que j’essaye d’alléger ce sac mais pas moyen ! Il doit être trop plein.
- Qu’est-ce que tu as mis dedans ?
- J’ai tout rangé dans des malles rapetissées, il y a aussi un chaudron et des livres…
- Tu as essayé de jeter des sorts directement dessus ?
Oreste leva un sourcil. Vanille se pencha sur le sac et regarda à l’intérieur, il semblait presque sans fond et on y distinguait en effet de nombreux objets encombrants.
- Lance tes sortilèges sur les malles une par une, ça marchera peut-être ?
- Pourquoi n’essayes-tu pas ?
- Je suis encore mineure, contra Vanille.
- Ne t’inquiète pas pour ça, fit Oreste avec un clin d’oeil. Le ministère est prévenu que je suis avec toi. Il n’y verront que du feu.
Vanille hésita un moment et sortit sa baguette de son propre sac (qu’elle avait prise pour pouvoir appeler le Magicobus à son retour), et lança précautionneusement quelques sortilèges d’allègement sur chacun des objets occupants le sac d’Oreste, puis prit la sangle et le souleva aisément.
- Voilà, fit-elle en le tendant, modeste.
Oreste rit :
- Je savais que tu réussirais. J’avais déjà essayé cette technique mais ça n’avait pas marché. Merci. On y va ? fit-elle en proposant son bras pour que Vanille s’y accroche.
- On y va ! approuva Vanille, qui avait parfaitement compris la manoeuvre d’Oreste pour la mettre en confiance.
Les deux filles arrivèrent à Londres cinq minutes avant leur départ de Portoloin - Vanille cru comprendre qu’arriver presque en retard était décidément une coutume sorcière anglaise, car personne ne s’étonna de les voir arriver en courant.
Leur Portoloin les déposa à Alexandrie, où un second était prévu jusqu’à Nairobi, la capitale du Kenya, une heure plus tard. Les sorciers aussi ont des escales pendant leurs voyages. Il faut dire que la synchronisation de Portoloins entre différents pays n’était pas tout à fait au point. Elles purent se poser pour discuter, et Vanille pu se remettre de son voyage, un peu pâle.
Les recherches d’Oreste avançaient à pas de géant. Elle avait élargi son champs d’étude et aidait à la création d’objets magiques qui permettaient non pas de jeter des sorts comme les baguettes mais de les contenir pour pouvoir les utiliser, Vanille ne comprit pas tout ce qu’elle racontait. Sa rencontre avec Tim Kahindi serait la dernière étape de la partie sur la magie sans baguette, après cela, elle se dévouerait entièrement à de nouvelles recherches.
- J’ai pu travailler en équipe avec d’autres experts en magie, c’était incroyable. Je ne savais pas qu’il existait des sorciers avec des connaissances aussi pointues dans ces branches de la magie. En même temps, au Département des Mystères, personne ne sait vraiment ce qu’ils font. Même si j’y travaille la moitié du temps, je ne sais rien sur les autres sorciers que j’y croise.
Le Club avait vraiment lancé Oreste dans sa carrière. Sans ça, elle n’aurait pas pu faire connaître ses capacités et grimper les échelons aussi vite.
Elles évoquèrent un peu Lorelei, avec qui Oreste restait en contact, mais Vanille n’osa pas poser trop de questions intimes. Alexandre lui revint en tête à ce moment-là, et Oreste s’en aperçut.
- Et toi, tes amours ? J’ai cru comprendre que vous vous étiez rapprochés avec Alexandre.
- Heu… hésita Vanille, incertaine.
Incertaine sur tout : sur sa relation, sur ses sentiments, sur ce qu’elle savait de lui.
- On s’est rapprochés, oui.
- Mais tu ne sais pas quoi faire n’est-ce pas ? Tu te poses des questions sur lui et sur votre relation ?
- Comment tu…
- On vient de passer des mois à travailler ensemble, je commence à te connaître, et puis tu es vraiment facile à comprendre tu sais. Tu es un peu comme…
Un livre ouvert, je sais.
Elle qui croyait avoir fait des efforts à ce niveau-là.
- Oui, je me pose plein de questions. J’en viens à me dire que je n’aurais jamais dû… faire le premier pas.
- Toi, faire le premier pas ? Il t’a cherché pendant toute l’année, tu n’as certainement pas fait le premier pas. Tu as peut-être cédé, si on veut. J’avoue, continua-t-elle devant le visage incrédule de Vanille, je l’ai un peu observé, il te regardait souvent. Et puis Lorelei m’a dit qu’elle l’avait entendu te parler. C’était un peu indiscret, pardon.
- Ce n’est rien.
Vanille se demanda si elle pouvait lui demander des conseils. Et pour une fois, le fait qu’elle soit un livre ouvert fut utile, elle n’eut rien à demander, car Oreste comprit immédiatement en croisant son regard.
- Alexandre n’est pas quelqu’un de très bavard, je n’ai pas beaucoup eu l’occasion de discuter avec lui. Mais moi, je suis quelqu’un d’assez observateur. Je sais qu’il est particulièrement doué en potion, et pas spécialement modeste. En fait, à y réfléchir, il transpire un peu la fierté. Mais je ne pense pas que cela fasse de lui quelqu’un de mauvais, il a certainement beaucoup d’ambition et pour réussir, il va devoir donner des coups de coude. Il sait comment ça marche, tu l’as vu vendre ses potions, même si l’apothicaire n’a pas voulu toute les lui prendre, il a réussi à se faire remarquer. A serrer les dents et à sourire alors qu’il déteste Mr Wiggs. Il ne va sûrement pas travailler avec lui longtemps, mais grâce à cette promesse de poste il pourra aller loin.
Vanille avait déjà plus ou moins compris cet aspect du caractère d’Alexandre.
- Après, en dehors de ce côté ambitieux, je pense que c’est quelqu’un de bien. Il a toujours voulu aider quand il voyait certaines personnes en difficulté, même quand il était Novice. Je pense qu’il est sincère, qu’il connaît ses défauts et qu’il est du genre à reconnaître ses erreurs. Il a un côté un peu… sourire charmant et voix profonde, un côté dragueur. Je crois qu’il aime plaire, tout simplement, pas spécialement plaire aux filles mais plaire en tant que personne. Il est charmeur, pour mettre tout le monde dans sa poche, sans forcément avoir de mauvaises intentions derrière. Et je ne sais même pas s’il le fait exprès.
Vanille voyait parfaitement ce qu’elle voulait dire. La voix grave d’Alexandre résonnait encore dans ses oreilles. En revanche, elle avait remarqué qu’il l’abandonnait quand il était particulièrement sincère, lorsqu’il lui avait fait ses aveux par exemple. Pendant son monologue, il avait perdu ce ton mystérieux et hypnotisant que lui procurait cette fameuse voix grave, et elle l’avait trouvé vrai, honnête. C’était sans doute cela qui l’avait poussée à l’embrasser.
- J’imagine que tu te demandes comment tu dois agir avec lui, tu ne sais pas trop si tu veux être en couple ou juste proche de lui. Tu sais, Alexandre c’est le genre gentleman, au fond. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé entre vous. Mais ce n’est pas le genre de personne qui te fera du mal, en tout cas pas volontairement. Et si ça arrive, il saura s’en rendre compte, te comprendre et se faire pardonner. Et, je sais que tu ne me demandes rien mais je vais te donner un conseil : laisse faire le temps. Apprends tranquillement à le connaître, passe le temps que tu veux avec lui, sans pression, sans forcément d’autre but que de passer du temps, et tu sentiras bien si c’est quelqu’un qui te correspond. Tu as déjà été avec un garçon ?
Vanille hocha frénétiquement de la tête en signe de négation.
- C’est étonnant qu’aucun garçon n’ait tenté de se rapprocher de toi, tu dégages un truc, je n’arrive pas trop à le décrire. A moins que tu ne les aies tous repoussés ? rit-t-elle.
Vanille rougit un moment et pensa à ce qu’Oreste venait de lui dire. C’était un excellent conseil, au fond, très différent de ce qu’Ambre et Leanne avaient pu lui dire avant de se quitter pour les vacances (“Demande-lui si vous sortez ensemble”, “Embrasse-le encore, tu sauras bien si tu veux être avec lui!”).
- C’est marrant, fit Oreste, sortant Vanille de ses pensées. Inconsciemment, par tes expressions, tu invites les gens à te comprendre. Tu es un peu comme… une Occlumens à l’envers.
Vanille se demanda ce qu’était un Occlumens, et pendant qu’Oreste lui expliquait, elle se rendit compte qu’en effet, sans parler, son amie avait compris de quels conseils elle avait besoin. Elle se sentit reconnaissante envers Oreste, qui semblait l’avoir décidément pris sous son aile jusqu’au bout.
End Notes:
Merci d'avoir lu jusqu'ici ! Bon sang qu'il était long celui-là. N'oubliez pas la Boîte à Suggestions (aka le Cadre des Reviews) qui n'attend que vous. Même si, j'avoue, il ne se passe pas grand chose en ce moment. C'est les vacances quoi ! (Non)
Rendons à César ce qui appartient à César. Le fait que les Sorciers Africains n'utilisent pas de baguette magique, je l'ignorais jusqu'à ce qu'Aeda me le signale en commentaire. Comme du coup Oreste a manqué un gros truc pendant ses recherches, je l'ai intégré ici. Mais ce n'est pas tout ! Cette notion m'a donné l'idée des vacances de Vanille, à savoir ses voyages de découvertes de cultures sorcières. Donc les trois chapitres (le suivant sera le dernier des vacances (je sais qu'il ne s'y passe pas grand-chose de palpitant)). Ensuite, d'autres idées en ont découlé et... J'ai peur de trop en dire. Mais à partir de cette review, mon histoire a suivi une nouvelle branche, que je n'aurais peut-être pas pensé à exploiter. Alors, Adea, merci. Merci beaucoup. Tu verras, promis, ça va envoyer du pâté. On se retrouve d'ici quelques publications, je te dévoilerai ce que m'a inspiré toute cette histoire.
La semaine prochaine, du Quidditch, des révélations étonnantes, et des guépards! On change d'animaux cette fois.
Merci de votre lecture !
Famille et analogies sportives by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous ! Bonjour et bienvenue à notre réunion hebdomadaire au Club des Créateurs.
Je souhaite vous présenter officiellement un nouveau membre de notre Club, ma bêta-readeuse et amie : Lena !
*'Jour.
Elle m'assistera dans l'avancée de notre histoire. Je lui ai lu tout ce qui est prévu pour la suite et j'ai pu voir dans ses yeux que tout ceci risque de vous plaire.
*En fait tu profites de moi pour vanter ta fanfiction ?
Exactement.
*Alors que je ne suis là que pour corriger tes fautes d'orthographe et t'aider quand tu bloques dans tes tournures de phrases ? En fait tu avais besoin d'un bêta-reader pour avoir le plaisir de montrer à quel point ton imagination est débordante? Parce qu'en vrai -
Et on accueille chaleureusement notre nouvelle membre ! Merci Lena.
Aujourd'hui, c'est la fin des vacances. Il est grand temps que cette péripétie se termine. On voit le bout du tunnel, merci, enfin. On va comprendre à quoi tout cela servait.
Donc, au programme comme prévu, des guépards, du Quidditch, une belle amitié et... une révélation.
Bonne lecture !
On les appela pour leur départ en Portoloin et elles s'agrippèrent à un vase en terre cuite qui les emmena à bonne destination.
Il faisait chaud à Nairobi. Vanille transpira instantanément dans ses vêtements, et fut soulagée de ne rester qu’une seule journée. Oreste et elle durent patienter un moment au Bureau des Voyages, le temps qu’une sorcière Médicomage leur applique quelques sortilèges de prévention : il y avait des maladies magiques puissantes qui sévissaient encore dans cette région du monde. Elle en profita pour donner à Vanille une potion anti-vomitive.
Puis, en sortant du Bureau des Voyages, elles trouvèrent directement leur hôte qui les attendait près d’une voiture noire. Comme ils étaient en plein coeur d’une ville Moldue, ils ne devaient pas se faire remarquer.
Tim Kahindi était imposant. Il dépassait Oreste et Vanille de plusieurs têtes, et ses larges épaules eurent du mal à passer la portière de la voiture. Heureusement, elle avait été agrandie à l’intérieur. Il portait un costume moldu particulièrement classe, avec une cravate violette qui, par coïncidence, ressemblait beaucoup à celle du Club des Créateurs. Il avait le crâne rasé et les sourcils broussailleux, qui lui donnaient un air de bonhomme sage. Des traits creusés autour de ses yeux témoignaient de son habitude à sourire.
Quand ses invitées furent installées dans la voiture, il se présenta à Vanille.
- Tim Kahindi, directeur adjoint de l’école d’Uagadou et Chef de Conseil du Département de Justice Magique. J’occupe les mêmes fonctions qu’un ministre dans votre pays. Vous pouvez m’appeler Tim, dit-il en lui tendant la main.
Vanille se présenta d’une petite voix timide, impressionnée, et serra la main, forte et calleuse, de Tim Kahindi.
- Vanille Ocean, heu… élève de Poudlard.
Tim (elle s’autorisa à l’appeler Tim dans sa tête, puisqu’il le lui avait proposé) rit et s’exclama vers Oreste :
- Eh bien, après vous avoir rencontrée Oreste, je commençais à penser que les demoiselles anglaises étaient difficiles à impressionner. Je vois qu’il s’agissait surtout de vous !
Oreste lança un regard amusé sur Vanille qui était toujours un peu intimidée.
- Ne vous inquiétez pas Tim, quand le choc lui sera passé vous comprendrez pourquoi j’ai proposé qu’elle vienne.
Vanille, un peu gênée de devoir faire ses preuves, regarda le paysage défiler par le fenêtre de la voiture : de longues routes poussiéreuse, de hauts arbres, des maisons de tous genre, de la plus simple à la plus riche. Elle aperçut même des aigles noirs voler dans le ciel immaculé. Le Soleil frappait fort mais il était plus doux qu'elle ne l'aurait imaginé.
La voiture s’arrêta dans un quartier résidentiel. De hauts murs cachaient les maisons et les jardins. Ils sortirent de la voiture qui allait revenir dans la soirée pour ramener Vanille au Bureau des Voyages.
Au moment où ils allaient atteindre un portail bleu qui était certainement celui de la résidence de Tim Kahindi, Vanille vit quelque chose se mouvoir plus loin dans la rue. Quand elle tourna la tête pour voir ce que c’était, elle sursauta et poussa un grand cri : deux guépards trottinaient tranquillement vers eux, l’air de rien.
Oreste sursauta au cri de Vanille et posa sa main sur son épaule pour la rassurer, tandis que Tim se tourna vers les deux fauves.
Ceux-ci se transformèrent alors en deux adolescents, une fille et un garçon, qui avaient l’air amusé d’avoir effrayé Vanille. En revanche, Tim n’avait pas l’air ravi.
- Qu’est-ce qui vous prend ? gronda-t-il. Vous savez que vous ne devez pas vous transformer dans la rue ! Même si c’est un quartier sorcier ! Vous vouliez faire les malins pour impressionner nos invitées anglaises c’est ça ? devina-t-il.
C’étaient certainement les enfants de leur hôte.
- Excusez-vous auprès de Miss Ocean, ordonna-t-il.
Les deux adolescents, qui devaient avoir entre douze et treize ans, se tournèrent vers Vanille, embarrassés. Leur père avait pris une voix particulièrement autoritaire.
- Excusez-nous. Nous savons qu’en Angleterre, il n’y a pas beaucoup d’Animagi, alors nous voulions vous montrer ce que nous avions appris. Nous ne voulions pas vous effrayer.
Ils parlaient d’une voix solennelle comme s’ils récitaient un discours politique, le menton relevé, l’air fier. Mais Vanille vit que leurs yeux brillaient imperceptiblement de larmes qu’ils essayaient de retenir.
- Ce n’est rien, pardonna Vanille tandis que Tim posait sa main sur les épaules de sa fille, comme pour faire comprendre qu’il voulait passer à autre chose.
- Entrons, proposa-t-il.
La maison de Tim Kahindi était spacieuse, ils s’installèrent sur des canapés pour discuter tranquillement.
Il présenta à Oreste et Vanille sa fille, Aurora, douze ans et son fils, Sam, treize ans. Il leur dit que sa femme arriverait plus tard avec leur aîné.
Ils discutèrent un moment des recherches d’Oreste sur la magie sans baguette, et il s’excusa de ne pas pouvoir montrer à Vanille ce qu’il montrerait à Oreste, c’est-à-dire l’école d’Uagadou et le ministère. Ils devaient garder certaines choses secrètes, et seuls certaines personnes, comme Oreste qui travaillait au ministère anglais, étaient autorisées à les découvrir.
Vers midi, ils furent rejoints par la femme de Tim, une très belle sorcière aux traits doux et aux gestes calmes.
- Je vous présente Penelope, ma femme, dit Tim tandis qu’elle s’asseyait sur l'accoudoir de son fauteuil.
Il passa sa main autour de sa taille et elle déposa un baiser sur son front, ce couple-là respirait l’amour.
- Et notre fils aîné, Tim Jr.
Ce dernier avait dix-sept ans et ressemblait beaucoup à son père. Il s’assit entre son frère et sa soeur.
Après quelques minutes de discussion, ils passèrent à table. Vanille goûta aux mets sorciers africains qu’elle trouva particulièrement bons. Puis, après un court silence, Tim posa la question que redoutait un peu Vanille, même si c’était pour ça qu’elle était là :
- Alors Vanille, j’ai cru comprendre que vous vous faisiez des études sur les cultures magiques ?
Vanille déglutit, posa sa fourchette et se lança :
- En effet, j’ai un projet personnel d’étude qui concerne les différents types de magie, et je m’intéresse en ce moment aux cultures sorcières. J’ai déjà rencontré deux amis d’Oreste, du Japon et de Scandinavie, et aujourd’hui grâce à elle j’ai pu vous rencontrer. Je ne vous cache pas que je ne sais pas grand chose - à vrai dire, rien - sur les différences qu’il peut y avoir entre nos cultures magiques. Je ne saurais pas vraiment quelle question vous poser, à part celle-ci : vous qui êtes venu au Royaume-Uni, quelles différences avez-vous pu trouver entre nos façons d’utiliser la magie ?
Tim réfléchit un instant. Vanille vit que les trois enfants étaient également intéressés par la réponse de leur père, ils ne devaient pas connaître l’Europe. En revanche, Vanille s’aperçut que Penelope gardait le visage fermé, penchée sur son assiette, et continuait de manger.
- Eh bien pour commencer, vous avez dû remarquer que Aurora et Sam sont des Animagi. En vérité, Penelope, Tim Jr et moi-même le sommes également. Une vaste majorité des sorciers africains peuvent se transformer en animaux, beaucoup le peuvent dès leur naissance, les autres l’apprennent lors de leur première année d’école. Rare sont ceux qui n’y arrivent pas, et cela témoigne souvent d’une perturbation émotionnelle. Voyez-vous, notre magie est basée sur l’émotion. Contrairement à vous autres, anglais, qui êtes très méthodiques, pointilleux, nous sommes plus à l’écoute de ce que nous ressentons.
Vanille vit un point commun avec les Japonais qui étaient eux aussi très instinctifs.
- C’est en lançant une première fois un sortilège que nous pouvons le comprendre, le ressentir. En essayant de retrouver ces sensations que procurent un sortilège, nous pouvons le relancer encore et encore jusqu’à ce qu’il viennent naturellement, sans formule ni artefact magique. Aussi, nous n’utilisons pas de baguette, et c’est pour cela qu’Oreste est ici aujourd’hui. Vous ne pouvez pas, du moins pas spontanément lancer de sort sans baguette parce que vous n’apprenez pas à ressentir la magie. La baguette vous coupe des sortilèges que vous invoquez, qui ne sont plus que des formules. Nous apprenons dès notre plus jeune âge à manipuler la magie de nos mains.
Pour appuyer son exemple, il fit tourner sa main d’un geste particulièrement élégant au-dessus de la table et, sans qu’il n’ait prononcé un mot, une bouteille d’eau apparut, se vida dans la verre de Vanille, puis disparu. Vanille était émerveillée et elle sentit l’excitation d’Oreste à côté d’elle.
- En apprenant à ressentir notre magie, nous pouvons graduellement ressentir celles des autres. Les sorciers africains sont particulièrement liés entre eux. Je comprends mes enfants et ils me comprennent, mais un lien plus fort que la simple parenté nous lie. Je les ai éduqués, je leur ai appris à ressentir la magie et elle a grandit en eux alors que j’étais à leurs côtés, et aujourd’hui, plus qu’hier et moins que demain, je les comprends. Nous, et tous les autres sorciers d’Afrique, avons un lien fort grâce à la magie. C’est cela, je pense, qui nous rend si empathiques entre nous, nous sommes coordonnés et il y a rarement de malentendus entre nous.
- Quel lien cela a-t-il avec votre facilité à devenir des Animagi ?
- Je suppose que nous pouvons facilement nous projeter dans ce que ressent l’animal qui nous représente, nous pouvons facilement créer ce lien avec lui et cela nous permet de nous transformer facilement.
Vanille sortit son carnet de son sac et nota en vitesse ce qu’elle avait appris.
Ils finirent le repas en évoquant quelques anecdotes sur la magie sans baguette et la transformation des enfants de Tim en Animagi - ils étaient tous les trois des guépards, lui était un éléphant et sa femme un zèbre. Ensuite, ils passèrent dans un plus petit salon, plus discret. Les enfants les laissèrent et Tim servit un thé masala à ses invitées et à sa femme.
- Merci pour ce repas, c’était délicieux. Et merci pour tout ce que vous m’avez appris, Mr Kahindi. Tim, ajouta Vanille quand il lui lança un faux regard de reproche.
- Je vous en prie.
Il bu une gorgée de thé et sembla hésiter un instant.
- J’ai moi aussi une question, et je profite que vous soyez là, Vanille, pour vous la poser à toutes les deux.
Oreste, qui jusque là n’avait pas beaucoup participé à la conversation pour laisser son amie au centre de cette journée, s’avança sur son fauteuil, intéressée.
- Vous m’avez toutes les deux fait comprendre que vous faisiez des recherches en magie, vous Vanille sur les différentes cultures, et vous Oreste sur la magie sans baguette. Mais ces recherches, surtout les vôtres Oreste, sont très pointues. Et il ne me semblait pas qu’à Poudlard, vous ayez des projets personnels aussi poussés.
Les deux filles échangèrent un regard, étonné qu’il sache comment se déroule l’éducation à Poudlard.
- Voyez-vous, je me demande si vous ne feriez pas, par hasard, partie d’un club spécial dans votre école qui vous permettrait de faire vos propres recherches sur la magie, vos propres… créations.
Il insista sur le dernier mot et Vanille comprit qu’il connaissait le Club des Créateurs.
- Ainsi vous connaissez les Créateurs, Mr Kahindi, lança Oreste, curieuse. Comment cela se fait-il ? Nous n’avons pas de lien avec Uagadou.
Tim eu un sourire satisfait, comme s’il avait eu peur qu’elles nient le fait.
- En effet et c’est bien dommage. Je connais la réputation de ce fameux Club des Créateurs, son influence, ses possibilités. Si je puis me permettre, j’aimerais faire la demande officielle à votre Club de considérer l’entrée d’Uagadou parmi les écoles présentes. Je crois savoir qu’aucune nouvelle école ne l’a intégré après sa formation. Nous aurions beaucoup à apprendre de votre Club et vous auriez aussi beaucoup à apprendre de nous. Bien que cela reste limité à quelques élèves, cela pourrait créer des liens entre nos écoles. Il est grand temps qu’Uagadou se fasse connaître.
Oreste se tourna vers Vanille :
- Je viens de finir ma septième année, je ne fais donc plus partie du Club en tant qu’active. En revanche, Vanille entre en sixième année. C’est donc à elle que vous devriez en particulier faire votre demande. Elle est en très bon termes avec la personne qui sera certainement le prochain président.
Vanille surprit le clin d’oeil d’Oreste et remarqua qu’elle n’utilisait pas les termes Jeune Créateur ou Maître Créateur, mais actif et président. Tim ne l’avait pas relevé, et elle comprit la manoeuvre d’Oreste, qui voulait observer ses réactions pour savoir s’il était un ancien membre du Club, peut-être d’une autre école qu’Uagadou. Et apparemment non. Vanille se tourna vers Tim et réfléchit un instant, l’idée ne lui déplaisait personnellement pas, mais ce n’était pas à elle d’en décider. Puis elle se dit que cela ne coûtait rien d’en parler à Alexandre :
- Mais vous n’avez pas répondu à ma question, coupa Oreste avant que Vanille n’ait pu parler (elle resta une seconde la bouche ouverte). Comment connaissez-vous notre Club ? Vous n’en faites de toute évidence pas partie.
- Eh bien voyez-vous, commença Tim en se penchant en avant, mon aîné est…
Sans prévenir, coupant Tim au milieu de sa phrase, sa femme Penelope se leva et parti en claquant ses talons sur le sol, et referma brutalement la porte. Choquées de cette interruption, Oreste et Vanille ne surent quoi dire. Tim soupira.
- Pardonnez ma femme. c’est un sujet sensible. Mon fil aîné habite au Royaume-Uni, chez sa mère. Je l’ai envoyé là-bas pour qu’il fasse ses études à Poudlard. Sa mère faisait partie du Club des Créateurs, et il me semble que lui aussi, bien qu’il ne m’en ait jamais parlé. Ce que je comprends, il s’agit d’un Club secret.
Intéressée, Oreste demanda :
- Quand a-t-il fini ses études ? Peut-être le connaissons-nous ?
- A vrai dire il n’a pas encore quitté l’école. Nous le connaissez certainement, il s’appelle Alexandre.
Vanille bugua un instant, les yeux écarquillés. Tim Kahindi était… le père d’Alexandre ? Oreste se tourna vivement vers elle, mais Vanille ne savait pas quoi dire. Elle comprit alors certaines choses qu’Alexandre lui avait dites, ou fait comprendre, que son père était un homme important, qu’il n’était pas originaire de Grande-Bretagne, qu’il était l’aîné de sa famille…
Oreste prit les devants :
- Oui, il est avec nous au Club. Il entre en septième année, et il va…
Elle hésita, soucieuse de ne pas en dire trop : si Alexandre n’avait rien dit à son propre père, ce n’était pas à elle de le faire. Malheureusement le mal était fait et elle en avait trop dit, ou pas assez. Tim la regardait l’air avide, presque désespéré. Vanille comprit que Tim et son fils ne devaient pas être en très bon termes, bien que Tim ait l’air de l’aimer sincèrement.
Oreste décida de finir sa phrase, un peu à contre-coeur, car elle réalisait qu’elle trahissait peut-être un peu son ami en parlant ainsi à son père.
- Il va certainement être président du Club dès la rentrée prochaine.
Tim garda le silence. Lui aussi avait comprit l’hésitation d’Oreste, et il n’insista pas pour avoir plus de détails. Son visage exprimait la gratitude et la satisfaction de cette nouvelle.
Tous les trois comprirent qu’ils ne pourraient plus parler d’Alexandre.
Tim se leva et prétexta devoir aller parler à sa femme, il laissa Vanille et Oreste seules avec leurs thés.
- Je n’en reviens pas que Tim soit le père d’Alexandre, murmura Vanille. Comment est-ce possible ? Pourquoi est-il venu à Poudlard ?
- Il ne t’en a jamais parlé ?
- Non. J’avais seulement compris qu’il n’était pas originaire de Grande-Bretagne, bien qu’il ne me l’ai pas dit directement.
Oreste fronça les sourcils :
- Le sujet doit être difficile pour lui. Quand tu lui en parleras, fait attention à ne pas le blesser. Il a dû se passer quelque chose pour qu’il ne porte même pas le nom de son père.
- Je pense deviner les grandes lignes. Ses deux fils ont le même âge, mais pas la même mère…
Les deux filles restèrent un moment silencieuses, buvant lentement. Tim revint quelques minutes plus tard, s’excusa et ils repartirent dans des sujets moins personnels.
Le reste de l’après-midi se déroula avec un fond de tension presque indétectable, en particulier lorsque Penelope était présente. Les trois enfants en revanche égayaient les conversations, posant toutes sortes de questions à Vanille et Oreste sur la vie à Poudlard. Oreste, amusée, leur fit une démonstration de magie avec sa baguette, et les deux plus jeunes applaudirent. Tim les autorisa à lancer quelques sortilèges avec leurs mains ; en effet, les jeunes sorciers de Uagadou qui étaient encore élèves et mineurs avaient le droit de pratiquer la magie uniquement quand un parent les autorisait explicitement. Vanille s’amusa sincèrement de la facilité avec laquelle ils lancèrent des sortilèges - simples, certes, mais parfaitement exécutés. Le travail de plusieurs années d’Oreste devenait presque inutile quand on voyait ces adolescents excités transformer avec leurs seules mains leurs chaises en pots de fleurs - les deux enfants lancèrent exactement le même sortilège et obtinrent le même résultats, synchrones, et c’était impressionnant à voir car ils ne semblaient pas s’être concertés. Vanille regarda son amie en coin pour voir comment elle prenait la situation, mais elle semblait se réjouir sincèrement.
- Nous n’avons pas la même façon d’apprendre la magie à Poudlard, et le fait d’avoir réussi à recréer la magie sans baguette de moi-même reste un exploit, même en voyant ces deux jeunes prodiges (elle leur fit un clin d’oeil) bien meilleurs que moi en la matière, lui expliqua-t-elle quand Vanille lui posa la question.
- D’après ce que vous m’avez fait parvenir comme documents, Oreste, vous avez compris l’essence même de notre magie, les émotions, confirma Tim. A ce propos, je sais que nous avons tout le temps pour cela mais pensez-vous pouvoir tenter de lancer un sort sans votre baguette ?
- Maintenant ? Je ne sais pas si j’y arriverais, hésita Oreste.
Elle regarda Vanille et son regard s’attarda sur son crâne. Vanille, par réflexe, passa sa main dans ses cheveux, qui avaient un peu repoussés depuis plus d’un mois mais restaient bien trop courts pour lui aller. Elle savait qu’elle allait devoir attendre qu’ils repoussent naturellement, car les ciseaux d’Annabelle, enchantés pour réaliser exactement la coupe désirée, empêchaient tout sortilège de repousse. Et Vanille détestait avoir les cheveux courts, elle ressemblait à un petit garçon sauvage.
Oreste du sentir l’amertume de Vanille en cet instant et elle posa ses mains sur les côtés de sa tête, Vanille, étonnée, ne bougea pas d’un cil. Oreste murmura un sort presque inaudible et glissa sa main dans les cheveux de Vanille, qui se doutait de ce qu’elle essayait de faire. Vanille sentit un frisson sur ses épaules nues, mais en voyant le regard satisfait de d’Oreste, elle comprit que ce n’en était pas un : ses cheveux avaient repoussé et lui caressaient maintenant les omoplates.
Oreste lâcha Vanille qui se leva et se dirigea vers la porte en verre d’une armoire : elle avait retrouvé sa chevelure. Mieux, sa tignasse était plus longue qu’avant et plus soyeuse. Elle qui n’avait jamais pris grand soin de son apparence, elle était néanmoins plus que satisfaite du résultat.
- Merci ! dit-elle en se rasseyant. Mais comment as-tu fait ? L’enchantement des ciseaux d’Annabelle auraient dû bloquer ton sort, non ?
- Peut-être bloquaient-ils uniquement les baguettes. Et la prochaine fois, Miss Ocean, dit-elle l’air faussement sévère, réfléchissez un peu avant de boire !
Vanille rit et se tassa sur son fauteuil, un peu honteuse que Tim et sa famille soient au courant de la vérité sur ses cheveux.
- Oui maman.
Le sort d’Oreste était parfait, elle maîtrisait de mieux en mieux la magie sans baguette.
Il était temps pour Vanille de repartir. Le chauffeur de Tim arriva et lui et Oreste la raccompagnèrent jusqu’au Bureau des Voyages de Nairobi.
Vanille remercia chaleureusement Oreste de l’avoir amenée ici, et Tim pour son accueil, ses explications et cette journée en général. Avant qu’elle ne reparte, Tim voulu lui parler un moment en privé. Ils s’éloignèrent d’Oreste qui garda un oeil sur eux, protectrice.
- J’ai vu que vous aviez l’air gênée lorsque je vous ai parlé de mon fils.
Vanille sursauta, un peu craintive.
- Ce qui se passe entre vous ne me regarde pas. J’espère que malgré tout vous accepterez de considérer ma demande, et que vous lui en parlerez. Mais j’aimerais tout de même vous prévenir, lui et moi ne sommes pas vraiment en très bon termes. Il n’acceptera peut-être pas ma demande sous prétexte qu’il s’agit de moi. Et cela serait dommage car au fond, ce n’est pas moi que cela concerne mais les élèves d’Uagadou, et tous les membres de votre Club.
- Je comprends, Mr Kahindi. Je ferai de mon mieux.
Il lui sourit et ne la reprit pas. Elle semblait bien trop intimidée pour l’appeler par son prénom, et Vanille su qu’il avait tout compris. Après tout, elle était une Occlumens à l’envers. Tim Kahindi savait que son fils et elle étaient bien plus proches que le “en très bon termes” qu’avait évoqué Oreste.
Vanille et Oreste se promirent de rester en contact, et elle se précipita pour prendre son Portoloin, encore une fois, elle était presque en retard.
Vers la fin du mois d’août, Vanille reçu une lettre d’Ambre, qui lui proposait de passer la voir avec Leanne. Soulagée qu’elles soient enfin disponibles, elle leur ordonna presque de venir passer la find des vacances chez elle.
Ses amies lui avaient manqué.
Elle débarquèrent par cheminée le lendemain matin, avec d’énormes sacs.
- Alors, qui a gagné ? demanda Vanille sans préambule.
- Les Allemands. Ils étaient vraiments bons cette année, tous leurs joueurs sans exception étaient exceptionnels. Les Anglais n’auraient pas pu faire le poids contre eux, ils ont été éliminés en demi-finale.
Leanne sorti de son sac des écharpes et drapeaux de différents pays : elle et Ambre avaient assisté à la coupe du monde de Quidditch tout l’été.
Vanille n’était pas fan de Quidditch, et même de sport en général. Quand ses amies lui avaient proposé ce projet de suivre tous les matchs pendant l’été, elle avait été tentée mais avait refusé. Regarder le sport l’ennuyait bien plus que de lire des livres sur les potagers. A vrai dire, elle s’endormait quand elle assistait à un match de l’école.
- Alors comme ça, tu as voyagé cet été ? lança Leanne.
Vanille n’avait pas voulu les déranger pendant leur périple et leur avait avoué ce qu’elle avait fait dans sa dernière lettre.
Elle leur raconta comment l’idée d’étudier les cultures magiques lui était venue, et comment Oreste l’avait aidée. Elle leur parla de Mai, rencontrée sur le Chemin de Traverse, de Peter, Piotr et Helga qu’elle était allée voir dans le grand nord sans même savoir précisément où, et du Kenya où elle avait accompagnée Oreste pour rencontrer Tim Kahindi. Un peu honteuse, elle ne leur avoua qu’à demi-mots comment elle avait fuit le nord, et respectant la vie privée d’Alexandre, ne leur parla pas du fait qu’elle avait rencontré son père.
- Et qu’as-tu appris sur leur culture ? demanda Ambre.
Elle leur exposa les grandes lignes : les Japonais et leur spontanéité, les slaves et leur côté “rentre-dedans tête la première”, et les Africains et leurs émotions, leurs liens indéchiffrables.
Ambre sembla très intéressée par ce que racontait Vanille. Quand elle eut fini, elle sortit quelques clichés de son sac des matchs qu’elle et Leanne avaient vus.
- Regarde, là, c’est l’équipe Japonaise. Ils ont été impressionnants cette année, difficiles à battre, parce qu’on n’arrive pas à deviner leurs actions. A chaque fois qu’on - je parle de l’équipe de Grande-Bretagne - essayait de contrer leurs techniques, ils partaient directement sur une nouvelle. Nos poursuiveurs n’arrivaient pas à anticiper quoi que ce soit. Un de leurs poursuiveur était le leader et improvisait, feintait pour revenir sur la première technique, il réagissait très vite face aux difficultés et les deux autres poursuiveurs le suivaient directement. Heureusement, notre gardienne est un véritable prodige, c’est grâce à elle qu’on a pu les battre, malgré leurs efforts les poursuiveurs n’arrivaient pas à récupérer le souaffle bien longtemps. Les joueurs étaient épuisés à la fin, ils ont demandé régulièrement des pauses pour pouvoir modifier leurs tactiques. C’était un match éprouvant.
Elle passa au cliché suivant, représentant une équipe africaine qui faisait le tour du stade :
- Là, ce sont les Tanzaniens. Leur jeu est magnifique à voir, c’est face à eux qu’on a perdu, et personne n’était réellement déçu. Ils sont tous tellement synchrones. Même à plus de vingt mètres de distance, en plein vol, les poursuiveurs changeaient de cap en même temps. Au début, on pensait qu’ils avaient une technique particulièrement bien rodée, mais notre équipe a sorti plusieurs nouvelles stratégies inédites pendant le match, il paraît qu’ils réservaient ces bottes secrètes pour la finale mais ils ont eu peur de ne pas l’atteindre, alors ils les ont tentées là. Mais ça n’a pas fonctionné, parce que les Tanzaniens, même pris au dépourvu, agissaient en équipe. C’était comme si une seule personne les contrôlait tous, comme si … ils partageaient le même esprit, la même âme, le temps du match. Il paraît même qu’à leur match précédent, ils ont été accusés de tricherie, d’utiliser des techniques de communication ultra-sophistiquées. Mais rien n’a pu être prouvé.
Elle montra un troisième cliché, des mastodontes montés sur balais apparaissaient dans un stade en liesse :
- C’est une photo du début du match Norvège - Royaume-Uni. Les joueurs de Quidditch norvégiens sont particulièrement forts et grands. Ils ont des balais spéciaux qui leur permet de pouvoir accélérer facilement malgré leur poids. Ils sont assez brutaux. La plupart du temps, quand un poursuiveur a le souaffle, c’est fichu pour l’équipe adverse, parce qu’il est difficile de le lui faire lâcher. On pourrait croire au premier abord que leur stratégie principale c’est de foncer le plus vite possible vers les buts - et c’est le cas, au début des matchs. Mais en vérité, ils jouent sur cet aspect, et quand ils feintent, les adversaires sont toujours pris au dépourvu. Ils ont une confiance en eux énorme, et grâce à ça ils tente souvent des coups que personne n’oserait. Ca marche une fois sur deux, ce qui est quand même pas mal, car comme ils sont très endurants, ils rebondissent très vite quand ils échouent. Et ils sont particulièrement fair-play : un de leur joueur a fait tomber un des nôtres de son balai, ça avait l’air involontaire mais il a avoué directement qu’il avait eu un mauvais réflexe et est sorti dix minutes du terrain de lui-même. Quand ils ont perdu, ils ont remercié chacun des membre de notre équipe pour ce match intense, et le lendemain il y a eu des clichés des deux équipes fêtant leur match ensemble dans la Gazette.
Vanille fut stupéfaite de voir à quel point les témoignages qu’elle avait reçu concordaient avec leur façon de jouer au Quidditch. C’était impressionnant.
- Et les Anglais ? Qu’est-ce que nos joueurs montrent de notre culture ?
Ambre réfléchit un instant, mais ce fut Leanne qui répondit :
- Nous sommes sérieux, les méticuleux. On apprend de façon carrée : pour lancer un sort, on a le geste, l’incantation, l’intonation, la pensée, tout est millimétré et contrôlé. Nos joueurs sont pareils : ils ont des techniques, des bottes secrètes qu’ils connaissent sur le bout des doigts et se sont certainement entraînés en imaginant tout ce que leurs adversaires pouvaient faire. Et puis ils sont fourbes, un peu vicieux : ils étudient toujours les tactiques courantes des adversaires pour les contrer. Ils adaptent leur jeu en fonction de l’équipe adverse mais seulement s’ils la connaissent, et ils sont un peu perdus face à l’improvisation, c’est pour ça que le jeu contre les Japonais était si difficile. Mais en même temps, ça paye d’être aussi rigoureux, leur technique est impeccable, sans bavure. Quand ils tombent sur des adversaires assez prévisibles, ils sont très beaux à voir - et je ne dis pas ça parce que c’est mon équipe - c’est comme assister à une danse, à un combat chorégraphié.
Vanille prit note de toutes ces informations.
Elle ne savait toujours pas où allaient l’emmener toutes ces connaissances, mais était ravie d’apprendre toutes ces choses. Peut-être nulle part, au fond, juste au plaisir de découvrir.
Mais dès la rentrée, elle le savait, elle se mettrait au travail de manière plus intense. Peut-être plus anglaise, au fond. Avec des livres bien carrés, bien propres, des potions rigoureusement préparées et des sortilèges avec baguette et incantation.
End Notes:
C'est ainsi que se finissent les vacances !
J'espère que vous avez aprécié ma vision des différentes cultures magiques. J'ai trouvé beaucoup d'informations sur internet bien sûr, mais j'ai aussi énormément extrapolé. Normalement, rien de devrait contredire ni le canon ni les informations officielles.
*Je peux dire un mot ?
Bah oui.
*Je voulais dire que je suis honorée d'être ta bêta-readeuse, même si en vrai je sais très bien que tu avais plus besoin de soutien et de compagnie dans ton aventure que d'aide.
Et en vrai même si toute la trame est trouvée, tu pourras mettre ton grain de sel par-ci par-là.
*Tu me laisses le mot de la fin ?
Avec plaisir !
*Merci à tous d'avoir lu, et pour toutes vos reviews adorables qui, à chaque fois, font sautiller de joie l'auteur. J'en témoigne. Elle est chiante.
*La semaine prochaine, on commence la sixième année de Vanille. On passe donc... (est-ce que vous suivez au fond ?) au plat principal, bien ! Moins d'exposition, moins de présentation. Plus de recherches, plus de relations, et puis plus d'emm**des.
Tu ne peux pas dire emm**de. Je censure les gros mots.
*Et donc (oui je t'ignore) plus d'aventures et de rebondissements ! Au programme du prochain chapitre : des rails, de la fumée et des compartiments : on va prendre le train !
*Des bisous !
Les voyages en train by Deanna
Author's Notes:
*Lena arrache le micro-plume des mains de Deanna*
Booooonsoiiiiir Ladies and Gentlemeeeen !
*Deanna agite frénétiquement les mains de haut en bas et essaie de récupérer le micro-plume des mains de Lena*
Chhhht, débile ! C’est pas un show n’de’diou.
Quoi ? Tu me passes la main et après tu regrettes ? Tss tss, laisse donc ta bêta-readeuse gérer ça, veux-tu ? Tu peux, s'il te plaît, te décaler, un peu ? Encore ? Encore un peu ? Non encore, je te vois là. Plus loin. Passe derrière le rideau pour voir ? Encore un poil et… Là ! Parfait. Bouge plus !
*voix au loin* Mais c’est mon texte quand même !
*Lena se racle la gorge et reprend le micro-plume*
Je disais donc, bienvenue ! A toi, spectateur invétéré et lecteur insatiable, au Club des Créateurs !
Tu es accroché comme une moule à son rocher aux histoires de Vanille depuis son tout premier banquet ? Parfait ! Retrouve ici Vanille, à deux doigts de sa rentrée poudlardienne, renouer avec ses amis qui, avouons-le, nous ont tous manqué ! Ambre, Leanne, *prend une voix sensuelle* Nathan et Alexandre *clin d’oeil* ils sont tous là, et ils t’attendent pour continueeer l’aventuuuuure au Cluuub des Créateuuuuuurs !
*levé de rideau*
*face palm de Deanna*
Quoi ? A l’américaine, baby ! Bonne lecture !
Vanille prit une profonde respiration. Debout sur le quai de la gare de King’s Cross, voie 9 ¾, sa malle dans une main et un sac dans l’autre, elle fixait le train qui crachait sa fumée. Tout allait bien : elle avait toutes ses affaires, il restait plus d’une demi-heure avant le départ, elle entrait en sixième année, comme le prouvaient sa liste de BUSEs impressionnante. Des Optimals presque partout. Un Effort Exceptionnel en Astronomie, un Acceptable en Créatures Magiques. Elle rit jaune à cette pensée : elle qui souhaitait pousser ses recherches vers les Créatures Magiques.
Oui, tout allait bien, ses amies allaient arriver d’une minute à l’autre, sa mère était près d’elle et portait la cage de sa chouette, son frère lui avait envoyé une lettre débordante d’amour pour sa rentrée.
Alors pourquoi était-elle stressée ? Son estomac se tordait, une boule s’était formée dans sa gorge. Elle prit une nouvelle respiration forcée : tout allait bien.
Elle força ses jambes à avancer dans la foule d’élèves qui commençait à grandir. Même lors de sa première rentrée, elle ne s’était pas sentie autant en panique. Son regard fouillait partout, sans raison. Elle se fit aider d’un contrôleur qui monta ses affaires dans le train et se tourna vers sa mère qui lui offrit un grand sourire un peu forcé.
- Passe une bonne année ma chérie. On se revoit à Noël.
- Tu pars maintenant ? s’étonna Vanille.
La nouvelle l’inquiéta un peu sans qu’elle ne sache vraiment pourquoi.
- Oui, je dois… J’ai promis à Steven que je le rejoindrai.
Vanille haussa les épaules : sa mère tenait à cette relation. Pour elle, ses enfants seraient toujours là, ils l’aimeraient toujours. Mais un homme pouvait glisser entre ses doigts, malgré toute la volonté et l’amour qu’elle pouvait donner à son couple. Vanille ne lui en voulait pas. Elle se savait coupable du premier échec amoureux de sa mère, du divorce de ses parents. Parce qu’elle était partie loin d’eux pour être une sorcière. Alors elle n’avait rien à dire.
- Mais tu es grande maintenant ! Tu as seize ans, tu vas à Poudlard, et partout dans le monde toute seul ! Je ne m’inquiète plus pour toi.
“Qui le fera alors ?”
Sa mère lui déposa un bécot sur la joue.
- Je… A bientôt ma chérie. N’oublie pas de m’écrire !
Elle lui fit un signe enjoué de la main avant de s’éloigner. Vanille la regarda accélérer progressivement.
“Oh, Vanille, je vois que quelque chose te tracasse, tu veux en parler avant que je ne m’enfuie voir mon copain?”
“Merci maman de remarquer ce genre de chose. En effet, j’ai envie de pleurer, et je ne sais pas pourquoi.”
Un peu amère, Vanille prit une nouvelle profonde respiration et se retourna vers le train. Elle croisa le regard de quelques-unes de ses connaissances, leur offrit quelques sourires. De nouveau, son regard fouilla dans la foule.
Et, éloigné de plusieurs wagons, elle aperçut ce qu’elle cherchait sans s’en rendre compte, un garçon à la peau sombre, aux yeux froids et aux traits fins. Sans réfléchir, elle baissa la tête et fonça vers le train, sauta dedans et chercha le compartiment où étaient rangées ses affaires. Ses gestes étaient un peu frénétiques, saccadés.
“Qu’est-ce qu’il me prend ? Pourquoi j’agis comme ça ?”
“Arrête deux secondes de te mentir, tu veux ? Tu fuies Alexandre parce que tu as peur de le revoir.”
Vanille s’arrêta, en réalisant enfin. Elle était stressée de revoir Alexandre. C’était aussi bête que ça.
“C’est ridicule. Tu avais moins peur pour tes BUSEs. Il ne t’arrivera rien de mal. C’est juste un garçon.”
Elle prit une nouvelle respiration pour calmer son coeur et essayer de faire redescendre le sang qui lui était monté aux joues.
Elle aperçut ses affaires dans un compartiment où étaient assis des élèves qu’elle connaissait bien : Annabelle, Octave et Olivier. Elle s’installa avec eux. Ils furent rejoints par Ambre, qui avait récupéré un chat abandonné, une boule de poils noirs avec le bout des oreilles blanches. Il sautait de genoux en genoux pour faire connaissance de tout le monde. Au moment où le sifflet de départ retentit, Leanne ouvrit grand la porte du compartiment, essoufflée d’avoir couru.
Ils étaient enfin réunis. Dans ce compartiment, il y avait les personnes auxquelles Vanille tenait le plus.
Leanne, sa première amie sorcière, avait fait partie du Club des Créateurs mais avait décidé de s’en détourner. Fille de bonne famille, elle faisait tout pour plaire à ses parents, qui de leur côté ne lui demandaient pas d’être quelqu’un d’autre qu’elle-même. Enjouée, malicieuse, Leanne ne brillait pas par son physique, disons-le, assez ingrat, mais par son naturel heureux et loquace.
Ambre, son autre meilleure amie, n’était elle pas bien bavarde. Avec sa coupe au carré, sa frange droite et ses yeux dorés, elle aimait observer les personnes autour d’elle et lancer, parfois, des remarques qui faisaient mouche. Depuis qu’elle était au Club des Créateurs, elle avait également rejoint le Club de Duels et avait travaillé sa répartie, aussi bien magique que verbale. Elle savait voir les gens, de ses yeux dorés, et les entendre. Les entendre vraiment.
Octave et Olivier étaient le duo inséparable du groupe. Ils étaient le cliché des farceurs. Ils se moquaient, riaient, prenaient tout à la légère. Ils ne se confiaient à personne d’autre qu’à eux-même, et même si, depuis quelques années maintenant, ils formaient un “groupe” avec Vanille, Leanne et Ambre, aucune d’entre elles ne connaissaient leur vie, leurs secrets, leurs passions et leur projets.
Annabelle était la seule du compartiment à ne pas appartenir à Serdaigle. C’était une courageuse dans l’âme, une combattante de la vie, une Gryffondor. Elle était objectivement et indéniablement mignonne ; petite, le visage rond, les cheveux courts et noirs, un petit nez qui remonte et la silhouette grâcieuse. Sa voix était douce, comme une chanson. Au premier abord assez sensible, c’était pourtant une lionne qui sommeillait en elle, qui ne demandait qu’à être testée.
Vanille était liée à chacun d’entre eux par un pacte magique. Le Club des Créateurs avait fait d’eux une famille, même Leanne qui n’en avait pas souvenir. Bien sûr, il y avait d’autres membres dans cette famille, et Vanille les soutenait et les appréciait tous. Mais il y avait là ceux avec qui elle se sentait le mieux.
Même avec Nathan.
Elle sursauta en remarquant sa présence : assis près de la porte d’entrée, juste à côté d’Ambre qui lui tournait involontairement le dos, il lisait la Gazette. Ou plutôt, il tenait son journal à hauteur des yeux et regardait Vanille, assise de l’autre côté du compartiment.
Vanille remarqua alors que plus personne ne lui parlait, à elle, ne cherchait à l’inclure dans la conversation. Nathan lui fit un faible sourire, comme une excuse, ou une demande.
C’était un garçon particulier. Très particulier. Il possédait des pouvoirs étranges qui avaient effrayé Vanille, avant qu’elle n’en comprenne le fardeau. Il pouvait, entre autre, se faire ignorer complètement des personnes qui l’entouraient. Pour être tranquille, selon ses dires. Depuis le départ du train, personne ne l’avait remarqué. Puis, il s’était fait voir de Vanille, et maintenant, il faisait en sorte que les autres ignorent Vanille. C’était sa façon de lui faire comprendre qu’il aimerait discuter avec elle. Il avait aussi la capacité de comprendre les autres. Pas comme Ambre, pas seulement de comprendre ce qu’ils disaient, mais de comprendre leurs sentiments, ou leurs ressentiments. De sentir le mensonge. De connaître le potentiel des gens. Il savait des choses, beaucoup plus de choses que ce qu’une personne normale pouvait deviner. Parfois, des choses qui n’étaient pas encore arrivées.
Vanille se leva dans l’idée de s’asseoir à côté de lui, puisqu’il semblait le lui proposer, mais elle attira l’attention des autres (le pouvoir de Nathan avait ses limites) qui lui demandèrent où elle se rendait. Elle hésita, regarda Nathan qui haussa les épaules, puis prétexta vouloir vérifier quelque chose dans son sac, qui, comme pour l’aider dans son mensonge, était placé au-dessus de lui. Elle prit donc ledit sac et s’assit à la place d’Ambre, qui comme les autres recommença à l’ignorer. Son bras toucha celui de Nathan.
“Tu n’as toujours pas envie de te faire remarquer ?”
“Non, pas aujourd’hui. Mais ça viendra. Il le faudra, bientôt.”
C’était une autre capacité de Nathan : par contact physique, il arrivait à communiquer avec son esprit.
Il y a plusieurs mois, sa remarque aurait frustré Vanille. Aujourd’hui, elle savait qu’il n’éludait pas ses propos, il ignorait tout simplement comment il savait... ce qu’il savait.
“Comment cela se fait qu’ils m’aient vue me lever ? Je croyais que tu nous avais isolés.”
“Quand tu bouges, c’est plus difficile. Surtout qu’ils sont proches. Mais comme ils parlent entre eux, ça simplifie les choses. S’il n’y avait qu’une seule personne avec nous, aussi proche, je n’arriverais pas à t’englober.”
“Tu maîtrises bien ton truc.”
“Tu ne m’en veux pas ?”
“J’ai arrêté de t’en vouloir pour rien. Et tu as le droit de vouloir être seul.”
“Je ne suis pas seul.”
Ils restèrent un instant sans rien dire. Ou plutôt, sans rien penser. Vanille commençait à comprendre comment “envoyer” ses pensées vers lui, et à ne pas lui envoyer de flot continu de réflexions inutiles.
“Tu as passé de bonnes vacances ?”
“Oui, j’ai…” commença Vanille. Elle repensa à ses rencontres, à Oreste, Mai et Peter, puis à Tim, sa femme, et à son fils, Alexandre, qu’elle n’avait pas encore revu et dont la seule pensée lui donnait à la fois des frissons et une boule au ventre.
Elle décolla d’un coup son bras en se rendant compte qu’elle avait laissé toutes ses réflexions couler vers Nathan. Elle aurait préféré choisir des morceaux précis, plutôt que de tout dire. Surtout sur Alexandre, dont elle aurait préféré taire le secret de famille.
Nathan ne se rendit à l’évidence pas compte de la gêne de Vanille, et arbora une mine étrangement mécontente. Il releva son journal à hauteur des yeux.
“Qu’est-ce qu’il y a ?”
Il ne la regarda pas, et Vanille se leva pour reposer son sac à sa place. Puis elle se tourna vers ses amis, et essaya de prendre la conversation en route :
- J’ai eu des Optimals seulement en potion et en sortilèges, vous vous rendez compte, j’aurai pu être viré du Club ! s’écriait Olivier.
Vanille s’apprêta à lui répondre qu’il y avait certainement des dérogations - peut-être le règlement du Club était-il seulement là pour rappeler aux membres d’être avant tout des élèves de Poudlard.
“Hé! Mais…”
Elle se retourna vers Nathan et lui agrippa le bras :
“Pourquoi tu as fait ça ?”
“Laisse-moi s’il te plaît.”
“Tu es contrarié ? A cause de quoi ?”
“S’il te plaît, Vanille.”
“Tu finiras bien par me le dire.”
Elle lâcha l’affaire et son bras. Cette fois, elle repartit volontairement vers les autres, sans que Nathan n’use de son pouvoir pour qu’elle l’ignore.
Les conversations tournèrent beaucoup, évidemment, autour du Club. Vanille participait, mais de temps en temps se tournait vers Nathan qui, étrangement, ne s’était pas fermé magiquement à elle. Olivier et Octave avouèrent avoir un projet secret pour le Club mais ne voulurent pas en parler avant de commencer leurs recherches, et d’avoir leurs autorisations. Ambre faisait attention de toujours laisser une place à Leanne dans les conversations, car même si elle était au courant de tout, elle n’était plus membre du Club, et respectait son moi d’avant et sa décision de l’avoir quitté. Elle n’en éprouvait aucune jalousie, prétextant avoir déjà assez eu de mal comme ça à avoir ses BUSEs pour ne pas rajouter un club chronophage. Malgré tout, tout le monde la considérait comme une des leurs.
Le chariot de friandises passa et fut complètement dévalisé. Plumes en sucre, dragées surprises et Fizwizbiz encombrèrent les genoux et les poches, et dans les mains s’échangèrent les cartes de Chocogrenouilles : Harry Potter, Hermions Granger et Ron Weasley étaient bien évidemment les plus prisés, mais il y avait également Kingsley Shackelbolt, le ministre de la magie, qui avait participé à la bataille de Poudlard et avait fait partie du désormais fameux Ordre du Phoenix lors de la lutte contre Voldemort, et, contre toute attente, Severus Rogue, dont Harry Potter avait clamé l’innocence et rendu les lettres de noblesses en racontant une histoire - rocambolesque mais approuvée officiellement - d’agent triple et de meurtre par compassion. Il se racontait que Harry Potter avait presque menacé le directeur des Chocogrenouilles pour que le mal-aimé ancien directeur apparaisse au même titre que lui sur ces cartes, mais Vanille en doutait, Elle n’imaginait pas Harry Potter menacer qui que ce soit.
Elle secoua la tête : “De quel droit je crois connaître Harry Potter moi.”
Au milieu du vacarme classique des échanges de cartes, la porte du compartiment s’ouvrit, sans se faire remarquer. Du moins pas par Vanille.
- Salut Alexandre ! s’écria Octave.
Vanille se figea et se sentit pâlir. Elle n’osait pas se tourner vers lui, et s’étouffa à moitié avec une plume en sucre.
- Je me disais bien que je vous trouverai ensemble, annonça la voix grave d’Alexandre.
Vanille ne tint plus et se tourna vers lui. Appuyé nonchalamment contre la porte, il souriait à pleine dents, apparamment ravi de voir des membres du Club aussi proches, même s’ils étaient au final presque tout de la même maison. Il était encore plus beau que lorsqu’ils avaient quitté Poudlard. Il avait un sourire plus que charmeur, une posture assurée et avenante, et avait tressé ses cheveux noirs vers l’arrière.
Il lança un regard vers Vanille, sourit, et lança à la cantonade en tendant un sac :
- Tenez, ce sont les fioles de Revelavis. Il y a l’équivalent d’une gorgée, soit un quart d’heure maximum. Buvez ça pendant la répartition. Comme vous l’a dit le professeur Roy, vous pourrez voir la puissance magique des personnes que vous observez, sous la forme d’une aura lumineuse. Evidement, ces aura sont susceptibles de changer au cours du temps, ce sont juste des indications. Personnellement, je ne tiendrai pas forcément compte de ces informations. Mais c’est particulièrement beau à voir. Je vous donne rendez-vous demain soir à la salle du Club pour notre première réunion. Passez une bonne soirée !
Tandis que les autres se répartissaient les fioles, Alexandre baissa les yeux une nouvelle fois vers Vanille qui ne l’avait, elle, pas quitté des yeux. Il lui fit un signe de tête discret vers le couloir, les yeux souriant. Elle acquiesça et, sans remarquer le moins du monde le grincement des dents de Nathan qu’elle contourna pour sortir, le suivit dans le couloir.
Ils trouvèrent un compartiment vide et s’installèrent face à face près d’une fenêtre. Ils s’y assirent et contemplèrent un moment le paysage verdoyant qu’ils traversaient. Sans que Vanille ne s’en rende compte, sa main se retrouva dans la sienne. Elle était toujours un peu stressée, mais sa boule au ventre s’était atténuée. Avoir pu passer ainsi du temps avec les membres du Club lui avaient rappelé ce sentiment d’être à sa place, et avec Alexandre, elle se sentait bien. Elle se rappela les conseils d’Oreste, qui se résumaient simplement : “tu fais ce que tu veux et tu ne te forces pas.” Là, elle voulait rester avec lui, quitte à ne rien dire, à juste regarder le paysage et, par intermittence, lui voler quelques regards. Elle le contemplait (presque) discrètement, et il faisait semblant de ne pas s’en apercevoir en souriant. Quand il tournait les yeux vers elle, elle regardait le paysage. Ce petit jeu du chat et de la souris dura quelques temps.
Puis il ria doucement et alla s’asseoir à côté d’elle, passa son bras par dessus ses épaules, déposa un baiser sur sa tempe (elle frissonna de plaisir) et dit :
- Comment tu vas ?
- Très bien. Ca fait du bien d’être de retour ici. Bizarrement, je me sens déjà plus chez moi ici, dans ce train, que chez mes parents.
- Je pense que ça fait cet effet-là chez beaucoup de monde, après un certain nombre d’années à Poudlard. Quelque chose a changé chez tes parents pour que tu ressentes ça ?
Elle expliqua brièvement la situation familiale - ses parents divorcés, son frère et son père partis au bout du monde, sa mère et son nouveau copain. Puis, le sentant à l’écoute, elle commença à se confier plus intimement. Sa responsabilité face au divorce de ses parents. Son sentiment d’abandon quand son frère avait décidé de partir voyager, sentiment injuste puisque c’était elle qui était partie, au départ. Et, depuis peu, ce nouveau sentiment d’abandon, quand sa mère ne rentrait plus qu’un soir sur deux, pour préserver son couple au détriment de ce qui lui restait de famille - Vanille, en somme. Elle avait l’impression de ne plus faire partie d’aucune famille, là-bas. Sa mère lui avait fait comprendre qu’elle souhaitait, au final, la voir s’envoler seule. Sa phrase de départ était horrible, une fausse fierté devant l’indépendance de sa fille, qui en vérité cachait une envie d’en être débarrassée.
Elle essuya ses yeux humides, un peu gênée :
- Excuse-moi, je me doute que ce n’est pas ce que tu voudrais entendre. Je ne suis pas quelqu’un de très… enfin… fort.
- Ne t’excuse pas. Je suis là pour toi si tu as besoin de te libérer de tout ça. Ce n’est pas ta joie de vivre ou ton intelligence qui m’intéresse, c’est toi toute entière.
Touchée par ses paroles, elle leva la tête vers lui. Il la couvait du regard, sincère. Leurs visages étaient très proches, elle pouvait sentir son souffle chaud sur sa joue. Elle leva la main pour la poser sur sa joue.
- Est-ce que tu veux qu’on… qu’on essaye tous les deux ? murmura-t-il.
Soulagée qu’il lui pose la question, pour pouvoir mettre des mots sur cette relation, elle n’hésita pas vraiment. Elle y avait pensé tout l’été, tout en essayant de ne pas le faire. Oui, elle voulait essayer, essayer d’être en couple avec lui, malgré leur passif un peu chaotique.
Sans le quitter des yeux, elle hocha la tête. Il retira alors son bras de ses épaules, et de ses mains, douces et fortes, encadra le visage de Vanille, un peu rougissante. Doucement, il se pencha vers elle et l’embrassa.
Vanille ressentit dans son ventre quelque chose danser lentement, comme une vague de délice. Ses lèvres étaient douces et son baiser mesuré, il ne dura pas plus d’une seconde qui parut à Vanille continuer encore et encore. Il s’écarta lentement, caresse sa pommette de son pouce et dit :
- Ta bouche est sucrée.
“Ah ? Tu es sûr ? Tu ne veux pas re-goûter pour voir ?”
- J’ai mangé une plume en sucre, chuchota-t-elle sans savoir pourquoi.
- Je m’en doutais, ria-t-il.
Il s’écarta un peu plus d’elle et Vanille ressentit une pointe de frustration. Ce garçon savait jouer avec elle. Il passa de nouveau son bras autour de ses épaules et elle posa sa tête contre son torse - musclé, elle ne l’avait jamais remarqué auparavant. Ils se prirent les mains.
Un vrai petit couple.
“Une vraie godiche culcul ouais.”
“Oui, je suis clichée, je sais. J’y peux rien.”
“T’as pas intérêt à partir sur des bisous volés dans les couloirs et des pelotages de nuit, merci mais non merci.”
“Je fais ce que je veux. Si j’en ai envie, je le fais.”
“T’as pas envie de devenir comme ça.”
“Mais lui non plus. On est pas des enfants.”
“Dixit la fille qui vient d’embrasser son premier garçon.”
“Pourquoi on n’agirait pas comme tous les couples amoureux ?”
Les doigts de Vanille se crispèrent.
- Est-ce que ça va ?
“Amoureux ? Tu pars loin ma fille. Redescend sur terre. Tu sais très bien ce qui intéresse les garçons de son âge.”
“Déjà, il n’est pas comme ça, et ensuite, peut-être que c’est moi qui en ait envie.”
“Envie de quoi ? Arrête de tourner autour du pot. Arrête de te mentir à toi-même.”
“Envie d’être un couple culcul qui se tripote derrière les tapisseries et se murmure des “je t’aime” entre chaque cours.”
“Mais t’en as PAS envie. C’est ça le truc. Tu vois toutes les filles agir comme ça, et tu crois que c’est la norme. Mais ça ne veut rien dire. Tu fais ce que tu veux.”
- Vanille ?
“Et si lui il veut ça ?”
“Alors tu l’envoies bouler. Fin de l’histoire. Ne te force pas à être quelqu’un que tu ne veux pas être.”
- Oui ?
- Tout va bien ? Tu étais toute crispée pendant quelques secondes…
- Non ça va, j’étais juste… ça va. Heu… et toi, tes vacances chez tes parents ?
Grossier changement de conversation que voilà. Vanille se maudit intérieurement d’être aussi peu subtile : elle comptait évoquer le fait qu’elle avait vu son père cet été, mais aurait voulu commencer par le début, ses recherches.
- C’a été, éluda-t-il.
Il ne dit rien de plus et Vanille comprit pourquoi. Elle réfléchit à toute vitesse à la meilleure façon d’annoncer les choses.
- Je ne t’ai pas dit, cet été j’ai rencontré des personnes pour mes recherches.
- Vraiment ? Qui ça ?
- Eh bien j’ai revu Oreste, elle m’a présenté une fille du Club que tu as sûrement déjà vu, Mai Ishii, une fille de Mahoutokoro.
- Oui, je vois de qui il s’agit. Mais pourquoi voulais-tu la voir ?
- Pour qu’elle me parle de ses études. Je me suis renseignée sur les différentes façons d’apprendre la magie, en fonction de la culture.
- Oh, c’est un sujet intéressant. On n’en parle pas dans les livres.
- Non, continua Vanille à toute vitesse, pour arriver le plus vite possible au sujet qui fâche et s’en débarrasser, et ensuite elles m’ont donné le contact de Peter, un gars du Club de Durmstrang, je suis allée là-bas.
- Tu es allée à Durmstrang ?
- Non, chez Peter, une journée. Et puis ensuite, Oreste est venue me voir et elle m’a proposé de venir avec elle… pour rencontrer un sorcier qui était intéressé par sa magie sans baguette. Un sorcier d’Afrique. De l’école de Uagadou.
Alexandre retira lentement son bras des épaules de Vanille.
- Je… j’ai rencontré le directeur adjoint. De l’école. Il est… Il nous a invité chez lui. Et on a discuté et…
- Arrête.
- Il nous a parlé de toi.
- Tais-toi !
Il s’était levé et avait presque crié. Ses yeux n’exprimaient plus aucune douceur, ils avaient retrouvé cette colère froide, glacée même. Vanille ne se laissa pas impressionner, elle s’était imaginé beaucoup de scénarios et celui-là en faisait partie.
- Alexandre, ton père nous a…
- Ne me parle pas de mon père ! cria-t-il.
Il fit nerveusement quelques aller-retours, Vanille se leva et chercha les mots pour le calmer.
- Ecoute, ça ne me regarde pas, mais il m’a demandé…
Sans prévenir, Alexandre s’approcha d’elle et plaqua avec force ses mains sur le mur derrière elle, l’entourant de ses bras.
