Summary:
© Fanart par @little_artist___ sur instagram
Au fil des années, Ginny et Luna se rencontrent, s’apprivoisent, s’aiment, se confient, s’embrassent, s’éloignent, se touchent, se réconfortent, rient, pleurent.
Au fil des années, Ginny et Luna se découvrent, strate par strate.
Sous ces étoiles ou d’autres, jusqu’à brûler la lune.
Court recueil sans prétention
Joyeux mois des fiertés ♥
Categories: Tranches de vie,
Epoque de Harry,
Linny (Ginny/Luna) Characters: Ginny Weasley, Luna Lovegood
Genres: Amitié, Femslash/Yuri, Missing Moments
Langue: Français
Warnings: Aucun
Challenges: Aucun
Series: Aucun
Chapters: 6
Completed: Oui
Word count: 9188
Read: 2886
Published: 21/06/2022
Updated: 30/09/2022
Story Notes:
Hello HPF ♥ oui, ça faisait très longtemps que je n'avais pas posté par ici (presque un an) – à vrai dire, je n'écris plus beaucoup de fanfiction ; je n'écris plus beaucoup tout court. Mais voilà, en plein angine du mois de juin, j'ai eu envie d'écrire ce petit recueil : rien de révolutionnaire, bourré de tropes à la cool qu'on aime – que j'aime et que, j'espère, vous aimerez aussi. Il sera composé de cinq textes, illustrés par cinq fanarts parce que pourquoi pas ? Je vous en souhaite une bonne lecture !
1. Ondine by Seonne
2. Cavalière by Seonne
3. Quidditch by Seonne
4. Résistantes by Seonne
5. Interlude by Seonne
6. Soleil by Seonne
— Tu sais, Luna, la première fois que je t'ai parlé, je me suis demandé si tu étais une vraie personne.
*
Allongée dans les herbes jaunâtres et sèches, Ginny tient ses jumelles plaquées contre ses yeux. Il n'y a rien à voir, dans les collines qui forment un paysage morne sous le soleil écrasant de septembre. Il fait bien vingt-cinq degrés et elle s'est mise à l'ombre, sous un des grands arbres dont elle n'a pas retenu le nom.
Elle soupire. Cela ne fait pas une semaine que Bill, Charlie et Percy sont repartis à Poudard qu'elle s'ennuie déjà après eux. Ce matin, elle a demandé à Maman quand ils reviendraient – elle lui a répondu de commencer par finir son petit déjeuner. Pas que pour Percy, ça change grand-chose. Mais, au moins, Bill et Charlie joue parfois avec elle.
Fred et George, eux, ont décrété qu'une fille ne pouvait pas jouer avec eux, parce que les filles, c'est trop peureux et ça fait que pleurer. Et parce qu'elle est trop petite. Ginny, elle, pense que c'est n'importe quoi. Ron, il est dix fois plus trouillard qu'elle, et puis, il n'a qu'un an de plus qu'elle. Alors c'est n'importe quoi que lui puisse jouer avec eux et pas elle. Pour leur faire croire qu'elle était devenue un garçon, elle a coupé tous ses cheveux avec les gros ciseaux qui traînent sur la table de la cuisine.
Maman était furieuse. Et Fred et George n'ont fait que rigoler.
Ginny passe le bout de ses doigts dans les mèches très courtes qui s'arrêtent à la base de son crâne. Elle trouve que c'est bien, elle. On dirait un garçon, pourtant. Les jumeaux auraient pu se laisser berner.
Ennuyée par sa contemplation d'un paysage trop immobile, elle finit par se relever. Des brins piquants restent pris dans les mailles de sa robe et ses genoux sont tous fripés. Sa peau est constellée de plis et de poussière. C'est à peine si elle y jette un regard. Elle tourne le dos aux vallons déserts et au seul élément intéressant du paysage : la tour noire perchée un peu plus loin, avec sa lune perchée au-dessus.
Les gens qui y vivent doivent être très spéciaux, c'est ce qu'elle s'est toujours dit. Maman ne les aime pas trop et Ginny trouve que c'est bizarre, de ne pas aimer des gens qui s'appellent Love-good – aime-bien. Papa, il dit que le monsieur qui y habite est gentil, et il va les voir, parfois.
Il y a une petite fille, dans la tour noire, aussi. Ginny l'a vu plusieurs fois, mais elle ne lui a jamais parlé. Elle ne veut pas aller à la tour noire avec Papa, quand il s'y rend – elle ne l'avouerait jamais devant Fred et George, mais la tour noire lui fait un peu peur. Elle s'imagine des histoires de dragons qu'elle tue d'un coup de baguette magique pour libérer la princesse blonde, comme dans le conte Moldu que Papa lui raconte en secret.
Ginny aime bien les contes Moldus. Papa se trompe souvent dans les histoires, parce qu'il ne s'en souvient pas très bien, mais ça la change de Beedle que Maman connaît si bien qu'elle n'a plus besoin du livre pour les réciter par cœur...
S'imaginant sauter entre les ronces d'un palais ensorcelé sorti de son imagination, Ginny dévale la pente qui mène à la petite rivière qui coule dans le sous-bois. Il y a moins de lumière, ici, et elle peut s'amuser à combattre les ombres qu'elle transforme en monstres. Sans prendre la peine de retirer ses chaussures, elle saute à pieds joints dans l'eau claire et écoute le clapotis quand elle marche.
Les yeux à demi-fermés, elle tourbillonne sur elle-même en inventant des noms de sortilèges qu'elle récite en chuchotant. Elle ne regarde pas où elle met les pieds et elle ne voit pas son lacet se coincer sous l'un des rochers immergés – elle sent quelque chose la retenir mais, avant qu'elle n'ait pu l'identifier, elle trébuche et la voilà la tête dans le ruisseau.
Ginny ressort la tête, crachote l'eau boueuse qu'elle a avalé et cligne des yeux.
Quand elle ne voit plus flou, elle ne peut retenir un cri et un bond en arrière.
Devant elle se trouve une créature au teint grisâtre et aux cheveux translucides. Et la créature la dévisage, parfaitement immobile, alors que Ginny recule d'un bon mètre – sans parvenir à décoincer son pied.
Je ne suis pas une froussarde.
Alors, elle ne va pas s'enfuir.
— Bonjour.
La créature parle. Ginny fait fonctionner son cerveau à toute vitesse. Avec son visage angélique, sa voix toute brumeuse et sa robe blanche détrempée, il doit s'agir d'une ondine. Ses boucles trempées lui descendent jusqu'à la taille.
— Tu... tu parles ?
— Toi aussi, observe son interlocutrice.
Elles se dévisagent encore un moment sans rien dire.
Bien sûr, Ginny ne reconnaît pas la petite fille de la tour noire. Celle-ci sautille toujours en rigolant. La petite fille face à elle a la figure triste. Ses traits coulent comme si elle avait pleuré trop longtemps. Et dans l'obscurité du sous-bois, elle apparaît comme une ombre.
— Est-ce que tu es une ondine ?
Un mince sourire étire les lèvres pâles de la nymphe et Ginny se sent rougir. Tout doucement, sa bouche s'entrouvre et elle émet un petit rire – presque un soupir.
— Ne te moque pas de moi ! Tu dois me répondre.
— Je ne suis pas une ondine.
— Tu es quoi, alors ?
— Je suis une sorcière.
Ginny ne peut se retenir de lâcher un « oh ». Les rouages de son esprit s'actionnent et elle considère qu'il puisse s'agir de...
— Tu es la princesse de la tour noire ?
L'autre fronce les sourcils, confuse. Dans un sens de l'orientation approximatif, Ginny pointe du doigt l'habitation qu'on aperçoit vaguement entre deux cimes. Alors, l'inconnue acquiesce.
