La Plume Enchantée by Juliette54
Summary:

Bellatrix emporte Andromeda dans son combat pro-sorcière, Bhanu l’entraîne dans les couloirs de La Plume Enchantée, société secrète à Poudlard depuis des décennies. Que restera-t-il de ses convictions ? Que restera-t-il de la peinture de Lucina ? Que restera-t-il de ces yeux merveilleux qu’elle voulait suivre au bout du monde ? « Ted, où es-tu ? » 

 

La Plume Enchantée

 

(dessin personnel)


Categories: Biographies, Durant Poudlard, Tedromeda (Ted/Andromeda) Characters: Andromeda Black
Genres: Amitié, Aventure/Action
Langue: Français
Warnings: Aucun
Challenges: Aucun
Series: Mesdames et Mesdemoiselles Black
Chapters: 4 Completed: Non Word count: 22546 Read: 1755 Published: 09/04/2021 Updated: 30/05/2021
Story Notes:

Coucou :) 

La fic sera centrée sur Andromeda Black-Tonks, personnage ô combien fascinant (vous savez, la cousine préférée et reniée de Sirius, la mère de Nymphadora, la grand-mère de Teddy) ! J'ai l'idée de cette fic depuis un moment, je l'ai arrêtée, re-réécrite, re-arrêtée, et comme les sélections sont bientôt en son honneur, c'est l'occasion de la reprendre vraiment. Pour le moment, j'ai le prologue, le chapitre 1, le 2, un morceau du 3, le plan et des morceaux par-ci, par-là, donc clairement la publication ne sera pas très fréquente mais les chapitres seront plutôt longs (le premier fait environ 10 000 mots, le deuxième 7000 mots) de quoi patienter jusqu'au mois prochain. C'est mon objectif pour l'instant, un chapitre par mois, avec un peu de chance, j'arriverai à finir le chapitre 3 pour le mois de mai. Et bien sûr qu'il y aura de la romance avec Ted, mais je n'ai pas envie que ce soit le coeur de la fic  (retenez-moi si ça le devient s'il vous plaît!), même si ce sera un personnage important, mais pas tout de suite. 

1. Prologue by Juliette54

2. 1. Réception indienne by Juliette54

3. 2. Retour explosif by Juliette54

4. 3. Boudicca, sorcière rebelle by Juliette54

Prologue by Juliette54
Author's Notes:

Le prologue est au présent, la suite sera au passé. Bonne lecture :)

 

Teddy Lupin n’a jamais vu sa grand-mère porter une autre couleur que le noir ou le bleu nuit. Elle dit qu’elle porte le deuil du grand-père dont il tient son prénom. Du haut de ses cinq ans, Teddy pense que c’est plus profond. Il pense qu’elle porte le deuil de toute sa vie passée. D’une partie de sa vie qu’elle a aimée mais qui n’a pas duré assez longtemps. Parfois, sur certaines photos où elle se trouve avec son grand-père, il a l’impression que ses robes étaient déjà de cette couleur.

Et qu’elles cachaient déjà la moindre surface de sa peau blême.

Comme si sa grand-mère voulait se cacher derrière ses vêtements.

Parfois, Teddy se dit qu’elle est trop exigeante avec elle-même. Mais cela ne dure pas longtemps car l’instant d’après, sa grand-mère lui fait des chatouilles sous lesquelles il pourrait mourir de rire sans regret.

Car Teddy sait déjà ce que c’est que mourir. La mort, il sait ce que c’est. Le mourir, le fait de mourir, un peu moins, mais il en connait les effets.

Sa mère est morte depuis toujours.

Son père est mort depuis toujours.

Son grand-père est mort depuis toujours.

Et il voit tout cela sur sa grand-mère dont les yeux gris sont couleur de larme lorsqu’elle lui parle de sa maman, lorsque la pleine lune brille à travers le carreau de la fenêtre, lorsqu’elle regarde des photos de son mari.

Mais ce soir, à présent qu’il a cinq ans depuis peu, il voit au-delà son air sérieux et grave qu’elle garde en toutes circonstances. Il voit que cette gravité ne la quitte jamais et ça le rend triste.

Car parfois, il aimerait comprendre pourquoi elle est si sérieuse et si intelligente sa grand-mère. Alors il va lui en parler sur le ton de la plaisanterie, comme il sait le faire. Il parait que sa mère faisait pareil.

.

.

Dromeda Tonks voit combien ce soir son petit-fils est silencieux. Elle voit qu’il est perturbé par quelque chose dont il n’ose pas lui parler. Mais elle sait aussi qu’il ne faut pas le brusquer ni même lui poser la question au risque de le voir se fermer comme une huître. Elle attend et monte le coucher sans un mot. Elle ne lui propose pas de raconter une histoire, car elle sait qu’il va finir par cracher le morceau, comme disait Ted. Elle le borde.

« Tu es trop intelligente, Grand-mère, finit-il par dire. Je ne comprends pas pourquoi tu es allée à Serpentard ! Tu aurais dû aller à Serdaigle ! »

Dromeda se sent revenir un quart de siècle plus tôt. Elle entend la voix de sa fille, de sa Nymphadora, dire la même chose à quelque chose près à son mari, alors qu’elle-même, elle est dans l’embrasure de la porte de la chambre de sa fille, de cette même chambre, et qu’elle contemple sa famille.

« Je ne comprends pas pourquoi le Choixpeau à envoyé maman à Serpentard, songeait Nymphadora. Elle est beaucoup trop intelligente ! »

Elle se surprend à sourire avec une véritable tendresse couplée à une joie insensée à son petit-fils.

« Ta mère n’est pas assez sage pour appartenir à la maison Serdaigle, jeune fille ! avait dit Ted après avoir explosé de rire. »

« Je ne suis pas assez sage, ni assez sérieuse, souffle-t-elle à Teddy en lui souriant mystérieusement. »

 

End Notes:

C'est tout pour le prologue, je mets le chapitre 1 demain, et le 2 dans dix jours. 

Si vous voulez la généalogie de la Maison des Black, j'ai recopié l'arbre de JK et je l'ai mis en lien sur mon profil. 

Merci d'avoir lu ! Et à très vite j'espère ! 

1. Réception indienne by Juliette54
Author's Notes:

Comme promis, voilà le chapitre 1. Il se passe durant les vacances précédant la sixième année d'Andromeda. 

Merci Zandry et Calixto pour vos reviews très encourageantes, adorables et pleines de compliments ! J'espère que vous aimerez la suite

Bonne lecture :)

Chapitre 1, Réception indienne

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Août 1969,

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Andromeda Black releva le regard afin de pouvoir contempler son visage pâle aux grands yeux gris perle ourlés de cils d’un noir profond dans le miroir. Elle avait le visage fier des Black et la délicatesse des Rosier, et elle s’en enorgueillissait.

Sa boucle d’oreille droite ornée d’un saphir et de petites pierres d’obsidienne rentrait très légèrement vers l’intérieur, alors elle la replaça avec un regard entendu pour son reflet. Elle vérifia que sa tresse tombait élégamment sur son épaule, qu’aucun brin de cheveux ne dépassait puis alla ouvrir son armoire.

Pour la féliciter de ses excellents résultats à ses BUSES, sa mère s’était empressée de l’accompagner sur le Chemin de Traverse afin de lui offrir une tenue complète. Andromeda l’avait choisie bleu roi, pour changer. 

L’horloge du Grand Salon tonna sept fois, ce qui indiqua à Andromeda qu’il lui faudrait descendre au premier étage dans quelques minutes pour se rendre à la réception annuelle en l’honneur de l’alliance indo-britannique sorcière.

Avec un sourire entendu pour elle-même, elle sortit l’immense boîte ronde en velours de son armoire avec ravissement. Elle la posa sur sa commode et l’ouvrit délicatement. Elle jeta le couvercle avec désinvolture sur son lit, et plongea les mains dans le velours émeraude pour en ressortir son ravissant chapeau bleu orné d’un ruban de satin brodé d’argent. Après trois pas vers la droite pour se rapprocher de sa coiffeuse, elle se regarda déposer le chapeau sur le haut de sa tête. Elle arrangea la pointe pour qu’elle retombe très légèrement et avec grâce et se permit un nouveau sourire.

Parfait. Ou plutôt, parfaite.

« Entrez, permit-elle à la personne qui frappait à sa porte. 

— Sublime, corrigea la voix de sa mère après être entrée dans la chambre de sa cadette.

— Merci, mère, dit-elle en se retournant vers la sorcière blonde. »

Druella Black la regarda de haut en bas en plissant ses lèvres rouge sang dont seule Andromeda avait hérité.

« Je n’aurais pas dû laisser Mrs Guipure échancrer autant ta robe et ton corsage, fit Druella. Tu n’es pas encore majeur. Je n’ose penser ce que ton père va dire. »

Andromeda retint une expression de surprise.

« Mère, j’ai obtenu mes BUSE, je suis sur l’année de mes dix-sept ans, il est temps que je mette ma féminité en avant, se permit-elle de rappeler.

— Certes, en convint sa mère en penchant légèrement la tête en avant. Mais garde-toi de trop en montrer. »

Andromeda écarquilla les yeux et se demanda si sa mère évoquait vraiment ce qu’elle avait compris.

« Mère, je… commença-t-elle mais elle se tut au mouvement ferme de la main de sa mère.

— Tu vois très bien ce dont je veux parler, Andromeda, reprit-elle en fermant la porte de sa chambre. »

Elle fit signe à sa fille de s’asseoir sur son lit et vint la rejoindre.

« Tu as de bonnes fréquentations, Lucina Rowle, Chiara Runcorn, Iphigénie Shafiq, Timothée Selwyn, Marcus Parkinson. Même Jugurtha Craggy semble moins fourbe que ses ancêtres, concéda-t-elle en lui remettant une mèche de cheveux imaginaire derrière son oreille. Mais les gens changent, et certains prennent parfois… de mauvaises voies. »

Andromeda se souvint du trou de brûlure à la place du portrait de son ancêtre Isla sur la Grande Tapisserie.

« Ces mauvaises voies auxquelles tu penses, je sais que tu ne les prendras pas, la rassura sa mère avec un léger hochement de tête. Je parlais de mauvaises voies, disons, morales. Tu n’es plus une petite fille. Tu es une femme, Andromeda, et c’est tout à fait normal que tu souhaites te mettre en valeur, chercher à plaire, fit-elle en insistant sur ce dernier mot. »

Sans qu’il n’y est de raison, ou plutôt, sans avoir personne de précis en tête, Andromeda se sentit néanmoins rougir.

« Je suis une Black, je n’ai pas besoin…

— … d’atours pour plaire ? finit sa mère en haussant un sourcil. Bien sûr que non, mais tu es une belle jeune fille, coquette comme toutes les jeunes filles. »

Andromeda faillit lui parler de Laura Patterson avec qui elle partageait son dortoir et qui revêtait de robes si élimées et si difformes qu’Andromeda pensait parfois qu’il s’agissait de robes d’homme. Mais elle s’abstint. Ce n’était pas une jeune fille de haute lignée après tout. Sang-Mêlée qui plus est.

« Reste prudente, ne put que lui conseiller sa mère. Je vois que tu es toujours très chaleureuse avec Bhanuprasad Patil, le fils de l’ambassadeur Indien avec lequel ton père discute au ministère. Mais les garçons… »

Andromeda n’osa pas briser le silence que sa mère laissait s’établir. Elle avait entendu des choses ici ou là, et ça lui suffisait. Elle aimait se sentir belle pour elle-même avant tout, pour voir que la beauté ne résidait pas que dans les mots, les dessins et les œuvres d’art. Elle aimait voir la beauté humaine. Pour être tout à fait honnête, elle aimait aussi qu’on lui dise qu’elle était belle, et sentir les yeux des sorciers et des sorcières glisser sur sa taille fine et son visage délicat, ou au contraire, rester bloqués sur sa personne, sublime, comme l’avait dit sa mère.

« Ah ma chérie, les garçons sont trop curieux lorsqu’ils grandissent, en conclut sa mère. Ne les laissent pas s’approcher trop de toi. »

Andromeda fronça les sourcils avant de lui sourire.

« Mère, ne vous faites point tant de souci. Que pourraient-ils me faire ? Ils savent que ma baguette est rapide.

— Et ne t’approche pas trop d’eux, toi non plus, précisa sa mère en se levant. »

La voix d’Andromeda mourut dans sa gorge. Ne pas s’approcher des garçons ? Alors qu’elle l’avait fait jusqu’à maintenant ? Bah, quelle drôle d’idée.

« Vous ne voulez plus que je fasse la conversation à Bhanuprasad lorsque père invite la famille Patil dans notre maison de campagne ? s’étonna Andromeda. C’est pourtant quelqu’un de charmant, toujours aimable et bienveillant avec moi.

— Vraiment ? fit Druella Black avec un semi-étonnement. N’est-il, justement, point trop prévenant ?

— C’est un ami fidèle, il va donc de soi qu’il soit prévenant envers moi, fit-elle en s’amusant déjà du chemin que prenaient les pensées de sa mère. En y pensant, Lucina est tout aussi aimable avec moi. »

Elle regarda le visage de sa mère à la recherche d’une réaction, mais Druella Black resta de marbre. Seule quelqu’un qui la connaissait pouvait remarquer l’angle de sa mâchoire un brin plus saillant qu’à l’ordinaire. Andromeda garda un visage ingénu et attendit avec un sourire innocent que sa mère reprenne la parole.

« Tout est donc pour le mieux, répondit Druella sans lâcher sa fille des yeux. Es-tu prête ? Nous prenons la poudre de Cheminette d’ici une dizaine de minutes.

— Il me reste à me chausser, et je vous rejoins, annonça Andromeda sans se départir de son sourire. »

Sa mère se leva du lit à baldaquin et se dirigea royalement jusqu’à la porte.

« Pense à prendre une cape légère, Andromeda. La grise se mariera parfaitement bien avec la teinte de ta robe.

— Bien sûr, mère, acquiesça-t-elle avec un léger hochement de tête. »

Druella ouvrit la porte pour disparaître derrière et Andromeda se permit enfin de rire. C’était si facile de déstabiliser sa mère. Se faire passer pour innocente évitait bien des situations désagréables. Elle n’était pas une spécialiste en la matière, mais dans les dortoirs de Poudlard, on finissait par comprendre les rudiments des relations humaines. Mais c’était si drôle de voir ses propres parents se dépêtrer avec ces sujets qu’ils jugeaient inconvenants en public, qu’Andromeda ne pouvait s’empêcher de répondre avec une naïveté idiote. C’était encore plus drôle avec Cissy et Bella. Elles la prenaient pour une débutante (ce qu’elle était), mais surtout pour une petite fille sans cervelle, et c’était amusant de les voir se retenir de soupirer d’exaspération.

Elle se regarda hausser les épaules dans le miroir à pied et se leva en souriant. Après avoir ouvert à nouveau son armoire, elle en tira sa cape d’été qu’elle passa sur ses épaules rapidement pour la boucler. Le bouton argenté brilla un instant sous la lumière des bougies du chandelier. Mais avant de suivre sa mère à l’étage inférieur, elle ouvrit sa table de chevet et en tira un petit carnet et un crayon à dessin qu’elle glissa dans la poche intérieure de sa cape. Sa baguette touchait son avant-bras dans la manche de sa robe, il ne lui manquait plus rien, si ce n’est des chaussures. Elle ouvrit sa commode et choisit une paire d’escarpins du même bleu que sa robe, agrémentés de dentelles argentées et de pierres précieuses. Elle les enfila en un rien de temps, vérifia une dernière fois dans le miroir que tout ce dont elle s’était revêtue était bien placé, et ouvrit la porte de sa chambre.

Les tentures vert-bouteille brodées de fils d’argent du palier du troisième étage du 12, Square Grimmaurd semblaient presque noires à cette heure-ci, si bien qu’Andromeda dût cligner des yeux pour s’habituer à la pénombre. Comme il n’y avait aucun bruit venant de la chambre de Cissy, ni même venant de la chambre de Bella, elle se décida à gagner le Grand Salon du premier étage, dans lequel la cheminée les mènerait dans la demeure de la famille Patil.

Tous les quatre, Bella, Cissy, Druella et Cygnus Black, l’attendaient en discutant avec Walburga. Ils l’attendaient. Elle aurait dû s’en sentir gênée, sa mère pinça d’ailleurs les lèvres, mais elle aimait bien qu’ils l’attendent. Elle se sentait attendue, certes, mais aussi aimée et se réjouissait même qu’ils désirassent sa venue.

« Je passe en premier, lui annonça son père. Druella, vous fermerez la marche. Souhaite une bonne fin de soirée à ta tante, Andromeda. Puis suis tes sœurs. Nous sommes attendus, rappela inutilement son père. 

— Je vous souhaite une très bonne fin de soirée, Tante Walburga, fit Andromeda en la saluant d’un mouvement de tête alors que Bella disparaissait déjà de la cheminée.

— Moi de même, Andromeda, grinça sa tante avec un sourire crispé sous ses grands yeux gris anthracite. »

La main de sa mère la dirigea vers la cheminée, et elle se saisit d’une généreuse poignée de poudre de cheminette.

« Ambassade indienne en Grande-Bretagne, s’exclama-t-elle en lâchant la poudre. »

Elle sentit un crochet lui attraper le nombril juste avant de décoller du sol puis de tourner, tourner, tourner. Son regard en alerte lui permit de voir tout le réseau de cheminette, tous les fils de magie reliés les uns aux autres. Un sourire en coin lui échappa en constatant à quelle vitesse son corps se déplaçait.

Elle garda ses mains croisées devant elle lorsqu’elle se sentit revenir dans une autre cheminée, plia les genoux pour supporter l’impact et atterrit en douceur dans l’immense cheminée de l’Ambassade indienne. Un pas plus tard, sa mère arrivait derrière elle. Tout était toujours semblable dans la demeure de la famille Patil, du carrelage bicolore, bleu foncé et bleu clair, aux motifs floraux qu’ils dessinaient sur le sol et les murs.

« Evanesco ! l’ensorcela sa mère pour qu’elle soit débarrassée de la suie de cheminée.

— Je vous remercie, mère, dit-elle en cherchant Bhanuprasad du regard. »

Elle le trouva presqu’instantanément et le salua d’un mouvement de tête accompagné d’un sourire avant de suivre son père.

« Hansaraj, mon ami, le salua Cygnus Black en joignant ses mains sous son menton et en s’inclinant légèrement. 

« Namasté, Cygnus, lui répondit immédiatement Hansaraj Patil avec des petits yeux pétillants. Druella, Bellatrix, Narcissa et… et Andromeda, énonça-t-il leur prénom en s’inclinant à chaque fois.

— Mr Patil, dirent-elles toutes les trois d’une seule voix en s’inclinant en même temps. »

En s’inclinant, Andromeda remarqua que Mr Patil portait des chaussures et s’en étonna. D’ordinaire, lorsqu’elle venait rendre visite à Bhanu ou que la famille Patil invitait Cygnus Black et sa famille à dîner, chacun enlevait ses chaussures à côté de la cheminée. Mais à côté de la cheminée, il n’y avait pas une seule paire de chaussures. Elle en demanderait la raison à Bhanu tout à l’heure.