- Vanille, énonça-t-il lentement d’une voix tranchante qu’il semblait tenter en vain de contrôler, je ne veux rien savoir de ce que tu as pu dire avec cet homme. Il n’est pas mon père, il n’existe pas. Est-ce que je suis clair ?
Les lèvres de Vanille tremblèrent tandis qu’elle essayait de trouver quoi répondre. Le visage d’Alexandre était proche du sien, avec un rictus presque effrayant.
- Je… je ne…
- N’évoque plus jamais ce sujet. Jamais.
Il lâcha le mur et Vanille tomba assise sur la banquette, comme s’il l’avait tenue debout. Sans rien dire de plus, sans un geste ni même un regard, il saisit brutalement la poignée de la porte, sortit dans le couloir et claqua ladite porte derrière lui.
Vanille était abasourdie. Avant même qu’elle n’ait pu formuler la moindre pensée, la porte se rouvrit et Alexandre rentra de nouveau :
- Et je t’interdis de lui envoyer le moindre hibou ! clama-t-il avant de repartir.
Au moment où la porte claqua pour la seconde fois, le coeur de Vanille qui hésitait entre deux sentiments, la tristesse ou la colère, se décida soudain, elle se leva, hésita une demi-seconde et s’empara de la poignée, qui était décidément bien malmenée, fit coulisser la porte violemment et se retrouva nez à nez avec Alexandre, qui finalement n’était pas allé bien loin.
- Pour qui tu te prends ?
Elle se souvint d’un coup qu’il mesurait une bonne tête de plus qu’elle, mais oublia bien vite ce détail, noyé dans sa colère.
- Tu crois que sous prétexte que tu m’as embrassée tu peux te permette de me donner des ordres ? De me parler comme ça ?
Sans rien dire, il la poussa sans aucune brutalité vers l’intérieur du compartiment. En reculant, Vanille aperçut quelques visages curieux apparaître dans le couloir. Elle se retourna et alla se poster près de la fenêtre, tandis qu’Alexandre insonorisait les lieux.
- Espèce de goujat, je ne sais pas pour qui tu m’as prise, mais il est hors de question que je te laisse me parler comme ça. Je n’ai rien fait de mal ! lança-t-elle en l’accusant du doigt. Je n’ai fait que rencontrer quelqu’un qui s’est avéré être ton père ! Et je savais que ça serait un sujet nul pour toi, il me l’a dit, mais je pensais que je te devais au moins de te le dire ! De ne pas te cacher un fait aussi important ! Tu aurais dit quoi si tu avais appris dans un mois, un an, que j’avais rencontré ton père avant même qu’on se soit mis ensemble ?
- Vanille, s’il te plaît, calme-toi, dit Alexandre, les poings serrés.
- Me calmer ? Tu étais le premier à me crier dessus!
Il s’approcha d’elle et tenta de poser ses mains sur ses épaules, mais elle l’en empêcha.
- Tes yeux doux ne changeront rien.
Il soupira, et s’affala sur la banquette, la tête dans les mains. Comme il restait silencieux, Vanille s’assit en face de lui.
- Excuse-moi, lâcha-t-il au bout d’un moment. Je n’aurais pas dû perdre mon sang-froid. Tu l’as dit toi-même, c’est un sujet difficile pour moi.
Sa jambe était secouée de spasmes. Il tentait visiblement de contenir sa colère.
- Je n’aurais pas dû m’emporter, te donner d’ordre.
- Ni avoir l’air si menaçant.
- C’est injustifiable, et je suis désolé. Mais je maintiens ce que j’ai dit, dit-il en relevant la tête vers elle, les yeux plein de hargne, cet homme n’est pas mon père et je ne veux plus jamais parler de lui.
Vanille hocha la tête, compréhensive. Elle lui prit les mains, essaya de le calmer. Un peu naïve, elle décida de lui pardonner son arrogance. Il avait immédiatement reconnu son erreur avant même de s’être libéré de sa colère.
Elle se demanda ce qui avait pu se passer entre son père et lui. Elle pensait à une histoire de tromperie, vu que son père avait eu deux fils en même temps avec deux femmes différentes. Et même si l’un était clairement préféré, puisqu’il était le fils de sa femme, qu’il était près de lui et qu’il portait même son nom, le père semblait aimer son autre aîné. Son regard ce jour-là en disait long, Tim Kahindi regrettait de ne plus avoir de nouvelles de son fils.
Vanille réalisa soudain qu’elle ne pourrait pas parler à Alexandre de l’école d’Uagadou. Finalement, il n’avait pas refusé parce qu’il s’agissait de son père, il avait tout simplement refusé de parler de ce sujet.
End Notes:
*Lena déboule sur scène*
Eeeeet c’est tout pour aujourd’hui ! Ah ! Je sais pas pour vous, mais moi je ne m’en lasse pas de cette histoire. Amitié, passion, mystère et sentiments. Que demande le peuple ?
Vous en voulez plus ?
Vous voulez savoir quelle sera la réaction de Nathan face à l’influence du beau black sur notre héroïne ?
*Voix de loin* C'est pas une romance que j'écris !
Quel sera le résultat du banquet de début d’année, des nouveaux espoirs seront-ils révélés ?
Que nous réserve la première réunion du Club, et du retour de ses membres ?
Tout ça, c’est à suivre dans notre prochain épisode de mercredi, du Cluuuub des Créateuuuuurs !
*Deanna débarque et arrache le micro-plume des mains de Lena*
Faut que t’arrêtes de faire ça.
Je sais que tu kiffes en vrai.
Hmpf. A la semaine prochaine tout le monde.
Author's Notes:
Bonjour à tous ! Soyez les bienvenus à notre vingt-quatrième réunion au Club des Créateurs.
J'ai attaché dans un coin et baillonné ma merveilleuse bêta-readeuse, afin qu'elle ne s'accapare plus de mes présentations. J'aimerais d'ailleurs la remercier pour sa relecture. Merci Lena !
*Hmm Hm Hmm!
"Va te..." Ahem, bien. Dans ce chapitre, il sera question d'un caillou, d'une potion, et de quelques désaccords.
J'espère que le chapitre vous plaira !
Bonne lecture à tous !
Leanne mit un coup de coude dans les côtes de Vanille.
- Eh ! Je suivais !
- Oh pardon. L’habitude.
Bon, certes, ce n’était que le premier cours de l’année. Mais Vanille avait pris une bonne résolution et comptait bien s’y tenir : plus d’évasion. Elle resterait concentrée sur le moment présent, tant qu’il y avait des personnes autour d’elle pour lui parler, tant que ce qui était dit était important. D’ailleurs, si elle arrivait à suivre en cours, elle aurait peut-être moins besoin de travailler de son côté, et aurait plus de temps pour le Club. Pour ses recherches. Pour Alexandre.
Elle secoua la tête et se força à écouter le professeur Flitwick, provoquant un léger rire chez Leanne, qui l’avait parfaitement vue arrêter de suivre.
- Tu t’en rends compte plus vite au moins, chuchota sa voisine, impitoyable.
Elle lui tira la langue et se força à l’ignorer. Malheureusement pour elle, ses voisins n’avaient pas pris les même résolutions qu’elle.
- Et une de Serpentard aussi, chuchotait Olivier, juste derrière elle. Tu l’as vue ? Elle avait une puissance incroyable ! Mais beaucoup plus violente.
- J’en ai compté quatre de cinquième année qui ressortaient vraiment, répondit Annabelle tout aussi bas (ils avaient ce cours en commun avec les Gryffondor). Malheureusement, comme je me suis concentrée sur les cinquième année, je n’ai pas pu voir ceux des autres, je n’avais plus de temps.
- Je n’ai pas du tout regardé la salle, avoua Octave. J’ai regardé les professeurs.
- De toute façon, Alexandre a dit qu’on ne se servirait pas forcément de ces informations pour le recrutement, pardonna Olivier. Alors ? Les profs ?
- Comme on s’y attend, McGonagall a une puissance magique furieuse et très stricte, ça lui va vraiment bien. Les autres sont un peu plus mous. En revanche, je n’ai pas vu Roy. Elle n’avait rien, c’était étrange.
- Peut-être qu’elle s’est protégée contre sa propre potion, proposa Annabelle.
Vanille reçu un coup de coude bien mérité.
- Et j’ai été ravi de voir que beaucoup d’entre vous avez réussi vos BUSEs en sortilège, congratulait le professeur.
Vanille lança un regard de reproche à Leanne.
- Si tu t’autorises à ne pas suivre maintenant, tu ne tiendras jamais l’année.
- C’est pas comme si ce qu’il disait était utile ! grogna Vanille.
Elle avait toujours trouvé les discours de début d’année beaucoup trop longs.
“Oui, je sais, je cherche déjà des excuses pour ne pas écouter.”
- Vanille ! entendit-elle chuchoter derrière elle.
“C’est pas de ma faute là!”
Elle se pencha en arrière, nonchalamment, croyant naïvement adopter une position subtile.
- Tu as compté combien de cinquième année potentiels hier soir ? demanda Olivier.
Elle haussa les épaules :
- Il ne faut pas trop se fier à ces… auras magiques. Il faudra donner sa chance à qui le voudra, argumenta Vanille.
- Tu n’as pas changé d’avis alors.
Le professeur Flitwick lui lança un regard désespéré et Vanille en profita pour se rassoir normalement. Intérieurement, elle le remercia. En vérité, elle n’avait rien à répondre à Olivier. Aucun des cinquième année de lui avait semblé plus apte à faire partie du Club des Créateurs qu’un autre.
Parce qu’elle n’avait pas bu la potion.
*Vanille sortit la fiole de sa poche, imitée par tous les autres membres du Club des Créateurs, éparpillés dans la Grande Salle.
- J’ai demandé des détails à Alexandre, pour ne pas être visuellement envahis, on peut essayer de se concentrer sur les cinquième année, et on verra uniquement les potentiels magiques que l’on souhaite.
Ambre leva sa fiole, comme pour trinquer, et bu cul-sec. Vanille s’apprêtait à l’imiter, mais son bras s’arrêta à mi-chemin.
Elle ne voulait pas boire cette potion.
Elle avait immédiatement réfuté l’utilité de cette potion dans le cadre du Club, parce qu’elle supposait qu’on ne pouvait s’améliorer, qu’on ne pouvait être meilleur que ce que la potion, l’aura, son destin ne prédisait. Comme si, d’après cette potion, on était destiné - ou pas - à réaliser des grandes prouesses magiques.
Comme si le fait qu’elle ait une forte et intense aura magique l’obligeait à devenir une grande sorcière. Non. Si elle avait eu une aura minable, elle n’aurait rien changé de ses plans. Et un faible potentiel chez un prétendant au Club ne devait pas l’empêcher d’avoir ses chances. Ses notes, oui, et encore. Sa motivation surtout.
Le potentiel même de cette potion était gâché en étant utilisé aussi inutilement.
Alors elle rangea la fiole dans sa poche et imita - vous l’aurez deviné, de manière ridicule - les autres membres du Club qui affichaient un air émerveillé.*
Pourquoi avait-elle décidé de cacher le fait de ne pas avoir bu le Revelavis ? Elle n’en savait trop rien. Une intuition, une petite voix dans sa tête (pas celle qui aimait la contredire, une autre, plus faible mais plus forte à la fois).
Cela avait à voir avec la lettre. La fameuse lettre, toujours dans son carnet de recherches, comme une épée de Damoclès invisible et incompréhensible.
“Il y a des secrets qu’il serait trop dangereux que tu découvres. Tu es prévenue.”
Cette lettre avait eu un double effet, plutôt antagonistes : la peur et la motivation. Elle avait continué ses recherches, évidemment, mais en se cachant et en se demandant qui pouvait lui envoyer telle menace. Et surtout pourquoi. Et justement, ce pourquoi était bien plus fort : quelle que soit la raison, quels que soient les secrets qu’elle ne devait pas découvrir, s’ils valaient une lettre de menace sur une simple Novice du Club des Créateurs, alors ils devaient être importants à garder.
Et si vous dites à un enfant de ne surtout pas ouvrir le tiroir de la commode, dès que vous aurez le dos tourné, il l’ouvrira. Vanille était une enfant. Elle voulait savoir ce qu’il y avait dans le tiroir.
- Je peux te donner un coup de coude là ? demanda Leanne d’un ton bien trop sérieux.
Vanille grommela et revint au moment présent. Le professeur Flitwick était en train d’écrire au tableau le premier chapitre de l’année.
“Analyse de sortilège.”
- Pendant ce semestre, vous étudierez la réalisation d’un sortilège, de la formule jusqu’au geste, et vous devrez en trouver un contre-sort ! annonça-t-il de sa voix fluette.
Vanille rit intérieurement. “Même fait exprès, cela n’aurait pas été aussi beau.”
Elle se promit de suivre avec attention au moins tout le semestre.
Puisqu’elle était impatiente que le soir arrive, pour pouvoir retourner dans la salle des Créateurs et rouvrir le Club, évidemment, la journée fut beaucoup trop longue. Sortilège, Métamorphose, Potion, Arithmancie, Botanique, Défense Contre les Forces du Mal. C’était la rentrée la plus chargée qu’elle n’avait jamais eu, et avec tous ces discours de début d’année - “Félicitation pour vos BUSEs, maintenant ça va être dur, très dur, et nous allons dès à présent vous faire stresser pour vos ASPICs bien que vous ayez encore deux ans pour les préparer.” - Vanille était exténuée quand arriva la fin de l’après-midi.
Mais toute son énergie réapparu spontanément quand elle se retrouva après le dîner devant la grande porte en bois stylisée du Club des Créateurs. Elle la contempla un instant, en silence, le nez levé. Un intense sentiment de retour à la maison l’envahit. Mieux que ça : elle se sentait rassurée.
Pendant un moment, enfoui au fond d’elle-même, elle avait eu peur de se retrouver face à cette porte et face à ses souvenirs.
Morgane qui tremblait violemment au sol après que Vanille lui ait envoyé un sortilège pour l’immobiliser.
Ses sueurs froides dans les couloirs, à pointer sa baguette vers les dédales sombres et glacés du château.
La violence des sortilèges qui les avaient expulsées, elle et Lorelei, au sol et contre le mur.
La haine et la colère dans les yeux de Jules quand il les attaquait.
Tous ces souvenirs qui étaient encore beaucoup, beaucoup trop vifs. Elle les balayait régulièrement d’un revers de main, mais ils revenaient. Jules, leur Maître Créateur et ami, serait toujours présent dans cette pièce. Toujours. Tant qu’il y avait quelqu’un pour penser à lui. Et Vanille ne pouvait s’empêcher d’y penser.
C’est pour cette raison qu’elle avait eu peur. Ces souvenirs pouvaient-ils l’empêcher de se sentir sereine au sein du Club ? Elle avait déjà eu une preuve que non : elle gardait toute confiance en les membres qui restaient. Et là, devant cette grande porte d’ébène, qui donnait presque l’impression de les attendre, elle souriait. Parce qu’elle était, malgré tout, simplement heureuse d’être là.
- Tu sais qu’on n’est pas obligés d’attendre qui que ce soit ? demanda Annabelle. Tu me laisses l’honneur de l’ouvrir ?
Vanille se décala. Annabelle ouvrit la porte en poussant de toutes ses forces - la porte était grande et Annabelle petite, et elle poussait les deux battants d’un coup, certainement pour donner un effet dramatique à leur entrée.
Annabelle et les Jeunes Créateurs de Serdaigle entrèrent dans la salle du Club, Vanille en dernière. Elle prit une grande respiration et toussa : cela faisait longtemps que la poussière n’avait pas été faite dans cette salle. Rien n’avait bougé depuis leur départ.
Tous les membres arrivèrent petit à petit et prirent place autour de la table ronde. La directrice n’était pas là - après tout, elle n’était pas vraiment membre, et le Club savait se gérer tout seul. Si elle avait été présente lors des dernières réunions, c’était uniquement à cause de Jules.
Vanille essaya de ne pas y penser.
Toutes les chaises étaient prises, il devait certainement y en avoir autant qu’il y avait de membres.
Chez les grands Créateurs, il y avait Alexandre, qui affichait un air dominant. Lorsqu’il était arrivé dans la salle, il était passé près d’elle et avait glissé sa main sur l’épaule de Vanille, simplement. Pour lui faire comprendre qu’il était là, qu’il savait qu’elle était là. Il s’était assis à côté d’elle et avait amené avec lui un livre noir, avec une pierre incrustée dans la couverture. C’était une pierre violette, Vanille cru reconnaître une améthyste, une pierre aux fortes propriétés magiques. Le livre était posé au centre de la table encore vide de tout travaux.
Florent et Iris étaient arrivés peu après, main dans la main, éternels rieurs. Ils arboraient toujours cet air bohème, lui avait d’interminables cils et une bouche fine, elle garnissait ses oreilles et ses cheveux de plumes, gri-gris en bois et autre bandeaux fleuris. Ils saluèrent tout le monde d’un geste joyeux, manifestement heureux de se retrouver là.
Alva et Alya arrivèrent bien plus discrètement. Vanille se rendit compte de leur présence au détour d’une conversation avec Ambre. Comme à leur habitude, elles n’avaient pas l’air commodes. Pourtant, et Vanille s’en étonna, c’est autre chose qui les caractérisaient : elles avaient des cernes maladroitement cachés d’un sortilège mal lancé, les traits tirés et baillaient régulièrement. Elles firent un vague signe de salut à Vanille lorsqu’elle captèrent son regard, et celle-ci leur sourit, un peu gênée d’avoir été grillée.
Les Jeunes Créateurs arrivèrent au compte-goutte, Lorelei et Enguerrand ensemble, puisqu’ils étaient tous deux de Poufsouffle (Lorelei vint prendre Vanille dans ses bras quand elle l’aperçut, et elles échangèrent un regard lourd de sens, conscientes d’avoir vécu ensemble un moment traumatisant - Vanille eut la confirmation de ne pas être la seule à ressasser encore cet événement), puis Kerwan, le Serpentard qui avait été le Novice de David avec Ambre, et enfin Leire, l’autre Gryffondor qui n’était pas aussi proche du groupe que les autres mais semblait s’en accommoder.
Alexandre se leva.
- Mes amis (Vanille leva les sourcils devant cette appellation un peu pompeuse), nous voici réunis de nouveau au Club des Créateurs. Avant de commencer quoi que ce soit, avant même de lancer le Club, il nous faut élire un Maître Créateur. Vous vous en doutez, je souhaite me présenter pour ce poste. Est-ce que quelqu’un d’autre parmi les Grands Créateurs souhaiterait également devenir Maître Créateur ?
Vanille s’étonna de la vitesse à laquelle il amenait les choses, pas de fioriture, directement dans le vif du sujet. Après tout, s’il fallait commencer par ça, pourquoi pas.
Personne ne se manifesta.
- Est-ce que quelqu’un souhaite proposer un autre Grand Créateur pour ce poste ?
Encore une fois, tous se regardèrent l’air entendu. On savait qu’Alexandre briguait ce poste et personne ne songeait à le spolier.
Florent leva les bras et baissa la tête, d’un geste théâtralement surfait :
- Merci à tous d’avoir prit en compte le fait que je n’étais pas du tout intéressé par ce poste, malgré mes incroyables talents de chef, plaisanta-t-il.
Il y eu un petit rire autour de la table.
- Est-ce qu’on peut encore parler d’élection à ce stade ? demanda Ambre. Non pas que je ne souhaite pas te voir devenir Maître Créateur, assura-t-elle quand Alexandre la regarda l’air passablement étonné, mais si personne d’autre ne se présente, alors le Maître Créateur n’aura pas vraiment été élu.
- Il y a une autre étape, affirma Alexandre. Au milieu de cette table se trouve le Livre du Club. Il contient les noms et des informations sur tous les membres du Club des Créateurs depuis sa création, à Poudlard et dans toutes les autres écoles. Il est bien plus complet qu’il n’en a l’air (Vanille songea en effet qu’il ne semblait pas y avoir plus de cinquante pages, mais c’était certainement un sortilège qui était à l’oeuvre), et n’est sorti qu’une fois par an, lors de la première réunion - ce soir, donc - pour y ajouter les noms des Grands Créateurs. Dans l’améthyste incrustée sur sa couverture se trouve le sortilège du Club, celui-là même qui vous a intégrés en temps que Novices.
Il pointa sa baguette sur le livre qui se souleva de quelques centimètres et s’ouvrit en plein milieu. Il tourna lentement sur lui-même. Sur les pages jaunies par le temps, Vanille aperçut l’espace d’un instant les noms d’Oreste et de David, mais pas ceux de Morgane ou Jules, qui étaient peut-être sur les pages précédentes. Ou peut-être le nom de Jules avait-il été effacé.
- Un à un, vous allez vous présenter, baguette tendue vers le livre. Dans votre esprit, vous penserez à la personne que vous souhaitez voir devenir votre Maître Créateur. C’est un vote à la majorité.
Il lança un regard entendu vers Ambre, qui hocha légèrement la tête, les yeux fixés sur le livre. En joignant la parole à l’acte, Alexandre, la baguette toujours tendue vers le centre de la table, dit :
- Alexandre Legrand, Septième année, Gryffondor.
Il marqua une pause, et le livre se tourna vers son voisin, Florent, qui fit de même. Chacun d’entre eux se présenta et vota intérieurement, cela finit par Vanille, qui vota évidemment pour Alexandre. Lorsqu’elle eut fini, le livre se referma et se reposa au centre de la table.
Un court instant passa, puis la pièce s’assombrit. L’améthyste commença elle à briller, en même temps que l’obscurité grandissait. Vanille se souvint de son entrée au Club, lorsque des filaments de lumière étaient passés de baguette en baguette. Et en effet, les mêmes filaments commençaient à sortir de la pierre. Le sortilège était à l’oeuvre.
C’était un spectacle très beau, l’incarnation de magie devant eux semblait vivante. Elle prit la forme d’une vague aérienne et se promena au-dessus de la table, bougeant élégamment, comme portée par un vent inexistant. De petits flashs apparaissaient spontanément, comme des surplus d’énergie, des court-jus d’électricité. Le tout toujours baigné dans cette douce lueur violette caractéristique du Club. Contrairement à la première fois, Elle ne se divisa pas en plusieurs parties pour rejoindre et lier les membres mais se mit à tourner devant chaque personne, comme un animal qui chercherait sa proie. Il flotta sans s’arrêter devant Iris, Ambre, fit presque un demi-tour en passant devant Nathan, puis se dirigea vers Alexandre. Mais au dernier moment, la sphère, le flux de magie se stoppa, pile entre Alexandre et Vanille.
Cela dura une demi-seconde : Vanille cru voir la lumière hésiter, si c’était possible, entre aller vers la gauche ou la droite. Puis, elle perçu un infime mouvement à sa gauche, comme si Alexandre s’était crispé. Enfin, d’un bond, d’un éclair, l’onde se précipita sur Alexandre et entra en lui.
Il lâcha un infime soupir, et tendit sa baguette vers l’améthyste : une nouvelle onde, plus intense, en sortit et plongea sur la pierre, ricocha et se divisa pour aller se loger dans chacun des membres du Club. Vanille accueillit le sien comme on reçoit un vieil ami : un manque inimaginé se trouve comblé, avec l’impression que rien n’avait changé depuis son départ.
Elle se tourna vers Alexandre, qui la regardait. La lumière était revenue dans la pièce, et chacun allait de son commentaire : les cravates et insignes étaient revenus à la normale.
Mais Vanille n’arrivait pas à détacher son regard d’Alexandre. Il lui souriait, satisfait. Il se pencha vers elle et l’embrassa sur la joue.
Sur les insignes, les nouveaux statuts étaient inscrits. Vanille fut enchantée de lire “Vanille Ocean Jeune Créatrice” sur le sien, toujours accompagné de son albatros.
Ils continuèrent la réunion avec Alexandre officiellement Maître Créateur, qui la dirigea avec aisance.
Il commença par leur demander s’ils avaient tous un thème de recherche. Sans en faire de liste, car certains préféraient garder pour eux, pour l’instant, les détails de leurs projets, il s’assura que chacun avait de quoi travailler. Certains affirmèrent travailler en duo, comme Iris et Florent, et Octave et Olivier. Alexandre leur dit qu’en tant que Maître Créateur, il devrait leur demander à chacun des détails en privé, afin de rédiger un compte-rendu pour le ministère. Il leur précisa qu’ils pouvaient évidemment garder cela secret même de lui, même du ministère, ils leur faudrait alors trouver une couverture.
Vanille ne savait pas encore comment elle allait gérer ses recherches. Elle n’avait pas encore parlé à d’autres personnes de sa lettre, et n’avait plus évoqué le détail de ses recherches, sauf avec Oreste. Elle décida à cet instant qu’il était temps qu’Ambre, Leanne et Alexandre soient au courant de toute l’histoire. Elle leur faisait confiance : aucun d’entre eux ne pouvait avoir envoyé la lettre. Elle se dit même que, peut-être, l’intimidateur avait quitté Poudlard. Cela aurait-il pu être Jules ? Elle en doutait.
Ensuite, ils évoquèrent le sujet des Novices. Il leur faudrait y réfléchir assez vite pour pouvoir se décider, chacun devrait, lorsqu’ils choisiraient le nombre de Novice, faire part de leur acceptation ou de leur refus d’en prendre un. La plupart d’entre eux se montrèrent plutôt motivés. Pas Vanille. Elle ne se sentit absolument pas légitime de prendre un Novice avec elle, et avait toujours l’impression de ne rien savoir sur la création. Ce qui était un comble pour une membre du Club des Créateurs.
Heureusement, il y avait assez de volontaires, et il y aurait certainement moins de Novices que de Créateurs.
Ils abordèrent ensuite les sujets pratiques. L’organisation de la réunion de présentation dura une bonne heure, durant laquelle tout fut débattu, de la date à la taille des caractère des affiches. Ils étaient sur la plupart des sujets assez en accord, mais Vanille souleva un sujet qui fit débat :
- Est-ce qu’il serait possible d’être moins prétentieux que l’année dernière ?
Tous les Grands Créateurs la regardèrent avec des yeux ronds, et les Jeunes en souriant discrètement. Ils savaient ce que Vanille avait pu penser du Club, au début. Elle baissa un peu le nez mais garda ses positions. Elle aurait peut-être dû prendre des pincettes.
- Pendant la réunion de présentation, il y avait une aura de suffisance qui se dégageait de vous. J’avais l’impression que vous étiez un club orgueilleux de course à la reconnaissance et à la supériorité. Mais ce n’est pas du tout ce que j’ai ressenti ici, alors je me disais… Peut-être qu’on devrait essayer de ne pas se faire de mauvaise publicité.
- La mise en scène est faite pour donner envie à des élèves de venir dans le Club, contra Iris. Il faut bien mettre en avant ses qualités. C’est un fait : nous sommes un Club prestigieux, et beaucoup de portes nous sont ouvertes à sa sortie. Et nous n’acceptons que les meilleurs sorciers, les plus motivés et prometteurs.
- Au contraire, renchérit Florent, cette année il faudra mettre les bouchées doubles. Je veux dire, après… Enfin, notre ancien Maître Créateur a été renvoyé de l’école. Comment voulez-vous convaincre qui que ce soit d’adhérer en sachant cela. Tout le monde sait qu’il y avait de la magie noire en jeu.
- Ils ne seront pas obligés de savoir, murmura Alexandre.
Vanille se tourna vivement vers lui.
- Tu veux cacher quelque chose d’aussi important ?
- Pas complètement, dit-il. On n’est pas obligé de leur dire pendant la présentation. On peut tout leur expliquer une fois qu’ils seront dans le Club.
Elle le regarda bouche bée, et fut encore plus choquée en comprenant qu’autour d’eux, presque tout le monde approuvait d’un léger et inconscient signe de tête.
- C’est ce que vous voulez tous ? Mentir pour avoir plus de prétendants ?
- Tu l’as dit toi-même, Vanille. Tu te souviens ? “Personne n’acceptera d’entrer dans un club où un membre en torturait un autre”, dit Iris.
- Ce n’est pas mentir, nous attendrons juste pour leur apprendre le passif du Club, compléta Alexandre. Si quelqu’un nous pose la question, nous dirons la vérité.
- David nous a recommandé d’être honnête avec eux.
- David n’était pas Maître Créateur.
- Quand bien même, il avait raison. Ils n’auront pas confiance en nous en apprenant la vérité si tard.
- Ce n’est pas si grave.
- Pas SI grave ?
La voix de Vanille venait de vriller. Elle débattait seule avec Alexandre, et cela ressemblait beaucoup trop à une dispute de couple.
“Tant pis. Tant pis si personne ne veut intervenir.”
- Ce qu’il s’est passé n’était pas si grave ?! dit-elle en se retenant en vain de hausser la voix.
- Ce n’est pas ce que je voulais dire.
- Alors quoi ?
Elle ne comptait pas abandonner. Le sujet comptait trop pour elle. Alexandre quant à lui gardait une voix calme et assurée. Tout ce qu’on attendait d’un Maître Créateur.
- Ne pas leur dire directement les… horreurs qu’a commises Jules n’est pas si grave, puisque nous le leur dirons plus tard. Il faut que le Club puisse aller de l’avant. Il nous faut être plus forts que ça. Nous ne devons pas nous enfoncer à cause de lui. Nous ne sommes pas responsables, ni toi, ni moi ni personne, lui seul l’est, et il a été puni pour ça. Il est à Azkaban et nous sommes ici, soudés, forts, prêts à accueillir de nouveaux Novices. Ce qu’il s’est passé est grave, je le sais Vanille, et nous ne devons pas oublier, seulement je refuse que nous vivions dans le passé.
Il s’adressa au reste du Club :
- Vous m’avez élu, même si c’était un il a une heure, Maître Créateur. Ce Club compte beaucoup pour moi et je ferai tout pour qu’il s’y passe le meilleur. Cela me semble être la meilleure solution. Mais si l’un d’entre vous souhaite que l’on vote, alors nous voterons. Je refuse d’imposer mon choix s’il n’est pas partagé.
Personne ne se manifesta. Vanille, frustrée de ne pas avoir réussi à faire valoir ses opinions, regarda ses amis. Ambre lui rendit son regard, et elle n’y vit aucun regret, elle aussi assumait son choix et semblait lui dire “je suis désolée que nous ne soyons pas d’accord”. Les autres fuyaient son regard : ils n’avaient pas l’habitude des débats houleux de Vanille. Il faut dire qu’ils étaient rares mais intenses.
- Si je suis seule alors je me range à la majorité, accepta-t-elle, diplomate, mais un peu amère.
Elle crut percevoir un soufflement rassuré.
- Et par rapport à la présentation ?
- Je propose que nous fassions comme l’année dernière. Après tout, nous avons eu beaucoup de Novices.
Quelques membres du Club aquiescèrent et repartirent précipitamment sur d’autres sujets, pour ne pas repartir sur un nouveau débat - une nouvelle dispute.
Ils évoquèrent sommairement les événements importants - la cérémonie d’entrée, la rencontre annuelle (dont ils ne savaient pas encore où elle aurait lieu), et quelques informations sur les relations avec le ministère.
- Avant que nous nous quittions, dit Alexandre pendant qu’ils rangeaient tous leurs affaires et se levaient à la fin de la réunion, il faudrait que quelqu’un - pas forcément ce soir - se propose pour m’aider dans les relations avec le ministère. C’était le travail d’Oreste l’année dernière et elle a fait un super boulot - tout est déjà organisé et prêt à être récupéré - je crois même qu’elle a laissé des notes pour le suivant. Si vous pouviez y réfléchir, il n’y aurait besoin que d’une seule personne.
Vanille attendit que tout le monde soit parti pour quitter la salle aux côté d’Alexandre. Ils éteignirent les bougies et se retrouvèrent seuls dans le couloir, au milieu de la nuit.
- Ne compte pas sur moi pour reprendre la paperasse d’Oreste, dit-elle en plaisantant.
- Dommage, on aurait pu passer plus de temps ensemble.
- Du coup, pas de rancoeur pour cette… dispute ?
Il se plaça face à elle et entoura ses épaules de ses bras.
- Ce n’était pas une dispute, juste un débat d’idée où nous n’étions pas d’accord.
- C’était complètement une dispute. En tout cas, c’est ce que tout le monde a vu.
- Dans tous les cas, je préfère ça à une approbation teintée d’amertume. Je préfère que nous ne soyons pas d’accord plutôt que l’un de nous accepte ce que l’autre dit ou veut - ou fait - sans rien dire, alors qu’il n’approuve pas.
- Tu parles du train n’est-ce pas ?
- Je suis encore désolé. Mais je suis content que tu m’aies tenu tête.
- Je te promets de ne pas te laisser me marcher sur les pieds, rit-elle.
Il lui sourit et l’embrassa. Ce baiser dura un peu plus longtemps que le précédent. Vanille avait l’impression qu’ils étaient tous différents, et qu’elle se souviendrait de chacun. Celui-là fut doux, fort, et lui donna des frissons dans le ventre. Il l’entourait de ses bras forts et elle se sentait en sécurité.
- Toutes mes félicitations, Maître Créateur, dit-elle lorsqu’ils se séparèrent.
- A demain, Jeune Créatrice. Passe une belle nuit.
Et ils partirent chacun d’un côté du couloir.
S’ils étaient restés une seconde de plus à s’embrasser, ils auraient vu une créature passer par la fenêtre du couloir, qui cacha la claire Lune et dont l’ombre se mouvait sur le mur, immense, lugubre.
Mais ils ne virent rien.
End Notes:
*Bouuh le mystère ! C'est pas comme ça que tu feras plaisir à tes lecteurs !
Lena retourne dans ton coin et fait ton travail de relecture !
Grblm.
Sinon, vous connaissez la fable de l'auteur heureux ? C'est l'histoire d'un auteur qui écrivait avec passion, et qui aimait inventer des histoires. Il publiait ses textes sur internet. Il était lu, pas énormément mais les personnes qui le lisait semblaient aimer ce qu'il écrivait. Il recevait des commentaires, mais...
*C'est long ! Beaucoup trop long ! Pousse-toi!
Lena !
*Tu m'as demandé de corriger tes textes, je corrige tes textes.
*Ahem. Ce qu'essaye maladroitement de dire Deanna, c'est que c'est une flippette. De la vie en général, mais dans notre cadre, une flippette de ne pas plaire. Alors surtout comprenez bien : tous les commentaires qu'elle a reçu, en plus de la rendre toute jouasse, l'ont beaucoup aidés à avancer. A se motiver, à prendre plaisir à publier.
*Parce qu'écrire et inventer ce n'est pas le problème. Deanna, elle a peur de lasser et de ne pas - de ne plus plaire. C'est bête hein ? Et dès qu'un chapitre passe la semaine sans review, ça la travaille. "Est-ce que ces scènes étaient inutiles ? Trop longues ? Est-ce que mes personnages deviennent chiants ?" Et ça la travaille, encore et encore. Du coup elle réécrit ses textes et elle me demande de les relire encore et encore et c'est elle qui devient chiante.
*La morale de cette fable ? Sauvez-moi, je vous en prie, sauvez-moi en laissant des reviews.
*La semaine prochaine, on retrouve des bêtes, deux citations, du film "Les visiteurs" et du livre "Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban", et puis... une lettre.
*Merci de votre lecture. La prochaine réunion aura quelques jours de retard, veuillez nous en excuser. On sera toutes les deux dans des endroits dénués d'internet.
Bises !
J'ai vu une grosse bête by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous ! Bienvenue à notre vingt-cinquième réunion au Club des Créateurs. Qui d'ailleurs est bien à l'heure contrairement à ce que je redoutais !
Nous retrouvons Vanille qui poursuit le début de sa sixième année.
Au programme, une balade, une citation, et une présentation. Un chapitre bien long ! Bonne lecture !
Vanille mit plusieurs jours avant de retourner au Club des Créateurs. Elle avait très envie d’y retourner mais n’avait pas encore réussi à se plonger dans des recherches, à trouver ce sur quoi elle travaillerait pour commencer, maintenant qu’elle était de retour. Elle se donnait du temps.
Elle discuta avec quelques-uns de ses camarades du Club, et, curieuse, leur demanda sur quoi ils comptaient travailler.
Lorelei, qui avait été l’autre Novice d’Oreste, lui apprit qu’elle se lançait dans la divination. Elle était très intéressée par l’énigme du temps, et comment la magie pouvait leur apprendre le futur, mais aussi le présent. Elle avait déjà des idées de sortilèges et commença dès le premier soir à travailler sur un artefact puissant mais méconnu par les sorciers d’Europe : les attrape-rêves.
Octave et Olivier travaillaient sur un projet secret. Ils affirmèrent qu’Alexandre ne voyait aucun inconvénient à leur travail, mais ne voulurent pas expliquer à Vanille ce dont il s’agissait.
- Dès que le projet sera terminé, nous vous en parlerons, promit Olivier. C’est quelque chose qui pourra servir à tout le Club. Mais pour l’instant, nous n’en sommes qu’aux idées, nous n’avons même pas de prototypes. Si on t’en dit plus maintenant, on aura la pression et tu seras déçue si on n’y arrive pas !
Les autres Jeunes Créateurs travaillaient sur divers projets classiques, création de sortilèges et de potions.
Ambre, elle, reprit le travail de David, et comptait continuer à créer des sortilèges de duel. Elle faisait partie du Club de Duels, en était même une membre principale. Elle comptait alterner ses soirées de Créatrice, de Duelliste et de révision. Elle proposa à Vanille de venir avec elle, une fois, voir si cela lui plairait. Vanille promit d’y réfléchir.
Elle avait toujours son chat. Plutôt petit et fourbe, il courrait toujours devant elle. Vanille avait l’impression qu’il l’accompagnait partout.
- Je l’ai croisé pendant les vacances et on a sympathisé, dit-elle comme si elle avait rencontré un ami. Il ne m’a pas lâchée depuis et il a eu l’air d’accord pour venir à Poudlard.
Il la précédait toujours comme s’il savait où elle allait, se présentait poliment à chaque nouvelle personne qu’il rencontrait : ce chat était bien trop intelligent pour être un simple chat. Vanille commençait à le suspecter d’être un Fléreur, ces créatures magiques connues pour leur ressemblance avec les chats et leur grande clairvoyance. Ambre lui donna le nom de Claw(*).
Son amie lui apprit également qu’elle s’était proposée pour devenir le contact du Club avec le Ministère de la Magie. David lui avait expliqué comment gérer les demandes, et elle avait déjà rédigé quelques papiers pour lui. Les membres du ministère qui étaient en contact avec eux connaissaient déjà son nom. Alexandre accepta immédiatement et lui donna un immense livre empli de feuilles volantes triées qu’Oreste avait tenu l’année précédente. Elle rédigea un premier rapport, dans lequel elle consigna les projets d’études des Créateurs. Pour la plupart, elle écrivit simplement “sorts et potions ménagers”, et cacha les projets d’Octave et Olivier, ainsi que ceux de Vanille.
Qu’elle ne connaissait pas encore précisément, d’ailleurs.
Le soir du troisième jour, Vanille se rendit après le dîner dans la salle du Club avec la ferme intention d’y expliquer à Ambre le détail de ses projets, ainsi que cette histoire de lettre qui l’avait empêchée jusqu’ici de penser correctement. Elle prévoyait ensuite d’en discuter avec Leanne, à qui elle comptait ne plus rien cacher, et enfin, allait trouver un moment pour tout raconter à Alexandre.
Pendant ces quelques jours, ils ne s’étaient presque pas croisés. Il lui avait dit au détour d’un couloir qu’il avait énormément de travail scolaire et s’était étonné de la facilité des anciens Grands Créateurs à réussir à continuer de créer autant malgré les devoirs.
Vanille se dirigeait donc ce soir-là vers le Club lorsque, avant même d’atteindre la porte, Ambre débarqua en courant. Elle glissa sur le dallage en freinant devant Vanille.
Cette dernière s’étonna de voir son amie, d’habitude si calme, témoigner d’autant de vivacité. Son visage était empreint d’excitation.
- Vanille. Oublie tes plans. Il faut que je te montre quelque chose.
Et sans attendre de réponse, elle lui empoigna le poignet et repartit en courant d’où elle venait, tirant derrière elle une Vanille décontenancée. Claw, le chat suspecté de Fléreur, comme à son habitude, courait devant elles, bondissant de temps en temps l’air joyeux.
Elles sortirent du château alors que les premières étoiles apparaissaient dans le ciel. Il faisait de plus en plus sombre. Vanille suivait Ambre, qui ne semblait pas se soucier de l’interdiction de sortir après le coucher du soleil, et qui prit la direction des serres, le pas rapide. Elle les contourna et s’engouffra sur un chemin de vieilles pierres, encadré par des murets couverts de mousse. De temps en temps, elle se retournait vers Vanille, le visage impatient, vérifiant qu’elle était toujours derrière elle.
Au bout du chemin, une longue pente descendait jusqu’à la forêt interdite, dans laquelle on pouvait distinguer un bout de rivière qui nourrissait le lac noir. Cette partie du parc n’était pas visible depuis le château, cachée par quelques arbres hauts, autour du chemin qu’elles venaient d’emprunter.
D’ailleurs, le chemin s’arrêtait là, la pente n’était qu’herbe et celle-ci était trempée par la pluie, il était hors de question pour Vanille d’aller patauger là-bas.
Mais Ambre ne s’y aventura pas, elle s’accroupit au bout du chemin et plissa les yeux. Le chat sauta sur le muret et s’assit droit comme un I, le regard plongé vers la forêt. Vanille se posta près d’Ambre :
- Tu m’expliques ?
- Attend, ça va venir. Assied-toi.
Vanille obéit, et observa la forêt. Ses yeux s’habituaient à l’obscurité au fur et à mesure qu’elle s’imposait. Tout était calme, la pluie se contentait de menacer, il n’y avait presque pas de vent.
Au loin, la forêt semblait à Vanille être vivante. Pourtant, aucun son ne s’en échappait, à par celui, singulier, d’une chouette sauvage. Aucun mouvement non plus, elle ne distinga aucun animal, magique ou non, bouger dans cette forêt. Mais pourtant il lui semblait que les arbres discutaient. Que les feuilles dansaient, que la vie y était abondante et pleine de magie.
- Là, regarde, chuchota Ambre en sortant Vanille de sa contemplation.
Elle pointait du doigt un point vers la gauche. Quelqu’un descendait la pente, tranquillement.
- Qui est-ce ?
- Tu ne la reconnais pas ?
Vanille plissa des yeux et tenta de deviner à qui appartenait cette silhouette dans la nuit. Une petite silhouette fine, avec des cheveux courts.
- Annabelle ?
- Elle-même.
Les deux filles regardèrent leur amie s’approcher de la forêt interdite et s’arrêter à l’orée. Puis, d’un coup, elle sembla tomber à terre et sa silhouette se transforma en celle d’un gros animal à quatre patte, aux poils longs et au museau pointu. Un loup.
La bête s’étira, huma l’air et d’un coup, s’enfonça en courant entre les arbres.
- C’est… C’est… Annabelle est un loup-garou ? s’écria Vanille en se relevant.
Elle retomba immédiatement sur les fesses. Assise sur le sol, le cul trempé, Vanille vit son regard attiré par une lueur dans le ciel. La Lune s’était levée, mais elle n’était pas pleine. A peine avait-elle la forme d’un croissant.
- C’est ce que j’ai pensé aussi, au début, avoua Ambre, tranquillement. Je l’ai suivie le premier soir, après la réunion du Club. J’aurais pu lui demander où elle allait que je l’ai vue prendre un autre chemin que celui des Gryffondor, mais ma curiosité était trop forte. J’avais peur qu’elle ne me dise rien. Je l’ai suivie par le même chemin qu’on a pris pour venir. Puis je l’ai vu se transformer en une grosse bête et partir dans la forêt, comme ce soir. Elle est venue ici tous les soirs depuis, et je crois qu’elle ne rentre qu’au matin.
Elle regarda également la Lune :
- Annabelle n’est pas un Loup-Garou, c’est un Animagus. Je pense que c’est ce qu’elle faisait au Club, l’année dernière.
Les deux filles restèrent un moment près du muret, à contempler le bout de forêt où s’était aventurée leur amie.
- Tu crois qu’elle risque quelque chose ? demanda Vanille.
- Je ne pense pas. Les arbres, dans cette partie de la forêt, sont assez clairsemés. Et puis il y a la rivière, ce n’est pas un endroit dangereux. Je crois que c’est par là que le professeur Hagrid garde ses sombrals.
- Qu’est-ce qu’on fait ? On rentre ?
- J’aimerais bien lui parler, avoua Ambre. J’aimerais savoir comment elle a fait…
- On pourra lui en parler au Club.
- Si elle ne nous en a pas parlé, je pense que c’est parce qu’elle n’ose pas. Elle doit avoir peur qu’on le prenne mal, qu’on la dénonce… Après tout, c’est illégal.
- Oh, c’est vrai.
Vanille n’avait pas un seul instant pensé à ça. Annabelle, si elle ne se déclarait pas officiellement, devenait une sorcière illégale aux yeux de la loi, et risquait, au pire des cas, plusieurs mois d’emprisonnement. Le gouvernement avait ouvert des prisons au sein du ministère pour les moindre délits, pour les courtes peines, afin de ne pas trop utiliser Azkaban. Les Détraqueurs n’y travaillaient plus, mais l’endroit était sinistre et traumatisant.
Dans le doute, même si elle ne risquait qu’un emprisonnement au ministère, Vanille ne lui souhaitait pas cela et n’avait aucune intention de la dénoncer.
Au contraire, elle comptait bien la féliciter et essayer d’en savoir plus sur sa méthode.
- Comment tu veux la retrouver dans la forêt ? Tu m’as dit qu’elle ne revenait qu’au matin.
- J’y ai pensé. Ne t’inquiète pas, j’ai aussi peu envie que toi d’aller me balader dans cette forêt en pleine nuit. Je vais essayer quelque chose…
Elle sortit sa baguette et se concentra un instant devant les yeux étonnés de Vanille, qui se demandait quel genre de sortilège pouvait contacter Annabelle au beau milieu de cette forêt. Certainement pas un sortilège qu’elles avaient appris en cours. Ambre avait peut-être inventé un nouveau sortilège ? Mais pourquoi l’aurait-elle caché à Vanille ?
- Expecto Patronum !
Un patronus ? Le chat d’Ambre surgit de sa baguette. Vanille fut bouche bée : il ressemblait étonnamment à Claw. Les mêmes oreilles, la même queue au bout touffu. D’ailleurs, les deux chats s’approchèrent l’un de l’autre, intéressés. On aurait dit un jeu de miroir magique.
Ambre se pencha sur son patronus, la baguette toujours à la main.
- Veux-tu bien aller trouver Annabelle et lui demander de nous rejoindre ici ?
Vanille ignorait que l’on pouvait interagir ainsi avec les patronus. Pour elle, ils n’étaient là que pour protéger les sorciers des Détraqueurs, et disparaissaient lorsqu’on n’avait pas besoin d’eux après un court moment. Mais le chat - le patronus, pas le vrai - d’Ambre s’enroula autour de ses jambes et partit vers la forêt interdite. On ne voyait de lui qu’une trainée lumineuse, tant il allait vite.
- On peut communiquer avec nos patronus ?
- Oui. Je l’ai vu dans un bouquin, mais ce n’est pas au programme. C’est assez difficile comme sort, avoua Ambre.
- Jusqu’où peut-il aller ?
- Je ne crois pas qu’il y ait de limite, il peut passer à travers les objets matériels, lui-même n’est qu’un sortilège.
- Et à quoi as-tu pensé ? Comme souvenir heureux ?
Vanille savait qu’il s’agissait d’une question très intime, mais elle était très curieuse de savoir ce qui rendait Ambre heureuse. Celle-ci rougit d’un coup, et l’obscurité ne l’aida pas à s’en cacher. Elle regarda ailleurs sans dire un mot. Puis, devant le silence et le sourire insistant de Vanille, elle hésita, ouvrit la bouche et…
- Oh, regarde, ils sont déjà de retour !
Vanille admira la pirouette d’Ambre pour éviter de répondre et vit qu’en effet, une forme lumineuse trottinait dans leur direction, suivie d’une forme plus sombre à quatre patte et à la fourrure noire.
Arrivé à leur hauteur, le loup les regarda sans rien dire. Enfin, sans rien faire.
- Mais c’est dingue ! s’écria Vanille sans prévenir.
Ambre et Annabelle-loup sursautèrent. Vanille venait de réaliser la situation.
- C’est génial ! Tu peux te transformer en loup ! Et ce n’est pas de naissance !
Elle se pencha sur son amie et lui prit la tête - la gueule dans ses deux mains.
- Et en plus t’es trop mignonne en loup.
Annabelle-loup eut un brusque mouvement de recul et secoua la tête, comme si elle riait. Elle poussa sur ses pattes avant et se redressa, tout en se transformant à nouveau en sorcière. Sa queue touffue fut la dernière à disparaître. Claw lui sauta dans les bras.
- La dernière fois que tu m’as dit que j’étais mignonne tu m’as fait couper tes cheveux. D’ailleurs, comment tu as fait pour les faire repousser ?
- Ne change pas de sujet, gronda Vanille. Je veux tout savoir. Et Ambre aussi.
Annabelle les regarda une à une, et abdiqua. Elles se mirent d’accord pour discuter au Club, elles y seraient tranquilles. La pluie commençait à mettre ses menaces à exécution.
Elle mirent un certain temps à rentrer, il leur fallait éviter les patrouilles de préfets et le concierge, et arrivèrent enfin au Club, vide de tout membre. Elles étaient seules.
Elles s’assirent sur les coussins qui servaient d'amortissage aux sortilèges de duels qu’Ambre testait, et Annabelle se lança dans des explications.
Elle avait eu cette envie d’être un animagus depuis toujours. En entrant dans le Club, elle s’était plongée dans les recherches sur le sujet, sans vouloir assister de Créateur. Elle savait où elle allait.
- Les livres parlent d’une notion que le folklore moldu connaît sans trop y croire : l’animal-totem. C’est beaucoup plus puissant qu’on ne le pense. Chaque personne, du moins chaque sorcier possède une connexion avec un animal. Et ce n’est pas forcément par rapport aux qualités de cet animal - un loup sauvage, un oiseau libre, un ours violent… Regardez, est-ce que vous me voyez comme quelqu’un de sauvage, sage, à vivre en meute ? Je ne ferais pas de mal à une mouche, la violence me répugne.
Elle croisa le regard de Vanille et elles pensèrent instantanément à Jules. Il était partout.
- Votre animal-totem, c’est vous, il est en vous. C’est votre patronus, votre forme potentielle d’animagus, quand vous en croisez un vous le remarquez. Plus vous en avez conscience, plus il est facile de devenir un animagus.
Elle caressait Claw qui ronronnait sur un oreiller.
- Etrangement, il n’y a pas de créatures magiques dans les animaux-totem. Ce ne sont que des animaux connus par les moldus. Enfin, si, on peut trouver des licornes ou des dragons, mais ces animaux sont connus par les moldus, ils sont juste persuadés qu’ils n’existent pas. Pas comme les botrucs ou les veracrasses.
Elle réfléchit un instant avant de poursuivre :
- Quand vous avez pris conscience de tout ça, vous êtes plus fort aux côté de votre animal-totem. Pas forcément plus puissant, mais plus stable, plus grand. Plus… mature peut-être. Plus sûr de vous. Un lien, qui existait déjà sans que vous ne le sachiez, se révèle entre vous et vous pouvez comprendre, parfois interagir avec lui. J’ai étudié deux grands hommes, qui avaient leurs animaux près d’eux tout le temps. Grands, mais pas forcément bons. Dumbledore et Voldemort. Ils avaient chacun leur animal, le phoenix et le serpent. Et ils ont fait des choses… terribles.
- C’est un individu en particulier ? Ou n’importe quel animal de cette espèce ?
- Je dirais un individu en particulier. Par exemple, Ambre, tu avais déjà eu des animaux chez toi il me semble ? Tu m’avais dit une fois que ta famille possédait des chats.
- Oui, et alors ?
- Tu ne vois pas ? C’est pourtant évident, sourit-elle. Claw est ton animal-totem.
Le chat miaula d’aise d’être au centre de la conversation.
- Mais Claw n’est pas un chat, contra Vanille. C’est un Fléreur.
- Demi-Fléreur, contra Annabelle.
Ambre prit son chat et le porta à la hauteur de son visage. Il lui donna des petits coups de patte sur le nez, joueur.
- Et il le sait ?
- Il se sent connecté à toi. Même s’il s’agissait d’un simple chat, moins perspicace et moins malin qu’un demi-Fléreur, il le sentirait.
- Tu as également étudié les Patronus alors ? demanda Vanille.
- Les sorciers connaissent les Patronus. Ils savent ce qu’ils sont - une force positive, une projection de l’espoir, du bonheur, du désir de vivre. Ils ne peuvent pas ressentir de désespoir, c’est en cela qu’ils sont utilisés contre les Détraqueurs, qui s’en nourrissent, en nous(**). Mais ils n’ont que peu été étudiés en temps que projection de notre propre magie. La force du patronus reflète ce qu’il y a en nous, reflète notre animal-totem.
- Tu as trouvé le tien ? s’enquérit Ambre. Tu as trouvé un loup… ton loup ?
- Non. C’est une phénomène rare que de réussir à le trouver. Tu as beaucoup de chance.
- C’est Claw qui m’a trouvée.
Le demi-Fléreur continuait à profiter de l’attention qu’il portait en jouant innocemment au milieu des trois filles.
- Vous n’allez pas me dénoncer ?
- Bien sûr que non ! s’exclama Vanille, outrée. Tu peux nous faire confiance.
- Je sais. Mais je ne savais pas ce que vous pensiez de tout ce qui pouvait être… illégal.
Il y eut un silence pendant lequel Annabelle sembla réfléchir.
- Vous savez, certains sorciers deviennent plus facilement des Animagi. Par exemple, ceux qui ont des facilités à invoquer des patronus puissants. Ou ceux qui sont en présence de leur animal-totem.
Vanille et Ambre se regardèrent.
- Je ne suis pas certaine de vouloir être un Animagus. Mais si l’envie me prend, je te demanderai des conseils, affirma Ambre.
Vanille acquiesça. Elle non plus ne se sentait pas de se transformer en oiseau des mers, surtout aussi loin de cette dernière. Elle était certaine que même sous cette forme, elle aurait le mal de l’air.
Le lendemain promettait d’être une journée importante : la réunion de présentation du Club aux cinquième année était prévue dans la soirée. Les membres devaient se réunir à midi pour s’organiser.
Quand Vanille croisa Annabelle au petit-déjeuner, elle se rappela un détail auquel elle n’avait pas songé la veille.
Et il était pourtant de taille.
- J’ai rencontré des personnes cet été avec qui tu aimerais certainement discuter, lui dit-elle après l’avoir rejointe à la table des Gryffondor. Ce sont des sorciers d’une autre culture magique qui ont plus de facilité à devenir des Animagi. Ils voient la chose d’une autre manière que nous, que les Européens. Si tu veux, je peux leur demander s’il acceptent d’échanger avec toi.
Annabelle accepta et la remercia chaleureusement. Comme elle avait du temps avant son premier cours, Vanille sortit une plume et un parchemin, s’installa près de la volière sur des bancs en pierre pour rédiger sa lettre.
Elle hésita un moment sur la forme. Après tout, elle écrivait à quelqu’un d’important.
“Mr Kahindi.
J’espère que cette lettre vous trouvera, vous, Penelope et vos enfants, en bonne santé.
Je n’aurais de cesse de vous remercier pour tout ce que vous m’avez appris cet été. J’espère que votre rencontre avec Oreste vous a été bénéfique à vous comme à elle. La magie sans baguette est et restera pour moi incroyable, même après vous avoir vus l’exécuter avec autant de facilité.
Mais c’est un autre sujet qui m’amène à vous écrire.
Comme vous l’avez si bien deviné, je fais partie du Club des Créateurs, et une des membres m’a hier expliqué la nature de ses projets : les animaux-totem, les patronus et les Animagi. Etant vous-même un Animagus, ainsi que votre famille et la plupart des sorciers autour de vous, j’aimerais lui proposer d’entrer en contact avec vous afin qu’elle puisse affiner ses recherches.
C’est quelqu’un de sérieux, qui s’intéresse sincèrement à ces questions.
Mais j’ai également une mauvaise nouvelle à vous apprendre. J’ai tenté de parler de votre demande à votre fils, mais il n’a pas voulu l’entendre. Je suis désolée, mais je ne souhaite pas me mêler de vos histoires plus que je ne l’ai déjà fait. Malheureusement pour votre demande, malgré le fait que j’approuve totalement cette idée, et qu’elle concerne bien plus les élèves des écoles que les relations que vous entretenez avec votre fils, je ne peux pas créer de lien sans que cela passe par vous deux.
Néanmoins, j’évoquerais votre école et votre demande lorsque je rencontrerai les membres du Club des autres écoles, même si je ne sais pas encore dans quelles conditions cela se déroulera.
J’espère que vous comprenez. J’espère également que cela n'influera pas en mal votre réponse à ma propre demande.
Cordialement, Vanille Ocean.”
Satisfaite de cette lettre, elle la porta à sa chouette pour qu’elle la délivre au bureau de poste de Pré-au-Lard, là où des chouettes long courrier sont capables de voler jusqu’en Afrique.
A la fin de la semaine s’organisa la cérémonie de présentation aux cinquième année. Malgré les réticences de Vanille, elle se déroula - presque - exactement comme elle l’avait vécue l’année précédente.
La salle à côté de celle du Club avait été aménagée, avec l’estrade et les rangées de chaises. Alexandre, Iris et Florent firent leur entrée en passant au travers des cinquième années qui attendaient devant ladite salle. Ils rejoignirent Vanille et les autres membres qui étaient debout sur l’estrade. Ils portaient tous leurs cravate et insigne, cachés par leur cape d’hiver. Vanille avait trop chaud sous cette cape et, en regardant les élèves entrer et s’asseoir, excités, ressentit un profond ennui. Autour d’elle, les autres membres semblaient satisfaits, Octave et Olivier étaient même plutôt excités et chuchotaient à toute vitesse en repérant certains élèves qui avaient, selon la potion, une aura magique puissante.
Ambre avait repris la mission d’Oreste. Exactement comme l’année précédente, elle rédigea le parchemin enchanté sur lequel devaient signer les membres, afin que leurs paroles restent incomprises au sujet du Club lorsqu’ils tenteraient d’en parler à d’autres. Vanille comprit qu’encore une fois, c’était une mise en scène. Ambre aurait très bien pu écrire ce parchemin plus tôt. Alexandre avait certainement dû lui demander, lorsqu’elle s’était proposée pour remplacer Oreste et être chargée des relations avec le ministère, d’écrire ce fameux parchemin en leur présence, pour qu’ils se demandent dès le départ ce qui pouvait se tramer.
Mystère, spectacle et prétention : Vanille se retrouva encore une fois dans cette ambiance détestable qui l’avait fait rejeter ce Club au début. Et même si elle savait que tout cela était faux, surjoué, elle ne pouvait s’empêcher de se demander ce qu’elle faisait ici, sur cette estrade, à regarder s’installer des cinquième année curieux, prête à leur vendre du rêve.
La plupart semblaient sincèrement intéressés, et même, aucun n’avait l’air dérangé. Alexandre commença à parler, et il avait le même discours que Jules, pas au mot près, mais l’intention était la même. Attiser la curiosité, insister sur la difficulté d’intégrer le Club, sur son prestige, sur son secret. Aucun des élèves devant elle ne semblait agacé, et elle se rendit compte de l’impression qu’elle avait dû donner l’année précédente. Alexandre lui avait dit qu’elle avait eu l’air blasé. Et en effet, si elle s’était retrouvée au milieu de la foule qui se tenait devant elle avec un air blasé, elle aurait fait tâche.
Peut-être avait-elle tort de rejeter ainsi ces méthodes de présentation. Peut-être le Club des Créateurs méritait-il d’être introduit ainsi. Il n’y avait aucun mensonge, hormis celui par omission qui lui restait au travers de la gorge de ne pas évoquer leur ancien Maître Créateur. Toutes les promesses étaient vraies, réalisables, les membres du Club étaient en contact avec des membres du ministère et en faire partie était un pas dans la haute société sorcière sans passer par les premières marches. C’était aussi vrai que la création de sortilèges et de potion était une chose incroyable, et même si elle n’en avait pas encore eu l’occasion dans ses propres recherches, elle avait vu les résultats. Oreste et Morgane qui avaient créé ce sortilège de révélation, Alexandre qui avait créé et vendu des potions, et même Ambre, vers la fin de l’année, avait réussi à inventer de petits sorts de duel.
D’ailleurs, Vanille avait décidé d’accepter sa proposition. Elle allait essayer ce fameux Club de Duels. Ambre avait été enjouée d’entendre sa réponse, et lui avait donné rendez-vous un soir prochain pour lui faire découvrir les joies de se battre avec sa baguette. Cette phrase avait un peu fait froid dans le dos à Vanille, qui s’était retrouvée une seule fois dans sa vie à se battre.
“Tu radotes, tu tournes en rond, tu te répètes.”
“Je crois que je suis traumatisée. Il y a de quoi.”
“Tu vas t’en remettre.”
Oui, elle s’en remettrait, évidemment, elle s’en remettrait. Elle le savait tellement qu’elle se le répétait à chaque fois qu’elle pensait à Jules et à Morgane. A chaque fois. Tous les jours.
Rentrer à Poudlard, ou plutôt retourner au Club, ç’avait été pour elle à la fois tourner le couteau dans la plaie et y passer un baume cicatrisant. Car il fallait bien donner cela au Club, elle y avait trouvé une famille. Et elle s’en rendait compte de plus en plus chaque jour, des liens qui l’unissaient avec les membres du Club, même ceux en dehors de Poudlard.
Quand Alexandre prononça la phrase “Nous sommes le Club des Créateurs”, selon le plan, elle déboutonna sa cape et la laisse tomber derrière elle, dégainant ainsi son insigne dorée et sa cravate violette. Malgré tout, elle n’arriva pas à avoir cet air satisfait et conquérant qu’il lui avait été proposé d’afficher. Elle regarda autour d’elle, les cinquième année étaient bluffés, les yeux ronds, et les membres du Club ravis. Et si ce n’est pas de la fierté qui se lu dans les yeux de Vanille, ce fut certainement de l’amour. Elle ne put s’empêcher de laisser fleurir un sourire sur ses joues en voyant autour d’elle ses amis et ce qu’ils allaient accomplir ensemble. Enfin, pas ensemble, mais les uns près des autres au moins.
C’est alors qu’elle remarqua, pour la première fois, quelque chose qu’elle n’aurait pas dû remarquer. Nathan était absent. Il était étrange qu’il ne soit pas là, d’une part, mais surtout, et de cela seule Vanille pouvait en comprendre l’anormalité (si l’on pouvait qualifier Nathan de normal, disons plutôt, inhabituel), elle remarquait son absence. D’habitude, soit il était là et on l’ignorait, ou bien il acceptait d’être vu (et donc on remarquait sa présence), soit il n’était pas là, et on ne pensait pas à lui. C’était ainsi que son pouvoir fonctionnait. Il lui arrivait de l’évoquer dans ses pensées, mais ce n’était jamais flagrant, jamais intense. Là, il était clairement présent dans son esprit et absent de la pièce. Si cela avait été n’importe qui d’autre, soit, elle se serait simplement étonné de son absence en cette cérémonie de présentation. Ce qu’elle faisait aussi, au passage (quoique, était-il vraiment nécessaire pour lui de venir ici sans être vu ?). Mais Nathan n’était pas n’importe qui, c’était quelqu’un qui avait décidé de faire en sorte qu’on ne pense pas à lui. Qu’on le laisse tranquille, jusqu’à ce qu’il décide qu’on le remarque. Alors, à moins qu’il n’ait agit à distance de là où il était, ou que cela se trouve, soit son pouvoir n’était plus aussi efficace qu’avant, mais dans ce cas les autres membres auraient remarqué son absence, soit il était moins actif sur Vanille. Dans le doute, elle fouilla la salle des yeux, derrière yeux, dans la foule des cinquième année, mais elle savait qu’elle ne l’y trouverait pas.
Elle sursauta presque en entendant les chaises racler au sol, la réunion était terminée.
- Est-ce qu’il aurait fallu que je te ramène à la réalité, à la Leanne, avec un coup de coude bien placé ? demanda Ambre en roulant son parchemin sans la regarder.
On pouvait deviner son sourire, caché par ses cheveux noirs qui lui chatouillaient le bas du visage.
- J’ai vraiment eu l’air absente ? J’espère que ça ne va pas être trop mal pris.
- Tant pis. Tant pis pour eux. On ne va pas te changer pour avoir plus de Novices dans notre Club, lui dit Ambre avec un clin d’oeil.
Vanille la remercia et, en quittant la pièce, décida qu’il était enfin temps de faire ce qu’elle aurait dû faire depuis longtemps.
Les deux amies prirent le plus long chemin possible pour rentrer à Serdaigle, et restèrent un moment dans leur salle commune. Vanille prit tout son temps pour pouvoir lui expliquer pourquoi elle ne lui avait pas encore parlé de la lettre de menace.
End Notes:
(*)Vous pouvez retrouver ce chat dans une autre de mes fictions : Mon âme et la sienne. Oui je me fais de la pub ! Promis l'histoire est sympa ;)
(**)Remus Lupin, HP3
Merci d'avoir lu !
Petit jeu : saurez-vous retrouver de quel film est tiré le titre du chapitre ? En récompense à ceux qui trouvent, vous aurez droit à une anecdote inédite sur le personnage de votre choix !
Dites-moi donc en review ce que vous avez pensé de ce chapitre ! La semaine prochaine, on se plongera enfin dans la recherche... Eh oui, Vanille va enfin se mettre au travail ! C'est pas trop tôt !
A la semaine prochaine !
*T'as publié sans moi ?
Bah t'es loin, t'as pas internet, et c'est mercredi.
*Bon. La prochaine fois, c'est mon tour.
On n'a jamais dit ça !
*Trop tard, je suis partie, j'ai plus internet !
...
Contrôle F magique by Deanna
Author's Notes:
Bonsoir, bienvenue à notre vingt-sixième réunion du Club des Créateurs.
Qui dorénavant se déroulera le samedi, n'en déplaise aux deux du fond !
Aujourd'hui, nous retrouvons un personnage qui, me semble-t-il, est particulièrement apprécié du grand public. Eh non, il ne s'agit pas d'Enguerrand (qui ?), ni d'Alexandre (qui à mon grand regret n'a pas un succès fou). Chers lecteurs, préparez votre carte de membre du Club de la Team Nathan !
Bonne lecture :)
Le lendemain de la réunion de présentation, Vanille se leva très tôt. Soulagée de s’être libérée d’un poids en racontant à Ambre, puis à Leanne, la vérité sur ses recherches et sur le frein qu’était cette lettre de menace, et encouragée à continuer malgré tout sans forcément le crier sous les toits, elle trouvait en elle une motivation intense.
“Mystères de la magie, me voilà.”
Sans prendre le temps de descendre manger, elle se rendit directement au Club. Son esprit bouillonnait d’idées et de pistes, floues, certes, mais qui ne demandaient qu’à être creusées.
La pièce était vide, mais particulièrement accueillante, ce qu’elle ne s’expliquait pas. Elle s’installa sur les bureaux à gauche de la table ronde centrale, étala ses notes et commença à fouiller dans les étagères à la recherches de livres.
Elle avait décidé de commencer à étudier la magie des créatures magiques. Sa première cible : les Elfes de maison. Elle sortit tous les traités parlant de créatures magiques qu’elle pouvait trouver et les empila sur la table. Puis, d’un sortilège pratique qu’elle avait trouvé dans un livre, copia toutes les pages qui concernaient les Elfes. Elle les lu en diagonale : la plupart répétaient inlassablement les mêmes informations : la morphologie, leur reproduction, leur état de servitude. D’ailleurs, cet état n’était jamais questionné : les Elfes obéissait, point. Les livres se contentaient de décrire les effets de cette servitude, leur punition, leur obéissance, et la manière de les libérer. Malheureusement, aucune information ne concernait leur magie.
