Harry ouvrit les yeux en sentant une main tapoter sa joue. Il ne pensait pas avoir perdu conscience jusqu’à ce qu’il se réveille. Sa vision le hantait encore et il se redressa rapidement.
– J’ai… j’ai vu une lumière verte, balbutia Harry en se frottant l’arrière de la tête. Et un rire d… diabolique. Je… je crois que j’ai aussi entendu ma mère.
Face à lui, ses amis le fixèrent d’un air inquiet. Puis Wisteria se racla la gorge.
– C’était un détraqueur, ils font revivre nos pires souvenirs. J’imagine que pour toi ça doit être la mort de tes parents, même si tu ne t’en souviens pas consciemment.
Harry croisa son reflet dans la vitre du train. Il n’osait pas regarder les autres. Il n’avait que trop bien conscience d’avoir été le seul à s’être évanoui. Et il avait honte. Il était un Gryffondor ! Il pouvait se battre et être fort !
– Prends une chocogrenouille, lui conseilla sa cousine avec un sourire un peu triste.
Harry obtempéra – il était encore trop abasourdi pour tenir tête à la Poufsouffle – et deux questions s’imposèrent dans son esprit. La première était simplement de la curiosité mal-placée : qu’est-ce qu’avaient vu ses amis ? Ils avaient tous grandi plutôt protégés dans leurs familles. Mais à regarder leurs visages pâles, il commençait soudainement à craindre ne pas les connaître suffisamment. Qu’est-ce qui pouvait bien être arrivé à Susan qui respirait la joie de vivre pour que les détraqueurs la fassent trembler comme une feuille morte ? Qu’est-ce que cachait Drago, le riche héritier d’une famille noble, pour avoir un teint plus blanc que le lait ? Qu’est-ce qui perturbait Ron au point de le faire recracher son fondant au chaudron ? De quoi pouvait se souvenir Wisteria qui avait que quelques mois à la fin de la guerre ? Seules Ginny et l’amie de sa cousine semblaient être moins affectées que les autres. Et bien sûr Luna qui ne semblait même pas s’être rendue compte qu’il se passait quelque chose d’anormal.
– Ça va ? s’enquit-il, inquiet pour ses amis. J’offre une tournée de chocogrenouilles !
Il les distribua quand soudainement la deuxième question se fraya le chemin de son cerveau jusqu’à sa bouche.
– Pourquoi un sort vert ?
Il voyait bien que c’était une question que la plupart d’entre eux ne s’était jamais posée. Même Wisteria, pourtant leur spécialiste en matière de sorts offensifs et défensifs, secouait la tête. Harry abandonna toute chance d’avoir une réponse. Si les sorciers depuis toujours ne savaient pas, il allait devoir chercher à la bibliothèque et franchement il n’avait pas envie. Et pourtant la lumière verte ne voulait pas lui sortir de l'esprit.
– C’est à cause de la longueur d’ondes du sort, lâcha l’amie de sa cousine – il venait de la rencontrer et avait oublié son nom. Le sort impardonnable Avada kedavra qui a comme but de tuer nécessite une force transmise par des photons. Ceux-là ont justement une longueur d’ondes qui correspond au vert. Comme il s’agit d’un sort de magie noire, on peut supposer qu’il est en lien avec le symbolisme négatif du vert, donc l’infortune ou l’échec. On peut aussi y associer le détachement soit sous le sens de neutralité, soit plus pragmatique avec l’effet du sort. Tu vois, le sortilège de mort est aussi efficace car il défait les liens entre la vie, l’âme et le corps, le monde. Il détache l’individu de l’emprise du monde. Vous saviez que personne qui meurt par lui ne peut revenir comme fantôme ? C’est parce que les fantômes…
– Je crois qu’on ne veut pas en savoir plus, l’interrompit Drago avec un malaise évident.
Harry fixa la jeune fille avec des yeux ébahis. D’où elle pouvait savoir ça ! Mais au moins cela confirmait que les sorts n’avaient pas une couleur au hasard. Ce sort vert le hantait. Vert émeraude, presque de la couleur de ses yeux…