Poudlard, été 1944
"L’influence de Grindelwald en Europe de l’Est inquiète la population sorcière anglaise. Le nombre de ses partisans ne cesse de croître et il est dorénavant impossible de faire l’impasse sur les événements survenus à New York et Paris, il y a maintenant plus de 10 ans de cela. Alors que la guerre moldu continue, le monde sorcier tremble de terreur devant la menace d’une guerre sorcière. Quelqu’un, pourrait-il mettre fin aux agissements de ce mage noir ? Combien de temps encore…"
Un mouvement de baguette agacé mit brutalement fin au reportage. Grindelwald. Ce nom était sur toutes les lèvres, la radio ne parlait plus que de lui, les foules aussi d’ailleurs. Apparemment, le ministère de la magie anglais s'était enfin réveillé de leur engourdissement de ces dernières années. Beaucoup de bruit certes, mais aucune action concrète. Vraiment pathétique.
Enfermé dans ses appartements à Poudlard Albus Dumbledore réfléchissait intensément. Dans sa main droite pendait une fine chaîne d’argent au bout de laquelle une petite fiole se balançait doucement tel un pendule. Il allait devoir s’y mettre et tenter d’arrêter Grindelwald, c’était une évidence. Mais une évidence difficile pour Albus qui soupira. Oui, bien sûr qu’il devait faire quelque chose contre Gellert, mais malgré les années passées depuis que le jeune Dragonneau lui avait ramené la fiole qui liait sa vie à celle de son ancien amant, il n’avait toujours pas réussi à s’en débarrasser. Il avait la sensation qu’il lui manquait quelque chose, comme une pièce de puzzle refusant de compléter l’ensemble. Il soupira de nouveau, la tête entre les mains. Il manquait quelque chose, indubitablement, mais quoi ? Le sorcier n’avait toujours pas de réponse à cette question, et ce, malgré les nuits sans sommeil passées à réfléchir et réfléchir encore. Par les caleçons de Merlin personne d’autre que lui ne pouvait donc s’occuper de ce problème. Pourquoi devrait-il forcément s’y coller ? De part le monde sorcier, il devait bien exister quelqu’un d’autre capable de la vaincre.
« Gellert est ton problème Albus, le tiens uniquement le tien. »
La voix de sa conscience raisonna douloureusement à l’intérieur de son crâne. Gellert Grindelwald était son poison, sa malédiction et la croix à porter pour réparer tous ses péchés. Ses péchés qui le rongeaient petit à petit comme de l’acide. Resterait-il quelques miettes de son cœur à la fin, il en doutait. Et ce maudit lien qui refusait obstinément de se rompre. De colère Albus jeta la fiole qui atterrit sur le sol dans un claquement sourd qui résonna dans tout l’appartement silencieux, avant de rouler sous le bureau.
Le professeur de métamorphose ferma un instant les yeux, comme épuisé, les épaules voûtées. Il soupira une nouvelle fois le cœur lourd et se baissa pour récupérer le précieux collier. Ses doigts rencontrèrent un tissu rêche et usé. Perplexe il tira la chose à lui et découvrit un vieux sac de jute crasseux et poussiéreux. À l’intérieur reposait une enveloppe à son nom, des liasses de parchemins enroulées soigneusement et une petite bassine en pierre.
Le cœur battant à coups redoublé, il saisit l’enveloppe légèrement jaunit par le temps. Se pouvait-il que la solution à son problème se trouvât là sous ses yeux, dans sa propre chambre. Avait-il raison d’espérer ou bien ses illusions seraient-elles brisées, une nouvelle fois. Les mains tremblantes, le souffle court Albus Dumbledore saisit le feuillet de la lettre et commença sa lecture :
Cher Monsieur Dumbledore,
Je ne sais même pas comment commencer cette lettre. Existe-t-il quelque part en ce monde une formulation polie et adaptée pour ce que j’ai à vous dire. Je ne le crois pas. Vous et moi ne nous connaissons pas, il me semble même que ne nous, ne nous sommes jamais croisés et pourtant comme je viens à peine de le découvrir, nos destinées sont liées l’une à l’autre.
J’ai bien conscience que mes propos doivent vous paraître soit terriblement fantaisistes soit particulièrement cavalier, mais sachez que si je me permets de vous contacter et ce dans le plus grand secret, c’est bien Mr Dumbledore parce que nous avons quelque chose en commun, ou plutôt quelqu’un : Gellert Grindelwald.
C’est une partie de moi et de mon histoire que j’aimerais définitivement enterrer. Malheureusement, je ne peux pas, pas encore du moins. Car cette histoire, mon histoire, il faut bien que je la raconte à quelqu’un.
Pourquoi moi me diriez-vous. Eh bien, à cela, je répondrais que vous êtes peut-être la personne que Gellert craint le plus au monde. Depuis que son collier ensorcelé à disparu, il n’est plus le même. La peur semble lui coller à la peau comme une ombre.
Vous êtes probablement la seule personne à pouvoir l’arrêter, moi, je ne peux pas. Je ne peux plus. De toute façon à l’heure où vous lirez ces lignes, je serais probablement morte depuis longtemps et bien que la peur me paralyse, j’ai l’intuition que vous aurez besoin de cette histoire, mon histoire pour faire basculer la balance en votre faveur. Alors en dépit de la honte et de la culpabilité qui me colle à la peau depuis longtemps, je vais vous raconter comment ma naïveté et quelques gouttes d’Amortentia, on détruit ma vie aussi sûrement qu’un sortilège impardonnable.
Ne me jugez pas trop sévèrement, je vous en conjure. Le poids de ma culpabilité est déjà bien assez difficile à porter comme cela. C’est quelque chose que vous pouvez comprendre, je crois.
En espérant que vous puissiez débarrasser le monde de ce fléau,
Bien à vous,
Séléna Black
P. S : j’ai joint à cette lettre, les feuillets de ma vie ainsi que la pensine de Grindelwald que je lui aie dérobé. Faites-en bonne usage. Oh et sans vouloir vous dicter votre conduite, je vous suggère fortement de commencer par mon histoire et de ne vous intéresser à la pensine que par la suite.
Eh bien, voilà un rebondissement des plus étonnant. Qui était-elle, cette femme ? Était-elle réellement la réponse à toutes ses interrogations ? Son nom lui était bel et bien inconnu. Étrange pour quelqu’un qui se targuait de connaître la communauté sorcière anglaise sur le bout des doigts. Une Black de surcroît ne pouvait surgir ainsi sans que personne n’en ai entendu parler. C’était tout bonnement irréaliste. À moins que….
Non-mieux valait ne ne pas élaborer de théorie pour le moment. Ne pas monter de conjecture qui pourrait s’avérer erronée. Non, la seule chose raisonnable à faire, était de découvrir ce que cette Séléna avait à raconter.
En saisissant la liasse de parchemins contenue dans le sac Albus ne put s’empêcher de penser qu’avec un peu de chance son calvaire prendrait bientôt fin. À moins au contraire qu’il ne fasse que commencer.