« Mon épouse ne va pas tarder, Cygnus, leur apprit Hansaraj en claquant des doigts. »

Un elfe de maison apparut à l’instant pour les décharger de leurs capes. Andromeda lui donna volontiers la sienne. Puis elle se rappela qu’elle avait laissé son carnet et son crayon à dessin dans la poche de sa cape et se fustigea mentalement. Tant pis. Elle pourrait s’en passer durant une soirée. Le temps qu’elle cesse de ruminer, Girija, la mère de Bhanu, entrait dans le Grand Salon et les saluait à son tour. Avec ses talons hauts, Andromeda la dépassait de plus de deux têtes et elle se demanda à nouveau pourquoi elle ne devait pas enlever ses chaussures ce soir avant de se souvenir que chaque année, pour cette réception, les sorciers gardaient leurs chaussures, sans doute pour ne pas trop chambouler les plus vieux sorciers un brin nationalistes.

« Suivez-moi, les enjoignit Girija en leur indiquant d’un mouvement de main la porte qui menait au couloir. »

Andromeda laissa ses parents et ses sœurs passer devant elle afin de pouvoir saluer Bhanu, mais il lui fit signe d’y aller lorsqu’elle fit un pas vers lui. Elle haussa les sourcils, ne comprenant pas pourquoi il ne voulait pas lui parler, mais il se détournait déjà pour accueillir les invités suivant. Outrée, elle voulut s’élancer vers lui pour lui demander des comptes quand la petite main fripée de Girija se posa dans le bas de son dos pour la faire avancer.

« Andromeda, que t’est-il arrivée pour tu me dépasses de près de deux têtes ? lui demanda Girija dans son anglais au fort accent indien. »

Le petit sourire de Mrs Patil fit oublier le comportement de Bhanu à Andromeda et elle lui sourit en retour.

« Mère m’a offert ces chaussures en même temps que ma robe pour mes excellents résultats aux BUSES, lui répondit-elle dans un murmure en soulevant légèrement sa robe afin de découvrir tout à fait ses pieds.

— De très jolis escarpins, en convint Mrs Patil avec un sourire.

— Je vous remercie, fit-elle en laissant à nouveau sa robe cacher ses chevilles. »

Elle n’eut pas le temps d’en dire plus, Bellatrix venait vers elle avec un sourire sarcastique. Elle lui présenta son bras. Andromeda s’empressa d’y passer le sien et se laissa entraîner vers le centre de la salle de réception.

« Les Lestrange ne sont pas invités, les Rowle non plus. Donc je n’ai pas mon fiancé pour m’occuper, et toi, Lucina ne sera pas dans tes pattes pour nous gâcher une soirée morose et déprimante, attaqua-t-elle d’amblée en s’approchant du buffet à petits-fours. Cissy nous fait d'ores et déjà une tête de six pieds de longs parce que monsieur son amoureux secret n’est pas là, dit-elle avec une voix aigue, donc nous voici toutes les deux prêtes à danser avec des vieux croutons du ministère pour faire plaisir à père, ronchonna-t-elle un peu plus en se saisissant d’une coupe de champagne qui lévitait à côté d’elle. »

Elle but la coupe d’une traite avant de la laisser s’envoler à nouveau et d’en tendre une autre à Andromeda. Cette dernière l’imita, déjà amusée de l’entrain que mettait sa sœur à les noyer dans l’ennui pour la soirée à venir. Elle exagérait, bien évidemment, mais Andromeda se plaisait à la regarder s’agacer. Il y avait quelque chose de beau chez sa sœur, outre ce visage made in Black qu’elle portait toutes deux. Il y avait quelque chose de plus brute qui fascinait Andromeda.

« Rodolphus est mon fiancé depuis des mois, je ne vois pas pourquoi père a refusé qu’il m’accompagne ! râla-t-elle à nouveau en se saisissant d’un petit feuilleté au fromage qu’elle enfonça sans grâce dans sa bouche. Au moins, avec lui, je sais comment m’occuper !

— T’occuper ? s’étonna Andromeda. 

— Ne te fais pas plus cruche que tu ne l’es, Meda, s’agaça-t-elle un peu plus. Il y a des activités que je pratique avec Rodolphus que je ne pratique pas encore avec toi. »

Prude ou non, Andromeda ne savait pas vraiment interpréter les propos de sa sœur. Soit ces activités se résumaient à se dévorer la bouche, soit à fomenter des attaques de Moldus pour leur Seigneur des Ténèbres, ce type obscure dont parlait Bella depuis quelques mois mais que personne ne connaissait. Et dans les deux cas, Andromeda n’était pas intéressée pour y participer. Elle se sentit d’ailleurs piquer un fard en s’imaginant visiter les amygdales de sa sœur.

« Ne rougis pas comme ça, la rouspéta à nouveau Bellatrix en lui pinçant le bras droit. J’ai l’impression que tu vis au Moyen-âge, et encore, ils étaient moins chastes que nous, les sorciers, à cette époque. J’ai l’impression que les sorcières ne sont plus bonnes qu’à pondre des petits sorciers à leur mari chéri. Beurk, commenta-t-elle en recrachant un feuilleté aux pruneaux dans sa main qu’elle jeta ensuite sous la table avant de s’essuyer les mains sur la nappe. Mais ce n’est pas parce qu’on te demande d’avoir un mignon héritier que tu n’as que ça à faire de ta vie, reprit-elle avec une voix plus glaciale. Et Rodolphus est parfaitement d’accord avec moi, précisa-t-elle avec un ton suffisant. Il sait qui détient la meilleure matière grise d’entre nous deux. »

Andromeda ne se retint plus de rire et le son de sa voix couvrit un instant les discussions de la centaine de sorciers déjà présents. Ils se tournèrent d’ailleurs tous vers elle, et elle sentit Bella lui pincer à nouveau le bras.

« Arrête de me pincer, fit-elle avec un air mi-ennuyé mi-agacé.

— Alors ne te fait pas remarquer, la rembarra Bellatrix en la tirant par la main pour les mener plus loin. S’il nous aperçoit, ce vieux pervers de Macmillan va me demander de danser et il en profitera pour me peloter les fesses. Non, merci, cracha-t-elle en s’enfilant une nouvelle coupe de champagne. Attends au moins que je sois ivre et que je ne puisse plus m’en souvenir. »

Andromeda écarquilla les yeux en la voyant s’enfiler tout ce qui lui tombait sous la main. C’était à croire que Bella était véritablement répugnée par cette soirée.

« Tu exagères, Bella, fit-elle en choisissant avec soin un amuse-bouche à la tomate. La famille Patil est très accueillante et…

— Je ne te parle pas d’eux, par Salazar ! la coupa sa sœur en chuchotant furieusement. Ils sont bien aimables et bien gentils, si tu veux. Mais de tous ces vieillards en rut invités à cette soirée.

— Bella, s’indigna faussement Andromeda.

— Oh je sais que tu es d’accord avec moi, ne commence pas à redevenir Miss Androprude.

— Bella, s’outra-t-elle réellement en s’éloignant d’elle.

— Ne me laisse pas, la supplia Bellatrix en la retenant par le bras.

— Alors ne m’attife pas de ce surnom ridicule, riposta-t-elle aussitôt avec un regard noir.

— Alors cesse de paraître stupide, renchérit Bellatrix en lui tendant une nouvelle coupe.

— Ne…

— Toi…

— Bonjour Andromeda, la salua une voix qu’elle connaissait bien. Bonjour Bellatrix. »

Les deux sœurs tournèrent la tête vers ce grand échalas de Marcus Parkinson dont le sourire confiant fit grincer Bellatrix.

« Qu’est-ce que tu veux, Parkinson ? attaqua d’emblée Bellatrix. Ma sœur n’est pas disponible ce soir.

— Vraiment ? Il me semble qu’Andromeda ne danse pourtant pas, continua-t-il de sa voix trainante et assez séduisante selon Andromeda.

— Elle est occupée à éviter à sa sœur une explosion nerveuse à cause de tous ces mâles persuadés que les sorcières sont leurs petits joujoux sex… »

Andromeda lui enfonça une part de cake aux olives dans la bouche pour la couper dans sa tirade pro-sorcière. Bella lui retourna un regard tout bonnement explosif. Elle avait donc déjà fait son explosion nerveuse ? Elle n’avait donc plus besoin d’Andromeda, bonne nouvelle.

« Non, je ne danse pas, Marcus. Mais tu es sur le point de changer cet état des choses, lui apprit-elle en lui tendant la main pour qu’il y fasse un baisemain. »

Il la fixa dans les yeux, avec cet éternel sourire confiant plaqué sur son visage émacié, et Andromeda remarqua leur couleur brune plus foncée qu’ordinaire détailler son visage avec… Avec quelque chose qu’elle n’arrivait pas à saisir. Il approcha sa main de ses lèvres, avant de se pencher légèrement, sans la lâcher des yeux. Quand elle sentit les lèvres chaudes de son camarade se poser sur sa main, quelque chose de bizarre lui tordit le ventre, et elle lui envoya un regard de défi sans en savoir la raison.

« Vos désirs sont des ordres, Princesse Andromède, lui souffla-t-il avec un ton particulier sur le deuxième mot. »

Andromeda le fixa encore un instant avant qu’il ne pose sa main dans le bas de son dos pour l’entraîner en milieu des autres danseurs.

« Meda ! explosa enfin Bellatrix en toussant. Meda ! Tu n’oserais pas… Je t’interdis… Ne me laisse pas ! la supplia-t-elle en tirant sur son bras.

— Bella, soupira-t-elle en lui souriant avec indulgence. Va donc tirer les Botrucs du nez à Cissy pour découvrir le nom de son amoureux secret et…

— Ne compte pas sur moi pour jouer les entremetteuses ! protesta aussitôt Bellatrix. Il n’y a rien à faire pour cette enfant, la moindre contrariété la transforme en fontaine larmoyante et…

— Sois aimable avec Cissy, elle a quatre ans de moins que toi, la tempéra Andromeda en décrochant les doigts de sa sœur un à un. On dirait que Macmillan vient à nous… murmura Andromeda comme si de rien n’était en voyant l’effroi se peindre sur le visage de sa sœur qui détala à toutes jambes. »

Andromeda remarqua la face rouge du vieux Macmillan approcher et soupirer de dépit.

« Bonjour Miss Black, la salua-t-il en lui faisant un baisemain sous la grimace d’Andromeda et de Marcus. Votre robe vous sied à ravir, commença-t-il sans même la regarder. Je cherche votre sœur, Miss Bellatrix pour la féliciter pour ses fiançailles ne l’auriez-vous pas vu ? »

Quel toupet ! pensa-t-elle. Compliments de circonstance, à peine un intérêt montré pour la personne interpellée… vraiment, il n’y avait pas de quoi ne pas faire de scandale en refusant de danser avec un tel…

« Elle ne se sentait pas bien, lui apprit Andromeda avec des yeux malheureux. Je crois qu’elle est déjà rentrée chez nous. »

Le vieux Macmillan la fixa enfin, mais Andromeda ne se laissa pas détailler, et tira sur le bras de Marcus pour qu’ils les fassent danser. Manque de chance, la musique s’arrêta à cet instant.

« Vous transmettrez…

— Aurais-je une quelconque ressemblance, par le plus grand des hasards, avec un hibou ? ou une chouette, Mr Macmillan ? dit-elle froidement. »

Elle se délecta un instant de le voir bafouiller puis elle tourna le regard vers Marcus qui se retenait lui aussi de rire de ce vieux sorciers peu élégant. La musique donna à Andromeda l’occasion de s’éloigner vers la piste de danse avec Marcus Parkinson et de rire.

« Ce vieux cochon, cracha Marcus avec dégoût. C’est à croire que sa petite Sang-de-Bourbe de secrétaire ne lui suffit pas pour faire des galipettes dans la boue.

— Marcus, marmonna Andromeda en jetant un coup d’œil derrière elle. C’est franchement dégoûtant ce que tu me racontes.

— Mais c’est la vérité, Princesse, rétorqua-t-il en la faisant sauter. »

Là où il avait ses mains posées, Andromeda sentait sa peau chauffer d’une étrange façon, d’une façon qui ne lui était jamais arrivée.

« J’espère que tu plaisantes, fit-elle en se sentant toute drôle.

— Ah ça, pas du tout, dit-il avec un sourire dégoûté. Et dire que sa femme est la seule à n’en rien savoir. Remarque, c’est mieux comme ça. Je crois que si j’apprenais, plus tard, que mon épouse se roule dans le foin avec un Sang-de-Bourbe, je la tuerais en deux coups de baguettes.

— Seulement deux ? plaisanta Andromeda. Dis plutôt que tu en mourrais, toi, sur le coup. »

Le sérieux qu’il avait convoqué pour dire cette phrase s’envola instantanément et il explosa bruyamment de rire en laissant Andromeda retomber contre lui. Elle s’affola d’être si proche de Marcus, avant de se rassurer. C’était son ami, il n’y avait pas de quoi changer ses habitudes, quoiqu’en dise sa mère.

« Possible, Princesse, lui souffla-t-il. »

Il était si proche qu’Andromeda pouvait sentir le souffle provoqué par chacun de ses mots lui lécher la peau du visage avec douceur. En le voyant rester immobile dans cette position plutôt inconvenante pour la bienséance, elle haussa un sourcil en sa direction pour lui demander silencieusement de la relâcher. Ce fut fait sans qu’ils n’aient rien à faire, puisqu’un couple de danseurs, leur rentra dedans, et Marcus dût la lâcher pour ne pas perdre l’équilibre. Ils étaient sur le point de s’échauffer tous les deux contre le couple maladroit, lorsque la musique s’interrompit brutalement pour laisser place à la voix de Mr Patil.

« Bonsoir mes chers amis. J’ai le plaisir d’organiser la cent quatre-vingt-dix-neuvième réception annuelle en l’honneur de l’alliance indo-britannique sorcière. Cette réception symbolise…

— Eh, Andromeda, entendit-elle à côté d’elle. »

Elle tourna la tête pour tomber sur le visage de Bhanuprasad qui la regardait en souriant. Elle fronça les sourcils, peu amène de lui parler après avoir été royalement ignorée tout à l’heure.

« Comment vas-tu depuis la semaine dernière ? lui demanda-t-il en faisant semblant d’écouter son père. »

Mais Andromeda, elle, cherchait vraiment à écouter Mr Patil.

« … une longue et terrible guerre que, par la suite, nous n’avons plus eu à déplorer. Si par malheur… 

— Andromeda ? s’étonna Bhanu en tournant à nouveau le visage vers elle. »

Elle croisa les bras pour lui montrer sa contrariété et également le fait qu’elle ne voulait plus lui parler. Mais apparemment, il ne comprenait pas le message, puisqu’il insista auprès d’elle.

« Serais-tu fâchée ? s’étonna-t-il à nouveau. Aurais-je fait quelque chose de…

— Pourrais-tu baisser d’un ton, Patil ? le coupa Marcus Parkinson. J’aimerais écouter ce que le maître de maison nous dit. »

Bhanu le regarda en fronçant les sourcils, attendant sans doute qu’Andromeda dise quelque chose, mais celle-ci resta muette comme une tombe et reporta son attention sur Mr Patil, en laissant les deux sorciers se kedavariser du regard.

« … C’est pourquoi, nous sommes ici réunis, ce soir, pour profiter d’une agréable soirée, en toute amitié indo-britannique. »

Andromeda frappa gracieusement des mains, ignorant toujours Bhanu tout autant que Marcus. Elle cherchait Bella du regard, et s’horrifia de la trouver à côté de Macmillan plus loin dans la foule. Comment n’avait-elle pas pu s’échapper ? C’était à n’y rien comprendre.

« Excusez-moi, marmonna-t-elle à son entourage pour se frayer un chemin jusqu’à sa sœur. »

Ce fut inutile puisque les convives cherchaient déjà leur place et elle put facilement rejoindre Bella qui était dans une fureur folle.

« Toi ! attaqua-t-elle dès qu’elle vit Andromeda. Que je t’y reprenne à me laisser tomber comme un vieux chaudron au fond trop fin ! Ce psychopathe de Macmillan m’a… argh ! J’en ai envie de vomir ! Comment peut-on me dire des choses pareilles, à moi, une femme fiancée, respectable et tout ce qui s’ensuit !

— Bella, calme-toi, la pria Andromeda en l’arrêtant devant leur nom mis face à face à la table de la dernière génération. »

Elle assit sa sœur à sa place et lui prit le visage entre les mains.

« Je vais t’apprendre ce que Marcus m’a dit…

— Ne me parle pas de ce Veracrasse de Parkison ! Lui et…

— Calme-toi, s’il te plaît. La prochaine fois que Macmillan vient te voir, dis lui que tu ne veux plus jamais avoir affaire à lui, sinon tu divulgues à sa femme son grand secret.

— Qui est ? sembla enfin s’intéresser Bellatrix en lui accordant toute son attention.

— Il se roule dans la boue avec sa Sang-de-Bourbe de secrétaire, lui chuchota Andromeda à l’oreille.

— PARDON ? hurla Bella en attirant toute l’attention sur elle. »

Andromeda fit un sourire crispé aux autres convives puis reporta son attention sur sa sœur.

« Calme-toi, Bella.

— Est-ce que… tu es en train de me dire… que ce… ce porc… m’a touché avec ses mains qui ont tripoté une Sang-de-Bourbe ? C’est à vomir, en conclut-elle en virant au vert.

— N’exagère pas, il s’est lavé les mains avant de… soupira Andromeda en levant les yeux au ciel.

— Ne me donne pas d’ordre, siffla-t-elle et Andromeda décida de s’éloigner.

— Tu m’épuises, Bella, soupira-t-elle à son tour en faisant le tour de la table pour s’asseoir en face d’elle. »

Elle se réjouit de voir que les noms de Marcus et Cissy se trouvaient aussi à leur table. Elle grimaça en voyant celui de ce petit prétentieux de Lucius Malefoy, pédant comme pas deux alors que chacun savait que les Malefoy avaient des quantités de Sang-Mêlés dans leur arbre généalogique. De l’autre côté il y aurait Bhanu, ce qui fit froncer les sourcils à Andromeda. Un peu plus loin elle lut le nom d’Alice Fortescue et se rappela vaguement une jeune fille brune, de petite taille, de la Maison Serdaigle. Le dernier prénom était trop loin pour qu’elle puisse le lire de sa place, alors elle s’en abstint.

Elle vit ses voisins, Malefoy et Bhanu approcher, et se décida à ignorer à son tour Bhanu.

« Dis-moi tout de suite ce que j’ai pu faire pour te contrarier, dit-il d’emblée en s’asseyant à côté d’elle.

— Tu m’as ignorée lorsque je suis arrivée, dit-elle contre sa volonté. »

Elle regarda méchamment son ami cligner des yeux.

« Tu plaisantes ? bafouilla-t-il.

— Bien sûr que non, je ne plaisante pas, rétorqua-t-elle en regardant Marcus s’asseoir à côté de Bella.

— Je ne t’ai pas ignorée ! s’offusqua-t-il. Je t’ai fait un grand sourire !

— Puis tu t’es retourné vers je-ne-sais-qui lorsque je suis venue vers toi, lui rappela-t-elle.

— Mais… Andromeda, je devais accueillir les invités de mon père, c’est la moindre des politesses. »

Andromeda cligna des yeux à son tour, perplexe. Ses pensées furent coupées par le rire sarcastique de Bellatrix.

« Ce que tu peux être autocentrée ! s’exclama-t-elle. L’univers ne tourne pas autour de toi, Androcentro !

