Elle se posta devant l'allée frangée d'arbres tristement dénudés et scruta les environs avec angoisse. Avait t-elle raté toutes les diligences pour rejoindre le Poudlard Express? Une violente bourrasque mêlée de neige fondue lui fouetta le visage et elle lâcha sa valisette avec un soupir de désespoir. Hermione ne se sentait ni la force ni le courage de parcourir le trajet à pieds qui plus est par ce temps exécrable. Elle glissa ses doigts dans l'encolure de son pullover rouge et en sortit le Retourneur de temps que Mc Gonagall lui avait donné deux ans auparavant .
À peine eut t-elle le temps de consulter l'heure qu'un bruit de sabots martelant sourdement le sol lui parvint. Une diligence, la dernière sans doute, ralentit et s'arrêta devant elle. Sans plus attendre, elle s'y engouffra, glissant son léger bagage dans les filets au dessus de son siège. Elle s'adossa à la banquette avec un sourire et songea que, l'espace d'une semaine, elle n'aurait pas à tempérer les sautes d'humeur de Harry ou, pire encore, les attentions gênantes de Ron à son égard. La carriole, qui s'était mise à avancer, stoppa si brusquement qu'elle dû se tenir à l'encadrement de la fenêtre pour ne pas basculer. Elle sortit sa baguette par mesure de prudence et s'apprêta à regarder au dehors lorsque la portière s'ouvrit et que le dernier être au monde qu'elle aurait souhaité voir s'appropria la banquette en face d'elle.
Piquée au vif, Hermione tourna la tête et fixa le paysage enneigé avec intérêt. La meilleure chose à faire restait encore de l'ignorer et peut être que, s'il avait un tant soit peu de jugeote, il remarquerait qu'elle était de mauvais poil et ne chercherait pas Aquavarius sous roche.
-Tiens, tiens ! Granger ! En retard ? Siffla Drago Malefoy.
Le seul son de sa voix trainante agaçait Hermione au plus haut point. Elle s'obstina sur l'ombre des arbres qui s'étendait sur la route tels des bras décharnés cherchant à happer le peu de lumière qui persistait. Elle ne voulait pas s'emporter, il n'en valait pas la peine et elle avait déjà assez de soucis en tête.
-Tu as perdu ta langue, Granger ?
Indifférence et sang froid. Les maîtres mots résonnaient à ses oreilles mais sa main se crispait déjà sur sa baguette. Après tout, pourquoi ne pas lui jeter un sortilège de stupéfixion ?
-Ah, j'ai compris ! Quand tes petits amis ne sont pas là pour te couvrir, tu te tiens tranquille, lança t-il avec un petit ricanement.
Juste un petit mouvement de baguette pour rabattre le caquet de ce petit Serpent acéphale... Personne ne le saurait et elle se sentirait tellement mieux !
-Tu retournes chez tes moldus pour Noël, comme c'est émouvant.
Le combat mental d'Hermione continuait à ravager son esprit. Elle apercevait la silhouette du train au loin, ils n'allaient pas tarder à arriver et elle serait enfin délivrée... Ce n'était plus qu'une question de temps.
-Est ce que Weasmoche te rendra visite ? Je n'y compterai pas trop si j'étais à ta place, il sera bien trop occupé à faire la manche avec les crève-la-faim de sa famille pour venir...
Hermione serra les mâchoires et lui décocha un regard noir qui n'eut pour seul effet que de le faire rire.
-Qu'est ce qu'il y a Granger ? Tu veux me jeter un sort ? Vas-y, je t'en prie. Tu ne pourrais m'offrir plus beau cadeau de Noël, s'esclaffa t-il en ouvrant les bras.
Elle le dévisagea, se demandant s'il la croyait trop intègre pour l'attaquer. Dans ce cas, il avait tort.
-Mais fais attention, reprit t-il en se penchant vers elle avec un sourire en coin. N'oublies pas que je suis fils de Mangemort et que je n'aurais aucune hésitation à t'infliger le sort que tu mérites, sale Sang-de-Bourbe !
Hermione l'attrapa par sa cravate et le repoussa sur sa banquette, ses doigts se resserrant dangereusement autour de son cou. Le visage de Malefoy devint plus pâle encore mais son expression affichait toujours la même arrogance.
-Et toi, n'oublies pas que j'ai assez de cran pour te faire cracher tes dents sans utiliser ma baguette. Tu te souviens, n'est ce pas ?
La diligence freina et elle eut toute la peine du monde à retrouver le sens des réalités. Elle le lâcha et ouvrit la portière d'un coup de baguette furieux. Si tourner le dos à un Serpentard lui était toujours apparue comme une erreur, elle était bien trop énervée pour s'en rappeler. Malefoy lui saisit le bras et la renvoya sur son siège avec une telle brutalité qu'elle en fut abasourdie et cet instant de faiblesse suffit au Serpentard pour la prendre à la gorge.
Hermione chercha machinalement sa baguette sans la trouver et la panique s'insinua en elle, l'oxygène avait déserté ses poumons et elle regardait les traits déformés par la colère de son pire ennemi avec effarement. Elle avait beau le ruer de coups, lui griffer le visage, il maintenait sa pression assassine, semblant même se réjouir de la situation.
-Tu fais moins la maline maintenant, hein ? Vociféra t-il.
Dans sa force à vouloir se dégager, Hermione se prit les doigts dans la longue chaine qui retenait le Retourneur de temps et un léger cliquetis l'alerta. Malefoy se redressa et Hermione oublia le bijou une poignée de seconde pour reprendre son souffle, les joues en feu, le cœur battant à tout rompre. Elle reprit pleinement ses esprits, elle vit Malefoy sauter hors de la diligence et, lorsqu'elle l'entendit marmonner, elle ne pensait plus qu'à retrouver sa baguette pour lui infliger ce qu'il méritait. Ses élans de recherche fébriles furent avortés par la réapparition de Malefoy à l'intérieur de l'habitacle, le teint plus achromique encore que quelques minutes auparavant lorsqu'elle avait voulut l'étrangler.
-Granger ! Dehors...
Son interlocutrice ne le laissa pas achever sa phrase, elle lui planta sa baguette sous le menton et, chose étonnante, il ne sembla pas vouloir se défendre ou même esquiver.
-Y a un truc pas net...
Et c'est là qu'un bruissement familier mais insolite parvint aux oreilles d'Hermione. Le ressac des vagues. Elle se pencha par la portière et scruta l'obscurité avec angoisse. Ce n'était pas une hallucination engendrée par son cerveau étourdi par le récent manque d'oxygène. Le vent qui soufflait sur son visage était emprunt de sel et à quelques mètres, l'écume blanche des vagues venant échouer sur le sable était très visible malgré l'obscurité.
- Où sommes-nous ? S'écria t-elle, déboussolée.
-Pas où nous devrions être en tous cas ! Gronda Malefoy qui avait reprit des couleurs.
Les neurones d'Hermione carburaient à deux cent à l'heure, s'efforçant de clarifier la situation avec le plus de vraisemblance possible. Malefoy était à nouveau sortit de la diligence, jurant à tout va dans la pénombre. Qu'est ce qui avait bien pu déclencher ce transplanage incongru ? À bien y réfléchir, ce ne pouvait être un transplanage, puisque la carriole les avait suivit. Elle avait beau repasser en revue toutes ses connaissances en matière de transports magiques, rien ne correspondait.
Enfin, il fallait que quelqu'un ait invoqué une formule ou... Elle se figea, l'esprit éclairée par une hypothèse plausible. Elle s'extirpa de l'habitacle et ne put retenir un cri de surprise en sentant ses pieds s'enfoncer dans le sable fin.