— Tu n'as pas la même tête que d'habitude. Comme si tu avais perdu quelque chose. Comme si tu avais perdu... de la couleur.
Oui, de près, Ginny la trouve grise. Des larmes montent aux yeux de la fillette et Ginny se sent rougir.
— Ah, non ! Ne pleure pas.
— D'accord. C'est vrai que j'ai p... j'ai perdu quelque chose.
— Alors, on peut essayer de le retrouver.
La princesse de la tour noire cligne encore des paupières, elle ne paraît pas comprendre. Ginny se lève et lui tend un bras :
— Tu es une princesse et moi je suis une preuse chevalière. Et, les chevaliers, dans les histoires, ils aident toujours les princesses quand elles sont perdues ou qu'elles sont en danger, tu vois ce que je veux dire ? Enfin, c'est chez les Moldus, parce que les sorcières, elles peuvent bien se débrouiller toutes seules. Mais tu es peut-être une sorcière qui a besoin d'une chevalière ?
Un instant de silence passe, comme si la fillette ne comprenait toujours pas. Ginny se mord l'intérieur de la joue : Percy dit toujours qu'elle s'exprime mal et qu'il ne faut pas s'étonner que personne ne comprenne ses ipténies. Mais après une seconde d'hésitation, la princesse attrape son bras et se lève à son tour. Bras dessus, bras dessous, elles se dévisagent, presque surprises par cette soudaine proximité. Et elles éclatent de rire.
— Alors, princesse, qu'est-ce qu'on cherche ?
— Une très grande sorcière, une expérimentatrice, une des meilleures de sa génération. Elle est très gentille et très douce.
— Voilà une quête digne de Sire Ginny ! C'est quoi ton prénom, à toi ?
— Luna.
— En route, Lady Luna !
*
— La première fois que je t'ai parlé, Ginny, j'ai cru que tu sortais d'un rêve.
Ce que Luna ne lui dit pas, c'est qu'elle avait imploré sa maman, là-haut dans le ciel dont elle ne pouvait voir les étoiles en plein jour, de ne pas la laisser seule.
Et sa preuse chevalière était accourue à sa rescousse.
End Notes:
Si ce premier texte vous a plu, n'hésitez pas à me laisser une petite review ♥
Les suivants arriveront très vite, ils sont presque tous écrits.
(oui, le fanart ne correspond pas totalement à la période puisqu'elles ont des uniformes de Poudlard dessus mais j'aimais bien l'air enfantin sur leurs visages, j'espère que vous me pardonnerez)
Ginny essuie ses yeux embués de larmes à mesure qu'elle grimpe les marches qui mènent au sommet de la Tour d'Astronomie. Point culminant de Poudlard, l'observatoire est convoité par les érudits, les cœurs brisés et les élèves en quête de solitude. Ce soir, Ginny remplit au moins deux de ces catégories. Elle ne sent même pas le froid de l'hiver mordre sa peau. Empêtrée dans les plis de sa robe de soirée, elle a presque envie de la déchirer.
De la mettre en pièces. Comme son cœur.
Arrivée en haut de l'escalier, elle marque un temps d'arrêt. Ses yeux se sont habitués à l'obscurité : il n'y a que la lumière du parc qui lui parvient, en contrebas. Entre ses pleurs, elle aperçoit une silhouette floue et elle sent une colère monter en elle, prête à exploser. Elle crispe ses doigts sur sa baguette, prête à demander à l'intru de dégager, quand une voix douce l'interpelle :
— Ginny ? Mais, tu ne devrais pas être au bal ?
Ginny laisse sa baguette retomber au fond de la poche de sa robe et sent sa colère se dégonfler comme les soufflés ratés de sa tante Muriel.
— Luna ? Que... qu'est-ce que tu fais ici ?
Elle s'approche en titubant, toute gauche dans sa robe vert bouteille. Pour toute réponse, Luna lui montre ses chaussettes – une bleue et une bronze, pour faire honneur à sa maison – en remuant les orteils.
— C'est ces imbéciles de cinquième année qui t'ont encore volé tes chaussures ? Ils ne paient rien pour attendre, je vais aller les...
Avant que Ginny ne finisse sa phrase, Luna pose sa main sur la sienne. Ginny ne sait pas comment elle fait : les mains de Luna restent toujours tièdes. Pourtant, ce soir, elle ne porte pas de mitaines. Alors que son champ de vision se clarifie, Ginny comprend pourquoi : sur les genoux de Luna se trouvent un rouleau de parchemin bien entamé et une plume. Luna n'aime pas porter de gants lorsqu'elle écrit.
— Peu importe. Je suis habituée, tu sais, ça ne fait rien. Pourquoi tu n'es pas au bal, Ginny ? C'est ce Londubat qui a été méchant avec toi ?
Incapable de répondre, Ginny hoche la tête de droite à gauche. Les larmes lui montent à nouveau aux yeux et elle sent sa gorge se serrer.
Elle se sent un peu bête, aussi.
— Si tu ne veux pas me dire, ce n'est pas grave. Tu veux pleurer pour laisser sortir les Premirillons.
À force de passer son temps avec Luna, Ginny a appris à connaître les bestioles imaginaires qui peuplent l'esprit de son amie. Et les Premirillons naissent des émotions trop intenses – ou les déclenchent, elle ne sait plus trop. Le seul moyen de s'en débrasser est de les évacuer par les pleurs.
Luna écarte son matériel d'écriture et ouvre un bras en direction de Ginny. Touchée, celle-ci laisse sa tête reposer sur son épaule et laisse ses émotions s'écouler, doucement. Luna la serre contre elle en silence et les sanglots finissent par s'espacer. Luna lui fait l'effet d'un soleil dans cette nuit glaciale.
C'est pourtant Ginny, d'habitude, qui protége Luna. Ce soir, elle est devenue la sorcière en détresse et Luna sa forteresse.
— Je suis désolée, finit-elle par marmonner en reniflant.
— Pourquoi dis-tu que tu es désolée ?
Luna s'étonne.
— Parce que je pleure pour rien.
Si Fred et George me voyaient, ils diraient que je suis bien une fille.
— On ne pleure jamais pour rien. Peu importe ta raison, il doit bien y en avoir une. Parfois, on ne sait pas, et ce n'est pas grave. Les Permirillons nous embrouillent souvent la tête, tu sais.
— Non, je... c'est ridicule.
Luna éclate d'un rire franc qui fait sursauter Ginny.
— Ginny, tu n'es pas une personne ridicule.
— Mais... je...
Ginny soupire en essuyant ses joues humides. Elle se redresse légèrement et prend la main de Luna dans la sienne, comme une ancre pour lui permettre de garder sa contenance.
— Si je te dis pourquoi je... pourquoi j'ai pleuré, tu promets de ne pas te moquer de moi ?
— Bien sûr.
Luna ne se moque jamais de personne, après tout.
— Eh bien, le bal a été un vrai désastre. Neville n'arrêtait pas de me marcher sur les pieds et j'ai fini par en avoir assez, alors, je voulais partir. Et Michael Corner m'a invitée à danser, tu le connais ? Il est de Serdaigle et il a l'air d'être plutôt gentil, je crois. Il... il a dit qu'il m'aimait bien.
Elle s'arrête un instant pour ne pas se laisse submerger de nouveau.
— Il a dit qu'il m'aimait bien, il l'a même dit plusieurs fois pendant toute la soirée. Et, et à la fin, quand j'avais vraiment trop mal aux pieds et que j'allais m'en aller, il... il m'a demandé si je voulais bien être sa petite amie et si je voulais bien l'embrasser. Et je... et je suis partie sans lui répondre.
Elle s'adosse contre le mur et soupire à nouveau. Elle se sent si bête.
