Poudlard avait revêtit son manteau blanc et, en ce soir de Noël, les astres s'attachaient au ciel noir, lui dérobant son ordinaire austérité. Toujours en proie à ses idées fantaisistes, Dumbledore avait décidé d'organiser un bal masqué pour distraire ses élèves ne serait ce que pour quelques heures. Il aimait à croire que cette nuit au moins, ces jeunes gens parviendraient à faire fi de la menace qui se profilait à l'horizon.
La grande salle de Poudlard avait été parée pour cette fête tant attendue des élèves en quête de frivolité et d'insouciance. Des étoiles de neiges flottaient paresseusement dans les airs sous le joug tamisé des candélabres d'or disposés ça et là. Un majestueux sapin trônait au fond de la pièce, superbe manifeste de l'esprit de Noël avec ses guirlandes aux couleurs vives et changeantes. L'orchestre avait prit place à l'endroit même où les professeurs avaient pour coutume de s'attabler et les premières notes de musique emplirent la salle. Les élèves firent leurs entrées, avivant les lieux par leurs bonnes humeurs et leurs costumes des plus originaux.
Drago n'avait pas tenu à s'embarrasser d'une cavalière, songeant qu'il n'aurait aucune difficulté à s'attacher les faveurs d'une demoiselle s'il en éprouvait l'envie en cours de soirée. A seize ans, il était déjà fort de son pouvoir sur la gente féminine et ses conquêtes, aussi nombreuses qu'anonymes, ne faisaient que conforter sa réputation de séducteur. Combien de filles avait t-il tenu dans ses bras ? Combien encore l'avait accusé de n'avoir ni décence ni cœur lorsqu'il les abandonnait à l'aube ?
Il n'était sensible qu'à ses propres désirs mais n'était cependant pas incapable d'aimer et c'était là son plus grand regret. Lui, Drago Malefoy, toujours si froid et imperturbable se consumait de l'intérieur. Il brûlait d'un amour sans espoir et ce sentiment qu'il exécrait avec la rage de l'orgueil le rongeait sans jamais le réduire en cendres. C'était une souffrance lente et assassine qui le tiraillait à chaque souffle. Une souffrance que rien n'apaisait jamais, ni le temps ni les femmes qu'il couchait dans son lit.
Le prince des Serpentards se dirigea vers le buffet, se servit un verre et sonda la grande salle en le dégustant. Ses prunelles claires s'attachaient aux silhouettes des femmes avec l'acuité d'un prédateur en quête de victimes. Il était quelque peu contrarié que ce masque qu'il portait dissimule en partie son visage mais il savait d'expérience que, même sans cet atout majeur que représentaient ses traits, il saurait triompher des jeunes filles les plus timorées.
Crabbe et Goyle lui avaient signifié qu'ils le rejoindraient dans une poignée de minutes et il s'attendait à les voir apparaître d'un moment à l'autre. Comme ils ne le reconnaîtraient certainement pas étant donné leur perspicacité discutable, Drago crut bon de guetter leur venue pour les intercepter. Il se servit une nouvelle coupe, se tourna machinalement vers l'entrée et c'est là qu'il la vit.
Aux primes abords, il crut se tromper mais il l'avait tant et tant de fois observé sous couvert qu'il avait apprit sans le vouloir les moindres aspects de sa personne. La finesse de sa taille, le dessin de sa nuque, l'ovale de son visage au teint sans défauts et cette crinière sauvage aux reflets si doux qu'elle avait toujours tant de mal à dompter...
Elle portait une robe blanche drapée d'or qui, par sa simplicité et son élégance, lui donnait l'allure d'une de ces déesses grecques innommables que vénéraient les moldus de l'ancien temps. Un masque orné de plumes dorées dissimulait ses yeux, abandonnant ses lèvres peintes aux regards curieux.
Soudain conscient qu'il la fixait depuis plus longtemps que ne le lui permettait sa raison, Drago détourna la tête mais il eut beau s'interdire de lui accorder un regard de plus, ses yeux dérivaient dans sa direction sans qu'il n'y puisse rien faire. Il avait eut l'occasion de la voir en grand apparat trois ans auparavant et même s'il l'avait trouvé bouleversante, ce n'était rien en comparé. Ce soir, elle était tout simplement parfaite...
Hermione, bien que pleine de bonne volonté, se sentait malhabile chaussée d'escarpins. Aussi, lorsqu'elle se dirigea vers Harry et Ginny, elle fit un effort titanesque pour avancer d'un pas assuré. Ses amis, parfaitement assortis dans leurs costumes noir et argent, faisaient figure de couple modèle et la jeune fille se sentit soudain triste de n'avoir personne avec qui partager cette soirée. Pourtant, elle avait décliné bien des invitations, sachant d'expérience qu'elle n'était que très peu disposée aux flirts éphémères.
Voilà comment elle se retrouvait seule ce soir. Ron, étant en couple avec Lavande, avait tout naturellement convié cette dernière à être sa partenaire. De son côté, Neville avait invité Luna qui, pour l'occasion, avait renoncé à ses atours anticonformistes. Hermione était donc entourée de couples. Les plus improbables soit, mais c'était ainsi.