-Lumos maxima, souffla t-elle en levant sa baguette au dessus de sa tête pour avoir un champ de vision plus large.
À quelques mètres d'elle, Malefoy jurait de plus belle, s'en prenant à sa baguette avec hargne.
-Pourquoi ça ne marche pas ? Criait t-il en trépignant comme un enfant mécontent.
-Qu'est ce que tu fabriques ? Demanda Hermione en s'approchant.
-J'essaie de me tirer de là ! Désolé de briser tes espoirs Granger, mais je n'ai pas l'intention de moisir ici avec toi !
-Mes... rêves ! S'offusqua t-elle.
-Cesses de geindre et expliques moi plutôt pourquoi on a été catapultés ici ! S'écria t-il en agitant sa baguette allumée devant son visage furibond.
Hermione ravala les paroles injurieuses qui lui montaient aux lèvres et marmonna :
-La seule explication possible est que cette diligence n'était pas destinée à rejoindre le Poudlard Express. Peut être que Dumbledore ou un autre professeur l'avait apprêté pour un voyage particulier.
-Brillante théorie ! Se moqua t-il.
-C'est les vacances, la personne qui a ensorcelé cette diligence avait sans doute prévu de les passer ici.
-En admettant que ce soit ça. Comment on fait pour rentrer en Angleterre ?
-Le transplanage ça te dit quelque chose espèce d'ignare ? Se moqua t-elle en croisant ses bras sur sa poitrine.
-Nom d'une gargouille Granger, tu croies que je n'ai pas déjà essayé ? S'emporta t-il plus nerveux que jamais.
Hermione tomba soudain des nues. Pas de transplanage possible ? Méfiante de nature lorsqu'il s'agissait des dires d'un Serpentard, elle tenta le sortilège.
-Ça ne marche pas ! s'exclama t-elle avec stupeur.
-C'est ce que je disais !
Plus elle prenait la mesure des choses, plus son sang se glaçait dans ses veines. Coincée ici avec ce sale petit serpent ! Ce ne pouvait être qu'un cauchemar ! Tout ça été la faute de Ron ! S'il ne l'avait pas retenu, elle n'aurait pas eu à prendre cette diligence ci et elle serait au fond du Poudlard Express, attendant patiemment d'arriver à Londres ! Elle porta la main au Retourneur de temps toujours pendu à son cou avec une bouffée de soulagement.
-Qu'est ce que c'est que ça ? Demanda Malefoy en s'avançant.
Mais Hermione ne répondit pas tout de suite, trop horrifiée par ce qu'elle voyait. Il était cassé ! Les aiguilles s'étaient détachées du cadran et la vitre fissurée menaçait d'éclater en morceaux.
-C'était un Retourneur de temps ! Je dis bien « c'était » parce que tu l'as cassé ! Gronda t-elle en le fusillant du regard.
-D'abord, je n'ai rien cassé du tout et puis ensuite, je ne vois pas pourquoi tu te frises le poil avec ça alors qu'on est perdu au milieu de nulle part !
-Ca, fit t-elle en brandissant le petit objet déglingué, aurait pu remonter le temps afin que nous évitions de prendre cette carriole infernale ! Mais par ta faute...
-Ne cherches pas à me mettre tout ça sur le dos ! Coupa t-il rageusement.
-Mais c'est de ta faute ! Si tu ne m'avais pas provoqué, j'aurais pu remarquer que nous changions de trajet !
-Changer de trajet ? On a atterrit ici en un rien de temps !
Hermione renonça à la discussion. Autant s'acharner à raisonner un troll ! Elle balaya les lieux d'un regard paniqué. Pourvu qu'on les retrouve au plus vite ! En ne la voyant pas à la gare, ses parents allaient chercher à contacter l'école. Pourvu qu'on fasse le rapprochement entre cette diligence disparue et elle ! En attendant, elle ne savait pas même où elle était. D'ici à ce que les secours arrivent, elle se devait de chercher une quelconque trace de civilisation. Il devait bien y avoir des habitants quelque part et, étant donné le sortilège anti-transplanage, ce devaient être des sorciers. Avec un soupir, Hermione récupéra sa valise dans la diligence et se dirigea vers une dune de sable.
-Où est ce que tu vas ? Cria Malefoy.
-Chercher de l'aide, répondit t-elle sans se retourner.
-Idiote, est ce que tu as vu de la lumière quelque part ?
Hermione s'arrêta à contre cœur. Le pessimisme de Malefoy venait de réveiller d'abominables doutes. Et si, comble de la situation, cette île était déserte ?
-Il n'y a pas trente-six moyens de le savoir, marmonna t-elle. Hominium révélio!
Elle resta bien plus de temps que nécessaire à attendre une manifestation mais rien ne se produisit et,nsi son pire ennemi n'avait pas été là, elle se serait laissée aller à pleurer de découragement.
-Alors?
La présence de Malefoy dans son dos la fit sursauter. Elle ne l'avait même pas entendu arriver.
-Rien, fit t-elle de mauvaise grâce.
-Si, et je dis bien si, ta théorie est juste, celui ou celle qui devait prendre cette diligence n'avait certainement pas l'intention de dormir à la belle étoile. Il doit y avoir une maison dans le coin.
Hermione le regarda prendre les devants et se retint de lui jeter un mauvais sort. Quelle arrogance! Elle le suivit bon grés mal grés et traîna sa valisette derrière elle. Après avoir escaladé quelques dunes sablonneuses, ils traversèrent de hautes herbes sèches sur plusieurs mètres. Hermione songeait à ses parents, à Harry et Ron qui ne tarderaient pas à s'inquiéter de son sort.
Elle se sentit tout de suite rassurée. Aucune chance qu'elle soit forcée de rester sur cette île plus de quelques heures... Perdue dans ses pensées, elle se cogna à Malefoy qui s'était brusquement arrêté. Il se retourna et lui lança un regard courroucé.
-Regardes où tu marches, Granger.
-Pourquoi tu t'arrêtes ? s'enquit t-elle avec impatience.
-Lumos maxima, dit t-il en dirigeant sa baguette vers la droite.
Le halo de lumière blanche vint éclairer la façade grise d'une chaumière aux fenêtres sombres. Hermione se mordit la langue. Pourquoi n'avait t-elle pas vu cette maison? Après ça, il serait insupportable.
-Ça ne changera pas de d'habitude, grommela t-elle en le suivant.
-Qu'est ce que tu rumines Granger?
-Que du bonheur! s'exclama t-elle ironiquement.
Hermione le regarda faire sauter le verrou de la porte d'entrée et attendit qu'il entre le premier. Au moins, s'il y avait des sortilèges de sécurité, il les subirait d'abord et elle serait avertie. Au fond, elle espérait bien qu'il souffrirait quelques maléfices. Malheureusement, aucun cri de douleur ou d'effroi ne vint exaucer ses espérances sadiques. Elle pénétra dans la vétuste demeure où Malefoy avait allumé les lampes et explora les lieux d'un œil morne.
-Quel taudis! Je ne viendrais pas passer mes vacances ici même si on me payait! persifla t-il avec une moue dégoutée.
-Si ça ne te plaît pas, tu peux toujours retourner à la diligence, dit Hermione avec un espoir infime.
Il se contenta de lui adresser un regard d'inimité et s'avança vers l'âtre de la cheminée. L'endroit était rustique. La salle principale, où ils se trouvaient ,faisait office de salon et de cuisine. Un canapé de daim saumon était acculé au mur et un fauteuil à bascule était installé prés du feu. La table de la cuisine semblait sur le point de rendre l'âme et les chaudrons suspendus au plafonds n'avaient sans doute jamais connu le célèbre Nettoie-tout de Me Gratte-sec. Hermione posa son bagage et emprunta l'escalier spirale qui rejoignait l'étage suivit de Malefoy. La pièce sous le toit était de toute évidence une chambre à laquelle était juxtaposée une salle de bain sommaire.