Plongée dans un énième livre, Vanille commença à se demander si elle devrait changer d’approche. Les informations étaient redondantes. Elle se leva et chercha l’inspiration dans les rayons des étagères, quand un mouvement attira son attention près du mur du fond. Une jambre dépassait de l’angle des étagères.
Quelqu’un était assis contre le mur.
Persuadée d’être seule lorsqu’elle était arrivée, Vanille n’avait vu personne entrer et commença à rougir en se rappelant avoir marmonné toute seule pendant près de deux heures. Elle s’approcha pour voir de qui il s’agissait.
C’était Nathan. Assis par terre, entouré de livres ouverts, il lisait intensément un énorme ouvrage noir. Vanille ne comprit pas vraiment. Pourquoi avait-il arrêté d’un coup son pouvoir d’isolement ? Car c’était certainement pour cela qu’elle ne l’avait pas remarqué jusqu’ici.
- Nathan ?
Il sursauta et leva son visage vers elle. Il afficha un air étonné, et Vanille eut la surprise de voir ses yeux rouges et ses cils humides.
- Vanille ? Comment est-ce que…
Il ne termina pas sa phrase et Vanille comprit ce qu’il s’apprêtait à faire.
- Attend ! Attend.
Elle s’assit près de lui. Le voir ainsi l’attrista profondément. Elle n’avait jamais vu Nathan exprimer ses émotions d’une telle manière. Elle l’avait déjà vu en colère, fâché, amusé. Mais jamais triste. Elle se doutait qu’il s’isolait dans ces moments-là.
Il n’avait pas l’air de savoir quoi dire. Comme prit en flagrant délit, il essuya prestement ses yeux et afficha un visage neutre. Ce masque semblait tellement facile à porter. Il ressemblait maintenant au garçon qu’elle avait l’habitude de voir. Mais quelque chose avait changé dans son regard. Un peu comme… de la peur.
- Qu’est-ce que tu cherches dans ces livres ? demanda-t-elle en espérant ne pas le brusquer.
Mais il semblait sur la défensive. Il haussa les épaules :
- Je lis, c’est tout.
- Tu as pourtant l’air de chercher quelque chose. Je croyais que tu ne faisais pas de recherches ? Que tu ne faisais que “nous regarder créer” ?
- Comment tu as fait pour me voir ? contra Nathan.
- Je ne sais pas, tu n’as pas fait exprès, pour que je vienne te parler ?
- Non. Si je voulais te parler, j’aurais attendu… un autre moment.
Il avait une voix sèche. Faisait-il semblant d’être en colère pour la faire partir ? Ou était-il vraiment contrarié d’avoir été vu ainsi ?
- Excuse-moi d’être arrivée comme ça alors. Mais puisque je suis là, est-ce que tu veux discuter ?
- Je ne comprends pas comment tu as fait pour me voir, insista-t-il.
- Peut-être qu’au fond de toi tu voulais parler, suggéra-t-elle. On est amis, non ? Je peux être là pour toi si tu veux.
Il sembla presque étonné de la dernière phrase de Vanille. Il n’osait pas lever les yeux vers elle, braqué sur la couverture du livre qu’il tenait fermement dans les mains.
- Tu n’es pas obligé de rester seul, tu sais.
Vanille réalisait combien il devait être seul. Il s’isolait constament, elle ne l’avait jamais vu parler avec qui que ce soit - même s’il pouvait très bien le faire sans qu’elle ne s’en aperçoive. Elle s’en était bien rendu compte dans le train. Nathan cherchait la compagnie, mais restait dans sa bulle. Il devait en être ainsi depuis des années.
Lorsqu’il lui avait parlé de ses pouvoirs, il avait évoqué son frère, et elle se demandait quelles étaient ses relations avec lui. Etait-il la seule personne avec qui il parlait réellement ? Si c’était le cas, il devait se sentir bien seul à Poudlard.
Puis il s’était intéressé et ouvert à Vanille, et elle ne souhaitait pas le voir continuer dans cette solitude.
Comprenant qu’il n’oserait pas parler, elle se dit que d’autres moyens de communication lui étaient certainement plus facile à utiliser, qu’il se laisserait certainement plus facilement aller en n’utilisant pas des mots, mais des pensées. Elle hésita quelques secondes et approcha son bras du sien. Quand leur peaux se touchèrent, ils furent pris d’un frisson commun, et il leva d’un coup son regard sur elle, surprit de la voir ainsi franchir ses barrières.
“C’est très impoli ce que tu viens de faire.”
“Oh, c’est quand même particulier, peut-être même unique ton pouvoir. Je ne peux pas en connaître toutes les règles de l’étiquette.”
Il eut un air amusé et triste.
“C’est ce que tu cherches n’est-ce pas ? Des informations sur tes pouvoir ?”
“C’est ce que je fais depuis que je suis arrivé au Club. Avant ça, j’ai retourné toute la réserve de la bibliothèque.”
“Et tu as des résultats ?”
“Non. Rien.”
Malgré tout, Vanille était contente de le voir ainsi s’ouvrir. Elle avait eu raison : il était bien plus avare en mot qu’en pensées.
“Tu as lu beaucoup de livres d’ici ?”
“En vérité, je les ai déjà tous lus. Comme je n’ai aucun indice, je recommence. Une deuxième fois. Au cas où j’aurais manqué quelque chose.”
Elle le dévisagea et observa les étagères de livres du Club : elle étaient pleines à craquer, et même débordantes, des piles de livres s’entassaient au sol et sur des chaises. Il était d’ailleurs grand temps de faire un tri dans ce bazar.
“Oui, ça fait beaucoup de livres.”
“ Alors tu ne sais rien sur tes pouvoirs ? Tu as demandé à des professeurs, à ta famille ?”
“Mes parents m’ont adopté, ils sont moldus. Mon frère aussi. Quant aux professeurs, je n’ai jamais osé trop leur demander. Je me doute que la majorité de leurs connaissances peuvent être retrouvées dans les livres.”
Vanille sentit une vague de découragement l’envahir. Nathan voulait connaître ses origines, et comprendre ses pouvoirs. Elle compatissait, même si elle-même n’avait jamais vécu cela. Elle se projettait d’ailleurs particulièrement bien, et c’était sans doute parce qu’ils partageaient à ce moment-là plus que de simples pensées.
“En revanche, je voudrais savoir comment tu as fait pour passer mes barrières. Personne ne peut.”
“Comme je t’ai dit, peut-être que tu voulais…”
“Est-ce que tu veux bien que je réessaie ? S’il te plaît ?”
Vanille fit la moue, un peu contrariée qu’il utilise ce prétexte pour qu’elle le laisse tranquille. Soit. Il avait certainement besoin de temps pour lui faire confiance.
“Ce n’est pas ça, contra-t-il, j’ai vraiment besoin de savoir… Si jamais ça ne marche plus…”
- Ne t’inquiète pas. Je te laisse.
Elle se leva, un peu plus brusquement que prévu, et retourna à sa table. Elle était vexée d’avoir été ainsi envoyée promener, mais se ravisa : Nathan n’avait ni une vie ni un tempérament simple. Il était certainement bien plus profond et complexe qu’il ne lui laissait parraître, elle le sentait lorsqu’ils communiquaient.
Vanille baissa les yeux sur ses notes et reprit le livre sur lequel elle s’était arrêtée : elle décida de finir ceux qui étaient sur la table avant de tenter de changer d’angle d’attaque.
Pendant qu’elle lisait et recopiait les pages des livres, elle se demanda comment trouver dans cet amas de livres les informations qu’elle désirait. Elle ne pouvait décemment pas ouvrir chaque livre dans l’espoir d’y trouver ce qu’elle cherchait.
- Pas comme moi quoi.
Elle sursauta en voyant Nathan s’assoir près d’elle. Un partout, réalisa-t-elle.
- Ca a marché ? Je ne savais pas si tu m’ignorais volontairement ou pas.
- Oui. J’avais oublié ta présence.
Il s’intéressa aux livres qu’elle recopiait :
- Ce sont tes recherches ? Tu étudies les Elfes ?
Une idée vint dans l’esprit de Vanille, immédiatement suivie d’un doute, puis d’un déni.
Nathan eut un petit rire.
- Tu es tellement expressive.
- Tu sais à quoi j’ai pensé ?
- Non. Je t’ai juste vu faire trois têtes consécutives.
Vanille hésita une seconde - non, Nathan n’était certainement pas l’auteur de la lettre. Quel intérêt aurait-il à écrire cela ? Et puis dans ce cas, ses cachotterie sur la nature de ses travaux étaient bien inutiles.
Alors elle se décida.
- Est-ce que tu veux m’aider dans mes recherches ? Cela pourrait te changer les idées, ou au contraire, t’aider à en avoir de nouvelles. Et j’avancerai plus vite comme ça, moi aussi.
Il paru un peu étonné de sa proposition mais n’hésita pas :
- Je veux bien.
- Alors je t’explique tout.
Avoir Nathan avec elle aida Vanille au moins sur un point, en dehors du fait d’avancer plus vite : ils pouvaient être tranquilles. Quand, dans les heures et les jours qui suivirent, ils travaillaient dans les livres au Club, elle n’avait plus à se soucier du fait de cacher ses recherches. Ils communiquaient par contact, et pour l’instant ne faisaient que lire, et il était facile pour Nathan d’user ses pouvoir sur elle, car, en dehors du matin, il y avait toujours plusieurs personnes dans la salle.
Au début de la semaine suivante, Vanille accompagna Ambre au Club des Duels.
Elle en fut ravie. Les séances étaient séparées en deux heures : la première consistait à apprendre et s’entraîner à de nouveaux sorts sur des mannequins en bois identiques à celui du Club (qui provenait certainement de là), et pendant la seconde, il y avait les duels.
Ambre prit Vanille sous son aile, et était une excellente professeure. Vanille apprenait vite les nouveaux sortilèges. Privilégiée de son statut de membre du Club des Créateurs, Vanille eut le droit d’apprendre les sorts que David et Ambre avaient créés, que cette dernière gardait jalousement face aux autres.
Vanille ressentait une sorte d’exhaltation au fait de se battre, contrairement à ce qu’elle avait pu penser au départ. Le fait de ne rien risquer enlevait tout stress. Les sorts n’étaient en général pas violent, et la moindre blessure était immédiatement prise en charge, il y avait toujours au moins deux personnes par duel qui observaient et agissaient en cas de coup trop violent. Vanille apprit par la même occasion à stopper une hémoragie faible, à soigner les bleus, les yeux au beurre noir, et les entorses. Elle apprit aussi qu’on ne s’excusait pas, après un duel. Sinon, on n’en finissait pas.
Elle se battait principalement avec Ambre, qui était vive et féroce en combat. Malgré le fait que Vanille débute, elle ne la ménageait pas et ne retenait aucun de ses coups. D’ailleurs, les premières séances, Vanille perdit tous ses combats. Cela ne la décourageait pas. Au contraire, elle se sentait habitée d’une force à chaque fois qu’elle tombait à terre qui l’aidait à se relever, et qui, à chaque combat, la rapprochait de la victoire. Petit à petit, les sortilèges qu’elle apprenait devenaient spontanés au bout de sa baguette, et elle lançait de moins en moins de sorts du bouclier.
Le plus difficile était qu’Ambre, comme on s’y attendait, n’utilisait que des informulés. Son visage n’affichait rien qui puisse aider à prédire ses attaques. Elle était clairement la meilleure du Club de Duels, et grâce à elle, Vanille prit en force et en confiance. Ambre était également la seule à ne pas utiliser les espaces prévus (de longues scènes, trop étroites à son goût), mais se battait au sol, car elle pouvait ainsi bouger bien plus facilement. Elle utilisait ainsi tout l’espace autour d’elle pour se courber, tourner, sauter et même s’écraser au sol parfois. C’était un exercice physique et magique éprouvant que de se battre avec elle, et d’essayer de la suivre dans ses mouvements. Vanille adorait cela.
Son emploi du temps était chargé, entre les cours, les deux Clubs, et les révisions. Heureusement qu’elle n’avait pas de diplôme à la fin de l’année.
Pour accélérer leurs recherches, Nathan apprit à Vanille un sortilège bien utile.
- Tu vas prononcer la formule et un mot, le mot que tu souhaite trouver, et de ta baguette tu feras deux tours dans le sens anti-horaire, en avançant ton bras vers les livres.
Elle essaya avec le mot Elfe, et plusieurs livres se mirent à briller une seconde. Ainsi, ils purent en récupérer plusieurs. Le sortilège fonctionnait aussi pour touver la page.
Un soir, au détour d’un livre, alors que l’esprit de Vanille vagabondait en observant distraitement Alexandre qui touillait une potion (non sans lui lancer quelques regards), une idée lui traversa l’esprit.
- Je suis bête non ?
- Pourquoi ? demanda Nathan, qui rédigeait un devoir (il travaillait souvent au Club. Ce garçon avait décidément besoin de compagnie.)
- Parce que je comprends toujours ce qu’il est logique de faire après des heures, voir des jours. On peut aller directement poser des questions aux Elfes de Poudlard.
Nathan referma d’un coup sec son livre, et dit en rangeant sa plume :
- C’est parti.
- Quoi ? Comme ça ?
- Pourquoi pas ? On n’avance plus trop. Il est encore tôt, le dîner est fini, et on n’a pas de devoirs pour demain. Et puis c’est en effet ce qu’il est logique de faire.
- Alors je suis vraiment bête ? demanda-t-elle avec un faux regard désespéré en rangeant elle aussi ses affaires.
- Demande-t-elle en rangeant ses Optimals dans son sac. Tu as des idées, au moins.
Vanille alla souhaiter la bonne nuit à Alexandre, et Nathan partit devant lorsqu’elle l’embrassa sur la pointe des pieds.
- Comment avancent tes projets ? demanda Alexandre.
- Doucement.
Elle avait prit le parti de tout lui raconter - la lettre, la magie, les créatures magiques. Officiellement, pour le ministère, elle travaillait avec lui sur ses potions. En revanche, elle ne lui avait pas dit qu’elle travaillait avec Nathan, à la demande de ce dernier. Elle savait qu’il n’aimait pas trop Alexandre - il le lui avait dit la première fois qu’ils s’étaient parlés - et ne comptait pas choisir entre ses amitiés et son couple. Nathan se débrouillait pour ne pas se faire remarquer, et si jamais Alexandre le lui demandait, elle ne comptait pas le lui cacher.
Elle voyait Alexandre à chaque fois qu’il venait au Club, et parfois le croisait à la bibliothèque. Ils n’étaient pas ce genre de couple à se donner des rendez-vous, à se tenir la main dans les couloirs, à s’embrasser au milieu des foules. Ils prenaient leur temps. De toute manière, les ASPICs d’Alexandre limitaient ses temps libres. Alors pour passer du temps ensemble, ils se raccompagnaient mutuellement parfois le soir jusqu’à leurs salles communes respectives, n’empruntant certainement pas les chemins les plus courts.
Elle aimait ces petits moments, et aimait la manière dont se déroulaient les choses. C’était simple, ils ne se forçaient pas, étaient la plupart du temps sur la même longueur d’onde. Ils apprenaient à se connaître, à s’apprécier, à se faire confiance. Elle lui parlait de sa famille, son frère, du Club de Duels, de ses projets, de ses histoires. Lui de sa mère, de ses potions, de ses ambitions, des ASPICs qui lui prenaient la tête, de ce qu’il aimait, de ses rêves. Ils n’évoquèrent jamais le sujet tabou, le seul, le père d’Alexandre. Vanille continuait de se demander quels avaient été les événements de sa vie qui avaient pu pousser Alexandre à haïr, et même renier ainsi son passé, sa famille. Elle savait que lorsque qu’il serait prêt, il lui raconterait. A aucun moment elle n’essayait de le forcer. La subtilité n’était pas son fort, alors elle prenait son mal en patience et savourait chaque détail qu’elle pouvait apprendre de lui.
Comme cette petite marque de naissance dans le creu de son cou qu’elle aimait retrouver et recouvrir de ses lèvres.
Mais ce soir-là, Vanille n’allait pas voler du temps de sommeil à Alexandre, et lui apprit qu’elle comptait retrouver les Elfes dans les cuisines. Il l’accusa de vouloir chipper les restes de pâtisserie et, en quittant le Club, lui promit de lui en ramener un le lendemain.
Nathan l’attendait patiemment dans le couloir, et se rendirent ensemble dans les sous-sols du château.
Comme à leur habitude, les Elfes furent ravis de voir débarquer des élèves. Vanille ne sut dire s’ils étaient réellement ravis, ou s’ils feintaient ce bonheur. Après avoir autant lu sur leur servitude, elle se sentait particulièrement mal à l’aise à côté d’eux.
- Bonsoir. Oh, non merci, refusa-t-elle en voyant des plateaux de pattiserie arriver en courant.
Elle ne tint pas deux minutes et finit assise face à Nathan avec des éclairs au caramel, un thé et des parts de tarte aux pommes sur une petite table. Nathan se moquait ouvertement d’elle et de son incapacité à refuser avec un sourire moqueur. Sourire qui se figea quand il se vit être servit de divers confiseries et fondants au chocolat.
Lorsqu’ils furent servis (les Elfes pouvaient être pires qu’une mère nourrissant ses enfants), Vanille leur demanda poliment si, lorsqu’ils auraient fini de travailler, elle pouvait discuter d’un sujet important avec l’un d’entre eux.
Evidemment, plusieurs arrêtèrent directement leur activité pour venir la voir, demander ce qu’ils pouvaient faire pour l’aider.
- Comment vous appelez-vous ? demanda Vanille.
Nathan sembla surprit de la voir commencer ainsi. Personne ne demandait leur nom aux Elfes. Ceux-ci se regardèrent, un peu perdus, s’étonnèrent d’être ainsi traités. Ils donnèrent prudemment, timidement leurs noms (Sako, Ama, Enwin et Pram), et Vanille s’efforça de les retenir pour pouvoir s’addresser à eux directement.
- Alors voilà, j’aimerais vous demander comment est-ce que vous utilisez votre magie. Comment ça marche, quelles sont vos actes, vos limites…
- Est-ce que vous nous demandez cela parce que nous n’avons pas de baguette ? osa Ama, qui se recroquevilla de timidité quand Vanille se tourna vers elle.
- Non, Ama, c’est parce que je m’intéresse à votre magie et à celle de toutes les créatures magiques. J’ai envie de comprendre comment vous faites. Parce que votre magie est différente de la notre et incroyable, vou pouvez transplaner dans Poudlard, faire des choses que nous ne pouvons faire. Pas pour pouvoir faire pareil, pas non plus pour le divulguer si vous ne le souhaitez pas. Simplement, pour étancher ma soif de connaissance.
Les arguments - et la manière polie de Vanille de leur parler sans les infantiliser ni les obliger - rassura les Elfes, qui lui expliquèrent de leur mieux ce qu’ils savaient de leur magie. D’autres les rejoignirent au fur et à mesure, et certains finirent même par se couper la parole pour pouvoir parler.
De ce que Vanille comprit, les pouvoirs des Elfes étaient pratiquement illimités. Il leur suffisait de penser à quelque chose, à un sort, même simplement à une action pour qu’elle se réalise. Ils pouvaient pratiquement faire tout ce qu’ils voulaient, et surtout, n’étaient pas limités par les magies des sorciers : les sortilèges anti-transplanage, bouclier ou même les sorts offensifs pouvaient tout simplement être ignorés. Seule une magie sorcière ne pouvait être transgressée ou ignorée : leur servitude.
Lorsqu’ils étaient embauchés, lorsqu’ils avaient un maître, ils étaient bridés pour ne faire que ce qu’on attendait d’eux. Désobéir, déplaire au maître leur provoquait une grande souffrance psychique, morale, et se sentaient obligés de se punir lorsque cela arrivait. Ils ne pouvaient tout simplement pas ignorer ce que le maître décidait. Ce n’était pas seulement l’éducation, c’était surtout magique.
Mais les Elfes, la plupart du temps, n’étaient pas malheureux. Car autant désobéir leur procurait un profond mal-être, satisfaire le maître, et par extension, les sorciers, provoquait en eux une allégresse, qu’ils comparaient au bonheur. Ils étaient donc heureux de servir.
Vanille était persuadée qu’un sortilège puissant était à l’origine de tout cela. Un lien existait entre les Elfes aux sorciers, entre tous les Elfes et tous les Sorciers. Le sortilège qui avait été lancé devait être un des plus puissants jamais lancé, pour perdurer ainsi dans le temps et pour agir aussi intensément sur autant d’individus. Et la raison pour laquelle ce sort avait été lancé était on ne peut plus clair. Les pouvoirs des Elfes faisaient peur aux sorciers. Si eux-même étaient limités dans leur magie, les Elfes ne semblaient pas avoir besoin d’apprendre un sortilège pour pouvoir l’exécuter. Le mépris qu’éprouvaient les sorciers envers ces petites et insignifiantes créatures était certainement dû à cela : méprise quelqu’un, il se croira inférieur à toi. Les moeurs avaient évolués ainsi pour garder cette suprématie. Vanille se demanda comment étaient les premières relations entre ces deux espèces. Les Elfes auraient aisément pu prendre le dessus sur les sorciers, et donc probablement sur toutes les autres espèces. La peur avait peut-être motivé ce sortilège.
Tout cela n’était que pure spéculation, mais Vanille ne voyait pas d’autre explication. Elle ne pouvait concevoir qu’un lien de ce genre existe juste comme ça, par hasard, les Elfes obéirons aux sorciers. Cela expliquait pourquoi les Elfes libres étaient si désireux de continuer à servir les sorciers, même après avoir été maltraités. Ils n’envisageaient pas de faire autre chose, car malgré la libération, donc la fin de l’obligation de servir un maître (avec les peines et les joies que cela leur procurait), ils souhaitaient retrouver ces sensations. Ils sentaient que sans cela, sans maître à servir, ils n’étaient rien. Qu’ils étaient faits pour servir les sorciers.
Au fur et à mesure que les Elfes racontaient comment ils faisaient de la magie (comment ils ressentaient le sort pour pouvoir le lancer sans baguette, par simple volonté : Oreste aurait adoré discuter avec eux lorsqu’elle était à Poudlard, et Vanille se rappela que c’était justement ce désaccord qui lui avait donné l’idée d’étudier les créatures magiques), au fur et à mesure qu’ils expliquaient comment ils étaient limités par les désirs des maîtres mais que cela ne les dérangeait pas, en somme, à chaque fois qu’ils louaient les sorciers de leur apporter ce bonheur de servir, Vanille sentait un poids s'alourdir dans sa poitrine.
Elle se sentait terriblement mal de faire partie de ceux, même si elle-même n’avait rien fait, qui les asservissait. C’était horrible de les voir se satisfaire du peu qui contrebalançait tout ce mal-être potentiel. Il lui suffisait de se lever et de leur dire quelques mots pour qu’ils se sentent humiliés, blessés, mals. Et au contraire, afficher de la satisfaction devant leurs gestes les rendait heureux. Ce pouvoir la dégoûtait. Peut-être que le fait d’avoir grandi comme moldue rendait sa vision des créatures magiques particulières : elle les voyait comme des êtres intelligents, égaux, sentients.
Et leur magie était tout simplement incroyable. Ils n’étaient pas affectés par la magie des sorciers, si on omettait le sort d’asservissement. Cela pouvait avoir deux raisons : soit ils utilisaient une magie différente, soit ils utilisaient la magie différemment. Dans le premier cas, cela montrait qu’il existait plusieurs formes de magie, et que chaque espèce pouvait potentiellement en utiliser une différente. Dans ce cas, serait-il possible, par exemple, pour un sorcier d’utiliser celle des Elfes ? Dans le second cas, cela serait plus interne à l’espèce. Un peu comme les différentes cultures qui perçoivent différemment la magie, les différentes espèces peuvent l’utiliser différemment.
Cela pouvait par exemple rejoindre le fait que les Gobelins enviaient les sorciers sur l’utilisation de la baguette magique : cette technologie, si on pouvait l’appeler ainsi, leur permettait d’utiliser certaines branches de la magie, fermée à ceux qui n’avaient pas de baguette. Mais cela contredisait le fait que les sorciers Africains n’utilisaient aucun autre artefact que leur main pour lancer des sorts, et pourtant, ils étaient soumis aux mêmes lois magiques que les autres.
Vanille se demanda ce qu’il en était justement des lois magiques. La loi de Gamp s’appliquait-elle exclusivement aux sorciers ? Elle stipulait qu’il existait cinq exceptions à la métamorphose élémentaire : la vie, la nourriture, les sentiments, la connaissance et l’argent, que l’on ne pouvait pas créer à partir de rien, ni en modifier l’essence. A voir les Elfes, ils faisaient apparaître les plats comme s’ils les sortaient du néant, mais ils étaient peut-être stockés ailleurs.
Ils lui confirmèrent qu’ils ne pouvaient en effet agir sur ces exceptions.
L’heure était tardive, et Vanille et Nathan décidèrent d’arrêter là leur interrogatoire.
Sur le chemin du retour, il lui apprit que lui aussi s’était senti démuni face à cette terrible soumission.
Le lendemain, aux aurors (Vanille avait pris l’habitude de se lever tôt pour se rendre au Club), elle rédigea au propre tout ce qu’elle avait appris la veille, et toutes les réflexions qu’elle avait pu avoir. Elle se demanda ce qu’elle pouvait bien découvrir de plus sur les Elfes que eux-même ne pouvaient lui apprendre.
C’était sans compter Nathan qui surgit comme à son habitude des méandres des étagères, avec un livre sans les mains, qu’il claqua sur la table où travaillait Vanille.
- J’ai trouvé quelque chose, annonça-t-il avec une excitation mal cachée.
“Les grands sorciers de la seconde guerre du XXe siècle”, ce livre était un condensé de tous ceux qui avaient eu un impact sur l’issue de la guerre contre Voldemort.
Nathan ouvrit la page et arriva au chapitre “La jeunesse guerrière”, avec sur les premières pages les amis de Harry Potter (ce dernier était évidemment le premier à apparaître dans le livre, juste avant Dumbledore), Hermione Granger et Ron Weasley.
- C’est écrit ici. “Parmi les autres actions de Miss Granger, il est à noter qu’elle est l’initiatrice d’un mouvement visant à la protection des Elfes de Maison, et a créé dans sa jeunesse la Société d’Aide à la Libération des Elfes (S.A.L.E.). Il est possible que cette première initiative ait été le déclenchement de son envie de carrière, qu’elle a commencé au Ministère de la Magie au Département de Contrôle et de Régulation des Créatures Magiques.”
Hermione Granger avait lutté pour la libération des Elfes. Elle avait peut-être étudié leur magie également. C’était une grande sorcière, très intelligente et surtout se battant sur plusieurs fronts à la fois, et Vanille se demandait à quel point elle avait poussé ses recherches sur les Elfes.
- C’est super, mais en quoi ça nous aide ?
- On va aller la voir !
- Tu crois qu’on peut aller comme voir discuter avec une héroïne de guerre, amie du Survivant, membre du ministère de la magie ? Nous ?
- On est membres du Club des Créateurs non ? On peut faire marcher nos relations. Il paraît que cela sert à ça d’être membre du Club.
- On ne va débarquer comme ça en réclamant de l’aide sous prétexte que…
Vanille s’arrêta. Elle regarda Nathan d’un air soupçonneux.
- Tu savais, pas vrai ?
- Je sens que tu as une solution. Mais je ne sais pas laquelle.
- On va utiliser mon joker, dit-elle. Il s’appelle Harry Potter, et il m’a proposé son aide.
End Notes:
Tadaaa ! Depuis des semaines que je vous la prépare cette partie. Les Elfes, on va en entendre parler, c'est moi qui vous le dit :)
Pour ceux qui connaissent, et les deux du fond (encore vous!), je participe au NaNoWriMo 2016, et j'en profite pour accélérer l'écriture de cette fiction (et d'autres projets encore), car depuis quelques temps je n'ai que trois ou quatre chapitres d'avance, et c'est un peu flippant d'avoir si peu alors que j'ai tant à écrire. (Je suis à 10k en 5 jours!)
Et Lena vous embrasse tous bien fort. Elle n'a pas pu venir ces derniers temps vous saluer, mais continue son bêta-reading de loin.
La semaine prochaine... On va voir du beau monde ;)
Ciao !
Le joug sorcier by Deanna
Author's Notes:
Bienvenue ! Aujourd'hui, samedi, je vous souhaite la bienvenue à notre nouvelle réunion au Club des Créateurs.
Je commence peu à peu à rattraper mon retard d'écriture, j'ai quelques chapitres d'avance, pour pouvoir vous promettre un peu de régularité !
Vous savez à quel point j'aime écrire avec des OC - j'aime profondément le monde magique de JK Rowling et je trouve dommage de se "limiter" aux personnages existants (ce qui est absolument ridicule à dire, vu le nombre de personnages, leur diversité, leurs incroyables background, et l'amour que je porte à la plupart d'entre eux). Cette fiction est principalement habitée d'OC. Mais j'avoue, j'avoue... j'adore mettre des guest. Surtout quand il s'agit de personnages que j'aime.
Cette introduction est beaucoup trop longue. Bonne lecture !
Leurs pas nerveux résonnaient sur les pavés de Pré-au-Lard, dans ce coin de rue peu fréquenté. On entendait à peine les élèves profiter de ce premier jour de sortie, dont l’écho joyeux se faisait de plus en plus lointain, tandis que Vanille et Nathan s’éloignaient de la rue principale. Ni l’un ni l’autre n’avait déjà visité cette partie du village, qui n’offrait à leur vue que des résidences privées et quelques établissements et bars peu fréquentés par d’autres que les résidents.
Le stress s’installa progressivement dans l’esprit de Vanille tandis que leurs regards cherchaient le pub où ils avaient rendez-vous. Elle n’avait jamais entendu parler de la Tête de Sanglier, et cela était très certainement la raison pour laquelle Hermione Granger leur avait proposé l’endroit. Une sorcière de sa réputation ne devait pas pouvoir se montrer en public sans attirer les foules.
D’un côté, l’idée rassura Vanille. Attirer les questions de ses camarades qui pourraient la voir en telle compagnie ne la tentait pas outre mesure. Evidemment, rencontrer Hermione Granger était un immense honneur - Vanille l’admirait énormément - et elle se sentait privilégiée d’avoir pu rencontrer ainsi deux des héros de guerre les plus reconnus. Plus encore, de les rencontrer et d’obtenir leur aide. Mais devenir elle-même reconnue ou admirée par ses pairs comment étant celle qui a rencontré, non, cela ne l’intéressait pas.
S’il y avait bien une question qui restait ancrée en elle,malgré ses efforts pour s’en débarasser, c’était celle-ci : Harry Potter et Hermione Granger étaient-ils ouverts à la discussion avec n’importe qui, ou bien n’acceptaient-ils de rencontrer ainsi que certaines personnes ? Elle n’était certainement pas la première à solliciter un rendez-vous, d’autres avant elle avaient dû prétexter des raisons diverses pour les voir en personne, et ils ne semblaient pas s’abreuver de leur notoriété. Alors, pourquoi avaient-ils proposé et accepté de l’aider ? Pourquoi elle ?
Oreste lui avait affirmé que les sorciers aimaient s’aider. Aussi, que son attitude était propice à attirer les conseils et assistance. Loin de flatter son égo, loin de la rassurer, tout ceci mettait Vanille dans un état de gêne improbable et intense.
Rencontrer des héros de guerre en privé était peut-être une très mauvaise idée pour ses nerfs.
Son coeur s’accéléra lorsque ses yeux se posèrent sur l’enseigne. Il ne leur restait que quelques mètres. Elle n’était pas prête, et sans qu’elle ne le commande, ses pieds s’arrêtèrent brusquement. Son dos fut parcouru d’une sensation désagréable, au-delà d’une sueur froide, c’était un picotement qui lui parcourait l’échine.
Nathan s’apperçu bien vite du malaise qui flottait dans l’air. Il posa sa main sur son épaule, un geste amical, rassurant.
- Ce que tu ressens, on appelle ça le syndrôme de l’imposteur. Tu crois que tu n’as rien accompli qui te ferait mériter ce qui t’arrive. Tu penses que tu n’es personne et que lorsque tu seras démasquée dans ton imposture, on te rejettera, parce que tu ments sur tes capacités.
Exactement.
- Mais c’est faux. Tout cela est faux. Et la personne que nous allons rencontrer fait partie, je pense, des sorciers les plus à même de pouvoir te juger telle que tu es. Ne te mets pas la pression. Pense à tes recherches. Le reste viendra tout seul.
Découvrir de quoi était faite la magie des Elfes. Les aider, si elle le pouvait, à se détacher du sort qui les lie aux sorciers. Aider la communauté sorcière à reconnaître ceux qu’elle considérait comme des esclaves, des êtres inférieurs comme était au final des créatures magique puissantes et méritant leur liberté.
Vanille avait eu soudainement beaucoup trop d’ambition, toutes ces idées lui donnaient le vertige. Mais la main rassurante de Nathan toujours accrochée à son épaule l’aida à reprendre le contrôle de sa respiration qui avait commencé à s’emballer.
- Merci, fit-elle en se tournant vers lui.
Il hocha la tête l’air entendu. Tous les deux se tournèrent vers la Tête de Sanglier, prêts.
Hermione Granger était en pleine discussion avec le barman lorsqu’ils entrèrent. L’aspect miteux du Club, la poussière collée aux vitres et aux verres, les voluptes de fumée et les odeurs de chèvre et de tabac froid, tout cela passa complètement au-dessus de la tête de Vanille. Rien d’autre ne comptait cet état de panique qu’elle tenta difficilement de cacher lorsqu’elle vit que Harry Potter était également présent, et qu’il agitait son bras en l’air, le regard tourné vers eux.
- Ne me laisse pas seule, chuchota-t-elle vers son ami en prenant leur direction.
- Je n’en avais pas l’intention.
Ils se dirigèrent vers la table, et le barman s’éclipsa après leur avoir proposé une Bièraubeurre. Vanille et Nathan s’installèrent, intimidés, muets faces aux deux héros de guerres les plus connus de Grande-Bretagne. Vanille fut soulagée de constater que Nathan ne tentait même pas de s’isoler, ils étaient bien quatre à cette table.
Hermione Granger était exactement comme sur ses photos : elle avait un visage classique, malgré ses épais cheveux qu’elle avait attachés en une queue-de-cheval bouffante, dont quelques mèches tombaient sur ses yeux emprunts d’un curieux mélange de sérieux et de malice. Son regard, posé sur Vanille dont la timidité était palpable, était infiniment bienveillant, et il la mit légèrement en confiance. Après tout, elles auraient au moins un sujet en commun, celui pour lequel ils étaient là, les Elfes de Maison.
Harry Potter avait l’air bien moins sérieux. Sa bièreubeurre était déjà bien entamée, et il affichait un sourire satisfait ; son regard alternait entre son amie, et on pouvait deviner bien des choses par ce regard : de la tendresse, de l’estime, de l’amour en quelque sorte, car l’amitié en est une forme. Les épreuves qu’ils avaient traversés tous les trois, avec Ronald Weasley, le fiancé d’Hermione, avaient dû les lier indescriptiblement. Et donc ce regard alternait entre Hermione et Vanille (bien que poliment, il regardait parfois Nathan, se demandant sans doute qui il était), et lorsqu’il se posait sur elle, les souvenirs remontaient incontrôlablement dans son esprit. Les circonstances de leur première rencontre étaient liées aux événements qui l’avaient traumatisée, et continuaient encore parfois à la hanter. Cela dû se voir. Des flashs apparurent spontanément devant les yeux de Vanille : son corps expulsé contre la pierre, la haine dans les yeux de son ami. Elle ferma les yeux un instant et chassa ces pensées austères du mieux qu’elle pu.
Il continua un instant à la regarder de ses yeux verts, compréhensif et compatissant. Malgré leur faible différence d’âge, c’étaient deux générations qui se tenaient là : celle de la guerre et celle de l’après-guerre. Les cicatrices, la sagesse, et ce quelque chose au fond de leurs yeux ne mentaient pas : ils avaient vécu et survécu à des moments difficiles.
Ceux qu’avait dû affronter Vanille l’avaient certainement bien moins été, et c’était elle qui se tenait là à affronter ses démons, face à ceux qui avaient fait face à un véritable mage noir. Elle se sentit honteuse de sa propre faiblesse.
- Comment allez-vous, Vanille ?
Elle sursauta presque en entendant la voix de Harry Potter. Elle ne l’avait jamais entendue.
- Je… bien. Et vous ?
Elle se sentit rougir et se recroquevilla légèrement, mais se força à regarder tour à tour ses deux interlocuteurs dans les yeux.
- Très bien ! fit Hermione Granger joyeusement. Qui êtes-vous ? demanda-t-elle poliment à Nathan.
- Je travaille avec Vanille au… sur ses recherches. Je m’appelle Nathan, fit ce dernier.
Il avait l’air bien plus à l’aise que Vanille, et elle le remercia intérieurement pour ça : il l’aiderait certainement à détendre la situation.
En fait, il n’y avait qu’elle pour être mal à l’aise. Les trois autres avaient au contraire l’air de vouloir la sortir de sa coquille, avec de larges sourires avenants. Deux bièraubeurres arrivèrent et connaissant la faible teneur en alcool de son breuvage, elle leva son verre et bu avidement de longues gorgées, comme pour se donner du courage. Ou se donner contenance. Elle n’en aimait même pas le goût, et son nez plongeait dans la mousse, si légère qu’elle ne s’en rendait pas compte. Et lorsqu’elle tenta de prendre une respiration entre deux goulées, sans même prendre le temps de baisser sa chope, elle aspira par le nez l’écume qui pourtant lui chatouillait tranquillement les narines, comme pour la prévenir, et qui en profita pour lui brûler les paroies nasales. Par réflexe, elle toussa, le liquide remonta et aspergea allègrement la table et ses occupants.
En bref, Vanille cracha sa bieraubeurre sur les deux sorciers les plus importants de leur génération.
Quoi de mieux pour briser la glace ?
Elle ouvrit de grands yeux sur Harry Potter et Hermione Granger qui eux-même ne savaient pas comment réagir, de la mousse sur les genoux et de la bieraubeurre sur leurs robes. Elle allait rougir, s’excuser, s’enfuir même quand elle fut stoppée par un grand rire. Un rire qui résonnait à sa droite et qu’elle n’avait jamais entendu. Il avait certainement déjà sourit, plaisanté, pouffé, son visage avait déjà exprimé de l’humour, de la satisfaction, voire de la joie. Mais jamais Nathan n’avait exprimé ainsi une hilarité pleine et sincère, il riait à gorge déployée et du plat de sa main claqua la table.
Son rire enjoué gagna tour à tour leurs interlocuteurs, mais ce ne fut pas un rire moqueur, ni méprisant, au contraire. Et il finit par gagner Vanille qui sentit sa tension s’évaporer doucement, tout comme l’alcool qui trempait la table qui disparu d’un coup de baguette habile.
- Après ça, je pense qu’il n’y a plus besoin de s’encombrer de manières ou de politesse, n’est-ce pas ? fit Hermione en levant la main pour commander au barman. Pourrions-nous avoir une autre bièraubeurre ?
- Deux ! précisa Harry, qui avait fini la sienne.
Vanille se sentait étrangement bien plus détendue après cet épisode catastrophique. Les deux sorciers en face d’elle ne souhaitaient de toute évidence prendre personne de haut, au contraire. Ils trinquèrent et repartirent sur de bonnes bases.
- Harry m’a dit que vous travailliez sur les Elfes ? lança Hermione à Vanille et Nathan. Sur leur magie ?
Vanille essuya sa moustache de mousse et commença son monologue, qu’elle avait préparé à l’avance, la voix malgré tout un peu tremblante :
- Oui. En réalité, il ne s’agit pas uniquement d’une recherche sur les Elfes mais sur toutes les créatures magiques. Je m’intéresse à leur magie. Je veux savoir comment ils l’utilisent, si leurs pouvoirs et les nôtres sont similaires, s’ils manipulent la même magie que la nôtre, ou au contraire une fondamentalement différente. J’ai voulu commencer par les Elfes de Maison, et je suis allée discuter avec eux dans les cuisines. De cette conversation, j’ai déduis plusieurs points : leur magie et la nôtre sont différentes au point que nous ne pouvons lancer de sortilèges qu’ils ne puissent contrer, ou même ignorer.
Hermione fronça les sourcils.
- Oui, c’est étrange expliqué comme cela. Mais ils peuvent aisément transplaner malgré un sortilège anti-transplanage. Ils peuvent désarmer et défendre un sorcier contre n’importe quel autre.
- Comme Kreatur dans la caverne, murmura Harry.
L’anecdote sembla plus parler à Hermione qu’à Vanille, car elle hocha la tête, pensive.
- Je pense, et il ne s’agit ici que d’une théorie, que leur magie a été bridée il y a des siècles par un sorcier particulièrement puissant qui aurait pris peur des capacités quasi-illimitées des Elfes. Ils m’ont dit qu’ils avaient, au fond, le choix de désobéir ou de volontairement fuir un maître. Mais ils en ressentent un profond sentiment de mal-être qui les dégoûte d’eux-même et les force à se punir pour leur actes. Et au contraire, lorsqu’ils satisfont leur maître, ou n’importe quel sorcier, ils ressentent une joie et un bonheur intenses, qui ne viennent pas d’eux mais certainement du sortilège. C’est cela qui les pousse - les pousserait à obéir ainsi.
- Tout cela fait sens, Harry, dit Hermione. Tu te souviens de…
- De Dobby, oui, il arrivait à désobéir, à fuir, parce qu’il préférait me protéger, moi. Et il ne pouvait s’empêcher de se punir, malgré toute sa bonne volonté.
- C’est certainement pour cela que notre communauté méprise les Elfes, pour qu’ils continuent à se sentir inférieurs, et qu’ils ne se rendent pas compte qu’il ne s’agit que d’un sort, continua Hermione. Le sorcier qui a créé cette… malédiction, cette horreur devait être à la fois puissant et profondément apeuré par les Elfes. S’ils ont la capacité de potentiellement outrepasser tous nos sorts… Oh, vous imaginez, s’ils se rebellaient contre nous ? Nous ne pourrions rien faire.
- Si aujourd’hui les Elfes se libéraient du joug sorcier, ils seraient en droit de réclamer justice, argumenta Vanille, satisfaite de voir qu’elles partageaient les mêmes idées.
- Mais nous ne pouvons simplement pas continuer comme cela, grogna Hermione, à les traiter ainsi !
- Si cette théorie est vraie, alors jamais le ministère ne voudra faire quoi que ce soit - au contraire, s’il s’en intéressait un peu, ne serait-ce qu’autant que nous et découvraient leurs potentiels, toute manoeuvre pour les libérer et leur accorder des droits serait refusée. Ils ne verraient que du danger.
- Dans ce cas il faut agir sans en parler au ministère.
- Agir comment ? Nous ne savons rien de ce sortilège - s’il existe, et jamais nous n’aurons la puissance de le contrer !
- Il faut au moins essayer d’en savoir le plus possible. Vanille, tu es sur une bonne piste. Tu dois découvrir comment fonctionne la magie des Elfes, celles de toutes les créatures magiques, il faut qu’un sorcier ou une sorcière agisse dans leur sens pour que le jour où nous cesseront de les dominer injustement, ils aient au moins une raison de nous pardonner.
- Attend, moi ? Mais je ne peux rien faire ! Au contraire, je comptais sur notre rencontre pour avancer, seule je ne peux rien faire, si même toi au Département de Contrôle et Régulations des Créatures Magiques tu es les mains liées, alors moi…
- Tu es membre du Club des Créateurs non ? Le ministère n’est pas un frein pour toi. Tu possèdes toutes les ressouces nécessaires.
Il y eut un silence pendant lequel Vanille, Nathan et Harry fixèrent Hermione.
Pendant leur dialogue, les deux sorciers s’étaient échangés des regards amusés - certainement dûs à l’incroyable harmonisation des longueurs d’onde de leurs amies. D’ailleurs, ce fut à ce moment que Vanille réalisa qu’elle venait de tutoyer allègrement Hermione Granger.
Mais ce qui avait choqué les esprits, autour de la table, c’était la perspicacité et l'inattendue connaissance d’Hermione quant au Club des Créateurs. Harry semblait se demander de quoi il en retournait, puisqu’il n’avait de toute évidence jamais entendu parler de ce Club - pensait-il. Et elle l’avait évoqué ce simple fait avec tant de spontanéité que Vanille et Nathan passèrent de l’incrédulité à la compréhension.
Apparemment satisfaite de son petit effet, Hermione dégagea un pan du haut de sa robe de sorcière qui cachait - ils s’en doutaient à présent - un insigne du Club.
“Hermione Granger - Maître Créatrice 1998-1999”
- Je me doutais, d’après ce qu’Harry m’a dit sur toi, que tu étais membre. Alors j’ai pensé l’emmener. En souvenir.
- On ne cesse jamais d’être membre du Club des Créateurs, prononça sentencieusement Nathan.
Il découvrit son propre insigne, et Vanille sortit le sien de sa poche. Elle ressentit une immense fierté, et c’était rare, d’être membre de ce Club. Car une des personnes qu’elle admirait le plus dans ce monde en avait été Maître Créateur.
- J’ai compris que vous portiez quelque chose que je ne peux pas voir, mais est-ce qu’au moins vous pourriez me dire de quoi vous parlez ? s’impatienta Harry.
Hermione prit sa main et y posa l’insigne, qui dû se révéler à ses yeux.
- Je t’expliquerai après.
Elle se tourna vers Vanille et Nathan.
- J’ai peur de ne pas pouvoir vous aider autant que vous ne le voudriez, se désola-t-elle. Au ministère, les choses sont bloquées et mettront du temps à avancer, et je travaille à ce que cela bouge. Vous êtes bien plus libres de votre côté. Ces recherches sur la magie sont très intéressantes, mais je pense qu’elles peuvent révéler bien plus que vous ne l’imaginez. Vous ne vous limitez pas aux Créatures Magiques n’est-ce pas ?
Vanille ne voyait aucune raison de ne pas avoir confiance en les deux sorciers devant elle. Sans même leur demander, elle avait confiance en leur discrétion.
- Je souhaite découvrir les origines et la nature de la Magie.
- C’est ce à quoi j’avais pensé.
Elle réfléchit un instant, ignorant Harry qui fixait tour à tour les insignes de Hermione, Vanille et Nathan, qui les lui avaient montrés.
- J’ai peut-être une idée. Lorsque je suis retournée à Poudlard, après la guerre pour faire ma septième année, la nouvelle directrice Roy nous a fait parvenir une potion qui permettait de voir les potentiels magiques des cinquième année qui pourraient être membres du Club. Cette potion s’appelle…
- Revelavis. Elle nous la donne toujours.
- Je détestais cette potion, marmonna Hermione, comme si on avait un destin prédéfini ou que…
- Qu’on ne pouvait faire de grande choses par soi-même, sans que cela soit écrit.
- C’était écrit, pour moi, contra Harry, qui tenait à participer à la conversation même s’il n’en comprenait pas toutes les ficelles.
- Pas vraiment, argumenta Hermione, puisque tu as décidé par toi-même de te battre contre Voldemort. Regarde, est-ce que Ron était destiné à détruire des Horcruxes ? A se battre comme il l’a fait lors de la bataille de Poudlard ? Et pourtant, lorsque j’ai bu la potion, je peux t’assurer qu’il n’était pas plus puissant qu’un autre. Selon cette stupide potion.
Harry n’avait pas l’air de tout comprendre mais accepta l’argument. Son amie lui expliquerait certainement tout plus tard.
- En quoi la potion peut-elle nous aider ?
- Avec les capacités de création du Club, je suis certaine qu’il est possible d’en faire une légèrement différente - une version de Revelavis qui te montrerait les potentiels des Elfes. Et pourquoi pas des centaures, des gobelins, de toutes les créatures magiques. Tu peux littéralement voir la magie avec cette potion. Même si je n’apprécie pas cette potion dans le cadre du Club, je reconnais qu’elle est exceptionnelle, et je n’ai absolument aucune idée de sa composition.
- J’espère que la directrice Roy acceptera de me donner la recette.
- En temps qu’ancienne membre du Club, il n’y a pas de raison qu’elle refuse au moins de t’en donner directement. Après tout, elle en fournit tous les ans pour le Club.
Vanille acquiesca et but une gorgée de bieraubeurre, dont la mousse avait complètement disparu. Elle faillit s’étouffer une nouvelle fois d’étonnement lorsqu’elle entendit Nathan, d’une voix qu’elle ne connaissait pas (il était décidément plein de surprise aujourd’hui), demander :
- Est-ce que vous me signeriez vos cartes Chocogrenouille ?
Hermione avait eu tort. Dès qu’elle fut retournée à Poudlard, Vanille s’était empressée d’écrire une lettre à la directrice - elle ne savait pas vraiment comment la croiser, ni où était son bureau - pour lui demander des renseignements sur la potion Revelavis, au mieux la recette, au pire quelques fioles.
Mais le soir même, lorsque la réponse revint à Vanille, elle fut tout sauf positive.
“Potion personnelle”, “uniquement dans un cadre de repérage de nouveaux membres”, “pas le temps d’en préparer”, “trop compliqué pour de jeunes sorciers, même membres du Club”.
Autant d’arguments qui lui semblèrent contradictoires et même faux. Elle se doutait que la seule vraie raison résidait dans ce “potion personnelle”, Roy tenait à sa potion et ne souhaitait pas la divulguer. Pas même à un membre de son propre Club, en qui elle était censée avoir confiance.
Elle regretta les grandes paroles de solidarité, confiance et grandeur qui étaient censées être intrinsèques au Club des Créateurs.
Aussi, elle se sentit particulièrement vexée par le “trop compliqué”. Une potion, trop compliquée pour un Créateur ? Elle n’était peut-être pas la plus grande maître des potions de cette école, mais elle savait à qui s’adresser pour l’aider dans sa tâche.
Sans surprise, lorsqu’elle fit part de son idée à Nathan, il décida de la laisser et lui demanda de revenir vers lui lorsqu’elle aurait terminé la potion.
Quelques jours plus tard, Vanille trouva Alexandre au Club. Pour une fois, une grattait une lettre et n’était pas affairé devant un chaudron.
- Salut, fit-elle en posant sa main sur son épaule, et il releva la tête. Est-ce que je peux te déranger ?
Il lui sourit, roula son parchemin avant que Vanille, curieuse, ne puisse voir de quoi il s’agissait. Puis il se leva et proposa d’aller ailleurs. Main dans la main, il sortirent de la salle.
Leur couple continuait tranquillement son chemin. Ils se retrouvaient régulièrement le soir, parfois les weekend lorsque leur travail le leur permettait. Mais comme la météo ne leur permettait plus de se balader dans le parc, Alexandre avait pris l’habitude de l’inviter dans la salle commune des Gryffondor. Il arrivait régulièrement que des élèves d’autres maison visitent ainsi les dortoirs les uns des autres - apparemment, cela n’était pas le cas avant la guerre, avant cette nouvelle manière de répartir (la répartition se faisait aujourd’hui en deuxième année). Les différentes maisons étaient bien plus liées, et même si la compétition était toujours de mise - que ce soit au niveau des points ou de la coupe de Quidditch - certains élèves qui avaient vécu avant et après la guerre affirmaient préférer ce Poudlard uni, solidaire.
C’est sur un canapé aux multiples cousins confortable, entourés de Gryffondor un peu fêtards, mais tout de même tranquilles devant leur cheminée, que Vanille et Alexandre se retrouvèrent pelotonnés. Le feu crépitait, les rires fusaient, l’air était doux ; Vanille regrettait que sa salle commune n’ait pas cette ambiance aussi festive. Certes, elle était plus calme et studieuse, l’atmosphère était convivial et bienveillant, et de nombreux artefacts magiques y étaient disponibles, mais quelque chose manquait. Un grin de folie peut-être. Le grin de folie des Gryffondor qui les poussaient à se défier de tester à l’aveugle des produits de chez Weasley Farces pour Sorciers Facétieux, ou à sortir du château la nuit faire des courses en balais.
Vanille croqua dans une part de crumble encore chaud - qui dans ce château ignorait encore comment se rendre dans les cuisines ? - et Alexandre demanda :
- Tu voulais me demander quelque chose au Club, non ?
Vanille se souvint de la raison de sa présence, elle s’était laissée embarquer dans ce moment de plaisir et de discussion.
- C’est par rapport à mes recherches. J’ai besoin de la potion Revelavis, en version améliorée.
- Améliorée ?
- J’ai besoin qu’elle me montre les potentiels magiques d’autres espèces que l’humain. Comme les Elfes ou les Centaures.
Alexandre se gratta la barbe.
- Je ne sais pas si c’est possible. Tu as demandé à Roy de te donner la recette ?
- Oui, et elle m’a assurée qu’elle était trop compliquée pour nous.
- Elle a raison. J’ai déjà essayé de la recréer - juste comme ça, je me suis penché sur les différents ingrédients qui pourraient la composer. Je n’ai même pas réussi à passer ce stade, à trouver quel mélange pourrait potentiellement aboutir à un semblant de résultat. J’ai trouvé quelques pistes - peut-être du mucus de grenouille, et du broyat de botruc. Oui, je sais, fit-il en voyant Vanille se méduser par l’idée de broyer un botruc, mais c’est un ingrédient commun. De toute façon je n’ai jamais réussi à aller jusqu’à l’étape de la potion.
- Même en l’analysant, tu n’as rien trouvé ?
- Quand j’ai fait cette ébauche de recherche, je n’avais pas de potion sous la main. Et je n’y pensais plus cette année. Si j’avais su, je l’aurais gardée.
- Donc on pourrait trouver les ingrédients avec la potion ? Et en déterminer la recette ?
- Eventuellement oui. Déterminer les composants, c’est facile. Puis chacun des ingrédient a plusieurs manières de se préparer en fonction des propriétés qu’il peut avoir, combiné ou seul. Ensuite il faut tester, parce que sur le papier, il y a toujours plusieurs possibilités.
- Tu connais toutes les propriétés de tous les ingrédients possibles ?
- Bien sûr que non, c’est impossible - quoique, certains sorciers doivent s’en approcher. Je connais en revanche les effets de beaucoup de gestes, de mélanges, de température… Théoriquement, un novice peut réaliser n’importe quelle potion avec une recette à suivre. Un véritable maître des potions peut en réaliser une juste en connaissant les effets désirés.
- Comme toi, plaisanta Vanille.
- Comme moi, affirma-t-il sans aucune humilité. Mais Revelavis, c’est trop pour moi. Sans la potion, on ne peut rien faire.
Vanille se tortilla dans ses bras pour atteindre une poche à l’intérieur de sa robe de sorcière, de laquelle elle sortit une petite fiole, qu’elle leva à la hauteur de leurs yeux.
- Alors retrousse tes manches, parce que je t’embauche pour m’aider à créer une potion Revelavis 2.0.
Il prit la fiole dans sa main et l’observa attentivement. Elle en profita pour l’embrasser sur la joue.
- Tu l’as gardée… Qu’est-ce que ça signifie, 2.0 ?
- Aucune idée. C’est une expression de mon frère.
End Notes:
Merci d'avoir lu !
Je n'ai pas énormément de reviews en ce moment, depuis quelques chapitres. J'espère que ça ne signifie pas que l'histoire commence à vous ennuyer !
Tiens, un nouveau petit jeu : de quelle histoire ai-je tiré mon titre ?
"J'ai vu une grosse bête", c'était des Visiteurs.
*Tu m'étonnes que personne n'avait trouvé. Avec des références aussi vieilles.
Lena ! Tu m'avais manqué ! Toi et tes adorables sarcasmes.
*Je sais. Je fais la fin, pour compenser !
Chers lecteurs, la semaine prochaine, on met le nez dans la fumée, dans les vapeurs d'un chaudron, et on tente de cuisiner. Oh, et on tente d'écrire une romance. On tente hein ! Dean', elle est naze en romance, je vous jure... Le Vanille / Alexandre, là, il est tout pourri hein ? Bon. Elle dit qu'elle sait où elle va... A vous d'en juger, après tout.
A la semaine prochaine tout le monde !
Author's Notes:
Bonjour à tous ! C'est avec un peu de retard que je vous souhaite la bienvenue à notre vingt-huitième réunion au Club des Créateurs !
Aujourd'hui, nous nous consacrerons spécifiquement à la création de potion, un thème où notre Vanille nationale n'excelle pas particulièrement, mais au moins, et c'en est presque trop facile, elle connaît les bonnes personnes autour d'elle pour l'aider.
Chers membres du Club, je vous souhaite une bonne lecture.
Les habitudes de travail d’Alexandre reflétaient parfaitement son caractère : minutieux, exigeant, et irritable. Travailler avec lui n’était pas du tout comme travailler avec Oreste, et Vanille se doutait que le peu de patience et d’explications qu’elle recevait, elle ne le devait qu’à leur couple.
Ce n’était pourtant pas ce qu’il lui avait semblé voir lorsqu’il travaillait avec Enguerrand. Du peu qu’elle avait pu observer l’année passée, Alexandre avait semblé pédagogue avec son Novice. Non, là, le challenge que représentait cette potion le rendait si exigeant avec lui-même qu’il en oubliait qu’il ne s’agissait pas de ses recherches, mais bien de celles de Vanille. Et que si elle avait demandé son aide, c’était pour apprendre à analyser et créer une potion, pas pour regarder et attendre le résultat.
Mais Vanille ne se laissa pas faire et dès qu’il feignait de se lancer sans explication, elle se rappelait à lui, et ils poursuivaient ensemble.
Ce système fonctionna parfaitement, et malgré les lacunes de Vanille, sa perspicacité, sa logique et sa créativité complétaient parfaitement l’organisation, le talent et les compétences indéniables de maître des potions d’Alexandre.
Parfois, elle lâchait au sol des pots de poudre de papillon de nuit, trébuchait sur le chaudron, et s’entaillait les doigts en découpant des feuilles d’arbre à thé. Et parfois, il râlait sur un mélange-potion trop court, s’enfermait dans un mutisme en réfléchissant à un composant, passait des heures entières sans boire ni manger au-dessus d’un chaudron bouillonnant au milieu de la nuit, pour recommencer encore et encore un test de mélange.
Rarement, ils se heurtaient, il s’exaspérait de sa maladresse à elle, et elle s’agaçait de son mauvais caractère à lui. Souvent, le fil de réflexions de leurs pensées se croisaient, et de nouvelles idées surgissaient spontanément. Et à chaque fois qu’ils étaient bloqués, ils réfléchissaient ensemble, cherchaient des idées dans les pages des livres de la bibliothèque, et avançaient inexorablement.
Ils commencèrent par déterminer la composition précise de la potion. Après plusieurs soirées, un chaudron fondu et différents sortilèges de multiplication, de séparation et d’analyse, ils réussirent à séparer dans trente-cinq fioles et vingt-quatre pots les cinquante-neuf ingrédients qui composaient la potion. Vanille cru que ses cheveux ne retrouveraient jamais leur aspect d’origine après ces heures passées à travailler dans ces vapeurs magiques.
Ils se posèrent un soir sur une table, pour faire une pause et réfléchir à la suite des travaux.
Il leur fallait maintenant déterminer les fonctions possibles de chacun des composants, selon la manière dont ils étaient mélangés, dans quel milieu et avec quel autre mélange. C’était un long travail, et il avançaient doucement, mais sûrement.
Mais il y eut une fiole et un pot qui leur posèrent problème.
Tout d’abord, il y avait ce pot avec un poil, un long poil, peut-être était-ce un cheveux. Il n’y avait pas beaucoup de potions connues qui nécessitaient l’ajout de cheveux - le polynectar, certains antidotes. Le cheveux n’avaient comme seul propriété connue que d’agir en fonction de la personne à qui il appartient. Dans un antidote, le cheveux d’une personne peut accentuer l’effet de ce dernier sur ladite personne, et l’annuler sur un autre. Dans le polynectar, il servait à transformer le buveur en la personne à qui il appartient. Mais dans le Revelavis ? Puisqu’il ne s’agissait pas du cheveux du buveur, ni de celui, de ceux dont on voyait les auras, à quoi servait-il ?
La fiole était encore plus étrange. Lorsque Vanille la leva à la hauteur de ses yeux pour observer le liquide noire qui tournait au fil de ses mouvements de poignet, elle murmura :
- Est-ce que c’est ce que je pense ?
- Je ne sais pas à quoi tu penses, fit Alexandre, distrait, le nez dans ses notes.
- Est-ce que c’est du sang ?
Il releva brutalement la tête.
- Montre-moi ?
Lorsqu’ils avaient séparé les ingrédients, après plusieurs dizaines, ils avaient fini par ne plus faire attention, ou plutôt, à ne plus essayer de savoir ce dont il s’agissait. Il s’étaient seulement assurés qu’il ne s’agissait pas d’un produit explosif (ils étaient rares, mais certains ingrédients brûlaient au contact de la lumière ou de l’air), lançaient un sort de conservation et les avaient rangés minutieusement dans des boites hermétiques.
Alexandre fit lentement tourner la fiole entre ses doigts. Le liquide, aux abords noirs, s’avéra être d’un rouge particulièrement foncé. Il accrochait aux parois en verre. Il avait exactement la texture que Vanille imaginait du sang. Mais c’était impossible. Revelavis ne pouvait être ce genre de potion.
- C’en est.
- Alors cette potion…
- Oui.
Ils jetèrent un regard sur le chaudron où le reste de leur sujet d’étude amplifié clapotait encore joyeusement, alors que le feu était éteint.
- Il s’agit de Magie du Sang. Une branche de la Magie Noire.
- Tu dois arrêter là, Vanille, tu trouveras un autre moyen, chuchota Nathan avec fermeté. Ca devient dangereux !
Vanille l’avait retrouvé dans la bibliothèque où il avait élu ses nouveaux quartiers depuis que elle et Alexandre travaillaient ensemble au Club. Elle tenait à l’informer de l’avancée de ses recherches - mais cherchait également à trouver conseil auprès de son ami.
Alexandre lui avait affirmé que les limites entre la Magie Noire et la Magie Blanche étaient arbitraires, floues. Que la Magie du Sang, si celui-ci est récolté sans douleur et avec consentement, pouvait aboutir à quelque chose au mieux de bénéfique, au pire d’innocent. Mais Vanille n’était pas dupe, elle savait qu’Alexandre tenait à finir cette analyse, ne serait-ce que par fierté. Elle avait même remarqué un soudain regain d’intérêt pour la potion, maintenant qu’ils avaient découvert un de ses secrets sordides.
Elle ne savait plus trop si elle souhaitait que Nathan la conseille sur le fait de poursuivre ou d’arrêter, ou si elle voulait qu’il la conforte dans la décision qu’elle avait déjà prise ; au fond, elle n’avait jamais songé à arrêter. En vérité, elle cherchait à ce qu’il lui dise que malgré cette condition de Magie du Sang, poursuivre cette étude ne faisait pas d’elle une chercheuse en Magie Noire.
Elle pensait que la Magie Noire lui faisait peur. Mais là, la fascination d’Alexandre pour cette fiole de sang l’avait au début étonnée pour ensuite la gagner. Pourquoi utiliser du sang dans cette potion pourtant à l’apparence anodine ?
Finalement, la lettre et Hermione Granger avaient raison. Ses études, ses recherches sur la Magie allaient loin, bien plus loin qu’elle ne l’aurait imaginé. Mais qu’est-ce qu’elle s’était imaginé ? Que la nature de la Magie était une petite fée merveilleuse et bienveillante ? Au fond…
- Vanille, la coupa Nathan dans ses pensées. Si tu es venue pour me poser des questions dont tu n’acceptes qu’une seule réponse, ce n’était pas la peine.
- Je n’ai pas…
- Je t’ai dit que je t’aiderai dans tes recherches, et dès que tu auras de nouveau besoin de moi, je reviendrai. Même si tu décides de te lancer dans… Dans la Magie du Sang.
Il avait craché ce mot avec le même dédain qui le gagnait lorsqu’il parlait d’Alexandre. Vanille soupira. Elle commençait à se demander si elle réussirait à concilier dans sa vie tous ces antagonistes. Nathan et Alexandre, la Magie du Sang et sa répugnance pour la Magie Noire. Ses recherches et sa peur.
Il avait raison d’être dégoûté. Revelavis était une potion destinée à être bue, et elle contenait du sang. C'était un procédé horrible que de boire du sang, ses propriétés pouvaient être terribles. Même si, mélangé dans une potion, la notion pure de sang, de chaire se désagrégeait et se transformait, la puissance magique qu’il contenait restait présente. On pouvait manipuler, terrasser, détruire avec du sang. On pouvait contrôler, forcer, tuer.
Mais Vanille s’en servait pour de bonne choses. Pour découvrir une vérité, pour aider, pour libérer. Elle n’avait pas une once d’ambition, d’envie de soumettre en elle. Elle le savait et n’avait besoin de convaincre personne.
Elle laissa Nathan là pour retourner à ses propres devoirs. Le soir, elle retourna au Club pour continuer la re-création de cette potion.
Alexandre et Vanille se mirent d’accord sur les limites qu’ils ne comptaient pas dépasser. S’il y avait du sang à récupérer, ils utiliseraient le leur, et uniquement en faible quantité, et en sachant exactement ce que cela impliquait.
Le sang avait une quantité gargantuesque de propriétés, et évidemment, toutes n’étaient pas répertoriées dans leurs livres. Ils n’étaient même pas certains de pouvoir toutes les trouver dans ceux de la réserve.
Et au-delà de ces deux freins, ces deux ingrédients dont ils ne pouvaient pas déterminer simplement les propriétés, il y avait les cinquante-neufs ingrédients à mélanger. Il fallait déterminer les usages de chacun d’entre eux en fonction des autres. Evidemment, il n’était pas possible de tout tester, mais certaines pistes furent réduites par des règles particulières : le mucus de grenouille et la poudre de papillon de nuit, par exemple, devaient être ajoutés en même temps, car ils accentuaient les propriétés l’un de l’autre. Et ils devaient être ajoutés à forte ébullition, ce qui n’était pas le cas des plumes de merle blanc (un ingrédient particulièrement rare) et des fanes de carotte jaunes (un ingrédient particulièrement commun), qui devaient donc être rajoutés à basse température.
Il y avait donc beaucoup de suppositions dans cette potion.
Au bout de quelques jours de travail, ils aboutirent à une dizaine de recettes différentes. Il leur restait bien des possibilités, mais décidèrent de les tester par dix. Histoire de varier un peu les plaisirs. Et de ne pas se décourager.
Ils décidèrent d’utiliser un cheveux de Vanille, car il était possible que celui qu’ils avaient obtenu appartiennent à la directrice Roy, donc à la créatrice de la potion. Ils décidèrent également d’utiliser son sang à elle, pour rester dans la même logique. Ils se firent discrets à cette étape, pour que les autres membres du Club ne connaissent pas la nature de leur potion. Vanille n’était pas très à l’aise à l’idée de faire de la magie du sang, mais au fond, ce qui la dérangeait, c’était que l’on puisse être au courant.
Ils ne s’étaient pas attendu en revanche à ce que la cicatrice refuse de s’effacer. Vanille savait comment arrêter une hémorragie (elle continuait de se rendre au Club des Duels et c’était un sortilège indispensable là-bas, surtout quand on se battait avec Ambre), mais la fine marque blanche refusait de disparaître de la surface de son avant-bras. En croisant le regard d’Alexandre, elle sut qu’il pensait la même chose qu’elle. La Magie du Sang refusait de se laisser effacer aussi facilement. Chassant le malaise qui tentait de s’emparer d’elle, Vanille descendit sa manche et se concentra sur la première potion.