— Ne. M’appelle. Pas. Comme. Ça ! la casse froidement Andromeda. »

Elle n’était pas centrée sur elle-même. Elle aimait juste qu’on la salue en bonne et due forme, et non en coup de vent. Elle avait eu de quoi être surprise, voilà tout.

« Tu préfères Andronombril ? riposta Bellatrix.

— Et toi, Bellatrou ? renchérit Andromeda avec un rictus méprisant avant de reporter son attention sur Bhanu. J’ai mal interprété ton attitude alors. Mais je me réjouis de cette mauvaise compréhension, le rassura-t-elle avec un vrai sourire. Tu as enfin choisi les matières que tu continueras l’année prochaine ? enchaîna-t-elle sans s’intéresser plus aux regards noirs de son aînée.

— J’hésite toujours, avoua Bhanu.

— Nous sommes à quelques jours de la rentrée, Bhanu, lui rappela Andromeda.

— Et alors ? lui répondit-t-il. Il y a des matières que je suis sûr de prendre, comme l’Histoire de la Magie, les Sortilèges et la Métamorphose. Je ne veux pas me priver d’un choix de dernière minute, quitte à arrêter une matière en cours d’année.

— Je le sais bien, lui rappela-t-elle. Mais… »

Elle s’interrompit au tintement qui envahit la salle. Ils se tournèrent tous vers la plus grande table, celle où Mr et Mrs Patil avaient pris place. Hansaraj Patil tenait à dire encore quelques mots à ses invités, et Andromeda, désormais réconciliée avec Bhanu, prenait à nouveau plaisir à écouter les discours et les discussions mondaines.

« Je vous souhaite une bonne soirée, mes amis, nous qui sommes tous réunis autour de ce repas de célébration, annonça-t-il de sa voix grave en claquant des doigts, et les plats apparurent sur la table instantanément comme ils le faisaient à Poudlard. »

Il y avait des dizaines de plats au centre de la petite table ronde, tous garnis de légumes, de morceaux de poulets, de riz, de couscous, de petits rouleaux de fruit frits… Elle ne se souvenait plus des noms de toutes ces spécialités indiennes, même si Bhanu, depuis des années les lui répétait, mais elle les aimait toutes. En petite quantité bien sûr. Elle n’était une gloutonne comme Laura Patterson.

« Si je ne te connaissais pas, je dirai que tu n’aimes pas ce qu’il y a sur la table, lui chuchota Bhanu avec un sourire merveilleux, selon Andromeda. Ton assiette est à moitié vide.

— La tienne n’est pas beaucoup plus remplie, le piqua Andromeda en sachant bien qu’elle lui offrait un mensonge plus gros que le château de Poudlard.

— Mais c’est évident, commenta-t-il en se retenant de rire. »

Il n’y avait que Bhanu qui réussissait à la taquiner de la sorte sans qu’elle ne se vexe. Elle s’était déjà fait cette réflexion, il y a quelques années sans en savoir la raison. Alors elle s’était dit que c’était parce qu’un lien particulier les unissait, sans qu’elle ne sache lequel. Mais les mystères la faisaient rêver, elle s’attachait donc toujours plus à cette relation sans chercher à la comprendre.

« Dis, Andromeda, as-tu… l’interpella Marcus en face d’elle, mais il fut coupé par un cliquetis métallique. »

Andromeda tourna la tête vers sa gauche, et tous les convives de leur table en firent de même. Le teint habituellement pâle de Narcissa vira à l’écarlate. La main de sa sœur était vide, parce que sa fourchette était tombée à terre. Si elle avait été à côté d’elle, Andromeda se serait rapidement baissée pour la lui rendre, et ainsi empêcher que toute l’attention soit dirigée vers sa sœur. A sa grande horreur, elle vit sa sœur virer au vert et ses yeux se remplir de larmes de détresse. Elle voulut ouvrir la bouche, dire n’importe quoi pour détourner l’attention qu’on portait à la petite Narcissa qui angoissait pour un rien ces derniers temps, mais sa voix se bloqua. Ce fut pire lorsqu’elle entendit Marcus se racler bruyamment la gorge pour masquer un fou rire. Elle fit claquer sa langue sur son palais pour attirer son attention et lui envoyer des menaces visuelles les plus furieuses qui soient, mais il ne trouva qu’à sourire un peu plus.

Elle reporta son attention vers sa sœur en entendant une chaise racler le carrelage de la Salle de fête, et s’étonna de voir ce petit prétentieux de Lucius Malefoy se baisser pour ramasser la fourchette de Cissy.

« Saviez-vous que j’ai été nommé Préfet pour l’année à venir ? dit-il en remontant le couvert négligemment. Je serais curieux de connaître le nom de mon homologue féminin si l’un d’entre vous le savait, poursuivit-il en posant le couvert à côté de lui sans même regarder Narcissa qui le regardait avec des yeux ronds de stupeur. Aucun de vous n’a eu vent de ce nom ? Je vous en prie, ne me dites surtout pas qu’il s’agit d’Antiocha Crabbe, ou pire de Mary Adams, poursuivit-il en pinçant les lèvres. La première est dotée d’une cervelle de cafard quand à la seconde… Est-il utile de préciser que personne ne sait d’où elle vient ?

— Alexia Meliflua, souffla la voix de Narcissa sans lâcher Malefoy de ses grands yeux exorbités.

— Meliflua ? s’étonna sincèrement Malefoy sous l’œil atterré d’Andromeda. Étonnant, commenta-t-il.

— Pourquoi cela ? murmura la voix tremblante de Narcissa.

— Il me semblait qu’elle avait eu un accrochage avec le Professeur McGonagall peu avant la fin de l’année, lui répondit aimablement Malefoy.

— Oh, peu de chose, commenta à son tour Narcissa avec une voix plus assurée. Ma cousine m’en a touché deux mots.

— Alexia Meliflua est ta cousine ? fit-il en commençant à manger.

— Au second degré, précisa Narcissa. »

Andromeda sortit de sa contemplation d’une Narcissa confiante lorsque le coude de Bhanu s’enfonça dans ses côtes. Après avoir obtenu son attention, il lui désigna sa sœur et Malefoy d’un geste du menton.

« Qu’arrive-t-il à ta sœur ? fit-il en chuchotant. Elle tient une conversation de plus de trois mots avec quelqu’un d’extérieur à sa famille.

— Bhanu, siffla Andromeda, irritée qu’on prenne sa sœur pour une enfant idiote.

— Ce ne serait pas lui, cet amoureux secret, dont tu m’as parlé avec agacement la semaine dernière ?

— Malefoy ? s’étonna-t-elle avec une grimace de dégoût. Ce petit blond platine prétentieux ? Je peux te détromper immédiatement. Mon père ne souffre pas les Malefoy, Cissy n’oserait jamais s’amouracher de lui, nia-t-elle en grimaçant.

— Avoue que le changement est saisissant, insista-t-il inutilement. 

— Le hasard, rétorqua Andromeda en finissant le dernier bout de poulet de son assiette.

— Si tu le dis, conclut Bhanu qui semblait singulièrement amusé. Mais…

— Princesse, voudrais-tu dire à ta sœur de cesser de donner des coups de pieds dans ma chaise ? l’apostropha Marcus en jetant des regards peu amènes à Bellatrix.

— Ne peux-tu le faire toi-même ? s’exaspéra-t-elle en regardant Bellatrix avec lassitude.

— Elle ne veut pas recevoir d’ordre d’un sorcier, j’en conclus qu’une sorcière telle que toi saura triompher là où j’ai échoué, fit-il d’une voix mielleuse.

— Demande-le-lui poliment et Bella cessera de guerroyer contre ton autoritarisme de mâle prétentieux, dit-elle en se retenant de soupirer à nouveau. »

Andromeda ne manqua pas le sourire rayonnant de Bellatrix, le premier depuis des semaines. Marcus les regarda avec consternation tour à tour avant de marmonner pour lui-même.

« Soyez témoins, ordonna soudain Bellatrix avec un sérieux déconcertant aux sept autres sorciers et sorcières qui occupaient la table. Ce soir, vers neuf heures, ma sœur cadette, Andromeda Black vient de vous rappeler que les sorcières sont puissantes, qu’elles méritent qu’on s’adresse à elle avec politesse et surtout respect. Ce soir je vous le dis, toutes les quatre, sorcière de notre état, nous sommes l’égal des sorciers et à l’avenir, nous serons même plus admirées qu’eux. »

Il y eut un instant de flottement, et Andromeda se rendit bien compte que Bellatrix passait une fois de plus pour dérangée, mais elle n’en avait cure. Bellatrix valait bien plus que n’importe lesquels d’entre eux réunis.

« Bella a fait une prédiction ! s’exclama finalement Narcissa en brisant le silence. Bellatrix est très forte pour les prophéties. Elle a eu un Optimal en Divination et Arithmancie à ses ASPIC. Et…

— Merci Cissy de faire ma promotion mais je ne suis pas un morceau de viande sur l’étal d’un Bouchomage, cassa froidement Bellatrix.

— Bellatrix, la reprit Andromeda avec un regard sévère. »

L’aînée garda son regard noir.

« Vivement que je sois mariée et que je n’ai plus à supporter vos sales petites têtes d’enfants pourris gâtés à chaque réception, cracha-t-elle en essuyant ses doigts avec la serviette de table avant de se lever. »

Andromeda n’essaya même pas de la retenir et la laissa s’enfuir de la salle pour s’enfoncer dans le parc de l’Ambassade indienne. Bellatrix ne demandait pas grand-chose finalement, un peu de considération en tant que sorcière aux remarquables capacités. Mais elle était trop… trop virulente dans ses demandes. C’était drôle au début de la journée, mais dès la fin d’après-midi, Andromeda était épuisée de l’entendre vociférer.

Vociférer. C’était bien le mot qu’elle utiliserait pour qualifier sa sœur ces derniers temps. Son attitude provocatrice dépassait en tout point celle qu’elle avait eu à Poudlard depuis que Rodolphus et elle avaient quitté l’école. Mais leur père tout comme leur mère la laissaient faire tout ce qu’elle vouait depuis qu’elle était fiancée, c’était donc inutile de chercher à la tempérer.

Elle pinça les lèvres sans s’en rendre compte et fixa l’encadrement de la porte derrière laquelle sa sœur s’était enfuie. L’année à venir, la Salle Commune de Serpentard lui semblerait bien vide sans les discours engagés de Bella.

« Ta sœur est infernale, lui lança Marcus tout en continuant à manger. Elle n’est même pas capable de se tenir durant un repas. Je plains sincèrement Rodolphus. Il ne va pas y survivre, l’imbécile, commenta-t-il.

— Je te défends de parler de ma sœur en ces termes, lui rétorqua-t-elle froidement. »

Il releva un visage figé par l’incompréhension vers elle.

« Pardon ? se permit-il d’insister.

— Ma sœur est une sorcière exceptionnelle, précisa-t-elle sans le lâcher du regard. Et tu ne lui arrives pas à la cheville. »

Il la regarda avec des yeux ronds de stupeur alors qu’elle finissait son assiette. Qu’elle le reprenne à se permettre ce genre de commentaire. Est-ce qu’elle lui disait, elle, que sa sœur était une petite traînée que tous leurs camarades avaient un jour tripoté dans une alcôve ? Non, elle ne se permettait pas de faire des commentaires en public déplacés sur Messaline Parkinson justement parce que Marcus était son ami.

Elle porta rapidement son regard sur Narcissa pour la voir en pleine conversation avec ce prétentieux de Malefoy et crut à nouveau halluciner, mais elle laissa faire. Malefoy venait tout de même d’une famille plutôt respectable, quoiqu’en dise Cygnus Black.

Bhanu n’osa pas croiser son regard, et seule Alice Fortescue soutint le sien à la table. Le quatrième garçon, qui s’avérait être Julius Scrimgeour semblait tout à fait détaché des conversations.

« Un problème, Fortescue ? demanda-t-elle finalement.

— Ta sœur a raison de réclamer du respect, dit-elle en posant ses couverts pour joindre les bouts de ses doigts devant elle.

— Évidemment, commenta-t-elle avec un sourire en coin.

— La façon dont elle le fait ôte simplement un peu de crédibilité à son propos, critiqua-t-elle à mi-voix pour que seuls Andromeda et Bhanu, qui était entre elles, l’entendent.

— Je te demande pardon ? fit-elle en reprenant une expression de marbre.

— Il y a d’autres manières de se faire respecter que de crier à tord et à travers, murmura-t-elle sans se départir de son calme. J’ai entendu plusieurs personnes dire qu’elle était hystérique, donc même si son message pro-sorcière est tout à fait positif, certains y croirait plus si c’était toi qui le portais, avec calme, fermeté, lumière d’intelligence et honneur, souligna-t-elle sans cligner des yeux une seule fois. »

Andromeda fronça les sourcils avec suspicion.

« Même si je conviens qu’il fallait commencer par une démarche disons… bruyante, telle celle de ta sœur, pour mettre la machine en marche, concéda Fortescue en reprenant ses couverts. 

— Par pitié, Fortescue, l’apostropha Marcus à l’autre bout de la table. Ne lui parle plus de se sœur, elle va exploser et nous réduire tous en cendre.

— Je ne lui parlais pas de sa sœur, Parkinson, répliqua Alice Fortescue négligemment. Je lui parlais d’elle. Mais je vois que tu aimes fourrer ton nez partout et écouter toutes les conversations autour de toi.

— Ne monte pas sur tes grands chevaux, Fortescue, fit lentement Marcus. Ton fiancé n’est pas là pour…

— Qu’à avoir mon fiancé dans cette conversation ? s’étonna-t-elle sincèrement.

— Il n’est pas là pour se battre pour toi, continua-t-il sans se rendre compte qu’il la provoquait. »

La baguette de la Serdaigle fut aussitôt dans sa main, et la tête de Marcus s’arrêta à quelques centimètres de son assiette, maintenue par une main invisible.

« Pour ta gouverne, Parkinson, je n’ai besoin de personne pour me défendre contre quiconque me manque de respect, dit-elle en détachant bien chaque syllabe. J’ai eu Optimal à tous mes ASPICS et j’ai commencé ma formation d’Auror depuis déjà plusieurs semaines. Évite de me prendre pour une potiche, à l’avenir, et même de prendre toutes les sorcières pour des marionnettes à ton service. »

La pression invisible relâcha la tête de Marcus, qui se redressa vers elle avec un regard noir.

« Je ne sais pas ce qui vous prend à toutes, ce soir, mais vous êtes… il se tut en voyant les regards noirs d’Andromeda et Alice Fortescue.

— La machine est en route, Andromeda Black, ne l’oublie pas, lui murmura Alice avec un regard entendu. »

Ahurie, Andromeda regarda Alice Fortescue poser ses couverts, et se lever de table.

« Bhanu, m’accorderais-tu cette danse ? Je vois déjà des danseurs occuper l’espace, lui dit-elle comme si tout était normal. »

Mais c’était invraisemblable pour Andromeda. Elle n’avait jamais vu une sorcière inviter un sorcier à danser, elle ne savait même pas que c’était possible. Elle pencha la tête sur le côté, réfléchissant d’où elle avait pu penser que ce n’était pas possible, avant de se dire que tout simplement, elle ne s’était jamais posé la question.

Il était peut-être temps qu’elle se pose des questions sur le pourquoi Bella semblait en vouloir à la terre entière.

« … eda, Andromeda, insista Marcus pour la sortir de ses pensées. Puis-je t’inviter à danser ? »

Andromeda revint parmi eux, et constata qu’il ne restait plus qu’eux deux et ce Scrimgeour à leur table. Elle fronça les sourcils, cherchant si elle devait lui tenir rigueur de ce qui s’était passé, puis y renonça en apparence, désireuse de se dégourdir les jambes. Il vint prendre sa main, et elle le suivit sans opposer de résistance. Il dût cependant le voir dans sa posture raide et son attitude peu loquace, puisqu’il se pencha à son oreille.

« Je m’excuse pour ce que j’ai dit à propos ta sœur, j’étais simplement agacé, murmura-t-il et elle sentit sa bouche frôler son oreille. »

Un sourire germa au coin de ses lèvres. C’était toujours la même chose avec Marcus. Il comprenait si bien qu’elle était contrariée, et il détestait cela, qu’il s’excusait platement dès l’embrouille commencée. Ses mots dépassaient sa pensée, et lui faisaient dire des choses qu’il regrettait la seconde d’après.

« Il va te falloir apprendre à te contenir, Marcus, dit-elle pour le taquiner. Moi, je te connais, je sais que tu ne voulais rien dire de déplacé, mais d’autres, comme ma sœur, te défieraient en duel.

— Et alors ? s’étonna en posant sa main sur sa taille pour entamer quelques pas de danse. Je saurai me défendre, affirma-t-il. »

Après avoir posé une de ses mains sur son épaule, et logée l’autre dans le creux de la sienne, elle lui envoya un sourire de défi.

« Tu te sentirais de taille à défier Bellatrix, alors qu’elle a obtenu ses APSICS et que nous n’avons que nos BUSES ? Tu ne manques pas de cran, par Morgane, souffla-t-elle devant tant d’orgueil.

— J’ai plus d’un tour dans mon sac, précisa-t-il en relevant fièrement la tête. »

Il n’était que très légèrement plus grand qu’elle, et comme elle portait des talons hauts, ils se retrouvèrent face à face, leur nez à quelques centimètres l’un de l’autre. Ses yeux étaient si… étranges, un brin fascinant aussi pour une jeune fille qui aimait autant l’art qu’elle. Ils étaient bruns, à n’en pas douter, mais l’iris de celui de droite était parcheminé de paillettes grises, comme si du sang de licorne avait giclé à cet endroit et laissé une trainée de gouttes.

« Tes yeux sont vraiment intéressants, dit-elle en réfléchissant à la manière de développer sa pensée. On dirait… Non, oublie ce que j’ai dit, se reprit-elle en se rendant compte de la bizarrerie de son propos. »

Elle se recula légèrement et voulut repartir dans une danse. Elle attendit qu’il mène à nouveau le jeu, mais comme Marcus restait immobile, avec son sourire en coin, elle haussa un sourcil avant de tapoter un peu son épaule.

« Marcus ? reprit-elle comme il continuait de la dévisager. Oublie mon propos, je me perds dans la contemplation parfois, et…

— J’aimerais te montrer quelque chose, la coupa-t-il en lui présentant son bras.

— Qu’est-ce que c’est ? s’étonna-t-elle en passant le sien dessous. »

Ils fendirent la foule de danseurs pour s’éloigner de l’agitation ambiante. Andromeda jeta un coup d’œil derrière elle, peut sûre que s’éclipser de cette manière soit tout à fait responsable et respectueux. Lorsqu’elle avait l’âge de Narcissa, lorsqu’elle avait commencé à se rendre à des réceptions non plus en tant qu’enfant à surveiller mais en tant que jeune fille, sa mère lui avait toujours appris à ne pas quitter la salle de bal sans autorisation.

Pourquoi ? lui souffla sa conscience.

Étrange, c’était la première fois que cette question ravageait ses pensées. Mais si se poser des questions la transformait en une autre Bella vocifératrice, elle n’était pas sûre que ce soit une bonne idée.

« Marcus, je ne suis pas sûre… souffla-t-elle trop tard. »

Ils s’étaient déjà engagés dans un couloir et Marcus accélérait le pas. Elle le sentit d’ailleurs lâcher son bras pour lui prendre la main. Elle se sentit bêtement rougir, avant de se rappeler que c’était une chose que faisaient les amis. Tout de même, sa main semblait la brûler, et elle n’osait plus la bouger de peur qu’il remarque son trouble.