-Je te laisse la chambre, je dormirais sur le canapé, annonça Hermione en redescendant au rez de chaussé.
Vu l'état de la maison, le plancher craquait certainement et elle préférait le savoir en haut afin de pouvoir percevoir ses mouvements. Et puis, en cas de soucis, la porte était toute proche...
-Je n'arrive pas à croire que je sois coincé ici avec toi! siffla t-il en s'agitant.
-Ça ne m'enchante pas non plus figure toi! répliqua t-elle en s'affalant sur le canapé pour ôter ses chaussures pleines de sable.
-Attends un peu que je rentre, Dumbledore va m'entendre!
Hermione le laissa tempêter à loisir et se débarrassa de sa cape beaucoup trop chaude pour le climat tropical. Elle se mit à explorer la cheminée mais il n'y avait aucune trace de poudre de cheminette. Pourquoi n'en avait t-elle pas emporté? Elle ouvrit sa valise et en sortit plusieurs ouvrages volumineux sans trouver celui qui lui serait utile.
-Mais qu'est ce que tu fiches avec tous ces bouquins? s'écria Malefoy avec une grimace qui en disait long sur son amour de la littérature.
-J'avais l'intention de les lire pendant les vacances.
-Une semaine de vacance et tu ramènes la bibliothèque chez toi? Je ne pensais pas dire ça un jour mais je plains ce pauvre Weasley, tu dois être d'un ennui!
-Ron ne me trouve pas ennuyeuse, vociféra t-elle offensée.
-C'est ça, bibliophage!
Elle prit le parti de l'ignorer et se concentra sur ses ouvrages avec acharnement. Il devait bien y avoir quelque chose d'utile quelque part! Elle avait beau savoir que sa disparition ne passerait pas inaperçue, elle ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter. Et si cette île était incartable? Le propriétaire s'apercevrait sans doute que sa diligence était partie sans lui, non? Évidemment.
Tôt ou tard, le propriétaire de cet endroit pittoresque ferait son apparition et elle pourrait rentrer chez elle. « Pourvu que ce soit rapide! » Se dit t-elle en remettant ses livres dans sa valise. La perspective de partager cette maison avec Malefoy ne l'enchantait guère et elle se doutait bien que l'épisode du train se reproduirait dés qu'ils seraient tous deux remis émotionnellement. Pour l'instant, le côté insolite et non moins catastrophique de la situation avait comme anesthésié leur haine. Pour s'occuper l'esprit, Hermione entreprit de commencer Architecture des Gernumblis et très vite, elle en oublia jusque la présence du Serpentard qui s'était mit à tourner en rond.
Hermione se réveilla en sursaut, la chaleur était suffocante et, tandis qu'elle regardait autour d'elle, complètement perdue, les souvenirs de la veille lui revinrent. Elle avait tant espéré que ce ne soit qu'un mauvais rêve! Elle repoussa la couverture et s'extirpa du canapé. Étant donné les ronflements très perceptibles qui lui parvenaient de l'étage du dessus, Malefoy dormait encore. Comment y arrivait t-il par cette chaleur?
Hermione essuya d'un revers de bras la sueur qui perlait à son front et entreprit d'attacher ses cheveux tout en faisant le tour de la cuisine. Contrairement à ce qu'elle s'était imaginée, les placards n'étaient pas vides. Thé, boites de conserve, fioles de potion non étiquetées... Elle renonça à se préparer du thé, elle avait bien trop chaud. Elle abandonna la bouilloire sur la table et sortit.
Le souffle tiède du vent n'atténuait pas l'ardeur du soleil mais rester à l'intérieur lui était insupportable. Elle devait s'occuper pour ne pas fondre en larmes. Pourquoi personne n'apparaissait? C'était aberrant! Elle abandonna ses chaussures et se mit à arpenter les lieux. Les herbes sèches dansaient sur les dunes et aucun bruit ne lui parvenait sinon celui des vagues plus loin. Elle prit la direction opposée à la plage et s'aventura au hasard à travers les arbres aux racines fibreuses.
Le paysage qui l'entourait l'aurait sans doute émerveillée si elle avait été en vacance mais aujourd'hui, toute cette verdure l'indifférait. Elle voulait rentrer à Londres. Elle erra longtemps, s'enfonçant dans une forêt tropicale luxuriante. Le soleil perçait à peine l'épais feuillage des arbres immenses mais Hermione ne s'en souciait pas. Son cerveau angoissé ne pensait plus qu'à un moyen de quitter cette île. Perdue dans ses pensées, elle trébucha sur une pierre et, avançant ses mains pour parer la chute, elle sentit la terre mouillée sous ses doigts.
Elle se releva, se demandant d'où pouvait venir cette eau qui, elle le voyait à présent, ruisselait sur le sol. Elle suivit les minces filets humides et bientôt, elle perçut le chuintement bien distinct d'une cascade. Elle se fraya un passage à travers les buissons et se retint de justesse au tronc d'un arbre. Un bassin bleu s'étendait en contrebas, alimenté par une petite cascade qui se brisait sur les rochers.
Hermione considéra les eaux limpides avec envie. Ses vêtements lui collaient à la peau, elle était en nage et rien ne la tentait plus à cet instant qu'une baignade improvisée. Elle descendit la falaise terreuse jusqu'à atteindre un rivage couvert de petites pierres grises et se retourna pour inspecter les environs. Malefoy était bien trop trouillard pour s'aventurer si loin tout seul, elle ne courait aucun danger.
Elle trouva refuge au pied d'un gros rocher et s'y déshabilla à la hâte, abandonnant sa baguette sans crainte aucune. Elle n'aspirait plus qu'à se rafraîchir. Elle testa la température qui se révéla idéale et, n'y tenant plus, plongea complètement. L'eau glacée sur sa peau brûlante lui fit le plus grand bien. Elle s'éloigna du bord, nageant vers la cascade. Elle avait quitté l'ombre des arbres et l'eau se fit plus tiède sous le soleil. Hermione s'adossa à la paroi rocheuse et reprit son souffle, offrant son visage aux rayons incendiaires.
Elle ne sut pas très bien combien de temps elle demeura ainsi, le corps et l'esprit libres de toutes contraintes mais son estomac lui indiquait qu'elle avait trop tardé. L'idée de se retrouver face à Malefoy ne la motivait pas tellement et elle préféra rester encore un peu. Quelle guigne d'être prisonnière ici avec lui! Poudlard accueillaient des milliers d'élèves et il fallait justement que le pire de tous partage avec elle cette diligence infernale! Plus que jamais, elle souhaitait qu'on les retrouve.
S'éterniser sur cet ilot avec ce petit reptile sournois ne pouvait se solder que par le meurtre de l'un par l'autre. Elle se redressa et plongea la tête sous l'eau pour soulager son visage trop longtemps exposé au soleil. Elle refit surface, rejetant ses cheveux en arrière et scruta les environs avec un mélange de désespoir et de frustration. Qu'avait t-elle bien pu faire pour mériter ça?
Elle se remit à nager pour gagner le rivage, l'insouciance s'était envolée et l'angoisse avait reprit le dessus. Lorsqu'elle reprit pied, elle était transie de froid. Le soleil si radieux quelques minutes auparavant était dissimulé derrière de gros nuages qui s'étaient amoncelés dans le ciel à la vitesse de l'éclair. Elle était sortie de l'eau à demi lorsqu'un craquement sec l'alerta. Elle sursauta et balaya les alentours d'un regard apeuré. C'est là qu'elle aperçut Malefoy, assis sur le gros rocher. Celui-là même auprès duquel elle avait abandonné ses affaires. Elle se plongea rapidement dans l'eau jusqu'au menton.