Malheureusement, mais sans grande surprise, aucune des potions n’aboutit à un résultat concluant. Ils n’eurent même pas à les tester : elles n’avait ni la bonne couleur, ni la bonne texture, rien qui ne corresponde. Ils firent fondre deux autres chaudrons, pourtant d’excellente qualité, et durent piocher dans la réserve de Gallions du Club pour en racheter de nouveaux.
Mais ils n’abandonnèrent pas, même lorsqu’Alexandre avoua n’avoir jamais autant eu de mal à réaliser une potion. Pourtant, ils sentaient qu’il y avait dans leurs notes quelque part la bonne recette, le bon mélange. Certaines soirées, Vanille ne pensait plus du tout à ses recherches, aux Elfes, à la Magie : elle ne se projetait que sur Revelavis, son défi. D’ailleurs, elle commença à s’ennuyer en cours de potion. Les connaissances et réflexes qu’elle acquit avec Alexandre se reflétèrent dans ses capacités en cours, à la grande satisfaction de son professeur.
En se replongeant dans une nouvelle session de recherche, Vanille vit avec surprise un livre trôner sur son bureau de travail. Un large tome qui parlait de créatures magiques. Elle chercha des yeux autour d’elle qui pourrait l’avoir oublié là. Puis, lorsqu’elle le souleva pour aller le ranger, elle s’aperçut qu’un bout de parchemin dépassait d’entre les pages.
Elle pensa à un marque-page mais, par curiosité, ouvrit le livre et vu sur le parchemin l’écriture de Nathan, qui s’adressait à elle :
“J’ai regardé où vous en étiez. J’ai lu quelques-unes de tes notes. Les deux plumes que tu as trouvées ne sont pas identiques. La plus brillante appartient à un merle blanc, mais l’autre, celle dont le nacre révèle des couleurs vives à la lumière de la lune, elle n’est pas ordinaire. Ce livre est le seul que j’ai trouvé qui parle de cette créature.”
Vanille détailla l’image sur le livre. C’était un dessin immobile, ce qui était assez rare pour le noter. La créature avait la silhouette d’un merle, les ailes écartée, en plein vol. Ses longues plumes nacrées, brillantes, attiraient toute l’attention. Vanille passa les doigts sur l’image. Une multitude de couleurs ressortaient de ce dessin, mais elle n’était pas certaine de vraiment les voir. Dès qu’elle tentait de poser les yeux sur un vert émeraude, un rouge flamboyant, ou un rose pastel, le même blanc de nacre revenait. L’animal avait des serres immenses, et au bout de ses ailes ressortaient de courtes griffes. Son bec, rugueux, donnait plus l’impression d’une gueule d’où pouvaient à tout moment surgir une rangée de crocs. Sur le sommet de son crâne ressortait deux fines crêtes, deux huppes non pas faites de plumes mais de ce qui ressemblait à de la kératine. Deux lignes de cornes pointues qui descendaient, semblait-il, jusqu’à la queue, fine, dépourvue également de plume, qui s'enroulait sur elle-même, dangereuse et élégante.
La bête était fascinante et magnifique. Vanille n’en avait jamais entendu parler. Elle dévora le texte qui accompagnait l’image.
“Le Dragonbird fait partie de ces créatures magiques fascinantes dont l’existence est reconnue et irréfutable, mais dont aucune trace n’a été retrouvée depuis plusieurs siècles. Il apparaît dans plusieurs légendes, sorcières et moldues, chacune lui attribuant des caractéristiques et des origines diverses. Il est tantôt un annonciateur de grand malheur, apparaissant lorsque la nouvelle Lune disparaît derrière l’horizon, tantôt un compagnon des dragons, empoisonnant leurs victimes de son dard venimeux pour leur épargner la douleur.
Certains récits affirment que son sang possède une grande magie, et que quiconque le boit pourra obtenir le don de double-vue, du troisième oeil. Il est aussi dit que dans le reflet de ses plumes, les devins confirmés sauront lire l’avenir, le passé et la vérité.”
Vanille tourna la page pour poursuivre sa lecture, mais elle tomba sur une autre créature magique.
“C’est tout ?”
Le texte s’arrêtait là. Elle regarda une nouvelle fois le Dragonbird. Ses grand yeux noirs semblaient se moquer d’elle, comme satisfait de pouvoir garder son mystère.
Mais ce n’était pas possible, la plume qu’ils avaient extraite de Revelavis ne pouvait appartenir à une telle créature. Si c’était le cas, comment Roy avait-elle obtenu ces plumes ? Et… son sang ? C’était certainement du sang de Dragonbird qui composait la potion.
- S’il s’agit d’une plume de Dragonbird, alors ça va être particulièrement compliqué de recréer Revelavis. Je ne connais aucun apothicaire qui soit en possession de Dragonbird.
Alexandre avait adhéré à l’hypothèse dès qu’il avait vu le livre. Il s’en voulu d’avoir cru que les deux plumes étaient identiques.
- Où as-tu trouvé ce livre, d’ailleurs ? Je ne l’ai jamais vu.
- Nathan me l’a donné. Il m’aide dans mes recherches.
Vanille s’était promis de ne pas mentir si le sujet devait un jour venir entre elle et Alexandre.
- Pourquoi il n’est pas là alors ?
- Il m’a dit qu’il se sentirait inutile avec nous. Il préfère m’aider à lire des livres et rencontrer des gens.
Presque pas mentir… Après tout, pourquoi avouer à Alexandre que son ami le détestait.
- Ouais. En tout cas, nous ne pouvons utiliser le sang et la plume de Dragonbird que pour une seule potion. Il faut que nous soyons sûrs de nous.
- Alors dans ce cas, on est bloqués. Parce qu’une fois qu’on aura recréé Revelavis, on doit encore le modifier pour qu’il nous révèle les auras magiques d’autres Créatures magiques.
- Et si c’était justement ça, la clé ? Les Créatures magiques ?
Il prit la plume nacrée et la fiole de sang :
- Ces ingrédients ont la propriété de donner des visions. Rien n’indique que celles-ci soient limitées. Et si elle permettaient déjà de voir les auras de toutes les créatures magiques ?
- Tu veux dire… Que Revelavis me permette déjà de faire ce que je veux ? Quel gâchis !
- Non, tu avais besoin de plus de potion dans tous les cas. Il te fallait la recréer, tu n’en avais assez que pour un quart d’heure. Et on ne pouvait l’amplifier sans risquer d’altérer ses propriétés.
- Mais dans tous les cas on ne peut plus la recréer.
- Je me demande si ces deux ingrédients - la plume ou le cheveux, et le sang - ne seraient pas justement utiles pour voir l’aura des êtres auxquels ils appartiennent.
Vanille réalisa ce qui signifiait la théorie :
- Dans ce cas, il nous suffirait de mettre un cheveux et du sang humain pour les sorciers, d’Elfe pour voir leur aura, de Centaure pour voir la leur… Mais à quoi servait le cheveux de Roy ?
- Pour lier. On lie deux êtres avec un morceau du corps, et l’un voit celui dont il a bu le sang.
Vanille frissonna.
- Mais si tu utilises du Dragonbird, tu n’as besoin que de te lier toi-même.
Ils partirent sur cette théorie et élaborèrent une dizaines de nouvelles recettes.
- Bien, fit Vanille alors qu’ils venaient d’achever la première potion de la nouvelle série. Pour ces tests, nous voulons lier les sorciers aux sorciers. Donc je n’ai besoin, a priori, que d’un seul de mes cheveux.
- Peut-être même aucun.
- Mais il me faut au moins une goutte de sang sorcier.
Alexandre stoppa le geste de Vanille, qui, la manche relevée, s’apprêtait à lancer un sort sur son bras.
- Tu es sûre de vouloir continuer ? Tu ne veux pas que je donne le mien ?
- On ne prend qu’une goutte à la fois, je ne vais pas m’évanouir…
- Ce n’est pas ça qui m’embête. Ce sont les marques.
Il passa doucement le pouce sur le relief ses cicatrices. Dix petites marques blanches brillaient sur sa peau. Dix petits coups de Difindo. Vanille vit passer dans le regard d’Alexandre une certaine douleur alors qu’il détaillait les coupures de ses yeux.
- Ce n’est pas… J’aurais préféré qu’on n’en arrive pas là. Je veux dire… J’aurais dû...
Elle passa sa main libre sur sa joue.
- En aucune manière je n’aurais accepté que tu fasses ça pour moi. Ce ne sont que des marques. Elles signent ma volonté et mon ambition. Elle ne représentent pas la souffrance ni la douleur. Seulement la persévérance.
Plus assurée qu’elle ne l’aurait cru face à un Alexandre un peu désemparé, elle déposa un baiser sur ses lèvres. Puis, libérant son bras de son étreinte, elle murmura le sort qui libéra quelques gouttes de sang rouge. Il coula dans le chaudron, et elle se soigna d’un coup de baguette. Une onzième cicatrice, identique aux précédentes, vint s’ajouter à sa collection. Vanille espérait qu’elles ne soient pas là en vain.
Mais cette goutte-là ne donna pas l’effet escompté, et elle su qu’il y en aurait d’autres.
Quelques jours plus tard, c’était la mi-octobre. Le Club avait reçu quelques demandes d’inscription de la part des cinquième année, et la directrice Roy avait annoncé l’organisation, pour la seconde année consécutive, un bal d’halloween. Le Club prévu une réunion pour la veille au soir, afin de se décider sur les prétendants, de prévoir l’organisation de la soirée.
Il y eu treize marques blanches sur le bras de Vanille. Treize fines et courtes coupures alignées, toujours aussi nettes et assurées. Et ce soir-là, la quatorzième fut la dernière.
Comme à leur habitude depuis qu’ils avaient commencé cette potion, ils étaient les derniers au Club. Face à face autour d’un petit chaudron, leurs yeux étaient figés sur la mixture qui bouillonnait doucement, au-dessus du feu qui éclairait leurs visages. Une goutte de sueur coulait le long de la tempe d’Alexandre, sa baguette était pointée sur le chaudron et remuait lentement le liquide. Les cheveux de Vanille, remontés à cause de la chaleur, collaient à son cou. Elle tenait son avant-bras de sa main, caressant les quatorze cicatrices, certaine qu’il n’y en aurait pas d’autres.
Elle venait de faire tomber une goutte de son sang dans une fiole qui contenait leur mixture. Celle-ci n’avait pas changé d’un iota, alors que les fois précédentes, la présence du sang avait noirci la mixture.
La potion était parfaite. Sa couleur, un bleu très transparent, était en tout point identique à celle de la potion d’origine. Elle était aussi liquide que de l’eau, et n’avait aucune odeur, si ce n’était celle de la mer.
Alexandre, sans un mot, prit la fiole dans laquelle il restait à peine un fond du Revelavis d’origine, et lança un sort sur les deux potions pour les comparer. Le résultat était positif. Ils avaient réussi.
Ils avaient recréé un chaudron de la potion Revelavis. Et il suffisait de placer une goutte de sang et un poil dans cette potion pour que Vanille ou n’importe quel sorcier puisse voir l’aura magique de n’importe quelle créature.
Ils s’affalèrent sur les coussins d’entraînement aux sortilèges au fond du Club, exténués. La rédaction précise de la recette leur avait pris deux heures. La potion était en lieu sûr, prête. Vanille n’avait pas voulu la goûter.
- Pourquoi n’as-tu pas bu ta potion, le premier jour ? demanda Alexandre, les bras autour de sa taille, le visage contre son front.
Elle réfléchit un moment, profitant de leur proximité.
- J’ai envie de te répondre que je savais qu’elle serait utile pour mes recherches, mais je crois que ce n’est pas vrai. En fait, depuis ce que tu m’as dit sur… ce que tu avais vu de moi, l’année dernière, j’ai détesté cette potion. J’ai détesté que Nathan ait dit de moi que j’avais un destin. J’ai détesté avoir été choisie pour ce que vous aviez vu de moi.
- Pourquoi ?
- Parce que je voulais faire mes preuves moi-même. Si rien de tout ça n’était arrivé, si la potion n’avait rien révélé de moi, que Nathan n’avait rien vu, alors je n’aurais peut-être pas eu, selon vous, la légitimité de prétendre au Club.
- Alors c’est par fierté que tu t’es vexée ?
- Peut-être.
Ils restèrent un instant silencieux.
- Que t’a dit précisément Nathan sur moi ?
- Il ne m’a rien dit. J’ai surpris une conversation entre Jules et lui.
- Ca ne répond pas à la question.
Il sembla hésiter quelques secondes.
- Demande-le lui.
Il avait raison.
- Merci de m’avoir aidée. J’ai beaucoup appris sur les potions grâce à toi. Et je n’aurais jamais pu obtenir de tels résultats seule.
- Je t’en prie.
- J’espère que je ne t’ai pas coupé dans tes propres recherches de potion. Tu fais quelque chose d’important en ce moment ?
- Ne t’inquiète pas pour ça.
Il resserra son étreinte. Vanille s’apprêtait à relancer le sujet lorsqu’elle vit ses yeux fermés et entendit sa respiration régulière. Elle aussi épuisée, elle cala sa tête dans son cou et s’endormit presque aussitôt.
End Notes:
Merci de votre lecture !
N'hésitez pas à ma laisser vos commentaires pour que je sache si l'histoire vous plaît.
Rendez-vous le weekend prochain, nous découvrirons quelques vérités à propos de nos amis les Elfes.
Author's Notes:
Bonjour, bonjour et bienvenue à notre vingt-neuvième réunion au Club des Créateurs !
Tout d'abord, je tiens à vous présenter mes excuses pour les retards, l'irrégularité de la publication.
Il y a deux raisons à cela : tout d'abord, le Nano (44k ! *Petite danse de fierté*), qui, du coup, m'a beaucoup pris de temps. J'ai principalement écrit sur cette fanfiction. Je traînais à deux, voir trois chapitres d'avance depuis quelques semaines, et ça me stressait un peu. J'ai donc décidé d'être moins régulière, mais moins stressée. Ca passe, comme excuse, non ?
La seconde raison, c'est l'évolution de la fic. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais peu à peu, les chapitres sont plus longs, et (de mon point de vue) plus travaillés. Je prends mon pied à détailler et mettre le maximum de détails (importants pour la suite), j'essaye d'améliorer mon style à chaque fois. Il en résulte des chapitres plus denses, parfois avec (presque) uniquement des dialogues, mais qui me siéent davantage ainsi.
Voici donc le nouveau chapitre. Il sera question aujourd'hui d'Elfes, encore, et puis de mésentente. Encore. Il faut dire que Vanille évolue, elle aussi, et elle commence à devenir... Eh bien... plus fougueuse. Enervante, aussi. Bref, j'espère que vous l'aimerez comme moi je l'aime.
Bonne lecture !
- Il faut bien que tu boives la potion à un moment où à un autre, dit Nathan. Que tu voies à quoi ressemblent les auras des sorciers.
Ils étaient, pour une fois, assis sur les sofas de leur salle commune, chez les Serdaigle. Vanille avait achevé la potion la veille avec Alexandre. Elle venait de la présenter à Nathan, qui fut impressionné par cette prouesse, au courant de la complexité du projet.
- Sinon tu ne pourras rien comparer à celles des Elfes.
Il avait raison. Mais Vanille ne voulait pas voir les auras des sorciers, elle aurait l'impression de rentrer dans leur intimité. Créer la potion et l'utiliser pour ses propres recherches avait changé ses perspectives, si au début d'année elle avait été à deux doigts de la boire, c'était le fait de l'utiliser pour juger et trier les potentiels membres du Club qui l'avait dérangée. Là, ce qui la bloquait, c'était la possibilité de voir une partie des sorciers qu'eux-mêmes ignoraient, de découvrir ces secrets sur eux, sans même qu'ils sachent de quoi il s'agissait.
- Dans ce cas, je ne veux voir que les auras des personnes qui l'auront accepté.
Et elle décida à ce moment que quelle que soit la personne dont elle souhaitait voir l'aura magique, elle leur demanderait la permission. Sorcier, Elfes ou toute créature magique.
- Je ne suis pas certain que la mienne te sois très utile, dit Nathan, lorsqu'il comprit par le regard de Vanille ce qu'elle lui demandait. Tu sais que ma magie est spéciale... Je ne sais pas si elle est la même que les autres, cela ne serait pas un bon point de comparaison.
- Tu ne l'as jamais vue ?
- Non.
- Pourtant, on pourrait te faire avancer dans tes recherches sur tes pouvoirs.
- J'attendais que tu me le propose. C'est ta potion.
Ils se comprirent, et tandis que Nathan rejoignait son dortoir, une fiole en main,Vanille alla voir Leanne et Ambre dans le leur. Elles seraient ses cobayes.
Elle leur expliqua ses avancées, confiante dans leur discrétion, et elles acceptèrent.
Assise face à ses amies, seules dans le dortoir, Vanille déboucha sa fiole et, confiante, en bu une courte gorgée. Une douce chaleur s'empara de ses yeux, ses pupilles se dilatèrent, et le monde devant elle brilla.
Elle n'eut qu'à jeter un regard sur ses amies pour savoir que la potion était efficace.
Autour de chacune d’elles volait un feu, lumineux, brillant d'un jaune intense, presque doré. Ils étaient doux, captivants, et différents selon la sorcière qu'ils entouraient. Celui d'Ambre était vif et élégant, et celui de Leanne plus discret, mais il sursautait de temps en temps, se révélant bien plus prenant. Ils collaient à leurs personnalités.
Avant qu'elles n'aient pu lui poser la moindre question, Vanille se précipita dans la salle de bain, prise d'une soudaine envie de voir son feu, sa magie, malgré sa réticence du début.
Mais elle n'arriva pas à croise son regard.
Car lorsqu'elle se retrouva face au miroir, elle ne trouva pas son reflet. La potion était toujours efficace, elle pouvait voir sa propre main briller. Elle savait qu'on pouvait observer son aura dans un miroir, Alexandre le lui avait dit. Ce qu'elle voyait à la place de son double n'était, elle le savait, pas normal.
Pendant la seconde qui lui restait d'efficacité de la potion, Vanille vit un arbre de feu. Il brillait au centre d'une clairière, et une sombre forêt formait un cercle parfait tout autour. L'arbre brillait si intensément qu'elle sentit ses yeux brûler, et le temps d'un battement de cœur, elle se sentit happée en avant, comme si une volonté propre et indépendante de plonger pour retrouve cette vision s'était emparée d'elle, irrépressible.
Le temps d’un battement de coeur, son élan fut stoppé et elle faisait face à son reflet, sans la moindre once de magie visible. Elle resta un moment hébétée, sans comprendre ce qui venait de se passer, se fixa dans le blanc des yeux sans vraiment les voir, absente, ailleurs.
Pourtant, elle résista à la tentation de boire une nouvelle gorgée de potion. A vrai dire, cette idée la quitta bien vite, sans qu'elle ne comprenne vraiment pourquoi.
Dans les cuisines, où se rendirent Nathan et Vanille dès qu’ils purent, les Elfes semblaient heureux de les revoir. Vanille demanda à parler avec Ama et Pram, les deux Elfes qui s’étaient montrées les plus intéressées par ses questions.
Elle décida de jouer la carte de l’honnêteté, et, après leur avoir demandé de bien vouloir garder tout cela pour elles, leur expliqua qu’elle avait créé une potion qui lui permettait de voir la magie des sorciers, et qu’elle souhaitait voir maintenant la leur.
Elle insista sur plusieurs points : déjà, elles devaient accepter d’elles-même, et qu’elle ne serait pas déçue si elles refusaient (ce qui était en partie un mensonge, mais il lui restait tellement de pistes à explorer qu’elle saurait rebondir sur un refus), mais elle ne pouvait cacher le fait qu’elle serait heureuse de les voir accepter. Dans tous les cas la situation était injuste pour eux, mais cette avancée pouvait peut-être lui permettre d’un jour pouvoir les libérer. Evidemment, de cette hypothèse, elle ne dit rien.
Ensuite, elle leur avoua qu’elle n’était pas certaine que la potion fonctionne sur les Elfes, et que pour prétendre l’utiliser, il leur fallait y ajouter une goutte de leur sang. Si elles comprirent de quel type de magie il s’agissait, les deux petites Elfes ne semblèrent pas s’en offusquer.
Et enfin, elle leur avoua avoir discuté de cette potion avec Hermione Granger. C’était cette dernière qui lui avait dit que son nom pouvait pousser les Elfes à l’aider plus qu’ils ne l’avaient déjà fait, elle qui avait déjà fait avancer les choses de son côté. Les Elfes la connaissaient comme celle qui voulait les libérer, ce qui n’avait au début pas joué en sa faveur, puis comme celle qui, grâce à ses réformes, avait interdit la maltraitance des Elfes et la vente qui séparait les mères des petits, entre autre. S’ils n’étaient pas forcément mieux vus des sorciers, au moins étaient-ils un peu mieux traités depuis l’arrivée d’Hermione Granger au ministère, et les Elfes le savaient.
Vanille n’avait pas besoin d’utiliser cet argument, Ama et Pram avaient déjà aqcuiescé de leurs petites têtes poilues, les yeux grands ouverts de curiosité, mais même si elle prêchait des convaincues, c’était presque à elle-même que Vanille s’adressait.
“Je suis soutenue par une personne fiable, intelligente, ce que je fais est juste, quelle que soit la voie.”
“Même si elle n’est pas au courant du contenu de cette potion.”
Elle avait craint une mauvaise réaction de sa part si elle avait avoué que la nature de cette potion était la magie du sang.
Ama et Pram, en tout cas, acceptèrent d’aider Vanille, et se disputèrent presque pour décider de laquelle des deux donnerait une goutte de son sang. C’est finalement Ama qui, à l’aide un tout petit couteau de cuisine, perça le bout de son pouce pour qu’une goutte rouge perle dans la fiole.
A leur grand étonnement, la potion vira au vert, toujours aussi limpide et liquide. D’un geste un peu fébrile d’excitation, devant les regards joyeux d’Ama et Pram, Vanille ferma les yeux, bu une longue gorgée et tendit la fiole à Nathan.
Lorsqu’elle ouvrit les paupières, son sourire s’étala sur son visage de satisfaction et d’émerveillement.
L’air de la cuisine, haute pièce qui faisait écho à la Grande salle de par la disposition de quatre grandes tables, était nappé d’une fumée, d’une vapeur discrète, verdoyante, émeraude. Elle enrobait chaque objet, du four sous lequel ronflait le feu aux couteaux qui découpaient minutieusement les fruits et légumes, sous l’oeil vigilant des Elfes.
Et les Elfes.
Il y avait deux sortes de magie. Ama et Pram, comme certains autres dans la pièce, mais en minorité, avait des auras extensibles, très différentes de celles des sorciers. Leurs feux de jade ne faisaient pas que monter et danser autour d’eux, ils semblaient se former de longs bras, des tentacules, qui s’agrippaient autour d’eux et imprégnaient de magie tout ce qui passait à la portée de leur conscience. Les couteaux en réalité volaient animés par Pram, on pouvait deviner le flux de magie qui les reliaient. Ainsi, bien qu’il s’agisse d’un moment calme, les Elfes pouvaient faire plusieurs choses en même temps, tant leur magie paraissait immense.
Mais la plupart des Elfes présentait des feux légèrement différents. Vanille observa avec attention un de ceux qui s’étaient présentés à elle la dernière fois, Enwin. Elle eut l’impression que sa magie était emprisonnée en lui. Il avait bien la possibilité d’agir à plusieurs endroits en même temps, et avec efficacité, mais dès qu’il finissait une tâche, son aura se résorbait incontrôlablement en lui. Il n’avait pas de feu qui s’émanait de son petit corps, comme ceux d’Ama et Pram qui brûlaient en continu et dansaient avec la pièce, et même entre eux, seulement ce flux fragile et fugace.
- Dit-moi, Ama, as-tu été libérée par d’anciens maîtres avant de venir ici ? s’enquit Vanille.
Les oreilles de la petite Elfe s’aplatirent lentement sur son crâne.
- Oui Miss.
- Et ici, tu es au service du château ? Ou es-tu employée ?
- J’ai été libérée par mes Maîtres car la loi de Miss Granger interdisait les violences envers les Elfes, Miss. Alors ils ont décidé de me libérer, car ils ne l’acceptaient pas. Je ne voulais plus être battue, Miss, et j’ai entendu parler de Poudlard où les Elfes pouvaient travailler sans avoir de maître. Je suis même payée, mais je ne sais pas quoi faire de cet argent. Je ne voulais pas être payée. Je voulais juste travailler. Mais je ne voulais plus être battue…
Sa voix se perdit dans un petit sanglot, et Pram la prit par les épaules pour l’enlacer. De grosses larmes coulèrent le long de sa joue en silence.
Emue, Vanille s’agenouilla et posa sa main sur son bras pour témoigner sa compassion. La petite Elfe lui sourit.
- Tous les Elfes ne souhaitent pas être libre aujourd’hui, Miss. Mais lorsqu’ils le seront, ils se rendront compte qu’il s’agit de la meilleure chose qui nous sera arrivée.
- Toi au moins, tu es déjà libre, Ama.
- Je parle de lorsque nous serons vraiment libres, Miss.
Vanille se releva et échangea un regard avec Nathan, dont les pupilles qui avaient viré au vert grâce à la potion lui apprirent qu’il avait vu tout ce qu’il s’était passé. Et qu’il comprenait également ce que la petite Elfe venait de dire.
Les Elfes, du moins ceux qui étaient libres, avaient conscience de leur entrave magique. Et ils n’attendaient qu’une chose : qu’elle disparaisse. Mais ils étaient impuissants. Cette magie était trop puissante pour eux.
Alors comment Vanille allait-elle faire pour la détruire ?
- Tu te rends compte de ce que ça pourrait impliquer, Vanille ? demanda Nathan, sur le chemin du retour, où ils débriefèrent sur ce qu’il venait de se passer. Si tu trouves le moyen - et encore faut-il que tu le trouves - de libérer les Elfes, tu auras la communauté sorcière entière à dos. Je suis d’accord avec toi sur le principe, évidemment. Mais tu dois réfléchir à tout ce que ça impliquera pour toi.
Le cerveau de Vanille était en ébullition et des dizaines de réponses, réflexions et émotions le traversèrent en même temps.
- Déjà, je ne suis pas prête de pouvoir réussir à faire ça. Il me faudra encore des heures et des heures de pratique et d’entraînement pour un jour prétendre à devenir assez puissante pour briser ce type de maléfice. Et ne parlons pas du temps de recherche pour le comprendre. Le temps qui se passera entre-temps, j’aurai réussi à analyser la situation pour pouvoir agir selon toutes les conséquences. Et puis, de toute façon, qui saura qu’il s’agit de moi ? Je peux très bien agir en silence et voir le monde sorcier basculer. Et puis, merde Nathan ! Tu penses à ma réputation alors que je te parle de rendre sa liberté à un peuple soumis depuis des centaines de générations !
- Je ne parle pas de ta réputation, je parle de ta sécurité. Et si malgré tes efforts, les gens finissent par savoir ? Les sorciers sont bornés, ancrés dans leur culture, et ne sont pas prêts à la remettre en question, même si tu les mets le nez dans leurs propres horreurs. Ils se sentent invincibles, face aux Elfes, face à toutes les créatures magiques, face aux Moldus ! Nos propres frères et soeurs nous sont inférieurs, Vanille, parce que c’est ce que notre culture nous apprend, nous conditionne à penser. Tu ne peux pas réformer l’esprit des gens.
- Ils apprendront bien à vivre dans le monde que je leur imposerai, cracha Vanille.
Nathan lui agrippa le bras et la força à s’arrêter. Ils se jaugèrent un moment du regard, sans rien dire. Un rayon de soleil les frappa, aveuglant, et ils se sentirent un moment seuls au monde.
“Tu t’entends parler ?”
“Tu sais très bien que je parlais des Elfes.”
“Non. Tu parlais d’autre chose. Tu parlais de tous les vices des sorciers.”
“Si tu avais le pouvoir de faire évoluer la société sorcière vers plus de tolérance et d’égalité, tu ne le ferais pas, toi ?”
“Je n’ai pas ce pouvoir.”
“Moi non plus.”
Elle arracha son bras et reprit son chemin.
- Comme ça le problème est réglé.
Ils ne reparlèrent pas de cette discussion. Il y eu pendant quelques heures une tension entre eux, mais elle se dissipa d’un coup, lorsqu’ils reprirent les recherches.
Quelques jours après cette visite chez les Elfes, Vanille reçu une lettre d’Hermione Granger, à qui elle avait raconté ses derniers exploits. Celle-ci, peu étonnée et satisfaite de ces avancées, lui parla alors des centaures, qui vivaient dans la Forêt Interdite, avec qui elle avait quelques relations. Elle lui permis encore une fois d’utiliser son nom pour obtenir de l’aide. Elle lui conseilla également d’aller voir Hagrid, le professeur de Soin aux Créatures Magiques, pour qu’il la guide dans la forêt.
Mais Hagrid devrait attendre pour les guider chez les centaures, car à l’approche d’Halloween, le Club exigeait leur pleine concentration.
Il était temps de trouver de nouveaux membres.
Un soir, au Club, les personnes présentes furent informées de quelques noms de prétendants, et on demanda à chacun d’aller s’enquérir auprès de différents professeurs de leurs notes et leurs sérieux. Vanille et Ambre se proposèrent pour parler au professeur Flitwick, directeur de leur maison et professeur de Sortilège, une matière essentielle pour le Club. C’était enfin une initiative du Club qu’elle approuvait, après le fiasco du Revelavis (dont ils n’avaient pas encore parlé au Club, ils délibéreraient certainement plus tard sur ce qu’ils avaient pu voir).
Quelques jours plus tard, après un cours de sortilège, les deux filles restèrent donc après la classe pour s’entretenir avec le professeur Flitwick.
- Ah oui, je m’attendais à vous voir cette semaine, fit-il de sa petite voix flûtée en les voyant s’approcher avec leur liste de noms. Je suppose que vous faites partie de ce mystérieux Club qui ne veut que des bons élèves dans ses rangs ?
Dit comme ça, c’était bien une vision pédante du Club qui ressortait. Vanille était presque déçue qu’il n’en fasse pas partie, c’était un sorcier puissant et un professeur compétant, et il avait gagné l’estime de Vanille depuis sa première année.
Ils discutèrent des dix élèves qui s’étaient présentés, sur les dix, un seul n’avait selon le professeur pas le sérieux ni l’intérêt pour la magie requis, de ce qu’il savait du Club, évidemment. Cela devait arriver parfois que certains élèves ne voient que le prestige et ignorent le travail demandé. C’était un des revers de cette présentation, cette image du Club que Vanille accusait, qui attirait autant les ambitieux passionnés que les profiteurs en quête de notoriété.
Les autres membres du Club acquittèrent de leur mission et le lendemain, veille du bal, une réunion s’organisa pour préparer cette fameuse soirée.
- En considérant que les avis des professeurs sont dignes de confiance, nous avons donc cinq prétendants au titre de Novice cette année. Deux Serdaigle, Deux Serpentard et un Gryffondor.
- Ce seront donc eux nos nouveaux Novices, dit Alexandre. Est-ce que vous les aviez repérés au Revelavis ?
Vanille s’adossa à son dossier et croisa les bras, mais ne se ferma pas complètement. Alexandre venait de lui prouver qu’il avait pris en compte son avis, et que le Revelavis était vraiment utilisé à titre indicatif. Sa première phrase le prouvait.
Ils discutèrent un moment de ce que la potion avait pu leur révéler, pendant que Vanille se remémorait sa propre expérience avec sa version du Revelavis. Elle croisa plusieurs fois le regard d’Alexandre, emprunt de fierté et… d’amour ? Non d’affection. Il la regardait avec affection, un sourire discret au coin de la joue, se doutant certainement de ce à quoi elle pensait, partageant avec elle le secret de leur potion réinventée.
Les cinq Cinquième Année s’avérèrent être en effet parmi ceux qui avaient marqué les esprits - enfin, les yeux - pendant le banquet de début d’année. On évoqua ensuite la soirée, à commencer par l’arrivée de l’Oubliator. Ce dernier, comme tous les ans, resterait discret, ne se présenterait qu’au Maître Créateur, et lancerait un sortilège précis et commun à tous les cinquième année, sauf cinq. Puis on parla des discussions avec certains d’entre eux pendant le bal (histoire de commencer à les connaître), et de la fameuse lettre d’acceptation qui leur serait remise discrètement. Lorsqu’ils le pourraient, ils la placeraient directement dans les dortoirs.
Puis ils évoquèrent l’entretien, où on demanderait à chacun les raisons qui les poussaient à vouloir faire partie du Club. Entretien que Vanille n’avait pas passé, en tout cas pas consciemment. Elle se souvenait parfaitement que Jules avait usé d’un sortilège pour orienter ses pensées, afin de connaître les raisons qui la poussaient à vouloir - où à ne pas vouloir - faire partie du Club. Vanille n’avait aucune idée de comment cet entretien était censé se dérouler. En fait, elle n’avait même aucune idée de son utilité.
- Est-ce qu’il est vraiment utile, cet entretien ? demanda-t-elle pendant un silence entre deux prises de décision.
Tout le monde se regarda du coin de l’oeil. Quelque chose changea presque imperceptiblement dans l’air, le regard de Vanille tourna autour de la table pour chercher la raison de ce changement. Elle croisa quelques sourire maladroitement cachés, parfois un soupçon de malaise, mais surtout, et ses yeux se figèrent de stupeur, sur le visage d’Iris, il y avait de la colère. Les mâchoires contractées, ses boucles d’oreilles en plumes agitées de tremblements, il semblait n’y avoir que la main de Florent sur la sienne pour l’empêcher d’exploser. Du moins pendant dix bonnes secondes.
- Quand est-ce que tu voudras bien arrêter de tout remettre en question ?
- Je dis ce que je pense, contra Vanille sans se laisser démonter. Moi-même je n’ai pas passé l’entretien...
- Et on se demande bien pourquoi ! Tu m’énerves à toujours vouloir tout changer dans le Club. La potion, la présentation, et maintenant l’entretien ?
- Remettre en cause ce qui existe ce n’est pas forcément une mauvaise chose, argumenta Vanille, que le silence général commençait à agacer.
“N’ont-ils donc pas d’opinion ?”
- Je ne cherche qu’à améliorer le Club.
- Selon TES principes, cracha Iris en l’accusant du doigt. Quand tu seras Maître Créatrice tu feras ce que tu voudras, mais tant que je serai là, tu n’imposeras pas ta loi.
Elle s’adossa violemment sur son dossier, croisa les bras et jeta son regard acide sur le sol à côté d’elle, refusant ainsi de continuer la discussion. Le silence s’éternisa, lourd. Comment en était-on arrivés là ? Comment Vanille se débrouillait-elle pour créer des tensions au sein de ce Club qu’elle aimait tant ?
Elle avait parfaitement conscience que ces tensions n’étaient dus qu’à elle, puisque c’était sa façon d’être qui était reprochée à chaque fois. Et elle ne voulait pas provoquer de clivage. Personne ne semblait être prêt à remettre en cause les principes du Club, et c’était bien dommage. Mais elle savait que ses idées n’étaient pas mauvaises. L’évolution ne peut être que bénéfique, mais il faut qu’elle soit voulue, pas imposée.
Alors que le silence n’avait pas encore été brisé, Vanille se leva sans hâte, attrapa son sac qu’elle accrocha sur son épaule, et annonça :
- Je n’imposerais rien, dans tous les cas, puisque nous sommes un Club où personne n’a d’autorité suprême. Mais si vous refusez que j’exprime mon avis et mes idées, je préfère ne plus participer aux réunions d’organisation.
Elle se retourna d’un mouvement lent et théâtral, et amorça son départ quand elle sentit une main la retenir par le poignet. Elle croisa le regard d’Alexandre, mais ne sut pas vraiment le déchiffrer. Etait-il déçu, réticent, résigné, soulagé ? Tout ce qu’elle pu lire, ce fut la promesse d’en discuter, plus tard, tranquillement. Alors elle pressa doucement sa main pour le rassurer : tout allait bien. Elle n’était pas énervée, peut-être déçue de ce tournant, mais ne ressentait aucune amertume, aucune rancoeur. Elle lâcha sa main et il ne la retint pas. Pourtant, malgré tout, elle ne put retenir un soupir lorsqu’elle poussa les lourdes portes.
Allongée sur son lit, les yeux grands ouverts, Vanille méditait. C’était en tout cas ce que sa mère aurait dit, tout comme le fait de rester allongée ainsi, en se détendant, était une forme de yoga. Dans le tourbillon de ses pensée, la douce candeur de sa mère lui réchauffa le coeur. Malgré leur séparation difficile, évidemment, elles se manquaient. Vanille avait besoin de parler, d’exprimer ce qu’elle ressentait pour pouvoir le comprendre. Cette étrange réunion, dont elle avait claqué la porte (au sens figuré, en vérité, elle l’avait refermée avec un calme étonnant) quelques heures plus tôt, sonnait étrangement das sa mémoire, comme un rêve, ou un souvenir modifié. Etait-ce cela que l’on ressentait lorsqu’on était soumis au sortilège d’amnésie ? Des bribes, des flashs, et surtout la sensation d’avoir vécu la situation d’un point de vue externe ? Comme si ses réactions et ses émotions avaient été guidées dans ce sens, comme si elle était une marionnette, impassible, acquiesçant à la demande d’un narrateur. El
le ne voulait pas quitter le Club, elle ne voulait pas laisser tomber, cela ne lui avait traversé l’esprit à aucun moment, ni lors de son départ, ni maintenant. Mais dans ce cas, pourquoi cette sortie sonnait-elle comme un au revoir ?
Elle détestait dire au revoir. Cette pensée lui rappela celui de son frère, plus d’un an auparavant.
“Evidemment. Tim.”
Elle roula sur le côté de son lit et plongea sa main dans sa valise, en sortie des feuilles de papier A4 (une chose plutôt rare à Poudlard) et entreprit de rédiger sa lettre.
“Salut petit frère.
“Blablabla je ne suis pas petit” Oui je sais, mais si je n’ai pas le droit de t’agacer, alors qu’est-ce qu’il me reste ? Sale gosse. J’espère que tu vas revenir bronzé et plein de piqûres de moustique.
Je suis à Poudlard depuis la rentrée. Maman s’est trouvé un copain. Cet été j’ai voyagé (mais en transport Sorcier, tu détesterais ça, parce qu’on ne voyage pas, on ne fait qu’arriver quelque part).
Les banalités, on s’en fout. Je ne t’écris pas pour ça. Tu vas finir par croire que je ne t’écris que par intérêt pour vider mon sac et c’est vrai. Tu es mon exutoire émotionnel lorsque les autres ne sont plus à la hauteur. Il faut bien que notre fraternité serve à quelque chose. (Je t’aime très fort!)
Il s’est passé quelque chose au Club. Et j’ai un peu claqué la porte. Pas entièrement, pas définitivement, j’ai juste annoncé que je ne participerai plus aux réunions et à l’organisation des événements. Depuis le début, il y a certains aspects qui me dérangent dans leur façon de faire, et lorsque j’ai voulu en discuter, on m’a fait comprendre qu’il n’était pas question de changement là-bas. Et puisque personne ne souhaite que je donne mon avis, je ne me sens pas de rester à participer en silence à chaque réunion.
Et je ne veux pas aller contre l'avis général. Je ne veux pas me battre. J'aime le Club. J'aime ce qu'il me permet de faire, j'aime la création, j'aime les recherches, j'aime le partage. J'aime la cohésion que nous formons. Mais je n'aime pas le fait d’agir comme si on voulait que ce Club soit réputé pour le principe d'être réputé. Je ne veux pas de la grandeur pour la grandeur. Alors peut-être que je n'aime pas le Club comme les autres l’aiment. Je l’aime pour ce qu’il pourrait être.
Je l’aime tellement que je ne le laisserai jamais tomber, mais je ne peux rien faire tant que les membres actuels sont opposés à tout changement. Je pense comprendre pourquoi la plupart restent silencieux face à ces débats : ils ne souhaitent pas participer à une scission du groupe, mais ne se sentent pas conservateurs au point de soutenir les arguments d’Iris. (Celle qui m’a demandé gentiment de la fermer.)
Je veux que ce Club soit meilleur qu’il n’est déjà. Mais je n’imposerai aucun changement qui ne serait souhaité à l’unanimité. Je veillerai à ce qu’il sorte de sa torpeur, de son confort actuel de Club reconnu, qu’il grandisse, qu’il se nourrisse de ce que ses membres ont à lui apporter, qu’il se remette en question pour mieux apprécier ce qu’il est.
Je commencerai par faire entrer une nouvelle école en son sein.
C’est étrange, ce regain d’ambition. Je n’y avais jamais songé, si ce n’est pour m’en moquer, mais je crois que j’ai envie de devenir Maître Créatrice.
Tu vas devoir m’appeler Maître !
Comme d’habitude, je n’attends pas spécialement de conseil. En fait je pourrait parfaitement jeter cette lettre, puisqu’elle a déjà eu sur moi l’effet escompté, celui de mettre de l’ordre dans mes pensées. Merci pour rien.
J’espère que mes hiboux continueront à te trouver, où que tu sois (en Roumanie, en Ukraine ou en Pologne), je ne comprendrai jamais comment ils font.
Embrasse Papa pour moi, dit-lui que je l’aime. Vous me manquez affreusement. Mais ne rentrez pas trop vite, ici la vie paraît bien fade à côté de vos aventures.
Ta petite soeur qui t’aime.
P.S. Ca veut dire quoi, en vrai, 2.0 ?”
End Notes:
Tadaa, merci d'avoir lu !
Je le répète à chaque fois (vous lisez les notes d'auteur, en vrai ? Je crois que j'écris de trop gros pavés.), mais laissez-moi donc vos impressions en commentaire ! Ils m'aident à savoir si la direction que prennent mes idées correspondent aux ressentis que vous, lecteurs, avez.
Parce qu'au fond, pourquoi je fais tout ça ? J'écris parce que j'adore ça, et je publie parce que j'adore avoir des complim - non, enfin si, mais surtout pour que vous jugiez de mon travail ! Que vous puissiez, vous aussi, prendre votre pied à suivre les aventures rocambolesques de Vanille, ses réflexions, ses idées... Et c'est en me critiquant que j'améliorerai mes textes et que vous apprécierez d'autant plus ;)
(Après, soyons honnête, la petite pointe d'excitation lorsque je vois une nouvelle review, c'est un petit bonheur.)
La prochaine fois - je n'ose plus dire semaine prochaine - on continue avec Nathan, avec Hagrid, et avec... un thérianthrope !
A la prochaine !
La dignité des faibles by Deanna
Author's Notes:
Bonjour, bonjour et bienvenue à notre trentième réunion au Club des Créateurs ! Trente réunions ! Les choses se déroulent plutôt... Se déroulent, ne trouvez-vous pas ? Certaines choses ont commencé à lentement changer depuis trente chapitres.
*Encore heureux qu'il s'en passe des choses...
Les publications passeront désormais d'hebdomadaires à (grosso-modo) bi-mensuelles. Les chapitres, plus longs, plus travaillés, me demandent tout simplement une attention plus importante. J'ai à coeur, bien plus qu'au début, de prendre soin de mes mots et de mes rebondissements.
*Tu veux dire qu'on va enfin lire de la qualité ?
De mon côté, du côté écriture, d'une part je prends toujours autant de plaisir à écrire, et je viens de trouver un énième plot twist pour la septième année de Vanille. Elle s'annonce vraiment bien, tout en crescendo. Elle n'est pas encore entièrement organisée, mais toutes les idées et les évolutions sont prêtes.
*Du drame ! Du sang ! Des larmes ! *rire diabolique*
Dans ce chapitre, nous rencontrerons, comme annoncé au chapitre précédent (ah, c'était ça les petites lignes en bas de page ?) un thérianthrope bien connu, un grand presqu'homme bien connu, et nous recevrons quelques conseils bien venus. Vanille aime bien les conseils. Enfin... elle en a bien besoin.
*C'est quoi un thérianthrope ?
Bonne lecture.
*Merci !
...Mesdames et Messieurs, c'était le retour de Lena.
Le bal de l’année précédente ayant été un succès, il fut donc réorganisé selon les mêmes principes, le soir d’Halloween. A l’instar de la première, Vanille tenta vaguement de profiter des danses et de l’ambiance festive, mais son humeur maussade finit par la pousser à partir se coucher sans même tenter d’apercevoir les nouveaux Novices que les autres Créateurs devaient recruter. Ambre et Leanne la rejoignirent bien vite dans leur dortoir, compatissantes, et elles s’organisèrent leur contre-soirée, seules, avec bieraubeurre et petits fourrés rapportés de la fête.
S’organisèrent quelques jours plus tard les entretiens des Novices. Vanille campa sur ses positions et refusa d’y participer, tout comme elle dénigrait les réunions régulières après son altercation avec Iris. Ses cours lui prenaient beaucoup de temps, si bien qu’elle ne remit les pieds au Club des Créateurs qu’au jour de la cérémonie d’entrée, à laquelle il lui fallait évidemment participer. Il s’agissait d’accueillir de nouveaux Créateurs, il était hors de question de la manquer. Elle n’était pas butée à ce point-là.
Les Novices avaient l’air apeuré. Tout comme lors de la cérémonie d’entrée de Vanille, il leur fallu un à un se présenter, et Vanille se demanda si elle aussi avait eu cet air timide et hésitant.
Il y avait Ariane et Lucy, Serdaigle, Orion et Regina, Serpentard, et Basil, Gryffondor.
Les Jeunes et Grands Créateurs se présentèrent à leur tour et arriva le moment du sortilège.
De l’avoir déjà vu à l’oeuvre, Vanille ne fut pas surprise par sa beauté, mais néanmoins se perdit dans sa contemplation lorsque les filaments de lumière violette se réunirent pour former leur réseau, la toile qui les relia tous et les unit, ensemble, définitivement. Ils ne firent plus qu’un, formaient dorénavant un tout, les nouveaux rendant plus fort encore le Club, comme à chaque cérémonie d’entrée.
Pourtant, la lumière, d’habitude si pure et si souple autour des autres, vibra, montra quelques faiblesses autour d’elle. Elle fut la seule à les voir. Son absence, les tensions dont elle était la source rendait son lien avec les autres moins fort. Indéniablement.
Vanille couva des yeux les nouveaux Novices qui examinaient avec attention leurs insignes. Elle se prit à les aimer instantanément pour leur curiosité, leur impatience, leur ravissement, comme une grande soeur aimerait ses cadets. Une impatience de les voir s’épanouir au Club s’empara d’elle.
On leur fit ensuite visiter les locaux du Club, la table ronde, la bibliothèque, les chaudrons, les tables de travail, puis ils se répartirent entre les Créateurs. Ambre accueillit Basil dans sa création de sortilèges offensifs et défensifs propres aux duels. Kerwan prit Lucy, Lorelei et Leire acceptèrent Regina et Orion, et Annabelle, qui avait finalement officialisé auprès des Créateurs son sujet d’étude (mais toujours pas auprès du ministère), décida d’accepter Ariane.
Le soir, en traversant la salle commune, le regard de Vanille croisa ceux d’Ariane et Lucy, qui contemplaient leurs insignes et leurs cravates. Lorsqu’elles la virent, elles lui firent un signe de main timide. Vanille s’approcha d’elles et dit :
- Je suis contente que vous soyez parmi nous. Est-ce que vous avez remarqué ce qui traversait votre insigne ?
- Est-ce un patronus ?
- Votre animal-totem. Annabelle travaille dessus. Si vous n’avez jamais lancé de Patronus, vous pouvez au moins connaître sa forme.
Les deux filles approchèrent leurs insignes de leurs nez jusqu’à en loucher.
- Je crois que c’est un oiseau… on dirait un rapace, avec des mouvements amples, lents…
- Le mien, c’est certainement un cheval. Ou peut-être un zèbre.
- Sur quoi est-ce que tu travailles, Vanille ? Tu ne nous l’as pas dit, demanda Ariane.
Elle réfléchit un moment, hésitante. Elle décida de ne pas trop entrer dans les détails :
- J’étudie les Créatures Magiques. Je fais des recherches, et mes créations, potions et sortilèges, m’aident à approfondir et accélérer ces recherches.
D’ailleurs, il était grand temps de s’y remettre. Elle prévint Nathan et ils se décidèrent d’aller rendre visite au professeur Hagrid.
Encore une fois, c’était une aide extérieure qui permettait à Vanille d’avancer. Elle devait certainement s’y habituer. Elle ne comptait pas passer son temps à étudier des livres, car si toutes les réponses s’y trouvaient, alors ce qu’elle faisait était inutile. Et puis, le professeur Hagrid n’était certainement pas de ceux dont les réflexions pouvaient se trouver entre les pages d’un quelconque ouvrage.
Sur le chemin de la cabane de Hagrid, une réflexion lui revint en tête. Elle n’espérait pas de réponse claire de la part de Nathan, malgré leur amitié naissante et sincère, mais cela lui tournait régulièrement en tête depuis maintenant plusieurs mois.
- J’aimerais savoir ce que tu as dit à Jules, dit-elle de but en blanc.
- Ce que j’ai dit à Jules ?
- A mon propos. Avant qu’il ne vienne à la charge pour m’avoir dans le Club.
- Tu le sais déjà. Je lui ai dit que tu avais un fort potentiel, que tu méritais ta place.
- Non, il y a autre chose. Je sais que parfois, tu peux voir, ou au moins deviner l’avenir. Je suis certaine que tu lui as parlé du mien. S’il ne s’agissait que de potentiel, Revelavis l’aurait renseigné seul. Tu lui as dit quelque chose, tu sais quelque chose, et j’aimerais savoir quoi.
- Non.
Il n’avait pas haussé le ton, ni hésité. C’était un non simple, un peu froid, sans émotion, et sans aucune envie de négocier.
- Tu me dois au moins ça. Ca me concerne.
- Pourquoi je te le devrais ? Parce que je l’ai dit à Jules ? Je n’aurais pas dû. Excuse-moi pour ça. Mais je ne regrette pas, je voulais que tu sois dans le Club. C’est tout.
Sans prévenir, Vanille lui prit la main. Il n’y avait entre eux aucune ambiguïté, mais d’un oeil externe, c’était un geste tout à fait romantique.
“C’est extrêmement malpoli. Ne fais plus ça.”
Il tenta de se libérer mais elle ne le lâcha pas :
“Tu as tes raisons pour me cacher ça. Des raisons idiotes de celui qui ne veut pas influencer l’avenir. Mais tu as fait en sorte que j’entre dans le Club, pourquoi ? Quel est ton intérêt ?”
“Je ne sais pas. Lâche-moi.”
“Tu sais des choses que tu ne me dis pas, et même si tu ne les comprends pas toi-même, tu n’as pas le droit de les garder pour toi. Plus maintenant. Alors que je sais qu’elles me concernent. Nous sommes amis Nathan.”
“Drôle de façon de traiter tes amis.”
Il arracha sa main et lui lança un regard assassin. Elle ne répliqua pas et se tourna vers Hagrid, qu’ils venaient de rejoindre dans son potager. Il était en train de bichonner d’énormes courges au moins aussi larges que lui.
- Bonjour Professeur Hagrid.
- Bonjour Miss Ocean ! répondit-il de sa voix bourrue.
Lors de ses cours de Soin aux Créatures Magiques, bien qu’elle n’ait jamais été très à l’aise avec ces dernières, Vanille avait ressenti une grande affection pour son professeur, qu’elle voyait comme un homme (s’il en était un) sincère, sympathique et passionné. Elle avait obtenu un Acceptable à sa BUSE dans sa matière, et avait décidé à contre-coeur de ne pas poursuivre pour pouvoir se concentrer sur celles où elle avait excellé.
Il abordait le sourire de celui qui les avait vus se tenir la main, ce sourire d’adulte qui voit les jeunes se mettre en couple. Il jeta un oeil interrogateur à Nathan, qu’il ne connaissait pas.
- Nathan. Je n’ai pas pris l’option soin aux Créatures Magiques, Monsieur.
- Pas de mal à ça.
Il contourna ses légumes, dont quelques énormes citrouilles qui avaient été utilisées en décoration d’Halloween, ôta ses gants en s’approchant d’eux et dit :
- Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?
- Professeur, nous avons appris que vous étiez ami avec Hermione Granger, et nous…
- Ah non !
Sa grosse barbe trembla dans ce qui ressemblait à de la colère, et Vanille fut un peu effrayée. Elle en recula d’un pas.
- Pas vous ! Vous allez pas devenir comme tous ces idiots qui m’adressent la parole que pour que je leur parle de Harry et Hermione ! Fichez-leur la paix, bon sang. Rien à vous apprendre sur eux.
- Non professeur, vous vous méprenez, dit Nathan d’une voix calme.
Hagrid se calma aussitôt et le fixa sans rien dire.
- Nous avons rencontré Hermione Granger, c'est elle qui nous a proposé de venir nous adresser à vous, nous avons besoin de votre aide pour un projet de recherche.
Vanille vit dans les yeux de son professeur passer le soulagement, et il leur proposa de venir chez lui pour boire une tasse de thé.
- Vous voulez parler aux centaures ? Pourquoi ?
- Nous voulons en apprendre plus sur leur magie.
- ‘voudront pas. Des créatures têtues et fières, comme les gobelins. Ils partagent pas facilement leur savoir.
Vanille et Nathan échangèrent un regard par-dessus leurs thés noirs.
- Professeur, ne connaissez-vous pas au moins l’un d’entre eux qui puisse accepter de nous parler ? Au moins pour pouvoir leur expliquer notre projet, nos recherches.
Il hésita en fronçant ses sourcils broussailleux, puis finit par abdiquer.
- Bon. J’essayerai de parler à Firenze. Il aime bien les sorciers. Je vous enverrai un hibou quand je lui aurai parlé.
Il se leva en repoussant involontairement la table avec ses bras massifs.
- Est-ce que je vous ai montré mes citrouilles ? Quand elles seront creusées, on pourra y cacher des lutins ou des doxys pour effrayer les élèves trop curieux ! C’est mon projet pour Halloween prochain, elles n’étaient pas assez grosse cette année.
Vanille et Nathan prétextèrent quelques devoir pour éviter d’avoir à discuter avec le professeur enthousiaste de ses idées un peu trop extravagantes.
La lettre de Hagrid arriva le lendemain dans la salle commune de Serdaigle. Il leur donnait rendez-vous en fin d’après-midi pour qu’ils se rendent dans la Forêt Interdite, car Firenze avait accepté de les rencontrer.
Vanille angoissait un peu. Alors que les Elfes étaient serviables et peu craintifs, du moins avec elle, les centaures n’accepteraient peut-être pas si facilement de participer à cette expérience, d’autant plus qu’elle consistait à verser une goutte de sang dans le but de permettre à des sorciers de voir leur magie. Cela partait mal. C’était un pari risqué, et la présence d’Hagrid, bien qu’indiscrète, la rassurait légèrement. En revanche, elle n’aimait pas l’idée de révéler ainsi au professeur la nature de sa potion. Peut-être arriverait-elle à parler seule à seule avec Firenze. Mais dans le cas où les centaures seraient foncièrement opposés à la Magie du Sang, dans le cas où la situation d’avance tendue échapperait à tout contrôle, rester seule avec un centaure n’était peut-être pas une si bonne idée.
Lorsque, le soir venu, alors que le Soleil offrait ses derniers rayons, Vanille, Nathan et Hagrid se dirigèrent vers la forêt, elle n’avait toujours pas résolu sa problématique, et s’était armée de son flacon de potion, non sans une pointe d’appréhension.
Ils s’enfoncèrent dans la forêt, Hagrid et son molosse en tête. Au moment où elle traversa l’orée, elle se sentit immédiatement et irrémédiablement à l’aise. L’air sylvestre la rassura, l’odeur des arbres, le crissement des feuilles mortes sous ses bottes, cette petite vapeur blanche qui s’échappait de ses narines quand elle expirait.
Inconsciemment, alors qu’ils avançaient toujours plus loin entre les arbres, elle passait ses mains sur les feuilles qui passaient à sa portée, humait la moindre odeur de sève, parfois même fermait les yeux sans se prendre dans les pieds la moindre racine, étonnement. Pourtant, elle avait toujours cru que son milieu naturel était la côte marine. Son animal-totem était un albatros, vaste oiseau des mers. Marcher sur les falaises, au bord de l’océan, le bruit impitoyable des vagues s’écrasant cruellement sur la roche, brisant le quartz en sable, l’écume blanche dansant au fil des marées, hypnotisante, l’iode qui asséchait sa peau et ternissait ses cheveux, et les bateaux qui fuyaient au loin, là où le soleil couchant arrosait d’une douce lumière la côte verte devenue rose, orange, rouge.
Et elle ouvrit les yeux et se retrouva de nouveau plongée dans le noir de la forêt, derrière Hagrid qui les guidait de sa lanterne, suivie de Nathan qui trébuchait à chaque pas, jurant de se retrouver si loin du moindre chemin.
Une chouette hulula, et Vanille frissonna face à la poésie des lieux. La lune blanche éclairait enfin le sol, et une silhouette immense se découpa dans la pénombre. Imposante.
- Bonsoir, Firenze, fit Hagrid d’une voix assurée.
Vanille et Nathan se stoppèrent d’un coup pour observer sans aucune politesse l’être qui se trouvait face à eux. Il sortit d’entre les arbres pour se placer dans la lumière. Haut d’au moins deux mètres, il était exactement ce que l’on pouvait attendre d’un centaure, de ses larges et puissants sabots à sa longue chevelure attachée en catogan. Mais au delà de sa thérianthropie, c’était sa posture qui impressionnait. La partie humaine de son corps, son buste, ses épaules, son port de tête, il était majestueux et fier. Il arborait une musculature à faire pâlir plus d’un poursuiveur (le Quidditch était pourtant un sport physique), et sur sa poitrine luisaient quelques cicatrices brillantes. Un arc finement sculpté d’un bois rouge était accroché sur son dos, d’où un carquois empli de flèches dépassait. Il arborait une barbe sombre, et un sourire tranquille. Il dégageait une aura tellement puissante que Vanille songea un instant qu’il n’était pas nécessaire de boire une quelconque potion pour comprendre qu’il respirait la magie.
- Bonsoir, Hagrid. Bonsoir, jeunes Vanille et Nathan.
Sa voix résonna dans toute la forêt, et Vanille en frissonna de toute son échine. Elle entendit Nathan répondre un court et timide “Bonsoir”, mais n’arriva pas à l’imiter, et se contenta de hocher lentement la tête en continuant de le fixer. Le centaure soutint un instant son regard, insondable, et reporta son attention vers Hagrid.
- Je suis satisfait de voir que ton frère se porte de mieux en mieux. Il vient parfois voir les centaures, et je me charge de le ramener chez lui.
- Oui, lança Hagrid l’air fier, je vous avais dit qu’il apprendrait vite. Je savais que vous finiriez par l’accepter.
- Nous n’avons pas eu le choix, souviens-t’en.
Hagrid grommela une parole incompréhensible, puis lança :
- Je vais justement le voir. Je te laisse avec eux. ‘Reviens dans pas longtemps.
Puis, sans une autre explication, il partit dans la forêt avec sa lanterne, laissant Vanille et Nathan seuls, dans la forêt, avec pour seule lumière celle de la Lune et pour seule compagnie un centaure dont ils ne connaissaient les us et coutume que des théories de livres sorciers.
Ils se tournèrent vers lui, et il tenta de les rassurer en voyant leurs visages apeurés.
- Ne vous inquiétez pas, il va revenir. Vous êtes en sécurité ici avec moi. Si vous le désirez, nous pouvons nous rendre dans une clairière un peu plus loin où vous pourrez allumer un feu. Je sais que vous autres, sorciers, aimez la lumière et la chaleur, même lorsque la nuit la plus claire s’offre à vous. Vous n’êtes que peu sensibles aux étoiles et à leurs promesses…
Il avait poursuivi sa tirade en repartant vers la forêt, suivit par les deux jeunes sorciers qui commençaient à se demander si leur professeur n’était pas complètement irresponsable et inconscient de les laisser ici en pleine nuit. Ils arrivèrent dans cette fameuse petite clairière, où ils lancèrent quelques sortilège de feu magique, qui, sans brûler la moindre feuille, leur réchauffa les mains et les pieds, et leur apporta un peu de réconfort.
Le centaure, Firenze, s’installa près d’eux.
- Hagrid m’a dit que vous désirez en apprendre plus sur notre magie. J’ai tout d’abord refusé, et je souhaite vous le dire tout de suite : même si mes relations personnelles avec les sorciers sont plus cordiales que celles de mes congénères, je ne partagerai pas la magie des centaures gratuitement. Je l’ai fait par le passé, et cela m’a valu un bannissement de mon troupeau. Je ne souhaite plus que cela arrive et respecte leur désir de garder pour nous nos us et pouvoirs.
- Alors, pourquoi avoir accepté de nous rencontrer ? s’étonna Vanille.
- Je me demande pourquoi deux sorciers élèves de Poudlard s’intéressent ainsi aux centaures, fit-il d’une voix particulièrement lente. Habituellement, lorsque cela arrive, ce sont des membres de votre ministère qui ne respectent aucunement les autres créatures magiques qu’eux-même, entrent dans nos terres sans en demander l’autorisation, et viennent exiger, ordonner, contrôler. Je me suis douté, du fait que vous vous soyez adressé au seul humain que nous côtoyons régulièrement et respectons pour nous rencontrer que votre démarche n’est pas aussi présomptueuse qu’aient pu l’être celles de vos paires. Me contredirez-vous ?
Il y avait dans ces mots un mélange subtil de dédain et de curiosité évidente. Il était clair qu’il ne portait pas les sorciers et leurs manières de faire dans son coeur, mais pourtant, il ne semblait pas en colère.
- J’espère que non, osa alors répondre Vanille. Si nos manière ou nos paroles vous offensent, j’espère que vous nous en excuserez. Nous ne venons avec aucune mauvaise intention, mais des désaccord inhérents à nos différences peuvent survenir...
Dans sa vision périphérique, elle vit Nathan lui jeter un regard étonné. Il n’avait jamais dû l’entendre parler ainsi. Elle s’était silencieusement entraînée toute la journée, consciente que les centaures apréciaient être respectés. Il lui avait semblé que parler avec courtoisie pouvait être une marque de politesse. Le centaure sembla avoir confiance en ses paroles, ce qui la rassura. Il ne lui restait plus qu’à expliquer sa venue, en essayant d’être le plus clair possible dans sa démarche.
- Je fais actuellement un travail de recherche sur la magie, dans son ensemble. Un de mes principaux questionnement était celui-ci : les êtres utilisant la magie l’utilisent-ils différemment, ou utilisent-ils une magie différente ? J’ai pu observer la magie s’émanant des sorciers, et celle s’émanant des Elfes. Elles sont très différentes. Je ne mets aucune échelle de valeur dessus, ce n’est pas le but. En vérité, mon intérêt va plus loin que celui d’étudier ceux qui utilisent la magie, il s’étend à celui d’étudier la Magie elle-même, sa nature et ses origines. Pour l’instant, je suis la piste de ceux qui l’utilisent, ceux qui en sont pourvus.
Elle regarda la centaure, observa ses réactions. Il l’écoutait avec attention, mais ne fit aucun commentaire. Alors, elle poursuivit, se doutant qu’il désirait avoir toutes les informations avant de se prononcer :
- Pour observer les émanations de magie, je possède une potion, dont je bois une gorgée. Pour voir la magie s’émaner de quelqu’un, j’ai besoin de son accord - du moins, par respect, je préfère le lui demander - et d’une goutte de son sang.
Le centaure eut un fort reniflement coléreux, et une vapeur dense sortir de ses narines. Son visage exprimait clairement de la colère - Vanille s’était douté que cette information serait la plus difficile à faire accepter.
- Je suis consciente de ce que cela implique, et j’ai moi-même eu des difficultés à me l’avouer.
Elle sortit la fiole :
- Il s’agit de Magie du Sang. Une goutte de mon sang et une mèche de mes cheveux ont été nécessaires pour la fabrication de cette potion, pour que je puisse m’en servir. Si le sang d’une autre espèce se retrouve dans cette potion, alors elle sera en mesure de me montrer son aura magique. Je sais que la Magie du Sang est considérée comme une branche de la Magie Noire. Je me rassure en pensant que lorsqu’il n’y a aucune intention belliqueuse, et que la potion ne provoque ni douleur ni asservissement, alors la Magie du Sang, et la Magie Noire n’en ont que le nom et la définition, et non pas l’essence même, la mauvaise essence. Je vous l’ai dit, je n’ai aucune mauvaise intention en faisant ces recherches.
- Mais alors, jeune fille, quelles sont-elles, vos intentions ?
Vanille hésita, ne comprenant pas vraiment la question. Le centaure précisa :
- Quel est votre but ? Lorsque vous vous lancez corps et âme dans la fabrication de cette potion, lorsque vous bravez votre peur pour venir ici, au milieu de la forêt ? Qu’est-ce qui anime vos actes ? Est-ce la simple connaissance ? Que pensez-vous qu’elle vous apportera ? Que pensez-vous faire, lorsque vous serez en possession du plus grand secret de notre ère ? Lorsque vous connaîtrez l’origine et la nature de tout ce qui vous entoure ?
Elle sentit ses côtes trembler sans qu’aucune fraîcheur n’ait pénétré ses vêtements.
- Alors, vous élèverez-vous au-dessus de nous ? Vous considérerez-vous comme à part ? Supérieure ? Pensez-vous que ces connaissances puissent vous donner pouvoir, contrôle ? Et si c’est le cas, qu’en ferez-vous ?
- Je me battrai pour la justice, chuchota Vanille, le visage baissé, une goutte de sueur perlant sur son front, les sourcils froncés.
Il y eut un silence, pendant lequel la forêt entière attendait qu’elle poursuive, son regard sérieux toujours tourné vers le sol, incapable de rendre le moindre regard. Le centaure avait ouvert une brèche dans son esprit, une petite entaille qui n'allait jamais se refermer.
- Si je découvre la raison qui entrave les Elfes, je leur rendrai leur liberté. Si je découvre un moyen de détruire les Détraqueurs, ils ne seront plus qu’un souvenirs. Si je découvre quelqu’injustice que ce soit, envers les sorciers ou envers tout autre être, magique ou non, alors je me battrai. Je me battrai pour la dignité des faibles. Pour la justice envers les opprimés.
Elle leva alors les yeux vers le centaure, prise d’un regain de confiance qui lui était pourtant étranger, et ils échangèrent un profond regard.
- Croyez-le ou non, Firenze, mon premier but n’était que la soif de connaissance, la recherche pure. Mais l’étude de la magie des Elfes m’a poussée à penser qu’un sortilège les force à nous servir - nous, sorciers, alors je trouverai un jour le moyen de les libérer. Vous dites que la connaissance m’apportera peut-être le pouvoir, le contrôle ? Je pense qu’elle m’ouvrira les yeux, et m’obligera à agir. Je n’aurai de cesse de vous répéter que mes intentions ne sont pas mauvaises, parce que je le pense au plus profond de moi. L’injustice, la cruauté, l’orgueil et le mépris me dégoûtent. N’y voyez pas là une quelonque prétention, Firenze. Je suis consciente de mes limites. Mais tant que je pourrai agir, je le ferai.
Alors, sans un mot, le centaure tendit sa main, et pris la fiole de potion. Il la débouchonna.