« Marcus… souffla-t-elle à nouveau. Dis-moi que ce sera rapide, ma mère…

— Fais-moi confiance, Princesse, lui souffla-t-il pour toute réponse. »

Sa voix avait quelque chose d’étonnement grésillant. Il n’était pas tranquille non plus alors. Un sourire sarcastique, sans doute le même que ceux de Bella, s’empara de ses lèvres et elle se sentit puissante à cet instant, à défier un tant soi peu l’autorité de ses parents. Bella avait raison de pester après le monde entier, de ne pas respecter ce que leur mère leur disait sur la bonne tenue quoiqu’on l’entendît crier après coup. C’était euphorisant de faire quelque chose… d’interdit.

Elle le suivit sans plus de résistance dans le couloir, se retenant de rire de façon incontrôlée. Puis il s’arrêta devant une porte, et Andromeda entra en collision avec lui. Elle manqua de perdre tout à fait l’équilibre, mais heureusement, les bras de Marcus la stabilisèrent immédiatement.

« Ne fais pas de bruit, Princesse, lui chuchota-t-il en posant un doigt sur ses lèvres à elle. »

Les amis aussi faisaient ça ? Peut-être, après tout, puisqu’ils étaient amis.

« Ne fais pas de bruit, Marcus, se moqua-t-elle à mi-voix en lui retournant son sourire en coin. »

Il ouvrit la porte doucement, et Andromeda remarqua vaguement qu’il s’agissait de la bibliothèque de la famille Patil. Elle le laissa la tirer à l’intérieur et regarda distraitement autour d’elle à la recherche de ce qu’il voulait lui montrer.

« Que voulais-tu me montrer, Marcus ? dit-elle à voix haute en se retournant vers lui. »

Elle le regarda venir vers elle doucement, sans lui répondre.

« Marcus ? répéta-t-elle sans faire un seul mouvement.

— Je vais t’apprendre à te brûler la peau, chuchota-t-il une fois qu’il fut à quelques centimètres d’elle.

— Mais… commença-t-elle en fronçant les sourcils. Ce n’est pas plaisant, s’étonna-t-elle.

— Si, c’est une brûlure qui fait frémir de… plaisir, souffla-t-il en prenant sa main. »

Il se mit à jouer avec ses doigts, sous l’œil amusé d’Andromeda, qui ne voyait pas du tout où il voulait en venir. Elle regarda ses doigts emprisonnés dans les mains de Marcus, et se demanda comment il allait s’y prendre pour la brûler sans qu’elle n’ait mal. Mais il délaissa ses doigts, et fit remonter son index le long de son bras nu, provoquant des frissons fabuleux à Andromeda. Elle se mordit même la lèvre, pour ne pas frémir de trop.

Des amis faisaient ça aussi ?

L’index de Marcus remonta jusqu’à son épaule seulement couverte d’un collier de saphirs.

« Marcus, le coupa-t-elle intriguée des gestes de son ami, qu’est-ce que…

— Chut, lui souffla-t-il en posant son index sur sa bouche. »

Son attitude était trop différente pour qu’Andromeda ne se posât des questions. C’était quand même très… intime, ce genre de gestes. Un filet de sueur froide lui glissa dans le dos sous sa robe, et elle se surprit à vouloir s’éloigner de Marcus, et à retrouver une distance physique respectable entre eux. Peut-être qu’elle avait eu tord de vouloir être proche de ses amis et ce, également de façon physique. Parce que… tout de même… ce n’était pas très amical ces gestes. Même si…

La porte de la pièce s’ouvrit brusquement. Elle vit Marcus écarquiller les yeux d’effroi puis se retourner vivement. Elle ne voyait pas qui avait pu entrer puisque Marcus était devant elle. Elle pencha la tête inutilement.

« Laisse Andromeda tranquille, Parkinson, souffla une voix qu’elle connaissait bien.

— Patil, tenta de dire en riant Marcus Parkinson mais sa voix fébrile s’éteignit aussitôt face à Bhanu qui semblait très contrarié.

— Fiche le camp avant que j’aille chercher Mr Cygnus Black, siffla Bhanu en l’attrapant par l’épaule pour le pousser vers la sortie. »

Anrdomeda regarda Marcus puis Bhanu avec incompréhension. Ils semblaient prêts à bondir au moindre mouvement suspect de l’autre. Elle avait l’impression de voir deux fauves toutes griffes sorties prêts à se dévorer d’une seconde à l’autre. Marcus marcha à reculons vers la porte de la bibliothèque sans lâcher Bhanu des yeux, avant de s’enfuir dans le couloir, ses chaussures en cuir frappant violement le sol en carrelage.

« Mais qu’est-ce que t’a pris, Bhanu ? s’étonna Andromeda en se remettant difficilement de ce qu’il venait de se passer. »

D’abord, Marcus avait un comportement étrange, ensuite Bhanu, toujours si calme, semblait dans une fureur incontrôlable. Sans parler de Bella qui était partie au quart de tour, sans que ce ne soit tout à fait inhabituel mais le fait qu’Alice Fortescue, ancienne rivale de Bella à Poudlard, soutienne sa sœur, voilà qui en faisait beaucoup en une soirée.

« Dis-moi que tu plaisantes, lui ordonna-t-il. »

Elle s’étonna un peu plus de son ton.

« J’aimerais vraiment savoir ce que vous avez tous, ce soir, répéta-t-elle.

— Tu… Merlin, dites-moi que je rêve ! s’exclama-t-il en riant jaune. Tu ne vois vraiment rien, hallucina-t-il en secouant la tête, les yeux agrandis par la révélation qu’il semblait avoir.

— Et qu’est-ce que je devrais voir ? s’agaça-t-elle. »

Elle n’aimait pas en savoir moins que les autres. Mais là, comme il ne disait rien, elle avait l’impression qu’il ne savait pas lui-même quoi lui dire.

« Il voulait juste m’apprendre à me brûler la peau sans que cela ne me fasse… Pourquoi ris-tu ? s’agaça-t-elle un peu plus.

— Le… »

Puis il se mit à parler en hindi, et Andromeda ne put plus rien comprendre. Il n’empêche qu’en le voyant s’arracher les cheveux et arpenter la bibliothèque comme une boule de fureur, elle s’inquiéta un peu.

« Bhanu, calme-toi, dit-elle avec l’impression que c’était la millième fois qu’elle disait ces mots.

— Que je me calme ? reprit-il en anglais. Il voulait que vous vous brûliez la peau ? répéta-t-il comme s’il n’en revenait pas qu’il ait dit ça, ou qu’elle ne comprenne toujours pas. C’est qu’il est littéraire, ce… Argh, je vais me taire, cracha-t-il en tentant de reprendre son calme.

— Mais enfin, que… reprit-elle avant qu’il ne la coupe en riant toujours jaune. 

— Par Merlin, Andromeda ! s’exclama-t-il en s’affalant sur le fauteuil derrière lui avant de se relever aussitôt pour se planter devant elle. Se brûler la peau… Il voulait dire fricoter ! S’embrasser ! Coucher ! Que sais-je encore !

— Je te demande pardon ? s’outra-t-elle en faisant un pas en arrière. »

Les battements effrénés de son cœur sous sa main lui assurèrent qu’elle était bel et bien en vie, et le peu d’alcool qui lui avait embrumé les pensées s’évapora d’un coup. Les traits doux de Bhanu à cet instant étaient rigides de colère et Andromeda n’avait jamais vu ses yeux si sombres, et elle doutait que ce ne fut qu’à cause de la semi-obscurité de la pièce.

« Tu ne t’en es pas doutée un seul instant ? répéta-t-il comme s’il n’y croyait pas. Il vous met à l’écart, dans une pièce où personne ne peut vous voir, la première chose qu’il fait dès qu’il arrive c’est de te demander de danser, il t’apostrophe sans cesse avec ce surnom ridicule « Princesse »…

Entendre ce surnom dans la bouche de Bhanu avait quelque chose de dérangeant. C’était moqueur et ne la mettait pas du tout en valeur, comme la voix de Marcus le faisait.

— … comme si tu étais une petite chose fragile qu’il tenait à couver et à sauver des griffes du monde entier. Il est tout le temps collé à toi dès que…

— Mais nous sommes amis ! le coupa-t-elle n’en pouvant plus.

— Oh, amis dis-tu ? se coupa-t-il avec un faux sourire. Tu me fais la tête pour un oui ou pour un non, et lui, il qualifie ta sœur d’infernale devant toute notre table et tu lui sautes au cou dès qu’il te demande de danser ? Franchement, sois cohérente avec toi-même. »

Elle regarda son ami avec des yeux ronds de stupeur.

Marcus n’était que son ami, rien de plus et… Mais… Comment Bhanu pouvait-il…

« Il s’est excusé, s’entendit-elle dire d’une voix tremblante. »

Était-elle si injuste avec Bhanu ? Alors qu’elle préférait mille fois discuter avec lui qu’avec Marcus ? Était-elle si ambigüe vis-à-vis de Marcus pour qu’il se permette de penser qu’elle voudrait… flirter ou fricoter avec lui ?

« Excusé ? Donc il reconnaît ce qu’il a dit, cracha-t-il avec dégoût. Je ne me permettais jamais d’insulter ta sœur pour m’excuser aussitôt après. C’est te manquer de respect, ça, pour le coup. »

Andromeda n’arrivait plus à soutenir les yeux sombres de Bhanu et s’en détourna.

« Si par hasard un jour j’insultais ta sœur, au lieu de ramper à tes pieds la seconde d’après, je t’expliquerais ce que je voulais dire, et je te laisserais y réfléchir avant de revenir vers toi. Et c’est ce que je vais faire ce soir si tu continues de ne rien dire pour me montrer que tu trouves mes reproches déplacés ou que sais-je encore, l’acheva-t-il. »

Mais elle ne voulait pas qu’il parte, elle ne lui en voulait pas. Pas vraiment. Mais il n’avait pas à le savoir. Alors elle se retourna aussitôt vers lui.

« Je ne me rends pas compte que je te fais la tête pour un rien, souffla-t-elle sans oser le regarder dans les yeux. »

Il ne dit rien, et Andromeda se désespéra de voir le visage glacial de son ami.

« Si j’ai un conseil à te donner, c’est de faire un peu plus attention aux gens qui t’entourent, lui dit-il entre ses dents. »

Elle releva aussitôt la tête.

« Comment cela ?

— Si tu avais fait plus attention à Narcissa, tu verrais qu’elle a maigri de façon dramatique par exemple, lui dit-il du bout des lèvres. Bien sûr, tu aurais vu que…

— Tu trouves que Cissy a maigri ? s’affola-t-elle aussitôt.

— Oui, et j’ai aussi entendu ta mère en parler auprès de la mienne avec inquiétude, lui avoua-t-il. Mais ta mère semble avoir pris l’affaire en main. »

Andromeda se retourna à nouveau. Les mots de son ami lui arrivaient en plein cœur, et elle avait l’impression qu’elle allait s’effondrer si elle en entendait plus. Pour autant, elle avait besoin d’avoir des réponses à une question encore. Elle chercha à nouveau à soutenir son regard.

« Comment peux-tu être sûr que Marcus voulait me… tu sais…

— Te tripoter ? finit-il avec un grimace. Fricoter avec toi ? essaya-t-il. S’il y a des mots, c’est pour qu’on les emploie, fit-il en souriant en remarquant son malaise.

— Je sais mais… C’est plus facile par écrit, souffla-t-elle sans s’en rendre compte.

— Par écrit ? reprit-il en fronçant les sourcils. »

Elle secoua la tête en pensant à son carnet caché dans la poche intérieure de sa cape. Peut-être qu’elle pouvait en parler à Bhanu, après tout, il lui avait bien montré qu’il était quelqu’un de confiance.

« J’aime bien gribouiller des trucs de temps en temps, des trucs jolis, dit-elle comme une enfant prise en faute. Mais rien de très intéressant. »

Il ne répondit pas immédiatement.

« C’est bien la première fois que je t’entends parler de façon si insignifiante de toi, dit-il avec un visage neutre.

— Oh c’est parce que, sur ce coup, je suis loin d’être une spécialiste, dit-elle précipitamment. Je sais que je suis belle, on me le dit et je le vois, je ne vais pas me cacher dans une humilité mal placée. Mais pour les trucs que je gribouille, je n’ai jamais eu d’avis.

— Tu n’en as jamais parlé à personne ? s’étonna-t-il. Pas même à tes sœurs ? Ou à Lucina Rowle ? »

Elle secoua la tête horizontalement et se retourna vers la bibliothèque pour fuir son regard insistant.

« Bella dirait que c’est un truc inutile et que je ferais mieux de m’atteler à remettre les Sang-de-Bourbes à leur place, déjà que…

— Pourquoi les appelles-tu comme ça ? la coupa Bhanu.

— Qui ça ?

— Les Nés-Moldus, pourquoi les appelles-tu…

— Sang-de-Bourbe ? C’est la même chose, dit-elle en haussant les épaules.

— Non, c’est une insulte, la contredit-il.

— En quoi est-ce une insulte ? s’étonna-t-elle sincèrement.

— La bourbe c’est… de la boue, lui expliqua Bhanu comme si elle était idiote ou juste décalée. Or leur sang n’est pas sale comme la boue ou la fange. Il est rouge, comme le tien. D’ailleurs, ils sont comme toi, ils font de la magie sauf que…

— Ils l’ont volé, dit-elle comme son père disait.

— Tu crois vraiment qu’un Moldu pourrait voler de la magie ? lui demanda Bhanu avec une moue dubitative.

— Non, reconnut-elle à mi-voix. Il n’empêche que leurs parents ne font pas de magie, et c’est vraiment étrange.

— Un aïeul de leur arbre généalogique était sorcier, mais ils l’ont oublié, c’est tout, souffla Bhanu.

— Peut-être, dit-elle en regardant les livres de l’étagère. Oh, celui-ci est en anglais ? s’étonna-t-elle en se tournant vers son ami, toute trace de la conversation précédente oubliée. »

Bhanu ne bougeait plus, comme si Andromeda lui avait lancé un stupéfix. Elle dût l’appeler plusieurs fois par son prénom pour qu’il lui réponde.

« Oui, c’est une traduction que mon père a faite, dit-il finalement. Ce livre traite des coutumes indiennes.

— Tu me le prêterais pour que je puisse le lire ? se réjouit-elle.

— Je te l’apporte à la rentrée, si ceci peut te faire plaisir, fit-il en lui souriant d’une drôle de façon.

— Merci, souffla-t-elle en rangeant l’ouvrage à la couverture dorée dans la bibliothèque. »

Elle attendit un instant avant de lui poser une dernière question de façon hésitante.

« Je peux te demander de me faire danser, comme Alice Fortescue l’a fait, sans que ce ne soit déplacé ? »

Le visage de Bhanu s’éclaira.

 

End Notes:

J'espère que vous avez passé un bon moment à lire ! N'hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé d'Andromeda, de Bellatrix, de Parkinson, de Bhanu aussi, de l'univers Sang Pur que j'essaie de construire, du chapitre global ou même de ce que vous voulez ;)

Merci d'avoir lu ! 

Prenez soin de vous et à dans une dizaine de jours pour le chapire 2

Juliette

edit : début légèrement raccourci suite à la remarque de Calixto, merci Calixto !

2. Retour explosif by Juliette54
Author's Notes:

Bonjour :) Merci pour tous vos commentaires Calixto, Aleyna et Selket ! Merci Aleyna pour la proposition de cette fic pour les sélection du mois de mai pour Andromeda

Chapitre 2, Retour explosif

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Septembre 1969,

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« Sais-tu, Sirius, que si tu veux pouvoir aller à Poudlard dans deux ans, il va bien falloir que tu apprennes toutes tes constellations pour la semaine prochaine, fit Andromeda, mine de rien, au petit-déjeuner.

Sirius s’arrêta aussitôt de manger pour la fixer de son regard torve, arrogant et attendrissant du haut de ses huit ans.

« Tu es de mon côté ou de celui de ma mère ? cracha-t-il à mi-voix pour que ladite mère n’entende pas leur conversation.

— Fais des phrases correctes et je te répondrai, Rayon de soleil, lui souffla-t-elle avec un sourire provocateur. »

Elle le vit franchement hésiter, puis sûrement comprendre qu’elle cherchait à le pousser à bout et il s’exécuta pour garder la tête haute.

« Êtes-vous de mon côté ou du côté de ma madame ma mère, chère cousine ? dit-il d’une voix pompeuse de vieille sorcière.

— Toujours du vôtre, mon cousin. D’où pouvez-vous tirer une idée pareille ? dit-elle en entrant dans son jeu. Ma foi, il n’empêche que pour qu’on ne vous demande plus de les apprendre, il serait bon que ces choses-là soient sues une bonne fois pour toutes, qu’en dites-vous, mon ami ?

— J’en dis que je suis votre constellation pour votre vie entière, et qu’en ces termes, je n’ai guère besoin de me préoccuper des autres, répliqua-t-il avec aplomb. »

Elle secoua très légèrement la tête de gauche à droite avec un sourire sarcastique et porta sa tasse de thé à ses lèvres.

« Sirius, si tu ne le fais pas pour ta mère, fais-le pour toi. Lorsque tu seras à Poudlard, tu n’auras ainsi pas besoin de travailler ton astronomie et tu pourras alors t’amuser. »

Son cousin resta quelques secondes immobile, avant de soupirer lourdement. Heureusement, l’attention de sa mère était captée par Druella, et elle ne dit rien à son fils.

« Je vais voir ce que je peux faire, dit-il finalement du bout des lèvres. 

— Je suis heureuse de t’entendre dire ceci, fit-elle avec un sourire satisfait au visage. Pense à m’écrire lorsque je serai à Poudlard, lui souffla-t-elle en le regardant droit dans les yeux. »

Ils avaient les mêmes, et c’était toujours troublant pour Andromeda. Elle avait souvent l’impression que Sirius c’était elle en homme et en plus jeune. Mis à part qu’elle avait les cheveux d’un brun plus doux, les traits de leurs visages étaient quasiment semblables. Sur les photos en noir et blanc du Manoir où ils avaient le même âge, on pouvait aisément les confondre.

« Nous y allons, Andromeda, lui rappela sa mère en s’approchant de la cheminée de la salle à manger. Pourrais-tu presser ton pas, c’est toujours toi que nous attendons.

— J’enfile ma cape et je vous rejoins, dit-elle avec sa voix posée. A très vite, Sirius, lui dit-elle plus bas en lui embrassant le haut du crâne. »

Elle ne s’attendait pas à ce qu’il enserre ses jambes pour la tenir contre lui, et elle manqua de tomber avant de se rattraper à la table au dernier moment.

« Sirius, souffla-t-elle en voyant ses grands yeux gris perle se remplir d’eau.

— Je ne veux pas que tu t’en ailles, fit-il d’une voix tremblante. »

Elle sentit son cœur se briser en mille morceaux.

« Sirius, Rayon de soleil, je rentre pour Noël, lui rappela-t-elle en s’asseyant à nouveau pour lui caresser les cheveux.

— Mère est horrible avec moi parce que je suis comme Bella, je me moque des courbettes et de ce qu’il faut faire. Et lorsque tu n’es pas là…

— Chut, Sirius, souffla-t-elle en cherchant son regard. »

Elle fit en sorte qu’ils soient face à face et lui caressa tendrement la joue.