-Ne joues pas les sauvageonnes, Granger. J'ai eu le temps de tout voir! se moqua Malefoy en sautant de son perchoir pour s'avancer vers le bord du bassin.
-Qu'est ce que tu fiches ici? s'écria t-elle, tétanisée.
-Je me demandais où tu étais passée.
-Quoi, il me faut ta permission pour sortir maintenant?
-Je ne pensais pas qu'une coincée dans ton genre se livrait à de telles exhibitions, ajouta t-il, ignorant sa question. Plutôt plaisant à voir, je dois dire.
-La ferme, sale pervers! cracha t-elle, partagée entre la gêne et la colère.
Il se contenta d'un petit sourire en coin et tourna les talons. Elle le suivit des yeux et c'est seulement lorsqu'il eut disparut qu'elle se rua sur ses vêtements. Quel ignoble personnage! Depuis combien de temps était t-il posté sur ce rocher? Elle était morte de honte à l'idée qu'il l'ai vu nue et elle se sentait idiote d'avoir céder à son instinct. Ça avait été stupide et téméraire. Mais comment prévoir que cet abruti puisse découvrir l'endroit où elle se trouvait?
Elle reprit le chemin de la chaumière en affichant le peu de dignité qu'il lui restait et se promit de lui jeter un Chauve Furie s'il se permettait ne serait ce qu'une nouvelle remarque désobligeante à son égard. Pourtant, lorsqu'elle entra, il ne dit rien. Il se réfugia à l'étage et elle entendit le lit couiner. Chercher à expliquer le comportement du Serpentard dépassait de loin les compétences d'Hermione. Elle n'avait jamais su comprendre Ron malgré le fait qu'il soit l'un de ses deux meilleurs amis alors en ce qui concernait le cerveau tordu de ce fils de Mangemort, c'était peine perdue!
Dehors, l'orage avait éclaté et la pluie tambourinait le toit avec de plus en plus d'intensité. Hermione troqua ses vêtements humides pour son pull aux couleurs des Gryffondors et un pantalon moldu plus confortable que sa jupe d'uniforme. L'estomac creux, elle explora de nouveau les placard et dénicha une boite en fer contenant des biscuits secs. Elle alluma la cheminée et y accrocha la bouilloire.
Par la fenêtre, elle voyait les cocotiers se tordre sous les rafales pluvieuses, la mer semblait déchaînée. Le temps était si changeant! Où était passé le soleil et le ciel couleur d'azur? Cette tempête ne faisait qu'accroitre l'inquiétude d'Hermione et peu à peu, la déprime la submergeait. Combien de temps devrait t-elle encore rester ici? Que se passait t-il en Angleterre à cet instant? S'était t-on déjà lancé à sa recherche? Si ses parents n'avaient aucun moyen magiques de la rechercher, elle se dit que la famille de Malefoy, elle, devait déployer des armées entières pour retrouver la trace de Drago.
Le sifflement de la bouilloire la tira de ses réflexions sombres. Elle se résolut de mettre de côté ses angoisses le temps de calmer son estomac révolté. Elle aurait tout le loisir de se morfondre ensuite. Elle dégustait son thé, installée dans la chaise à bascule lorsque Malefoy réapparut, le teint plus pâle que jamais. Il se laissa tomber dans le canapé en face d'elle et Hermione se garda bien de le dévisager ouvertement, voyant qu'il semblait d'une humeur noire.
-Tu veux du thé? demanda t-elle au bout de cinq minutes de silence durant lequel il fixait les flammes sans ciller.
Le fait de tourner la tête vers elle parut lui couter un effort considérable.
-Si tu croies que je vais avaler cette saleté!
-Très bien, meurs de faim. Tu me faciliteras la tâche, le morigéna t-elle.
À son grand étonnement, il ne releva pas. Plus elle l'observait, plus elle avait l'impression que quelque chose n'allait pas. Il était bien trop tranquille! Elle vit sa mâchoire se crisper et fronça les sourcils. Quoi, elle n'allait tout de même pas s'inquiéter pour lui! Ça, c'était hors de question. Elle déposa sa tasse vide sur la table branlante et rangea la boite de biscuits où elle l'avait trouvé. Une exclamation étouffée la fit se retourner.
-Malefoy?
Mais il ne répondit pas, la tête renversée sur le dossier du canapé, les yeux clos. Hermione s'approcha prudemment et s'aperçut qu'il tenait fermement son bras gauche.
-Malefoy, est ce que ça va?
-Est ce que j'ai l'air d'aller bien? fit t-il entre ses dents.
-Qu'est ce qui t'arrive?
Mais il ne répondit pas et, au bout de dix secondes d'hésitation, Hermione s'approcha. Elle n'aurait sans doute jamais pensé toucher Drago Malefoy de son plein gré un jour mais c'est pourtant ce qu'elle fit. Elle le força à lâcher son bras et il grimaça sous la pression.
-Ne me touches pas! s'insurgea t-il en résistant.
Bien qu'il soit affaibli, il avait encore assez de force pour l'empêcher de l'examiner.
-Lâches moi, je te dis! rugit t-il.
-Arrêtes de gigoter où je...
Hermione n'acheva pas sa phrase, parcourue d'un violent frisson le long de sa colonne vertébrale. Elle venait de remonter la manche de sa chemise et le tatouage qui marquait l'avant-bras du Serpentard lui coupa tout ses moyens. Mais elle vit presqu'aussitôt deux petits trous symétriques et boursoufflés prés de son coude.
-Qu'est ce que c'est? parvint t-elle à articuler.
-Un décalcomanie que j'ai trouvé dans une boite de Fondants du Chaudron! ironisa t-il en la foudroyant du regard.
Hermione leva les yeux au ciel, excédée. Et considéra la blessure de plus prés, s'efforçant de ne pas faire une fixette sur la Marque des Ténèbres.
-Ce qui t'a mordu, idiot! grogna t-elle.
-Un serpent, répondit t-il en s'agitant.
Elle se retint de lui sortir une remarque ironique. Un disciple de Salazar Serpentard attaqué par un serpent... L'heure n'était pas tellement à l'échange de propos cinglants. Il avait vraiment l'air d'agoniser, si ce n'était pas le cas, il n'aurait jamais consentit à lui céder son bras.
-Ça fait longtemps que tu as été mordu? demanda t-elle en se levant pour fouiller la cuisine à la recherche d'un couteau.
-Une heure ou deux. J'en sais rien...
Hermione sentait la panique la gagner. Pourquoi n'était t-il pas resté ici au lieu de jouer les Tarzan? La réponse lui parut évidente. Il avait voulut savoir où elle était. En quelque sorte, elle était responsable de ce qui lui était arrivé.
-N'importe quoi! marmonna t-elle en trouvant enfin ce qu'elle cherchait.
Elle n'était pas très sûre de ce qu'elle allait faire mais elle n'avait guère le choix, Me Pomfresh n'était pas dans les environs et elle ne pouvait décemment pas laisser Malefoy mourir bien que cela ait été son rêve le plus cher d'aussi loin qu'elle se souvienne. Son cœur battait à toute allure, faisant trembler ses mains lorsqu'elle se saisit de l'une des nombreuses bouteilles de Firewhisky cachées sous l'évier.
-Qu'est ce que tu vas faire avec ça? s'affola Malefoy, brandissant sa baguette, la voyant approcher avec un couteau digne d'un boucher.
-Je vais enlever le pue de la plaie et la désinfecter.