- J’étais prêt à vous demander diverses choses en échange de cette goutte de mon sang. Un don pour un don. Mais je ne le ferai pas. Je ne vous donnerai que ce conseil, Vanille. En échange de mon sang, vous devrez entendre ce que je vais vous dire.
Et Vanille, sans un mouvement, sans un mot, sincèrement, intensément, porta son attention sur ce qu’il prononça ensuite :
- Vous ne pourrez qu’échouer si vous écoutez trop passionnément votre colère. Aimez, pardonnez, et ne considérez pas votre justice comme universelle. Croyez en vous, et en chacune des personnes que vous croiserez lors de votre quête. Et lorsque les jours viendront où vous devrez faire des choix, alors n’écoutez jamais celui que vous dicte votre hargne.
Le centaure lança sa main au-dessus de sa tête et sortit une flèche de son carquois, il piqua le bout de son doigt et fit tomber une goutte rouge dans la fiole, qui s’assombrit. Il la rebouchonna, et la rendit à Vanille, qui, silencieuse, sans quitter du regard celui dont les mots avaient traversé son esprit, en bu une gorgée, avant de tendre la main vers son ami pour qu’il puisse faire de même.
Elle sentit littéralement ses pupilles se dilater. La forêt, jusque là sombre et mystérieuse, se retrouva accueillante et chaleureuse. Vanille se leva. Elle voyait tout, la moindre branche qui vibrait sous une brise imperceptible, le moindre insecte qui se nourrissait des feuilles mortes qui jonchaient le sol, et là-haut, vers le ciel, lorsqu’elle leva les yeux, elle fut prise d’un tourni lorsqu’elle aperçu bien plus d’étoiles qu’elle n’en avait jamais vues. Elle se rappelait de ses cours d’astronomie et de divination stellaire, et sans le moindre soucis, réussit à repérer tous les astres et les constellations qui s’offraient à son regard. La voie lactée brillait, magnifique.
Et en baissant les yeux, elle se heurta à Firenze, le centaure, qui s’était également levé, et la dominait de toute sa hauteur. De sa peau, de son coeur s’émanait une dense lumière noire. Ou une sombre fumée brillante. Non, c’était impossible à décrire. L’aura était connectée de toute part avec tout ce qui entourait le thérianthrope, les arbres, le tapis de feuille, et même l’air… Comment était-ce possible ? Il faisait indéniablement partie d’un tout. Il était dans la forêt à sa place la plus logique, la plus forte. Elle resta un long moment à le regarder, et lui, immobile, sa flèche dans la main, lui rendait son regard. Le silence devint peu à peu opressant, car si ses yeux s’étaient ouverts à la magie de la forêt, son ouïe elle ne l’était pas, et elle sentait que quelque chose manquait pour véritablement faire partie de ce tout. Au delà des bruits, peut-être les sensations, les connaissances, elle n’en savait rien, mais elle ne se sentait plus à sa place dans la forêt. Elle était chez les centaures. Peut-être a forêt ne leur appartenait pas à eux seuls, mais ils étaient bien plus à leur place qu’elle et ses questions idiotes, ses recherches, ses aspirations. Ce n’était pas son monde. La forêt n’était pas son monde. Elle restait douce, accueillante, elle s’était mise à l’aimer, avec tout ce qu’elle en voyait maintenant, mais se sentit au plus profond d’elle-même bien impétueuse de venir ici pour en comprendre la magie.
Elle comprenait maintenant. Cette magie qui habitait la forêt n’était pas la sienne. Elles n’étaient pas si différentes, elles étaient peut-être soeurs, mais la magie qui coulait dans ses veines et celle qui habitait le centaure et sa forêt n’avaient en commun que le nom. Ils auraient beau partager savoir et techniques, ils auraient beau se battre et se haïr, ils n’arriveraient jamais à prendre l’ascendant l’un sur l’autre.
Alors sa vision s’effaça, et pendant de longues secondes, Vanille fut aveugle. Puis, lorsque ses pupilles s’habituèrent à la vision humaine de la forêt, qui devint tout à coup banal et sombre, le centaure, qui avait éteint le feu magique, s’enfonça entre les arbres, les invitant à le suivre. Sans un mot. Sans un dernier regard.
Il ne leur demanda pas ce qu’ils avaient vu. Il se contenta de les ramener à leur professeur, et de disparaître entre les arbres.
End Notes:
Merci de votre lecture !
J'espère sincèrement que vous appréciez toujours cette histoire. Au moins autant que moi ! (C'est pas possible.)
La prochaine fois, nous parlerons... Eh bien. Nous parlerons d'amour. Et, vous l'aurez peut-être remarqué, moi et les romances, on est pas très copines.
Aux différentes façons d'aimer by Deanna
Author's Notes:
Bonjour, bienvenue a notre trente-et-unieme reunion du Club des Createurs !
Je vous souhaite une bonne annee ! Je publie un peu en retard, je suis en vacances avec Lena (d'ou ma difficulte a ecrire avec des accents, je suis dans un pays ou le clavier est cyrillique).
*Et je dirais meme plus, le clavier est en кирилица !
Merci pour vos super commentaires sur le dernier chapitre ! Ils m'ont fait super plaisir :D
*Et du coup elle est toute joyeuse et insupportable. Bon boulot les gars.
Je galere alors je ne vais pas m'etendre plus, je vous souhaite une bonne lecture !
*Et je dirais meme plus, Приятно четене !
Hagrid les récupéra en chemin et les guida vers la sortie de la forêt. Il ne leur posa aucune question. Sous le choc de ce qu’elle venait de vivre, Vanille resta un long moment silencieuse, suivant pas à pas son professeur. Puis, au moment de sortir de la forêt, lorsqu’Hagrid annonça qu’il les accompagnerait jusqu’au château, son cerveau se remit en marche, et, de nouveau consciencieuse, tenta de trouver quelques nouvelles pistes pour continuer ses recherches, déjà envieuse de poursuivre. Elle parla à Hagrid de son envie de voir d’autres créatures magiques. Il leur apprit que les sirènes du lac de Poudlard ne s’étaient plus montrées depuis la mort de Dumbledore, plusieurs années auparavant. Vanille ne pouvait donc espérer les rencontrer. Ils évoquèrent les gobelins succintement, mais renoncèrent bien vite à l’idée de leur demander de l’aide : si certains centaures pouvaient exprimer un certain respect, ou du moins des sentiments dépourvus de colère envers les sorciers, ce n’était pas le cas des gobelins, contre qui ils avaient combattu lors de plusieurs guerres sanglantes. Leur histoire commune était bien trop tendue, et même les évènements récents, la chute du régime de Lord Voldemort n’avait pu apaiser ces tensions. Après tout, Voldemort avait été un sorcier.
Elle avait pensé observer d’autres créatures magiques, celles qui n’utilisaient pas la magie, mais en étaient indéniablement pourvues. Mais elle ne souhaitait pas expliquer à Hagrid en quoi consistaient ses recherches. Aussi, ces créatures, dépourvues de parole, comme les sombrals ou les doxys, ne pouvaient exprimer leur accord sur le fait de prendre une goutte de leur sang. C’était un voeux auquel elle tenait, ne souhaitant pas impliquer des êtres incapables de donner leur accord dans une magie potentiellement dangereuse.
Alors, ils laissèrent de côté l’idée, et tentèrent de repartir sur d’autres bases que les créatures magiques. Après tout, ils avaient fait beaucoup d’avancées à ce sujet.
Les mots de Firenze résonnaient régulièrement dans son esprit.
“Vous ne pourrez qu’échouer si vous écoutez trop intensément votre colère. N’écoutez pas les choix qu’elle vous dicte. Ne considérez pas votre jutice comme universelle.”
Ces conseils s’incrustèrent en son for intérieur, comme si le centaure avait réussi à lire en elle, et pourtant ils n’étaient adressés à elle, pas directement. Ils étaient pour une autre Vanille, celle qui sommeillait, celle qui parfoit surgissait lors de ses colères.
Celle qui enrageait de voir les Elfes contraints dans leur soumission. Celle qui croyait en un Club des Créateurs plus sobre et plus intègre. Celle qui rêvait de justice, au point de la confondre avec vengeance. Ils étaient pour la Vanille qu’elle était en train de devenir. Pour celle qui peu à peu prenait de la place, et osait user de Magie du Sang, osait se battre contre ses amis, osait rêver et lutter pour un monde où la justice… sa justice serait prônée. Sa vision de l’équité, de la justice, de l’honnêteté, de l’intégrité, de la logique, sa propre vision d’un monde idéal… n’étaient que les siennes. Elle comprit qu’il lui faudrait se battre, en quelque sorte, contre elle-même. Un jour.
Vanille eut énormément de travail à l’approche des vacances de Noël. Elle réussit à prendre quelques moments pour synthétiser ce qu’elle avait appris avec les Elfes et Firenze, mais fut obligée de restreindre ses soirées au Club des Créateurs. En revanche, elle continuait à se rendre au Club de Duels : c’étaient ces soirées qui, comme le Quidditch pour les joueurs, lui permettaient de faire redescendre la pression des cours. Les Duels étaient un vrai sport, et elle ressortait de ces séances essoufflée mais satisfaite. Ambre était de plus en plus fière d’elle, car elle commençait à réussir à lui tenir tête. Elle se battait avec de plus en plus de précision, et gardait sa concentration à son maximum à chaque combat.
Et un soir, deux jours avant les vacances de Noël, il y eut un incident. Après deux gardes contrées efficacement, lors d’un combat à deux contre deux, Ambre parvint à désarmer l’adversaire de Vanille au prix d’un relâchement de sa propre défense, et se prit un sortilège explosif en plein poumons. Dans un panache de fumée, elle se retrouva effondrée sur le sol. La scène rappela à Vanille la fois où, au Club, un nouveau sortilège l’avait sonnée : la scène se répétait, et Vanille su comment réagir. Malheureusement, la puissance du sort reçu avait été combinée avec le maléfice que Vanille avait tenté de lancer, et, dans le bazard que fut ce combat, Ambre se trouva incapable de se relever. Et cette fois-ci encore, elle fut envoyée à l’infirmerie.
- Rien de grave, affirma Ambre, lorsqu’elle reçu la visite de Vanille et Leanne. J’ai la tête dure. Comme d’habitude.
Elle avait dû être transportée semi-consciente, sa respiration était restée rauque un long moment, avait mis plusieurs heures à se réveiller, mais non, rien de grave. Ambre était décidément une casse-cou dans l’âme. Rien n’arrivait à étancher sa soif d’action, elle voyait chaque bosse, chaque blessure, et même chaque défaite comme une victoire, comme un pas vers son but. Vanille s’assit sur son lit tandis que Leanne approcha une chaise.
- Il faudrait peut-être vous calmer pendant vos combat, dit cette dernière. J’ai l’impression de vous voir réparer plus de bosses et de bleus de semaine en semaine.
- Vanille devient coriace, je monte peu à peu le niveau, répliqua Ambre en lui lançant un clin d’oeil.
- A ce rythme-là, vous allez pouvoir vous inscrire aux Clubs officiels de Duels l’année prochaine.
Les duels ne se restreignaient pas au Club de Poudlard, il existait des groupes officiels, nationaux, des rencontres régionales et mondiales. Les Duels magiques étaient le second sport le plus prisé des sorciers, après le Quidditch.
C’était là le but d’Ambre : intégrer les clubs de duels. Elle inventait toujours de nouveaux sortilèges pour ses combats et, grâce au Club, à la directrice Roy qui avait été une duelliste renommée en France, et aux relations qu’ils lui donnaient, elle commençait à vraiment envisager sa carrière dans les duels.
Vanille et Leanne restèrent plusieurs heures à l’infirmerie. Mrs Pomfresh leur promis une libération dans la soirée, le temps que ses potions fassent effet. Une fois n’est pas coutume, elle parlèrent de garçons. Malgré leur seize ans, ce n’était étrangement pas un sujet régulier dans leurs conversations. Aucune d’elles n’avaient eu jusque cette année d’histoire de coeur, elles étaient toujours restées en groupe jusqu’à leur entrée dans le Club, un peu renfermées entre elles.
Leanne n’avait jamais eu de béguin pour qui que ce soit. Son manque évident de confiance en elle en était certainement la cause, et même si, les années passants, elle acceptait de mieux en mieux son physique et devenait plus naturelle, elle ne s’était jamais vraiment intéressée à personne. Elle aimait ses amis, affirmait que pour elle, l’amitié était une forme d’amour, que cela lui suffisait pour l’instant. Malgré tout ce qui avait pu se passer entre elles, Leanne avait pardonné et vivait parfaitement bien la situation d’être en dehors du Club des Créateurs. Comme elle était au courant de son existence, elle participait régulièrement aux discussions autour du repas ou sur les sofas de la salle commune avec les filles, Octave, Olivier, et parfois certains Jeunes Créateurs des autres maisons qui venaient leur rendre visite.
Discussions qui tournaient souvent autour des avancées des créations, mais parfois, les sujets devenaient plus privés, plus personnels.
Vanille en arrivait même parfois, mise en confiance, à parler de sa famille, de sa mère de moins en moins présente, de son frère au bout du monde.
Ambre non plus n’avait jamais eu d’histoire, mais elle n’affirmait pas avec autant de fougue que Leanne le fait de n’avoir de béguin pour personne. De plus en plus régulièrement, le sujet la faisait rougir, et Vanille aimait adopter un air taquin pour lui soutirer des informations. Elle était persuadée qu’elle viendrait d’elle-même en parler, mais elle sentait malgré tout qu’il y avait quelque chose de particulier dans le rose de ses joues, dans les regards hésitants qu’elle pouvait lancer à Vanille. Elle qui n’avait aucun don pour comprendre ce que pensaient, vivaient les gens autour d’eux, même ceux pour qui elle avait le plus d’estime (elle se souvenait parfaitement du choc que le baiser d’Oreste et Lorelei lui avaient fait), elle ne pouvait décemment pas compter sur cela pour deviner - elle ne pouvait compter sur le fait de deviner tout court. Avant que le sujet ne dérive trop - elle reconnaissait en revanche les dons d’Ambre pour dévier les sujets gênants ou qui ne l’intéressaient pas - elle lança un clair et peu réfléchi :
- Est-ce que tu comptes nous le dire, un jour ? Qui est la personne pour qui tu as un béguin ?
Ambre ouvrit en grand ses yeux dorés, comprenant enfin pourquoi Vanille la fixait depuis le début de la conversation.
- Il n’y a personne, tu le sais bien…
- Je sais que je suis complètement à la ramasse, parfois. Mais tu me laisses trop d’indices. Et je n’arriverai jamais à le deviner toute seule. Tu sais que tu peux nous en parler ! Moi je vous parle bien d’Alexandre !
Ambre rit, sans méchanceté :
- Parlons-en d’Alexandre, justement. Est-ce qu’on peut vraiment parler de couple ? Vous n’agissez vraiment pas comme si vous l’étiez. Tu le vois quand tu le croises par hasard, et le reste du temps vous ne faites presque rien pour vous voir plus… Sauf lorsque vous travaillez ensemble. On dirait un couple d’adultes.
- On prend notre temps. Pourquoi tu changes de sujet ?
- J’essaye de comprendre. Tu es amoureuse ?
Vanille hésita, pourtant, elle connaissait la réponse. Et cela ne la dérangeait pas.
- Je te réponds si tu me dis de qui toi tu es amoureuse.
- Rappelez-moi votre âge, les filles ? Dix ? Onze ans ?
Elles se tournèrent vers Leanne, qui elle fixait l’entrée de l’infirmerie où deux élèves plus jeunes, dont un était plutôt amoché, venaient de s’installer.
- Je te donne un indice, dit Ambre en se retournant vers Vanille. Et toi tu me dis où tu en es dans tes sentiments.
- Marché conclu. Qui c’est ?
- Les filles…
Elles ignorèrent Leanne sans vraiment s’en rendre compte.
- Juste un indice. Tu connais cette personne mieux que moi. D’une certaine manière, tu tiens à elle plus que moi.
- Comment ça ?
- Où en es-tu dans tes sentiments pour Alexandre ?
- Je ne vois pas… commença Vanille avant de voir le regard accusateur d’Ambre. Je n’en sais rien, je ne suis pas… Je n’ai jamais…
- Van. Ambre.
Elles se tournèrent vers Leanne qui continuait de fixer l’entrée de l’infirmerie. Les deux jeunes garçons qui étaient entrés un instant plus tôt discutaient avec énergie. Leanne garda les yeux rivés sur eux, en silence, et ses amies firent de même. C’étaient deux garçons de deuxième année, peut-être à Serpentard ou à Gryffondor. Au bout d’un moment, Leanne murmura :
- Je connais ces garçons…
- Ah ? En même temps, c’est une école. On croise du monde, dit Vanille, sans comprendre la surprise de Leanne.
- Je veux dire… je les ai croisés, une fois… je crois… Mais j’ai oublié. ça avait un rapport avec… Avec…
Ambre et Vanille échangèrent un regard.
- Si tu as oublié, ce n’était peut-être pas important.
- Non, c’est étrange, je me souviens de quelques détails, mais… c’est comme si mon cerveau refusait que j’accède à ces souvenirs. Je n’ai que des flashs.
- Le sortilège d’Oubliette, comprit Vanille. Mais pourquoi aurais-tu oublié ces garçons ? Quel rapport ont-ils avec le Club ?
Elle échangea un regard d’incompréhension et de suspicion avec Leanne. Sans prévenir, Ambre leva sa baguette et chuchota un sortilège : soudain, ce fut comme si les deux garçons qui poursuivaient leur discussion parlaient à quelques centimètres d’eux. Ambre posa son doigt sur ses lèvres, faisant comprendre à ses amies que le sortilège agissait dans les deux sens. C’était comme un tunnel entre les deux groupes dans lequel les sons étaient décuplés.
- Tu pourrais demander à cette fille. Lily. Elle t’aiderait sûrement, fit celui des deux qui n’était pas allongé.
- Mais je n’ai plus un Gallion en poche, fustigea l’autre. La dernière fois, elle m’a pris la totalité de mon argent de poche pour une plume rédactrice. Et elle ne fait pas dans les potions.
- Si, elle crée des enchantements d’objets et des potions. Terence a pu sécher plusieurs cours et plusieurs retenues. Je suis sûr qu’elle peut t’aider pour tes épreuves, même si tu n’as pas assisté aux cours. Il parraît qu’elle a un labo entier pour créer tout ça.
- Mais ça ne change rien au fait que je n’ai plus d’argent.
- Je t’en prêterai, ce n’est pas un soucis.
Le sortilège d’Ambre s’annula d’un coup de baguette discret. Les trois filles se regardèrent avec des yeux ronds. Elles avaient compris la même chose, mais n’osaient pas en parler, de peur de se faire entendre. Vanille et Ambre ne reprirent pas leur discussion, aucune des deux n’ayant vraiment envie de continuer à avouer des sentiments dont elles n’étaient pas certaines. Leanne lança quelques sujets de conversation, histoire de ne pas avoir l’air louche à rester silencieuses.
Quelques instants plus tard, Mrs Pomfresh inspecta Ambre, vérifia quelques-unes de ses blessures, lui asséna une multitude de remontrances et de conseils quant à son comportement imprudent et, enfin, l’autorisa à quitter l’infirmerie, juste avant l’heure du couvre-feu, l’air plus agacé que jamais. Les trois filles se précipitèrent dans les couloirs, de peur de se faire attraper par les préfets.
Enfin arrivées dans leur salle commune, elle purent s’installer sur un sofa, lancer un sortilège d’isolation sonore, et débriefer sur ce qu’elles avaient entendu à l’infirmerie. Sans se concerter, elles avaient en tête exactement la même chose.
- Trop de coincidences, lança Vanille, sans prendre le temps de formuler des phrases entières. Les souvenirs de Leanne et la description de cette Lily ? ‘Parlaient du Club.
- Est-ce qu’il y a une Lily dans vos nouvelles Novices ?
- Non. Regina, Lucy, Ariane.
Le visage d’Ambre était crispé de concentration.
- Du coup, quel est le rapport avec moi ? s’étonna Leanne.
Vanille se posa devant elle, lui prit les épaules dans les mains, et la regarda dans les yeux, solennelle :
- Essaye de te souvenir. Ces deux garçons. Où les as-tu vus ? Dans quelles circonstances ?
- Je ne sais plus, murmura Leanne en essayant de se concentrer. Un soir. Ou une nuit. Ils était dans l’ombre d’un couloir. Je voyais à peine leurs visages...
Elle ferma les yeux et fronça les sourcils de concentration. Ses lèvres tremblaient alors que Vanille augmentait la pression de ses mains sur ses épaules.
- Ils n’étaient pas seuls. Mais moi si… Il y avait… un livre. Dans ma main. Dans ma tête… Et j’avais… Je crois qu’ils étaient en colère.
- Les deux garçons ?
- Non.
Elle ouvrit les yeux et baissa ses épaules que Vanille lâcha.
- Je ressentais de la peur, puis plus rien. Mais je ne crois pas que j’avais peur d’eux.
- Tu as dit qu’ils n’étaient pas seuls. Qui était avec eux ?
- Je ne sais pas… J’ai l’impression que plus j’essaye de les attraper, plus mes souvenirs s’envolent. Comme quand tu as un mot sur le bout de la langue. Tu sais que tu connais son sens, tu l’entends presque mais tu ne peux pas t’en souvenir, ni du mot ni de son sens. Il est comme derrière un mur de brique.
- Est-ce que que cela te fait le même effet lorsque tu essayes de te souvenir de tes moments au Club ? De la réunion de présentation, de la cérémonie d’entrée ?
- Non, de tout ça je ne garde aucune trace.
Ambre se renfrogna.
- A quoi tu penses ? demanda Vanille.
- A cette Lily. Je pense qu’il n’y a tout de même peu de chance que dans ce château, il y ait un second Club d’élèves qui créent des sortilèges et des potions, ou qui ait accès à un laboratoire, à du matériel comme le nôtre.
- Alors c’est une fille du Club.
- Mais qui ? demanda Leanne. Alva, Alya, Iris ? Ou même Lorelei, Annabelle, Leire ?
Vanille et Ambre échangèrent un regard triste. “Aucune d’entre elles, j’espère.”
- C’est répréhensible ? De vendre des potions ou sortilèges directement aux élèves ?
Elle n’avait pas envie de subir une nouvelle déception d’un membre du Club. Après tout, était-ce si grave ? Aider les élèves à tricher, ou à ne pas aller en retenue… Peut-être avait-elle tout simplement besoin d’argent. Est-ce que cela valait la peine de chercher des réponses qui pourraient ne pas lui plaire ? Et, au-delà de tout ça, supporterait-elle encore une fois ce sentiment de trahison qui l’avait habitée lors de l’histoire de Jules et Morgane ? Qui l’habitait encore ?
“Pas encore remise de tes émotions. Il va falloir changer de registre, un jour.”
“On ne parle pas ici de… de torture. Ce ne sont que deux gamins qui veulent avoir de meilleures notes. Tant pis pour eux.”
- Rien ne le mentionne dans le règlement, coupa Ambre dans les réflexions de Vanille, parce qu’il considère que les membres respectent une des règles fondamentales : ne rien créer sans l’autorisation express du ministère, et tout leur revendre par la suite. Mais le règlement est là justement pour faire plaisir au ministère. Apparemment, cela fait des années que les membres font ce qu’ils veulent. Entre nous, respecter le règlement du Club n’est pas si important lorsque cela concerne le ministère, en ce qui concerne l’officiel. En revanche, qu’en est-il de l’aspect moral ? Profiter du Club pour se faire de l’argent à son propre compte… Je veux dire, il ne s’agit pas ici de créer pour l’art et la passion de la création. On a dépassé le stade du plaisir de l’art pour entrer dans celui du business. Et là… chacun est juge de la moralité de ce milieu. Je veux dire, les moldus nagent dedans. Leur monde est contrôlé par la finance. Et même s’ils n’aiment pas ça, ils le tolèrent. Ici, chacun jugera différemment ce genre d’action. De notre côté, on n’a rien à dire.
Ambre cessa son monologue en voyant ses deux amies la dévisager.
- Je t’en prie, continue. Je ne t’ai pas entendue autant parler depuis des années.
- Depuis les vacances de la troisième année qu’on a passées chez Vanille Je m’en souviens très bien.
Une connection neuronale tenta de se faire dans le cerveau de Vanille, mais elle l’ignora. Une première réflexion prenait toute la place : Ambre, de toute évidence, détestait ce principe de vente de sortilèges. Cela se voyait dans ses narines dilatées et son regard fixe sur le sol lorsqu’elle parlait. Et pourtant, elle considérait l’opinion générale, tentait de rester neutre. En somme, de ne pas faire sa loi. Vanille avait tout intérêt à partager avec elle ses moments de colère qu’elle ne saurait calmer toute seule, peut-être son amie aurait-elle plus de facilités à canaliser ses émois et à l’aider à reconsidérer ses principes de justice.
- Mais le sujet n’était pas là. Ambre poursuivait sa réflexion, peu émue de l’effet de son discours sur ses amies.
Est-ce que c’est à nous de chercher à accuser un membre de notre Club ? Non, au contraire, on devrait se soutenir, même si on ne cautionne pas… Cette Lily ne semble pas faire de mal. Pas concrètement. Et ça me tue de dire ça. En revanche, l’argument qui moi me fera agir, c’est cette histoire de souvenirs.
Elle se tourna vers Leanne.
- Tu as reçu des sortilèges d’amnésie parfaitement exécutés par l’Oubliator, et tu n’as aucun souvenir, aucune séquelle. Mais ceux dont tu peines à te souvenir ont été effacés par quelqu’un qui ne maîtrise pas ce sortilège. Donc, cela n’a pas forcément de lien avec le Club. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il y a un lien avec ces deux garçons, et avec cette - ou ces autres personnes avec qui ils étaient lorsque tu as subis le sortilège.
- Et le fait qu’ils parlaient de cette Lily, qui elle a certainement un lien avec le Club des Créateurs, n’a peut-être aucun rapport avec tout ça, comprit Vanille.
Cet argument leur permettait d’éviter de considérer d’office cette Lily et le Club dans leurs réflexions.
- Tu devrais ouvrir un cabinet d’enquêteurs, lança Vanille à Ambre.
- J’y songe. Mais je n’arrive pas à m’empêcher de penser qu’il y a un lien entre les deux histoires malgré tout. Même si ça me tuerait de savoir que Lily est dans le Club. Je la déteste d’avance.
- Donc la théorie qu’on détesterait, mais qu’on ne peut s’empêcher de penser, c’est : Lily, membre du Club des Créateurs, m’a fait perdre la mémoire pour ne pas que j’interfère dans ses affaires.
- Et comment on fait pour découvrir la vérité ? demanda Vanille. On va voir ces deux garçons ?
- En dernier recours, oui. Mais je pense qu’ils ne diront rien. Par contre, je crois savoir où on peut aller mener notre enquête.
- Notre enquête ? Sérieusement ?
Vanille soupira. Pourtant, au fond, elle était soulagée de voir Ambre s’impliquer autant dans cette histoire, de la voir prendre les initiatives. Parce qu’elle avait peur. Peur que cette théorie soit vraie. Peur d’aller chercher elle-même la vérité. Peur de la déception.
Elle qui avait tant tenté de fuir ses émois, à son grand regret, Vanille se retrouva quelques jours plus tard face aux souvenirs qu’elle fuyait. Ils avaient quitté le château pour les vacances de Noël, et Leanne, Ambre et elle s’étaient retrouvées dès le lendemain de leur retour, grâce au réseau de cheminettes, en plein coeur de Londres, dans un des bâtiments les plus importants du monde magique : l’Hôpital Ste Mangouste pour Maladies et Blessures Magiques. L’idée d’Ambre était brillante : parler avec Morgane de sa mémoire.
Morgane avait passé tout l’été à Ste Mangouste. Depuis septembre, elle en sortait régulièrement pour essayer de reprendre une vie normale, mais passait la moitié de son temps sur son lit attitré, fatiguée, et en proie à une profonde dépression. Ambre et certains autres membres du Club lui avaient déjà rendu visite, mais sa solitude ne pouvait être contrée que par la présence impossible de la seule personne interdite de lui rendre visite, et interdite de sortir de sa cellule, son amour de jeunesse, l’auteur de tous ses maux, Jules.
Morgane avait, selon Ambre, retrouvé une partie de ses souvenirs, et c’était là la raison principale de leur visite. Et de ce fait, elles seraient obligées de parler de l’incident, et cela stressait Vanille au plus haut point. Elle fuyait ses démons avec tant d’ardeur que se jeter ainsi dans leurs gueules lui semblait idiot et contre-productif face à sa tentative d’aller mieux. Elle qui mettait si facilement le mot “traumatisme” sur son mal-être récurent, elle essayait tant bien que mal d’oublier, et de passer à autre chose.
Peut-être, finalement, que la solution était différente de ce qu’elle avait envisagé. Peut-être qu’elle devait se confronter à ses peurs pour qu’ils arrêtent de la contrôler par surprise.
C’est dans cet état d’esprit un peu hésitant mais gonflé d’un espoir nouveau - et surtout, avide de poursuivre l’enquête qu’elle et ses amies s’étaient attitrée, qu’elle entra à le suite d’Ambre dans la chambre de Morgane.
Un mélange d’étonnement et de soulagement lui prit la gorge lorsqu’elle vit l’intérieur de la pièce, elle s’était attendu à une chambre d’hôpital triste, blanche, à l’image du couloir, asceptisé et froid. Là, des couleurs rouges (surprenant, dans la chambre d’une ancienne Serpentard) et chaudes s’imposaient sur le lit et les murs, de nombreuses plantes décoratives ornaient les meubles et les espaces libres sur le sol, un poste de radio chantait, et Morgane, sa longue chevelure rousse attachée dans un chignon certainement fait à la va-vite, sans la moindre joie sur son beau visage, lisait un livre, enfoncée dans un énorme fauteuil moelleux. Quand elle remarqua ses visiteurs, ses lèvres s’étirèrent d’un doux sourire, mais ses yeux gardèrent cet air triste.
Vanille comprit immédiatement qu’elle luttait contre une profonde mélancolie. Elle les accueillit avec chaleur et fit apparaître trois autres fauteuils. Ambre lui avait envoyé une lettre pour lui expliquer la raison de leur visite, aussi n’eurent-elles pas à tout réexpliquer après les conversations de convenance.
Malgré l’apparent état de fatigue et de peine - même après de longs mois - de Morgane, Vanille ne put alors s’empêcher de demander, sans le moindre tact :
- Est-ce que Jules a précisé pourquoi il a fait… ce qu’il t’a fait ? Est-ce qu’ils l’ont un peu plus interrogés, à Azkaban ?
Leanne et Ambre la regardèrent les yeux ronds, mais Morgane, au contraire, eut un petit rire.
- Tu n’as pas changé. Je suis contente de vous revoir, ça me rappelle de bons souvenirs. Jules n’est pas à Azkaban. Il refuse de parler, alors les aurors ont décidé de le placer dans une cellule du ministère pour pouvoir le surveiller, et de temps en temps l’interroger.
- Est-ce que tu…
Vanille n’osa pas finir sa phrase.
- Non, je ne l’ai pas revu. Ce n’est pas faute d’avoir demandé, d’avoir expliqué que l’avoir en face de moi pourrait m’aider à avancer, mais ils ont toujours refusé. Je ne sais pas ce qu’ils font de lui. Parfois, la nuit, dans mes rêves, je l’imagine contraint à parler, brutalisé par les Aurors. Et au réveil, je n’en tire rien d’autre que de la peine. Tant que je ne peux pas le voir, je suis bloquée au même stade. Je l’aime et il me fait du mal.
Ambre prit la main de Morgane, alors que ses yeux s’embuaient.
- Ambre nous a dit que tu avais retrouvé tes souvenirs ? essaya Vanille de changer de sujet.
- Ah, oui, c’est vrai, vous êtes venues pour me poser des questions.
Vanille se recroquevilla, honteuse.
- Ne t’en fais pas. Je sais que c’est difficile de rendre visite à des personnes à l’hôpital, surtout pour toi, Van. Je ne t’en voudrai jamais. Avec Oreste et Lorelei, vous m’avez sauvée, et je comprends que, à une autre échelle, tu sois toi aussi encore perturbée par les événements.
Morgane était, de toute évidence, bien plus forte qu’elle. Ses joues creusées, son teint gris, sa taille bien plus mince qu’à l’ordinaire témoignaient de son état difficile, et pourtant elle en parlait comme si elle acceptait la fatalité, la dure réalité. Elle l’affrontait, au moins, contrairement à Vanille qui chassait de ses pensées la moindre pointe de peine venue avec les souvenirs de l’attaque de Jules. Morgane était brisée, et cela n’irait pas en s’arrangeant, toujours prisonnière de l’amour qu’elle éprouvait envers Jules, envers ce qu’elle se souvenait de lui. Elle souffrait et elle luttait, non pas pour oublier ou pour cesser d’aimer, mais pour accepter, pour avancer. Elle était un exemple de courage, c’en était à se demander pourquoi le Choipeau l’avait envoyée à Serpentard. Certainement pour qu’elle puisse y être avec Jules.
- J’ai retrouvé certains de mes souvenirs, pas tous. Ou plutôt, je les ai tous retrouvés, mais pas entièrement. Tous ces moments qui ont été effacés de ma mémoire, je sais maintenant qu’ils existent, et je peux, pour la plupart, les situer, me remémorer des sujets de conversations, avec qui j’étais. J’ai encore du mal avec certains. Certains souvenirs m’évoquent des disputes, de la colère, et ceux-là m’échappent dans le détail.
- Comment as-tu fait pour les retrouver ? Je croyais que le sortilège d’amnésie était irréversible.
- Je le croyais aussi. Mais il y a une médicomage dans cet hôpital spécialisée dans le domaine de la mémoire. Elle est aussi Oubliator pour le ministère, et c’est elle qui est en contact avec le Club. C’est une sorcière brillante, elle sait tout ce qu’il y a à savoir sur la mémoire.
Elle regarda Leanne avec un petit sourire :
- Elle s’appelle Effie Pepper.
Les deux autres se tournèrent vers Leanne à leur tour.
- Ma mère ?
End Notes:
Merci d'avoir lu ! La prochaine fois, dans 15 jours promis, je publie avec un clavier pratique.
Des bisous !
*целувки !
De l'importance que personne ne reste sur sa faim by Deanna
Author's Notes:
Bonjour ! Bienvenue à tous à notre trente-deuxième réunion au Club des Créateurs !
J'ai retrouvé un clavier classique, et j'ai abandonné Lena à l'aéroport pour pouvoir publier tranquillement. (Je lui ai laissé des vivres, et un forfait internet, ne vous inquiétez pas pour elle.)
Nous poursuivons aujourd'hui notre histoire en nous plongeant dans le nouveau mystère du Club, les souvenirs de Leanne. Qui est cette mystérieuse Lily ? Que faisaient ces deux garçons, cette fameuse nuit ?
Je vous souhaite une bonne lecture !
La situation familiale de Leanne ne devait pas être évidente.
Ses parents étaient des sorciers reconnus et appréciés dans leur monde, on prévoyait son père dans quelques années ministre de la magie, et on savait sa mère capable de soigner les maux magiques les plus complexes. Pourtant, on ne les voyait pas comme un couple : Dean Pepper et Effie Pepper étaient deux personnes à part entière, il n’était pas rare que certains réalisent soudainement leur lien, lorsque la conversation évoquait les deux sorciers à la suite, et qu’on se rendait compte qu’ils portaient le même nom de famille.
Issus d’une longue lignée de sorciers au sang pur, les Pepper n’étaient pourtant pas très connus avant l’arrivée de Dean et Effie. Ils n’avaient pris aucun parti lors des guerres (si ce n’est celui de se protéger), leur discrétion face aux événements n’avait d’égal que la grandeur de leurs actes, à quelle qu’époque que ce soit.
Il se disait même que, quelle qu’aurait été l’issue de la guerre, le parti victorieux aurait laissé travailler les Pepper en paix, car ils faisaient indéniablement du bon travail.
Dean Pepper avait évidemment redouté l’année des ténèbres et la chute du ministère, mais, fin et stratège, avait réussi à passer entre les mailles du filet, à garder son poste sans se lancer dans une quelconque chasse aux nés-moldus. On aurait pu dire de lui qu’il fut lâche pendant cette guerre, et il aurait alors répondu qu’il fallait que certaines personnes sensées restent au coeur du ministère, pour garder un semblant de justice, le temps que les tensions s’apaisent. Dean Pepper était sage, humble, ambitieux et séduisant.
Effie Pepper avait soigné sans relâche tout sorcier - né-moldu, sang pur, cracmol et sang-mêlé, et parfois même, clandestinement, des moldus touchés par les combats - car c’était là son unique but : rendre aux personnes malades la santé mentale et physique. Elle ne vivait que d’empathie, affirmait parfois que sa propre vie n’était pas importante, puisqu’elle n’était comblée que lorsqu’une vie retrouvait la lumière, l’espoir. Il n’existait pas un sorcier, pas une personne qui puisse dire sincèrement qu’elle n’appréciait pas Effie Pepper. Et elle était respectée, ne recevait, malgré son physique avantageux, aucun rentre-dedans, aucune grossierté, et c’était assez notable pour le préciser. Effie Pepper était forte, intelligente, stricte et bienveillante.
Et donc, si l’on connaissait Effie Pepper et Dean Pepper individuellement, on ne savait rien de la famille Pepper, leur mariage, leur vie privée. On ne savait pas que la ravissante Effie et l’élégant Dean avaient une fille comme Leanne. Une jeune fille dont les premières années, les premières relations sociales et les prémices de sa construction personnelles avaient été mis à mal par un défaut simple, objectif, et classique : la laideur. On pouvait trouver du charme chez Leanne, mais on ne pouvait nier ses yeux, ses cheveux, sa mâchoire, son port et sa démarche. Il n’existait pas plus grande différence entre un enfant et ses parents qu’entre Leanne et les siens. Heureusement, rencontrer Vanille et Ambre lui avait été salutaire, et aujourd’hui, on ne voyait plus ses défauts en tant que tels, ils n’étaient que des caractéristiques inérants à la personne entière qu’était Leanne. Pour l’expliquer plus simplement, son caractère prenait le dessus sur son physique, et après un court temps avec elle, la première fois qu’on lui parlait, il n’était plus question de jugement mais de répartie intelligente, d’humour subtil, et d’affection sincère et spontanée. Leanne avait réussi le pari de s’intégrer socialement et complètement, malgré les bâtons que la vie avait mis dans ses roues, sans accepter la proposition (faite avec amour, dans l’espoir d’aider et non de rabaisser) de sa mère de modifier définitivement son apparence physique. Leanne s’en sortait très, très bien.
Mais il en était différemment avec sa famille, il lui restait toujours au fond d’elle-même une envie d’être à la hauteur qu’étaient ses parents. Du portrait d’eux que l’ensemble de la société magique se faisait (Vanille compris), elle n’arrivait à se montrer digne, et c’était là un des derniers obstacles qui la séparaient de la sérénité entière, elle ne pouvait s’abandonner complètement aux soucis simples de la vie d’une adolescente de seize ans - les devoir, les amis, les amours - tant que ce démon continuait à danser sur son épaule. Elle rêvait d’être aussi grande que sa mère, aussi aimée que son père, aussi intelligente, aussi forte. Elle voulait leur succéder, dans la noblesse et l’humilité, et pourtant jamais, ô grand jamais ses parents n’avaient prononcé de telles attentes.
Leanne ne s’attendait pas à revoir sa mère ce jour-là, car en réalité, elle ne voyait que peu ses parent. Ils étaient très occupés, mais avaient le mérite de passer la moindre heure de liberté avec leur fille lorsqu’ils le pouvaient - et pendant ces vacances, ils ne le pouvaient pas. Leanne ne leur en voulait pas, ils l’aimaient, elle les aimait, tout était bien.
Et aujourd’hui, elle était là, assise devant le bureau d’Effie Pepper, sa mère, entourée de ses deux amies, à l’improviste, ne sachant pas vraiment comment poser les questions qu’elle avait dans la tête et sur le coeur.
Vanille avait été étonnée d’apprendre que l’Oubliator du Club était la mère de Leanne, même Ambre, dans sa mission de chargée de relations avec le ministère, n’avait pas eu connaissance de son identité. Cela signifiait-il qu’elle était au courant de l’existence du Club ? De toute évidence. Jamais elle n’aurait accepté de pratiquer ces sortilèges d’amnésie sans en connaître toutes les raisons. Alors dans ce cas, cela signifiait que c’était à elle qu’était revenue la mission de faire perdre sa mémoire à Leanne, à sa propre fille. Elle lui jeta un oeil, son amie était pâle. Elles attendaient depuis maintenant une heure, depuis qu’un message sur papier volant leur avait dit de patienter devant le bureau d’Effie Pepper, directrice adjointe de l’établissement.
La porte du bureau s’ouvrit de l’intérieur et cette dernière sortit pour accueillir ses visiteuses imprévues. Leanne enlaça sa mère, et se dirigea vers les chaises qui faisaient face au bureau complexe et organisé autour duquel elle recevait certainement ses patients, mais après avoir fait entrer Ambre et Vanille (qui observèrent la pièce, impressionnées de se retrouver là), elle fit s’assoir sa fille et ses amies autour d’une table basse sur d’élégants fauteuils, accompagnées d’une théière auto-verseuse, dans un coin plus convivial et moins strict du bureau.
- Que me vaut donc votre visite, les filles ? Qu’y a-t-il de si urgent ?
- Ce n’est pas si urgent, nous étions sur place pour voir Morgane, et elle nous a dit que tu pouvais nous aider. J’espère que tu n’as rien annulé pour nous.
Effie balaya l’idée d’un revers de main.
- Comment connais-tu Morgane ? demanda-t-elle en retour, en plissant ses grands yeux suspicieux.
- Comment ça ? C’est une amie.
- Vous savez pourquoi elle est ici alors, toutes les trois ? Cela ne m’étonne pas. Mais en revanche, Leanne, pour toi, je ne comprends pas bien.
Leanne ouvrit la bouche, visiblement assez peu assurée de ce qu’elle devait comprendre ou dire. Ce fut Ambre qui débloqua la situation :
- Nous lui avons tout dit. Après quelques mois, nous avons décidé de ne plus lui mentir sur ce que nous faisions de nos soirées.
- Alors cela explique tout. Ma pauvre chérie, j’ai vraiment l’impression d’avoir fait tout cela pour rien…
Elle passa doucement sa main sur la joue de sa fille et dans son regard tendre, Vanille lu un amour sincère. Pourtant, Leanne s’écarta.
- Alors c’est vrai ? Tu es l’Oubliator du Club ? C’est toi qui fait oublier à des générations entières de sorciers son existence ?
Effie sourit, visiblement heureuse de pouvoir enfin partager avec sa fille ce secret, elle se leva pour prendre un objet dans le tiroir de son bureau. Vanille savait exactement ce qu’elle allait en sortir, et se fit la remarque que ce geste était bien souvent présent autour d’elle. Il y avait décidément beaucoup de monde dans ce Club - on ne lui avait pas menti, le réseau était immense.
L’insigne d’Effie était comme tous les autres, et par pudeur, Vanille et Ambre ne l’examinèrent pas comme le fit Leanne.
- J’ai travaillé sur les soins pendant trois ans. Des potions aux sortilèges, et pendant ma dernière année, j’ai affiné mon domaine de recherche sur la mémoire. C’est ainsi que je me suis retrouvée à Ste Mangouste et au ministère, grâce au Club qui m’a permis d’avoir plus de connaissances et de compétences rapidement. Et évidemment, grâce à sa renommée. J’ai effectué le sortilège d’amnésie dès ma septième année, avant que je ne sois là les membres effectifs du Club devaient chaque année trouver un contact au ministère pour effectuer la tâche, j’ai donc instauré le fait d’avoir une personne récurente qui s’occupe de tout.
- Et papa ? Il en a fait aussi partie ?
- C’est là que nous nous sommes rencontrés, avoua Effie avec un doux soupire, les souvenirs lui remontant certainement en tête.
Vanille se dit que Leanne aurait dû être fière, ou au moins heureuse de la nouvelle, mais le visage de son amie n’exprimait que la tristesse lorsqu’elle rendit l’insigne à sa mère, le nez tourné vers ses genoux.
- Qu’y a-t-il ?
- Rien je… J’ai dû te décevoir, quand tu as dû me faire oublier le Club. Deux fois.
Vanille comprit qu’elle était en train d’assister à tout ce qu’elle avait analysé chez son amie. L’auto-dévaluation face à ses parents, qui n’étaient pourtant pas exigeants.
Effie prit la main de sa fille en se penchant, et de son autre main la força à relever le menton.
- Combien de fois dois-je te le répéter ? Je suis fière de toi et de tout ce que tu es, de tout ce que tu fais. Que tu aies décidé de ne pas faire partie du Club des Créateurs n’est pas un échec, car tu n’as pas à suivre nos traces à ton père et moi. Oh, bien sûr que nous aurions été fiers, autant que nous le sommes aujourd’hui, car tu as pris cette décision alors que tu souhaitais de toute évidence, encore une fois, prouver ta valeur en te comparant à tes parents. Et te voilà aujourd’hui au courant de ces décisions passées, et tu as décidé, d’après ce que j’ai compris, de respecter ce choix dont tu ne te souviens même plus. Quoi que tu fasses, ma chérie, je te soutiendrai.
Leanne essuya une petite larme et Vanille et Ambre se regardèrent, pour ne pas s’immiscer davantage dans cet élan maternel. Après quelques minutes, Effie se rassit sur son fauteuil.
- Ceci étant dit, je ne sais toujours pas pourquoi vous êtes ici.
Leanne hésita, et ce fut Ambre qui, encore une fois, débloqua la situation. Après tout, c’était elle qui menait les opérations de cette histoire.
- Nous aimerions savoir comment vous avez fait pour faire retrouver sa mémoire à Morgane, si c’est un sort que vous seule pouvez lancer, et s’il est potentiellement possible de le faire pour toute personne ayant subit un sortilège d’amnésie.
Elle omettait volontairement de dire que “toute personne” faisait référence à Leanne, songeant certainement que des informations objectives vallaient mieux. Vanille jugea un instant cette manière de faire, un peu manipulatrice, puis se résigna à faire confiance à Ambre, qui ne comptait certainement pas mentir indéfiniement. Effie réfléchit un instant, et s’avança.
- Tout d’abord, si vous vous lancez dans ce genre de travaux, j’aimerais que vous me promettiez de ne rien faire à la légère, et de venir vers moi pour que je puisse vous aider. Maintenant, puisque je commence à connaître vos caractères - et surtout la capacité du Club à faire ce qu’il veut en faisant croire qu’il suit des directives officielles - je vous fais la promesse de vous aider, et même si je finis par désaprouver vos idées, je ferai en sorte que nous trouvions on terrain d’entente.
Vanille comprit le message. Il était hors de question de manipuler l’esprit de quelqu’un - qui plus est, Leanne, son amie - sans avoir toutes les cartes en main. Si sa propre mère se proposait à les aider, la situation n’en serait que plus rassurante, le sort mieux exécuté, les risques largement amoindris. Ayant terminé son introduction, elle s’adossa complètement à son fauteuil, croisa les jambes et joignit les mains, et, inconsciemment, comme un miroir, une réponse à un appel à l’écoute, Vanille, Ambre et Leanne s’avancèrent, s’appuyèrent sur leurs genoux et concentrèrent leur attention sur Effie Pepper, Maître dans l’art de la Mémoire.
- Les souvenirs ne sont pas supprimés de la mémoire lors d’un sortilège d’amnésie, ce sont les connections qui permettent au cerveau d’atteindre ces informations qui sont débranchées. Le cerveau est un organe fascinant, les moldus en sont particulièrement conscients et le connaissent bien mieux que les sorciers, j’ai effectué beaucoup de recherches de leur côté, j’ai beaucoup appris grâce à eux. Les souvenirs peuvent être rappelés à la conscience par différents moyens, tout simplement en se concentrant, et parfois spontanément en entendant une chanson ou en sentant une odeur. Les souvenirs sont des connexions particulières qui se reforment et recréent une scène, en travaillant sur différents sens, la vue, le toucher, et même en réactivant certaines hormones présentes lors de l’évènement. Tout ceci concerne la partie, dirais-je, moldue de la mémoire. Le sortilège d’amnésie donc cache les connexions qui permettent de se reconnecter à ces souvenirs, un sortilège bien réalisé empêche de pouvoir non seulement de se concentrer dessus mais également d’avoir de réminiscences par les autres voies - comme je l’ai dit, un son, un visage, une odeur. J’ai assez étudié ce sort pour pouvoir ôter toutes les connexions, et, j’imagine qu’il s’agit de l’information que vous attendez, je sais les rebrancher.
Vanille eut un sursaut ; tout ce que disait Effie correspondait à ses attentes, et elle sentait son excitation grandir.
- Je sais parfaitement rendre les souvenirs que j’ai moi-même ôté, car je sais quel chemin j’ai pris, ma minutie et ma précaution me poussent à chaque sortilège d’amnésie lancé à analyser la moindre parcelle que j’efface, ou plutôt que je cache. En revanche, si quelqu’un d’autre, quelles que soient ses capacités en sortilège, tente à ma place de rendre la mémoire à quelqu’un qui a subit mon propre sortilège d’amnésie, je le répète quel que soit son niveau dans ce domaine, même quelqu’un de bien plus avancé et puissant que moi, cette personne ne pourra jamais reconnecter l’intégralité des souvenirs. Bien sûr, s’il s’agit de l’oubli d’une courte scène, le cerveau s’arrangera pour recréer les éléments manquants, et cela ne sera pas bien grave, mais pour de longues conversations, c’est impossible. Du moins, de toutes les recherches actuelles, de toutes les informations et les experts avec qui je travaille, personne n’en est capable. Et, évidemment, cela fonctionne dans l’autre sens, si je peux rendre une partie de sa mémoire à une personne amnésiée par un autre sorcier, je ne pourrais jamais lui rendre la totalité de ses souvenirs.
- Alors, Morgane ne récupèrera jamais ses souvenirs, murmura Ambre.
- Sauf si elle revoit Jules. C’est pour ça qu’elle tient absolument à le voir ? demanda Vanille.
- Vous devrez le lui demander vous-même. Je suis tenue avec elle au secret professionnel, travailler avec la mémoire de Morgane m’a donné accès à beaucoup de partie de son être, de son esprit - à ce stade, on peut affirmer que cela se rapproche de la Legilimencie. Elle a accepté que je fasse de mon mieux pour l’aider et m’a autorisée pour cela à fouiller sa mémoire, vous comprenez que je ne peux trahir la confiance qu’elle place en moi. Mais oui, en effet, c’est pour cela qu’elle ne retrouvera peut-être jamais la mémoire. Jules est certainement son seul espoir.
- C’est terrible, murmura Ambre, approuvée silencieusement par Vanille et Leanne. Ce doit être horrible de se dire que son seul salut réside en la personne qui l’a brisée.
Elles restèrent un moment silencieuses. Vanille médita sur ce que venait de dire Effie - ignorant au passage la boule au ventre que lui procurait le fait de parler de Jules. Il devenait évident que quelqu’un d’autre que sa mère avait fait subir à Leanne un sortilège d’amnésie, elle avait eu ces souvenirs lorsqu’elle avait vu les visages de ces garçons, et lorsqu’elle s’était concentrée sur ce souvenir, il lui avait échappé progressivement. La personne qui lui avait lancé le sort ne le connaissait pas bien et l’avait lancé de façon brute, sans grande subtilité - sans connaissance, certainement.
- Vous comprenez maintenant mon insistance sur le fait de ne pas lancer vous-même de sortilège pour rendre la mémoire à quelqu’un. Non seulement - pardonnez mon manque de confiance en vos capacités, vous échoueriez, mais surtout sans expérience vous risqueriez d’aggraver la mémoire de cette personne. Et maintenant que vous avez eu vos réponses, puis-je savoir de qui il s’agit, et pour quelle raison vous souhaitez lui rendre sa mémoire ?
Leanne prit une grande respiration, regarda sa mère dans les yeux - qui, en une demi-seconde, avait comprit - et dit :
- C’est moi. Je pense - nous pensons que j’ai subi un sortilège d’amnésie par quelqu’un d’autre que toi. Des souvenirs me sont revenus après avoir vu deux élèves à l’infirmerie, on pense qu’ils ont un lien avec cette perte de mémoire.
Effie jaugea sa fille du regard. Sans avoir besoin de poser de question, elle comprenait parfaitement ce qu’elles attendaient d’elle.
- Retrouver ses souvenirs est une expérience déboussolante. Pendant plusieurs heures, voir plusieurs jours, tu peux te trouver perdue, remettre en question ta vie, tes opinions, parfois même ton identité. Je ne serai pas à la maison avec toi pour te soutenir - il faudra qu’au moins une de vous deux reste avec elle pendant quelques jours, dit-elle à Ambre et Vanille.
- Je resterai.
Vanille avait affirmé cela avec conviction. Sa mère n’avait pas besoin d’elle, elle passerait les fêtes avec son copain, voilà tout. C’était ainsi qu’elle la punissait de l’avoir abandonnée, à la rentrée.
- Je m’arrangerai pour rentrer à la maison dans la soirée. Restez au moins toutes les deux ce soir pour le moment du sortilège.
Les trois filles acquiescèrent et repartirent. Elles passèrent voir Morgane, heureuse d’avoir eu de la visite, et rentrèrent se préparer pour ce qui était, leur sembla-t-il, un moment particulièrement important.
- Rappelez-moi ce dont je vais me souvenir ?
- Tu es sûre que tu veux tout savoir avant ?
- Oui.
Vanille bu une longue gorgée de thé brûlant. Assise dans le salon des Pepper, près d’un énorme feu ronflant, un Elfe adorable leur avait apporté quelques gâteaux. Vanille fut plus que satisfaite de voir que l’Elfe tutoyait Leanne, et qu’il ne semblait pas soumis ni maltraité - encore heureux.
- La première fois, tu as oublié la cérémonie de présentation, le fait de t’être inscrite et une bonne partie du bal, avec des discussions avec des membres. La seconde, tu as oublié la cérémonie d’entrée, et les quelques recherches que tu as faites avec Jules.
- Alors je travaillais bien avec Jules. Vous m’en aviez parlé, mais je n’en étais plus certaine.
- Lorsque tu m’as dit vouloir partir, avant le second sortilège, tu as vaguement évoqué le fait de ne pas t’être sentie très à l’aise avec lui. Tu n’as pas voulu me dire pourquoi.
Leanne sirota son thé en silence.
- Je ne t’ai pas soutenue, quand tu n’allais pas bien, avoua soudainement Vanille à voix basse. Je n’ai rien vu, parce que j’étais trop obsédée par les recherches d’Oreste. Je n’ai pas été une bonne amie, j’ai insisté pour que tu fasses partie du Club mais à aucun moment je ne t’ai demandé ton avis sur la question. Je voulais que tu saches que j’en suis consciente et te présenter mes excuse pour ne pas avoir géré tout ça.
- Et tu me dis ça maintenant parce que ?
- Parce que lorsque tu auras retrouvé ta mémoire, tu te souviendras de cette conversation, celle qui ressemblait à une rupture d’amitié. Tu te souviendras de ce que tu ressentais à ce moment-là, et j’ai un peu peur que cela te fasse changer d’avis sur moi.
Leanne rit.
- Tu m’as déjà dit tout ça. Je te connais Van, quand bien même je me souviendrais de t’avoir haïs, je n’oublierai pas le reste. Aujourd’hui, tu es mon amie. Ton honnêteté me touche, et je te promets que de retrouver mes souvenirs ne changera pas l’affection que j’ai pour toi.
Rassurée, Vanille, accompagnée d’Ambre, continua à lui expliquer dans les détails ce dont elle se souviendrait. Lorsque sa mère rentra, tard dans la soirée, Leanne était prête. Sur son fauteuil, avec Vanille et Ambre en renfort au cas où elle s’écroulerait, elle fixait sa mère qui se préparait, baguette à la main.
- Tu as subi plusieurs sortilèges d’amnésie, mais je ne vais te lancer qu’une seule fois le sortilège de retour de mémoire, sans me préoccuper de choisir ce qui te reviendra. Il ne s’arrêtera que lorsque toute ta mémoire sera revenue, ou s’il se trouve bloqué par un Oubliette dont je ne suis pas à l’origine. Alors, si c’est le cas, je tenterai de nouveau, en fonction de ce que tu me diras te rappeler. Tes souvenirs vont revenir du plus ancien au plus récent. Ceux que j’ai effacés couleront comme un ruisseau, les autres tomberont comme de la roche. C’est Morgane qui a fait cette analogie, une fois, je pense qu’elle doit être pareille pour tout le monde. Je t’ai tout dit. Es-tu prête ?
- Je crois.
Elle passa sa main sur la joue de sa fille.
- Non, tu ne l’es pas. J’ai refusé de commencer à rendre les souvenirs de Morgane pendant plusieurs jours, pour attendre qu’elle le soit, car ce n’est pas une expérience facile. Mais je t’avoue que l’idée qu’on t’ai enlevé, à toi, ma fille, des souvenirs, m’est très peu supportable. J’aurais dû parler de tout ça à mon supérieur, à ton père, voir même aux Aurors, mais je me doutais que l’idée ne t’aurait pas plu. Vous êtes assez matures, je pense, pour reconnaître quand avoir besoin d’aide d’adultes, et quand vous débrouiller entre vous ou avec le Club.
Elle se leva, posa sa baguette sur le crâne de Leanne qui commençait à trembler. Vanille lui prit la main, Ambre fit de même, Leanne prit une grande respiration et hocha la tête en fixant sa mère.
- J’irai à trois. Un… Deux… Memoria Reditum.
Une pâle lumière s’émana de la baguette d’Effie, et alla s’entortiller dans les cheveux de Leanne, puis engloba totalement son crâne. Elle serra les yeux et les mains de ses amies dans les siennes. Elle ne dit pas un mot. Le sortilège agit pendant de longues minutes. Plusieurs fois, elle retint une inspiration de surprise, ouvrait les yeux puis les refermait instantanément. Tout semblait se passer normalement, Leanne vivait bien la situation. Doucement, elle hocha la tête, comme pour approuver quelque chose. Il y eut un moment de répis, pendant lequel le sort sembla s’amenuiser, briller un peu moins, puis il reprit de plus belle. Elle chuchota un vague “Oh!”. Il y eut des prémices de sourires sur son visage. Sa mère ne disait rien, n’exprimait rien, concentrée, sa baguette toujours posée sur les cheveux de sa fille. Puis, après quelques instants, une seconde fois, le sort diminua en intensité pour revenir de plus belle. Cette fois-ci, Leanne paru ne pas se sentir bien, ses sourcils se froncèrent brutalement, sa tête se secoua plusieurs fois comme pour refuser un coup, sa mâchoire se crispa. Une goutte de sueur perla sur sa temps. Vanille senti sa main broyée mais ne la retira pas, au contraire, elle posa sa seconde dessus pour rassurer son amie. Cela dura de longues secondes, puis Leanne émergea comme si elle manquait d’air, ses yeux s’ouvrirent d’un coup et son corps entier trembla.
Sa mère ôta sa baguette et fit apparaître une couverture pour enrouler sa fille dedans. L’Elfe de maison, qui avait assisté à la scène, fit gonfler le feu et apporta d’autres tasses de thé chaud.
Emmitouflée, Leanne gardait les yeux rivés sur le sol, comme si elle venait de subir un malaise. Vanille et Ambre ne savaient pas bien quoi dire, un regard d’Effie leur fit comprendre qu’elles devaient attendre que Leanne sorte de sa torpeur. Cela dura quelques minutes, le thé avait un peu refroidit, mais lorsqu’elle en bu enfin la première gorgée, elle sembla se rappeler de la présence de sa mère et ses amies autour d’elle.
- Comment te sens-tu ?
- Je me souviens… Tout est clair, net, tout ou presque, mais c’est si étrange… Comme si j’étais un mélange de deux personnes, de deux mémoires… Je ne sais pas… si c’était réel. Si j’étais réelle… il y a quelques minutes. Rien ne me semble faux mais tout paraît contradictoire. Vous comprenez ?
- On ne peut que l’imaginer. Mais c’est une bonne chose que tu arrives à mettre des mots sur ce que tu ressens, dit Vanille. N’est-ce pas ? demanda-t-elle en cherchant l’approbation d’Effie.
- Oui, tu ne sembles pas tant choquée, pas plus que je n’ai pu l’observer chez certaines personnes, et c’est certainement dû au fait que ce sont principalement mes sortilèges qui ont été annulés. Peux-tu nous dire, avec quelques détails, ce dont tu te souviens ? J’aimerais principalement que tu décrives des moments que tu as passé avec Vanille et Ambre, qu’elles puissent confirmer ce dont tu te souviens.
Leanne hocha la tête et s’exécuta.
Elle évoqua la fois où elle avait vu l’affiche sur le panneau de Serdaigle. Ses discussions sur le sujet, puis la cérémonie de présentation, elle se souvint de Jules, d’Alexandre et de Nathan, des histoires de Vanille. Elle se souvenait d’avoir, lors du bal, discuté avec Florent, et d’avoir accepté le fait de ne pas vraiment vouloir faire partie du Club pour elle-même mais pour ses parents, et parla d’une silhouette encapuchonnée qui avait tendu sa baguette sur elle, discrètement. Sa mère affirma qu’il s’agissait bien d’elle. Puis, elle se souvenait d’un grand blanc dans sa tête, dont elle ne prenait consience que maintenant. Elle évoqua Jules, qui était venu la voir pour lui proposer d’entrer dans un Club prestigieux, sa discussion avec Ambre et Vanille, et la soirée de la cérémonie d’entrée, un peu sur ses gardes, persuadée d’avoir manqué quelque chose. Elle parla de l’intense sentiment de satisfaction que lui avait procuré le fait de voir la magie du Club entrer en elle, et cette impression de partager quelque chose d’important. Puis elle se souvint des premières soirées au Club, et elle s’y était sincèrement sentie bien. Elle avait aimé travailler avec Jules, même si ce dernier n’était pas toujours très présent, il était avenant, aimait aider et lui apprendre des choses.
Et quelque chose bascula dans son regard. Elle sembla fouiller des yeux quelque chose devant elle, en elle.
- C’est ça. Je me souviens un peu mieux. J’étais partie en pleine nuit avec… (elle ferma les yeux) un livre. Non, pour chercher un livre. Je ne sais plus. J’allais au Club. Il faisait noir, je n’avais pas le droit d’être là, mais peut importe, on a des passe-droit la nuit… Et en descendant un escalier en colimaçon, j’ai croisé… j’ai entendu plusieurs personnes. Ils parlaient de Gallions, il chuchotaient, je sentais qu’ils ne voulaient pas être entendus. J’ai reconnu… j’ai reconnu des voix. Alors plutôt que de partir, j’ai décidé d’écouter. Ils parlaient à une certaine Lily, la Lily… Mais ils m’ont entendue, et ils m’ont vue, c’étaient les deux garçons, les deux de l’infirmerie, ils m’ont tirée par le bras et… et…
Elle ouvrit les yeux d’un coup. Son corps se balançait d’avant en arrière, cherchant du regard quelque chose que Vanille ne pouvait voir, peut-être une ombre, un souvenir, une explication.
- J’ai vu Iris. Je me souviens de ses yeux. La colère. La surprise. La peur aussi, peut-être, je crois. Je me suis enfuie. Et elle me courait après, je me suis précipitée au Club, je n’étais pas loin, mais quand j’ai tiré sur la porte, quelqu’un m’a sauté dessus de l’intérieur.
Elle parlait de plus en plus vite, les yeux exorbités, fixant le vide.
- Je suis tombée en arrière, je ne sais pas où elle était, Iris, mais celui qui m’avait faite tomber c’était… C’était Jules ! Il me disait des choses… bizarres, des phrases que je ne comprenais pas vraiment.
De nouveau, elle ferma les yeux pour se concentrer, fronça les sourcils.
- Il disait que… Il disait… “Ce n’est pas de ma faute.” “Je l’aime.” Mais je ne sais pas pourquoi, d’un coup, il a levé sa baguette vers moi, et j’ai eu peur, j’ai entendu des bruits dans la salle du Club, je crois qu’il n’était pas seul, je me souviens d’un mouvement mais je n’arrive pas à voir… Je l’ai vu, mais je ne me souviens pas. Il n’était pas seul.
Elle prit sa tête dans ses mains et se remit à trembler.
- J’ai voulu m’enfuir. Je voulais partir, je voulais disparaître, j’ai vu Iris dans le couloir, elle se cachait, elle voyait tout, mais elle n’a pas bougé, et Jules a… Jules, je lui faisais confiance, j’étais sa Novice, il m’a tellement appris, même en si peu de temps, je l’aimais beaucoup, et il a… il a crié quelque chose, je ne me souviens plus, ça devait être un Oubliette. Mais dans ses yeux… Il y avait quelque chose dans ses yeux, il était comme un fou, comme un diable, la haine et les larmes dans ses yeux, il disait “Je l’aime”, mais pourquoi alors, s’il l’aimait, s’il aimait Morgane, pourquoi aurait-il…
Leanne pleura un instant, en silence, Ambre caressait son bras de son pouce. Puis, avant que sa mère n’ait pu dire un mot, elle poursuivit, sentant certainement qu’elle serait incapable de revivre ça avant de longues journées de repos.
- Je me souviens du lendemain. Je n’avais oublié que la veille, mais quelque chose de nouveau était né en moi. Comme de la tristesse, de la mélancolie. Je n’avais plus envie d’aller au Club. Parler avec Jules était étrange, et je comprends maintenant pourquoi. J’en ai parlé avec toi, Ambre, et puis au bout d’une semaine à ce régime, je ne me sentais plus à ma place, et je ne voulais plus rester. Mais… Je veux dire, je me souviens de tout, ou presque, maintenant, et je n’avais pas vraiment envie de partir. Je crois que le sort que m’a lancé Jules m’a donné cette envie… Est-ce que c’est possible ?
- Jules travaillait sur des techniques de manipulation, se rappela Vanille. Je pense que c’est possible.
- Je ne voulais pas quitter le Club. Mais j’étais tellement soulagée quand j’ai tout oublié. C’était comme sortir d’une forêt sombre, ou d’un rêve un peu trop opressant, mais sans que je ne me souvienne d’où je venais.
Sa mère rangea sa baguette dans sa manche.
- Je ne te ferai pas plus subir de sortilège. Je ne pense pas qu’il y ait besoin, en tout cas pas pour l’instant. Si j’insiste sur les parties manquantes, tu risques de mal le vivre. Je dois aller travailler. Si vous avez le moindre soucis, n’hésitez pas à m’en parler. Même s’il s’agit du Club, maintenant que vous savez que j’en fais partie. Et si vous décidez de vous lancer dans de grands projets seules, que ce soit en rapport avec cette histoire de souvenirs ou non, n’oubliez pas de vous faire confiance, malgré tout. Le Club est et restera une grande famille. Bonne nuit les filles. Bonne nuit ma chérie.
Elle quitta la pièce alors que sonnaient les douze coups de minuit.
- Elle travaille vraiment tard, ta mère, murmura Vanille.
- Oui. Elle aime ce qu’elle fait. Et elle nous aime, mon père et moi.
- Et toi tu l’aimes. La boucle est bouclée. On débriefe ?
Ambre lança un coussin sur le visage de Vanille.
- Du tact, Van ! Du tact !
Leanne se souvenait donc avoir vécu en une seule nuit plusieurs événements, qui l’avaient amenée à subir un sortilège d’amnésie et à avoir envie de quitter le Club.