— Je n'ai pas compris pourquoi cela t'a fait pleurer.
L'innocence de Luna a quelque chose de touchant.
— Parce que... Parce que pendant tout le temps où je dansais avec lui, Luna, je ne faisais que regarder Harry. Et Harry, lui, ne faisait que regarder Cho Chang. Il est amoureux d'elle, Luna et je... et je me disais que même s'il ne m'avait pas invitée pour le bal, il pourrait m'inviter pour danser. Mais il ne m'a pas regardé une seule seconde. Et quand Michael Corner a dit qu'il voulait m'embrasser, je... Je me suis dit que...
Elle sent le regard de Luna, attentif, posé sur elle. Mais elle set incapable de le soutenir. Ginny savait qu'elle st écarlate et, même dans la pénombre, son amie doit pouvoir s'en rendre compte. Rien n'échappe aux yeux perspicaces de Luna.
— Je me suis dit que je rêve de mon premier baiser depuis longtemps. Avec Harry. Et que... et que ce ne sera pas avec lui, parce que lui il ne rêve que de cette fichue Cho. Et je ne... Je crois que j'étais déçue. Parce que même si Michael Corner est un très gentil garçon, et que j'aimerais bien, un jour, avoir le droit à mon premier baiser... je ne voulais pas que... pas que mon premier baiser, ce soit avec lui. Est-ce que tu comprends ?
Luna hoche doucement la tête et Ginny se blottit de plus belle dans ses bras.
— Il va bien falloir que je l'oublie, Harry. Mais mon premier baiser, je... je n'ai pas envie que ce soit avec un autre garçon. Et c'est bête. Mais...
Un soubresaut de sa poitrine lui coupe la parole. Luna caresse ses cheveux, tout doucement, avec une affection que personne d'autre ne semble jamais pouvoir lui offrir. Luna est son rempart quand le reste du monde ne peut pas la comprendre.
— J'ai peut-être une solution, pour tout problème.
— Pardon ?
Ginny relève la tête. C'est à son tour d'être étonnée.
— Si j'ai tout bien compris, tu aurais eu envie de pouvoir embrasser Michael Corner. Ce qui est embêtant, c'est que ça aurait été ton premier baiser et tu ne veux pas que ton premier baiser soit avec un autre garçon que Harry Potter.
— C'est... c'est ça.
— Alors, il te suffit d'embrasser une fille !
Luna affiche un sourire radieux, comme une génie qui aurait trouvé un moyen de contourner la loi de Gamp sur la métamorphose élémentaire. Ginny manque d'éclater de rire – avant de comprendre que Luna était sérieuse. Elle manque d'éclater de rire puis, à son tour, elle se mit à considérer cette option.
Car, après tout, pourquoi pas ?
— Ce...
— Comme ça, tu n'embrasserais pas un autre garçon que Harry Potter.
— C'est vrai. C'est très vrai.
— Mais il faudrait que tu en aies envie aussi. Sinon, c'est un peu bête, tu ne crois pas ?
Luna a détourné le regard, satisfaite de ses élucubrations. Et de but en blanc, Ginny lui demande :
— Luna, est-ce que tu voudrais bien être mon premier baiser ?
Luna ancre son regard dans le sien, le temps de réfléchir. Et Ginny remarque pour la centième fois à quel point ses yeux sont bleus et profonds, et elle s'en sent presque un peu intimidée. Elle se mord l'intérieur de la joue – a-elle encore parlé trop vite ?
— Oui, je crois que ça me plairait bien.
Elle lui sourit encore. Avec Luna, les choses sont toujours si simples. Alors que le reste du monde rabroue toujours Ginny – tu parles trop vite, tu ne réfléchis pas, ce n'est pas comme ça qu'on fait – Luna la comprend toujours.
— M... maintenant, alors ?
— Si tu veux.
Elles sont déjà si proches – Ginny se dit qu'elle ne va pas perdre de temps à hésiter et elle pose ses lèvres sur celle de Luna. Elles sont un peu gercées et c'est râpeux – ce n'est pas vraiment ce qu'elle s'imaginait. Pourtant, quelque chose d'autre se passe en elle, et elle ne sait pas ce que c'est. Leurs doigts se serrent un peu plus, comme si elles avaient peur de tomber. Elles s'écartent, hésitent, s'embrassent à nouveau : cette fois, elles entrouvrent leurs lèvres pour laisser leurs langues se toucher, se frôler, à peine, tout doucement.
Et c'est tout. Le premier baiser est passé, cette grande étape dans leur vie est réalisée, elles reprennent un peu de distance et Ginny repose sa tête contre l'épaule de son ami. Son cœur bat un peu la chamade et elle sent ses mains tremblotantes. Ses joues sont brûlantes.
Ce n'était pas ce qu'elle imaginait.
Elle a l'impression, dans le fond, que c'était mieux. Peut-être. Sûrement.
Ginny voudrait dire quelque chose, mais elle ne sait pas quoi. Alors elle se tait, et elles restent longtemps blotties l'une contre l'autre, en silence. Ginny ne comprend pas vraiment pourquoi sa tête tourne, comme ça. Est-ce que tous ses baisers la feront chavirer ? Si c'est le cas, elle est pressée de recommencer. Enfin, peut-être. Sûrement.
C'est finalement Luna qui reprend la parole :
— Peut-être que je pourrai être ta cavalière, pour le bal de l'année prochaine.
Ginny rigole et elle sent Luna se raidir. Il ne s'agissait pas d'une blague. Comme pour la proposition du baiser, passé la surprise, elle prend un instant de recul. Mais avant qu'elle n'ait pu considérer la situation sous un angle plus sérieux, Luna ajoute :
— Mais tu iras sûrement avec Michael Corner, s'il t'aime beaucoup et que tu as envie de l'embrasser. Il est vraiment gentil, tu sais.
Et pour la première fois, Ginny ne sait pas ce que Luna pense. Elle en qui on lit d'habitude comme dans un livre ouvert lui donne l'impression de s'être refermée.
— Peut-être. Je ne sais pas. C'est dans longtemps, l'année prochaine.
Et tout ce qu'elle veut, pour l'instant, c'est que cet instant ne s'arrête pas.
Dans le tumulte général, Ginny ne sait pas où donner de la tête. On l'a portée, on l'a acclamée – quand on l'a reposée par terre, c'est à peine si elle s'est rendue compte qu'elle touchait le sol. Son esprit est en ébullition et les hourras résonnent encore dans ses oreilles, alors que le stade s'est presque entièrement vidé. Après le désastre du match contre Poufsouffle, elle n'aurait jamais imaginé une si belle issue possible. Elle pense à Ron et elle se dit que pour une fois, elle est fichtrement heureuse de partager ce moment avec son frère.
Ils ont gagné la Coupe. Non seulement ils ont gagné le match, mais aussi la Coupe. Pour son deuxième match de Quidditch, Ginny Weasley fait un doublé : elle a de nouveau attrapé le Vif-d'Or, et sous le nez de Cho. Bon, elle n'est peut-être pas passée au-dessus de ces enfantillages, après tout. Tant pis. Elle savoure son moment de gloire.
Elle sort de la douche la première – Angelina, Alicia et Katie papotent entre elles. Elles sont comme les doigts de la main, toutes les trois, Ginny ne peut pas leur en vouloir. Elle n'a même pas vraiment envie de se greffer à leur groupe. Elle a déjà des amis en or. Et puis, elles s'entendent bien, tout de même.
Mais elle se dit qu'elle ne fera de mal à personne en reprenant le chemin du château toute seule. Elle a bien envie de marcher un peu en silence. De reprendre ses esprits avant de retourner faire la fête.