-Qui me dit que tu ne va pas m'amputer le bras?
-Je n'achève pas un homme à terre, Malefoy. Même un Mangemort. Laisses moi te soigner et on pourra recommencer à s'entretuer ensuite, ça te va? argumenta t-elle.
Il hocha la tête sans grande conviction et abaissa sa baguette. Cet effort semblait l'avoir épuisé et Hermione se demanda si elle n'allait pas le mutiler pour rien. Si elle montrait son hésitation, il n'allait pas se laisser faire. Elle fit une petite incision sur la plaie et aspira l'épais liquide avec sa baguette. Intérieurement, elle se dit que c'était un bon entrainement pour ce qui l'attendait sous peu en Angleterre.
-Où est ce que tu as appris à faire ça? l'interrogea t-il.
-Euh... Dans un documentaire, avoua t-elle.
-Si tu aggraves mon état, je te tuerai, crut t-il bon de la prévenir.
Hermione l'ignora et versa du whisky sur la plaie qui avait ostensiblement désenflée. Malefoy eut un mouvement si brusque que la bouteille lui échappa des mains. Il grimaça de douleur et elle le fixa, se demandant s'il n'allait pas la frapper. Il avait l'air si furieux qu'elle recula instinctivement. Mais il se reprit vite et lui tendit son bras qu'elle banda avec une serviette de table à carreaux. Tandis qu'elle nouait le pansement, ses yeux s'attardèrent sur son tatouage. Un Mangemort. La peur passée, toute l'horreur et la réalité de la chose lui apparaissait.
Elle ramassa la bouteille d'alcool, aspira le liquide qui s'était répandu sur le sol et se leva. Elle déposa le couteau dans l'évier sans vraiment s'en rendre compte, comme murée dans une dimension nouvelle et macabre.
-Pourquoi tu m'as sauvé, Granger? Tu aurais dû me tuer, ça t'aurait éviter de le faire plus tard quand... Quand la guerre aura éclaté.
Elle continua de lui tourner le dos, ses yeux aveugles regardant le couteau imprégné de sang. Il avait raison mais pour l'instant, elle ne pouvait se résoudre à le laisser mourir. Il y avait des chances pour qu'elle l'affronte très bientôt et à ce moment là, ne regretterait t-elle pas de ne pas l'avoir fait aujourd'hui?
-Tu ne dis rien? insista t-il.
-Croies-le sur parole, j'aurais grand plaisir à te faire disparaître le moment venu.
Il y eut un long silence et elle l'entendit dire à voix basse:
-À la bonne heure...
Quand elle se retourna, il avait déjà quitté la cuisine et elle perçut à peine le bruit de ses pas à l'étage tellement la pluie faisait rage. Après avoir arpenté la pièce de long en large, elle se résolut à reprendre l' Architecture Gernumblis là où elle s'était arrêtée la veille. Lorsqu'elle acheva son livre, il faisait nuit et son estomac la força à se lever de son fauteuil. Elle ouvrit une boite de soupe à l'oignon et glissa le chaudron sur le feu.
Le fumet qui envahissait la cuisine réveilla des souvenirs de vacances d'été passés chez Mrs Weasley et presqu'aussitôt, l'angoisse la reprit. Qu'attendait t-on pour venir la chercher? C'était tout de même incroyable! Elle se servit un bol de soupe et l'avala sans vraiment s'en rendre compte tellement elle était tourmentée. Elle s'emmitoufla dans sa couverture pelucheuse et contempla les flammes jusqu'à ce que ses yeux se ferment d'eux mêmes.
Cette nuit là fut agitée. Les rafales de vent la réveillèrent à plusieurs reprises et les grincement de la chaumière ne la rassurèrent pas du tout si bien qu'elle finit par se lancer un sortilège Bouche-oreilles.
Le réveil fut brutal pour la simple et bonne raison que Malefoy la secoua comme un pommier et que, de saisissement, elle tomba du canapé. Elle le foudroya du regard et rompit le charme de son sortilège d'un coup de baguette rageur.
-Non mais ça va pas, Malefoy? grommela t-elle en se relevant tant bien que mal.
-Tu ne te réveillais pas! s'écria t-il, sourcils froncés.
-Et bien quoi, tu t'inquiètes pour moi, maintenant?
-Tu rêves! Je ne tenais simplement pas à déménager ton cadavre de la cuisine! répliqua t-il.
Et sur ces mots, il la poussa dans le canapé et s'éloigna.
-Je vais faire un tour.
Hermione se retint à grand peine de ne pas lui jeter un sort. Quel être insupportable! elle l'avait guérit et il se comportait comme le dernier des ingrats! Mais qu'attendre d'autre de la part de Drago Malefoy? Elle se prit la tête entre les mains, refoulant les larmes de colère et de désespoir qui l'assaillaient. À défaut de ne pouvoir se défouler sur Malefoy, elle s'acharna sur sa valise et, au bout de quelques minutes, elle finit par se calmer.
Rien de tel qu'une douche froide pour apaiser ses nerfs à vifs. Elle traversa la chambre et s'étonna de trouver l'endroit impeccable. Elle avait même l'impression que la pièce était plus propre que lorsqu'elle l'avait vu à la première fois. Se pouvait t-il que Malefoy ait fait le ménage? C'était improbable... Non, impossible! Ce sale type ne devait même pas savoir faire la vaisselle... Elle s'enferma dans la cabine de douche et repoussa résolument ses réflexions saugrenues.
Lasse de tourner en rond, Hermione quitta la chaumière pour se promener sur la plage. Elle avait l'intention de retourner à la diligence mais elle eut beau chercher partout, aucune trace de la maudite carriole. Elle avait tout bonnement disparue ! Elle se laissa choir dans le sable brûlant, à bout de force. Cette fois, elle ne se retint plus et éclata en sanglots.
Elle évacua ainsi toute la tension émotionnelle de ces dernières quarante-huit heures et aucun espoir ne vint consoler son âme éplorée. À quoi bon se leurrer ? Si personne n'était encore apparut, c'est qu'elle était introuvable ! Elle était condamnée à cohabiter avec un Mangemort sur ce misérable îlot. Malefoy, lui, ne semblait pas aussi affecté qu'elle ! Il gérait cette mise en exil avec tant de calme...
C'en était énervant ! La logique voulait que ce soit lui qui craque le premier !
-Tes moldus te manquent à ce point ?
Hermione ne tourna même pas la tête. Elle n'avait pas besoin de voir son visage pour savoir que son malheur le réjouissait. Elle le sentait dans sa voix trainante et cynique...
-Fiches moi la paix, vociféra t-elle.
Du coin de l'œil, elle le vit s'asseoir à quelques mètres.
-Ne me dis pas que tu chiales à cause de Weasmoche ?
Elle ne répondit pas, trop concentrée à ravaler la vague de déprime qui la ravageait.
-Tu sais qu'il me suffirait de poser le doigt sur ce tatouage pour rentrer chez moi ?
Cette fois, Hermione lui accorda plus d'attention. Il avait relevé sa manche et la Marque des Ténèbres mouvante sous l'éclat du soleil apparaissait dans toute sa noirceur. Malefoy ne la regardait pas. Impassible, il fixait son avant bras.
-Qu'est ce qui te retient de le faire ? Sans toi ici, ce serait déjà moins cauchemardesque !
Il la dévisagea et esquissa un pâle sourire.
-Si je le fais, tu peux être sûre que ceux qui viendront se feront une joie de te tuer.
-Ne t'imagine pas que je vais te supplier de m'épargner ! S'insurgea t-elle avec orgueil.
-Je ne pensais pas à ça.
-Ah ? S'étonna t-elle.