« Un jour, je partirai de cette maison, il faudra bien que tu apprennes à vivre sans moi, lui souffla-t-elle. 

— Jamais, souffla-t-il en la prenant à nouveau dans ses bras. »

Elle chercha un instant que dire, mais elle était si déstabilisée par la réaction de son cousin, qu’elle ne trouvait plus les mots.

« Va dans ma chambre, et ouvre le dernier tiroir de ma commode. Tu y trouveras ton cadeau d’anniversaire, murmura-t-elle pour qu’il soit le seul à l’entendre.

— Mais…

— Je sais, ce n’est pas tout de suite, mais si je te manque trop, va quand même y jeter un coup d’œil, lui suggéra-t-elle en lui embrassant le front une nouvelle fois. Je ne te demanderai d’être sage, mais plutôt de ne pas être trop effronté, n’est-ce pas ? »

Il répondit à son sourcil arqué par un rire plein de larmes.

« ANDROMEDA ! hurla sa tante, qui apparemment était sortie de ses gonds un brin trop tôt. »

Elle sauta sur ses pieds, enfila sa cape en quelques secondes et attrapa sa malle de Poudlard.

« Je t’aime, Meda ! s’écria Sirius alors qu’elle disparaissait dans la cheminée.

— Moi aussi je t’aime, Sirius, souffla-t-elle sans y réfléchir dans les flammes de son départ. »

Elle déboucha sur le quai 9 ¾ bondé à cette heure-ci, et fendit la foule, en traînant sa valise derrière elle. Elle chercha Lucina du regard, mais la fumée de la locomotive l’empêchait de voir à plus de dix pas devant elle. Abandonnant alors toute idée de retrouver une connaissance, elle se décida à monter directement dans le Poudlard Express. D’habitude, sa mère était là pour l’aider à monter sa malle, mais aujourd’hui elle se résolut à le faire toute seule. Elle monta trois marches puis tira dessus, en espérant ne pas perdre l’équilibre et s’humilier dans une chute ridicule au milieu d’un quai bondé. Mais étonnement, elle monta sa valise sans difficulté, et se demanda pourquoi on ne la laissait pas se débrouiller auparavant. Peut-être parce qu’elle était plus petite. Oui, ce devait être ça.

Elle tira sa malle dans le couloir étroit du Poudlard Express à la recherche de Lucina. Mais les wagons étaient déjà envahis pas les élèves, et elle se demanda comment elle pourrait même circuler. L’irritation due se voir sur son visage puisque le premier gamin qui la vit s’enfuit en courant dans un compartiment.

Elle avança, toujours à l’affut de la moindre chevelure brune sur un petit corps maigre sous une robe de Serpentard, mais Lucina ne semblait pas être dans ce wagon.

Résignée, elle se décida à arpenter le Poudlard Express pour trouver l’une de ses amies. Son talon résonna dans le wagon, qui se mettait d’ores et déjà en branle, et elle dût se tenir à la vitre pour ne pas perdre l’équilibre par cette brusque secousse. Heureusement que sa tante lui avait rappelé de se dépêcher, que se serait-il passé si elle avait manqué le train ?

Elle fronça les sourcils en voyant les visages des autres élèves se tourner vers elle. Quoi ? Qu’avait-elle ? Son chapeau était-il de travers ? Elle vérifia discrètement sa figure dans la vitre extérieure du train, mais se trouva aussi belle que d’habitude. Elle se vit même sourire en constatant que son froncement de sourcil la faisait un peu plus ressembler à Bella.

Lorsqu’elle reporta son attention sur le couloir, les élèves s’étaient enfermés dans leurs compartiments. Elle cligna les yeux de surprise, avant d’en conclure que le départ du train avait poussé chacun à regagner sa place. De cette façon, elle put facilement remonter le train, vérifiant dans chaque compartiment que Lucina ne s’y trouvait pas.

Elle aperçut finalement le profil de Chiara Runcorn puis celui d’Iphigénie Shafiq à travers la vitre de la porte du compartiment. Elles étaient avec Jugurtha Craggy qui semblait leur raconter une histoire passionnante, vu qu’elles étaient pendues à ses lèvres. Après un sourire sarcastique, Andromeda appuya sur la poignée de la porte, et laissa le son relâchant la fermeture attirer leur attention.

« Andromeda, la salua poliment Chiara. Nous nous demandions où tu étais. Comment te portes-tu ?

— Très bien, et vous ? se contenta-t-elle de répondre, peu désireuse d’étaler ses au-revoir avec Sirius.

— J’ai passé deux mois en Italie dans la famille de ma mère, lui rappela Chiara avec un sourire suffisant. C’était merveilleux.

— Mes arrières-arrières-grands-parents ont tenu à nous emmener dans la campagne de France, commenta Iphigénie avec une moue désappointée. Grand-père Caius tenait absolument à nous montrer le village sorcier d’où vient sa… mère ? Non, sa grand-mère. Je ne sais guère ce qu’il lui prend ces derniers temps, mais il se fascine pour ses ancêtres, expliqua-t-elle en soupirant lourdement.

— Des vacances très… familiales, commenta platement Andromeda en montant sa valise dans le filet à bagage, s’étonnant une fois de plus de n’avoir besoin de l’aide de personne.

— C’est toujours mieux que de rester en Angleterre pendant deux mois entiers, commenta Iphigénie qui semblait vexée par sa remarque. »

Andromeda ne s’y attarda pas, connaissant la susceptibilité de son amie.

« Deux mois en Angleterre partagés entre la campagne du Sussex et les réceptions mondaines, commenta-t-elle simplement avec un sourire. Le pique-nique des Parkinson était encore mieux que l’an dernier, expliqua-t-elle brièvement. Le dîner d’Araminta Meliflua en l’honneur de la commémoration des sorcières brûlées vives était tout bonnement… animé, vous auriez dû voir cela.

— Ta sœur a fait des merveilles d’éloquence, rappela Jugurtha avec un sourire moqueur.

— Elle a été splendide, insista-t-elle avec fierté.

— Et la réception en l’honneur de l’alliance indo-britannique ? lui demanda Jugurtha. Marcus m’en a touché deux mots, mais j’avoue ne pas avoir saisi… »

Elle savait que son visage l’avait trahi, pour qu’ils la regardent tous trois de cette manière et que Jugurtha ne finisse même pas sa phrase.

« Il n’a pas été correct avec ma sœur et moi. Voilà tout ce qu’il y a à savoir, fit-elle sèchement en se relevant.

— Lucina est dans le wagon des préfets avec Terence Harper, elle revient tout à l’heure, lui rappela Chiara avec suffisance. »

Andromeda s’en était souvenue en remarquant leur absence.

« Je sais, dit-elle en ouvrant la porte. Je reviens dans un instant. »

Elle ne se justifia pas, et ne donna pas plus d’explications à ses amis. Chiara Runcorn avait le don de l’agacer le jour de la rentrée, pour qu’elle s’habitude à sa façon de parler plutôt… maniérée, il lui fallait au moins deux ou trois jours.

A cet instant, elle avait envie de voir Bhanuprasad et de lui poser quelques questions qui avaient tournées en boucle dans son esprit depuis qu’ils s’étaient vus lors de la réception. Il devait être avec ses amis de Serdaigle dont elle avait oublié les prénoms. Sa main se contracta d’agacement : il avait raison, elle ne faisait pas assez attention à lui. Et même si ceci la tuait de constater qu’il avait parfaitement raison, elle ne pouvait le nier.

Il fallait d’abord qu’elle prenne de ses nouvelles. Ce n’était pas qu’elle doive se le répéter pour que ça l’intéresse, mais lorsqu’elle avait une idée en tête, elle oubliait parfois les choses les plus essentielles. Ensuite, elle lui poserait ses questions.

Elle regarda par la fenêtre d’un énième wagon, sans qu’elle ne trouve le visage mat de son ami. Il ne devait pourtant pas être bien loin, elle avait déjà parcouru tout le reste du train sans rencontrer une seule tête amie.

Enfin, ses yeux bruns pétillant de vivacité lui arrachèrent un grand sourire. Il était bel et bien avec ses amis de Serdaigle et écoutait en riant à gorge déployée l’histoire que lui racontait l’un d’eux.

Il n’avait jamais ri de cette manière avec elle.

Pour la première fois, elle se sentit jalouse de l’amitié qu’il pouvait avoir avec ses camarades de la maison Serdaigle avant de se reprendre. Ce n’était pas rationnel et complètement déplacé.

Elle leva la main, et frappa à la vitre. Ils tournèrent tous la tête vers elle, et elle fit un signe de la main à Bhanu pour le saluer. Son ami se leva aussitôt pour lui ouvrir en riant toujours de la blague qu’avait dû lui raconter le garçon blond à la tête ronde.

« Andromeda, comment vas-tu ?

— Bonjour Bhanu, dit-elle en souriant. »

Puis elle se rappela qu’elle voulait plus s’intéresser à sa vie, et se tourna vers les autres Serdaigle.

« Bonjour, répéta-t-elle en se souvenant de sourire. Je voulais juste discuter un peu avant qu’on arrive à Poudlard, prendre de tes nouvelles, précisa-t-elle alors qu’il haussait un sourcil. Mais sinon…

— Non, non, j’arrive, lui dit-il en passant le seuil du compartiment. Je reviens dans quelques minutes, dit-il au garçon blond. Je veux entendre la fin de tes mésaventures Tim, prévint-il avec un doigt semi-menaçant dans la direction de son ami. »

Quelques minutes, elle avait quelques minutes. D’accord. Elle le regarda fermer la porte derrière lui et s’appuyer négligemment sur les fenêtres extérieures du wagon. Ne sachant pas quoi faire de ses mains, elle laissa ses doigts se triturer entre eux pendant qu’elle restait stoïque devant lui.

« Alors, commença-t-elle sans savoir pour la première fois de sa vie comment parler à Bhanu. Comment ce sont passés tes derniers jours de vacances ? Tu m’as dit que la sœur de ton père venait chez vous avec sa famille.

— Bien, dit-il en souriant. Tante Salila était ravie de redécouvrir le Chemin de Traverse. La dernière fois qu’elle était venue en Angleterre c’était pour ma naissance. Ses jumeaux sont tout bonnement intenables, mais ils adorent me regarder faire de la magie sans baguette.

— Comme on fait en Inde, se souvint Andromeda.

— Exact, confirma-t-il avec un sourire. Et toi Andromeda ? »

Elle fronça les sourcils.

« J’ai passé les derniers jours à raconter des histoires sur le monde de la magie à Sirius, tu sais mon cousin, rappela-t-elle inutilement comme il hochait la tête. Et j’ai… j’ai un peu gribouillé, je te montrerai.

— Vraiment ? s’étonna-t-il toujours en souriant.

— Seulement si ça t’intéresse, murmura-t-elle comme si elle voulait qu’il n’entende pas. Et j’ai aussi réfléchi à ce que tu m’as dit, reprit-elle plus haut.

— Ce que je t’ai dit ? »

Elle le vit s’éloigner des fenêtres pour se flanquer sur ses deux pieds, les bras croisés devant lui.

« Par rapport à Parkinson, et à toi, tout ceci, fit-elle avec en balayant l’air d’un geste de la main.

— Et ? demanda-t-il en fronçant les sourcils.

— Et je… je me suis demandée pourquoi tu t’étais autant énervé, continua-t-elle en se tournant vers la fenêtre pour trouver plus facilement ses mots. C’est vrai, qu’est-ce que ça pouvait te faire que Parkinson essaie de… fricoter avec moi, comme tu dis ? Et j’en suis venu à la conclusion que, nous étions amis, vraiment ami, que tu me connaissais bien pour savoir que ce genre de choses ne m’intéressait pas et que… j’espère que je ne me trompe pas, hésita-t-elle en essayant de voir son reflet dans la vitre mais le soleil n’était pas aligné comme il le fallait. Non, oublie ce que je disais, c’est stupide. »

Elle se mit à fouiller dans la poche de sa robe de Poudlard pour en tirer un petit rouleau de parchemin.

« Qu’avez-vous fait d’Andromeda Black ? chuchota Bhanu. »

Il s’était à nouveau appuyé sur la fenêtre et du coin de l’œil, Andromeda vit son visage perplexe.

« Pardon ?

— Cesse de te dénigrer comme ça, je ne te reconnais plus, fit-il si bien qu’elle se sentit rougir sous l’intensité de son regard.

— Je ne me dénigre pas, Bhanuprasad, reprit-elle en le regardant méchamment.

— Qu’est-ce que j’ai promis de t’apporter lorsque nous serions à Poudlard ? demanda-t-il avec un visage vide d’expression.

— Vraiment ? s’exclama-t-elle, choquée qu’il puisse croire que ce n’était pas elle. Un livre sur les traditions indiennes que ton père a traduit, répondit-elle de mauvaise grâce en soupirant lourdement. Franchement, Bhanuprasad, qu’est-ce…

— Pardonne-moi, mais je t’assure que tu n’es pas comme d’ordinaire. Passons, tu me parlais de Parkinson, du pourquoi je m’étais agacé, que nous étions amis…

— Oublie, je n’ai plus envie d’en parler, fit-elle en prenant la mouche, déjà prête à s’en aller. »

Mais en entendant l’appeler, elle se souvint qu’il lui avait reproché de lui faire la tête pour un rien, et elle s’enjoignit au calme.

« Je me suis dit, avoua-t-elle en se retournant vers lui, que tu me prenais peut-être un peu pour une petite sœur. »

En d’autres circonstances, et avec un autre interlocuteur, elle se serait offusquée qu’il se mette à rire aux éclats, mais c’était Bhanu, et elle avait l’impression que c’était la première fois qu’elle le faisait rire, comme son ami Tim l’avait fait rire quelques minutes plus tôt.

« Si tu veux, Andromeda, lui concéda Bhanu avec les yeux brillant d’amusement. Ou tout simplement pour une véritable amie, mais ne te braque pas pour si peu, fit-il en riant à nouveau.

— Ne te moque pas ! s’outra-t-elle en lui donnant un coup de coude. C’est important pour moi. Je sais que je peux avoir confiance en toi, c’est important, répéta-t-elle avec une moue faussement agacée. »

Il s’arrêta de rire pour secouer la tête.

« Je ne peux pas avoir confiance en Marcus comme je le croyais, et si je suis si aveugle à ceux qui flirtent avec moi, franchement, je ne sais plus en qui je peux avoir confiance, marmonna-t-elle pour elle-même.

— Parkinson disait à qui voulait l’entendre que tu étais sa chasse gardée, fit Bhanu avec une grimace. Il pensait déjà te passer la bague au doigt.

— Pardon ? s’offusqua-t-elle. Il ne manque pas de toupet.

— Oh mais ça n’empêche pas Timothée Selwyn de baver dès qu’il te voit, poursuivit Bhanu sans se départir de sa grimace. Les autres sont plus discrets, mais…

— Je ne veux pas en savoir plus, fit-elle en agitant ses mains devant elle. »

Il la regarda en souriant à nouveau, prêt à en ajouter une couche, mais elle le dissuada d’un regard noir. A la place, il s’empara du petit rouleau de parchemin qu’elle tenait encore entre ses doigts.

« Ouvre-le plus tard, quand tu seras seul, le pria-t-elle en l’empêchant de tirer sur le ruban noir qui le maintenait fermé. S’il te plaît. Je serais gênée sinon. »

Il la regarda avec ce même sourire amusé, puis enfonça le rouleau dans la poche de sa robe de sorcier.

« Est-ce que… est-ce que ce serait déplacé si je te prenais dans mes bras ? demanda-t-elle subitement en repensant à Sirius qui s’était jeté sur elle ce matin. »

Finalement, elle n’attendit pas sa réponse, et l’entoura brièvement avant de le lâcher presqu’aussitôt. Puis elle ouvrit la porte de son compartiment.

« Je vous le rends, dit-elle à ses amis. A très vite, Bhanu, fit-elle en le poussant à l’intérieur.

— Ne veux-tu pas rester un peu ? lui proposa Bhanu en lui montrant qu’il restait de la place à côté de lui sur la banquette.

— Non, je vais…

— On n’est pas assez bien pour toi, Black ? lui demanda le garçon blond au visage rond avec un ton agressif.

— Je te demande pardon ? s’étonna-t-elle en restant les bras ballant sur le seuil de leur compartiment.  

— Oh mais tu as très bien compris ce que je voulais dire, reprit-il avec un rictus mauvais. La princesse des Serpents ne parle pas aux gueux que nous sommes et…

— Puis-je te demander en quel honneur tu m’agresses de cette manière ? le coupa-t-elle abruptement, peu habituée à ne pas comprendre ce qu’on lui reprochait. Sur ce, faites bon voyage, lança-t-elle aux trois amis de Bhanu qui partageaient son compartiment. Je vais retrouver Lucina que je n’ai pas vue depuis des semaines. On se voit plus tard, Bhanuprasad. »

Elle sortit sans refermer la porte derrière elle, ce qui lui permit d’entendre le début de la conversation que Bhanu avait avec ses amis.

« Je ne comprends toujours pas ce que tu fais avec cette fille, Bhanu, entendit-elle. »

Ceci eut le mérite d’attiser sa curiosité, et elle attendit à côté de la porte ouverte, cachée aux yeux du compartiment des Serdaigles.

« C’est mon amie, répliqua Bhanu de sa voix calme habituelle.

— Comment peux-tu… C’est une Black ! Elle insulte tous les Nés-Moldus comme moi de…

— Je la connais depuis que j’ai cinq ans, Tim, le coupa Bhanu en élevant la voix. Elle n’est pas aussi extrême que sa famille et…

— Tu plaisantes ? reprit la voix du dénommé Tim. L’année dernière je l’ai croisée avec Bellatrix dans un couloir et elles se sont…

— Elles ne se sont pas jetées sur toi, elles t’ont…

— … regardé comme si j’étais une puce sur une licorne. Franchement…

— Lorsqu’elle n’est pas avec sa sœur, elle est adorable, le coupa à nouveau Bhanu et Andromeda sentit ses joues rougir. Parfois elle est juste… »

Il se tut et Andromeda fronça les sourcils, craignant de s’être fait repérée, mais il reprit rapidement.

« D’une naïveté désarmante que c’en est à mourir de rire. »

Andromeda crut avoir mal entendu mais le rire de ses amis la conforta dans l’idée qu’il se moquait d’elle.

« Elle ? Naïve ? Pédante si tu veux, mais naïve ? En as-tu d’autres, des bonnes, comme ça ? reprit une voix de fille qu’elle n’avait pas encore entendue.

— Ne te moque pas, c’est vraiment charmant, répliqua-t-il et Andromeda se sentit tout de suite mieux puisqu’il prenait sa défense. Il faut juste apprendre à la connaître et ne pas s’arrêter à la réputation de sa famille, précisa-t-il ce qui fit froncer les sourcils à Andromeda. »

Elle pencha un peu plus l’oreille, mais un bruit à l’autre bout du wagon la fit sursauter. Elle se mit aussitôt en route vers le compartiment de ses camarades de Serpentard, craignant de se faire repérer, en remarquant les deux garçons qui venaient vers elle. Ils s’arrêtèrent devant un compartiment et le plus petit y entra. L’autre, un grand blond de la maison bleu et bronze, comme sa robe, reprit sa route. Andromeda remarqua qu’il s’agissait du préfet de Serdaigle et se souvint de l’avoir déjà vu avec Bhanu. Il lui semblait même qu’il s’agissait de son meilleur ami.