Elle enfile une robe propre, fourre sa tenue de Quidditch dans un sac et quitte les vestiaires après un « À toute ! » crié à la volée. Perdue dans ses pensées, un sourire flottant sur ses lèvres, elle fait quelques pas sans se rendre compte que deux personnes l'attendent, dehors. À vrai dire, elle manque de rentrer dans l'une d'entre elles. Ce sont les chaussures bleu ciel, sur lesquelles des nuages grossiers et des étoiles énormes ont été peints, qui l'interpellent.
— Luna !
Elle relève le regard et prend son amie dans ses bras – et, en passant sa tête par-dessus son épaule, elle aperçoit derrière elle son petit-ami, qui la toise avec un mélange de timidité et de jalousie.
— Dean...
Ginny fait de son mieux pour masquer le manque d'enthousiasme qui l'assaille soudain. Dean et Luna, elle les adore – séparément. Quoi que, ils s'entendent bien, aussi. Mais là, tout de suite, elle ne se sent pas l'énergie de faire l'entremetteuse.
Heureusement pour elle, Dean la comprend d'un regard.
— Je vous laisse toutes les deux. On se retrouve dans la salle commune.
— Oui. Je te retrouve là-haut !
Il lui envoie un baiser du bout des doigts, alors que Ginny n'a toujours pas lâché Luna qui la serre comme si sa vie en dépendait. Elle a de la chance – elle a un petit-ami génial. Elle sourit.
Puis elle se rend compte que ça doit faire pas loin d'une minute que Luna la tient contre elle. Elle s'écarte légèrement et son amie la relâche.
— Tout va bien, Luna ?
— Oui. Je suis très heureuse pour toi. Bravo, Ginny, tu es vraiment une bonne Attrapeuse !
Ginny réalise que son amie est restée pour la féliciter, alors que c'est l'équipe de sa maison qu'elle vient d'écraser. D'un coup, elle se sent indélicate.
— Je suis désolée pour Serdaigle. C'était un beau match.
— Ça ne fait rien. Mon amie a gagné, alors, cela me rend heureuse.
Luna sourit avec une innocence enfantine. C'est à cause de cet air-là que les gens la croient parfois simplette. Mais Ginny sait que derrière la naïveté de son amie se cache un esprit plus complexe qu'il n'y paraît.
— Me feriez-vous l'honneur de m'accompagner au château, milady ?
Elle lui offre son bras, souvenir de ce soir-là, où elles s'étaient dit qu'elle serait peut-être un jour sa cavalière. Luna le saisit sans hésiter et, bras dessus, bras dessous, elles traversent le parc déserté par les élèves.
— Tu es sûre que tout va bien, Luna ?
— Oui. Je suis contente de pouvoir avoir un moment avec toi.
Son ton n'a rien d'accusateur, c'est un simple constat. Alors, pourquoi Ginny sent-elle son cœur se serrer dans sa poitrine ? Ginny compte, dans sa tête. Depuis combien de temps ne se sont-elles pas retrouvées seules – vraiment seules, toutes les deux, hors des cours, hors de l'AD ? Trop longtemps. Cette année a été particulièrement tumultueuse. Et puis, si Ginny aime beaucoup Dean, elle se rend tout de même compte qu'elle passe le plus clair de son temps libre avec lui... au détriment d'autres personnes.
— Ça me manque, tu sais. Nos moments toutes les deux.
Elle aimerait adopter les airs détachés de Luna mais elle ne peut empêcher la culpabilité de l'étrangler. Elle a toujours si peur de la blesser, sa Luna. Parce qu'en dehors de Ginny, qui la comprend vraiment ? Même elle n'est pas toujours certaine, des fois, de savoir ce que Luna pense.
— Moi aussi.
— Je suis désolée, Luna. J'ai l'impression d'avoir la tête sous l'eau, en ce moment – entre le Quidditch, les examens, les réunions de l'AD...
Ginny sent les larmes lui monter aux yeux. Elle est envahie par le doute et elle ne sait même pas pourquoi. Elle se sentait si bien, quelques instants auparavant ! Alors pourquoi la simple présence de Luna la fait-elle chavirer ainsi ?
— C'est vrai que ça fait beaucoup. Et puis, tu passes du temps avec Dean, aussi. C'est normal. Tu as l'air heureuse, avec lui, n'est-ce pas ?
— Ou-oui.
Pourquoi a-t-elle hésité, à nouveau ? Bien sûr, qu'elle est heureuse, avec Dean ! Mais...
— Enfin, ce n'est pas pareil.
Luna se tourne vers elle et la dévisage, étonnée. Ginny se sent rougir jusqu'aux oreilles. Les mots sont sortis de sa bouche sans qu'elle ne réfléchisse.
— Je veux dire, pas pareil que quand on... se voit. Toi et moi. Enfin...
Plus elle cherche une façon de s'expliquer, de justifier sa phrase hors de contexte, plus elle sent son cerveau s'enliser.
— Dean est ton petit-ami. Je suis ton amie. Ce n'est pas pareil. C'est ce que tu voulais dire ?
À nouveau, Luna est très factuelle. Tout paraît simple, dit comme ça. Pourquoi faut-il que Ginny y sente une ambiguïté ? Est-ce elle qui crée une ambiguïté ? Est-ce que Luna la ressent aussi ?
— Oui et non. J'ai du mal à m'exprimer, peut-être que le Cognard de tout à l'heure ne m'a pas laissée aussi indemne que je voudrais le croire. Enfin, ce que je veux dire, Luna, c'est qu'aucun de mes petits-amis ne te remplacera jamais.
Pourquoi se sent-elle obligée de le préciser ? C'est évident, non – Luna est son amie. Est-ce que c'est à cause de ce baiser, l'année dernière, que Ginny se sent obligée de se justifier ?
Est-ce à cause de ce baiser, auquel elle continue de repenser ? Est-ce à cause de ce baiser, qu'elle ne peut s'empêcher de comparer avec ceux de ses petits-amis ?
Est-ce que Luna y repense, elle aussi, à ce baiser ?
Il lui semble pourtant que ça n'a rien changé, entre elles. À moins que...
— Je suis rassurée, alors. Merci, Ginny.
Rassurée ? Luna aussi se posait-elle des questions ?
Ginny n'a pas le temps de le lui demander. Elles ont franchi la grande porte et elles sont au pied de l'escalier.
— Je vais aller à la bibliothèque. Profite bien de la fête.
Luna lâche son bras et Ginny a envie de la retenir. Elle a envie de s'enfuir avec elle, là, quelques minutes ou quelques heures, de revenir au sommet de la Tour d'Astronomie, ce soir-là où tout était si simple.
Mais elle a dit à Dean qu'elle le retrouvait dans la salle commune.
— À bientôt !
Luna disparaît au bout du couloir.
Et l'interrogation au fond du cœur de Ginny, celle qu'elle refoule depuis des mois, ne s'estompe pas tout de suite.
End Notes:
Je sais qu'on a moins de fréquentation sur HPFanfiction qu'à une époque, et je me doute que ce couple n'est pas celui qui attire le plus de lecteurices, mais si vous passez par ici malgré tout, n'hésitez pas à laisser une petite review ♥
Author's Notes:
Un grand merci à Ruby Jones pour sa review ♡ j'espère que ce chapitre-ci te plaira également ♡
© It’s spring par boaillustration
Il est tard, mais Ginny ne dort pas. Minuit est passé depuis un bon moment, maintenant, et elle n'est pas dans son dortoir. Inutile de dire qu'elle n'y rentrera pas, ce soir. Avec Luna et quelques autres, ils ont pris l'habitude de dormir dans la Salle sur Demande, de temps en temps. Après avoir reformée et élargie – l'AD dans son quartier-général d'origine, la salle est devenue leur refuge lors d'opérations trop risquées. Car ces imbéciles de Carrow semblent n'avoir toujours pas compris où ni comment les retrouver.