Mais la discussion s'arrêta là. Malefoy se releva et tourna les talons, laissant derrière lui une Hermione perplexe. Décidément, ce sale type était impossible à cerner ! Elle secoua la tête et chassa ses dernières larmes. Hors de question qu'il la prenne pour une pleurnicharde ! Elle se releva et revint vers la chaumière où Malefoy entrait déjà. Inutile de déprimer, on finirait par les trouver. D'ailleurs ce ne devait plus être très long...
Au fond d'elle, Hermione n'en était plus très sûre mais écouter ses doutes à cet instant pouvait lui être fatale. Elle devait garder espoir, c'était le seul moyen de tenir le coup. Malefoy s'apprêtait à monter à l'étage lorsqu'elle lança :
-La diligence n'est plus là. Je suppose que tu ne l'as pas remarqué ?
Il s'arrêta dans son ascension et lui décocha un regard sardonique.
-Si, j'avais remarqué, Granger. Mais contrairement à toi, ça ne m'étonne pas. Les Sombrals n'allaient pas rester planter là indéfiniment.
Hermione croisa les bras sur sa poitrine et plissa les yeux.
-Ça ne t'a pas traversé l'esprit qu'ils étaient peut être rentrés sans nous ?
-Je te signale que c'est toi qui a voulut qu'on s'installe ici en attendant les secours.
-Je ne t'ai pas forcé à me suivre, que je sache ! Tu n'as aucun reproche à me faire, s'emporta t-elle.
-Je ne t'en fais pas ! C'est toi qui essaie de me mettre cette initiative à deux noises sur le dos ! Contra t-il en se détournant.
Hermione serra les dents et alla s'asseoir sur le canapé. Tandis qu'elle commençait « Les milles et une façon de protéger sa maison », elle se promit d'ignorer Drago Malefoy jusqu'à la fin de ce calvaire.
Les deux jours qui suivirent se passèrent sans anicroches d'aucune sorte. En dépit de la petitesse de la chaumière, Hermione était rarement exposée à la présence de Malefoy. Il s'occupait de sa nourriture lui même, chose qu'elle trouva fort surprenante, ne lui adressait pas la parole, fait très agréable, et désertait souvent les lieux. Bien qu'elle se promène souvent sur l'île également, elle ne le croisait jamais.
Un après midi, alors qu'elle explorait les coteaux rocheux d'une falaise, elle se fit surprendre par la pluie et revint à la chaumière à toute jambe, protégée par un sort imperméable. Après s'être coulée sous l'eau chaude et avoir enfilé des vêtements adéquats, elle se posta à la fenêtre, se demandant où le Serpentard avait bien pu passer.
Et plus les heures défilaient, plus Hermione s'inquiétait. Son comportement l'irritait mais elle ne pouvait rien y faire. La pluie et le vent faisaient rage. Était ce possible qu'il se soit perdu ? Non, il devait avoir trouvé refuge quelque part et attendait une accalmie bien au sec. Cet idiot ne devait pas connaître le sortilège Impervius. Elle s'écarta de la vitre et alla s'installer prés du feu, emmitouflée dans sa couverture.
Une heure plus tard, il faisait nuit noire et elle se reprit à lire trois fois la même ligne. Pas même la lecture ne parvenait à la distraire ! Elle se leva de nouveau, faisant sans cesse l'aller et retour entre la fenêtre et le canapé. Toujours rien. Où cet idiot était t-il allé se fourrer ? Et s'il s'était fait attaqué par un Arboresprit dans la forêt ? Et s'il avait fait une chute ou...
-Et si, et si ! Se gronda t-elle, agacée.
Fatiguée de tourner en rond, elle enfila sa cape et ouvrit la porte à la volée.
-Petit Serpent acéphale ! Je n'arrive pas à croire que...
Mais sa phrase resta en suspens. À quelques pas, une baguette lumineuse apparaissait dans l'obscurité. Hermione revint sur ses pas, referma la porte et se débarrassa de sa cape. Puisqu'il était là, inutile qu'il sache qu'elle s'était inquiétée au point de se lancer à sa recherche. Elle reprit son livre et fit semblant d'y être plongée à corps perdu. Malefoy finit par entrer, toujours aussi nonchalant et prétentieux dans sa démarche. Il ôta sa veste et la posa sur le dossier d'une chaise. À la dérobée, elle le regarda ouvrir le placard sous l'évier pour en sortir une bouteille de Firewhisky.
-Tu bois un verre, Granger ?
Devant son air peu enthousiaste il se ravisa d'emblée.
-C'est vrai que les filles dans ton genre ne boivent pas d'alcool.
-Qu'est ce que tu entends par «les filles dans mon genre» ? Ne put t-elle s'empêcher de demander.
-Tu sais, celles qui ont un code de conduite à la place du cœur et un dictionnaire encyclopédique en guise de cerveau, la nargua t-il.
Hermione fit mine de s'intéresser à son livre, ne souhaitant pas céder à la provocation.
-Allez, Granger, juste un ! Je te promets de ne le dire à personne.
-Merci mais non merci ! Fit t-elle sèchement en fixant la page jaunie de son ouvrage avec obstination.
À son grand damne, il s'approcha et s'installa dans la chaise à bascules. Elle le toisa d'un œil dégouté tandis qu'il vidait son verre d'un trait.
-C'est le meilleur moyen d'oublier la bouse de dragon dans laquelle je me suis fourré, marmonna t-il en se réservant un nouveau verre qu'il vida aussi sec.
-Demain, tu seras encore dans cette même bouse mais avec une migraine effroyable en prime, l'informa t-elle non sans plaisir.
-Tu parles en connaissance de cause ?
Hermione prit le parti de l'ignorer mais c'était chose difficile étant donné la proximité du Serpentard.
-Je n'arrive pas à croire que je sois ici avec toi. J'aurais encore préféré être attaché à une goule pendant vingt quatre heures ! Geignit t-il en passant sa main dans ses cheveux.
-Croies bien que cette situation ne m'enchante guère, Malefoy.
-Je me demande ce qu'ils fichent ! Ça va faire une semaine ! Bougonna t-il.
Alors lui aussi commençait à s'inquiéter ! Hermione sentit son estomac se tordre à la seule pensée quelle devrait rester sur cette île maudite jusqu'à ce qu'elle ait des cheveux blancs. Il lui revint soudain en mémoire cet article dans le Chicaneur à propos d'un sorcier célèbre qui avait périt sur son île incartable et qui avait été découvert à tout hasard par des touristes. À la seule pensée qu'elle allait peut être dépérir ici, Hermione sentit la peur et l'angoisse l'étreindre de nouveau.
Sans trop y réfléchir, elle arracha la bouteille de Firewhisky à Malefoy et se servit un verre. Ce dernier ne fit aucun commentaire et bien que l'alcool lui enflamme la gorge, elle ne dit rien. Autant assumer son geste sans geindre. Aucun doute, cela n'avait rien à avoir avec la Bièraubeurre qu'elle avait pour habitude de boire !
-C'est... infecte, déglutit t-elle en grimaçant.
-C'est ce qu'on appelle de l'alcool, fillette ! Se moqua t-il en lui servant un second verre.
-Oh non, je n'en veux plus.
-Un dernier ? L'incita t-il.
Elle opina silencieusement, se disant qu'elle n'aurait pas besoin de courir après le marchand de sable cette nuit. Bien qu'elle n'ait ingurgité que trois verres, Hermione avait la nette impression que le plancher tanguait comme ces navires en pleine tempête. Et ces meubles miteux... Pourquoi ne cessaient t-ils pas de s'agiter ? Leur étaient t-ils poussés des jambes en l'espace d'une demi heure ?