« Tonks, le salua-t-elle, toujours décidée à s’intéresser à la vie de Bhanu.

— Black, la salua-t-il en retour avec une expression si perplexe sur le visage qu’elle s’arrêta en face de lui pour lui demander s’il y avait un problème. »

Il s’arrêta de même, sûrement dans l’attente qu’elle se décale de son chemin, mais ses yeux… Bon sang, elle adorait regarder les yeux des gens, surtout quand leurs iris avaient quelque chose de vraiment peu commun. Et là, c’était le cas. Ils étaient entre le marron et le vert, d’une teinte noisette pas tout à fait unifiée, qui brunissaient vers l’extérieur et s’éclaircissait vers l’intérieur, ce qui formait un magnifique contraste avec la pupille.

Son raclement de gorge la détourna de sa contemplation, et elle fit un pas en arrière pour avoir à nouveau une vue d’ensemble sur le préfet.

« Bhanu est dans le troisième compartiment à droite, dit-elle après un autre sourire pour se donner une contenance.

— Merci, fit-il avec méfiance en voulant s’engager sur le côté droit du couloir. »

Mais elle avait eu la même idée, et ils manquèrent de se foncer dedans. Un effluve d’eau de Cologne fit pétiller ses sinus, et elle ne retint pas un sourire un coin.

« Il n’y a pas de quoi, dit-elle sans pouvoir s’empêcher de regarder à nouveau ses yeux. »

Il hocha la tête, et lui fit signe de passer devant lui, ce qu’elle fit avant de lui faire une réflexion sur ses yeux et de ne plus savoir comment en sortir. Elle se faufila rapidement, et s’enfuit dans le wagon suivant.

Sans pouvoir s’en empêcher, elle se retourna, et à travers les différentes vitres pleines de traces de doigts, elle remarqua la chevelure blonde de Tonks disparaître dans le compartiment qu’elle lui avait indiqué. Sans en savoir la raison, elle sourit.

Elle remonta le train en repensant à ces yeux si particuliers et manqua de louper le compartiment dans lequel se trouvaient ses amis.

« Andromeda ! l’interpella la voix de Lucina. »

 Elle tourna la tête pour retrouver son amie, Iphigénie, Chiara, Jugurtha et Terence Harper.

« Où étais-tu ? s’étonna Lucina en poussant Terence pour qu’elle puisse s’asseoir à côté d’elle. J’ai vu ta mère et ta sœur sur le quai, mais nulle trace de toi !

— Je suis arrivée peu après par Cheminette, expliqua-t-elle posément, ravie de retrouver son amie. »

Les grands yeux chocolat de Lucina lui donnèrent instantanément envie de sourire. Alors elle le fit.

« Ma parole, c’est bien la première fois que je te vois avec autant de couleurs, s’étonna Andromeda en remontant le chapeau de son amie. »

Laquelle s’en débarrassa aussitôt. Ses long cheveux lisses d’un brun éclatant commençaient à lui coller au front et Andromeda s’amusa à les lui remettre derrière l’oreille.

« Après un mois en Australie, on ne peut être autrement, répliqua son amie. Je n’en reviens toujours pas d’avoir pu suivre mon père et son associé, Cléombrotos Flint, là-bas alors que mes frères ont dû rester s’occuper de ma mère en Écosse, répéta-t-elle et Andromeda s’amusa de la voir si pleine de joie, elle dont on avait l’impression que rien ne l’atteignait. Lazarus aussi était là pour accompagner son père. C’est d’ailleurs lui le préfet-en-chef cette année, précisa-t-elle avec un clin d’œil. Il n’a pas cessé de me répéter qu’il ferait des merveilles. Il a fait la grimace en apprenant que son homologue féminin, était la préfète de Gryffondor c’est-à-dire… Marcelina Brown, qui fréquentait…

— Abélard Weasley, compléta Andromeda en fronçant les sourcils.

— On raconte que leurs parents veulent les fiancer dès la fin de l’année civile, c’est-à-dire aux vacances d’Hiver, reprit aussitôt Chiara. Mais la mère de Brown fait tout pour retarder ceci. Elle refuse que sa fille épouse un Traître-à-son-Sang. Elle aurait mieux fait d’épouser quelqu’un d’autre qu’un Brown si elle ne voulait pas que sa fille fricote avec un Weasley.

— J’ai entendu dire qu’elle était enceinte, souffla Iphigénie pour en ajouter une couche, et que c’était pour cela que Monsieur Brown s’était résolu de conclure ce mariage au plus vite mais…

— Êtes-vous sûr de ce que vous dites ? les coupa Jugurtha en riant. Vous êtes les pires commères de Poudlard. Marcelina a quitté Weasley pour son meilleur ami, Emil Abercrombie, pendant les vacances. J’ai assisté à un beau duel, bien humiliant pour Weasley sur le chemin de Traverse. C’était à mourir de rire. »

Andromeda tourna la tête vers lui, et remarqua les visages de Chiara et Iphigénie se pincer d’agacement. Commères ? Ah oui ? Andromeda se fit la réflexion qu’effectivement, la plupart des nouvelles des deux amies se révélaient constamment fausses. Ne plus faire confiance à Chiara et Iphigénie, donc ? C’était noté.

« Tu ne dis rien, Harper ? l’interrogea Andromeda car elle le voyait arborer un rictus méprisant.

— Je suis impressionné par tant de bêtises, cassa-t-il d’une voix traînante. Si maintenant les affaires de cœur des Gryffondors vous intéressent, je me demande ce que Craggy va faire pour les beaux yeux d’Iphigénie.

— Ferme-la, le rembarra méchamment Jugurtha Craggy.

— Parle-moi sur un autre ton, Craggy, répliqua-t-il en se redressant sur la banquette.

— Allez faire votre combat de coqs plus loin, les reprit Andromeda avec mépris. Vous ne savez que vous battre, vous les hommes.

— Ta sœur t’aurait-elle passé le flambeau de la défense des sorcières ? se moqua Craggy sûrement vexé de se faire rembarrer.

— J’énonce une simple vérité, Jugurtha. Vous ne savez que montrer les muscles et la baguette, la moindre subtilité vous échappe, soupira-t-elle de façon tragique. Sinon, vous auriez compris que nous voulions être entre filles, souffla-t-elle de façon moqueuse. »

Craggy la regarda comme un poisson hors de l’eau, et elle ne put retenir un rire cristallin.

« Réveillez-moi lorsque nous arriverons, souffla-t-elle en abaissant son chapeau devant ses yeux. Votre simple présence m’a déjà épuisée, l’acheva-t-elle avec un rictus. »

Elle entendit Lucina en dire de même avant de sentir sa tête s’appuyer sur son épaule.

Des retrouvailles dans le Poudlard Express normales en somme.

.

Lorsqu’elle se réveilla, Andromeda trouva ses mains plongée dans une chevelure légèrement humide de sueur. Elle cligna des yeux derrière son chapeau pointu, guettant le moindre bruit provenant de ses camarades, mais seul le roulement du train lui répondit. Après s’être débarrassée de son cache-œil improvisé, elle remarqua que ses amis dormaient tous. Amusée, elle bailla silencieusement, portant sa main libre à sa bouche pour ne pas faire profiter un éventuel regard de la vue du fond de sa gorge, élégante certes, mais peu agréable en cet instant. La tête de Lucina avait dû tomber sur ses jambes, et ses mains lui avaient caressé la tête machinalement. Elle avait des cheveux si doux ! Andromeda lui avait déjà demandé quel shampoing elle utilisait, mais même en l’utilisant sur elle, ses cheveux bruns aux multiples boucles restaient plus rêches.

Elle laissa ses mains caresser la chevelure brune de son amie, et jeta un coup d’œil autour d’elle. Chiara dormait la bouche ouverte, la tête ballotant de droite à gauche au gré des mouvements du train. La tête d’Iphigénie reposait sur les genoux de Jugurtha, qui dormait avec un sourire niais plaqué sur le visage. Son attitude était ridicule avec Iphigénie. Elle le regardait de haut parce que, selon elle, la famille Shafiq était plus respectable que la famille Craggy d’une part, et d’autre part parce qu’elle préférait les poursuiveurs aux gardiens. Finalement, ils étaient aussi stupides l’un que l’autre.

Seul Terence Harper ne dormait pas et lisait paisiblement un grimoire dans un coin du wagon. Parfois, à le voir si distingué dans sa robe de Serpentard, Andromeda en oubliait qu’il était de Sang-Mêlé, que sa mère n’avait jamais réussi à produire la moindre étincelle de magie malgré son appartenance à la famille Runcorn. On ne prononçait pas le mot « cracmol » en présence de Terence, par respect ou plutôt, par hypocrisie, songea Andromeda en plissant les yeux.

« Je sais que mon anatomie mérite le détour, Black, mais ton observation finit par me gêner, marmonna-t-il de sa voix traînante habituelle. »

Elle sentit ses oreilles chauffer sous ses cheveux longs, et chercha à lui offrir une réponse bien sentie.

« C’est l’anatomie de ton livre qui m’intéresse, dit-elle sur le même ton en le voyant sourire de façon sarcastique. Mais si ton amour propre a besoin de croire que ton anatomie est enviable, ne l’en empêche surtout pas. Que lis-tu ? »

Elle le regarda sourire un peu plus, puis secouer très légèrement la tête, comme s’il était fatigué de son répondant.

« Ce sont les œuvres complètes d’Ursula du Verrier, poétesse française du XVIème siècle, lui dit-il en relevant le visage de son ouvrage. La connais-tu ? »

Bien sûr, elle pouvait mentir, et dire qu’elle connaissait très bien les poèmes de cette sorcière, mais c’était risqué vu qu’il avait l’ouvrage dans les mains, et qu’elle ne connaissait même pas le prénom de cette sorcière la seconde d’avant. Si elle ne pouvait pas mentir, il lui restait à mépriser sa lecture. Mais elle n’en avait pas envie. Elle était coincée : s’avouer ignorante dans un domaine que lui connaissait, ou faire quelque chose qu’elle n’avait pas envie.

« Ce ne me dit rien, avoua-t-elle difficilement. Mais j’aime beaucoup Bellah Shack-Nitics. »

Lui qui restait toujours de marbre eut l’air sincèrement surpris. Mais de quoi ? Qu’elle avoue une faiblesse intellectuelle, ou qu’elle connaisse Bellah Shack-Nitics ? Andromeda aurait plus penché plus pour la première possibilité, mais il la détrompa.

« Tu as lu Bellah Shack-Nitics ? répéta-t-il sans y croire. C’est… intéressant, en convint-il. »

Elle fronça les sourcils, peu sûre du sens qu’il mettait dans le mot intéressant.

« C’est-à-dire ? s’enquit-elle.

— Ce n’est pas très… traditionnel, dit-il prudemment en fermant son recueil.

— C’est en cela que Shack-Nitics est fabuleuse, expliqua Andromeda en souriant sincèrement. Elle parvient à écrire du monstrueux et que ce soit magnifique. C’est tellement…

— Violent, la coupa Harper avec une voix vibrante. Tu es secoué, littéralement. Que ce soit dans ses poèmes d’amour ou dans ses Nouvelles à l’Arsenic.

— C’est exactement ça, confirma Andromeda émerveillée d’enfin trouver des mots pour décrire Bellah Shack-Nitics. Et dire qu’on ne sait même pas qui elle est réellement, soupira-t-elle en regardant les landes écossaises derrières la vitre du Poudlard Express.

— C’est encore mieux comme ça, reprit Terence avec insolence. Elle est encore plus mystérieuse, de cette façon. »

Andromeda considéra la question. Pour mystérieuse, ça, elle y était. Mais elle aurait vraiment aimé pouvoir en savoir plus sur cette poétesse de la fin du XIXème siècle. Qu’avait-elle dû vivre pour avoir une imagination si morbide et sublime à la fois ?

Elle était sur le point de faire part de ses réflexions à Terence, mais Lucina décida de s’étirer à cet instant. Et d’un accord tacite, ni l’un ni l’autre ne relança la conversation. Aussi simple que ce fut, Andromeda ne se posa même pas de questions là-dessus.

« Mes genoux sont-ils confortables ? souffla-t-elle à Lucina en haussant un sourcil.

— Plus que ton épaule, lui répliqua-t-elle en vérifiant qu’aucune mèche de cheveux ne s’était échappée de son chignon serré. »

Andromeda la regarda faire en souriant. Puis Jugurtha s’éveilla à cet instant et leur montra du doigt la gare de Pré-au-Lard qui se dessinait à l’horizon. Il réveilla la jeune femme qui dormait sur son épaule, et Andromeda les laissa minauder dans leur coin.

Si elle avait pu monter sa valise toute seule, elle pourrait la descendre sans l’aide de personne également. Alors elle s’y attela. Sa valise était la plus proche et la plus haute vue qu’elle l’avait hissée en dernier, aucune autre ne la gênait. Après avoir remonté les larges manches de sa robe de sorcière, elle leva les bras, et tira sur l’anse de sa malle. Laquelle vint toute seule. Un peu trop toute seule. Mais Andromeda parvint néanmoins à la faire atterrir en douceur.

« Tu aurais pu me demander de l’aide, lui dit Harper en saisissant sa propre malle.

— Et pourquoi faire ? s’agaça-t-elle. Est-ce que toi, tu as besoin d’aide ? »

Il s’arrêta juste avant que sa valise n’ait quitté le filet à bagage pour tourner la tête vers elle. Elle le vit froncer les sourcils.

« Ne me dis pas que c’est ma condition de femme qui… reprit-elle avec un regard noir.

— Ne me fais pas dire ce que je n’ai pas dit, grinça-t-il sans faire un mouvement. Tu es une femme, d’accord, marmonna-t-il. Je te rappelle simplement que descendre une malle à deux est bien plus facile. Pourrais-tu m’aider, soit dit en passant ? »

Elle se sentit stupide, vraiment stupide de s’être emportée pour un rien. Elle devenait paranoïaque depuis qu’elle avait choisi de se poser des questions sur le pourquoi Bellatrix en voulait à la terre entière, et surtout au côté masculin de la planète, et voilà qu’elle prenait la mouche pour un rien à présent.

« Oublie, je me suis emportée, marmonna-t-elle en l’aidant à descendre sa malle. 

— Je te remercie, Andromeda, dit-il de sa voix traînante. Après toi, lui proposa-t-il en la laissant passer devant lui avec sa propre malle. »

Andromeda ne se fit pas prier et tira sa malle le long du couloir, puis laissa Harper la lui tendre lorsqu’elle fut sur le quai, décidée à ne plus se vexer. Puis il en fit de même avec la sienne, et Andromeda se décida à la prendre sous son regard moqueur. Soit il la testait, soit il se moquait royalement d’elle, et dans les deux cas, cela ne lui plaisait pas. Mais elle prit sur elle, décidée à ne plus s’enflammer pour un oui ou un non. Elle aida Lucina et laissa leurs valises plus loin sur le quai, où les elfes de maison de Poudlard les emporteraient jusqu’au château.

Lucina passa immédiatement son bras sous le sien, et Andromeda s’amusa de la voir se pendre presque à son bras comme une enfant qui attend qu’on lui parle de sa surprise.

« Je te montrerai les cartes postales que j’ai acheté en Australie, pépia-t-elle joyeusement. Mon père a même fait faire une photo de moi devant le Mont Uluru. Et regarde, continua-t-elle en sortant sa chaîne en argent de sous son col mao. Regarde ce pendentif. »

C’était une petite pierre plate d’une jolie couleur ambrée, légèrement transparente. Quelque-chose semblait être pris à l’intérieur.

« Vois-tu les petits traits noirs dans la roche ? C’est un Billywig qui s’est pris dedans lorsque la pierre s’est formée.

— Fascinant, commenta Andromeda en rapprochant le caillou de ses yeux. »

Lorsqu’elles se furent installées dans les calèches, Lucina décrocha la chaîne qui entourait son cou et la tendit à son amie. Andromeda put facilement voir l’insecte dans la pierre ambrée. Elle rendit le tout à son amie, qui la regardait avec des yeux brillants.

« Lazarus me l’a offert pour mon anniversaire, expliqua Lucina.

— Ah oui ? fit Andromeda en haussant un sourcil intrigué.

— Ne va rien t’imaginer, la coupa immédiatement Lucina en secouant la tête. Je sais qu’il me tourne autour et que nos parents seraient ravis si nous nous fréquentions, rappela-t-elle en soupirant. Mais… Je n’y arrive pas, avoua-t-elle en baissant la voix, craignant que les Poufsouffles qui partageaient leur calèche ne les entendent. Je le connais depuis que je suis toute petite, puisque nos familles codirigent les importations de plantes indo-asiatiques depuis des décennies. Mais… Je n’y arrive pas, répéta-t-elle en grimaçant. C’est… comme mon troisième frère. Sachant que ma relation fraternelle est nettement plus chaleureuse avec lui qu’avec Clovis et Pelée, marmonna-t-elle plus pour elle-même que pour son amie. Et je suis persuadée qu’il en est de même pour lui, précisa-t-elle. Mais il ne veut pas désobéir publiquement à son père, donc il attend que je lui dise de cesser sa cour. Mais je suis également coincée avec mon propre père, sans parler de ma mère, marmonna-t-elle. Enfin, lorsqu’il se prendra d’amour pour une autre, il sortira les griffes face à son paternel. Je n’ai plus qu’à patienter, soupira-t-elle fataliste. »

Andromeda aurait bien explosé de rire face à cette tirade un brin cynique, mais un caillou sur la chaussée fit sursauter la carriole et elle alla s’écraser sur son amie. Elles rirent aux éclats suffisamment longtemps pour ne plus avoir de souffle.

« Ce chemin est infernal, commenta finalement Andromeda. Chaque année on manque de tous tomber dans la boue, ou de casser le nez de son voisin en perdant l’équilibre.

— Que veux-tu, c’est Poudlard, plaisanta Lucina. C’est bancal, mais agréable.

— Poudlard n’est pas bancal, protesta Andromeda.

— Je ne parlais pas du château, mais des élèves, précisa Lucina. Marcelina Brown Préfète-en-Chef ? Franchement, Lorelia Bones est mille fois meilleure qu’elle dans toutes les matières, et tu sais que je ne porte pas Bones dans mon cœur. Mais reconnais qu’elle a bien plus l’étoffe d’une Préfète-en-Chef que Brown.

— Certes, en convint Andromeda. Mais Bones…

— … a la tête dans les nuages. Impossible de lui faire penser à plus de trois choses à la fois, précisa Lucina. »

La calèche s’arrêta d’un coup, manquant de projeter Andromeda sur les petits Poufsouffles en face d’elle.

« Par Morgane, c’est intenable ! s’exclama-t-elle en se précipitant hors de la calèche. »

Mais avant qu’elle n’ait pu dire un mot de plus, deux mains la saisirent à la taille pour la faire décoller du marchepied et la poser galamment sur les pavés. Un coup de coude lui échappa, et elle entendit le gargouillis furieux de Marcus Parkinson derrière elle.

« J’ai déjà vu mieux comme remerciement, Princesse, marmonna-t-il en frottant ses côtes douloureuses tout en passant un bras dans le bas de son dos.