Elle se demande pourquoi Rogue ne leur a pas vendu la mèche. En fait, elle se pose beaucoup de questions à propos de Rogue. Beaucoup de choses dans son comportement qui ne sont pas logiques. Il doit aimer faire cavalier seul. Après tout, il n'est plus à démontrer qu'il est un parfait connard.
Elle se demande pourquoi Rogue ne leur a pas vendu la mèche. En fait, elle se pose beaucoup de questions à propos de Rogue. Beaucoup de choses dans son comportement qui ne sont pas logiques. Il doit aimer faire cavalier seul. Après tout, il n'est plus à démontrer qu'il est un parfait connard.
Mais ce soir, Ginny ne pense pas aux Carrow. Elle ne pense pas à Rogue. Dans leur prison dorée, elle est restée pour profiter un peu plus de sa dernière nuit avec Luna.
Elles sont allongées toutes les deux, sur l'un des grands matelas qui déborde de coussins et d'oreillers. Luna étudie un Scrutoscope à travers ses Lorgnospectres – Ginny ignore ce qu'elle essaye de décrypter. Et Ginny, elle, étudie Luna du coin de l'œil.
Négligemment allongées, si proches l'un de l'autres.
— Luna ?
— Hm ?
Elle laisse tout de suite tomber la toupie magique et retire ses Lorgnospectres. Luna sait déceler, dans le ton de sa voix, quand Ginny ne va pas.
— J'ai peur.
Luna remonte un peu sur le matelas pour se mettre à sa hauteur. Pour ancrer son regard dans le sien.
— Peur de quoi ?
— Je ne sais pas.
Des larmes montent aux yeux de Ginny, et elle ne sait pas pourquoi, c'est vrai. Elle est toujours occupée, dans la journée, à chaque pause, même le soir, jusque tard dans la nuit. En revanche, la nuit, quand elle n'a plus rien à penser...
— Tu peux me prendre dans tes bras ?
Comme avant, se retient-elle d'ajouter. Avant, elles étaient si tactiles, l'une envers l'autre. Ces choses-là ont changé. Depuis Ginny a des petits-amis. Depuis que Ginny sort avec Harry – enfin, sortait. Luna n'ose plus. Ginny n'ose plus.
Et ça lui manque.
Avec une douceur toute naturelle, Luna passe un bras autour des épaules de Ginny, qui fait reposer sa tête sur son épaule. Quelques pleurs coulent en silence le long de ses joues.
— Est-ce que tu veux qu'on parle, pour comprendre ce qui te fait peur ? Ou tu préfères le silence ?
— Je... je crois que j'ai envie d'en parler. Mais je ne sais pas par où commencer.
— Il y a beaucoup de choses effrayantes, en ce moment. Terrifiantes.
La voix de Luna est plus grave qu'avant. Cela fait un moment que Ginny l'a remarqué. Ils sont tous différents. La vie les abîme chaque jour un peu plus. C'est injuste. Le monde est injuste. Ils n'ont même pas leur diplôme en poche qu'ils participent à une guerre.
Envolée, leur innocence.
Et dans la voix de Luna, une pareille gravité crève le cœur de Ginny. Parce que son insouciance, à Luna, c'est ce qui la rend si authentique. Si touchante. Si Luna.
— Ça me fait du bien de faire ça avec toi – avec vous, avec Neville. Et les autres. L'AD. Je ne pourrais pas rester là, dans ce château, pendant que des monstres torturent les élèves, à attendre les bras croisés que la Gazette nous rapporte les morts de la semaine. Ça me fait du bien de faire quelque chose, d'avoir la sensation d'être utile, un minimum. D'avoir l'impression de donner du sens à tout ce merdier. Mais je...
Elle marque une pause pour reprendre son souffle. Luna a passé une main dans ses cheveux et, tout doucement, elle caresse ses mèches emmêlées – sans trop tirer. C'est doux. C'est agréable. Et ça apaise Ginny.
— Ça me fait du bien de diriger un peu tout ça et de redonner de l'espoir aux autres. Mais je ne suis pas plus forte qu'eux. Et... et moi, et nous, qui nous... qui nous redonne de l'espoir ?
— Personne, Ginny. On est les seuls à pouvoir s'en donner.
La clairvoyance de Luna a quelque chose de terrifiant. Elle a raison, bien sûr.
— J'ai peur, Luna. Parce que demain, on part tous du château pour Noël, et que... et que dans une semaine... dans une semaine, je ne sais pas qui reviendra.
Elle sent son cœur gonfler dans sa poitrine, prêt à exploser, et ça lui donne la nausée. Est-ce que Luna l'entend, son cœur, battre la chamade ? Est-ce que Luna entend cette pensée qui ne cesse de tourner dans sa tête, depuis tout à l'heure, mais qu'elle est trop peureuse pour formuler à voix haute ?
J'ai peur que tu ne reviennes pas, Luna.
J'ai peur que tu ne reviennes pas et que je ne puisse jamais te dire tout ce que je ressens, là, maintenant, quand tu me tiens dans tes bras.
J'ai peur et je suis lâche.
Ginny pleure de plus belle. Et Luna la berce, jusqu'à ce qu'elle se calme.
— Quoi qu'il arrive, il faut continuer de se battre.
— Et si l'un de nous ne revient pas ? Si l'un de nous disparaît sans donner de nouvelles ?
— Alors il faudra supposer que c'est parce qu'il est dans une cachette, en lieu sûr. Il faut garder l'espoir, Ginny, parce que sans ça, on ne peut pas survivre, ici.
— Je sais. Je sais. Mais c'est si dur, certains soirs... Il y a des moments où ça me... où ça me paraît insurmontable.
Ginny se tait – elle essaye de respirer, son souffle est court. Elle ne sait pas ce qu'il l'étouffe le plus : sa crainte ? Ses regrets ? Elle refuse de faire le compte des personnes qu'elle a déjà perdues. Le trou béant dans son cœur menace de l'engloutir en permanence.
Sa culpabilité ? L'image de Harry lui revient. Il l'a quittée, avant de partir, il l'a quittée et elle s'est sentie se déchirer en deux. Elle a peur pour lui – chaque jour, elle pense à lui, elle pense à Ron, elle pense à Hermione, et elle implore Morgane qu'ils soient encore en vie, en sécurité, où qu'ils se soient volatilisés.
Il l'a quittée et elle en souffre, parce que, dans le fond, il y a bien une part d'elle qui doit toujours l'aimer.
— Tu sais, Ginny, j'aimerais qu'on ne soit jamais séparées.
Ginny mord sa lèvre. Elle se retient de crier. Bien sûr, qu'elle le sait. C'est pour ça que Luna a peint son portrait sur le plafond de sa chambre – avec celui de ses autres amis, bien sûr. Et Ginny a envie de lui dire qu'elle aussi, elle voudrait qu'elles ne soient jamais séparées. Parce que ce qu'elle ressent pour Luna, c'est unique, c'est si fort, ça la dévore et c'est ce qui la maintient vivante.
Peut-on aimer deux personnes à la foi ? L'image de Harry la hante et pourtant elle n'a qu'une envie, là, tout de suite, c'est de se blottir contre Luna pour toujours.
C'est de retrouver ces lèvres dont elle a eu un avant-goût, il y a si longtemps, par une soirée de neige, entre deux larmes.
Luna caresse toujours ses cheveux mais avec une douceur différente – presque languissante. Les sens de Ginny s'affolent et elle a chaud, soudain. Alors elle décide de laisser Harry où il est, pour ce soir. Lui n'a pas rechigné à la laisser, après tout.
— Tu repenses à notre baiser, parfois, Luna ? demande-t-elle de but en blanc.