Malefoy, lui, avait l'air tout aussi éméché mais il semblait davantage lucide qu'elle ne l'était. Ou bien était ce satané whisky qui faussait sa vue ? Il retroussa les manches de sa chemise et Hermione aperçut de nouveau la Marque des Ténèbres.
-Ça te fiche la trouille, hein ? Plastronna t-il en surprenant son regard.
-Pourquoi aurai-je peur ? Je trouve ça... Hideux et... Et stupide ! Bredouilla t-elle.
-Stupide, stupide, répéta t-il pensif en buvant à même la bouteille. Ma mère a dit la même chose.
-Alors... Elle est intelligente et toi... Tu es stupide.
Hermione ressentit le besoin inexplicable de s'asseoir sur le sol. Peut être pour s'assurer qu'il était bien stable sous elle et non pas mouvant comme elle en avait l'impression.
- Parfois dans la vie, on n'a pas toujours le choix, Granger. Est ce que tu... Est ce que tu as la moindre idée de ce que c'est que l'honneur ? Non, c'est idiot comme question. Qu'est ce qu'une Sang de Bourbe de ton espèce peut connaître à l'honneur ? Ricana t-il en se balançant d'avant en arrière.
Hermione lui prit rageusement la bouteille des mains et bu quelques gorgées. Rien à faire, même avec une demi-bouteille d'alcool dans le sang, il restait désagréable.
-Tu m'exaspères, Drago Malefoy, souffla t-elle en posant sa tête sur l'accoudoir molletonné du canapé. Ce n'est pas si étonnant que tu sois devenu un Mangemort, finalement...
-Moi, je ne me voyais pas le devenir. C'est un coup du destin.
-Le destin n'existe pas. On choisit soi même ce que l'on doit être, ce que l'on doit faire...
Hermione toisa le fond de la bouteille avec un effort de concentration singulier.
-Des conneries. T'es complètement beurrée, si tu veux mon avis.
-Je ne suis pas beurrée, d'accord ? Je suis juste un peu... fatiguée. Oui, c'est ça ! Je suis fatiguée d'être là sur cette île perdue au milieu de nulle part ! Et avec toi, en plus ! Comme si je n'avais pas assez d'ennuis !
-Je suppose que tu aurais préféré être avec Weasmoche.
-Non, c'est... C'est tellement mieux d'être seule ! C'est ce que je voulais ! Passer quelques jours toute seule avec mes parents. Ils sont adorables, mes parents ! Mais Ron, je ne peux décidément plus le supporter. Il braille, il jappe sans arrêt...
C'est l'éclat de rire de Malefoy qui la tira de son monologue plaintif. C'était la première fois qu'elle le voyait rire. Pas ricaner mais rire, vraiment. Son visage semblait transfiguré tout à coup.
-Ce n'est pas drôle, tu sais. Je l'aimais moi, avant ! Mais maintenant c'est trop tard alors je voudrais qu'il comprenne...
Hermione s'interrompit. Il fallait qu'elle se taise, elle n'allait pas déballer sa vie sentimentale à ce Mangemort juvénile ! Malefoy se leva et elle remarqua qu'il titubait légèrement. Au moins, elle n'était pas la seule à avoir un coup de trop dans le nez. Quand il revint, il s'installa prés d'elle sur le sol et lui tendit une nouvelle bouteille.
-Tu la mérites, dit t-il avec un sourire.
-Je suppose qu'entre Parkinson et toi, c'est le grand amour. Vous êtes aussi mauvais et tordu l'un que l'autre. Le parfait petit couple sordide, reprit t-elle avec hargne.
-Pansy et moi... C'est un cauchemar à vrai dire. Elle me colle sans arrêt et elle est aussi paranoïaque qu'un farfadet... Mais le pire de tout c'est sa jalousie.
-Je sais ce que c'est. Viktor était très jaloux d'Harry.
-Viktor Krum ?
-Il pensait qu'Harry et moi... Enfin, tu voies ? Ça me rendait dingue mais Ron est pire. Bon, il est moins dangereux que Viktor mais quand même...
-Je n'arrive pas à croire que Viktor Krum soit sorti avec toi ! Pouffa t-il.
Hermione lui donna un coup de coude et se redressa, toute fière.
-Il me trouvait intelligente et il a même dit que j'étais spéciale.
-Spéciale, je ne sais pas mais chiante, ça oui !
-Chiante, moi ? S'offusqua t-elle.
-Tu n'arrêtes pas de la ramener. Comme le dit si bien Rogue, tu es une insupportable Miss Je-Sais-Tout.
-Je ne me vante pas, moi !
-Qu'est ce que tu insinues ?
-Tu pues la prétention des kilomètres à la ronde.
Il esquissa un sourire narquois et lança d'un ton pompeux :
-C'est dans les gènes, je n'y peux rien !
-Tu es désagréable, hautain, grossier, arrogant et le pire de tout... Tu es un Mangemort ! Enuméra Hermione, désireuse de casser cette expression de dédain sur le visage pâle de son interlocuteur.
-Et toi, tu es vaniteuse, sévère, coincée, irascible et tu as du sang moldu dans les veines.
-C'est strictement faux ! Enfin sauf pour ce qui est du sang moldu, bien sûr...
-Et bornée en plus ! Ajouta t-il en buvant.
-Et toi... Toi, tu es un ivrogne !
-Regardes toi dans la glace, Granger. Tu es aussi saoule que moi.
-Je ne suis pas saoule ! S'entêta t-elle avec véhémence.
-Si tu l'es, assura t-il calmement.
-Non, je... Tu... Oh ! Je te déteste ! Soupira t-elle à bout d'arguments.
Il se mit à rire et malgré sa colère encore bouillante, Hermione céda à l'hilarité également. Ça n'allait pas. Mais alors pas du tout ! Pourquoi était t-elle en train de rire avec Drago Malefoy ? C'était aberrant.
-L'alcool ramollie le cerveau, dit t-elle plus pour elle même que pour lui.
-Personnellement, je te trouve beaucoup plus marrante comme ça...
-Je ne veux pas être marrante, marmotta t-elle, dépitée.
-On ne fait pas toujours ce qu'on veut.
Hermione le fusilla du regard et, au lieu de lui renvoyer son antipathie, il la dévisagea, très visiblement amusé. Elle lui enleva la bouteille et la posa dans le coin de la cheminée.
-Tu deviens presqu' humain, ça me fait peur. Vas te coucher ! S'exclama t-elle en se hissant sur le canapé.
-Humain ? Qu'est ce que c'est pour toi la définition d'humain ? L'interrogea t-il en l'imitant.
-Tu ries, tu plaisantes et tu...
Hermione perdit le fil de sa pensée. Dans les yeux gris de Malefoy, nulle trace de cynisme ou de méchanceté. Il la fixait sans ciller, attendant patiemment qu'elle termine sa phrase. C'était comme si elle avait en face d'elle quelqu'un de totalement différent. Quelqu'un de différent et d'étonnamment séduisant...
-Tu me regardes bizarrement, acheva t-elle dans un murmure.
Malefoy ne répondit pas mais il apparaissait clairement à Hermione que son visage s'était ostensiblement rapproché. Elle aurait voulu reculer, prendre ses distances et détourner la tête pour ne plus être obnubilée par ce regard clair et brillant. Mais elle n'en eut pas la force. Elle sentit le contact de ses lèvres tièdes sur les siennes. Ce ne fut qu'un effleurement, comme une caresse légère et hésitante qui ne demandait qu'un mot, un geste d'approbation.