Finalement, cette Lily était bien une personne du Club, en la personne d’Iris. Ambre ragea contre cette information, déçue. Elle était d’autant plus énervée que non seulement, Iris faisait un trafic de potions et de sortilèges sur le dos du Club, mais en plus, d’après ce que Leanne leur avait raconté, elle était présente lorsque cette dernière s’était retrouvée attaquée par Jules. Pire que le fait de ne pas l’avoir secourue, elle était au courant que Jules était dangereux, et n’avait rien dit. Encore, son inaction pouvait être pardonnable, la peur, le choc. Mais pourquoi n’avoir rien dit, après coup ? Pourquoi cacher cette histoire aux autres ? Certainement, proposa Vanille, certainement pour que rien ne soit révélé de sa propre affaire, de sa propre implication dans l’histoire.
Iris, seule, sans Florent, c’était un concept étrange à appréhender. Et Iris refuser de venir en aide à un autre membre du Club, Iris protégeant ses secrets au mépris du danger que représentait Jules ? C’était encore plus choquant.
Vanille pardonnait son inaction au moment des faits. Elle avait vu Oreste brisée, bouleversée à l’instant même où elle avait vu le visage de son ami. En revanche, elle n’arrivait pas à s’empêcher de donner allègrement à Iris sa part de culpabilité sur ce qui était arrivé à Morgane. Elle se rendit compte qu’inconsciemment, elle diluait la responsabilité de Jules. Elle lança alors le sujet sur le tapis.
Et si… Et si Jules n’avait pas agit seul ? S’il avait fait ses recherches avec quelqu’un d’autre ? Si c’était cette personne qui tirait les ficelles ? Vanille refusa de penser cela, elle avait déjà du mal à accepter que Jules ait fait cela, alors, comment imaginer un autre membre ? Mais le doute n’était pas permis, du moins, pas sur la présence d’une autre personne. Et Jules qui s’était écrié que ce n’était pas de sa faute. Il voulait peut-être qu’on le croit innocent. Qu’on le sache innocent.
- Vous pensez qu’il faudrait en parler avec Morgane ? Aux autres membres du Club ?
Ambre et Leanne réfléchirent.
- Pour Morgane, non. Cela ne ferait qu’accentuer sa peine, repousser son rétablissement, même si elle apprend que Jules l’aimait, qu’il y a une chance pour qu’il ne soit pas responsable, les Aurors refuseront de le laisser la voir.
- Alors, en parle-t-on au Club ?
- Je me déteste de dire cela mais… Je crois que ce n’est pas une bonne idée. J’ai l’impression de trahir David, lorsqu’il disait que le Club doit rester soudé quoi qu’il arrive. Mais là… il y a trop d’évidences. Quelqu’un était avec Jules. Quelqu’un manipulait, torturait Morgane avec lui. Je n’ose penser qu’il s’agit de quelqu’un d’extérieur au Club, tout simplement parce que… Parce qu’Iris et Jules nous ont déjà déçus. Alors… Je me dis…
- Tu te dis “pourquoi pas les autres”, et tu as peur d’être trahie, de nouveau, et tu commences même à te demander si tu ne dois pas retirer ta confiance en les personnes autour de toi, pour apprendre, peut-être, à les croire un par un.
Ambre fixa Vanille.
- Exactement.
- C’est précisément ce que je ressens depuis que j’ai dû lancer ces sortilèges sur Jules pour me défendre. J’ai compris à ce moment-là que les liens du Club pouvaient se briser à tout moment. Que nous avions tous des secrets. Ca, plus le lettre de menace - que j’ai tendance à oublier ces derniers temps, depuis que je me suis lancée dans mes recherches justement. Je crois que c’est une des choses qui me bloquent, au Club. Je crois que sa mentalité a ouvert des portes à des malhonnêtetés. Je n’ai plus confiance dans les membres du Club, depuis que j’ai été attaquée par Jules. J’ai confiance en vous. Je pense faire confiance à Nathan, même si j’ai quelques réserves. J’apprends à connaître Alexandre, et c’est bien cette méfiance qu’il ne mérite pas qui m’empêche de m’attacher profondément à lui. Je connais un peu Annabelle, Octave, Olivier, Lorelei… Pas assez pour leur faire aveuglément confiance, une confiance comme le suggère notre cérémonie d’entrée, notre livre, nos insignes et la magie qui nous lie. En pensant cela, j’ai l’impression à la fois de trahir le Club, et de le protéger. J’ai envie de le protéger. Il pourrait être tellement parfait.
- T’ai-je déjà dit à quel point, parfois, quand tu parles, je t’imagine Maître Créatrice ?
- Je ne sais plus. Peut-être.
- Songes-y.
Leanne approuva silencieusement et Vanille ressentit en elle une vague de chaleur. Elle n’avait aucun plan, aucune connaissance. Juste quelques idées de choses à faire, et des envies de supprimer des choses. Et au moins un membre et demi pour la soutenir.
End Notes:
Merci à tous d'avoir lu !
Vos review me font toujours autant plaisir, continuez surtout !
Je vous donne rendez-vous dans deux petites semaines, pour enfin avoir le fin mot de cette histoire. Comment va réagir le Club, que vont donc dire Vanille, Ambre et Leanne aux autres ? Et comment réagira Iris ? La suite, à notre prochaine réunion au Club des Créateurs.
Au passage, je fais un coucou à Fantomas (je ne sais pas si tu me lis encore, et comme j'écris ce bout de texte en édit tu l'as peut-être manqué) qui m'a inspiré le titre de ce chapitre, en réponse à "Leanne me laisse bien plus sur ma fin", dans une ancienne review, j'espère t'avoir satisfait.e au moins un petit peu !
En vous remerciant pour votre lecture, je vous souhaite de belle créations magiques !
Juge, Maître et Novice by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous ! Bonjour et bienvenue à notre trente-troisième réunion au Club des Créateurs.
En dehors de ma régularité plus que douteuse ces derniers temps, et du départ au loin de Lena qui me prive *renifle tristement* de bêta pour quelques temps, j'aimerais aborder un sujet en note de fin.
Mais pour l'instant, je vous laisse avec ce chapitre, en (quasi) huis clos, l'histoire progresse tranquillement et j'espère qu'elle vous plaira !
Bonne lecture !
Vanille passa presque l’intégralité des vacances de Noël chez Leanne. Un jour sur deux, Ambre passait, et elles révisaient ensemble, sortaient et parlaient du Club. Elle offrit quelques cadeaux magiques à sa mère (il était facile d’offrir un cadeau à un moldu, il suffisait d’animer un objet), en envoya et en reçu certains de la part de quelques amis.
Leanne récupéra très vite. Les premiers jours, il lui arrivait de se figer instantanément, de regarder dans le vide d’un air songeur et de se demander à haute voix si ce dont elle se souvenait était réel. Et à chaque fois, ça l’était, tous ses nouveaux souvenirs l’étaient, ils entraient simplement en contradiction avec ce qu’elle avait pu penser, vivre après, et son esprit avait du mal à comprendre. Puis elle finissait par accepter la fatalité : pendant des mois, elle avait oublié une partie de sa vie. “J’avais oublié, mais aujourd’hui je me souviens”, chuchotait-elle régulièrement pour se remettre les idées en place.
Elle ne réussit pas à se souvenir plus précisément de ce qu’elle avait vécu cette fameuse nuit. Sa mère avait fait un bon travail, et elle se souvenait déjà de beaucoup. Vanille, Ambre et elle continuèrent à débattre sur le sujet de Jules ayant un acolyte pendant quelques jours, mais finirent par accepter l’idée qu’elles ne sauraient peut-être jamais la vérité. Cela fit naître en elles un sentiment commun presque inavoué, détesté de méfiance, et elles furent plus soudées que jamais lorsque, vers la fin des vacances, les filles prirent une décision pour le Club. Elles profiteraient de la première réunion de l’année pour mettre les choses à plat. Elles confronteraient Iris à ses actes. S’il le fallait, il suffisait de faire boire à Leanne ou à Iris du Veritaserum pour que la vérité éclate enfin. Vanille décida de laisser Ambre présenter les choses. Et évidemment, elle décidèrent d’y inviter Leanne, qui avait participé à la cérémonie d’entrée, et pouvait parfaitement de prétendre participer aux réunions. Elle préparèrent tous les arguments, et se mirent d’accord pour demander à ce qu’Iris soit radiée du Club. C’était radical, mais une colère profonde les animait toutes les trois.
Avant la rentrée, Vanille envoya une lettre à Alexandre pour lui expliquer vaguement leur projet de parler d’un sujet important au Club, et qu’il fallait que tous les membres soient présents.
Et dans le train de retour à Poudlard, il tenta de lui demander de quoi il en retournait, mais elle resta évasive. Elle avait plutôt peur des réactions des autres, elles allaient certainement provoquer un ras-de-marée de réactions, de disputes, de mésententes. Et elle ne souhaitait pas tout cela… Alors elle ne lui dit rien, se contenta de poser sa tête contre lui et de regarder défiler les paysages, se demandant sincèrement ce que lui réservait l’avenir au Club des Créateurs.
Le première réunion eut lieu le lendemain de la rentrée.
Ce fut comme si la salle était au courant de leurs projets, et c’était la première fois qu’elle agissait ainsi : sans que personne ne s’en soit occupé, il y avait une chaise supplémentaire et une fiole transparente et inodore qui trônait au centre de la table.
Tout le monde avait répondu à l’appel. Si certains s’étonnèrent de voir Vanille (qui avait cessé de participer aux réunions) et Leanne, d’autres s'enthousiasmèrent de leur retour, étonnés, certes, mais peu rancuniers, que ce soit du départ de Vanille ou de celui, plus ancien, de Leanne. Vanille évita le plus possible de croiser des regards, pour ne pas paraître étrange à éviter seulement celui d’Iris. Lorsque tout le monde eut pris place autour de la table, un court silence régna. On s’attendait à ce qu’Alexandre ouvre le sujet, mais il se contenta de regarder poliment Vanille, qui avait proposé cette réunion. Cette dernière, ayant pris la décision - qu’elle savait vaine - de ne pas participer, se tourna à son tour vers Ambre, qui, rougissante mais sûre d’elle, se leva.
- Je ne sais pas comment annoncer ce que j’ai à vous dire. Nous avons un problème au sein du Club. Un de nos membres a agit de manière impardonnable, et il nous faut en parler.
Vanille sentit presque Iris se crisper, tant elle était concentrée sur elle. Son regard alternait entre Ambre et Leanne.
- Il n’y a pas de bonne manière d’annoncer les choses, alors je vais y aller directement. Leanne a retrouvé une bonne partie de sa mémoire, grâce à l’Oubliator, car nous avions des doutes sur les sortilèges qu’elle avait reçu. Il s’avère que Jules, l’année dernière, lui avait également lancé un sort d’amnésie, en plus de lui insuffler le désir de quitter le Club. Et en retrouvant sa mémoire, elle a découvert qu’ Iris était au courant de ce qu’il s’était passé.
Là, il n’y eut plus de doute possible. Les doigts d’Iris s’étaient contractés, enfonçant ses ongles dans le bois de la table. A ses côtés, Florent la regardait, profondément choqué. Les autres membres, ébahis, alternaient leur regard entre Ambre et Iris.
- Nous avons découvert qu’Iris organisait - peut-être seule, peut-être pas - un trafic de potions et d’objets ensorcelés qu’elle vendait aux élèves plus jeunes désireux d’éviter des retenues ou d’améliorer leurs résultats. Elle est connue sous le nom de Lily. Un soir, alors que Leanne se rendait au Club, elle a croisé Iris en train de vendre à des première année - ce sont eux qui, mal effacés dans ses souvenirs, ont permis à Leanne de retrouver un début de mémoire et poser quelques doutes. D’après les souvenirs de Leanne, Iris l’a poursuivie dans un but incertain, mais devant la salle du Club, Jules s’en est pris à Leanne. Iris l’a vu, elle était présente mais n’a rien fait, soit, cela peut être compréhensible, mais a également décidé de ne pas en parler. Selon moi, cela la rend partiellement responsable de ce qui est arrivé à Morgane. Elle aurait pu faire en sorte que ce drame soit évité - ou raccourcis, en nous parlant de Jules.
Elle se pencha en avant et attrapa la fiole de Veritaserum :
- Si vous voulez des preuves que ce que nous disons est vrai, Leanne est prête à boire cette potion pour vous le prouver.
- Mais qu’est-ce qui nous prouve que sa mémoire est bien revenue ? Que ce n’est pas un faux souvenir qui a été implanté ? demanda Annabelle.
Ce n’était certainement pas un défi ou une prise de position de sa part, cela se voyait dans son air sincère. Elle aussi ne souhaitait que la vérité.
- Nous avons confiance en l’Oubliator qui lui a rendu sa mémoire, et…
- Excuse-moi mais parler de confiance après ce que tu viens de dire, c’est illusoire, coupa Enguerrand. La seule option que nous ayons pour connaître la vérité, c’est de faire boire cette potion à Iris.
Il lui jeta un regard colérique, qui la défiait de le contredire. Il semblait avoir pris parti.
Dans le silence qui suivit, chacun fixait Iris. On attendait qu’elle parle, qu’elle s’exprime, qu’elle refuse, réfute ou bien admette, avoue. Mais elle restait murée dans son silence, non pas un silence rageur, le silence de celui qui n’admettra jamais sa faute, mais le silence de celui qui hésite de la marche à suivre. Vanille sentit qu’elle cherchait à se sortir de cette situation à moindre frais. La potion la piégeait. Sa culpabilité, aux yeux de Vanille, était indéniable, et Iris allait tenter de trouver un moyen de passer entre les mailles du filet.
- Je trouve ça particulièrement injuste d’être accusée des actes de Jules. J’ai été paralysée, Jules est plus fort que moi en tout point, son regard était menaçant, et la panique m’a prise. Comment voulez-vous que j’agisse dans ces conditions ? Il m’aurait, à moi aussi, ôté la mémoire…
- Tu aurais dû nous en parler ! gronda Alexandre, intervenant enfin. Tu aurais dû venir nous voir, et tout ceci aurait pu être évité !
- Mettez-vous à ma place ! A ma place l’année dernière, lorsque Jules était encore notre Maître Créateur, qu’aucun soupçon ne planait sur lui. Vous étiez, nous étions tous confiants, tellement qu’aujourd’hui le fait de l’imaginer dans cette situation continue de nous choquer. Qui m’aurait crue ? Lequel d’entre vous, honnêtement, sincèrement, lequel d’entre vous m’aurait crue l’année dernière, si je vous avais dit avoir vu Jules attaquer Leanne ?
Tous méditèrent un instant. Son argument tenait la route, Jules était - avant - la personne la plus importante du Club, aimé, adulé. Porter une attaque contre lui aurait certainement été un coup à se prendre le retour de bâton.
- Jamais vous n’auriez été au point de donner à Jules du Veritaserum. Vous ne m’auriez pas crue, vous auriez pensé que mes yeux m’avaient menti, il faisait nuit, la fatigue, la fin de semaine…
- Moi je t’aurais crue, dit Florent.
Elle se tourna vers lui, amorça un mouvement pour lui prendre la main mais se ravisa, on sentait en lui une tension immense.
- Tout le monde se serait attendu à ce que tu me croies, Florent. Cela aurait été normal que nous soyons dans le même camp, quand bien même l’un de nous se trompe ou mente. Je ne t’ai rien dit pour t’épargner. J’ai tout gardé pour moi pour que l’on ne s’en prenne à aucun de nous deux.
- Et du coup, c’est à Morgane qu’il s’en est pris, lança Vanille.
Et merde. Elle ne voulait pas participer, la phrase lui avait échappé. Tant pis, autant aller jusqu’au bout, maintenant.
- Ton silence est pire que ton inaction !
- Et ma parole alors ? Si, imagine, Vanille, si je vous avais dit ce que j’ai vu, si vous aviez discuté, réfléchis, débattu, et que vous aviez fini par le croire, lui ? J’aurais été celle à l’origine du clivage de notre Club, celle qui amorce les tensions, alors que je ne souhaite que son union et sa force ! Leanne est partie, tant pis, tant mieux, je n’en sais rien. Et après, imagine, si une part de sa culpabilité, même innocentée, avait été mise à jour, ne penses-tu pas que Jules aurait été bien plus sur ses gardes ? Tu crois qu’il vous aurait laissé trouver Morgane si facilement, qu’il aurait été arrêté ?
Vanille se leva d’un coup en frappant le plat de ses mains sur la table, provoquant un sursaut général :
- Comment oses-tu ?! Comment oses-tu dire que par ton égoïsme, ta lâcheté, tu nous aurais permis d’arrêter Jules ? N’essaye pas de nous faire croire que tu as tout calculé, un mal pour un bien ? Vraiment ?
- Non, je n’ai pas calculé, j’ai eu peur ! Tu as vu ses yeux, Vanille (elle chercha des yeux Lorelei, qui avait aussi vu Jules lors de son attaque), toutes les deux vous avez vu à quoi il ressemblait. Ce n’était pas le Jules que nous connaissons, il était comme un fou, habité par une colère, une froideur, il était comme un mage noir, il était effrayant. Alors oui, j’ai eu peur de lui. Et lorsque je me suis enfuie, j’ai eu peur d’en parler, parce que ce que j’ai vu, vous ne l’auriez pas compris. Vous ne pouvez pas prouver que si j’avais décidé de parler, les choses se seraient mieux déroulées.
Il y eut un silence, au bout duquel Annabelle murmura :
- Elle n’a pas tort.
Elle se tourna vers Iris pour lui parler directement :
- La peur peut se comprendre, mais tu as certainement dû peser le pour et le contre, avant de te décider à ne rien dire. Qu’as-tu vraiment pensé à ce moment-là ? Pourquoi n’avais-tu pas confiance en nous ?
Vanille se rassit en silence, et Iris, essoufflée de sa tirade, déglutit.
- Au début, j’avais juste peur de ce que Jules pouvait me faire, s’il savait que je l’avais vu. Lorsqu’il a attaqué Leanne, à terre devant lui, j’ai cru, pendant un instant, j’ai cru qu’il allait la tuer. Evidemment que j’ai envisagé d’en parler, évidemment, ça m’a travaillé pendant des jours. Des semaines. J’ai pensé à Morgane, en premier, mais je me suis imaginé l’un d’entre vous venir me dire que Florent avait attaqué quelqu’un, et ça m’a bloquée. Puis Oreste et David, mais ils étaient tellement proches de Jules, je savais qu’ils allaient commencer par douter de moi avant de douter de lui. Vous savez comment Oreste a réagit lorsqu’elle s’est retrouvée face à Jules. Et puis, Alexandre, Alva, Alya, nous étions tous plus jeunes, moins influents, et ne parlons même pas des Novices - n’y voyez là aucun mépris, surtout. Vous n’étiez même pas encore conviés aux réunions. Alors, le temps passait et je n’arrivais pas à me décider, et Leanne a quitté le Club, et a tout oublié. A ce moment-là, j’ai compris que c’était trop tard.
Elle baissa les yeux, qui jusqu’ici cherchaient le regard de chacun des membres, pour leur prouver la sincérité de ses paroles. Sa voix se fit plus basse.
- Mon dilemme me hantait chaque jour, j’en avais des cauchemars. Quand Leanne est partie, j’ai décidé d’arrêter d’y penser. Je ne savais rien de plus que ce que j’avais vu, je ne savais rien sur Morgane, sur ce qu’il faisait, je ne savais même pas qu’il faisait quelque chose. J’avais même envisagé à un moment qu’il s’était passé quelque chose entre Leanne et Jules, et que cette histoire ne les regardait que tous les deux. J’ai préféré ignorer, j’ai préféré oublier. Evidemment, lorsque la vérité a éclaté, je me suis sentie coupable… avant de me rendre compte que je n’aurais peut-être rien pu changer.
Elle s’adossa sur sa chaise, le nez toujours baissé, et croisa les bras. Florent s’approcha d’elle et l’enlaça, et ils ne dirent plus un mot. Autour de la table, la réflexion était intense. Même Vanille, si sûre d’elle, commençait à douter de l’amoralité d’Iris. Elle ne pardonnait pas, mais commençait à comprendre, à imaginer ce qu’elle pouvait ressentir. Et pourtant, il restait plusieurs points à éclaircir.
- Pourquoi as-tu couru après Leanne ? Lorsqu’elle t’a vue dans le couloir ?
- Et surtout, reprit Alexandre, j’aimerais en savoir plus sur cette histoire de trafic.
Les mains jointes devant sa bouche, il regardait Iris sans la moindre colère, ni jugement ; il se dégageait de son regard un professionnalisme évident, et le titre de Maître lui seyait parfaitement. Iris se dégagea de Florent doucement, une nouvelle flamme s’était allumée dans ses yeux : elle était de nouveau prête à se défendre.
- Tout d’abord, rien de ce que je fais n’est illégal...face au règlement du Club.
- Cela peut être légal mais immoral, lança Ambre.
Alexandre eut un geste de main vers elle pour la faire taire, le regard toujours tourné vers Iris, et la pria de continuer.
- Notre Club a ses propres règles et ici, vous n’avez pas le droit de me juger pour ne non-respect du règlement de l’école ou du ministère. Je n’ai jamais enfreints celles du Club, les vraies, les règles internes. Vos règles morales, peut-être. De mon point de vue, un peu hypocrite, je l’accorde, j’aide les élèves. Parmi les potions et les sortilèges que je crée, il y en a qui me sont commandées directement par des élèves. Il me demandent de quoi améliorer leurs mémoire, de quoi écrire plus vite, parfois même d’être plus fort pour le Quidditch, ou encore pour des choses plus personnelles, pour leurs relations, pour leur famille… On me connaît sous le nom de Lily. Ce sont surtout les plus jeunes qui me connaissent. Et je leur vends ces sorts, ces potions, au prix variant en fonction des ingrédients, du temps de travail, du danger potentiel. Je fais toujours attention à ce que cela ne soit pas dangereux, ni pour moi, ni pour eux. Et parfois, lorsqu’ils deviennent trop menaçants pour moi… Il m’est déjà arrivé que certains me menacent de me dénoncer, et cela, je ne peux pas me le permettre. J’ai besoin de cet argent, j’ai besoin de cet anonymat, et si cela venait à se savoir, alors c’en serait fini de mes études, de mes ambitions, de tout. Lorsque cela arrive, je… je leur lance un sortilège d’amnésie. Je les maîtrise parfaitement, et il m’arrive même de vérifier par la suite qu’ils n’ont pas de séquelle.
Elle déglutit une nouvelle fois, comme pour ravaler sa gêne et sa fierté, et se tourna vers Leanne :
- Quand je t’ai vue, je n’avais pas confiance en toi. Je t’ai vue et j’ai vu ma fin. Alors, je n’ai pas réfléchi, et je t’ai poursuivie pour te faire oublier ce que tu venais de voir. J’avais peur de tout voir s’effondrer autour de moi. Mais quand j’ai vu Jules pointer sa baguette sur toi… En vérité, j’avais espoir qu’il te lance un sort d’amnésie, et j’avais peur qu’il ne te tue. Mais je ne connais pas le sort qu’il t’a lancé. Je ne m’en souviens pas. Certainement une de ses créations de manipulation. Si c’est ce que vous voulez m’entendre dire, lança-t-elle à la cantonade, oui, j’étais soulagée de voir que Leanne ne se souvenait de rien. Et cela a peut-être - sûrement affecté mon jugement et ma décision.
Il n’y avait plus rien à ajouter. Toute l’histoire était sortie. Vanille sentait toujours cette pointe de colère en elle, et malgré la compréhension qui s’était emparée d’elle, elle continuait d’estimer qu’Iris n’avait plus sa place dans le Club. Le Club des Créateurs n’était pas un business, comme l’avait évoqué Ambre, et par son inaction, elle avait peut-être permis à Jules de poursuivre plus longtemps ses méfaits. Elle se sentait encore trahie, et ne voulait pas pardonner. Elle était mêlée à l’histoire terrible de Jules, et pour cela, Vanille ne la considérait plus comme une membre de son Club, plus comme une amie, à vrai dire, elle ne la considérait plus du tout.
- Comment as-tu fait pour créer tout ça sans que Florent ne s’en aperçoive, vous qui travaillez toujours ensemble ? demanda Annabelle, qui avait décidément de bonnes questions.
Iris ouvrit la bouche mais ce fut Florent qui parla :
- Je travaille avec elle. Ce projet est à nous deux.
- Non, Flo, je…
- Tu prends tous les risques depuis le début, il est hors de question que tu plonges seule.
Il échangèrent un regard empli de mièvrerie. C’en était à oublier la gravité de la situation. Alexandre, au milieu du silence songeur qui s’était de nouveau imposé, se leva et dit :
- Iris, Florent, voulez-vous bien quitter la salle ? J’aimerais que nous puissions discuter entre nous.
- Quoi, vous allez rendre votre jugement ? A main levée, vote à la majorité, pour savoir si nous faisons encore partie du Club ? ironisa-t-elle, amère.
- Exactement.
- C’est ridicule ! Vous ne pouvez pas nous exclure, nous faisons partie du Club.
- Si. Je t’invite à relire le règlement.
Florent, plus conciliant, la tira doucement par la manche. Entre-temps, Ambre avait sorti un parchemin enroulé, sur lequel elle lit à voix haute :
- “Maître Créateur : autorité suprême du Club dans son école. Il termine les débats et prend les décisions principales (admission – présentation de projet – radiation).” Alexandre a l’autorité pour vous exclure immédiatement. Estime-toi heureuse qu’il nous demande notre avis.
Elle lui lança un regard empli de colère en roulant le parchemin, et Iris accepta de sortir.
- Est-ce que l’un d’entre vous a quelque chose à dire ? demanda Alexandre dès que la porte fut refermée sur eux.
Ambre se manifesta en première.
- Je sais que ce que nous faisons ici est avant tout personnel, que le ministère se fourvoie sur la plupart de nos recherches. Nous avons tous nos recherches, nos travaux personnels, et il serait hypocrite de notre part à tous de leur en vouloir pour ça. Et même si ça me tue de dire ça, elle ne fait de mal à personne avec ses ventes. Entendez-bien, je déteste le principe. Je déteste qu’elle s’autorise à effacer la mémoire des élèves. Je déteste me dire qu’on se serve de notre Club pour des ventes personnelles, pour se faire son propre argent, pour créer un business. Pour moi, l’idée principale du Club, c’est l’art et l’amour de la création, et de la magie. Je suis personnellement prête à passer l’éponge sur cette partie, je veux dire, je ne connais pas les vraies affaires de chacun d’entre vous. Et ce n’est pas à moi de juger. Je déteste le principe mais j’admets qu’ils ont bien géré leur projet, si ce qu’ils disent est vrai - et je pense que ça l’est - alors ils ont été, à défaut de moraux, consciencieux sur ce qu’ils faisaient et ce qu’ils vendaient.
- Les deux garçons n’avaient pas l’air d’avoir peur d’elle, au contraire, quand ils parlaient d’elle, ils la décrivaient presque comme leur salut, dit Leanne.
- Leur salut dans la tricherie. Comment pouvez-vous ne pas penser à ça ? Par ses actes, elle tolère, elle cautionne et incite à la fraude, et nous sommes dans une école avant tout. Nous ne pouvons nous prétendre à l’excellence si nous nous penchons sur ce genre de méfaits, dit Vanille.
- Méfait, le mot est fort. Je te vois surtout vexée du mensonge, et aveuglée par ta colère. Ce n’est pas ce que font Iris et Florent qui te gêne, argumenta Annabelle, ce sont ses silences après avoir vu Leanne se faire attaquer par Jules.
- Et elle a bien raison, dit Enguerrand. On parle de Jules, on parle de tout ce qu’il a fait de terrible l’année dernière, et on ne peut pas nier que par son silence, elle a peut-être aggravé une situation qui aurait pu être évitée.
- Mais Iris a raison sur un point, et pour cela je lui pardonne : nous-même ne pouvons savoir comment nous aurions réagi si elle nous avait avoué ce qu’elle avait vu. Et moi, je ne sais pas si j’aurais agi différemment, dit Alya.
- Personnellement, je sais que j’aurais eu autant - voir plus peur qu’elle, avoua Lorelei. Je le sais parce que j’ai fait face à Jules, moi aussi. Oui, Vanille, ajouta-t-elle alors que cette dernière allait rebondir dessus, toi, tu as fait preuve de courage, pour protéger Morgane, pour nous protéger toutes les trois, tu es passée outre ta surprise et ta peur. J’en aurais été incapable. Je ne peux pas lui en vouloir.
Vanille referma la bouche, le bec cloué.
- Alors quoi, on ne fait rien ? Vous avez beau pardonner, on ne peut ignorer la gravité de ses actes, lança Olivier. Après, je ne suis pas partisan du fait de la dénoncer, je pense que nous devons garder tout cela entre nous.
- Et la laisser continuer ?
- Peut-être oui. De toute façon, nous avons déjà plus ou moins admis que ce n’était pas son trafic le problème, et Ambre a raison, ça serait hypocrite de notre part de lui en vouloir pour ça. Nos codes moraux personnels varient.
- Alors que proposes-tu ? demanda Alexandre, ouvert à toute proposition.
- Je ne sais pas. Je n’ai pas envie de la punir, par simple empathie, je ne me sens pas légitime pour ça.
- Tu es un Jeune Créateur du Club, tu as autant de légitimité que chacun d’entre nous.
- C’est en tant que sorcier que je me pose, répondit Olivier, en tant qu’élève, en tant qu’ami, tout ça à la fois en plus du fait que nous partagions tous quelque chose ici. Se soutenir, n’était-ce pas là notre credo ? Se soutenir malgré les problèmes, se soutenir dans l’adversité, Parce que nous sommes tous liés - à Leanne, à Jules, à Iris.
- Dans ce cas, si nous hésitons entre sévir et passer l’éponge, pourquoi pas un entre-deux ? Qu’elle continue ses ventes, mais si elle nous ment encore une fois sur quelque chose d’aussi grave, alors nous sévirons.
- Un blâme, en quelque sorte ?
Vanille jugea la peine un peu faible.
- Je suis pour qu’elle ne puisse plus avoir de droit de vote, de droit d’argumenter pendant nos débats, dit-elle J’ai perdu confiance en elle. Personnellement, je ne recevrai plus ses arguments, je n’écouterai plus sa voix. Voilà ce que je propose. Qu’elle assiste à toutes les réunions qu’elle souhaite, mais qu’elle perde son droit de participation à la vie du Club.
Alexandre reprit la parole :
- Nous avons donc deux propositions. Y en a-t-il une troisième ?
- La radier du Club, lâcha Ambre.
Vanille se tourna vers elle, étonnée. Elle s’était attendu à ce que son amie soit la plus compréhensive, la plus apte à raisonner, à pardonner. Elle pensait qu’Ambre serait celle qui la limiterait dans sa propension à juger selon ses propres lois, à ce qu’elle limite sa sévérité, et voilà qu’Ambre se retrouvait à juger avec une extrême sévérité.
Autour de la table, certains s’étonnèrent.
- Pour ce qu’elle aurait fait à Leanne si elle l’avait attrapée avant Jules.
Et elle avait raison. Les convictions de Vanille basculèrent, d’un coup, d’une phrase Ambre lui avait fait changer radicalement d’avis en lui rappelant la véritable victime de cette histoire, Leanne. Justement, Alexandre lui accorda la dernière phrase.
- Qu’en penses-tu, Leanne ?
Celle-ci se recroquevilla sur sa chaise, peu habituée aux tables rondes du Club, se sentant certainement partout sauf à sa place.
- J’aimerais revenir au Club, dit-elle doucement. Si vous le voulez bien. Je n’ai jamais voulu le quitter, mes idées n’étaient pas les miennes. Mais si vous acceptez, je ne sais pas comment sera l’ambiance, avec Iris à côté…
- Iris, malgré ses actes, ne mérite pas notre méfiance quant à une quelconque agressivité de sa part, argumenta Annabelle. Notre confiance, elle l’a perdue, du moins pour la plupart d’entre nous, je pense. En tout cas, elle ne la mérite plus entièrement. Mais tu ne risques rien, à part d’être mal à l’aise avec elle. Rien ne t’obligera à la côtoyer.
Après quelques instants de réflexions, on remit les propositions sur la table, et on vota à main levée. Puis, Alexandre alla chercher Iris et Florent, restés derrière la porte. Ils furent accueillis par un silence glacial, et ne purent accrocher le regard d’aucun d’entre eux, pas même de Vanille qui pourtant observait Iris, fière, digne, prête à accepter la sentence, amère d’avance.
- Voici ce que nous avons décidé. Iris, tu perds ton droit à la participation aux réunions, dans le sens où tu peux y assister, mais tu n’auras plus de droit à intervenir. Ta voix ne sera plus entendue dans les décisions du Club. Nous avons pris cette décision non pas pour te punir de ton trafic, ni même de ton silence, mais bien de ce que tu t’apprêtais à faire à Leanne. Pour cet élan, même s’il n’a pas été concrétisé, tu perds notre confiance. Tu es libre, comme je l’ai dit, de venir aux réunions, et évidemment de poursuivre tout ce que tu fais au Club, officiellement et officieusement.
- Et Florent, rajouta Ambre, comprend bien que même si ta voix compte autant que chacune des nôtres, ta proximité avec Iris fait qu’elle pourra argumenter à travers toi. Nous n’avons aucune raison de te punir de quoi que ce soit. Mais comprend-nous, comprend-moi lorsque je dis que tu es indissociable d'Iris à mes yeux. Vos paroles, de par votre proximité, ne font qu'une. Tu ne mérites pas de perdre toi aussi notre confiance, mais Iris ne mérite pas que nous t'écoutions.
- Je comprends parfaitement ce que tu veux dire, dit-il, sincère.
- Bien. Tout ceci est donc réglé.
Après un instant de flottement, les deux s'assirent en silence.
- Quelqu'un a-t-il un autre sujet que nous devrions aborder ? demanda Alexandre.
- Le retour de Leanne, dit Ambre.
- C'est vrai. Je pense que personne ne s’y opposera, dit-il en lançant un regard à l'assemblée, qui pour la majorité hocha la tête l'air entendu. En revanche, Leanne, j'ai peur de ne pas pouvoir t'accepter comme Jeune Créatrice. Tu as manqué une année complète au Club, tu n'as rien appris, rien travaillé. Je te propose de redevenir Novice, et de passer Jeune Créatrice l'année prochaine - je crois que cela sera une première au Club. Tu ne pourras jamais avoir de statut de Grande Créatrice, et j'en suis désolé. Mais je ne peux pas te proposer mieux.
- Et cela me va parfaitement. Merci, souffla-t-elle.
- As-tu un domaine dans lequel tu aimerais travailler ? Je crois que la plupart d'entre nous, cette année, travaillons sur des projets non officiels, et plus ou moins secrets. Et certains ont déjà des Novices.
Il balaya la table du regard, et la plupart des membres firent comprendre qu'il n'était pas possible pour eux de prendre une Novice.
- Si tu es d'accord, proposa Alexandre, si les potions t'intéressent, je peux te prendre comme Novice.
- Oui, je veux bien. Vanille m'a parlé de tes talents de maître des potions, je suis sûre que j'apprendrai beaucoup avec toi.
- Et, comme pour tous les Novices, tu pourras à partir de quelques mois, voir semaines, te lancer dans tes propres créations, sous une tutelle. En vérité, tu n'auras de Novice que le statut, ton niveau d'étude te permettra de faire ce que tu veux d'ici à ce que tu te sois remis dans le bain de la création, et des ventes au ministère.
Et on s'organisa ainsi. Pendant le reste de la réunion, où différents points furent abordés - comme la prochaine réunion qui porterait sur la rencontre internationale avec les autres Clubs, Leanne fut parfaitement intégrée et Iris parfaitement ignorée.
End Notes:
Merci d'avoir lu !
Comme je l'annonçais plus haut, j'aimerais vous prévenir que ma publication se fera de plus en plus rare, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord ma vie personnelle de plus en plus emplie m'oblige à espacer le temps que j'octroie à l'écriture (à mon grand regret, tmtc toussa, la vie est dure mon frère) (je nierai avoir écrit ces mots).
Ensuite, j'aimerais faire évoluer mon style d'écriture. Cette fanfiction, ma première fanfiction longue, est pour moi un exutoire à idées. Mon esprit fourmille de plans, de plots, de retournements et d'évolutions de relations entre mes personnages. En cela, et comme je suis une éternelle impatiente, j'écris vite pour que ressortent toutes ces idées dans mes textes, au détriment du style, de la forme. Je n'améliore pas mon style d'écriture, ce que j'aimerais pourtant faire.
Mais je me suis embarquée depuis plusieurs mois (depuis juin... neuf mois ? o.o) dans cette histoire, et je ne peux pas d'un chapitre à l'autre changer le style de l'histoire. Il est également hors de question que j'arrête de l'écrire avant la fin, et par voie de conséquence que j'arrête de la publier. Par plaisir personnel et pour vous qui lisez.
J'ai écrit un chapitre particulier. A priori, il s'agira du trente-huit (vous aurez le temps de le voir venir quoi). Il reflète ce que j'aimerais tenter de faire, en partie, car j'aimerais faire évoluer en continu mon style, l'améliorer sans cesse. Je me répète. Hors, ce chapitre, il a mis presque cinq fois plus de temps à être enfin terminé (je l'écrivais en parallèle de l'histoire), à force de bêta et de conseils, de relecture phrase par phrase, paragraphe par paragraphe, point par point. Et s'il plait, je glisserai doucement vers ce type d'écriture. Plus lent, plus réfléchis, moins pressé (personne ne me presse à part moi, je le sais très bien), pour le reste de la fanfiction (l'histoire en elle-même me permettra de justifier (de manière intradiégétique) ce changement de type d'écriture).
Voilà donc ce qui justifie ma baisse de rythme, et peut-être même de niveau des derniers chapitres. Je me lasse de mon style, disons-le clairement, ou plutôt de mon non-style, de la narration simple et efficace, même si elle me permet d'écrire vite.
Je vous embrasse tous fort, et espère vous retrouver lors de notre prochaine réunion au Club des Créateurs.
Dean
Oui, c’est exactement ce à quoi vous pensez by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous et bienvenue à notre trente-quatrième réunion au Club des Créateurs !
Sans plus d'introduction (je vais arrêter mes notes de chapitre à rallonge), voici un nouveau chapitre, avec une nouvelle Création fort intéressante...
Bonne lecture !
Après ces événements, la vie fut bien plus calme au Club des Créateurs. Leanne s’intégra parfaitement au quotidien d’Alexandre, bonne élève et voulant amortir ses lacunes, elle travaillait avec attention et rigueur. Alexandre, en dernière année et donc en pleine préparation de ses ASPICs, n’allait pourtant pas souvent au Club, et de fil en aiguille, de plus en plus confiant sur ses capacités, finit par laisser Leanne faire quelques recherches, quelques tests de potions seule. Elle l’aidait à avancer plus vite et il en étant très satisfait.
Leanne, quant à elle, rayonnait d’être à nouveau membre du Club. Il fallu apporter quelques retouches au sortilège du Club pour qu’il comprenne que Leanne, sixième année, était une Novice, et grâce au talents magiques réunis d’Ambre, Vanille, Octave et Olivier (qui avaient tous tenu à participer à ce petit projet de réintégration), son insigne fut mise à jour et lui fut rendue dans une cérémonie non officielle et improvisée, un soir, dans la salle commune de Serdaigle. La grande Novice en fut émue aux larmes, et Vanille se moqua d’elle allègrement. Il s’en résultat une bataille explosive et de nombreux duels d’oreillers, à la fin desquels il fut communément admis que tous étaient ravis du retour de Leanne, de sa bonne humeur et de son humour dérangé.
Plusieurs fois, Vanille, Leanne et Alexandre se retrouvèrent à discuter ensemble, lorsque Vanille les rejoignait devant leurs chaudrons. Vanille compris qu’Alexandre avait fait en sorte - inconsciemment, peut-être - que Leanne soit avec lui pour pouvoir la rassurer, être certain de sa bonne réintégration, et pour s’assurer qu’elle rattrape son retard dans les connaissances du Club.
- Tu es un bon Maître Créateur, lui dit-elle lorsqu’ils se retrouvèrent seuls, Alexandre et elle, après que Leanne soit partie (certainement persuadée de devoir leur laisser un peu d’intimité). Tu es parfait avec Leanne, tu investis ton temps pour elle, alors que tu n’étais clairement pas obligé. Et puis je trouve que tu as particulièrement bien géré le débat, les arguments de chacun, les décisions. Tu n’as pas seulement de l’ambition, tu as un tact de chef.
Un immense sourire fleurit sur son visage.
- Tu n’imagines pas à quel point ce que tu dis me fait plaisir.
- Je le pense sincèrement. Tu nous as écoutés, tu as laissé à chacun le droit de s’exprimer, tu as su t’imposer quand il le fallait. J’ai senti - on a tous senti je pense que nos avis comptaient, même si la décision finale était la tienne.
- Est-ce que tu me dis ça parce que ta proposition a été celle qui a été retenue ?
- Non, mais je dois avouer que si Iris n’avait reçu qu’un blâme ou avait été radiée, j’aurais ressenti grande frustration. Quand bien même, j’aurais reconnu tes qualités de chef.
Il hésita un moment.
- Ce n’est pas seulement le fait d’avoir su gérer, ou aiguiller un débat. J’avais une responsabilité immense, radier un membre n’aurait pas été une décision à prendre à la légère. Pourtant, c’est le choix que, seul, j’aurais pris.
- Tu veux dire…
- Que moi, contrairement à toi, je la ressens, cette frustration. J’aurais aimé être un Maître Créateur tyrannique, et prendre cette décision sans m’occuper des états d’âme des autres membres. J’étais bien plus en colère que je ne l’ai montré, je me suis senti profondément trahi, mais lorsque je me suis proposé pour être Maître Créateur, ce n’était pas pour faire le chef et imposer ma loi. Je ne souhaite que le meilleur pour le Club, et le Club, c’est nous, nous tous. Ma voix est finale, ma responsabilité est immense, mais je ne peux décider à moi seul, ça n’a pas de sens.
Vanille soupira.
- Alors tu as encore plus de mérite que je ne le pensais. Je n’aurais jamais pu faire preuve d’autant d’abnégation à ta place, si la décision finale reposait sur mes épaules, je n’aurais pas réussi à entendre les arguments. Je crois que je ne ferais pas une bonne Maître Créatrice.
Il rit.
- Non, je ne pense pas !
- C’est vexant, lâcha-t-elle en croisant les bras.
Il l’attira vers lui :
- Je ne vais pas te mentir pour te faire plaisir, Van. Je commence à te connaître, et de ce que tu me dis sur tes recherches, sur tes idées (Vanille lui avait raconté ses rencontres avec Firenze et avec les Elfes, et son ambition quant à leur libération, mais n’avait encore jamais évoqué ses idées de réforme du Club, ni sa naissante ambition de se proposer comme Maître Créatrice.), tu as encore du chemin à faire pour pouvoir gérer ta colère, ton impulsivité. Tes idées sont bonnes, tes manières trop brutes. Non pas dans le sens brutal, mais trop entières, tu manques de finesse, de recul, et justement d’abnégation. En gros, toi, tu serais une cheffe tyrannique, parce que ta propre notion de justice te tient trop à coeur.
- C’est encore vexant, parce que tu as raison.
“Et ainsi s’envolent mes ambitions.”
- Ambre ferait une bonne Maître Créatrice, poursuivit-il. Elle s’est trop laissée aller pendant le débat parce qu’il concernait une personne qu’elle aime, mais je pense qu’avec une forte responsabilité sur les épaules, elle saurait gérer ses états d’âme et agir comme il le faut. Et puis, dit-toi qu’Ambre Maître Créatrice, toi à ses côtés en Grande Créatrice, vous pourrez faire de grandes choses. Je pense qu’elle saura canaliser tes emportements tout en allant dans ton sens. Je pense qu’elle pourrait être le vecteur de ta révolution.
Vanille ne s’étonna même pas. Evidemment, il avait tout compris, il avait tout vu. Il appelait cela “révolution”, dans sa tête à elle c’était une réforme, une amélioration, mais au final, l’idée était la même. Et il avait su lire en elle alors qu’elle s’entraînait, depuis maintenant plusieurs mois, à surveiller ses paroles et ses actes. Il la comprenait vraiment.
Puis elle réfléchit un instant sur le sens de ses paroles. Ambre avait-elle déjà montré quelconque signe d’ambition ? Certainement, elle était officieusement à la tête du Club de Duels, assurait son poste de chargée de relations avec le ministère au Club des Créateurs sans aucun effort ni difficulté, et avait guidé les opérations après avoir eu connaissance des soucis de mémoire de Leanne. Peut-être ne nourrissait-elle pas l’ambition concrète de devenir Maître Créatrice, mais elle en avait l’aura, elle avait le “truc” pour.
Même si elle avait évoqué Vanille en probable Maître Créatrice quelques semaines plus tôt.
Et sans la pression des responsabilités, Vanille pourrait se consacrer à ses propres projets, surtout si Ambre partageait ses opinions et lui assurait son soutien. Mais de cela, elle n’en était pas encore certaine.
- Comment te sens-tu, par rapport à cette histoire ? Aujourd’hui ? demanda alors Alexandre.
Il avait peu à peu acquis le don de poser les questions qui comptent pour Vanille, et c’était encore une fois la preuve qu’il la comprenait vraiment. Elle ne l’avait pas spécialement évoqué, certes s’était énervée lors de la réunion mais avait accepté la sentence et on n’avait plus vraiment parlé de tout ça, au Club. La pression était retombée, les faits avaient été acceptés, et on s’était globalement habitués aux révélations, à la présence de Leanne, aux silences d’Iris. Le tout en quelques semaines.
Le fait qu’il lui pose cette question, en appuyant sur le “aujourd’hui” en disait long sur ce qu’il avait compris d’elle, sur ce qu’elle-même n’avait pas forcément pris le temps de formuler, pas même dans sa tête.
- Je me sens trahie. Encore. Et tout ça me fait peur.
Elle s’écarta de lui pour mettre de l’ordre dans ses pensées, et tenter de dire ce qu’elle avait sur le coeur sans le vexer.
- J’ai peur de ne plus réussir à faire confiance. J’avais confiance en Jules, et je ne comprends toujours pas pourquoi, comment, toute cette histoire… Et j’avais confiance en Iris, et encore une fois je n’arrive pas à admettre ses actes, ses pulsions. A chaque fois que j’y pense, je me sens trahie parce que j’avais posé ma confiance en eux. Et je crois que… Tout ça me fait peur, je crois que je suis en train de tout remettre à zéro, toute la confiance aveugle en chacun des membres qui m’était venue aux débuts, je crois que je suis en train de la remettre en question. Il n’y a qu’en Ambre et Leanne que j’ai une confiance absolue. Mais pour les autres… et pour toi même. Je crois que ça va me prendre du temps de te faire confiance.
- Je comprends.
- Non, je ne sais pas si tu comprends vraiment, je te disais que ça me faisait peur, parce que… Parce que d’un côté, je n’ai pas envie d’être trahie, j’ai peur de retomber de haut, mais en même temps j’ai l’impression que c’est trop tard parce que… Parce que je crois que je t’aime. (Elle déglutit et rougit d’un coup.) A ma manière, parce que je ne sais pas si on peut parler d’amour alors que je te dis que j’ai peur d’avoir confiance en toi.
- Donc, oui, je comprends. Et je pense que c’est normal que tu te mettes cette barrière dans ta confiance après qu’elle ait été brisée par d’autres. Je ne t’en voudrai jamais pour cela. Et, surtout n’y voit aucune pression, surtout - je te connais - sache que moi j’ai confiance en toi, et en ta capacité de t’en sortir dans ces débats dans ta tête, dans ta capacité à me faire de nouveau - ou juste, de commencer à me faire confiance. Parce que je suis aussi en train de tomber amoureux de toi.
On aurait pu faire bouillir de l’eau sur le visage de Vanille. Et sans trop se concerter, ils s’accompagnèrent dans leur dortoir, le sien, à elle, ou à lui, peu importe au fond. Et le reste de la nuit n’appartint qu’à eux.
Vers la fin du mois de février, il y eut une nouvelle réunion organisée au Club, et il n’était plus question depuis longtemps que Vanille manque les réunions. Elle se sentait, paradoxalement, très à l’aise depuis qu’Iris n’y participait plus. Alexandre avait gonflé sa confiance, indéniablement. Ambre et Leanne, dorénavant toujours présentes autour d’elle, lui donnaient l’impression de former un véritable groupe, elle se sentait, avec Alexandre à ses côtés, comme faisant partie du noyau du Club, son épicentre. Alexandre Maître Créateur, Leanne sa Novice, Ambre toujours impliquée dans l’organisation et les relations du Club, et elle, Vanille, au milieu, amie, amante, membre, comme une de ces petites boules d’énergie qui formeraient le coeur du Club.
Autour d’elle, autour d’eux gravitaient librement les autres, soudés, malgré ce petit nuage qu’était Iris. Un nuage blanc, unique, dans l’immensité du ciel bleu ; on la savait ici, mais elle ne dérangeait personne ; on lui parlait, oui, elle faisait partie de la danse, mais gardait le silence, résignée, et malgré tout souriante et présente. C’était assez étrange à décrire, mais cela convenait. Personne ne se haïssait, tous se motivaient, et même Leanne, parfois, prenait part aux conversations auxquelles Iris participait, et même si c’était étrange et, il faut l’avouer, un peu forcé, elles se répondaient, comme si, d’un commun accord silencieux, elles avaient décidé que tout avait été dit et qu’il fallait pardonner ou partir, et aucune d’elles ne souhaitait sincèrement voir le départ de l’autre.
Il fallu un bon moment à Vanille pour remarquer enfin le retour de Nathan auprès d’elle. Il recommença - avait-il seulement arrêté - à participer aux réunions, se mêlait aux conversations, aux fou rire, aux recherches. Personne ne trouva étrange de le voir apparaître soudainement. Vanille le remarqua un peu plus véritablement que les autres, c’est-à-dire que si au Club on voyait Nathan, juste Nathan, sa présence, elle voyait bien son retour après une longue absence.
Elle s’en rendit pleinement compte lors de cette réunion du mois de février, et en s’installant sur la table ronde, elle se mit volontairement à côté de lui pour lui offrir son plus beau sourire, un sourire de bienvenue, dénué de toute question face à son absence, dénué de tout reproche, juste, elle lui sourit. Et il sembla heureux de cet accueil, elle qui seule le remarqua vraiment. Etait-ce un choix de sa part de s’ouvrir de nouveau à elle, ou était-elle véritablement en train de prendre le dessus sur ses barrières ? Elle n’en savait rien, et peu importait, au fond. Elle avait hâte de retrouver le temps de se plonger dans ses recherches avec lui. Son aide, son implication sincère dans ses recherches à elle était un véritable soutien, et elle n’imaginait plus vraiment travailler sans lui, tant il s’était impliqué, approprié le projet, à son échelle, à sa manière, sans jamais vouloir prendre le dessus, mais toujours en main forte. Le regard soutenu, fort et profondément amical qu’ils s’échangèrent lui fit chaud au coeur. A elle, et à lui.
Ce furent Olivier et Octave qui furent à l’origine de cette réunion (mais refusèrent catégoriquement de dire pourquoi avant) et Alexandre profita de l’occasion pour commencer par parler de la rencontre avec les autres Clubs, qui aurait lieu pendant les vacances de Pâques.
- C’est malheureusement la situation la moins exotique, car nous accueillerons cette année les quatre autres écoles à Poudlard. Pour les Jeunes Créateurs, ne vous inquiétez pas, vous pourrez visiter une école l’année prochaine. Certainement Beauxbâtons, mais rien n’est encore décidé. Pour les accueillir, nous aménageons une salle spéciale du château pendant une semaine, qui s’appelle la Salle sur Demande. Elle nous donne des dortoirs, une salle commune, des salles d’eau, des habits de Poudlard, en bref tout ce qui nous est utile et indispensable pour leur accueil, qu’il soit le plus confortable et le plus discret possible. Le but de cette visite est de passer du temps avec eux pour, évidemment, organiser le Club à l’échelle internationale, mais aussi échanger sur nos créations, tisser des liens avec eux, et, avouons-le, passer de bons moments le soir, à base de nourriture et de bieraubeurre. Vous l’aurez compris, l’ambiance est, d’habitude, bien sympathique.
L’euphémisme dans toute sa splendeur. Vanille voyait d’ici le whisky pur feu, les sorties nocturnes et les gueules de bois qui en découlent.
- Nous leur ferons visiter le château, le parc, Pré-au-Lard, échangerons conseils et idées. J’organise tout avec Ambre, et si vous avez des idées pour améliorer leur séjour, n’hésitez pas à proposer.
- Justement, s’écria Olivier en se levant d’un coup, imité par Octave. Je peux ? Tu as fini ?
Alexandre se rassit, un petit rire fleurissant sur ses joues, et les invita à reprendre en tendant une main vers eux. Il savait exactement de quoi il en retournait, mais il était bien le seul. Vanille trépignait d’impatience devant l’excitation d’Olivier, rejoint par Octave, et les deux garçons se dirigèrent vers la porte d’entrée, à sa droite. Ceux qui ne voyaient pas se retournèrent sur leurs chaises, curieux, tous amusés par l’engouement qui naissait dans l’air, nourrit par les gestes vifs d’Olivier. Octave, plus calme, sorti sa baguette et fit apparaître sur le mur un grand rideau.
- Mesdames, Messieurs, chers Créateurs. (Il avait prit un air pompeux.) Voici plusieurs mois que nous travaillons dans le plus grand secret sur un projet qui, j’en suis certain, vous satisfera grandement, presque autant qu’il nous a plu de travailler dessus. Vous connaissez peut-être, pour certains d’entre vous, notre propension à interpréter le règlement et à en visiter les failles.
- Non, par contre je connais votre penchant à ignorer le règles quand ça vous arrange, s’amusa Ambre.
- Mais toujours dans les règles de l’art ! s’exclama Olivier, faussement vexé. Nous n’agissons que pour le bien commun de notre Club. Mais au lieu de vous faire attendre nous allons donc vous présenter tout de suite notre projet finalement abouti, notre fierté, notre bébé…
Octave, d’un petit geste de baguette assuré, fit s’envoler le rideau, qui disparu dans une nuée de confettis, laissant apparaître (contrairement à ce que sa forme laissait imaginer), un amas de brique rouges, ressemblant étrangement à…
- La Cheminée du Club des Créateur ! La Créminée ! s’exclama Olivier.
- Non ! Non non, juste, la Cheminée du Club, s’empressa de préciser Octave.
- Mais on avait dit…
- On n’avait rien dit du tout. Tu as dit. J’ai refusé.
- La Cheminateur alors ? D’accord, d’accord, on en reparlera.
- C’est trop tard, maintenant, dit Vanille. Présentez-nous la Créminée !
- Je te déteste.
Octave, dont le visage hésitait entre une exaspération profonde, une résignation forcée et un amusement retenu, s’éclaircit la gorge.
- Cette cheminée, malgré son air grossier et brut - nous ne sommes pas de très bons modélistes - est exceptionnelle. Elle est reliée à l’ensemble des cheminée du château.
- Ainsi qu’à l’ensemble des cheminée du réseau...
- Et enfin, à toutes les cheminées hors réseau qui existent au Royaume-Uni. En somme, elle est reliée à tout.
Il y eut un silence contemplatif devant cette audace. Vanille mit bien dix seconde pour comprendre. C’était un tour de maître magistral et d’une illégalité sans nom.
- Wow.
Ce simple mot décrivait parfaitement l’état d’esprit général, personne ne fut épargné par l’admiration qui grandissait à mesure qu’ils prenaient conscience de l’ampleur de cette Création.
- Ôtez-moi d’un doute, dit Lorelei. Vous parlez de discussion par cheminée… Ou de transport ?
- Les deux.
- Mais non ! s’écria Vanille.
Elle fut la première à se lever pour aller voir de plus près la cheminée, suivie par tous les autres, remis du choc. Elle était vraiment laide, pas bien haute mais particulièrement large. On pouvait facilement entrer à quatre, peut-être même cinq ou six en se serrant (en somme, six comme Annabelle, quatre comme Alexandre). Les briques qui la composaient ne semblaient pas toutes provenir de la même carrière, et cela lui donnait un air particulièrement fait maison. Elle ne trouva pas de terme plus flatteur.
- Donc elle est reliée à tout le réseau, et même hors réseau. Comment vous avez fait ?
- Nous avons créé notre propre réseau clandestin, national et ultra sécurisé. Personne ne pourra vous détecter lorsque vous utilisez la Créminée.
- Cheminée du Club. Elle passe outre toutes les règles du réseau officiel. On a passé au moins deux mois rien que pour analyser et comprendre le réseau existant, et deux autres pour répertorier les clandestins, puis à faire le notre, qui a ses propres règles. En somme, on a compris comment fonctionnait la magie des Cheminées, son fonctionnement de base, intrinsèque, pour pouvoir tout simplement l’ignorer. Une fois qu’on a eu toutes les informations, il était facile de les contourner.
- Elle est reliée à toutes les cheminées du Royaume-Uni. C’est fou.
- Les cheminées ouvertes, les cheminées non reliées, et les cheminées sécurisées. Elle est reliée à Poudlard. Au ministère. A votre vieille voisine aigrie. Et même… A Azkaban.
Il y eut un silence lourd.
- Elle devient d’un coup particulièrement dangereuse, remarqua Ambre.
Tous regardèrent le tas de briques comme s’ils s’attendaient à voir en surgir d’un coup des prisonniers d’Azkaban dans un déluge de flammes.
- Non, vous ne comprenez pas. Ce ne sont pas toutes les cheminées qui accèdent à ce lieu, c’est la Créminée qui permet d’accéder à tous les endroits.
- Cheminée du Club.
- Alors on ne peut faire que des allers sans retour ? s’étonna Vanille, déçue.
- Non, ce n’est pas ça. A cheminée particulière, poudre particulière.
Olivier fit apparaître du néant deux gros sacs en tissu, Octave un troisième.
- Voici les Poudres de Voyage de la Cheminée, les Poudri…
- Non ! Les Poudres de Voyage. De la Cheminée du Club.
Vanille retint un sourire pour ne pas encourager Olivier, mais se promit d’utiliser le plus souvent possible les nouveaux noms. Ils ouvrirent les sacs d’un même geste pour en montrer les contenus.
- Poudre orangée, sac orange, discussion. Un feu, une poignée, vous mettez votre tête dedans. Fonctionne partout.
- Poudre verte, sac vert, Poudlard. Pareil, un feu, une poignée, et vous entrez dedans comme si vous passiez le pas de votre porte.
- Poudre bleue, sac bleu, Royaume-Uni. Même système.
- Il y a quelques particularités. On ne prononce pas forcément le nom du lieu qu’on veut visiter, le système est plus logique, plus précis, plus intuitif. Lorsque vous insérez votre tête ou l’entièreté de votre anatomie dans la cheminée, vous vous retrouverez face à un défilement constant de cheminées. Il vous faudra vous concentrer sur votre destination, soit en prononçant, soit en y pensant, tout simplement. Si la destination est imprécise, face à vous se présenteront plusieurs cheminées, qu’il vous faudra faire défiler, eh bien, j’ai envie de dire, par la pensée. C’est très intuitif et malheureusement nauséeux les premières fois.
- Pour retourner à Poudlard, car c’est la seule chose que vous pourrez faire en partant d’une autre cheminée que la Créminée (on entendit un faible “Cheminée du Club” chuchoté par un Octave lassé), il suffit d’y jeter une poignée bleue, et vous rentrerez à la maison - en l’occurence ici, mais on va dire à la maison, sans avoir besoin d’y penser.
Ambre, curieuse, se pencha sur les poudres.
- On peut aller partout instantanément, gratuitement, en utilisant la Crémi… La Cheminée du Club comme point de chute ?
- C’est l’idée. Partout sur l’île. On a essayé d’étendre jusqu’à l’Irlande mais pas moyen, trop complexe. En revanche, on peut se contrentrer sur des cheminées en particuliers dans d’autres lieu. Par exemple, je ne sais pas, par pur hasard, une cheminée à Beauxbâtons ? On aimerait proposer cette idée aux autres Clubs. Leur donner des pistes, si jamais ils sont intéressés pour refaire le même système chez eux - leurs réseaux sont certainement différents du notre - et, si ça ne les intéresse pas, au moins leur proposer une cheminée par Club, pour qu’ils puissent venir ici. Et aller les uns chez les autres. On commence à bien connaître le système… Cheminal ? Il nous sera facile de créer un mini-réseau, en pentagone, entre nous.
- Vous êtes des génies.
- C’est sécurisé à quel point ? questionna Annabelle.
- Si tu parles de discrétion, c’est indétectable. Je ne voudrais pas paraître prétencieux mais…
- Mais nous sommes les meilleurs. Le système de cheminée du Royaume-Uni date des fondateurs. Au moins.
- A ce point ?
- Non, mais dans l’idée oui. Je ne comprends pas que personne n’ait pensé à ça. Manipuler le système est tellement facile… C’en devient, en effet, dangereux. C’est en partant de ce postulat que l’on a décidé de prendre le temps d’assurer la sécurité. Il existe une quatrième Poudre, la poudre noire. Elle bloque entièrement et instantanément notre réseau, de n’importe quelle cheminée. Et seuls Olivier et moi sommes capables de la débloquer, pour l’instant. Et comme c’est notre bébé, nous gardons pour nous au moins ce joker. La poudre noire, par contre, sera disponible pour tout le monde. En cas de problème.
- Et, pour en revenir à ta question, Annabelle, elle est également enchantée pour t’emmener où tu veux sans grande difficulté, et pour te ramener ici à partir d’un certain temps passé dedans. Si tu hésites, si tu es perdue ou même, si tu fais un malaise - je vous ai dit que ça donnait des vertiges la première fois ? - tu réapparaitras ici.
Vanille n’avait jamais douté des capacités magiques d’Octave et Olivier, ils avaient toujours été bons en cours, et faisaient après tout partie du Club des Créateurs - mais là, c’était une autre paire de manches. La prouesse était véritablement impressionnante. Les deux garçons, considérés comme les deux humoristes du groupe, mais certainement pas les deux têtes. Il apparu que cette vision était partagée par l’ensemble du Club. Le silence qui suivit avait dépassé le stade de l’admiration, il y avait maintenant dans les regards une fierté immense envers les deux garçons - les deux gamins, bustes relevés, les sourires aux oreilles, deux paons - et, c’était un peu plus étonnant, il y avait également dans ces regards comme des demandes de pardon, comme si l’assemblée s’excusait d’avoir douté d’eux, de ne les avoir vus que comme deux larrons.
- Comment vous est venue l’idée ? se demanda Leanne à haute voix.
- Un beau matin de septembre, commença alors Olivier d’un air lyrique, alors que le sommeil s’était refusé à nous toute la douce nuit - je crois qu’il était question de Quidditch nocturne et de friandises à récupérer chez Weasley & Weasley - encore pris de fatigue, nous nous sommes mis à imaginer un moyen rapide et sûr de nous rendre dans notre salle de cours, ou dans la grande salle. Nous est alors apparue l’idée, au fil de la discussion qui accompagnait notre préparation pressée pour nous rendre en cours, en retard, des chaussette en guise de gants, d’avoir une cheminée reliant rapidement notre salle commune au Club. Puis, l’idée s’est améliorée, et nous avons rêvé, travaillé et créé la Créminée.
- Cheminée du Club. Comprenez : un matin, en retard, on s’est dit qu’une cheminée pouvant nous mener directement en cours ne serait pas du luxe. Enfin, si, justement, mais qu’on pouvait bien prétendre l’obtenir, ce luxe.
Alexandre reprit la parole, de son air de Maître Créateur.
- Si j’ai bien tout suivi, vous gardez pour vous l’annulation de la poudre noire, qu’en est-il de la formule de création des autres poudres ? Et de l’utilisation de cette cheminée ?
Les deux se regardèrent, et hochèrent la tête d’un même geste entendu, comme si la question avait déjà été réglée entre eux auparavent.
- Libre accès. Les recettes, les poudres, la cheminée. Il faudra seulement s’assurer de toujours avoir assez de poudre, mais il y en a déjà une grosse réserve, et je doute qu’on l’utilise vraiment régulièrement.
- Attendez, il y a un sujet qu’on n’a pas évoqué, coupa Ambre. Cette cheminée est illégale. Non pas que cela me dérange, mais il faudra établir des règles entre nous. Je veux dire, nous n’allons pas commencer à nous balader librement, partout, en toute illégalité… Si ?
- Pourquoi pas ? demanda Olivier.
- C’est ma conscience moralisatrice qui parle. Je pense qu’il faudra en user modérément, pas sur des coups de tête. Sauf pour l’essayer une fois, évidemment, mais après…
- Je comprends ce que tu veux dire, dit Alexandre. Tu pense à une responsabilisation, en somme, et oui, c’est une bonne idée. Voilà ce que je propose : pour les discussions, faites librement comme bon vous semble. Pour bouger dans Poudlard, j’hésite, je pense que nous devrions simplement faire attention à ne pas se faire attraper, mais je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions l’utiliser. Privilège du Club. En revanche, pour sortir de l’école, il faudra l’accord du Maître Créateur et aucun contre-argument des Grands Créateurs. Qu’en pensez-vous ?
Tous se regardèrent.
- Tu nous demandes notre avis sur les règles, ou sur le fait d’avoir des règles pour la Créminée ? demanda Vanille. Cheminée du Club, ajouta-t-elle prestement devant le regard sombre et désespéré d’Octave.
- Aucun des deux, je voulais savoir si l’un d’entre vous protesterait. Je me doute vous auriez tous préféré pouvoir vous amuser librement avec cette Cheminée - au demeurant exceptionnelle - au mépris des règles de sécurité et de légalité. Pour une fois, je vais agir en Maître Créateur tyrannique et vous les imposer, car j’estime que c’est là qu’est ma responsabilité.
- Tout en sachant que nous sommes, dans l’absolu, libres de faire ce que nous voulons, comprit Olivier par le ton de la voix d’Alexandre.
Ce dernier acquiesça sans rien dire, pour ne pas en rajouter - ils avaient tous compris le principe : un nouveau règlement avait été établi au sein du Club, personne n’irait vérifier s’il était respecté, mais on se faisait confiance. Tout simplement.
End Notes:
Merci d'avoir lu ! J'espère que cette histoire vous plaît toujours. N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez en review !
A la prochaine !
Author's Notes:
Eeeeet bienvenue ! Ca faisait longtemps ! Bienvenue à notre - je compte - trente-cinquième réunion au Club des Créateurs ! Comme prévu, comme prévenu, j'ai de moins en moins de temps pour écrire.
Mais j'ai promis de finir, à moi-même, à vous (vous êtes un peu moins d'une cinquantaine de réguliers, ça me fait super plaisir !), et à ma lâcheuse de bêta qui a décidé de s'exiler pour ses études (je t'aime très fort Lena. Même si tu ne liras probablement pas ce message avant un bout de temps.)
Aujourd'hui ! Aujourd'hui on poursuit un peu nos études de la Magie. Et on fait dans l'illégal. Histoire de pimenter un peu.
Chers membres du Club des Créateurs, je vous souhaite une agréable lecture.
- Ce n’est pas la Créminée ! s’exclama Octave. C’est la Cheminée du Club des Créateurs !
Octave, d’habitude si calme, perdant son self-contrôle ? C’était un spectacle plutôt rare.
Le débat reprenait vie chaque fois qu’on évoquait la création, c’en était devenu une blague courante. On en était venu à changer de sujet de conversation pour dévier vers la Créminée à chaque fois qu’Octave était dans les parages. Mais s’il réagissait toujours spontanément, il commençait peu à peu à s’habituer et à ne répondre que pour poursuivre la blague. Olivier était très fier de lui.