— Je ne t’avais rien demandé, répliqua-t-elle froidement en se dégageant, agacée qu’il se montre si familier avec elle. D’abord, je n’ai pas besoin de ton aide pour descendre d’une calèche. Ensuite, la prochaine fois que tu poses tes mains sur moi sans ma permission, c’est ma baguette qui fera des étincelles, siffla-t-elle sans se rendre compte du silence qu’elle faisait planer autour d’elle. »

Elle se tourna vers Lucina qui la regardait avec des yeux ronds de stupeur. Après un froncement de sourcil interloqué, elle se rappela que personne n’était au courant de son attitude inadéquate avec elle. Et alors ? Ce simple geste était suffisamment blâmable pour qu’ils comprennent sa réaction. Finalement Lucina daigna lever sa main et lui désigner quelqu’un derrière elle. Andromeda retint un soupir et se retourna.

Lazarus Flint, accompagné du Professeur Slughorn, la regardait étrangement. Puis le professeur de potion fit retentir son petit rire de circonstance.

« Évitez de menacer les élèves pour si peu, Miss Black. Ou vous effrayerez les nouveaux venus, fit-il avec un ton qu’Andromeda trouva condescendant. »

Dites à vos élèves de ne pas me prendre pour une poupée, dans ce cas, pensa-t-elle.

Elle se rendit compte trop tard qu’elle avait pensé à voix haute en entendant le petit cri étouffé de Lucina et les visages stupéfaits de Lazarus et de Slughorn. Bon… Autant continuer sur sa lancée.

« Je puis me débrouiller pour descendre une marche sans qu’on ne m’impose un atterrissage forcé. »

Personne n’osait dire un mot, ni même relâcher son souffle, alors elle continua.

« Mais si vous voulez que je m’excuse…

Elle ne voyait plus que les yeux globuleux de son professeur.

— … de vouloir me débrouiller seule, comme une personne indépendante et adulte…

Même Lazarus pâlissait à chaque mot supplémentaire.

— … vous pouvez patienter car je suis dans mon bon droit de vouloir un peu de respect. »

Il la regardait tous comme si elle était une extraterrestre.

« Je vous en prie, Miss Black, soupira finalement le Professeur Slughorn. Ne mettez pas la Salle Commune de Serpentard dans tous ses états comme votre sœur l’a fait.

— Ma sœur, reprit-elle d’une voix posée, est une personne tout à fait admirable qui ne cherchait qu’un peu de respect de la part de ses condisciples masculins, fit-elle en fendant la foule pour se diriger vers le château. Et si j’entends quelqu’un la critiquer… »

Elle se mordit la lèvre inférieure en se rendant compte qu’elle était sur le point de menacer un professeur. Merlin, mais que faisait-elle ? Elle secoua la tête, et tourna devant la Grande Salle pour s’enfoncer au bout du couloir où se trouvaient les toilettes.

La première chose qu’elle vit après avoir poussé la porte fut le visage de sa sœur. Elle cligna des yeux, interloquée, puis avança jusqu’au miroir qui surplombait l’évier.

Ce n’était pas sa sœur.

C’était elle. Les mêmes traits que Bellatrix, avec des cheveux plus clair et soyeux, dans le visage à la mâchoire forte des Black. Dans la pénombre, même ses lèvres rouge sang étaient devenues plus ternes.

Elle n’avait jamais autant ressemblé à Bellatrix. Autant elle pensait qu’elle en serait fière, autant à cet instant elle fut seulement fascinée de voir comment quelques mots avaient pu la transfigurer de la sorte.

La machine est en route, Andromeda Black, ne l’oublie pas, lui avait dit Alice Fortescue.

Si Bellatrix l’avait mise en marche, elle, elle s’assurerait qu’elle tourne à plein régime.

 

End Notes:

Le chapitre est écrit depuis un moment, mais ça m'a fait beaucoup rire de pouvoir lire quelque chose en lien avec le visage d'Andromeda semblable à celui de Bellatrix chez toi, Calixto ! ;) 

Alors qu'en pensez-vous ? Apparition de Sirius, puis voyage en Poudlard Express avec Lucina Rowle, Chiara Runcorn, Iphigénie Shafiq, Terrence Harper et Jugurtha Craggy... Elle est exaspérante par son arrogance la petite Andromeda, hein? ;) 

Et puis la discussion bizarre avec Bhanu et... TED ! Très brève apparition, mais il pointe enfin le bout de son nez. Qu'en avez-vous pensé? Il revient aussi rapidement dans le prochain chapitre. 

Et bonne nouvelle, j'ai réussi à enfin boucler le chapitre suivant ! Merci pour vos lectures et votre soutien, ça m'a motivée de fou ! J'ai attaqué le chapitre 4, quand il sera presque fini, je mettrai le 3 en ligne (j'aime bien avoir au moins un chapitre d'avance pour pouvoir le relire et traquer les fautes)

Merci d'avoir lu ! 

3. Boudicca, sorcière rebelle by Juliette54
Author's Notes:

Coucou :) La suite est enfin là (c'est un peu chargé niveau perso ces temps-ci oups, j'avais dit mi-mai, c'est un peu plus tard). Merci Calixto, Winter et Sifoell pour vos reviews pleines d'enthousiasme !! Chapitre un peu plus calme (enfin je trouve)... 

Je remercie aussi Calixto pour sa relecture attentive <3 

Chapitre 3, Boudicca, sorcière rebelle

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Septembre 1969,

Le lendemain,

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« Princesse ! Viens un instant ! entendit-elle en descendant les marches de son dortoir. »

Marcus Parkinson était affalé dans l’un des canapés en cuir vert de la salle commune. A côté de lui, Timothée Selwyn riait grassement à une blague sans doute scabreuse. Elle retint un soupir, pensa à l’ignorer royalement mais hésita une seconde de trop. Il s’était déjà saisi de sa main et l’avait tirée sur le canapé lorsqu’elle eut fait son choix.

« Parkinson, que veux-tu ? soupira-t-elle en jetant un coup d’œil à ses ongles recouvert d’une teinte nacrée depuis la veille.

— Beaucoup de choses, suggéra-t-il avec un sourire qui se voulait séducteur mais qui lui donnait seulement envie de l’envoyer voltiger d’un coup de baguette. Mais à cet instant, je voulais surtout te proposer de t’accompagner petit-déjeuner. Qu’en dis-tu ? »

Son arrogance habituelle s’était légèrement éteinte lorsqu’il avait prononcé ces deux dernières phrases. Or le misérable cœur d’Andromeda en fut malheureusement touché.

« Joins-toi à Lucina et moi dans ce cas, proposa-t-elle avant d’y réfléchir véritablement. »

Elle se mordit les lèvres en voyant Lucina descendre. Pourquoi ne réfléchissait-elle plus depuis quelque temps lorsqu’elle parlait ? C’était franchement agaçant.

« Je voulais dire… reprit Parkinson en l’empêchant de se lever. Juste tous les deux, toi et moi, insista-t-il comme si elle n’avait pas compris. »

Certes, elle n’avait pas compris. Mais maintenant elle voyait où il voulait en venir, et elle refusait catégoriquement de se sentir comme attaquée une fois de plus en sa présence.

« Ne commence pas, Marcus, reprit-elle en gardant son calme. Nous sommes le 2 septembre, jour de la rentrée. Nous allons tous recevoir nos emplois du temps, ce n’est pas la peine de…

— Ce sera pour une autre fois alors, s’exclama-t-il en se levant. Après toi, fit-il en la laissant se lever. »

Il retira la main qu’il avait tendu pour l’aider à se lever, sûrement en souvenir de la scène qu’elle lui avait offerte hier. Tant mieux, songea-t-elle. Elle pouvait se débrouiller toute seule.

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« Je crois que nous avons pris les mêmes matières, lui fit Lucina en comparant leurs emplois du temps une fois à table. »

Andromeda vérifia qu’elle avait bien ses six matières, histoire de la Magie, Sortilèges, Potion, Défense contre les Forces du Mal, Astronomie et Étude des runes anciennes avant de jeter un coup d’œil à l’emploi du temps de son amie.

« Pas tout à fait, la contredit-elle. Tu n’as pris ni Étude des Runes, ni Défense contre les Forces du Mal.

— Je n’ai pas eu ma BUSE d’Étude des Runes, soupira Lucina. En soit, c’est plutôt logique ; je n’y comprends pas grand-chose, grimaça-t-elle. Et la Défense ne m’intéresse pas. J’ai pris Botanique à la place. J’aime m’occuper des plantes et puis mes parents y tenaient. Tu sais, avec les exportations… »

Andromeda opina distraitement, surprise de toutes les heures accumulées par le choix de ces six matières. Sa mère lui avait conseillé de se décharger de l’Étude des Runes et des Potions, mais Andromeda appréciait énormément ces deux matières, et elle avait dit qu’elle y songerait, sans en tenir compte une seule fois. Bellatrix l’avait encouragée à faire les choix qui lui semblaient bons, en lui précisant toutefois que l’astronomie, pour une Black qui se respectait, était non-négociable. Même si Andromeda n’avait pas besoin que sa sœur le lui rappelle pour choisir cette matière, elle avait été touchée de l’intérêt que portait Bella à sa vie et ses études.

« Je commence par l’Étude des Runes, annonça-t-elle à Lucina en souriant.

— Je me demande combien vous serez à avoir pris cette matière, fit Selwyn avec un reniflement méprisant.

— Sûrement moins que l’option je suis un stupide Veracrasse, lui envoya Lucina avec un regard noir avant qu’Andromeda n’ait pu répondre. »

Elle regarda son amie avec un immense sourire, pas vexée pour une Noise que Lucina lui ait coupé la parole. Un éclat de rire lui échappa même en constatant la mine défaite de Timothée. Marcus ne savait pas s’il devait se compter dans le grand nombre des optionnaires de je suis un stupide Veracrasse, et fronçait les sourcils, la bouche légèrement ouverte comme un poisson hors de l’eau.

Tout à fait réveillée et de la meilleure des humeurs qui soit, Andromeda se servit une généreuse cuillère d’œufs brouillés et servit Lucina en thé avant de se servir elle-même. Son amie lui retourna un large sourire, satisfaite d’avoir rendu muets les deux garçons en face d’elle.

« Je crois que cette année, je vais abandonner l’idée que les Faucons remporteront le tournois, reprit Lucina en se beurrant un toast. Je vais te rejoindre dans le soutien de l’équipe des Frelons.

— Tu dis cela parce que ton cousin est le nouvel attrapeur, embraya Andromeda avec un sourire entendu.

— Sûrement, murmura Lucina en étouffant un rire. Glorius est le meilleur de toute façon, rappela-t-elle avec une suffisance feinte. Serpentard a gagné la coupe de Quidditch de Poudlard trois années consécutives grâce à lui il y a quelques années.

— Il est vrai que les jumeaux Carrow étaient de terriblement mauvais batteurs, murmura-t-elle hypocritement.

— Ce furent les meilleurs de leur génération ! répliqua aussitôt Timothée qui ne comprenait pas le second degré.

— Elle était ironique, lui marmonna Marcus avec agacement. »

Elle regarda à nouveau Lucina et se mordit la lèvre inférieure pour ne pas exploser de rire. A chaque fois, elle s’étonnait de cette capacité qu’avait Lucina à la faire rire pour un rien par sa seule présence. Une sensation de légèreté s’emparait toujours d’elle lorsque son amie était là, et elle avait l’impression d’être un peu moins cynique.

D’un trait, elle but son verre de jus de citrouille, s’essuya la bouche délicatement avec la serviette de table et se leva pour récupérer ses affaires.

« Nous nous retrouvons à dix heures à la bibliothèque, lui rappela Lucina. Il faut vraiment que tu me racontes ce que tu n’as pas voulu m’expliquer hier, précisa-t-elle en baissant la voix. »

Andromeda hocha distraitement la tête et remonta la Grande Salle jusqu’à la Grande Porte.

Comment pourrait-elle raconter l’attitude inadmissible de Marcus sans passer pour une idiote innocente et naïve ? Sa résolution de ne plus être passive ou manipulée, et au contraire de montrer à tous les sorciers qu’une sorcière pouvait tout autant voire plus qu’eux ?

Mais Lucina comprendrait. Elle comprenait toujours ce qu’Andromeda voulait dire, et c’était rare qu’elles ne finissent pas par tomber d’accord.

« Andromeda ! »

La voix de Bhanu la coupa dans ses pensées, et elle se retourna pour le voir arriver vers elle avec deux types blonds de sa maison derrière lui. Elle reconnut l’un des deux comme le Préfet de Serdaigle, Tonks, dont les yeux appelaient à la rêverie. Pour l’autre, en revanche, rien ne lui revenait si ce n’était son appartenance à la maison Serdaigle, selon le blason brodé sur sa poitrine.

« Bonjour Bhanu, répondit-elle d’une voix posée. Tonks, salua-t-elle ensuite. »

Elle se contenta d’un signe de tête pour le troisième. Comme aimanté, son regard chercha à nouveau les yeux si étonnant de Tonks, et elle s’émerveilla encore une fois sur leur couleur.

« Black, marmonna lentement Tonks en plissant ses jolis yeux. »

Elle se força à écouter ce que Bhanu lui disait pour ne pas s’égarer dans sa rêverie. De toute façon, les deux yeux merveilleux s’étaient éloignés avec l’autre garçon blond.

« J’ai lu le rouleau de parchemin que tu m’as donné, dit-il simplement avec un sourire. »

Il lui tendait ledit rouleau avec ce même petit sourire. Juste pour se remettre les mots en tête, et le dessin à l’esprit, elle le déroula silencieusement. Au-dessus du grand aigle qu’elle avait dessiné, les lettres s’inscrivaient d’elle-même, tremblotantes, et l’oiseau ouvrait ses ailes pour s’envoler parmi les lettres et disparaître dans l’horizon de la feuille.

Un jour, rêvant que je volais,

J’ai ouvert mes bras à la vie

Pour me tourner vers l’infini

Et j’ai senti l’air sous mes pieds…

« Alors comme ça, tu sais voler ? s’amusa-t-il. »

Elle secoua la tête en voyant très bien qu’il la taquinait.

« Bien sûr que non, je ne sais pas voler sans balai, fit-elle avec le même sourire que lui. Mais je crois en mes rêves. Si je voulais voler, je volerais.

— Mais ce n’est pas cela dont tu rêves.

— Je rêvais de peindre, alors je l’ai fait. Je rêve de dessiner, alors je dessine. Et depuis quelques temps je rêvais d’écrire. Alors je l’ai fait. »

Il la regarda sans se départir de son sourire.

« J’aimerais bien lire la suite de ce poème, demanda-t-il.

— La strophe peut se suffire à elle-même, précisa inutilement Andromeda.

— Elle le peut, certes. Mais je sais que tu as prévu une suite, insista-t-il.

— Si tu me la demandes, c’est que mes gribouillages en valent la peine, fit-elle avec ingéniosité. »

Il ne dit rien, alors ce fut à elle de sourire un peu plus.

« Peut-être, dit-il finalement.

— Je serai à la bibliothèque avant le repas, tu n’auras qu’à y passer, lui suggéra-t-elle. 

— Tu te fais désirer, se moqua-t-il en croisant ses bras devant lui.

— Peut-être, répliqua-t-elle de la même manière. »

C’était faux. Le second carré de parchemin était simplement dans son dortoir, avec son carnet à dessin. Elle ne l’emportait pas avec elle en cours, ou bien c’était l’assurance de perdre sa concentration pour gribouiller dedans. Déjà que les marges de ses cours regorgeaient de dessin en tous genres, ce n’était pas la peine d’être encore moins attentive. 

C’est l’instant que choisit la porte de la salle de cours pour s’ouvrir en grinçant. Les élèves se tournèrent vers le bruit sans sursaut, habitués aux manières du professeur Marina Martinez et de sa salle de classe sombre qui croulait sous les parchemins et les livres anciens. Andromeda fit un signe de tête à Bhanu pour lui dire qu’elle entrait et il lui emboîta le pas.

Elle s’assit à sa place habituelle, la même depuis la troisième année. D’ordinaire, Lucina s’asseyait à côté d’elle. Mais Lucina avait arrêté l’Étude des Runes. Alors la place était vacante. Un instant, elle pensa à demander à Bhanu de venir occuper la place à côté d’elle, puis elle oublia l’idée en le voyant avec son ami Tonks. Ils feraient sûrement équipe cette année encore.

Elle sortit ses deux manuels et son syllabaire Lunerousse sans faire attention au professeur Martinez qui cherchait un livre sur la grande étagère de la salle de classe.

« Rowle n’est pas là ? lui demanda la voix de Bhanu derrière elle. »

Elle se redressa. Il s’était assis sur la table derrière elle avec son ami Tonks. Ils n’avaient aucun manuel devant eux.

« Elle n’a pas gardé l’Étude des runes, l’informa-t-elle. Pourquoi ?

— J’ai oublié mes manuels et Ted aussi, lui expliqua-t-il en grimaçant.

— C’est le premier cours, on ne va pas faire grand-chose, dit-elle en haussant les épaules. »

Ted Tonks, bien sûr. Elle le savait, Bhanu le lui avait déjà dit suffisamment de fois.

« Mesdemoiselles et Messieurs, les salua enfin la Professeure Martinez. J’espère que vous avez passé de bonnes vacances, mais si nous voulons que vous ayez… Merci de nous honorer de votre présence Monsieur Harper, se coupa sarcastiquement le professeur au caractère de feu alors que le Serpentard entrait de façon nonchalante dans la salle de classe. Veuillez vous asseoir à côté de Miss Black, elle se sent seule depuis que Miss Rowle n’est plus là pour raconter des pitreries, marmonna-t-elle. »

Andromeda fronça les sourcils, déjà agacée par le manque de respect du professeur Martinez. Malheureusement pour elle, les quelques élèves qui avaient gardé cette matière se mirent à rire et elle se retint de faire un commentaire. Elle avait déjà fait des vagues hier, ce n’était pas la peine de suivre le chemin de Bella en ce qui concernait sa collection de retenues pour insolence.

« Bien, nous sommes douze cette année, à ce que je vois. Je fais l’appel et nous commencerons par une version de remise en forme. Pas de protestation ! s’exclama-t-elle alors que du remous se faisait entendre. Qu’y a-t-il Monsieur Patil ? Je vous en prie, ne me dites pas que vous avez déjà oublié votre dictionnaire de Runes ? Vous êtes terrible ! Allez donc en chercher un dans l’armoire du fond. Je commence l’appel : Andromeda Black, oui, oui je vous ai vue Miss Black. Adalbert Boot, bien sûr. Felicity Fronsac, évidemment… »

Andromeda se désintéressa de ses camarades pour sortir son rouleau de parchemin dont elle coupa trente centimètres pour faire son brouillon. Elle regarda ensuite le sujet de runes à traduire : Boudicca, sorcière rebelle. Voilà comment commencer une bonne année.

.

Deux heures plus tard, elle posa sa traduction sur le bureau du professeur Martinez et retourna ranger ses affaires. Elle jeta un coup d’œil à Bhanuprasad qui semblait s’arracher les cheveux sur le texte et à son voisin plus frustré que concentré. Terence semblait avoir abandonné et froissait son brouillon, l’air dépité. Il passa devant elle, et manqua de lui lâcher la porte sur le visage avant de l’apercevoir. Elle passa rapidement, et tint la porte à une petite blonde de la Maison Serdaigle.

« Boudicca, franchement, marmonna Terence une fois qu’elle fut à son niveau.

— Une grande sorcière, commenta simplement Andromeda.

— Peut-être. Mais c’était surtout un grand n’importe quoi ma traduction, avoua Harper. J’ai inventé des phrases entières.