Ça fait trois ans qu'elle brûle de lui poser cette question. Trois ans qu'elle y repense. Oh, pas tout le temps, même pas à chaque fois qu'elle a pu embrasser quelqu'un d'autre. Mais l'instant finit toujours par revenir, comme un refrain qu'on ne peut se sortir de la tête. Avec son lot de questions.
— Oui.
Pourquoi faut-il que Luna soit si concise dans ses réponses ?
— Est-ce que tu as embrassé d'autres personnes, Luna ?
Elle se rend compte qu'elle ne lui a jamais posé la question, auparavant. Si Ginny ne lui partage pas toutes ses histoires de cœur, elle a été assez démonstrative en public pour que toute l'école puisse suivre ses aventures amoureuses. C'est étrange, tient, qu'elle n'en ait jamais parlé avec Luna. Ça a toujours été Hermione, sa confidente, pour ces choses-là.
— Non.
Pourquoi se sent-elle soulagée ? Est-elle égoïste à ce point-là ?
— Et tu as eu envie d'embrasser d'autres personnes ?
Pourquoi enchaîne-t-elle ces questions ? N'est-elle pas trop intrusive ? Ginny a conscience de dépasser les bornes mais elle ne peut pas s'en empêcher, c'est plus fort qu'elle. Comme une fièvre qui se serait emparée d'elle, pressée par l'urgence de cette dernière nuit.
— Non.
— Et notre baiser, est-ce que tu as eu envie de... enfin qu'il... une autre fois... de...
— Oui.
Luna n'a pas hésité une seconde. Ginny tremble.
Luna est si sûre d'elle, en cet instant. Elle la regarde dans les yeux, avec autant de fermeté que de bienveillance. Et Ginny tremble – parce qu'elle, elle ne sait pas. Elle ne sait rien du tout. Comment peut-elle se montrer si sûre d'elle avec les autres et être si déstabilisée avec son amie de toujours ?
— Et maintenant ? finit-elle par articuler à demi-mot.
Comme si Luna avait attendu ce signal toute sa vie, elle attire un peu plus Ginny contre elle et elle l'embrasse, enfin, après tant d'années.
Un baiser tendre, doux, salé de larmes. La maladresse de leurs treize ans a disparu, remplacée par un affolement, une ardeur adolescente. Par la fébrilité de savoir que cet instant pourrait être leur dernier – dans tous les sens du terme.
Elles s'embrassent à pleine bouche, à en perdre leur souffle, leurs langues se frôlent, se caressent, s'escriment dans une joute dont aucune ne sortira indemne. Leurs corps serrés l'un contre l'autre dansent au rythme de leur désir, se frottent dans une intimité fiévreuse. Leurs doigts se rencontrent, se séparent, partent à la découverte du corps de l'autre, de ce corps connu par cœur et pourtant si mystérieux, dans ce nouveau jour, dans cette exploration hésitante.
La main de Luna glisse le long de la clavicule de Ginny, s'arrête juste au-dessus de sa poitrine. Elles se dévisagent avec étonnement, comme si elles avaient oublié comment elles en sont arrivées jusque-là.
— Je peux ? murmure-t-elle.
Ginny est écarlate et elle admire combien Luna semble à l'aise avec ses désirs. Maîtrisant sa propre pudeur, elle prend la main de son amie pour la déposer, tout en douceur, sur son sein.
Et elle ne peut retenir un soupir.
*
Il est tard, mais Ginny ne dort pas. Dans quelques heures, les cloches du réveil les tireront du maigre sommeil qu'elles auront trouvé et il leur faudra rejoindre à tout allure leur dortoir, sans se faire attraper.
Il est tard, mais tant pis, elles dormiront dans le train. Sous les couvertures, leurs corps enlacés se réchauffent l'un l'autre. Jamais Ginny n'a ressenti cette plénitude, menacée par l'horreur qui viendra crever leur bulle hors du temps dans quelques heures. Elle a fermé les yeux, pour mieux se concentrer sur la magie de l'instant.
Peut-être Luna croit-elle qu'elle dort. Sûrement. Car, dans un chuchotement à peine audible, elle souffle :
— Je t'aime, Ginny.
End Notes:
Si vous souhaitez lire d'autres femslahs, il y a une sélection en cours sur le forum HPF : à vos écrans (et vos propositions !). Sinon, vous pouvez toujours laisser une petite review, si le cœur vous en dit ♡
Author's Notes:
Merci à Ella C et Ruby Jones pour leurs reviews ♡
Ce texte n'était pas prévu dans le recueil (il en restera donc un sixième par la suite), on peut le considérer comme un chapitre bonus, écrit grâce à l'un des défis du Combat à Mort : on peut donc remercier Cachou pour son existence !
© Friends par drakonarinka
— Comment tu as dit que les Moldus appelle ça ?
— C'est un festival. Ça n'existe pas tellement, chez les sorciers. Je ne sais pas pourquoi. Peut-être parce que nous sommes trop consensuels, qu'est-ce que tu en penses ? Les Moldus ont une telle variété dans leur musique, il y en a pour tous les goûts. Je suis certaine que ça va te plaire.
Dans leur périple autour du monde, c'est Luna qui a insisté pour ajouter un arrêt à Glastonbury. Ginny ne connaissait pas cette bourgade du Somerset : à vrai dire, elle a accepté un peu par hasard, quand Luna lui en a parlé après avoir récupéré un prospectus pour l'événement. Ginny était encore ébahie de leur périple en Grèce, où elles sont tombées par hasard sur Gabrielle – sa belle-sœur, même si ni l'une ni l'autre n'est à l'aise avec ce terme.
— Tu as tout ce qu'il te faut ? Des lunettes de soleil, une gourde ? On peut y aller !
Luna lui tend le bras et elles transplanent ensemble. Elles pourraient faire comme tout le monde et transplaner chacune de leur côté, mais elles adorent s'escorter à tour de rôle. C'est un jeu, entre elles.
Elles se matérialisent en lisière de champ, à l'ombre d'un genévrier, et il leur faut quelques minutes de marche pour rejoindre l'entrée. Ginny est impressionnée : la seule fois qu'elle a vu autant de monde se presser au même endroit, c'était pour la Coupe du Monde de Quidditch ! Tous ces gens chantent, se saluent comme s'ils se connaissaient depuis toujours et sourient, malgré la pluie qui tombe drue.
Absorbée par sa contemplation, Ginny manque d'écraser une grenouille.
— Il y a toujours autant de monde ? souffle-t-elle.
— Le festival de Glastonbury est très connu ! L'année dernière, ils ont réussi à avoir Bob Dylan, c'est un très grand chanteur et guitariste américain. Les gens viennent rencontrer leurs idoles. Moi, j'aurais rêvé de voir sur scène Giorgio Gaber...
Ginny ne connait pas tous ces noms – si, Gaber, c'est un chanteur italien que Luna lui a fait écouter, il y a longtemps. Elle sait que son amie l'apprécie beaucoup. Si Ginny a grandi en écoutant la RITM et Célestina Moldubec avec sa mère, celle de Luna lui a fait découvrir les musiciens Moldus. Et leur rock qui n'a rien à voir avec celui des Bizarr'Sisters, qui n'en est qu'une pâle copie.
— Ça ne te fait pas peur ? Tous ces gens au même endroit ?
Ginny se rend compte que par réflexe, elle a attrapé la main de Luna. Malgré elle, une part de son cerveau ne peut s'empêcher de lui chuchoter : « un tel attroupement de Moldus, ce serait une sacrée aubaine pour des Mangemorts pas si repentis que ça... ».
Elle voudrait se forcer à penser à autre chose. C'est plus fort qu'elle. Il y a des moments, comme ça, où tout lui revient. Et elle ne peut rien faire d'autre que se prendre le passé en pleine figure.