La Créminée avait été testée tous les jours de la première semaine. Son apparence grossière devint un charme, ses grosses briques informes et mal arrangées, Ambre y ajouta même un vase empli de fleurs qui changeaient d’apparence en fonction du nombre de personnes présentes dans la pièce : plus il y avait de membres, de vie, plus les fleurs s’aggrandissaient, se multipliaient. C’était une belle magie, inutile, certes, mais qui contrastait merveilleusement avec la Créminée, incroyablement pratique mais laide comme pas permis.
Mais après quelques essais au demeurant simplistes - aller dans les dortoirs, dans la cuisine, dans les salles de cours (un effet particulièrement pratique avait été ajouté par les deux Créateurs : pouvoir voir de l’intérieur de la Créminée la pièce où l’on souhaitait se rendre, avant de s’en extraire, et ainsi vérifier la disponibilité et la discrétion de l’arrivée, pour ne pas tomber sur un professeur ou tout autre adulte indésirable) - on se rendit compte d’une possibilité jusque là négligée : celle de visiter l’entièreté du château, et ses pièces inconnues.
Une nuit entière, Olivier, Octave (qui avaient eux-même déjà pu observer une quantité impressionnante de cheminée, dans et hors Poudlard), Leanne, Ambre, Vanille et Annabelle (oui, ils se serrèrent) cherchèrent une à une les salles secrètes, les coins oubliés. Ils tombèrent sur d’anciens appartements privés poussiéreux que les toiles d’araignées avaient investis, des bureaux et salles de cours inutilisés et même, plus étonnant, ce qui ressemblait à une ancienne volière glacée d’un courant d’air sortant probablement tout droit d’un blizzard éternel, un immense couloir à placards à balais éfillochés non loin du stade, et une réserve à potion privée, qu’ils fuyèrent bien vite en se rendant compte qu’un chaudron y bouillonnait, débordait gentiment, profitant de l’absence momentanée du préparateur.
Ils s’amusèrent grandement de cette nuit, profitant non seulement de la création mais également de la proximité que cela procurait. Octave et Olivier étaient les incontestables maîtres de la nuit, guidant les autres, testant les limites de la Créminée et de leur audace - audace parfois confondue en témérité imprudente.
Malheureusement, il fallu revenir à la dure réalité : ils étaient élèves et avaient bien trop de devoir pour pouvoir s’enjailler de la sorte toutes les nuits durant. Devoir à rendre malgré les sorties, cours à suivre malgré la fatigue, et, pour ne pas perdre en plaisir, recherches à poursuivre au Club des Créateurs.
Vanille retrouva Nathan, prêt à reprendre du service, mais tout aussi perdu qu’elle sur la suite des événements. Ils n’avaient aucune idée, pour l’instant, de comment poursuivre leur recherche sur la libération des Elfes, et après quelques soirées infructueuses, décidèrent de repartir de la base des recherches de Vanille : le maintenant assumé et assuré “Nature de Origines de la Magie”. Mais à leur grande déception, ils bloquèrent encore quelques temps sur la suite. Principalement, ils parlèrent des recherches qu’ils avaiet déjà faites, pour s’en inspirer.
- C’était un très bon point de départ que de chercher du côté des créatures magiques, même si nous n’avons au final que peu d’informations. On sait que la Magie brûle en chacun de nous, et en ressort comme un feu. Il est possible de l’enfermer, de la contrôler chez l’autre. Elle est donc manipulable dans son essence, puisqu’on peut l’enfermer chez l’être qui la possède. Est-ce que tu crois qu’il est possible de contrôler la sienne ? De s’affranchir des limites… de son propre corps ? De prendre conscience de cette Magie qui nous compose, et d’en faire littéralement ce qu’on veut ?
Nathan ne répondit rien, puisqu’il s’agissait plus de réflexions que de réels questionnements. Puis il ajouta :
- Et dans un autre ordre d’idée… Est-ce qu’il serait possible de la séparer de son hôte ? De priver un être de magie, ou au contraire, d’en pourvoir un autre ?
- Et d’accumuler en soi plusieurs magies ? Cela serait terrible, j’espère qu’aucune personne mal intentionnée n’aura l’idée de s’attaquer à ce sujet. Mais nous sommes certainement limités par nos capacités, par notre corps. Il faudrait certainement être sacrément puissant pour prétendre à ce niveau de contrôle. Aussi, nous ne savons toujours pas d’où vient cette magie, si elle est indépendante de nous ou si nous la créons.
- La magie des sorciers est la même pour tous, elle est juste plus intense chez certains, ce qui montre bien qu’elle nous est propre. Au moins, en grande partie. En revanche, on a bien vu à quel point elle était différente chez les autres créatures magiques, je ne pense pas qu’il soit possible de manipuler cette aura verte des Elfes, ou la sombre des Centaures.
- J’en ai marre ! Tellement marre !
Vanille et Nathan se retournèrent d’un coup vers la porte d’entrée d’où venait de surgir Leanne. Elle s’arrêta un instant sur le vase posé sur la Créminée pour n’y voir que quelques fleurs et s’assurer qu’elle n’avait pas dérangé trop de monde en débarquant aussi bruyamment, puis se dirigea d’un grand pas rageur vers la table où s’étaient installés Vanille et Nathan.
- Salut Van. Tu travailles seule ? Oh, dit-elle après une demi-seconde de réflexion, excuse-moi Nathan, je ne t’avais pas vu.
Elle s’affala sur une chaise, et se débarassa de son sac de cours d’un large mouvement désabusé. S’attendant certainement à ce qu’ils lui demandent de quoi elle parlait, elle leur offrit un regard couroucé.
- Je vous dérange ? Pardon. J’ai besoin d’exploser un coup.
- A propos de quoi ? demanda finalement Vanille, consciente que Leanne n’attendait que son feu vert pour déverser tout ce qu’elle avait sur le coeur.
- De ce cours idiot. L’Histoire de la Magie ! s’écria-t-elle devant les visages interrogatifs de ses interlocuteurs. Comment ai-je pu être assez stupide pour poursuivre après mes BUSEs ? J’en ai marre d’apprendre des dates horribles sur les guerres sanglantes des sorciers, de retenir le nom des rois gobelins morts, des territoires centaures revendiqués, des tribues géantes décimées. Apprendre que les sorciers sont les grands vainqueurs par leur nombre de victoires injustes et dégradantes. C’est très agréable, dit-donc, d’apprendre que ton peuple est arrogant et violent.
Elle marqua une pause, puis prononça la phrase qui fit tilter le cerveau fort peu compatissant de Vanille, qui de son côté avait remercié Merlin d’avoir pu se débarasser de cette matière dès sa troisième année.
- Cette matière, ce n’est pas l’Histoire de la Magie. C’est l’Histoire des Sorciers. L’Histoire méprisable et guerrière des Sorciers.
- C’est ça !
Leanne jeta un oeil douteux à son amie, qui exprimait certainement beaucoup plus d’empathie à sa cause qu’elle ne le pensait réellement, avant de se rendre compte qu’elle ne parlait pas du tout de ses déboires scolaires.
Pour couronner son désarroi, Nathan dit à mi-voix :
- Ca fait deux fois que tu te fais cette réflexion.
- Je sais, dit Vanille. Deux fois que la solution la plus simple et la plus logique me vient alors que je me triture les méninges depuis des heures, des jours.
Elle ne s’étonna évidemment pas que Nathan ait parfaitement compris ce qu’elle avait en tête, et puis après tout, c’était plus simple ainsi, de ne pas avoir à expliquer le déroulement de ses pensées. Elle appréciait assez Nathan pour que cette idée ne la dérange plus, cette idée qu’il puisse aussi facilement lire en elle, bien plus que de raison.
Leanne, en revanche, ne comprenait rien, en témoignait son visage figé.
- Merci Léa. Et désolée pour ton cours. Il faut que j’aille continuer mes recherches, fit-elle en se dirigeant d’un pas vif vers la bibliothèque du Club.
- Parfois, je te déteste, tu sais, lui répondit son amie en se levant pour partir.
- Tu ments ! s’écria Vanille depuis les étagères de livres. Promis je t’expliquerai !
Et elle se mit à trier un à un les livres pour trouver ce qu’elle cherchait, bientôt rejointe par Nathan. Il n’y eut besoin de se concerter, ils savaient ce qu’il fallait maintenant chercher : les plus anciens témoignages de manifestation magique chez les Sorciers.
Ils sortirent de nombreux livres pour pouvoir les étudier sur leur table : L’Histoire de Poudlard, de nombreux livres de cours d’Histoire de la Magie - ou plutôt de l’Histoire méprisable et guerrière des Sorciers, des recueils de grandes figures historiques sorcières, des listes datées des inventions magiques - en somme, tout ce qui pouvait avoir une date.
L’idée était la suivante : essayer de comprendre comment l’utilisation de la magie avait évolué au fil des âges, au fil du temps. Si cette modification avait été régulière, s’il y avait eu des événements importants modifiant plus ou moins profondément l’utilisation de cette magie. Et, en fil rouge, essayer de trouver l’origine des sortilèges, l’origine des sorciers, en somme l’Origine de la Magie. Et, en parallèle, malgré le peu d’informations qu’ils pouvaient trouver, essayer de trouver l’origine des créatures magiques.
Quelques questions subsidiaires vinrent s’ajouter à la liste : comment cela se faisait-il que des sorciers naissent de parents dépourus de magie ? Que des enfants non magiques pouvaient naitre de familles sorcières ?
Il y eut beaucoup à lire, et de nombreux allers-retours à la bibliothèque de Poudlard. La Créminée apporta même son aide, lorsqu’il leur fallu pousser les recherches encore plus loin, poussés par cette soif de savoir et se décidant à ignorer les règles, ils se rendirent lors des repas ou des cours à la réserve, et même dans les appartements privés de certains professeurs dont la cheminée faisait face à leur bibliothèque personnelle - ils ne volèrent rien, mais dupliquèrent. A aucun moment le remord d’enfreindre ainsi les règles, et surtout de violer la vie privée d’autrui ne les freinèrent. Si Nathan parfois hésitait, il se laissait convaincre par l’enthousiasme, l’engouement de Vanille, qui l’assurait prendre l’entière responsabilité de leur potentielle punition s’ils se faisaient attraper.
Et un jour, ils se décidèrent à franchir une nouvelle étape dans l’illégalité, l’insolence pure et l’inconsidération des effets personnels d’autrui, et se rendirent dans le pire endroit , le plus dangereux en terme de punition, mais aussi le plus excitant : le bureau de la directrice Roy.
Ils se préparèrent longuement à cette escapade, restèrent plusieurs fois figés dans la Créminée à observer le bureau, à analyser les recoins où se cacher et estimer la meilleure tactique pour repérer, dupliquer et récupérer les livres qui leur seraient utiles. Il y avait plusieurs problèmes à résoudre. Les tableaux, par exemple. Nathan l’assura qu’il savait se faire ignorer aussi bien des tableaux que des sorciers, et ils s’entraînèrent plusieurs fois à passer dans les couloirs, désillusionnés, les mains étroitement serrées pour que la magie de Nathan puisse parfaitement inprégner Vanille. D’ailleurs, cette technique les privait d’une main - elle s’entraîna à agir uniquement à l’aide de sa baguette - mais elle leur permettait de communique dans un parfait silence.
Mais il n’y avait aucun moyen de s’assurer que la pièce ne possède pas quelque sortilège anti-infraction. Ils hésitèrent un moment à provoquer une convocation dans ledit bureau dans le but de pouvoir l’étudier, mais leurs habituels calme et respect du règlement auraient rendu soupçonneux une telle provocation, et ils n’étaient même pas certains d’y être vraiment conviés. Ils se décidèrent donc à faire le plus vite possible, et à croiser les doigts - un geste difficile quand on a une main occupée à en prendre une autre, et la seconde tenant baguette et poignée de poudre bleue.
Et puis, surtout, la bibliothèque, pourtant peu fournie du bureau de la directrice, était magnifique, le bois était travaillé, les livres parfaitement rangés : Roy aimait ses livres, c’était évident, et de ce fait il fallait forcément s’attendre à ne pas pouvoir s’en approcher si facilement. Encore une fois, il n’y avait aucun moyen de vérifier. Ils apprirent quelques sortilèges potentiellement efficaces pour annuler des charmes de protection, sans grand espoir : ils jouaient sur leur chance.
Il ne fallait pas non plus que la directrice surgisse alors qu’ils fouillaient allègrement ses appartements.
Au vu de tous ces paramètres aléatoires, de la complexité du plan et du risque plus qu’évident d’un pur et simple renvoi de l’école, deux sentiments se partageaient leurs esprits : la peur et l’excitation. Et ces sentiments apparurent en même temps chez eux deux : ils hésitèrent à abandonner et sentaient leurs estomacs se contracter de stress et d’adrénaline aux même moments. Des fous rires et des moments d’hésitations ponctuèrent leur préparation, jusqu’au moment où ils se décidèrent qu’ils étaient prêts.
L’opération se déroula en plein milieu de la nuit, et elle était prévue pour durer trois à cinq minutes au grand maximum. En silence, ils se désilusionnèrent, prirent une poignée de poudre bleue chacun, leurs baguettes et joignirent les mains. Vanille alluma le feu, Nathan lança sa poignée et tandis qu’il se concentrait sur sa magie, ils avancèrent dans la cheminée. Dans le bureau de la directrice, le silence régnait en maître, les tableaux dormaient, une pâle lumière lunaire élairait la pièce. C’était parfait. Ils s’avancèrent en silence, Vanille lança un sort simple pour que la bibliothèque garde son apparence malgré ses enchantements et pour essayer d’empêcher une quelconque protection de s’activer. Ensuite, elle repéra les livres et s’enquit de sortir, dupliquer, ranger l’original, rétrécir le nouveau, le fourrer dans sa poche aggrandie pour l’occasion et de passer au suivant. Elle tenta de sélectionner les livres intéressants, mais ce ne fut pas évident de se décider, il faisait sombre et elle n’avait pas le temps. Elle dupliqua consciencieusement un à un les livres. Une goutte de sueur commençait à perler sur son front, quelques tableaux ronflèrent et la main de Nathan était de plus en plus froide.
“On part”, entendit-elle dans les tréfonds de son esprit.
Elle su qu’il ne voulait poursuivre plus longtemps. Elle accepta et finit le livre qu’elle était en train de récupérer, lança un dernier sort pour rendre à la bibliothèque son aspect concret - qui n’avait pas changé, fort heureusement pour eux - et reculèrent en silence jusqu’à la cheminée où la poudre bleue lancée par Vanille les porta jusqu’au Club. Octave et Olivier avaient fait en sorte que le retour puisse se faire sans feu, sans lumière, sans bruit. Ils avaient tout prévu pour pouvoir eux-même visiter des lieux interdits.
Lorsque Nathan et Vanille se retrouvèrent au Club, dans le noir, seuls, réalisant ce qui venait de se produire, ils explosèrent dans un grand rire. Elle sortit les livres de sa poche et leur rendit leur taille originelle.
- Ils ne resteront pas bien longtemps, j’ai appliqué un charme de duplicat basique - pas le temps de faire mieux, il valait mieux en avoir plus… D’ici deux ou trois jours ils auront disparu. Il faut vraiment qu’on se dépêche de les analyser, et de réécrire les passages importants.
- Nuit blanche ?
- Nuit blanche.
Il y eut deux nuits blanches, de nombreux sommes en cours et des siestes improvisées le midi, et les livres disparurent alors qu’ils venaient de finir d’en extraire des passages importants - sans même les lire, ils s’étaient décidés à utiliser des plumes de copiage automatique lorsque le temps avait commencé à manquer.
Aucune rumeur ne circula à propos d’une quelconque effraction dans le bureau de la directrice Roy, et celle-ci ne sembla ni agacée ni soucieuse lorsqu’ils la virent le lendemain, et les jour suivants.
Leur opération avait parfaitement fonctionné, il ne leur restait qu’à voir si le jeu en vallait la chandelle.
Et c’était le cas. Bien plus qu’ils ne l’avaient espéré.
Il apparu que certains des livres de la directrice Roy évoquaient précisément les sujets de recherche de Vanille. Ils prirent connaissance de légendes anciennes, parfois contradictoires mais toutes profondément intéressantes, concernant des folklores sorciers. Les légendes étaient parsemées de points étranges, de faits non élucidés.
Il y avait une celle évoquant un village secret dans l’est de l’Europe où vivaient ensemble depuis la nuit des temps sorciers et moldus, un village dont on ne partait que rarement, impossible à trouver, et protégé par une forme de magie aussi ancienne que la Magie elle-même. Il n’y avait aucune jalousie, aucun mépris ni de la part des sorciers ni de celle des moldus, et y régnait une entraide et un respect profond de chaque communauté envers l’autre, mélangés jusqu’aux familles, et la violence n’y était pas tolérée.
Une seconde légende évoquait un sorcier si puissant qu’il avait fait face à la Mort elle-même et avait décidé de se refuser à elle, par la simple force de sa volonté magique. On disait de cet homme qu’il vivait seul sur une montagne depuis plusieurs milliers d’années, regrettant amèrement d’avoir ainsi défié la simple règle qu’est celle de la vie, qui n’a plus de valeur lorsqu’on la sait éternelle.
Il y avait plusieurs théories plus que légendes sur les premières créations de sortilège. Les folklores se modifiant avec le temps, il était évidemment impossible de savoir si l’une d’entre elles était plus véridique que les autres, ou si elles partaient toutes de la même base.
D’autres encore évoquaient de grands sorciers, il y avait un livre entier sur Merlin, un autre sur les quatre Fondateurs de Poudlard, et plusieurs sur les créateurs de Beauxbâtons, qui avait été l’école d’étude de Roy, ainsi que sur d’autres grands sorciers.
Et il y avait ce livre, le seul livre abîmé de la collection. Il était parsemé de tâches, de coupures et de pages raccornies et jaunies, certaines parties - et même certains chapitres entiers étaient manquants. Mais le problème principal résidait dans le fait qu’il était écrit dans une langue que ni Vanille ni Nathan ne connaissaient.
Particulièrement intrigués et poussés par une curiosité maladive, malgré le fait d’ignorer la nature même des récits posés sur ces pages, ils commencèrent alors un travail de recherche de traduction terriblement ardu. Aucun des dictionnaires de traduction ne décrivait ce langage, dont l’alphabet n’était ni latin, ni grec, ils étudièrent les alphabets araméens, les écritures arabiques, les lettres cyrilliques… Ils finirent par trouver quelques vagues similitudes avec les runes anciennes, et purent ainsi traduire quelques rares mots de ce texte.
Il évoquait une explosion, et un feu immense brûlant sur l’intégralité de la Terre. Puis trois mots revinrent plusieurs fois au fil du récit : Vie, Lumière et Amour. Il y avait une notion de puissance et de partage, et des premiers êtres usant de la magie.
Vanille en tremblait presque jusqu’à la plume. Si près du but, mais impossible de l’atteindre, impossible à traduire, impossible à comprendre. Elle se plongea intégralement dans ce texte.
Elle réussit à en sortir, après un travail dantesque, d’autres notions : les hommes-dragon, chevaucheurs du ciel, des loups puisant leur force vitale dans les éléments de la nature, et, enfin, des divinités. La notion de divin était contradictoire avec le folklore sorcier, il n’y avait dans leur culture aucun culte, aucune religion. Les fêtes chrétiennes, comme Noël, étaient empruntés aux moldus, leur histoire étant étroitement liée à celle des sorciers. Les horreurs des chasses aux sorciers du moyen-âge avait été une période de clivage et de rejet pur et définitif de toute notion de Dieu dans leur société. Et ce livre, qui évoquait clairement l’histoire des sorciers et de leur magie, parlait de divinités. Il semblait y en avoir plusieurs, des sorciers ou des êtres originaux, faits de magie pure.
Il n’y avait malheureusement aucun moyen - du moins, à la portée de Vanille - de tirer plus d’informations de ce livre. Il en résultat en elle une grande frustration, et pourtant, ses avancées étaient conséquentes. Elle eu l’impression d’avoir enfin réussi à courir et de se retrouver face à un mur infranchissable. Il lui faudrait trouver un autre chemin. Encore.
End Notes:
Merci d'avoir lu !
J'ai décidé de publier à partir d'un certain nombre de chapitres d'avance, sauf si le temps entre deux chapitre dépasse le mois. Faut pas exagérer, j'écris quand même. Mais je tiens à être totalement satisfaite de ce que j'écris, comprenez-vous, quand bien même je n'y arrive pas totalement.
Oh, au passage, le chapitre spécial dont je vous avais parlé avance... d'ici deux ou trois chapitres, promis ;)
Rendez-vous à notre prochaine réunion au Club des Créateurs !
Dean'
La rencontre internationale annuelle du Club des Créateurs by Deanna
Author's Notes:
Bonjour à tous !
J'espère vous trouver tous en bonne forme pour notre 36e réunion. Vous l'attendiez tous, je vous en parle depuis nos premières réunions, enfin, la voici, la rencontre internationale ! Cinq continents, cinq écoles, un seul Club.
Et des changements dans l'air.
Je vous souhaite une agréable lecture !
La rencontre annuelle entre les différents Clubs à travers le monde était indéniablement un des événements les plus attendus, mais surtout le plus compliqué à organiser, principalement pour l’école d’accueil.
Alexandre décréta Leanne parfaitement capable de gérer seule ses recherches après quelques semaines, elle pu ainsi s’émanciper, et commença à réfléchir à ses créations personnelles. Cette décision ne fut évidemment pas prise au hasard, Alexandre avait besoin de toute sa concentration pour la préparation de la rencontre. Lui et Ambre se réunirent de nombreuses fois pour lire et relire ce que les archives du Club expliquaient des venues précédentes, puisqu’il n’y avait aucun Créateur actuel pour avoir été présent la dernière fois que Poudlard accueillait la rencontre. Heureusement pour eux, les anciens avaient à chaque fois relaté les étapes d’organisation, les conseils, les erreurs qu’ils avaient faites, et les propositions d’amélioration pour les suivants.
Grâce aux talents d’Octave et Olivier, ils réussirent à entrer en contact facilement avec les autres Clubs via la Créminée. Au début, ils ne purent que discuter avec les autres, car il était difficile de travailler d’un seul côté. Ce n’était pas tout à fait la même recherche que lorsqu’ils avaient créé leur réseau personnel, il s’agissait de particulièrement longues distances et de cheminées précises, et encore une fois, les deux Créateurs démontrèrent leurs incroyables capacités. Une semaine avant les vacances de Pâques, Alexandre et Ambre réussirent à se déplacer dans les autres écoles, et ainsi, ils résolurent une des principales difficultés. Cette Créminée était un sésame, une puissante et indéniable amélioration pour le Club.
Furent ensuite organisés les logements. Ce problème avait été réglé quelques années auparavent par une membre essentielle au Club, connue et aimée : la Maître Créatrice Hermione Granger, qui avait fait part de ses connaissances concernant la Salle sur Demande. Le Club s’appropriait une semaine par an cette salle, et il y avait dans les archives des détails précis concernant la manipulation de la salle pour pouvoir l’utiliser à son optimum. Ils passèrent une journée entière à se décider de la position des dortoirs, des salles d’eau, des lieux communs… Les placards se remplirent d’uniformes de Poudlard. Enfin, ils y firent mettre une cheminée avec une réserve de poudre verte, afin de facilement pouvoir se rentre au Club.
Ensuite, ils organisèrent les journées, les événements. Une visite du Club, du château, du parc et de Pré-au-Lard, des réunions de présentation des membres, des créations, des propositions d’amélioration, de changements du règlement… Et une organisation des soirées. Vanille insista pour qu’ils préviennent les Elfes plusieurs jours à l’avance de leur venue, afin qu’ils aient le temps de préparer pour eux de quoi festoyer tout au long de la nuit. Des nuits.
Enfin, Alexandre prépara une quantité impressionnante de potion du langage, qu’il répartit dans de nombreuses fioles disposées un peu partout, dans la salle du Club, dans la Salle sur Demande, et dans les poches des uniformes.
Ce fut une préparation fastidieuse, et particulièrement stressante, mais aucune anicroche ne vint se mettre au travers de leur route. Ambre et Alexandre relurent plusieurs fois les conseils des anciens, pour ne rien laisser au hasard. C’était là leur côté maniaque qui se dévoila commun à tous les deux. Après tout, les Clubs comptaient une douzaine de membres par école, soit au total, une soixantaine de membres.
Tout au long de cette course à l’organisation que Vanille et Leanne regardèrent de loin, après s’être vues refusées à aider par une Ambre déchaînée et prise d’un certain engouement (mental, certes, car son attitude restait toujours sobre), Vanille hésitait. Arrivait le moment qu’elle redoutait presque, l’idée, la proposition qu’elle avait dû refuser à contre-coeur mais qu’elle comptait toujours défendre. L’entrée d’Uagadou parmi les écoles du Club. Il y avait toujours en elle cette envie d’aggrandir, de sublimer le Club, et quoi de mieux que l’entrée d’une nouvelle culture, d’une nouvelle façon d’appréhender et d’utiliser la magie ? Elle avait apprécié découvrir celles du Japon et du grand nord, et la magie africaine était particulière, incroyable, et avait un potentiel de création énorme. Alors, sans en parler aux autre, et surtout pas à Alexandre, elle prépara son discours. Il n’y eut qu’Ambre dans la confidence, une confidence à la base relative : Vanille lui demanda un moment dans leur planning où ils seraient réunis dans un moment sérieux (et elle entendait par là un moment où l’alcool n’aurait pas encore été sorti de la journée), afin de pouvoir lancer un sujet de discussion important. Si au début, Ambre n’insista pas sur la nature de cette discussion, les regards curieux qu’elle lui lançait régulièrement les jours précédents l’arrivée des autres écoles finirent par faire craquer Vanille, qui décida de lui avouer de quoi il s’agissait.
Il s’avéra qu’Ambre approuvait sincèrement l’idée, mais ne comprenait pas pourquoi Vanille tenait à la garder secrète jusqu’au moment fatidique. Cette dernière ne put se résoudre à avouer la principale raison, qui concernait Alexandre et son père, et leur relation plus que conflictuelle. Elle fit cependant comprendre à son amie que ce n’était pas par manque de confiance ou par égoïsme, mais que cela ne la concernait pas qu’elle. Ambre le comprit, et lui promit de glisser un moment de latence dans leur programme pour qu’elle puisse lancer le sujet, sans qu’Alexandre ne remarque ce vide dans l’emploi du temps. Après tout, il y avait de nombreux moments qu’ils avaient simplement décrit comme des “moments de détente”, celui-ci serait simplement différent du fait qu’il n’aurait pas lieu en fin de journée.
Et alors, tout fut prêt.
De tous les Novices, il n’y eut que Regina qui resta à Poudlard pendant les vacances, et évidemment, elle pu rester pour l’accueil et la présentation des autres écoles. On la prévint cependant que le Club fermait ses portes aux recherches pendant la semaine, et qu’elle devrait attendre d’être Jeune Créatrice pour pouvoir participer aux événements de la rencontre.
Les seize Créateurs (les plus nombreux de toutes les écoles) de Poudlard prirent soin de placer leurs insignes à l’endroit et leurs cravates droites et bien nouées, ils lissèrent leurs uniformes, nettoyèrent la salle du Club (un nettoyage de printemps dans toute sa splandeur, car le seul et unique de l’année) et rangèrent du mieux qu’ils purent les livres, ingrédients et tables. Les murs de la salle furent repoussés et la table ronde largement agrandie pour pouvoir accueillir tout le monde.
Alva et Alya lancèrent un sortilège complexe de sonorisation : autour de cette table, lorsque quelqu’un parlait, chacun pouvait l’entendre comme s’il était assis juste à côté s’il s’adressait à l’assemblée, mais au contraire, les conversations privées étaient partiellement isolées, afin d’éviter à la fois les brouhaha infernaux ou les isolements complets de ceux qui parlaient juste entre eux. En somme, le sort permettait de contrôler comment portait sa voix. Il existait décidément une multitude de sortilèges différents de sonorisation.
Les horaires étaient très précis quant à l’arrivée des membres, afin de ne pas créer de bouchon dans la Créminée.
Arrivèrent en premier les français, particulèrement enjoués par la cheminée, qui faillirent bloquer l’arrivée des américains à force de l’observer avec excitation, il fallu les recadrer avec le plus de tact possible pour ne pas les vexer, et leur faire comprendre qu’ils auraient toutes les explications quant à cette cheminée en temps voulu, tout en leur offrant des fioles de potion du langage.
Les américains ne furent pas plus disciplinés, mais ne s’attardèrent pas particulièrement sur la cheminée, mais sur les anglais et les français déjà présents, certains se sautèrent au cou et les Jeunes Créateurs furent ravis de la convivialité presque enfantine qui se dégageait dès les premières minutes de la rencontre. Il y eut même un long baiser entre une française et un américain, qui provoqua une salve d’applaudissements de tous les autres, en cercle autour. On failli manquer l’arrivée des élèves de Durmstrang.
Si ces derniers ne provoquèrent pas de blocage de cheminée ni de sautages au cou, leurs accolades et poignées de main furent intensément chaleureuses et leur ravissement de ces retrouvailles et rencontres sincères. Vanille retrouva avec ravissement Helga et Piotr, toujours désolés de son départ précipité de chez eux. Elle tenta de leur expliquer les raisons, de leur dire qu’elle n’avait pas ét prévenue de leur aura intense, mais ils furent interrompus par l’arrivée de la dernière école, les japonais de Mahoutokoro.
Ils arrivèrent avec organisation, contrairement aux autres qui avait pris la cheminée par paquet de quatre à six, presque sans se donner le temps de sortir : deux par deux, ils s’écartèrent directement de la sortie de la cheminée et se rangèrent devant les autres et se saluèrent avec respect. Et lorsque les derniers sortirent de la cheminée, ce fut un capharnaüm intenable.
Ambre et Alexandre avaient prévu le coup, et s’étaient laissés toute la matinée avant d’organiser une quelconque réunion. Chacun se présenta presque individuellement aux autres, tentant avec difficulté de retenir les prénoms. Vanille se rendit compte à quel point la potion de langage avait dû être un changement drastique quant à la convivialité et la facilité de communication entre eux. Elle tourna entre tous les membres qu’elle ne connaissait pas, fit la connaissance d’une fille de Mahutokoro qui s’avéra être la petite soeur de Mai, qu’elle avait rencontrée l’été précédent.
On fit visiter spontanément dans un bazard inorganisable la salle du Club dans son entièreté, on se marcha sur les pieds, on s’extasia devant les quelques sortilèges dispersés ça et là dans la pièce puis, peu à peu, on commença à s’installer autour de la grande table sans que quiconque n’ait eu à le demander. Ambre et Alexandre auraient aimé que chacun s’asseye entourés de ceux de son école, mais les affinités qui se créèrent au bout de ces trois petites heures d’accueil désorganisèrent ce point-là. Tant pis, haussa Ambre des épaules, ce n’était pas si important.
Chacun fut assis sur sa chaise, devant une fiole bleue, au cas où, et commença la discussion la plus compliquée à gérer que Vanille n’ait eu l’occasion de voir, du fait, compréhensif, qu’ils étaient soixante-quatre. Le sortilège d’Alya et Alva fut merveilleusement efficace et pratique, et le charisme et l’autorité naturelle d’Alexandre lui permirent de gérer cette première réusion de la meilleure manière possible. S’il y eut, lors de son discours, des éclats de voix, des blagues et autres salves d’applaudissement, il ne s’en formalisa pas - pourquoi l’aurait-il fait ? - et Vanille vit dans ses yeux, dans sa voix et sa posture qu’il appréciait particulièrement le statut de Maître Créateur et, pourrait-on dire, de Maître des lieux et de cérémonie. Soutenu par Ambre qui de temps en temps apportait quelques précisions spontanées, il organisa une présentation de chacun des membres et de chacune des écoles. Poudlard, Beauxbâtons, l’Institut des Sorcières de Salem (qui, contrairement à ce que son nom indiquait, n’était pas réservé aux sorcières, mais était un hommage aux terribles événements de Salem - les membres américains du Club étaient particulièrement fiers et émus par leur passé), Durmstrang et Mahoutokoro. Ensuite, il leur expliqua brièvement ce qu’ils avaient prévu - il leur expliqua les visites, les sujets des réunions, mais n’entra pas dans les détails, après tout, ils verraient bien. Puis, ils se rendirent dans la Salle sur Demande.
Ambre entra en premier dans la cheminée, et Alexandre en dernier. Vanille suivit le mouvement comme si elle découvrait avec tous les autres le Club de Poudlard, prise dans l’ambiance, même si elle et les autres de Poudlard avaient déjà eu droit à une visite de la Salle. Celle-ci avait été pensée pour faciliter au maximum l’installation et l’appropriation des lieux par chacun des invités : les couloirs dans l’entrée menant aux dortoirs étaient surmontés d’écriteaux en bois, il y avait plusieurs zones de confort emplis de canapés, poufs, hamacs et autres oreillers, décorés de bougies multicolores, placés judicieusement dans les murs agrémentés de trous stylisés afin que leur lumière puisse être utilisée à son optimal sans aveugler. Au fond, de longues tables en bois garnies de couverts, boissons et nourriture les attendaient.
Vanille était à l’origine de cette idée : en très bon termes avec les Elfes, elle avait réorganisé les repas qui jusque là consistaient à aller chercher par groupe la nourriture dans les cuisine et de revenir. Elle avait négocié avec eux - si on pouvait appeler cela négocier, à son grand désarroi, ils avaient accepté avec un immense plaisir - le fait d’être servis directement dans la Salle sur demande au lieu de la Grande Salle. Alors, aux heures de repas, les plats arriveraient avec la même organisation que dans la Grande Salle. Vanille se doutait du surplus de travail, même si les Elfes lui avaient assuré que, pendant les vacances, ils étaient justement moins occupés, et s’était promis de trouver un moyen de se racheter. Même si elle n’avait aucune idée de ce qui pourrait alléger leur charge, ou les aider dans leurs tâches. Oh, si. Les libérer.
Les Créateurs passèrent presque toute la journée dans cette salle à se découvrir, à discuter, à sympathiser. Ils se décidèrent de visiter le château le lendemain - alors que c’était prévu pour l’après-midi, mais ils se doutaient qu’il y aurait des contre-temps, on n’organise pas avec fiabilité une semaine avec soixante-quatre personnes - puis le soir retournèrent dans la salle du Club pour parler de sujet relatifs à ce dernier.
La réunion dura toute la nuit, et Alexandre, encore une fois, la géra d’une main de maître.
Ils évoquèrent toutes les créations qu’ils partageaient entre eux.
Octave et Olivier proposèrent leurs services pour mettre en place leur projet “Pentagone de Proximité” (nom qu’Octave avait réussi à imposer, face à un Olivier toujours prompt à trouver des noms ridicules), et les Créateurs acceptèrent avec un enthousiasme tout particulier. Ils laissèrent les deux Créateurs le soin de prendre contact avec eux pour mettre en place le projet. C’était une avancée pour le Club au moins aussi importante que la potion du langage. Une autre idée fut évoquée, concernant des tableaux pour dialoguer entre eux, lancée par un Français peintre. Des tableaux représentant les cinq Créateurs du Club.
D’autres Créations furent évoquées, partagées, encouragées.
Malgré l’heure tardive, à trois heures du matin, personne n’était fatigué. Et dans un court silence, Ambre prit la décision de lancer le sujet de Vanille, qui n’était pas prête.
- Avant que nous ne partions, il y a un dernier sujet important à évoquer. Je pense que nous devrions en parler dès maintenant, afin de profiter de la semaine de réflexion pour prendre une décision.
Elle regarda Vanille l’air entendu, qui elle lui lançait un regard courroucé. Elle qui pensait avoir le temps de préparer un discours, de se préparer mentalement à la colère d’Alexandre, elle se mit à en vouloir à Ambre de cette trahison - qui n’en était pas une, Ambre ignorait la raison pour laquelle le sujet était difficile à aborder. Alors que l’ensemble des Créateurs la fixaient, tantôt patient, tantôt curieux, elle sentit son sang quitter son visage. Elle se racla difficilement la gorge, ses yeux cherchèrent où trouver du réconfort mais lorsqu’elle croisa le regard d’Alexandre, surpris de ne pas savoir de quoi il en retournait, son estomac se tordit. Sa colère dans le train lui revint en tête.
Alors que de longues secondes passaient, elle finit par sentir près d’elle une vague de chaleur. Le temps d’un battement de coeur, elle se sentit mieux. Nathan était assis à sa droite, et il venait non seulement de se faire remarquer, mais aussi de la soutenir mentalement. Ses poumons se remplirent lentement alors qu’elle se rendait compte qu’elle avait cessé de respirer, elle reprit ses esprit, et une pensée vint s’imposer à elle : “Je fais ça pour le Club.”
Alors, elle accrocha un sourire peu convainquant sur ses lèvres et, d’une voix plus assurée qu’elle n’osait l’espérer, annonça le sujet.
- J’ai découvert il y a peu à quel point notre Club était important, non seulement important pour ses membres, mais important en taille. Le réseau est immense, et on ne nous a pas menti lorsqu’il nous a été présenté. J’aime profondément ce Club et souhaite qu’il perdure et s’améliore. Et pour cela, je pense que des changements, des évolutions à la hauteur de son importance pourraient être, à défaut de nécessaires, particulièrement bénéfiques.
Elle marqua une pause, satisfsaite de son introduction. Certains Créateurs hochèrent la tête, en disant ainsi long sur leur ouverture au changement.
- Ce que j’ai à vous proposer pourra vous paraître insensé, bien trop gros pour être envisageable. Je vous demande simplement d’y penser, de ne pas rejeter immédiatement l’idée, et de peser le pour et le contre de manière non pas objective mais raisonnée. J’aimerais que nous envisagions d’intégrer une autre école dans le Club.
Il y eut un changement drastique dans l’air. La plupart des Créateurs exclamèrent leur surprise, certains hochèrent la tête comme s’ils étaient déjà en pleine réflexion, d’autres croisèrent les bras, les sourcils froncés, attendant la suite.
Alexandre, lui, s’était crispé. Il n’avait pas bougé d’un millimètre, mais Vanille sentit sur son visage qu’il savait exactement de quelle école elle parlait. Il ne lui adressa pas un regard, et Vanille eut la soudaine impression de le trahir. Elle reprit ses esprits : le Club, ce n’était pas elle, ce n’était pas lui, c’était l’ensemble de ses membres. Il l’avait dit lui-même.
- J’ai rencontré cet été le directeur adjoint de l’école d’Uagadou, située près de la côte est de l’Afrique, pour des recherches liées au Club. Cet homme, Tim Kahindi (elle sentit presque la respiration d’Alexandre s’arrêter), connait le Club de réputation, car il connait certains anciens membres. Il m’a demandé de bien vouloir considérer l’idée d’intégrer une autre école, ce à quoi j’ai répondu que je ne pouvais parler au nom du Club. Je pense qu’il n’y a pas de meilleur moment que maintenant, lors de notre rencontre annuelle, pour lancer le sujet. C’est une réflexion et une décision qu’aucun d’entre nous ne peut prendre seul.
Elle laissa encore une pause, le temps que les rumeurs s’apaisent autour de la table. Le ton commençait à monter, mais face à son silence, les Créateurs la laissèrent finir avant de reprendre le débat.
- Je ne suis que porteuse du message. Je ne connais pas assez l’organisation et les ficelles du Club pour débattre de la manière, de comment une nouvelle école pourrait être intégrée, et je ne souhaite pas porter le projet - si projet il y a. Néanmoins, je tiens à préciser que depuis plusieurs mois que l’idée m’a été évoquée, je la trouve de plus en plus intéressante. Les différences culturelles qui existent entre nous sont une force, nos créations sont différentes du fait de notre manière d’appréhender la magie. Les sorciers d’Afrique l’appréhendent aussi différemment, leur magie est puissante et émotive, nous aurions autant à apprendre d’eux qu’eux de nous. En revanche, je comprendrais tout à fait que l’idée vous rebute de prime abord. Ce Club a été créé par cinq sorciers, et cinq écoles en découlent. Mais d’expérience historique, le rejet de l’autre n’a jamais fait avancer le monde, et l’union apporte du bon dans un tout. Dans le tout qu’est le monde sorcier. Nous, au Club des Créateurs, avons des branches dans trois continents, un réseau formidable, qui je le sais ne cessera de me surprendre, nous sommes...
Elle déglutit et lâcha la phrase qu’elle détestait tant.
- Nous sommes l’élite des sorciers. Un réseau interne, dense et fort dans le monde magique. Etendons-le. Développons-le. Améliorons-le.
Prise de court par son propre enthousiasme, Vanille s’étonna du silence attentif qui régnait autour d’elle. Elle ne vit plus de réflexion, plus de rejet ou de débat, elle ne vit que des visages tournés vers elle, surpris, épatés, souriants. Elle s’adossa sur son siège pour faire comprendre qu’elle avait fini sa tirade, mais aucune rumeur ne démarra. Alors, Ambre prit la relève :
- Je propose que nous discutions de tout cela pendant la semaine, entre nous, que nous laissions nos idées et nos avis se mélanger et se confronter en dehors des réunions. Il s’agit, je pense, du sujet le plus important dont nous aurons à débattre cette année. Nous en rediscuterons proprement, à froid, le dernier jour.
Certains approuvèrent, mais la plupart étaient déjà partis dans d’intenses introspections. Alors, on se donna rendez-vous le lendemain dans l’après-midi dans la salle du Club pour une visite de Poudlard. Evidemment, chacun était libre de se rendre dans la salle du Club quand bon leur semblerait, et les élèves de Poudlard comptaient revenir dans la Salle sur Demande dès le réveil.
Vanille ne réussit pas à parler à Alexandre, à cause de sa peur, à elle, et sa fuite, à lui. Elle le perdit du regard lorsque tous se levèrent, et, dans la confusion que fut le départ aux dortoirs, ne le vit pas s’en aller. Cela lui trotta en tête tout le reste de la nuit, inquiète de ce qu’allaient être leurs relations à partir de ce moment, et ne trouva le sommeil que lorsque les premiers rayons du soleil vinrent frapper le murs de son dortoir.
Faire visiter Poudlard ne fut pas une mince affaire. Il ne fallait pas trop attirer l’attention, car malgré les robes de l’école, promener cinquante-huit personnes discrètement dans le château était une tâche immense. Ils s’organisèrent par petits groupes, et fort heureusement ne croisèrent personne de trop curieux. Les Créateurs en visite furent émerveillés par le plafond de la Grande Salle, l’immensité du parc et de la forêt, les dortoirs des différentes maisons et l’organisation des cuisines. Alors que certains groupes étaient en visite et que les autres discutaient dans la Salle sur Demande, Vanille se rendit dans la salle du Club dans l’espoir d’y trouver Alexandre.
Elle le trouva en grande discussion avec Ambre sur une pile de parchemins. Lorsqu’elle fit remarquer sa présence par un discret raclement de gorge, tous deux stoppèrent net leur conversation pour lever la tête vers elle. Il y eut un silence gêné, puis Ambre se leva et quitta la salle, sans oser regarder Vanille dans les yeux, en refermant doucement la porte derrière elle. Vanille resta plantée un moment sur place, et observa Alexandre. Lui gardait son regard sur le sol près d’elle, le visage fermé, les sourcils froncés. Elle ne savait pas comment aborder le sujet. Elle n’avait pas d’excuse, et savait qu’elle avait fait le bon choix. C’était à lui de lui pardonner.
Alors elle vint s’asseoir près de lui et attendit qu’il lâche enfin ce qu’il avait sur le coeur. Au bout de longues minutes, il finit par lui parler.
- Je t’en veux, tu sais. Tu aurais dû me parler de ça avant de lancer le sujet devant tout le monde.
Les joues de Vanille s’empourprèrent, non pas de gêne mais d’une légère indignation.
- J’ai essayé. Tu as mal réagit. Alors j’ai pris cette décision seule, tu avais été clair avec moi. Tu ne voulais pas aborder le sujet.
- J’ignorais ce que tu avais en tête ! Et quelle idée ! Intégrer une nouvelle école ? Tu n’as pas conscience de l’ampleur, de la complexité de cette idée ?
- S’il ne s’agit que de ça, alors…
- Le Club des Créateurs a été créé par cinq élèves de cinq écoles, il en a toujours été ainsi, ça marche très bien comme ça. Non seulement ton idée ne fonctionnera pas, mais elle pourrait faire s’écrouler tout notre système.
- Tu dis ça uniquement parce que…
- Oui ! Je dis ça uniquement parce qu’il s’agit de l’école de mon père ! s’écria-t-il.
Vanille n’osa pas bouger. Elle redoutait sa colère.
- Tu savais parfaitement que je serais contre, tu savais parfaitement que ça me mettrait en colère, mais tu l’as quand même fait ! Tu n’as aucune considération pour ce que je peux penser, ce que ça peut me faire de t’entendre parler de cette école, de cet homme ?
Il se leva et s’éloigna pour ensuite revenir à la charge :
- Je déteste cette idée ! cracha-t-il. Je hais cet homme, j’exècre son école, et toi, toi… Toi je t’en veux, tu m’exaspères et tu me fatigues parce que je t’aime et je sais que tu défendras cette idée à tout prix parce que tu y crois. Et je m’en voudrais d’être celui qui t’empêche de faire ce que tu veux. Alors je me retire de cette histoire. Je ne donnerais pas mon avis, et si la décision finale va dans ton sens, je ne participerai en rien à tout ça.
Soulagée de ne pas le voir exploser comme il avait pu le faire dans le train, Vanille le rejoignit sans un mot et passa ses bras autour de lui pour poser sa tête contre son torse. D’abord réticent, il finit par lui rendre son étreinte. Ils restèrent en silence un moment, sans doute tous les deux soulagés d’avoir trouvé si vite un terrain d’entente sur ce champs de mines. Puis elle chuchota un simple :
- Merci.
Elle le sentit retenir un grognement et resserra son étreinte. Derrière elle, la porte se referma sans un bruit et une ombre s’enfuit dans les couloirs.
End Notes:
Merci d'avoir lu jusqu'au bout ! Beaucoup de descriptions, peu d'actions, peu de dialogues, vous avez réussi à tenir sans sauter d'un paragraphe à un autre ? Haha, on fait tous ça pendant les longs passages.
On arrive doucement au fameux chapitre charnière... encore un et on y sera ! Je vous tease pas mal dessus, j'espère qu'il sera à la hauteur.
Rendez-vous à notre prochaine réunion au Club des Créateurs !
Author's Notes:
Bienvenue à notre nouvelle réunion ! Le publication est un peu chaotique non ? Mea culpa. Hm, bref, mes chers Créateurs, comme je le disais, bienvenue à une nouvelle réunion au Club des Créateurs.
Aujourd'hui on finit notre rencontre internationale, et on part sur un nouveau mystère, qui nous occupera pendant tout le reste de l'année.
Je crois que je n'ai rien à ajouter, je vous souhaite une bonne lecture !
Le sujet de l’entrée d’une nouvelle école revint régulièrement dans diverses discussions pendant la semaine. Ambre rapportait régulièrement à Vanille, qui ne pouvait être partout (mais il semblait que les oreille d’Ambre, si), les avis des uns et des autres. Ces avis étaient partagés, mais allaient globalement vers l’approuvation. Une idée naquit dans les échanges, celle de tenter de réorganiser le Club et de prévoir l’entrée d’Uagadou pour savoir si cette intégration était viable, avant de se décider. Ce ne fut donc plus le fait d’accepter une autre école qui fit polémique mais la faisabilité du projet, et c’était pour Vanille une excellente nouvelle, puisque cela signifiait que les quelques détracteurs avaient bien vite changé d’avis face aux arguments et à l’engouement pour.
Les jours filèrent à une vitesse incroyable. Ils échangeaient, partageaient, visitaient, et le soir fêtaient la grandeur de leur Club. Il y eut des soirées arrosées bien plus que de raison, et Vanille, saoule, découvrit avec horreur que la potion de langage ne fonctionnait pas lorsque l’alcool imbibait ses veines. Il s’en suivit des discussions et des quiproquos burlesques entre quelques-uns de ses camarades, mais heureusement, aucune tension n’en naquit.
Et, inévitablement, la dernière soirée arriva. Vanille suivit avec délectation les compliments et remerciements de la part des Créateurs étrangers, pleinement satisfaits de leur séjour. Ils s’échangèrent conseils et avis sur leurs projets en cours, s’offrirent mutuellement des cadeaux spontanés trouvés à Pré-au-Lard, dans le simple but de se montrer leur affection mutuelle.
Autour de la grande table ronde du Club des Créateurs, la conversation joyeuse battait son plein avec toute la compexité toujours inhérante à leur nombre, lorsque la Maître Créatrice de Mahoutokoro se leva, incitant au silence.
Elle aborda le sujet de l’intégration d’Uagadou.
Pendant la semaine, ils s’étaient réunis plusieurs fois, tantôt par groupes spontanés, tantôt par école, et une fois entre Maître Créateurs, Alexandre ayant néanmoins réussi à éviter cette réunion-là, et Ambre y avait participé pour lui. Il s’en était suivi, après cette semaine de débats, la conclusion suivante.
- Les arguments de Vanille quant à l’importance du Club et à sa grandeur, et sa conviction sur le fait qu’il faille l’étendre pour le faire évoluer sont, je pense, quasi unanimement adhérés. Je ne pense pas me tromper lorsque j’affirme que nous sommes presque tous d’accord avec le projet. Mais même si l’idée a finit par tous nous séduire, ce ne sera pas une entreprise évidente à mener à bien. Cela ne pourra se faire en un an. Alors, voici la proposition : nous prendrons le temps qu’il faudra, discuterons, rédigerons et prendrons évidemment contact avec le directeur d’Uagadou, avec qui nous nous rencontrerons autant de fois qu’il sera nécessaire pour que nous soyons sûr d’eux, qu’ils soient sûrs de nous, et que nous préparions une intégration propre et efficace.
Elle sortit un fin livre sur lequel des idées avaient apparemment déjà été posées, sur lequel elle lança un sortilège de multiplication, et un sortilège protéiforme. Elle en distribua un à un membre de chacun des cinq Clubs.
- Avec ce livre, qui s’aggrandira et se complètera au fil des idées et organisations que nous y mettrons, nous saurons à chaque instant où en est le projet.
Vanille vit passer devant elle le fameux livre, sur la couverture duquel était gravé “Projet U”. Le livre s’arrêta dans les mains d’Ambre, qui jeta un regard à Alexandre, hésitant sur le fait de le lui faire parvenir. Ce dernier n’y accorda pas un regard. Personne ne remarqua la manoeuvre, car la Maître Créatrice de Mahoutokoro avait repris la parole :
- Alors avant de lancer officiellement les prémices de cette intégration, il nous faut savoir si l’un d’entre vous s’y oppose radicalement, et ce avec de bons arguments à l’appui.
La tournure de la phrase était telle que si d’aventure un Créateur avait eu de tels arguments, il n’aurait osé les prononcer. La question était déjà réglée, et ce n’était que par pure bienséance que l’on proposait de garder le débat ouvert encore un instant. Vanille se sentit soudain terriblement mal à l’aise face à ce quasi-despotisme, elle avait eu connaissance de quelques contestations, peu nombreuses, certes, mais récurentes, qu’ils ne pouvaient décemment pas ignorer. Mais poutant, ce fut le cas. On n’appelait plus à la discussion, on imposait l’idée, et elle ne sut comment se sentir face à ça.
Oh, si. Gênée, presque en colère contre elle-même. Elle garda le silence jusqu’à la fin, un silence amer, songeur.
“Même tes idées finissent par te déranger toi-même.”
“C’est la manière dont ont été tournées les choses qui me gène. Chaque année, ce sont les Maître Créateurs qui règnent sur le Club. Je me demande seulement si cette mascarade a eu un fond de vérité.”
Et dire qu’elle était persuadée d’en avoir fini avec ses discussions avec elle-même. Elle secoua la tête et reprit conscience du monde alors que tous se levaient pour les adieux.
Vanille donna aux Maîtres Créateurs les coordonnées de Tim Kahindi, et leur promit de lui envoyer une lettre avant la fin de l’année pour qu’ils puissent dès le début de l’année prochaine entamer quelques démarches. Elle espérait qu’ils laisseraient Alexandre en paix sur le sujet, mais n’osa pas le leur recommander.
Tout en promettant de se passer des coups de cheminée réguliers, les Créateurs s’embrassèrent avec tristesse et nostalgie avant de se séparer école après école. Lorsqu’il ne resta que les élèves de Poudlard, le silence s’invita dans la pièce. Il s’étira, s’éternisa, et pendant de longues minutes, personne ne le brisa, ni par un mouvement, ni par une parole. En demi-cercle autour de la Créminée d’où venaient de partir leurs amis, ils observaient le bouquet de fleur qui l’ornait, et qui reprenait sa forme originelle : il avait tant gonflé ces derniers jours que d’autres vases étaient apparus, et là, doucement, un seul et unique vase violet brilla devant leurs yeux, et quelques boutons de fleur s’ouvrirent avec délicatesse. Ils se sourirent et s’installèrent à la table ronde, devenue bien trop large. S’imposa un grand vide dans cette pièce, complétant le silence. Leurs oreilles profitaient du calme, et de temps à autre, l’un d’entre eux lâchait un soupire de satisfaction.
- C’est étrange, commenta alors Iris à voix basse. L’année dernière, nous n’étions pas si…
- Si proches, compléta Florent. Et les adieux n’étaient pas si nostalgiques. Comme si le fait de pouvoir les revoir dès que nous le voulons grâce à la cheminée rendait leur départ plus…
- Plus incongru, finit Iris. Plus étrange.
Elle se tourna vers Octave et Olivier :
- Merci, fit elle avec sincérité.
Les deux garçons hochèrent la tête. Bien loin était leur rancoeur face à Iris. Sa sentence était toujours active, mais sa douceur était revenue. Peu à peu, les Créateurs quittèrent la salle. Certains traînèrent, Alva et Alya reprirent possession de leur bureau habituel dans un coin sombre de la pièce, Ambre attrapa quelques livres dans la bibliothèque, et Vanille croisa le regard d’Alexandre qui lui demandait de bien vouloir rester un peu plus longtemps avec lui, malgré l’heure tardive. Tous deux, ils annulèrent les sortilèges d’aggrandissement de la table, rapprochèrent les murs, rangèrent quelques affaires. Lorsqu’ils furent seuls, ils prirent chacun une chaise. De toute évidence, il avait des choses à lui dire.
- Je pense que je te dois des explications sur mon passé.
- Tu ne me dois rien si tu ne veux pas…
- Je veux que tu comprennes, pour qu’à l’avenir, tu saches dans quoi tu t’engages lorsque tu évoques… mon père. Que tu comprennes pourquoi tu me fais du mal.
Vanille sentit une vague de tristesse l’envahir, mêlée d’une curiosité inexorable. Elle garda le silence et ne le quitta pas des yeux, alors que lui cherchait ses mots.
- Je vais aller au plus simple. Ma mère n’est pas la femme de mon père. Je pense qu’ils s’aimaient, mais la situation politique de mon père ne lui permettait pas de laisser un scandale d’adultère entâcher ses projets. Alors, sa femme a accepté de ne rien dire et de faire comme si j’étais son fils, et comme elle attendait un enfant, ils nous ont publiquement fait passer pour des jumeaux en me cachant au public pendant plusieurs semaines avant sa naissance. Ma mère est partie vivre ici, au Royaume-Uni, et elle venait régulièrement me voir. Je ne manquais de rien, mon père s’assurait de toujours me donner le maximum, de faire en sorte que ma situation ne m’empêche pas de m’épanouir. Il a eu deux autres enfants. Mais au fond de moi, je me sentais étranger dans cette famille. Mon… frère porte le nom de notre père. Sa mère ne m’a jamais aimé, je n’étais pas et ne serai jamais son fils.
Il hésita un instant, perdu dans ses souvenirs. Une vague d’empathie s’empara de Vanille, qui dut résister à la pulsion de le serrer dans ses bras, mais bien vite, le regard d’Alexandre changea du tout au tout, de nostalgique, il devint soudain froid. Elle connaissait ce regard, même si son visage restait immobile, ses yeux ne mentaient pas.
- Quand j’ai eu l’âge d’entrer à l’école d’Uagadou, mon père et elle se sont battus, elle ne voulait pas de moi dans cette école avec son fils, elle ne voulait plus de moi dans sa famille, tout simplement. Elle a exigé de moi que je m’en aille, a refusé de m’adresser la parole du jour au lendemain. Elle préparait son fils pour qu’il entre à l’école, et lui a mis dans la tête que je n’avais jamais vraiment été son frère. Comme nous n’étions pas fusionnels, malgré cette géméllité imposée, et que c’est un garçon… manipulable, il m’a lui aussi évincé de sa vie. Son frère et sa soeur l’ont imité. Mon père a vaguement tenté de les raisonner, mais c’était trop tard. Elle… elle allait jusqu’à refuser de me servir à manger ou de laver mes vêtements. J’étais jeune, et ils m’ont abandonné, alors j’ai contacté ma mère, ce que mon père refusait de faire, aveugle face à la situation. Elle est venue me chercher, et je suis entré à Poudlard.
Encore une fois, alors qu’il se mura dans le silence, Vanille vit des mots se perdre sur ses lèvres. Des mots de colère, de rancoeur. Des flashs passaient dans ses yeux. Tout le long de son monologue, sa voix était restée sobre, vide, comme s’il avait voulu raconter cette histoire d’un point de vue externe, comme s’il avait voulu parler d’une autre personne que lui. Se replonger dans son passé lui avait coûté, et elle comprenait maintenant pourquoi il lui avait demandé de ne plus évoquer sa famille.
Elle comprenait également les réactions de la femme de son père, sans les cautionner, tout était plus clair. Elle se demanda dans quelle mesure il taisait aujourd’hui sa colère, car au-delà des faits, concrets, finalement simples à relater, il restait ses émotions à lui. Elle le savait impulsif, autonome, ambitieux, et pouvait maintenant poser une origine sur la froideur régulière de ses pupilles noires, sur son caractère dominant, son attitude fier. Un caractère qu’il avait dû se forger pour pallier à l’abandon, à la trahison qu’il avait subie. Alexandre, pour ne plus jamais être trahi, avait décidé de tout contrôler pour ne plus se laisser manipuler par les événéments.
Comment Vanille avait-elle réussi à lire ainsi dans les mots d’Alexandre ? Elle d’habitude si peu apte à comprendre les émois de ceux qui l’entouraient, elle se surprit à ressentir tout ce qu’il tentait de lui cacher.
Elle s’approcha de lui alors qu’il s’était adossé sur sa chaise en attendant une réaction de sa part, et s’assit sur ses genoux. Elle posa sa main sur sa joue, sur son cou, profita de la douceur de sa peau, glissa ses doigts le long de ses tresses. Elle n’eut rien à dire, car elle savait que son propre visage exprimait clairement ce qu’elle ressentait. Elle était émue de ce qu’elle venait d’apprendre, compatissante, et presque soulagée de savoir enfin la vérité. Elle était heureuse qu’il lui fasse assez confiance pour avoir pris sur lui, et lui avoir avoué ses blessures profondes. Elle se sentait à sa place, là, près de lui, alors qu’il l’entourait de ses bras pour poser son front sur sa gorge. Et tandis qu’elle glissait doucement la paume de ses mains dans la chaleur de son dos, il y eut un “je t’aime” de murmuré.
Elle ne sut pas vraiment s’il venait de lui, d’elle, peut-être d’eux deux à la fois. Peu importe.
Quelques heures plus tard, ils se décidèrent enfin à quitter la salle du Club. Vanille rassembla ses affaires, ralentie par la fatigue due à l’heure tardive, et dans la pénombre de la pièce, son regard se posa sur la table qu’Alva et Alya avaient investie plus tôt dans la soirée. Il lui fallu quelques instants, alors qu’elle était en train de remettre une chaussette, pour comprendre que quelque chose attirait un peu trop son regard. Bloquée dans son mouvement, en équilibre sur un pied, elle fixait une note. Ce n’était pas ce que disait le texte qui la retenait, mais son écriture. Une écriture qu’elle ne connaissait que trop bien, pour l’avoir relue maintes et maintes fois, sur ce petit bout de papier qu’elle avait un jour reçu dans son sac.
La lettre de menace, sur le fait de ne pas poursuivre ses recherches sur les origines de la magie, dont les mots étaient gravés dans son esprit pour l’avoir prise au sérieux : “Tu le regretterais. Il y a des secrets qu'il serait trop dangereux que tu découvres. Tu es prévenue.”, ces mots avaient été écrits par nul autre qu’Alva et Alya.
“Je dois trouver une autre voie, je dois trouver un autre chemin, il faut que j’avance dans ces recherches.”
De savoir qu’Alva et Alya avaient tenté de l’arrêter dans ses travaux sur la magie, Vanille n’en avait tiré que de la motivation, malgré son blocage évident. Depuis la fin des vacances, à chaque heure de cours, elle tentait de trouver de nouvelles pistes. Il y avait de toute évidence de grandes choses à découvrir, et elle se sentait, à défaut de prête, profondément curieuse. Et d’une certaine manière un peu concernée, sans pouvoir se l’expliquer.
La situation était de plus en plus complexe, car maintenant qu’elle savait de qui venait la lettre, elle ignorait toujours les raisons de son envoi. S’il ne s’agissait que du fait de travailler sur le sujet de la Magie, peut-être était-ce pour supprimer la concurrence. Concurrence. Ce mot résonna dans sa tête, c’était ridicule, comment pouvait-on être concurrent dans des recherches qui n’apportent ni Gallion ni gloire ? Alors, peut-être les secrets qu’elle était sur le point de découvrir étaient réellement dangereux, mais dans ce cas pourquoi avoir utilisé ce biais pour la stopper ? Pourquoi ne pas lui avoir simplement dit “Ce que tu fais est dangereux, je sais de quoi je parle, c’est pour ton bien”, non, dans la lettre, le ton était clairement menaçant. Ces secrets étaient donc importants, peut-être puissants. Mais encore une fois, un pas, un mur.
Car Alva et Alya avaient disparu.
Du jour au lendemain, leur table de travail avait été vidée, et personne n’avait eu de nouvelles. Au Club, ils en discutèrent quelques temps, mais au vu de leur dortoir parfaitement rangé, leur espace de travail nettoyé, et du silence auquel elles les avaient habitués depuis leur entrée au Club, personne ne s’inquiéta vraiment. De ceux qui les connaissaient un peu, Iris, Florent et Alexandre, ils apprirent qu’elles n’avaient pas montré grand enthousiasme en cours depuis le début de l’année. Alors, ils conclurent tout simplement qu’elles avaient décidé de ne pas passer leurs Aspics et, majeures, étaient tout simplement parties. Déçus de ne pas avoir eut droit à des explications au moins pour le Club, il en ressorti un agacement général face à ce qu’ils ressentaient comme un abandon. Alors, ils décidèrent sans vraiment se le dire de ne pas chercher plus loin, et d’oublier que deux membres étaient parties sans explications. Et l’histoire devint comme un secret de polichinelle, comme une tâche sur une belle nappe qu’on préférait cacher avec une belle vaisselle.
Evidemment, Vanille avait sa propre idée quant à la raison de ce départ précipité. Elle ignorait comment Alva et Alya l’avaient su, mais de toute évidence, le jour de ce départ ne pouvait être une coïncidence, puisqu’elles étaient parties alors que Vanille venait de découvrir leur implication avec sa lettre.
Mais elle n’en parla pas aux autres membres du Club, du moins pas à tous, seulement à ceux en qui elle avait encore cette confiance absolue, Leanne et Ambre. Pataugée dans les secrets, elle ne savait plus vraiment si elle devait se sentir mal de cacher ainsi les actes d’Alva et Alya aux autres membres, mais elle ne revint pas sur cette décision, même lorsque ses amies lui demandèrent de le faire.
Et alors que les semaines passaient, inexorablement, la vie de Vanille devenait de plus en plus fade. Grâce au Club, elle avait réussi à acquérir de grandes facilités à comprendre les cours, et commençait à s’y ennuyer. Chaque nouveau sortilège, métamorphose ou enchantement ne lui prenait que quelques minutes à maîtriser. Elle rédigeait ses devoirs comme une automate, apprenait de nouvelles notions comme on apprend une liste de noms. Rien ne paraissait plus intéressant que ce qu’elle ne pouvait découvrir, car ce que ses professeurs lui enseignait, elle pouvait les retrouver dans ses livres, et son esprit était de plus en plus obnubilé par l’essence même des sorts qu’elle lançait, par les sensations qui passaient dans ses mains à chaque sort qu’elle lançait. Elle se concentrait parfois plus sur ces ressentis que sur l’effet du sortilège lui-même.
Elle tomba petit à petit dans une mélancolie, couplée à un ennui palpable. Ses professeurs, qui voyaient parfaitement ce changement de comportement chez elle, ne semblaient pas s’en inquiéter. Elle avait toujours eu cette capacité à être ailleurs, pendant les cours, et si son visage n’exprimait plus de joie, cela ne devait pas être bien grave. Cela arrivait à tout le monde.
Décidée à ne pas se laisser tomber dans une déprime plus profonde, elle tenta tant bien que mal de poursuivre ses recherches. Nathan lui proposa quelques pistes : après avoir fouillé le passé, pourquoi ne pas changer de point de vue et tenter de voir la magie d’un point de vue Moldu ? L’idée était intéressante à creuser, mais ils n’aboutirent pas bien loin. Il apparu que dans les grandes religions moldues polythéistes anciennes, la mythologie égyptienne, scandinave, grecque, les Dieux apparaissaient souvent aux Homme comme des êtres supérieurs doués de magie, et il était presque certain qu’il s’agissait de sorciers usant de leurs pouvoir pour assoir leur supériorité face aux Moldus. Et s’il s’agissait d’informations particulièrement intéressantes à apprendre (particulièrement l’histoire des demi-dieux grecs, et d’Odin et ses Walkyries), elle n’apparaissaient pas à Vanille comme essentielles pour la suite de ses recherches, car ils ne trouvèrent rien sur leur manière d’utiliser la magie, sur leurs origines. Il ne s’agissait que de sorciers particulièrement puissants.
Ce fut lorsqu’ils refermèrent leurs carnets de recherches que Vanille et Nathan furent surpris par une exclamation provenant de l’autre côté de la salle du Club.
Ils se retournèrent d’un seul mouvement pour voir Alexandre, debout devant son bureau, un parchemin à la main.
- Et merde, merde…
Les yeux fixés sur le mot, il se mit à faire les cent pas, plus nerveux que jamais, en murmurant grossieretés et mots inintelligibles.
- Je devrais aller voir ce qui lui arrive, annonça Vanille en se levant. On vient de finir, de toute façon.
Nathan ne répondit rien et repris son rangement en silence, le visage fermé. Elle soupira. Son ami avait toujours du mal à apprécier Alexandre.
En s’approchant de ce dernier, elle se rendit compte que le parchemin qu’il lisait était une lettre, dont l’enveloppe était déchirée sur son bureau. Elle observa un moment Alexandre, qui s’était assis et lisait en boucle sa lettre en marmonnant. Il ne l’avait pas vue, et lorsqu’elle posa sa main sur son épaule, il sursauta.
- Vanille ! s’écria-t-il en se relevant. Je ne t’avais pas…
Il tenta maladroitement de cacher sa lettre derrière son dos.
- Comment tu…
Il fixa le fond de la salle, où étaient assis un instant auparavant Vanille et Nathan.
- Je pensais être seul dans la salle.
Il gardait sa main derrière son dos, décidé à ne pas évoquer ce parchemin. Mais Vanille comptait bien savoir de quoi il en retournait.
- Je t’ai vu avec ta lettre. Qui te l’a envoyée ?
- Personne. C’est pas important, fit-il en se retournant vers son bureau.