— C’est trop tard à présent, fit-elle en haussant les épaules. »

Elle faillit lui foncer dedans lorsqu’il s’arrêta.

« On peut dire que tu sais remonter le moral aux gens, toi, grimaça-t-il en se remettant à marcher.

— Ce n’était pas mon intention, s’étonna Andromeda avant d’avoir compris l’ironie. »

Elle s’en voulut de n’avoir pas su tenir sa langue dans sa bouche en entendant le rire sarcastique d’Harper.

« Parfois, Black, je me demande dans quel monde tu vis, marmonna-t-il en donnant le mot de passe de la Salle Commune de Serpentard. Camera Secretorum !

— Est-ce Flint ou Montague qui a choisi ce mot de passe ? se désespéra-t-elle. Ils n’en ont pas assez avec cette Chambre des Secrets qu’on ne trouvera jamais ?

— Flint y croit dur comme bois de baguette, fit Terence en haussant les épaules. »

Il s’enfuit dans les escaliers menant aux dortoirs des garçons. Un sourire sarcastique la prit en pensant que Flint avait beau paraître réfléchi, il était plus que désespérant avec ses croyances étranges. Lucina n’était pas dans leur dortoir. Seule Laura Patterson, cette fille étrange aux robes difformes avait la tête plongée dans son placard, sans doute à la recherche de quelque objet perdu dans son bazar. Andromeda n’y fit pas plus attention et tira son carnet à dessin de sa table de chevet.

Dix minutes plus tard, elle retrouva son amie Lucina à la bibliothèque. Laquelle se tenait bien droite sur sa chaise à la table du fond. Elle crayonnait dans un grand cahier qu’Andromeda connaissait bien. Approchant à pas de loup pour ne pas la déconcentrer, elle se pencha légèrement derrière son épaule pour observer ses coups de crayons. L’aquarelle donnait déjà une teinte chaleureuse au paysage, comme les couleurs de l’automne encore jeune.

« C’est la colline du Chêne de Merlin à Flaglet-le-Haut ? murmura Andromeda. »

Lucina sursauta si bien que son crayon barra l’angle de la page qu’elle travaillait. Elle retourna un regard furieux à son amie.

« Tu as gâché mon aquarelle ! s’indigna-t-elle en chuchotant furieusement.

— Je n’aurais jamais osé, répliqua-t-elle intelligemment. »

Lucina ronchonna et entreprit de gommer le trait fautif sous l’œil amusé d’Andromeda. C’était si facile de contrarier son amie.

« C’est vraiment splendide, fit enfin Andromeda sans lâcher du regard ses cheveux soyeux et tout à fait lisses. Tu devrais en proposer une à l’Exposition d’automne. »

Seul le rire méprisant de son amie lui répondit.

« Ils n’acceptent que des portraits. J’y suis allée l’année dernière, et je leur ai demandé où se trouvaient les paysages. Nous ne sommes pas ces originaux d’Allemands et de Français, Miss Rowle ! Voilà tout ce qu’on m’a dit, fit-elle avec mépris. »

Andromeda grimaça et se demanda à nouveau pourquoi aucun artiste depuis Bellah Shack-Nitics n’osait l’originalité. Il y avait bien l’artiste expérimentale Magenta Comstock qui avait osé bouleverser les habitudes en laissant les yeux de ses portraits non seulement suivre les spectateurs dans la salle mais aussi jusque chez eux. Mais à part ces deux artistes, personne ne s’était réellement permis de révolutionner l’art sorcier. Même Magenta Comstock était restée dans des formes classiques, un style classique et des sujets classiques.

« Enfin, j’enverrai une toile en France ou en Allemagne un jour, murmura Lucina en riant jaune. »

Andromeda grimaça. Niels Robertson, le responsable des vernissages sur le Chemin de Traverse était d’une étroitesse d’esprit stupéfiante. En quoi l’art avait-il une frontière ? En quoi ne pouvait-on pas proposer de nouvelles règles ?

Lucina reposa sa gomme à crayon à dessin, et releva le visage vers son amie. Ses fossettes se creusèrent lorsqu’elle sourit, et ses yeux sombres se firent pétillants.

« Ou bien je m’y rendrais moi-même, souffla-t-elle en haussant un sourcil. Tu m’accompagneras ?

— Je te le promets, lui souffla Andromeda en retour. »

Elles étouffèrent un pouffement de rire pour ne pas attirer l’attention de la bibliothécaire.

« Parle-moi de ce qu’il s’est passé avec Marcus pendant les vacances. Tu n’as rien voulu m’en dire hier, lui demanda Lucina à voix basse. »

Andromeda soupira puis lui raconta ce qui s’était passé avec le moins de mots possible :

« Il a tenté de… »

Elle fit une grimace à Lucina en espérant qu’elle comprenne ce qu’il en retournait, mais elle se rendit compte que ses mots n’avaient aucun sens et qu’elle n’avait même pas formé de phrase. Alors elle se décida à tout lui raconter, quitte à passer pour idiote de n’avoir rien vu venir. Lucina la regarda avec des yeux ronds, éberluée par ce qu’elle entendait. Puis elle secoua la tête, comme cherchant à remettre ses idées en place.

« Je ne pensais pas que Parkinson agirait de la sorte… souffla Lucina, pensive. Je pensais qu’il s’en tiendrait à ses petites attentions, comme il l’a fait toute l’année précédente mais…

— Mais c’étaient des attentions amicales et… protesta Andromeda sans y croire vraiment. »

Le sourire moqueur que lui retourna Lucina lui coupa la parole.

« Je t’ai répété des dizaines de fois qu’il était un peu trop prévenant pour un simple ami, lui chuchota Lucina avec un sourcil arqué. »

Après un petit silence qui en disait long, Lucina ricana à mi-voix.

« A lui parler de ces yeux en ces termes aussi, il a dû se dire qu’il t’avait dans la poche, fit-elle avant de souffler sur son aquarelle.

— C’était une simple remarque esthétique, précisa une nouvelle fois Andromeda en sentant ses oreilles chauffer. J’aurais pu faire la même à n’importe qui, si ses yeux avaient attiré mon attention. Même si je sais que ceci peut prêter à confusion, reprit-elle alors que Lucina ouvrait la bouche. Mais comme je pensais que c’était mon ami et…

— L’un n’empêche pas l’autre, souffla Lucina en fermant son carnet à dessin.

— C’est-à-dire ? s’étonna Andromeda.

— Il peut être officiellement ton ami et vouloir te fréquenter. Il attendait peut-être le bon moment, précisa Lucina sous les yeux exorbités d’Andromeda. Rejoins-moi sur Terre, Andromeda, souffla-t-elle avec amusement. C’est indéniable que tu lui plais. Sans parler du fait qu’il faudra bien que tu te choisisses un époux dans quelques années, autant en chercher un à Poudlard, que tu puisses prendre le temps de le connaître sans être sous la surveillance de tes parents, lui expliqua-t-elle calmement comme si elle était sa fille.

— Mais nous ne sommes qu’en début de sixième année, lui rappela Andromeda avec une moue dubitative.

— L’année des ASPIC approche, lui rappela Lucina. »

Andromeda regarda Lucina avec étonnement. Sous ses grands yeux noisette et son visage ovale, Lucina lui avait toujours parue un peu hors du temps. Ses longs cheveux bruns, sans aucune boucle ni aucun faux plis, lui tombaient dans le dos en brillant toute la journée. Ses fossettes finissaient un portrait si ce n’est parfait, du moins lisse et délicat.

« Donc toi, quelqu’un te plait ? Tu… tu as déjà quelqu’un en vue pour ton avenir ? s’étonna Andromeda en cherchant mentalement qui cela pouvait-il être.

— Pas encore, lui avoua Lucina. Et je ne sais pas si j’ai envie de m’en préoccuper.

— Mais tu me disais…

— Je t’explique la situation dans laquelle doit se trouver Marcus et un grand nombre d’autres, la coupa Lucina avec ce sourire moqueur que les Rowle maniaient à la perfection. Moi je veux peindre, je penserai aux hommes et au mariage plus tard. »

Andromeda cligna des yeux, tout à fait perdue.

« Je pourrais très bien me marier à vingt-cinq ans au lieu de vingt ans, personne ne m’en tiendra rigueur, pointa Lucina en haussant les épaules. Mais Marcus semble pressé, ce qui n’est pas toujours bon signe, soit dit en passant, souffla Lucina avec un sourire moqueur.

— Problème financier ? souffla Andromeda en se rappelant avoir entendu les Lestrange discuter de la dot de Bellatrix.

— Ou peur que celle qu’il convoite ne lui échappe, souffla Lucina en se moquant allègrement d’elle. »

Andromeda lui donna un coup de coude qui fit s’esclaffer Lucina. Le grognement de la bibliothécaire les calma un peu.

« Et sinon, comment s’est passé ton cours de Runes ? lui demanda Lucina en laissant sa tête retomber dans sa main.

— Nous avons eu une traduction de remise en forme. C’était un extrait des Légendes des deux Bretagnes d’Aryagalatis portant sur Boudicca. 

— On dirait que ceci a fait ta journée, commenta Lucina avec amusement.

— Exact. »

Elle se pencha sur son sac en cuir pour en tirer le sujet et le montrer à son amie. Elle sourit en voyant sa grimace, et se contenta de relire sa traduction. Elle repéra deux ou trois fautes, bien évidemment, mais elles étaient mineures, elle ne s’en formalisa donc pas. Finalement, Lucina finit par se lever, et rentrer à son dortoir poser son matériel à dessin. Andromeda préféra lui dire qu’elle la rejoindrait dans la Grande Salle dans quelques minutes.

Elle tira une plume de son sac, la trempa dans un peu d’encre, remonta sa manche et l’approcha de son avant-bras. Elle se mordit la lèvre inférieure, sachant bel et bien quelle serait la réaction de ses parents s’ils la voyaient écrire sur sa peau. Mais ils n’étaient pas là, et ce n’était pas quelque chose de grave, de toute façon. Ce soir, après sa douche, tout aurait disparu.

ᛒ ᛟ ᚢ ᛞ ᛁ ᚲ ᚲ ᚨ

Puis elle prit sa baguette, et l’agita au-dessus du prénom écrit en rune.

« Libertatem Boudiccae do, souffla-t-elle en faisant de petits tours avec sa baguette. »

C’est à ce moment-là que Bhanuprasad entra dans la bibliothèque. Elle déroula prestement sa manche, comme prise en faute. Puis elle lui fit signe de la table à laquelle elle était encore assise et il se dirigea vers elle en souriant.

« Déjà en train de travailler ? s’étonna-t-il en voyant son texte de Runes.

— Je relisais simplement ma version. »

Elle tira un petit rouleau de parchemin de son sac et le posa devant lui.

« Je peux ? demanda-t-il. »

Elle hocha la tête et s’empêcha de le regarder dérouler le carré de papier, encore surprise d’avoir caché à Bhanu les simples traits d’encre dont elle avait marbré sa peau. Il s’en fichait et il n’en dirait rien à ses parents. Ce n’était pas son genre de rapporter tous ses faits et gestes à quiconque. Son attitude était si stupide, qu’elle se força à remonter sa manche et à vérifier que son sortilège fonctionnait toujours. Les lettres avaient disparu, ce qui la fit sourire. Puis elles revinrent chacune leur tour à leur place, comme soufflées vers le lieu de leur naissance par un grand vent. Ceci ne les empêcha pas de tourner sur elles-mêmes, sans doute par amusement.

« C’est un tatouage permanent ? s’étonna Bhanu en fixant son avant-bras. »

Elle se mordit à nouveau la lèvre inférieure. Si seulement, pensa-t-elle. Mais sa mère en serait sans doute devenue folle.

« Non, je l’ai fait à la plume, il part à l’eau.

— Avec de l’encre pour parchemin ? Et tu arrives tout de même à l’animer ? s’étonna-t-il. Boudicca… Je vois que la version de ce matin t’a inspirée.

— Pourquoi n’y arriverais-je pas ? s’étonna-t-elle. Le sortilège ne dépend pas de l’encre ni de la manière de l’appliquer. »

Il regarda son bras en fronçant les sourcils, revint au parchemin, et reporta à nouveau son attention sur son tatouage temporaire, puis enfin il fixa son regard sur les vers.

Le seul dessin qu’elle avait fait pour accompagner ses vers se trouvait être l’ombre d’une sorcière aux cheveux bouclés, comme les siens. C’était un autoportrait, peut-être. L’ombre sortait sa baguette, lançait un sortilège qui effaçait la strophe de quatre vers pour laisser une autre la remplacer. Puis elle s’enfonçait dans l’horizon.

Un soir, rêvant que je mourrais

J’ai quitté à jamais mon lit

Pour faire ce dont j’avais envie

Et ils m’ont laissé guerroyer…

.

Minuit, rêvant que je vivais,

J’ai oublié jusqu’à mon ris

Pour découvrir le paradis

Et j’ai écrit, peint et pensé…

« Qu’est-ce que le ris ? demanda-t-il en fronçant les sourcils. »

Bhanu était bilingue depuis tout petit. Peut-être même qu’il avait appris l’anglais avant l’hindi, et lorsqu’il ne comprenait pas un mot, il avait ce petit pli de contrariété qui lui barrait le front.

« C’est une ancienne forme du nom rire, qui vient lui-même du verbe rire, mais utilisé comme un nom.

— C’était pour la rime ? lui demanda Bhanu avec l’ébauche d’un sourire moqueur.

— Non, lui expliqua-t-elle avec un sourire en coin. Si j’oublie mon ris, c’est qu’il est passé, ancien, désuet. Et j’oublie aussi mon passé et mes souvenirs. »

Il ne quitta pas des yeux les vers, laissant la magie faire réapparaître les deux strophes. Ses lèvres étaient pincées, comme s’il se retenait de dire quelque chose. Ce qui était inhabituel : peut-être qu’il y mettait les formes, mais Bhanuprasad disait toujours ce qu’il voulait. Abandonnant les feuillets, il ouvrit son sac pour un sortir un carré de parchemin plié en deux. Il hésita une seconde, puis le lui tendit.

Elle le prit, troublée par tant de sérieux pour un morceau de papier.

« Ouvre-le, souffla-t-il. »

Intriguée, elle déplia le morceau de parchemin.

Comme tu peux lire ces mots, tu as ta place parmi nous.

Nous sommes la société secrète de La Plume Enchantée.

Nous manions nos plumes pour le plaisir.

Nous laissons nos voix emplir notre île secrète.

Nous nous autorisons le mystère, l’inconnu, la découverte.

Nous lisons, nous écrivons, nous refaisons le monde.

Si la curiosité te prend,

Le sept septembre,

Descends dans les cachots à minuit,

Prends le couloir de Pallas Winfeather,

Porte sept,

Étagère sept,

Livre sept.

Ouvre-le.

Et tu pénètreras dans les couloirs de La Plume enchantée.

.

Elle se sentit hausser un peu plus les sourcils au fur et à mesure de sa lecture. Une société secrète ? Rien que cela ? En plein Poudlard ? Le directeur, ce fou de Dumbledore, était forcément au courant. Il avait des yeux partout. Mais Bhanuprasad la regardait toujours avec sérieux.

« Est-ce que tu me fais une blague ? souffla-t-elle. Une société littéraire secrète ? Dans les cachots de Poudlard ? Vraiment ? »

Un sourire en coin gracia ses lèvres et il se pencha vers elle.

« Ai-je l’air de plaisanter ? fit-il. Tu écris, tu dessines, tu as ta place parmi nous.

— Tu écris, toi aussi ?

— De la poésie, avoua-t-il. Tu pourras l’entendre si tu viens. »

Elle regarda Bhanu autrement. Quand elle pensait qu’ils avaient une relation spéciale, elle était loin de se douter de toutes les facettes de cette relation.

« L’année dernière, La Plume-en-chef, c’est-à-dire la personne qui dirigeait la société, était en septième année. Elle n’est donc plus là aujourd’hui. Or… »

Il regarda autour de lui, pour être sûr que personne ne les écoutait. Puis il remonta sa manche gauche et Andromeda put voir une petite plume dessinée à l’encre mauve laisser trois gouttes d’encre colorer son bras.

« Nous avons tous ceci, ce qui nous permet de nous reconnaître en tout temps, lui expliqua-t-il brièvement. Mais depuis que La Plume-en-chef est partie… Nous cherchions quelqu’un qui sache dessiner à l’encre. Tu… fit-il encore plus bas. Or tu sais dessiner et animer l’encre sur la peau. »

Il se mit à marmonner en hindi, un air soucieux plaqué sur le visage. Puis voyant le sourcil arqué d’Andromeda il reprit en anglais.

« Tu saurais en faire de même avec de l’encre indélébile ? fit-il enfin.

— Un vrai tatouage ? Avec des aiguilles ? s’inquiéta-t-elle. Bhanu, je…

— Non, à la plume, mais avec de l’encre qui reste sur la peau pendant un an entier.

— Sûrement si c’est avec une plume classique, se rassura-t-elle aussitôt. Mais dis-moi, tu me demandes de venir pour écrire ou dessiner ? »

Bhanuprasad se recula sur sa chaise et reprit son fameux sourire amusé.

« Les deux, fit-il. »

Ils se regardèrent un instant sans rien dire, puis la sonnerie annonçant la fin des cours de la matinée retentit. Il lui rendit ses rouleaux de parchemin et lui tendit un livre peu épais.

« Lis au moins les deux premiers chapitres, ce pourrait t’être utile, lui dit-il simplement. »

L’auteur ne lui disait rien, le titre non plus.

« L’auteur est un Moldu, lui fit-il sans la lâcher des yeux. »

Elle pinça les lèvres, prête à lui demander en quoi cela lui serait utile, mais il était déjà parti.

Elle n’avait rien, personnellement, contre les Moldus. Disons plutôt qu’ils ne l’intéressaient pas. Elle ne voyait pas très bien ce qu’il pouvait y avoir de sensationnel dans leur vie, ni même d’intéressant. Ils ne faisaient pas de magie, donc ils ne pouvaient pas faire mieux que les sorciers. Mais tant qu’ils ne lui cherchaient pas de noises, elle s’en fichait éperdument. Bellatrix perdait son temps en les attaquant, il y avait mieux à faire. Quant aux Nés-Moldus… C’étaient tout de même des sorciers. Peut-être des sorciers de bas étage, mais des sorciers néanmoins. Pour sa part, elle n’irait pas s’acoquiner avec eux, surtout s’il fallait côtoyer les Moldus de leur famille, mais elle les laissait devenir des sorciers à part entière.

Et en ce qui concernait leur culture…

Elle fourra le livre de Bhanuprasad dans son sac. Elle lui dirait qu’elle l’avait lu lorsqu’elle lui rendrait. Il n’avait pas besoin de savoir que ce n’était pas vrai.

 

End Notes:

Alors alors, un peu de Marcus Parkinson (quel lourdingue...), un peu de Bhanu, et de Ted (confettis de fangirl héhé), un peu de Terence Harper, un peu de Lucina... Et enfin un peu de Plume Enchantée (un tout petit peu, un peu plus au prochain chapitre et beaucoup plus encore après !). 

Vous pensez qu'Andromeda va lire ce fameux livre ? Et vous pensez que c'est quel livre ? Les paris sont ouverts ! ;) 

Merci d'avoir lu, j'espère que l'histoire vous plaît toujours ! 

Ju'

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