Elle se tourne vers Luna, elles échangent un regard : et elle voit dans ses yeux qu'elle a compris ce qui la tracasse.
— Oui, ça me fait un peu peur, des fois, les grandes foules. Mais on est ensemble et tant qu'on est ensemble, on peut se protéger l'une l'autre s'il se passe quoi que ce soit, pas vrai ?
Son sourire est irrésistible : il est solaire et cela distrait Ginny de sa peur. Elle qui tremblait presque se sent apaisée, d'un coup. Ses épaules crispées se détendent.
— On va se mettre dans la queue pour entrer ?
Ginny hoche la tête. Main dans la main, elles rejoignent le flux des Moldus enthousiastes.
*
Qui aurait cru que la musique puisse lui faire ressentir tant de choses ?
Proche de la scène, Ginny sent les battements de son cœur démultipliés. Elle sent aussi le son, les notes de batterie vibrer dans sa poitrine. La musique est assourdissante et elle se sent bien, elle se sent résolument bien, elle ne s'est pas sentie aussi ancrée dans le moment présent depuis... bien trop longtemps.
Tout a cessé d'exister, le passé comme le futur, il n'y a que cette mélodie qui hurle dans ses oreilles et les cris fous du public tout autour, que la mélodie qui la transcende et son corps qui bouge en rythme, qui danse tout seul.
Lorsque la chanson se termine, Ginny rouvre doucement les yeux : c'est comme se réveiller. Juste l'espace d'un instant. Elle voudrait que ce moment continue pour toujours mais sur scène, le chanteur de Muse leur fait annonce qu'il s'agissait de leur dernière interprétation. Des applaudissements explosent comme un coup de tonnerre.
Et Ginny, qui aurait pu en avoir peur quelques heures auparavant, bat elle aussi des mains à tout rompre. Elle crie, elle siffle avec les autres. Elle exulte d'une joie qu'elle n'a pas ressentie depuis si longtemps...
Les musiciens font leur sortie de scène et alors que le flot de la foule se dirige déjà vers le prochain concert, Ginny, elle, fond dans les bras de Luna. Elle la serre contre son cœur, très fort, comme pour lui transmettre toute sa joie, toute son adrénaline.
— Tu es la meilleure, Luna ! Tu as eu tant raison de m'emmener... Oh, c'est absolument merveilleux !
Elle était sur le point d'ajouter que les Moldus font parfois des choses plus magiques que les sorciers, mais elle se dit qu'elle se met à trop ressembler à son père et elle s'abstient. Luna, dans ses bras, rigole.
— Je suis très heureuse que ça te plaise.
— Et comment ! Tu veux manger quelque chose ? Boire quelque chose ?
Elles ont pris une bière en arrivant : elle est bien plus amère que la Bièraubeurre que boivent les sorciers, mais aussi plus rafraîchissante. La pluie du début de journée a cessé et malgré les nuages grisâtres, le soleil tape et elles ont chaud, à s'agiter dans tous les sens.
— Je ne sais pas. Peut-être. Je crois que j'ai envie de respirer un peu, aussi.
Ginny s'écarte, mais elle garde un bras autour des épaules de Luna. Elle se sent toute transpirante, mais ne le sont-ils pas tous ? La fièvre qui lui monte à la tête est particulièrement agréable.
— Je n'aurais jamais pensé que la musique puisse être... aussi...
Ginny se rend compte qu'elle aussi est un peu essoufflée, un peu étourdie, elle en perd ses mots. Et comme toujours lorsqu'elle ne parvient pas à poser sa voix, c'est Luna qui complète pour elle :
— Aussi libératrice ?
Luna lui sourit, de ce sourire si simple qui la remplit toujours d'un bonheur indescriptible. Ginny acquiesce. Et sans réfléchir, elle dépose un baiser sur la joue de son amie ; un baiser tendancieux, un baiser si proche de la commissure de ses lèvres qu'on croirait à une embrassade ratée.
Elle n'a pas réfléchi, ou si elle a réfléchi, elle s'est dit : « pourquoi pas ? ».
Elle s'écarte et elle attend, elle guette le moindre signe sur le visage de Luna.
Il s'est passé plus d'un an et demi depuis leur nuit dans la Salle sur Demande, depuis la découverte de leur intimité. Il s'est passé une séparation si brutale durant laquelle Ginny s'est demandé si elle n'était pas morte, il s'est passé une bataille dans laquelle elle a perdu son frère et retrouvé le petit ami qui l'avait quittée avant de partir en guerre. Il s'est passé une nouvelle année à Poudlard avec Harry – et Luna – tous deux si proches d'elle qu'elle en avait mal.
Il s'est passé trop de choses et Ginny n'a jamais su s'occuper de ses sentiments.
— Tu voulais m'embrasser ?
C'est ça qu'elle aime, avec Luna : son honnêteté. Elle ne s'embarrasse pas des convenances.
— Oui.
— Tu peux le faire, si tu en as encore envie.
— Bien sûr, que j'en ai envie.
Ginny ne réfléchit pas et elle pose ses lèvres sur les siennes.
Dans la musique, dans la foule, sous les applaudissements, elles se sentent en dehors du temps. Alors les réflexions pourront bien attendre le retour à la réalité.
Elles s'embrassent, d'abord timides, et c'est comme une nouvelle découverte ; puis à en perdre le peu de souffle qui leur reste. Elles s'embrassent longtemps, peut-être, ou peut-être que cela ne dure qu'une seconde : quelle importance ? L'instant présent transcende tout le reste.
Et quand elles se séparent enfin, elles se rendent compte que deux garçons en face d'elles, bras dessus bras dessous, les ont observés. Leurs regards se croisent et Ginny s'apprêtent à leur aboyer dessus mais contre toute attente, ils les applaudissent. Elle est encore plus désemparée.
— Bravo les lesbiennes !
Ginny est encore plus éberluée : elle n'a jamais entendu ce terme et elle n'a pas la moindre idée de ce qu'il signifie. À l'air jovial du type, elle se dit qu'il n'a pas l'air de les insulter, mais... Elle n'a pas le temps de demander à Luna si elle sait ce que cela signifie que celle-ci dit au jeune homme :
— J'aime beaucoup ton châle.
Sur ses épaules, il porte un genre de cape, assez mal taillée, rayé de bandes aux couleurs de l'arc-en-ciel.
— Tu veux parler du drapeau ?
Il soulève le drapeau en question et Ginny est d'autant plus déroutée : elle n'a pas la moindre idée du pays dont il peut s'agir. Sont-ils en train de leur faire une mauvaise farce ?
— Le drapeau queer, ajoute-t-il face à leur incrédulité. Le drapeau LGBT.
Les deux filles échangent un regard perplexe.
— Dis-moi, demande-t-il à son acolyte, est-ce qu'on ne serait pas tombés sur deux membres de la communauté qui s'ignorent, Jake ?
— Ça m'en a tout l'air, Henry !
Ils éclatent de rire et Ginny se dit que cette fois, c'est bon, c'en est trop : il est de son devoir d'exiger des explications !
— On peut savoir de quoi vous parlez ? On n'est... on n'est pas d'ici.
— Tu as dû passer la dernière décennie sacrément bien rangée dans le placard, ma pauvre chérie... Je m'appelle Henry, et lui c'est Jake, mon mec. On vous paye une bière ? Je vous connais pas mais je crois qu'on a plein de choses à vous raconter qui pourraient vous intéresser.
— D'accord.
Luna a accepté sans attendre l'approbation de Ginny, mais dès que Henry a dit « mon mec », elle a senti le poids qui pesait sur ses épaules retomber.
Au-delà même de la musique, il semble que les Moldus aient plein de choses à leur apprendre...