- Ca en avait l’air. Ca avait l’air grave.
- Laisse tomber. On va manger ?
- Il est dix heures passées. Tu ne comptes rien me dire ? Tu ne me fais pas confiance ?
Il hésita un moment, puis se tourna vers elle.
- J’ai mes secrets, tu as les tiens.
- Je n’ai pas de secret.
- Tu sais pourquoi Alva et Alya sont parties.
- Non, c’est faux !
- Tu n’as pas réagi comme si tu étais choquée de leur départ. Tu sais quelque chose, libre à toi de ne rien dire, mais ne me parles pas de confiance lorsque je veux garder des choses pour moi.
- Ca n’a rien à voir. J’ai...j’ai découvert qu’elles m’avaient envoyé la lettre de menace. Celle que j’ai reçue l’année dernière, sur mes recherches. Elles sont parties le lendemain, j’en ai déduit qu’elles ne voulaient pas que je les confronte à leurs actes comme on l’a fait avec Iris. Je n’en sais pas plus.
Son visage prit une expression choquée :
- C’étaient elles ? Mais pourquoi ?
Il gromella dans sa barbe un moment.
- Je déteste être pris au dépourvu.
- Je t’ai dit ce que je savais, dit-moi de quoi il s’agit à propos de cette lettre. S’il te plaît…
- Ca t’inquiète à ce point ?
Il soupira.
- Tu sais, toutes ces histoires de moralité internes au Club, ces règles qu’on s’impose, sans se soucier des lois sorcières… J’ai moi aussi mes propres histoires.
- Je peux tout entendre.
Une lueur passa dans ses yeux, quelque chose de sévère, de froid. Un frisson parcouru l’échine de Vanille. C’était un mensonge, elle savait pertinnement qu’un rien la choquerait, l’insurgerait, la dépasserait. Mais sa curiosité était intense, bien plus que la peur de découvrir un nouveau secret terrible lié au Club, lié à Alexandre. Il se décida alors à sortir la lettre, sans pour autant la lui donner.
- Lorsque l’apothicaire est passé l’année dernière pour acheter certaines de mes potions, il m’a fait signer un papier lui donnant l’exclusivité de mon stock de nouveautés, et m’interdisant de vendre à d’autres commerces tout ce que je pourrais créer de nouveau jusqu’à ce qu’il revienne acheter le reste, avec la promesse de me prendre comme apprenti dès la fin de mes études. Je hais cet homme et la facilité avec laquelle il m’a coincé, je ne pouvais plus rien vendre à quiconque, et je savais que si j’avais trop de nouveautés lorsqu’il reviendrait, il n’en prendrait pas la moitié et recommencerait son manège jusqu’à ce que je travaille avec lui. C’est ce qu’il s’est passé, lorsqu’il est revenu le mois dernier. Alors j’ai décidé de le doubler à mon tour. J’ai vendu des potions à des commerces clandestins, dans les réseaux de l’allée des embrumes. Des potions inédites et de qualité, ils ont sauté sur l’occasion. Mais ceux-là sont encore pires que l’apothicaire. Ils ont compris le filon, ils ont compris ma situation, et si le ministère les connaît et sait dans quoi ils trempent, et les laisse tranquilles parce que le marché noir leur rapport beaucoup, moi, j’ai tout à perdre à être découvert. Ils ont décidé de m’entuber encore plus que l’apothicaire. Dans cette lettre, ils prétendent que leurs clients sont tombés malades à cause de mes potions, et exigent d’en avoir de nouvelles gratuitement, sans quoi ils me dénonceront au ministère, et ma carrière sera finie avant même d’avoir commencé.
Il jeta la lettre avec force sur le bureau, et avant que Vanille n’ait pu poser sa question, il y répondait :
- Mes potions ne rendent pas malades. Tout ceci est un tissu de mensonge et ils savent parfaitement que je n’en crois pas un mot, mais je n’ai pas le choix.
- Tu en es certain ? Tu as très bien pu faire un erreur…
- Je ne fais pas d’erreur. Jamais je ne vendrais de potion douteuse. Jamais je ne mettrais la vie de quiconque en danger.
- Tu vas faire quoi ?
- Je vais réfléchir à ma meilleure option. N’en parle à personne, je ne veux pas que ça s’ébruite, même au Club.
Alexandre décida de rester plus longtemps dans la salle du Club, Vanille la quitta donc seule.
Lorsqu’elle se retrouva dans le couloir menant à son dortoir, elle fut rattrapée par quelqu’un qui lui tira le bras pour l’arrêter.
- Je dois te dire une chose importante, Vanille, chuchota Nathan.
Surprise, elle ne tenta même pas de se dégager le bras. Il la fixa l’air sombre, s’approcha comme pour appuyer ses mots.
- Alexandre… il t’a menti.
End Notes:
Un grand merci d'avoir lu !
L'idée d'Odin et de ses Walkyries comme étant des sorcier est inspirée de la superbe histoire "Ginger la Légende" de Mak. J'imagine que vous la connaissez, elle est dans les tops du site ;)
Je n'ai aucune idée de ce que vous pensez de mon histoire dernièrement, n'hésitez pas à me laisser une petite review, ça fait vraiment plaisir, et ça motive ! Et comme ça je peux savoir si ça vous plaît, s'il y a des choses qui vous dérangent ou au contraire que vous aimeriez voir s'améliorer.
Lors de notre prochaine réunion... Ca ne sera pas une réunion.
Je teste de nouvelles choses. J'espère qu'elles vous plairont. C'est pour ça que le peu de review sur les derniers chapitres me fait tilter : j'espère ne pas partir trop loin.
Je vous embrasse !
Dean
De courts frissons saccadés secouent sa peau, et à chaque spasme se hérisse un peu plus le duvet de ses bras. Le froid s’infiltre lentement par chacun des pores de sa peau, ses vêtements n’y peuvent rien, son corps est ralenti. Son sang lutte pour regagner le coeur, qui, d’une explosion, renvoit sa chaleur dans tout son être.
Comme s’ils venaient de subir une éternité en apné, ses poumons se gonflent d’une irrépressible inspiration, sa gorge et ses bronches grondent de douleur, transpercés par une humidité glaciale irritante. Douleur bien vite remplacée par cette merveilleuse sensation qu’est celle de pouvoir respirer. L’oxygène nourrit doucement ses veines, et soulage une gêne jusque-là insoupçonnée.
Le noir profond, abyssal de ses pupilles dilatées n’y font rien, il n’y a aucune lueur pour faire briller ses yeux. Elle est aveugle. Et si cette cécité ne la trouble pas, c’est que sa cause est simple. Ses paupières sont closes. Irrémédiablement, parfaitement closes. Alors, comme prises de la réalisation d’avoir été privées de lumière depuis bien trop longtemps, elles s’entrebaillent, puis dans un sursaut, s’écarquillent.
Et elle ne contrôle rien.
S’impose alors la Lune à ses yeux, reine du ciel nocturne escortée d’un millier d’astres, régnant pourtant seule, berçant le monde de sa lumière blanche. La lande écossaise, sauvage et brute, loin des villes et de leur pollution lumineuse, autorise ses iris à refléter les constellations. La voie lactée elle-même se révèle, un chemin d’étoiles, une brèche resplendissante sur la voûte céleste, vision unique liant chaque être sur Terre, un toit universel sous lequel la vie naît puis meurt.
A cet instant, elle fait pleinement partie du monde.
De grand arbres noirs dont la cime se révèle enfin dans la nuit dansent, secoués par un vent furieux. Ces immenses pins s’accompagnent dans un ballet, un heurt, une lutte sans fin, les branchent se rencontrent, dans un excès d’enthousiasme projettent leurs aiguilles dans les airs, et autour d’elle comme une pluie s’abat. Ces immenses colosses guerroient contre un mistral orgueilleux mit au défi de les faire s’allonger. La dense orée sylvestre se dresse telle une gardienne, dernier rempart face à la tempête dont la violence n’est pas admise en ces bois, il lui faudra abattre nombre d’entre eux pour prétendre agiter les feuilles mortes de son tapis.
Alors, autour des larges troncs, pas un zéphir ne vient caresser sa peau une fois les portes de la forêt franchies. Le calme règne ici en maître, et pourtant, là-haut, le vent qui chahute devrait emplir ses oreilles. Elle peut encore voir les étoiles disparaître au fil des balancements.
La Forêt Interdite est habitée de magie.
Il n’y a pas de doute possible, c’est en ce lieu qu’elle se trouve. Pas qu’elle n’en reconnaisse la moindre parcelle, ni même qu’il n’y ait à portée de vue le château ou quelque mur caractéristique pour preuve. Mais où pourrait-elle être d’autre, sinon chez elle, à Poudlard, pour se sentir aussi sereine. Ses pas ont dû la porter ici dans son sommeil, et là voilà dans le coeur dense de la forêt, habillée de sa chemise de nuit, les pieds nus enfoncés dans la mousse fraiche. L’hiver l’enveloppe toute entière : de ses pieds monte une vague de froid, mêlée d’une force tranquille infiltrant ses veine, elle remonte ses jambes et son corps entier est pris d’une énergie nouvelle, la fraicheur atteint son dos, puis sa gorge, et de son nez s’échappe un buée blanche. Puis le cycle reprend sans la faire ciller. Au contraire, loin de l’incommoder, il l’anime. Etrange. Ces sensations nouvelles lui font alors réaliser qu’elle ne se trouve plus dans son monde. C’est un songe. Le plus pur, le plus authentique des songes qui lui aient été donnés de vivre.
Ses sens sont en éveil. L’odeur de la sève qu’elle sent sillonner autour d’elle, vie lente et puissante gravissant l’écorce et le bois, la beauté des bourgeons encore endormis, promesses d’un éternel déploiement de nouvelles tiges, le son discret d’une feuille mourante libérée de son rameau, privée de son sang sucré par l’arbuste économisant la moindre force, la douceur de l’air agité par sa chute contre sa joue rosie d’émoi de cette proximité.
La vie est cyclique.
Ses pas la portent toujours plus profondément. Il n’y a aucun guide, aucun but, aucune volonté, seul son corps agit et son esprit profite des stimulations sensorielles qui s’offrent à elle. Sans prévenir, un mouvement peu discret sur un tronc retentit, attire son attention. Un crissement, un souffle, puis un hululement. Une poésie. Une invitation, la route paraît plus claire par là, alors elle s’y rend. Un étrange mélange se dispute en elle, car la forêt n’est pas sa place, elle est le lieu de vie des êtres qui l’habitent, et pourtant, malgré son intrusion, ils l’accueillent sans reproche, d’une douce hospitalité. La vie, végétale, animale, magique, l’accompagne sur son chemin. Sans aucun vent pour les porter, les branchages s’écartent autour d’elle, quelques-uns carressent son épaule à son passage, dans une bienveillance sincère. Pas une ortie, pas une ronce ne se dresse devant elle, et c’est presque avec désolation qu’elle applatit fougère, jeunes pousses d’arbre et fleurs de la plante de ses pieds nus.
Bercée par une aura qui l’accompagne dans son voyage, qui la guide jusqu’aux fonds inexplorés de la forêt, elle sent autour d’elle une nuée de présence. Elle est au coeur d’un organisme, un véritable dédale de sensations et de vies. D’abord discrètes, ces vies, ces flammes finissent par céder à leur curiosité et viennent peu à peu l’entourer, la devancer dans sa marche, la suivre. Une danse, un jeu, parfois un chahut lorsque, poussés trop loin, ils s’aventurent devant son regard et fuient devant son regard amusé. Aucun d’eux n’a l’audace de se dévoiler entièrement. La paix sereine fait place à un manège euphorique et harmonieux, ses tympans se délectent du chant de ceux qui se refusent à sa vue, et son dos frissonne de l’amour qu’elle sent s’émaner de chacun des êtres qu’elle croise sans reconnaître. Une douceur emplit son coeur alors que ses pas, sûrs d’eux, continuent de l’emmener.
Où que ce soit, elle s’y rend.
La forêt est loin d’en avoir fini avec elle, et doit aimer la voir s’émerveiller ainsi. Alors elle pose sur son chemin une créature, une bête majestueuse qui ne porte pourtant en elle pas une once de magie. Assise entre deux arbres sur un coussin d’herbe grasse et de feuilles rouges tombées au combat, elle observe tendrement ses jeunes se dégourdir les pattes un peu plus loin. Toutes deux demeurent immobiles. Subitement, ses naseaux hument l’odeur humaine caractéristique sans en reconnaître vraiment le parfum. On ne croise que peu de cette espèce, ici. Ses grands yeux noirs cherchent un moment l’origine de l’étrange parfum, lorsqu’ils tombent sur l’être d’où s’émane ce mélange subtil d’iode et de framboise. Commence un échange de regards intense. La forêt a cessé de piailler et s’est tue progressivement jusqu’à demeurer parfaitement silencieuse, comme pour respecter ce moment. Il n’y a pas de peur. Chacun des deux êtres sait l’innocence de l’autre, et elles se lisent dans les pupilles le calme et le respect, aucune des deux ne souhaite le moindre mal. Juste, savourer l’instant.
Ce n’est pas tous les jours que cette biche croise une sorcière.
Mais c’est elle qui brise le contact car, toujours sereine et peu à peu remise de sa surprise, elle voit apparaître son mâle. Ses longs bois, témoins de sa force et de sa majesté, s’accrochent dans les jeunes branches alors qu’il s’écarte pour contourner la sorcière, et il passe si près d’elle il en sent les frissons. Elle ne l’inquiète pas. Il l’ignore superbement, penche sa longue tête et frotte son museau sur celui de sa femelle, puis invite sa famille à partir. Sans un bruit, ils s’éloignent. Lui n’offre pas un regard à l’étrangère mais la biche ne peut s’empêcher de chercher une dernière fois le contact, le lien. Mais elle ne le trouve pas.
Car elle est en train d’essuyer de sa manche les larmes salées qui lui brouillent la vue.
Sans lui laisser le temps de se remettre de ses émotions, son corps se remet en chemin, comme un automate vidé de toute émotion. Le silence l’accompagne maintenant, la forêt refuse de reprendre sa gaieté, comme si l’apothéose de cette rencontre avait effacé tout le reste, comme si les petites vies ne voulaient remonter sur scène après le passage de ces rois, et elle reste seule, perdue dans ses tremblements. Pourtant, nombre d’autres créatures vivent ici, magistrales, ésotériques, mystérieuses. Et l’une d’entre elle brille, au bout du chemin. Elle a du mal à saisir ce que ses yeux tentent de lui montrer, la Lune l’éclaire toujours de sa blanche lumière, mais c’est au loin, là-bas, tout près, une lueur bien différente qui chatoie. Enfin, elle fait face à son dessein, c’est là qu’elle doit se rendre, c’est là qu’on l’appelle. Ses pas se font de plus en plus rapides, sa respiration s’accélère et ses mains écartent sans ménagement les branches qui tente maladroitement de lui barrer le passage. Des épines lui griffent la peau, des racines s’emmêlent dans ses pieds pour l’inciter au calme, à la douceur. Mais elle n’en a cure. On la demande. On la requiert. On l’attend. Entre les énormes troncs, juste là, tout près, si près. Elle court, elle esquive, se baisse et se relève. C’est alors que la forêt la rappelle à l’ordre, elle, l’invitée sous ce toit, n’a pas à se comporter ainsi. Une branche s’interpose. Dans sa hâte, elle ne peut l’éviter, et son front la heurte avec violence. Elle se retrouve alors à terre. Sonnée.
Perdue.
A genoux, les mains dans l’herbe humide, le crâne résonnant de douleur, elle ne se souvient pas être sortie de la forêt. Et pourtant, les arbres ont dû s’écarter, car elle se voit à l’orée d’une clairière parfaitement ronde. Une faible brise l’accueille, ses yeux brillent encore de leurs larmes salées, le froid reprend ses droits sous ses vêtements, mais tout cela n’a aucune importance. Aucune. Rien d’autre ne compte que ce qui illumine la clairière, au centre d’une spirale d’herbes hautes et de fleurs blanches. La fascination s’empare d’elle, et dans un silence si profond que même sa propre respiration n’ose le briser, elle contemple ce qui se dresse devant elle. Un Moldu pieux parlerait de miracle. Un sorcier évoquerait simplement la magie. Mais elle sait que c’est bien plus que cela. Elle sent sa gorge se serrer douloureusement, ses doigts se crispent et arrachent l’herbe, elle s’assoit sur ses talons et s’abreuve de sa vision.
C’est un arbre.
Un arbre enlacé d’un halo de lumière chaude, de flammes jaunes, rouges, lumineuses, qui montent si haut qu’elles paraissent vouloir embraser le ciel, un arbre nu de toute feuille, à peine plus haut qu’elle, dressé sur le coteau que forme la clairière, dont les branches sont figées dans un mouvement de spirale qui accompagnent les flammes qui l’animent, un arbre dont la lumière n’a d’égale que la dense obscurité dans laquelle il se tient. Il brille. La forêt autour se prosterne face à lui. Incapable d’en détacher ses yeux, elle finit par comprendre qu’au-delà de l’éclat du feu qui le brûle sans le blesser, c’est son écorce elle-même qui sintille. D’infimes pointes brillantes grouillent sur sa surface, des lumières pétillent, scintillent et étincellent, l’arbre vit. Il vit au-delà de la sève qui monte et les feuilles qui poussent, au-delà que la chaire qui saigne et le coeur qui bat, il respire mais ne tremble pas, il exhale, il s’émane de lui une intensité indescriptible et incomparable.
Et il l’appelle.
Alors, dans un effort colossal, elle se redresse et elle avance. Un pas après l’autre. La distance qui les sépare s’amenuise tandis qu’elle pénètre dans une atmosphère chaude, douce, qui englobe et intègre tout son être, elle sent ses muscles, ses os vibrer, chacune de ses cellules est en émoi. La sensation qu’éprouve chaque pore de sa peau, que vit chaque parcelle de son être, que ressent chaque pensée qui la traverse est nouvelle. Nue dans le ventre protecteur de sa mère, enroulée dans la couverture d’un lit, enivrée par l’amour d’un baiser, rien n’est comparable à la béatitude, la félicité que lui offrait cet être à chaque pas qui la rapprochait de lui. A-t-elle déjà connu l’amour, le bonheur ? Rien n’est moins sûr. De quel monde vient-elle ? Si ce n’est pas celui-là, alors elle n’y retournera pas. Rien, rien d’autre que la magie, la Magie qui passe en elle à ce moment précis, qui s’enroule et danse autour d’elle, qui caresse sa peau. Il n’existe plus de danger, il n’existe plus de mal, plus de peur, il n’y a au monde qu’elle et l’être lumineux qui, sous la forme de cet arbre, absorbe le temps et l’espace pour ne rien l’aisser d’autre. Ce moment se doit de durer une éternité, sinon, il n’y aura plus que la mort.
L’idée traverse son esprit comme un sabre, alors qu’elle n’a plus qu’à tendre le bras pour enfin toucher son but. Comment peut-elle s’imaginer arrachée à cet extase ? Cette pensée, vive, précise, la brise et lui coupe le souffle. Elle tombe à genoux. Encore. Son coeur manque un battement, puis deux, ses poumons cherchent de l’air mais il n’y en a plus. Elle se noit, alors que ses yeux restent accrochés à cette lumière qui lui brûle les rétines tant elle se refuse de les fermer. Il existe encore en elle le bonheur, la vie, l’amour, l’euphorie. Mais apparaissent dans une autre mesure, ou peut-être à force égale, la peur, le désarroi. La peine. La mort. La fin de toute chose, le néant, le vide. Son corps ne vibre plus, il s’est figé, même ses larmes se sont arrêtées à la frontière de ses paupières. Deux forces se battent en elle, et elle sent que l’issue de ce combat ne pourra que lui apporter la mort.
Comme une prière, un ultime effort, comme s’il n’y avait plus d’autre espoir, comme si la vie ne pouvait plus se battre en elle sans lui, elle tent la main vers l’arbre pour supplier son aide, car il n’y a plus que lui pour la sauver. Il est toujours vif, luminescent, et son tronc parcouru d’étincelles éclatantes n’est qu’à quelques centimètres d’elle, ses doigts tendus le touchent presque mais elle n’arrive pas à s’approcher davantage. Son corps refuse, son esprit est figé.
Ne me laisse pas.
Lentement, presque imperceptiblement, les étincelles de lumière se mettent à former une bosse, puis une spirale face à elle. Elle prend la forme d’une main. Sa main. Un miroir, presque parfait si ce n’est que sa propre main semble impure, indigne de celle qui s’est formée face à la sienne. Une main de lumière, de vie, de magie, et une main de chaire, de peur et de larmes. Les deux se font face, en silence. Le temps s’est arrêté, mais il reste encore un effort à faire. L’arbre, l’être, la main continuent de l’appeler. La distance qui les sépare semble pourtant infranchissable, demeure une force entre les deux mains qui agit comme un gouffre, comme si elle n’appartenaient pas au même monde et n’étaient pas censées pouvoir se rencontrer, et cette force menace d’exploser, d’imploser à tout instant.
Mais il n’en est rien.
Muée d’une volonté nouvelle, elle tend alors son index, et l’autre main l’imite. Ils franchissent alors cette barrière impossible et, dans un ultime éclat, se rencontrent.
Un tourbillon insoutenable s’empare alors d’elle. La douleur se mêle au plaisir. La joie à la crainte. La mort à la vie. Elle ressent dans son corps chaque organe s’embraser, son sang accélérer, sa respiration s’intensifier. Elle sent la vie couler en elle, au-delà même, elle sent la magie l’habiter. Son esprit se brise soudain, son âme s’ouvre à un gouffre de connaissance, à un méandre de possibilités, elle voit le monde, elle le vit. C’est insuportable, mais elle s’en abreuve, comme si elle avait attendu ce moment durant toute son existence. Son corps n’est pas prêt, son esprit sature, elle n’a plus aucune pensée, aucune volonté, elle n’existe plus. Elle n’a jamais existé. Tout ce qui fut, est et sera ne compte plus, tout est balayé, ses nerfs refusent de lui dire où elle est, ce qu’elle est, son doigt est toujours en contact avec cet être qui semble vouloir lui parler mais qui n’y arrive pas, elle le sait, elle le sent.
Résonne alors au fond de son esprit une voix cristaline, douce et incompréhensible, loin, si loin en elle.
Le temps d’un battement de coeur s’est écoulé.
Et sans prévenir, l’instant se brise et la détruit. La main de lumière s’évapore, ne lui laisse que des tremblements intenses et incontrôlables, son esprit se vide et elle ne peut que voir devant ses yeux une tornade de lumière s’emparer de l’arbre. La Magie s’enroule et emporte avec elle toute la félicité, la chaleur et les espoirs, l’arbre se vide et la clairière entière profite de cet instant pour s’abreuver de lumière pour enfin se laisser emparer par l’obscurité. Le temps de rien, le temps d’une larme, l’être a disparu, ne laissant qu’un arbre mort.
Vide, seule, elle reste une instant immobile, pour enfin retrouver ses sensations, le froid, la peur, la solitude, et elle explose dans un long sanglot. Elle s’enroule sans le prévoir dans l’herbe au pied de l’arbre, déjà hantée par le souvenir de cette apparition dont le manque est insoutenable.
De longues heures passent. On n’entend plus dans la clairière qu’une respiration régulière. Le vent s’est apaisé, les arbres se sont tus. Les bêtes, pudiques et bienveillantes, ont déserté les abords de la forêt, et même la Lune s’est cachée derrière quelques nuages. On cherche à préserver l’endeueillée qui gise là. Elle ne sommeille pas. Les yeux grands ouverts, elle n’attend qu’une chose : la fin du rêve. Ce cauchemar a assez duré, et le réveil sera difficile, elle le sait, car les songes traumatisent lorsqu’ils provoquent de tes émois. Elle prie pour ne pas se souvenir, elle se supplie d’oublier, et elle espère que tout ceci n’est réellement qu’un rêve.
Son esprit commence à la torturer, alors que le temps se fait de plus en plus long. Elle a froid, elle a peur, elle attend, et pourquoi ne peut-elle se réveiller ? Et si ce n’est finalement pas un rêve ? Que fait-elle ici ? Que vient-elle de vivre ? De nouveau, sa respiration se bloque, mais il n’y a aucune chaleur, aucune aide pour équillibrer son apnée qui se résulte en une inspiration brisée, rauque, qui lui arrache la gorge. Elle tousse. Son corps meurtri par la position inconfortable qu’elle a adoptée proteste, et la force à sa rassoir. Face à elle, l’arbre la désole par sa seule présence. Comment une telle vision peut-être procurer ainsi la mort et la désolation ?
L’arbre n’est pas mort.
Elle sursaute et ses yeux s’équarquillent, une voix vient de surgir, tout près. Trop près. Prise de panique, elle se lève et fouille les lieux du regard, mais ses yeux n’arrivent toujours pas à s’habituer à l’obscurité. Puis, elle le voit.
Son corps est noir, plus sombre encore que la nuit. Il est immense. Humanoïde, l’être dégage pourtant une aura inhumaine, son corps est trop long, trop fin, ses membres interminables. Il semble fait de traits grossiers dessinés au fusain, et tout ceci n’est peut-être qu’à cause de la nuit, mais elle est incapable d’apercevoir de mains, de pieds, comme s’il avait été créé au strict minimum. Son bras est tendu vers une des branches de l’arbre dont il caresse l’écorce, qui se révèle presque aussi noir que lui. Malgré sa difficulté à distinguer perceptiblement ce nouvel être sylvestre, elle aperçoit pourtant ce qu’il est en train de manipuler. Du bout du doigt - ou de ce qui pourrait être son doigt, elle voit apparaitre une tâche blanche. Sur la branche se déploie lentement une fleur, rose, nacrée, douce, accompagnée de quelques folioles, solitaire. Orpheline, survivante abandonnée d’un incendie meurtrier, sa beautée en est décuplée. Elle accompagne un sentiment de soulagement qui s’empare de la clairière entière : non, l’arbre n’est pas mort.
Alors, elle tourne son attention vers l’être. Il semble, de par son apparence, interdire quiconque de le regarder parfaitement. Son immobilité presque totale, en plus de lui conférer cet aspect inhumain, donne l’impression d’être face à une statue d’obsidienne. Se dégage de lui une astreinte, une force qui pousserait quiconque osant tenter de le dévisager à rebrousser chemin et à baisser les yeux. Un respect énigmatique s’empare alors d’elle, malgré son absence de chaleur, d’éclat, il est aussi divin que la Lumière qu’elle vient de rencontrer. Et pourtant, la seule pulsion qui s’empare d’elle est la fuite. Une émotion, un choc de plus la briserait, elle le sait, en une nuit, en un songe, elle a ressenti plus d’émois que dans toute une vie, son esprit ébranlé la supplie de ne pas risquer de jeter le dernier coup de pied sur son âme en équilibre entre la raison et la folie. Une nouvelle confrontation avec un être magique approfondirait ses stigmates, ses cicatrices qu’elle sent déjà poindre en elle, elle ne souhaite que tourner les talons et s’enfuir, se plonger de nouveau dans la forêt qui ne l’accueillera plus jamais comme avant et chercher la sortie de ces lieux, de cette scène, de ce rêve.
Ne pars pas.
Et le voilà, le second choc. La phrase a résonné devant elle au moment où elle a amorcé son échappée. Un second être se tient debout, tout près de son dos. Une résignation s’empare d’elle, tant pis, si la mort doit la cueillir cette nuit, au moins a-t-elle vécu l’extase le temps d’une battement de coeur. Repenser à la Lumière ne lui fait plus mal, maintenant, au contraire, elle le sent au fond d’elle-même comme un souvenir vivant logé, installé dans son coeur. Elle ressent encore la douceur mêlée à la peine, les deux opposés se battant encore comme s’ils voulaient la faire rire et pleurer en même temps. Et puisque la fuite n’est pas permise, ce soir, puisqu’elle se retrouve entourée de deux colosses lui barrant le passage, alors sa seule solution est d’accepter ce qu’ils sont venus faire d’elle. Ainsi, la voilà prête, seule, le coup qui la tuerait, espère-t-elle, n’éteindra pas la Lumière qui accompagne maintenant son âme et la mort ne sera plus un simple néant mais une éternité accompagnée de… de...
L’Asten’Fire.
Ce nom qui résonne en elle fait sens, il a toujours été là, elle le connaît sans l’avoir jamais entendu. Oui, l’Asten’Fire est avec elle, son départ n’en était pas un, il s’est simplement caché à ses yeux, à ses sens, pour réapparaître dans son âme. Et cette pensée atténue d’autant plus la peur de sa mort imminente que de pouvoir enfin la nommer. Asten’Fire.
Nous ne te tuerons pas ce soir, Vanille, ni jamais. Nous sommes des messagers.
Les deux voix simultanées résonnent autour d’elle, l’anglobent entièrement. Elles sonnent comme un roulement, un son glutural, qui persiste à la fois dans son esprit comme dans ses tympans. Deux êtres, deux gardiens, deux messagers ou deux bourreaux, cela importe peu, il peuvent faire d’elle ce qu’ils désirent, car elle est à leur merci. Attendre, et écouter, voilà tout ce qu’elle peut faire.
Cette nuit, l’Asten’Fire t’a choisie, t’a touchée. Elle a peur. Une menace gronde sur Elle, et si Elle s'éteint, toute Magie s’éteindra avec Elle. Alors Elle s’est logée en toi, Vanille, pour te demander ton aide.
Ce n’est pourtant pas ce que ressent son âme, au contraire, c’est elle qui sans l’Asten’Fire s’éteindrait. C’est elle qui a besoin sa sa présence, pas l’inverse.
Tu as en toi la félicité qu’Elle apporte et le néant que Son absence provoquerait. Aide-la.
Pourquoi ? Qui suis-je pour recevoir de tels ordres ? N’ai-je pas déjà assez de mal avec ma propre vie ? Je ne peux aider personne. Je ne peux pas aider. Je ne sais pas aider.
Une menace vient de ta propre espèce. Une créature comme toi se rend ici avec de sombres desseins. Si elle atteint son but, il en sera fini de toi, de tous, et de toute Magie sur cette Terre telle que nous la connaissons.
Sa peau frissonne à cette idée.
Tu es déjà sur la voie, Vanille, et nous t’aiderons à poursuivre à présent. Tu n’es pas prête, mais tu sembles être de ceux qui peuvent L’aider. La sauver, Elle et les autres. Lorsque tu feras face à des choix, nous te trouverons, te guiderons pour qu’au moment venu, tu sois prête.
Il y eut un sursaut et soudain, Vanille se retrouva dans ses draps, trempée de sueur, hatelante.
Un rêve.
Oh, quel soulagement ! Son matelas n’avait jamais été si confortable, si rassurant. Comment son cerveau désinvolte pouvait-il inventer de tels dramas ? Sauver la Magie ? Avec un être de feu vivant en son coeur ? Elle ne ressentait plus, les émotions étaient de lointains souvenirs qui s’éteindraient progressivement, comme tout rêve. Plus rien ne témoignerait de ce qu’elle avait vécu cette nuit, malgré le réalisme, malgré les émois. Ses chevilles étaient intactes, sa chemise de nuit était sèche, et son index…
Son index droit révélait à son extrémité une brûlure profonde et indolore. Un fourmillement résonnait dans sa main.
Que s’était-il passé ?
End Notes:
*Cela faisait au moins des mois, des années. Une éternité ou deux. Les seuls vestiges témoignant du passage d’êtres vivants résidaient dans de vieilles toiles en lambeaux, figées dans leur décomposition entre des rideaux poussiéreux, jadis d’un rouge luxuriant, et des câbles à l’arrêt depuis bien trop longtemps. Même leurs hôtes les avaient quittées, en manque de proies pour se sustenter, obligés de migrer vers des contrées habitant plus de vie que ce théâtre décrépi.
*Il n’en fut, pourtant, pas toujours le cas. Il fut un temps, un temps de renommé formidable, où la foule se tassait au guichet, se précipitait vers les sièges alors écarlates des premiers rangs, acculée, bousculée au pied de la scène, pour acclamer le phénomène, l’admirable, que dis-je, la remarquable, voire même, l’inoubliable ! Lena.
*Mais où était-elle passée ? Pourquoi avoir déserté ce lieu reliquat de sa gloire passée ? Pourquoi avoir abandonné son public, ses fans, sa célébrité ?
*C’était sans compter sur cette silhouette élancée, à présent déchirant le silence de son pas feutré, ramenant la vie dans cet édifice ensommeillé. Les rideaux vibrèrent d’excitation à son passage. Un léger vent balaya la couche épaisse de poussière, dégagea le paysage. La mystérieuse s’avança vers le coeur de la scène, elle y saisit le micro assoupi sur son pied d’ébène, s’éclaircit légèrement la voix.
Les projecteurs se réveillèrent alors, braquèrent leur feu ravivé vers la nouvelle arrivée, qui leva haut le menton et s’écria à pleins poumons:
*I’M BACK B*TCHES !! Mmmh, ça fait plaisir. Mais attends. Attends voir, Dean ? Deaaaan ? Viens voir par ici, s’il te plaît ? Deanna ? DEEEANNAAA- Ah, te voilà !
- *soupire* tu m’avais manqué.
*Et je vois qu’il était temps que je revienne ! C’est quoi ça ?
- Quoi, ça ?
*Ce chapitre, là, ci-dessus!
- Ben c’est ma nouvelle publication.
*T’as fumé quoi ?
- Hein ?
*Pour l’écrire, ce chapitre ! T’as fumé quoi ?
- C’est une question piège ?
*Nan mais parce que, j’en veux, en fait. J’veux dire, moi aussi, je veux pondre des pépites pareilles ! T’es allée chercher ça où, un délire pareil ?! Tu t’es mis à la poésie, ça m’a donnée l’envie d’en faire aussi ! Viens on devient des poètes.
- Poétesses ?
*Poil aux fesses !
- Tu m'avais manqué.
*Et Lena prit Deanna par l’épaule, l’invitant à s’enfoncer avec elle dans les coulisses obscures, décrivant son grand projet pour l’avenir, ensemble, un grand projet littéraire ! Un projet poétique.
*Voilààààà ! Pardon. Quand Dean me donne carte blanche, je m’emballe. Surtout sur un chapitre pareil ! Vous en avez pensé quoi ? Moi j’en perds mon latin, si ce texte était un tableau je resterais scotchée devant, détaillant le moindre coup de pinceau que son auteure y aurait apporté, appréciant chaque nuance de couleur, chaque scène, chaque émotion comme un oeuvre d’art en soi. Je suis désolée de te l’annoncer, mais tu as atteint un sacré niveau, Dean. Maintenant tu ne peux plus reculer.
*Svp, messieurs dames, des reviews ! J’ai besoin d’autres avis sur la question, ce chapitre, que l’on pourrait qualifier de test, est-il à votre goût ? Vous en voulez plus ? J’ai pas entenduuuu ?! Dites nous tout ! Pour chaque review laissée, je vous fait un limbo.
*Des bisous !
- Tu pars plus hein?
*Mais j'étais toujours là.
Premier enseignement by Deanna
Author's Notes:
Eeeet bonjour ! Bienvenue à notre trente-neuvième réunion au Club des Créateurs ! J'espère que tout le monde va bien.
Je crois que le dernier chapitre vous a un peu divisés. Il était un peu étrange, je sais. J'ai voulu tester un autre style, j'ai beaucoup travaillé dessus, et l'excuse du rêve était parfaite pour rester cohérent : on ne change pas de style narratif au milieu d'une histoire sans raison ! Alors je tiens à vous rassurer (ou à vous décevoir ? J'espère que non) : la suite sera comme le reste de la fanfic, avec mon style d'écriture habituel.
En tout cas merci de vos review ! Elles me mettent en joie à chaque fois que je vois le compteur monter :)
Et qu'est-ce que j'avais dit ? Qu'est-ce que j'avais promis, dans mes ràr ? La ré-gu-la-ri-té ! Alors comme la fin de l'année est entièrement rédigée, je n'ai plus aucune raison de faire traîner. Il y aura un chapitre par semaine jusqu'à la fin de l'année ; quand à la suite, je dois d'abord la travailler au maximum avant de me lancer dans l'écriture.
Je parle trop, place à l'histoire ! On avance en parallèle sur nos deux tableaux principaux : ce qui signifie ce rêve, et ce que signifie la phrase de Nathan. Et donc, au plus grand bonheur de certains (JE VOUS AI COMPRIS ! *lève les bras face à cette référence nulle*), voici le retour en force de notre cher, notre très cher Nathan. Mon petit chou.
Allez, bonne lecture !
- Ce sortilège nécessite une concentration optimale, nous allons commencer par l’étudier en détails au cours d’aujourd’hui, et commencerons la pratique demain.
La voix haut perchée du professeur Greenhat, au cours de Défense Contre les Forces du Mal, provoquait un grondement sourd dans les tympans de Vanille. La pointe de sa plume trembla lorsqu’elle la trempa dans l’encrier.
- Il a été inventé par le mage Elsius Swan en dix-huit cent quarante-sept, au dix-neuvième siècle donc. Il est connu pour cette découverte et pour avoir siégé au conseil des mages pendant douze années consécutives, entre dix-huit cent trente-sept et…
La salle de classe était froide, mais elle transpirait. Une goutte de sueur glacée coulait le long de sa tempe, mais elle ne trouva aucune force dans son bras pour l’essuyer. Elle tentait de garder son attention sur son professeur. Tant bien que mal. Plus mal que bien.
- Bien qu’on attribue cette découverte au mage Swan seul, il est possible qu’il ait été aidé de ses fils avec qui il travaillait, et l’un d’entre eux…
Elle ferma les yeux deux secondes dans l’espoir de reprendre ses esprits. Puis elle se sentit comme enfermée dans une petite boîte noire et secouée dans tous les sens.
- Enervatum !
Le mot, comme une lointaine mélodie, s’empara d’elle et la réveilla. Une douleur s’imposa à son crâne. Rien d’autre. Juste son esprit absent.
- Miss Grinlow, pouvez-vous aidez Miss Ocean à tenir debout ? Nous allons la conduire à l’infirmerie.
Etait-elle debout ?
- Doucement, Van. Ca va aller.
Elle obéit mécaniquement aux ordre qu’on lui donnait. Après un temps infiniment long, pendant lequel des sifflements la coupaient de tout ce qui l’entourait, elle se retrouva allongée dans des draps qu’elle trouva si confortables qu’elle s’y endormit immédiatement.
De longues heures défilèrent pendant lesquelles Vanille flotta dans son sommeil, balancée par les vagues dans une barque moelleuse.
- Le stress, peut-être. Mrs Pomfresh a dit n’avoir trouvé aucun signe de maladie.
- Elle dort mal en ce moment. Tu l’as entendue comme moi cette nuit ?
- Oui. J’ai hésité à la réveiller plusieurs fois. Quand elle pleurait, quand elle se débattait de la tête…
- Vous ne lui en avez pas parlé ce matin ?
- On s’est réveillées après elle, et elle n’avait pas l’air souffrante quand on l’a vue sortir de la salle de bain.
- Elle est restée longtemps évanouie, tout à l’heure. J’ai eu vraiment peur, quand sa tête a heurté la table.
Il y eut un long silence, et Vanille profita du calme qui régnait dans ses oreilles. Puis elle ouvrit doucement les yeux, au prix d’un effort qu’elle puisa au plus profond d’elle-même. Elle repéra Leanne et Ambre, à son chevet. Alexandre était appuyé sur le bout de son lit, et lorsqu’il la vit éveillée, il lui offrit un sourire tendre.
- Te voilà revenue. Comment te sens-tu ?
- Fatiguée…
Gênée par la situation, elle prit une profonde respiration et trouve le courage de s’adosser contre ses oreillers.
- Qu’est-ce qu’il m’est arrivé ?
- Tu as fait un malaise. Rien de grave, mais l’infirmière et les professeurs insistent pour que tu restes ici au moins pour aujourd’hui et demain.
La lumière diminuait déjà dans l’infirmerie.
- Combien de temps ça a duré ?
- Ton malaise ? Tu es restée plusieurs minutes évanouie, dit Ambre. Tu as dormi ici le reste de la journée. Tu devrais manger un peu, d’ailleurs.
Il y avait en effet un plateau-repas qui l’attendait sur la table de chevet.
- Je suis désolée de… si je vous ai inquiétés. Je vais bien, vraiment, je…
Vanille fut brutalement coupée dans sa phrase. Devant ses yeux, entourant Alexandre, deux immenses formes noires venaient de surgir du néant. La pièce devint glacée, les lumière s’étouffèrent, ses oreilles bourdonnèrent.
- Vanille ?
Tout redevint normal en un instant. Leanne, Ambre et Alexandre se regardèrent, concernés par le choc du visage de Vanille. Elle n’arrivait plus à se concentrer clairement.
- Tu dois encore te reposer. Tu es pâle comme la mort.
Sans ne rien trouver à répondre, elle se roula en boule et se glissa sous sa couverture, les yeux grands ouverts. Ils n’avaient rien vu. Elle avait halluciné. La fièvre…
Elle entendit des chaises racler le sol, et sentit quelque part sur son front se déposer un baiser chaleureux. Alors que les bruits de pas s’éloignaient d’elle, l’écho de ce baiser devint comme un picotement qui lui prit peu à peu tout le crâne. Elle ne s’était jamais sentie aussi malade.
Tu n’es pas malade, Vanille. Ton corps doit apprendre à s’adapter.
La voix, cette voix qu’elle ne pouvait que reconnaître entre mille, cette voix inhumaine, grave et lente, avait retentit dans son esprit. Soudainement emplie de vigueur, elle jeta sa couverture sur le côté pour se relever et se retrouver… allongée dehors, au centre d’une clairière ronde.
Ce rêve, encore. Mais il n’y avait pas d’arbre, et le ciel était jaune et orange, d’une beauté sans pareille. Lorsqu’elle se releva, les deux silhouettes noires se tenaient face à elle. Toujours aussi sombres. Toujours aussi inhumaines. Toujours aussi effrayantes. Elle ferma les yeux.
- Je suis dans un rêve, murmura-t-elle les mains posées sur les côtés de son visage, et vous n’existez que dans ma tête.
Tu as raison. Mais cela ne t’empêche pas de nous entendre.
- J’hallucine, je suis malade, tout ceci n’est pas réel.
Tu ne pourrais être plus en tort. Ecoute-nous.
- C’est un maléfice, une maladie, vous finirez par disparaître et je vais me réveiller.
Regarde ton doigt et regarde ton coeur. Ecoute-nous.
Au fond d’elle-même résonna la voix douce et incompréhensible qu’elle avait entendu dans son rêve. Son esprit s’apaisa. Le calme s’empara d’elle, ses paupières s’ouvrirent, et les deux silhouettes semblèrent moins effrayantes.
- Qui êtes-vous ?
Nous sommes les messagers de l’Asten’Fire. Nous avons une mission te concernant.
- Qu’est-ce que vous voulez de moi ?
Tu n’es pas encore apte à lui donner ce qu’Elle désire. Nous devons te préparer. Nous devons te donner des enseignements, sans lesquels tu ne pourras l’aider.
- Pourquoi a-t-elle besoin d’aide ?
Les deux créatures restèrent silencieuses un instant, puis brisèrent leur immobilité en se tournant l’une vers l’autre.
La Magie est menacée. Si tu écoutes nos enseignements, elle te guidera.
- Est-ce que tout cela est réel ?
Plus réel que tout ce que tu as pu vivre jusqu’ici.
- Et si je refuse ?
La voix qui de la créature, qui résonnait toujours dans sa tête, prit soudain un ton plus aigü, plus rapide. Comme si elle riait :
Vanille, il s’agit de ce que tu recherches depuis des mois. Nous te parlons de la Magie Originelle. De tous les sorciers, tu es celle qui désire le plus ardemment découvrir de quoi il s’agit, et pour cela, nous t’avons choisie. Mais ne te méprends pas. Si tu n’écoutes pas nos enseignements, nous trouverons quelqu’un d’autre. Même si cela nous prend des années.
Elle ne se sentait plus malade, pas plus qu’endormie. Si ces créatures disaient vrai, si ce qu’elle avait vécu la nuit dernière était réel, alors elle n’avait pas à hésiter. Un lien se fit soudain dans son esprit, une pièce du puzzle venait de trouver sa place. L’asten’Fire était liée à l’Origine de la Magie, aux divinités dont parlait le livre de Roy. L’Asten’Fire était liée aux premiers êtres de magie. Comment pouvait-elle en être venue à s’adresser à elle, Vanille, petite étudiante même pas majeure, pour venir l’aider ? Ne pouvait-elle pas trouver des sorciers bien plus puissants qu’elle, comme Harry Potter ou d’autres héros de guerre ?
D’autres auront plus de mal que toi à suivre les enseignements. Nous avons tenté d’enseigner à d’autres avant toi. Ils ont tous échoué.
- Et quels sont-ils, ces enseignements ?
Nous t’en enseignerons trois. Il te faudra comprendre et accepter chacun d’entre eux pour passer au suivant.
- Dites-moi le premier.
La créature de droite s’approcha alors de Vanille, qui fut obligée de fixer ce qui lui servait de visage, une forme lisse et floue, noire et dense, d’où s’émanait une vague de froid. Elle eut la plus grande des difficultés du monde à garder ses yeux ouverts droit sur la créature.
Sa voix s’incrusta dans ses tympans comme si elle ne voulait plus jamais en sortir, comme s’il fallait qu’elle s’imprègne en elle.
Ne donne ta confiance à personne.
Elle s’attendait à se réveiller brutalement dans son lit à l’infirmerie, mais il n’en fut rien. La créature s’écarta d’elle, et rejoint la seconde. Vanille se sentit alors lentement partir.
- Attendez ! J’ai encore des questions !
Nous te retrouverons.
- Qui a échoué à vos enseignements ?
Il y eut un court silence, puis ses yeux roulèrent dans ses orbites, et elle se sentit aspirée en arrière. Elle heurta sa tête de lit, et se releva d’un coup, faisant sursauter Nathan qui était assis juste là.
- Tes rêves sont étranges.
Vanille regarda autour d’elle. C’était le matin. Parfaitement réveillée, elle entreprit de quitter ses draps et de partir réfléchir seule, mais fut rattrapée par l’infirmière qui insista pour l’observer. L’examen fut beaucoup trop long à son goût, elle eut l’impression que Mrs Pomfresh s’énervait un peu plus chaque fois que Vanille se retrouvait là. Nathan resta dans un coin de la pièce tout le long, usant certainement de ses pouvoirs pour ne pas qu’on le jette dehors. Vanille sentit qu’il ne restait pas là par hasard, qu’il ne comptait pas la lâcher.
Il était toujours remonté contre Alexandre. Il ne lui avait rien dit de plus que la dernière fois, c’est-à-dire qu’il avait senti qu’Alexandre avait menti lors de leur discussion. Elle lui jeta un regard noir alors que l’infirmière lui donnait ses dernières instructions (“Reposez-vous aujourd’hui, et revenez me voir ce soir pour que je vérifie votre état”, ordonnait-elle), elle n’avait pas la tête à ces histoires, elle ne voulait pas d’un énième argument de sa part pour l’éloigner d’Alexandre.
A son grand désarroi, il lui suivit en silence dans les couloirs.
- Laisse-moi, Nathan.
- Pourquoi as-tu murmuré le nom d’Adalbert Waffling avant de te réveiller ?
Elle assimila l’information sans s’arrêter, et prit le chemin du parc. L’infirmière lui avait ordonné de se reposer, elle avait donc sa journée de libre. Le parc était frais et vide, parfait pour réfléchir.
- N’as-tu pas un cours ?
- Tu crois vraiment que les professeurs remarquent mes absences ?
Un point pour lui. Combien de cours avait-il pu manquer sans que personne ne s’en rende compte ? Et comment les rattrapait-il ?
Elle savait pertinemment qu’il pouvait saisir le sens de ses pensées, mais il ne répondit rien. Elle trouva un banc en pierre au bord du lac et s’y installa, aussitôt imitée par Nathan.
- Alors, pourquoi parlais-tu de Waffling ?
Elle haussa les épaule, tentant de prendre un air nonchalant. Sa dernière question, dans son rêve, avait été de demander qui avait échoué aux enseignements de l’Asten’Fire, qui avait été choisi pour l’aider sans succès.
- Tu sais quelque chose sur lui ? demanda-t-elle.
- Grand sorcier du XXe siècle, a écrit plusieurs livres qu’on étudie en cours, répondit-il d’une voix monotone.
Elle le fixa un instant, pensive.
- A une carte Chocogrenouille sur laquelle sa phrase la plus célèbre est écrite, qu’il considérait comme une loi fondamentale de la magie : “Ne touche aux plus profonds mystères - la source de la vie, l’essence de soi - que si tu es préparé à en subir les conséquences les plus extrêmes et les plus redoutables.”
Vanille fronça les sourcils, concentrée. Waffling avait été choisi par l’Asten’Fire pour l’aider avant elle. Il avait de toute évidence appris beaucoup sur la magie, et c’était aussi certainement grâce à cela qu’il avait pu écrire et faire autant avancer la magie en son temps. Mais il avait échoué, l’Asten’Fire avait encore besoin d’aide. Et cela s’était déroulé presque un siècle auparavant… Depuis combien de temps la Magie cherchait-elle le sorcier qui pouvait l’aider ? Et pourquoi avait-elle besoin d’un sorcier, avec tout les pouvoirs qu’elle incarnait ?
Une brise vint se glisser dans ses cheveux. L’air était calme, elle sentait à peine la présence silencieuse de Nathan à côté d’elle. Le moment était propice à une concentration optimale. Elle sentit son doigt picoter et leva sa main devant elle pour l’observer : la brûlure avait un aspect d’ancienne cicatrice, sur la dernière phalange de son index droit. Elle était presque blanche, et on pouvait deviner des petits points réguliers. Les yeux ainsi plongés dans la contemplation de son index, elle fouilla dans sa mémoire pour retrouver ce qu’elle avait appris pendant son rêve. La voix lui revint aussitôt en mémoire, comme si elle l’entendait.
“Une créature comme toi se rend ici avec de sombres desseins.”
“Une créature comme moi”, un sorcier donc. Un sorcier se rendait dans la Forêt Interdite, et ce qu’elle y faisait menaçait la Magie toute entière. Il fallait donc l’arrêter.
Qu’en était-il de cet enseignement, sans lequel elle ne pouvait agir ? Ne faire confiance à personne… Comment pouvait-elle ne faire confiance à personne ? Cet idée arrivait précisément au moment où elle travaillait dans l’autre sens, elle essayait de ne pas perdre confiance dans les gens autour d’elle. Elle ne pouvait se résoudre à entièrement ôter sa confiance en ses amis, au moins envers Leanne, Ambre, et Alexandre…
- Il y a quelque chose de changé en toi, murmura Nathan.
Lui aussi fixait l’index de Vanille, mais il ne parlait pas de sa cicatrice. Elle lui lança un regard à la fois mécontente d’être dérangée dans ses réflexions, et curieuse de ce qu’il entendait par là.
- Je n’arrive pas à saisir le fil de tes pensées. J’y arrivais pourtant de mieux en mieux, plus on se rapprochait.
Elle rougit stupidement.
- Je n’arrive plus à saisir que des bribes. Je me demande pourquoi. Comment t’es-tu faite cette cicatrice ?
Elle resta silencieuse, reporta son regard sur son doigt, qu’elle abaissa, puis fixa le lac. Devait-elle écouter les messagers, et ne rien dire à personne sur ce qu’elle vivait ? Elle sentait que ce qui lui arrivait devait rester secret. Non pas par fierté d’avoir été choisie, mais parce qu’elle prenait pleinement mesure de l’importance des événements. Le danger était réel, cette histoire dépassait de loin tout ce qu’elle pouvait vivre ici, à Poudlard et au Club des Créateurs.
- Tu ne veux rien me dire et je ne te forcerai pas. Mais je dois quand même insister sur une chose, Vanille. Je dois te parler d’Alexandre.
Elle lâcha un soupire râleur, avant de se reprendre. Elle le regarda alors droit dans les yeux. Depuis le début, elle savait que Nathan n’aimait pas Alexandre, mais il n’avait jamais été plus loin que le fait de refuser de parler de leur couple ou de rester lorsqu’ils travaillaient ensemble - pour Revelavis par exemple. Il ne s’était jamais immiscé dans leur histoire, n’avait jamais clairement dit les choses. S’il insistait aujourd’hui, il devait avoir ses raisons, et de sérieuses raisons.
- Il ne m’a pas menti, au contraire, il m’a tout avoué. Ses ventes illégales de potions au marché noir de l’allée des embrumes…
- Je sais. Mais il a dit une phrase, et dans sa voix résonnait le mensonge. Cela ne concernait pas ses stupides affaires. C’était bien plus intense que ça.
- Et qu’est-ce qu’il a dit ? soupira encore une fois Vanille.
- “Jamais je ne mettrai la vie de quiconque en danger.”
La vie de quiconque en danger ? Pourquoi aurait-il…
- J’ai senti quelque chose, lorsqu’il a prononcé cette phrase, et c’est pour ça que j’insiste, Vanille. J’ai senti quelque chose en lui, quelque chose de mauvais, et j’ai peur que…
- Tu te trompes.
Elle secoua la tête. Il était hors de question qu’ils aient ce genre de discussion. Qu’il aille plus loin.
- J’ai confiance en lui.
- Et moi j’ai peur pour toi. Dès que tu te retrouves seule avec lui, surtout maintenant que je sais qu’il est dangereux…
- Il n’est pas dangereux ! s’étrangla-t-elle. Tu ne sais même pas de quoi tu parles ! Tu ne comprends pas tous tes pouvoirs, d’ailleurs ils ne marchent plus sur moi, comment veux-tu que je crois ce que tu dis ? Pourquoi voudrais-tu que je te crois plus que lui ?
- Laisse-moi une chance. Une chance de te prouver que ce que je dis est vrai. S’il te plaît, Vanille, supplia-t-il, je ne te dis pas tout ça à la légère, par stupide rancoeur, par jalousie ou je ne sais à quoi tu penses. Laisse-moi une chance de te prouver que tu dois te méfier de lui, et si je me trompe, alors je te laisserai tranquille.
- C’est comme si tu me demandais de choisir entre lequel de vous deux je dois faire confiance.
- Si après ça tu décides de le croire lui, alors je me retirerai de ta vie, Vanille.
Un choc passa dans son dos.
- Quoi ? Pourquoi ?
- Pour que tu comprennes l’importance de la situation.
- Mais je n’ai pas envie de… Que tu… Enfin, tu es prêt à remettre en cause notre… notre amitié pour un simple doute ?
Il la fixa, et elle vit une colère froide passer dans ses yeux.
- Oui.
Maladroitement cachés par un sortilège de désillusion et par les pouvoirs de Nathan, Vanille et lui attendaient en haut de la tour Nord près du portrait de la grosse dame qui cachait l’entrée de la salle commune des Gryffondor. C’était le milieu de l’après-midi, la plupart des élèves étaient en cours, et Alexandre, si Vanille se souvenait bien, avait encore plusieurs heures de cours devant lui. Le silence régnait autour d’eux. Un silence accusateur.
Au bout d’une semaine de remarques discrètes et de regards réguliers de la part de Nathan, Vanille avait fini par craquer.
Elle était particulièrement énervée, et se demandait comment il avait fait pour lui faire accepter tout ça. Elle détestait cette situation, car elle ne pouvait amener rien de bon.
Si Nathan avait tort, ou s’il ne pouvait prouver qu’il avait raison, il avait promis de disparaître de sa vie, et cela, elle s’était rendu compte au moment où il avait prononcé ces mots qu’elle ne pouvait le concevoir. A force de travailler avec lui, il s’était développé entre eux un lien fort, un lien au-delà de la camaraderie, un lien différent même de l’amitié. Partager tous ces secrets, pouvoir communiquer sans barrière et sans filtre lorsqu’ils étaient en contact était une expérience hors du commun, et même s’il l’agaçait, souvent, même si elle n’arrivait pas toujours à le comprendre, elle avait pour lui une affection particulière et étrange. Il n’y avait jamais eu d’ambiguïté entre eux, et il n’y en aurait certainement jamais. Leur lien était intense et indéniable.
Et s’il avait raison… si Alexandre cachait quelque chose de bien plus grave que de vendre des potions au marché noir - et ce n’était pas vraiment grave, que se passerait-il ? C’était tout autant impossible à concevoir. Elle avait confiance en lui, elle le connaissait bien, elle connaissait ses emportements et sa passion, elle connaissait son passé difficile et les séquelles qui en avaient résulté, et surtout, surtout… Elle l’aimait.
Elle sentit l’espace d’un instant le contact qu’elle maintenait avec la peau de Nathan la brûler, et elle écarta son bras. Puis, elle se rapprocha :
“Il est encore temps de laisser tomber et de décider que tout ceci est ridicule.”
“Tu as accepté, alors tient ta parole. Je ne fais pas ça par plaisir, crois-le bien.”
“Tu fais ça pour quoi alors ?”
“Pour toi.”
Elle s’en serait bien passé. Elle comprenait qu’il préférait dans le doute risquer qu’elle le perde lui, plutôt que de ne risquer un quelconque danger - qui n’existait pas, elle le savait - s’il y avait quoi que ce soit à reprocher à Alexandre. Au fond, tout au fond, quelque part dans son déni, elle lui en était reconnaissante, et lorsque cette histoire ridicule serait terminée, il était hors de question qu’elle le laisse partir loin d’elle. S’il fallait jouer ce jeu pour rassurer Nathan, alors soit. Même si cette situation l’énervait au plus haut point.
Le portrait qu’ils surveillaient s’ouvrit devant eux, et une bande de quatrième année en sortirent, ils se faufilèrent silencieusement dans l’espace libre avant que le tableau ne se referme et se jetèrent dans la gueule du loup. Heureusement qu’ils pouvaient se faire ignorer en plus du sortilège de désillusion, qui n’était pas très efficace lorsqu’ils étaient en mouvement.
Elle le tira par la manche pour lui indiquer le chemin du dortoir d’Alexandre. Elle n’y était jamais allée mais l’avait vu plusieurs fois s’engouffrer dans l’escalier, lorsqu’elle lui rendait visite dans sa salle commune. Ils trouvèrent la porte sur laquelle “Septième année” était inscrit, et après avoir vérifié que personne n’était là pour la voir s’ouvrir, s’engouffrèrent dans le dortoir.
C’était un capharnaüm sans nom. Six lits disposés en cercle contre les murs entouraient une pile de vêtements, livres et valises ouvertes au centre de la pièce circulaire. Vanille fut sidérée du bordel improbable qui régnait dans la pièce. Pas un lit n’était épargné. Ces six-là devaient particulièrement bien s’entendre pour partager un tel environnement. Elle n’avait jamais imaginé Alexandre vivre dans un tel endroit, lui si sérieux dans son travail, si exigeant envers lui-même et les autres.
Elle repéra son lit aux quelques affaires qu’elle reconnu comme siennes, et le désigna à Nathan. Celui-ci s’en approcha et commença à observer, au début sans vraiment toucher, puis peu à peu en retournant les vêtements et parchemins pour voir ce qu’il y avait en dessous, tout en prenant soin de remettre les choses où elles s’étaient trouvées juste avant.
Vanille sentait un profond malaise s’insinuer en elle. La situation était bien plus grave qu’elle ne l’imaginait : à vouloir croire tout le monde, elle finissait par trahir Alexandre. Elle permettait à Nathan de faire ce qu’elle-même n’aurait jamais osé : violer sa vie privée. A ce moment précis, elle su qu’il était trop tard. Elle ne pouvait plus changer d’avis, elle ne raconterait jamais à Alexandre ce qu’il se serait passé ce jour-là, et il existait dorénavant un mensonge entre eux. Elle n’arriverait pas à se le pardonner.
Elle avait peut-être fait son choix au final, même si elle n’avait pas pris mesure des conséquences de cet acte lorsqu’elle avait accepté ce que Nathan avait exigé, elle avait choisi de ne pas le perdre lui, et pour cela avait posé un pied au-delà de la limite à partir de laquelle elle méritait la confiance d’Alexandre. Elle avait égoïstement choisi de ne plus la mériter pour pouvoir garder celle qu’elle avait en lui.
Agacé par l’immobilisme de Vanille, Nathan lui jeta un regard accusateur.
- Parce que tu croyais que j’allais en plus fouiller moi-même ses affaires ? chuchota-t-elle. Qu’est-ce que tu cherches au juste ?
- Je ne sais pas, fit-il sans cesser sa perquisition, le nez froncé dans une pile de chaussettes, une preuve, une lettre, un journal, une note n’importe quoi.
Elle regarda ailleurs, un peu perdue.
- Ce garçon te cache quelque chose, Vanille, et je te le prouverai.
Ils restèrent ainsi un long moment. Il fouilla chaque recoin, chaque tiroir, chaque poche de robe avec minutie et précision, il tira une valise et des sacs de sous le lit, et à chaque étape qu’il franchissait, chaque fois qu’il s’enfonçait plus profondément dans la valise ou dans les placards, elle sentait son malaise s’accentuer. De temps en temps, elle l’entendait murmurer “Certain… Quelque chose… Une lettre…”, ses gestes étaient de plus en plus saccadés, stressés. Il désespérait d’enfin trouver ce qu’il cherchait. Il se mit à lire sans aucune gêne tous les mots, tous les cours qui lui passaient sous la main, et Vanille finit par ne plus vouloir regarder, elle fixa le vide, attendait que ce mauvais moment passe enfin.
Au bout d’une heure, Nathan se releva de la valise qu’il venait de vider, la remit en état et la fit glisser presque violemment sous le lit. Il resta debout plusieurs secondes, les poings serrés. Vanille, qui s’était assise sur le lit, se leva à son tour.
- On devrait y aller, murmura-t-elle.
Elle ravala tout ce qu’elle pouvait ressentir en ce moment précis - l’angoisse d’être découverts, la honte d’avoir agit ainsi, la colère contre Nathan qui lui avait fait subir tout cela en vain. Lui sembla un instant réfléchir à toute vitesse, ses yeux passèrent dans tous les recoins possibles, cherchant là où il aurait pu ne pas regarder, puis capitula.
Ils amorcèrent un mouvement pour sortir, lorsqu’ils se figèrent devant ce qu’ils redoutaient le plus : la poignée de la porte s’abaissa, et celle-ci s’ouvrit.
Paralysée, elle vit au ralenti une silhouette apparaître dans la pièce, et simultanément, sentit un choc dans son dos et une pression l’entourer. Les bras de Nathan l’enlaçaient avec une force peu commune. Alexandre apparu en entier et elle entendit dans son esprit : “Ne - bouge - pas.”
Ses yeux s’exorbitèrent de peur. Sa respiration s’arrêta. Alexandre, lorsque son regard balaya la pièce, s’immobilisa une seconde puis referma la porte. En silence, sans jeter un regard à Vanille et Nathan debouts devant son lit, il les contourna et jeta son sac au sol avant de chercher des notes éparpillées au sol.
Elle pouvait entendre les secondes passer. Comment Nathan arrivait-il à les isoler ainsi ? Elle se souvenait parfaitement de ce qu’il lui avait révélé sur les limites de son pouvoir : moins il y avait de personne, plus il était difficile de s’isoler. Et englober quelqu’un dans son champs d’action était un exercice particulièrement difficile. Alexandre était à quelques pas d’eux, concentré sur des quelconques notes de cours, et il n’avait pas conscience de leur présence.
Une goutte de sueur tomba de son front. Son front à elle, ou à Nathan, elle s’en savait rien. Elle sentait son souffle régulier sans sa nuque, son coeur battre contre son dos. Sa peau se hérissa de frissons. Au fond de son esprit résonnait l’ordre, clair, ne pas bouger.
Elle regardait Alexandre et son coeur se serrait. Il ne méritait pas cela. Il n’avait rien demandé à personne, il était quelqu’un de bien. Et elle ne voulait pas être celle qui amorcerait leur séparation. Car cette situation était grave, elle ne saurait garder ce secret bien longtemps. Elle était incapable de vivre cette relation en gardant le silence, en lui mentant ouvertement, alors la solution était simple, il fallait tout arrêter maintenant et se confronter à son jugement. C’était son droit de décider maintenant s’il voulait toujours partager ce lien avec elle après ce qu’elle avait fait, elle n’avait pas ce droit. Elle était en faute. Elle devait assumer. Elle n’avait qu’à s’extirper des bras de Nathan et le laisser s’isoler seul.
“Ne fais pas ça.”
Le ton qui résonna dans son esprit était sans appel, autoritaire. Nathan refusait net ce qu’elle venait d’envisager.
“Si quelqu’un doit assumer, c’est moi. Mais pas maintenant. Pas encore. Il reste encore un endroit à vérifier.”
“Tu restes persuadé, après tout ça…”
“S’il te plaît, une toute, toute dernière fois, fais-moi confiance. Et laisse-moi me concentrer.”
Elle abdiqua et obéit. Il ne comptait pas abandonner. Il avait senti ce mensonge, cette malhonnêteté dans ces mots. Depuis des mois, des années maintenant qu’il le connaissait, Nathan n’avait jamais eut confiance en Alexandre. Quelque chose clochait en lui, une part sombre le contrôlait, l’habitait. Mais il n’avait rien dit, il n’avait aucune preuve, il savait c’était tout. Mais là, enfin, il avait vu la faille et s’y était engouffré. Il n’aurait jamais fait cela s’il ne s’agissait pas de Vanille. Il arriverait à prouver qu’il avait raison, il fallait qu’il l’aide à se protéger elle-même contre ce garçon. Il détestait la savoir avec ce menteur, ce manipulateur, il détestait qu’elle lui fasse confiance, il détestait qu’elle l’aime, et il le haïssait lui de plus en plus.
Il avait beau ne pas comprendre tout ce que ses pouvoirs lui montraient, il savait qu’elle était bien plus que ce qu’elle paraissait, bien plus qu’une simple socière étudiant à Poudlard. Leur lien s’était renforcé ces derniers mois, et il n’avait jamais vu une once de mauvaise intention en elle, il avait senti ses pouvoir magiques grandir, et il savait ce qu’elle était destinée à être, c’était pour cela qu’il avait insisté pour l’avoir parmi eux au Club. Et cela même si depuis quelques jours, un voile s’était glissé dans son esprit, comme pour la protéger d’un secret qu’elle ne pouvait partager. Ce n’était pas un voile sombre, au contraire, c’était un voile de lumière. Il aurait pu chercher en elle en ce moment, il pourrait tenter de comprendre ce qu’elle vivait, mais cela signifiait de relâcher sa concentration, et c’était hors de question qu’Alexandre découvre ce qu’ils faisaient, qu’il soit sur ses gardes et détruise les preuves de sa malhonnêteté. Il ne la forcerait pas à révéler ce qui se passait dans sa tête. Il attendrait qu’elle lui parle de ces deux créatures noires qu’il avait vu surgir, une fois, devant ses yeux.
Qui étaient présentes dans la pièce. Là, tout de suite.
Vanille sentit la chaleur de son corps s’évanouir. Les deux êtres noirs étaient apparus devant elle, dans le pire moment qu’elle pouvait imaginer. Mais ils ne restèrent pas. Aussi vite qu’ils étaient apparus, ils s’évanouirent, et dans les esprits de Vanille et Nathan résonna une phrase.
Premier enseignement.
Soudain, Alexandre se leva, provoquant un infime sursaut chez Vanille. Il hésita un moment, un peu étonné, regarda dans le vide. Puis, il posa ses notes et s’empara de quelques vêtements. Il se dirigea vers la pièce du fond, dont il referma la porte derrière lui. Ils entendirent de l’eau couler.
Elle amorça un mouvement pour se libérer mais il resserra son étreinte, et elle entendit un loquet se fermer. D’