Ce geste, elle le fit. Inconsciemment peut être mais elle eut l'audace d'aller chercher à nouveau ce baiser, déclenchant ainsi tout le reste. Elle savait pourtant que ce qu'elle faisait était de la pure folie. Elle le sentait comme elle sentait les mains de Drago Malefoy glisser sur sa peau nue, s'appropriant chaque parcelle de son corps. La timidité dont elle avait toujours fait preuve avec Viktor avait disparu. Elle se laissa déshabiller, allant même jusqu'à s'impatienter lorsque les vêtements de son partenaire ne lui cédaient pas assez vite.
À cet instant, Drago Malefoy n'était plus cet homme qu'elle détestait plus que tout au monde et il n'était pas difficile de fermer les yeux sur ce lien belliqueux qui existait entre eux. Elle ne songeait plus qu'à sa bouche, ses mains, sa peau envers et contre toutes les conséquences qui pouvaient résulter de ce moment d'égarement.
Hermione n'osait pas ouvrir les yeux. Voilà une heure qu'elle était réveillée mais elle se rappelait très bien, et même trop bien, de ce qui s'était passé la veille. Et si son esprit révolté lui invectivait de jeter aux oubliettes ses souvenirs nocturnes, les bras qui l'enlaçaient encore réduisaient à néant tout effort de négation. Elle l'entendait respirer, sentait son souffle sur sa nuque et sa main tranquillement posée sur son ventre...
Avec une profonde inspiration, elle tenta de s'échapper du lit dans lequel elle était couchée. Profondément endormi, Malefoy la laissa partir et elle se réfugia dans la salle de bain. Après mûre réflexion, elle préféra se baigner dans le bassin qu'elle avait découvert. Le moindre bruit pourrait le réveiller et elle ne tenait pas à l'affronter maintenant, pas avant d'avoir préparé scrupuleusement son discours. Le mieux était de caser ce qui venait de se passer comme une erreur, une grossière erreur. Une erreur agréable, sensationnelle même... Mais une erreur !
Comment avait t-elle pu agir avec tant de légèreté ? Elle qui avait planifié sa première expérience charnelle avec autant de concision ! Elle avait cédé aux avances de Viktor après avoir préalablement peser le pour et le contre, rien n'avait été laissé au hasard ! Et la nuit dernière, elle s'était comportée de façon si irréfléchie ! Peut être était ce parce que Malefoy était bien plus habile avec les femmes que l'était Viktor... Qu'importe, rien ne justifiait un tel écart de conduite !
Malefoy reconnaitrait certainement qu'ils avaient bu déraisonnablement et que cela ne devait plus se reproduire. Jamais. Mais aurait t-elle seulement le courage de le regarder en face ? Ou de lui résister s'il lui faisait à nouveau des avances ?
-Bien sûr que oui ! s'exclama t-elle en coupant à travers la forêt.
Elle se plongea dans l'eau sans plus réfléchir et c'est un picotement vivace à l'épaule qui l'alerta. À la vue de la marque de morsure violacée, elle réprima un cri de surprise. Dans quel état avait t-elle donc été pour ne pas avoir sentit que Malefoy l'avait mordu ? Hermione se sentit rougir. Comment avait t-elle pu commettre une telle énormité !
Son pire ennemi, celui qui n'avait eut de cesse de l'humilier et de l'injurier durant toutes ces années ! «Un Mangemort, un Mangemort, un Mangemort...» Lui répétait sa conscience avec des accents réprobateurs. Elle avait honte, terriblement honte... Il fallait absolument enterrer cet épisode cuisant ! Jamais personne ne devait savoir ce qui s'était passé. Des limbes de souvenirs lui revenaient en mémoire et la culpabilité la tortura cruellement. Les caresses enivrantes, les baisers passionnés, les soupirs de Malefoy à son oreille et ces mots qu'il avait inconsciemment murmurés...
Il avait suffit d'une bonne rasade de whisky, de quelques éclats de rire et elle avait cédé. Elle tentait de se disculper, mettant cetincident sur le compte de l'alcool, de la situation et de sa trop longue abstinence mais elle n'en était pas moins en colère contre elle même. Avoir prit autant de plaisir à faire l'amour avec Malefoy l'ébranlait fortement. Si elle ne s'en souvenait pas, ça aurait été tellement plus simple ! Mais aucun détail ne lui était épargné, bien que son cerveau ait été noyé par le whisky. En couchant avec ce Mangemort, elle avait trahi ses amis et ses propres convictions morales. Elle avait beau s'immerger sous l'eau jusqu'à perdre le souffle, rien n'y faisait.
Elle finissait de se rhabiller lorsqu'un bruit de pas sur la grève l'avertit qu'elle n'était plus seule. Croiser le regard du Serpentard suffit à lui faire monter le rouge aux joues. Contre toute attente, il avait reprit son expression froide et impénétrable ce qui lui facilita les choses. Elle aurait bien plus de mal à lui exposer son point de vue sur ce qui s'était passé entre eux s'il s'était conduit différemment.
-Ce qui s'est produit hier soir était une erreur pure et simple. Nous avions trop bu et tu comprendras que ce genre d'incartade ne se reproduira jamais plus. Aussi, je te demanderai de ne plus y faire allusion et de te comporter comme tu sais si bien le faire, avec l'arrogance et la méchanceté qui te caractérise habituellement !
Après cette longue tirade, elle se sentait déjà plus légère. Elle crut un moment que Malefoy allait se fâcher et lui lancer quelques unes de ses injures préférées au visage mais il n'en fit rien, muré dans une indifférence glaciale.
-Je n'avais pas l'intention de faire autrement. J'ai une réputation à tenir et m'envoyer en l'air avec une Sang de Bourbe n'est pas particulièrement flatteur. Si jamais ça s'ébruite, Granger, je te le ferais regretter. Maintenant que chacun a vidé son sac, il faut qu'on y aille. La cavalerie a débarqué, on rentre à Londres.
Et sans lui laisser le temps de l'interroger plus avant, il lui tourna le dos et s'éloigna. Hermione sentit un soulagement intense emplir sa poitrine. Les secours, enfin ! Elle ne tarda pas à rejoindre Malefoy mais aucun d'eux n'ouvrit la bouche, s'ignorant superbement comme ils savaient si bien le faire. À la vue de la diligence et des deux sorciers qui se tenaient près d'elle, Hermione céda à l'euphorie.
Hermione fut flattée de voir ses hypothèses certifiées par le chef de la Police Magique. La diligence qu'ils avaient malencontreusement prit avait été affrété pour le professeur Dumbledore qui passait ses vacances sur cette île perdue lors de ses congés. Il n'avait guère eut le temps de s'y rendre ces dernières années et il n'avait pas envisagé une seconde qu'un tel incident puisse survenir c'est pourquoi il n'avait pas prit la peine d'annuler le convoi exceptionnel.
C'est dans un état second qu'elle rassembla ses affaires sous l'œil bienveillant d'un des agents de la Brigade de Police Magique et qu'elle monta dans la carriole. Drago la rejoignit presqu'aussitôt et tandis que la diligence se mettait en route, elle accorda un dernier regard à la chaumière rustique, aux dunes de sable blanc piquées d'herbes sèches et elle sentit son cœur se serrer inexplicablement lorsque le paysage se brouilla pour enfin disparaître.
Elle détourna alors les yeux et rencontra ceux de Malefoy. Qu'elle le veuille ou non, leurs rapports avaient changé et bien qu'elle soit encline à renier les faits, l'animosité qui avait toujours existé n'était plus aussi violente. Ce n'était plus qu'une répulsion feinte et forcée, une pâle esquisse de la haine qu'ils éprouvaient encore l'un envers l'autre trois jours seulement auparavant. Et, à travers les prunelles grises de celui qui avait toujours été son pire ennemi, elle lu qu'il ressentait exactement la même chose.