End Notes:
Oui, le "bravo les lesbiennes" est probablement un petit anachronisme. Mais on a le droit de dire qu'on s'en fiche, pas vrai ? J'espère que ce chapitre estival vous aura plu, c'est autant une déclaration d'amour à l'ambiance des festivals qu'au couple adorable que Ginny et Luna forment ♡
Author's Notes:
Merci à RubyJones et Tiiki (x5!) pour leurs reviews ♡ J'essaye de vous répondre bientôt :)
Oops, on me signale que j'avais totalement oublié de poster ce chapitre... Comme on dit, mieux vaut tard que jamais : voici *enfin* la conclusion de ce recueil. À moins que j'ai un jour d'autres idées. Ou pas. On verra !
© Luna and Ginny par upthehillart
Pour une ambiance musicale : Le Dernier Jour du Disco – Juliette Armanet
— Tu sais, Luna, la première fois que je t'ai parlé, je me suis demandé si tu étais une vraie personne.
— La première fois que je t'ai parlé, Ginny, j'ai cru que tu sortais d'un rêve.
Le sous-bois qui borde Loutry-Sainte-Chaspoule prend des couleurs d'or et de feu, sous le crépuscule de septembre. Main dans la main, Ginny et Luna remonte le cours de la rivière qui coule entre les collines, cette rivière dans laquelles elles se sont rencontrées, il y a tant d'années, maintenant. Pourtant, elles s'en souviennent toutes les deux comme si c'était hier.
Un jour chaud de fin d'été, comme aujourd'hui.
La fin de quelque chose – leur solitude – et le début d'une nouvelle aventure. Comme aujourd'hui.
Elles ont fait le tour du monde, cet été. Après une dernière année à Poudlard mouvementée, d'autant plus perturbée par la présence de Harry, Ron et Hermione, cette pause toutes les deux les a coupé de leur monde, tout en les ouvrant sur le reste.
Aujourd'hui, elles rentrent à la maison. Cet instant hors du temps, comme tous ceux qu'elles ont connus dans leur vie, doit prendre fin. Mais, avant, Ginny avait besoin d'une dernière petite parenthèse. De renouer avec leurs débuts.
— C'est cet été, pour moi, qui sortait tout droit d'un rêve. Luna, j'ai peur de ce qu'il va se passer, quand je vais me réveiller.
Luna serre un peu plus fort sa main. Elle est son point d'ancrage.
— Est-ce que tu t'es décidée ? Sur ce que tu veux faire.
Luna parle toujours avec cette douceur, lorsqu'elle pose des questions, comme si elle s'adressait à un enfant terrorisé. Et c'est un peu comme ça que Ginny se sent, dans le fond. Elle n'est qu'une adolescente, prête à rentrer dans le monde des adultes, mais pas tout à fait.
— Ce que je veux faire par rapport à... nous deux ?
Luna acquiesce d'un hochement de tête. Elle ne lui a jamais mis la pression pour prendre une décision, mais elle a fini par dire à Ginny qu'il faudrait bien qu'elle choisisse. Et elle a raison. Quand Luna et Harry sont tous les deux revenus dans sa vie, avec fracas, Ginny était bien incapable de se rouvrir à eux. De se rouvrir à quiconque. Il y a un an, la fin de la guerre a surtout été la perte d'un frère, pour elle. Une blessure qui ne se refermera jamais complètement.
Elle a guéri, au cours de l'année écoulée, oui – même s'il restera toujours une petite plaie dans son cœur, qui saignote lorsque le passé refait surface. Elle est allée de l'avant, il le fallait bien, elle n'avait pas le choix. Les cours. Les examens. Le Quidditch.
Et Harry et Luna, présents, tous les deux, en permanence. Ni l'un ni l'autre n'a voulu la brusquer. Ils lui ont laissé du temps. De l'espace. Tant de bienveillance.
Ginny s'en veut, parfois. Elle se sent coupable. Se plaindre d'être aimée par trop de personnes, n'est-ce pas le comble, tout de même ?
Elle a pleuré des dizaines de fois, en songeant qu'il faudrait choisir. Car ni l'un ni l'autre n'aurait supporté de la partager. Et qu'elle ne pouvait pas les blesser, les tromper, les faire tourner en bourrique.
— Je crois que... je crois que oui. Ça y est. Je suis sûre de moi. J'ai fait mon choix.
Luna a ralenti la cadence et elle s'arrête, tellement pendue aux lèvres de Ginny qu'elle en oublie de continuer de marcher. Ginny s'arrête aussi, un pas devant elle, et tarde à se retourner. Elle n'a jamais été très douée pour les beaux discours, ce n'est pas son truc. Mais Luna doit se douter de ce qu'elle va lui dire, pas vrai ?
N'a-t-elle pas déjà un peu pris sa décision lorsqu'elle a décliné l'invitation du trio à se joindre à eux pour leurs vacances après les examens, préférant la compagnie de Luna pour ce voyage qu'elles planifient depuis l'âge de neuf ans ?
— Je veux rester avec toi, Luna.
Elle s'est retournée et, dans le mouvement, leurs mains se sont lâchées. Elles se dévisagent avec un recul, une pudeur qui paraît déplacée.
— Ce qu'on a vécu cet été, c'est... Je le sais, maintenant, j'en suis certaine. C'est avec toi que je veux être. Toi et personne d'autre.
Paraissant enfin comprendre ce qu'elle lui dit, Luna éclate d'un rire de joie et saute à son cou, avec un peu trop de force – les voilà qui se retrouvent détrempées, allongées dans la rivière. Elles rirent, elles rirent si fort qu'elles en font fuir les oiseaux perchés au-dessus de leurs têtes, si fort que la forêt s'agite.
Elles s'embrassent et elles rient encore, et s'embrassent à nouveau, et il leur faut quelques minutes pour parvenir à se calmer. Elles se relèvent et le silence revient petit à petit dans le sous-bois.
— Est-ce que tu es prête à rentrer, maintenant ?
Ginny hésite. Sa décision est prise mais elle ne se sent pas forcément prête, pour autant. Elle soupire. Elle hoche la tête. Il va bien falloir qu'elle y arrive, pas vrai ? Cet été hors de leurs frontières lui a appris bon nombre de choses – notamment que chez les Moldus, ce type de relations étaient aujourd'hui bien plus acceptée. Cet été, elle a aussi appris de nouveaux mots, comme « bisexuelle ». Et « lesbienne ». Un pour elle, un pour Luna.
Luna lui reprend la main, pour lui donner un peu de force, un peu de courage. Et, ensemble, elles reprennent le chemin du Terrier.
— Ils t'aiment, tu sais, lui dit Luna comme si elle lisait dans ses pensées. Alors s'ils voient que tu es heureuse, ils seront heureux. J'en suis convaincue.
Ginny s'apprête à lui répondre qu'elle aimerait que les choses soient plus simples, avec une pointe d'amertume. Mais elle se retient. Car, après tout, pourquoi les choses devraient-elles être compliquées ? Ses parents ne sont pas les Malefoy, son père est un admirateur absolu des Moldus. Peut-être a-t-il même déjà entendu parlé des prides, ces marches réunissent des personnes fières de leur sexualité non-hétéro. C'est tout un nouveau lexique que Ginny a découvert, avec cette identité qu'elle embrasse doucement.
Et en marchant vers le début d'une nouvelle vie, elle se sent un peu plus elle-même.
End Notes:
On est donc à la fin de cette brève histoire / recueil / exploration de ce couple que j'adore. J'espère que cela vous aura plu. Comme dit précédemment, je n'exclus pas d'un jour rajouter d'autres chapitres bonus mais ce n'est pas prévu pour tout de suite ! N'hésitez pas à me laisser une petite review et à bientôt ♡
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