-Je te promet de ne pas te laisser sur ta chaise, Hermione. La prochaine danse sera pour toi !
Lui lança Harry tandis qu'il conduisait Ginny sur la piste. Hermione lui adressa un sourire en guise de réponse, les suivant du regard tandis qu'ils commençaient à évoluer parmi les autres danseurs. Restée seule, la jeune Gryffondore s'installa à l'une des petites tables rondes nappées d'azur et observa ses camarades valser. Elle eut un sourire en voyant Neville guider Luna avec l'agilité d'un danseur émérite et, comme elle admirait les sujets de cristal pendus aux branches de l'arbre de Noël, ses yeux croisèrent fugitivement ceux d'un jeune sorcier.
Il était grand, d'allure svelte et son costume d'un noir profond aux broderies d'argent semblait avoir été taillé pour lui tant il lui allait à la perfection. Autant qu'elle puisse en juger, il avait les cheveux d'un blond presque blanc et elle crut un moment qu'il s'agissait de cet idiot de Malefoy mais repoussa aussitôt cette idée. Jamais Malefoy ne se serait enhardi à la fixer de la sorte, sans animosité ni rictus sur les lèvres. Et puis, autant qu'elle sache, il n'était pas le seul blond de cette école ! Lorsque l'inconnu au masque de bronze lui adressa un sourire discret, Hermione s'empourpra.
Non, ce n'était pas Malefoy. Rassurée par ce constat, elle lui retourna son sourire avec retenue et détourna la tête, jouant les indifférentes pour cacher son trouble. Quand elle se rendit compte que le mystérieux jeune homme ne se trouvait plus à l'endroit où elle l'avait vu quelques secondes plus tôt, elle fut vivement désappointée mais ce ne fut rien comparé à ce qu'elle ressentit lorsqu'il surgit devant elle et lui tendit une main gantée de blanc. Une invitation.
Hermione hésita, ne sachant pas à qui elle avait à faire puis se dit qu'après tout, une danse ne l'engageait à rien. Elle glissa sa main dans la sienne et se leva. Le contact de sa paume sur sa hanche la fit frissonner et elle eut quelques peines à se concentrer pour ne pas lui massacrer les pieds. Il dansait avec une habileté charmante et elle se laissa guider avec plaisir, se détendant peu à peu.
Elle ne voyait de son visage que sa bouche. Des lèvres fines sur lesquelles se glissait un pâle sourire, de ceux là même qui en disaient long sans en avouer trop. Sa visière de bronze laissait entrevoir des prunelles claires mais avait t-il les yeux bleus ou verts ? Hermione n'aurait su le dire, les bougies n'offraient qu'un éclairage sommaire et vacillant.
Les yeux rivés aux siens, elle se demandait si elle l'avait déjà vu auparavant mais si ça avait été le cas, elle s'en serait incontestablement souvenu. Elle aurait voulut lui demander son nom, ou au moins celui de la maison à laquelle il appartenait mais sa bouche restait muette tandis que son regard soutenait le sien sans ciller. Il se dégageait quelque chose d'incroyablement attractif de sa personne, une aura ensorcelante qu'elle ne parvenait pas à expliquer.
Elle était si absorbée par son cavalier qu'elle ne remarqua pas qu'ils entamaient leur deuxième danse. Johann Strauss laissait discrètement place à Doga et le corps d'Hermione se tendit lorsque son partenaire resserra sa prise sur sa taille, la rapprochant de lui en douceur. Il n'avait aucun geste déplacé et elle se rasséréna progressivement, le suivant avec joie sur ce rythme plus soutenu.
Ils étaient si proche l'un de l'autre qu'elle pouvait sentir son parfum. Une fragrance boisée, sensuelle et résolument masculine qui dévoilait le raffinement de son cavalier. Hermione, désireuse d'en apprendre davantage, finit par demander :
-Quel est ton nom ?
Elle crut un moment qu'il allait lui répondre mais il se contenta de la faire pivoter sur elle-même avant de la ramener vers lui. Elle eut un sourire, bonne perdante et ajouta :
-A minuit, il te faudra bien tomber le masque.
-Si tu parviens à me retenir jusque là, chuchota-t-il.
Hermione fronça imperceptiblement les sourcils. Cette voix lui semblait étrangement familière et pourtant, elle ne parvenait pas à la reconnaître. Il avait parlé si bas qu'elle ne pouvait être certaine de quoi que ce soit.
-Je ne suis pas prête à laisser s'envoler un si bon danseur, fit t-elle.
Il garda le silence mais lui offrit un sourire qui lui alla droit au cœur. Hermione se laissa peu à peu griser par la musique entraînante et renonça à s'interroger sur l'identité de son partenaire, songeant qu'elle finirait par découvrir son visage aux douze coups de minuit. Elle perdit la notion du temps et en oublia même ses amis qui, de temps à autre, la croisaient sur la piste. Quand l'orchestre entama les premières gammes d'un tout autre genre de musique, Hermione s'arrêta.C'était un morceau romantique qui interpella inévitablement les couples présents.
Elle restait perplexe, jaugeant la réaction de son cavalier mais il semblait s'en remettre à elle. Danser sur ce morceau était un aveu quand à son attirance pour lui. Elle le savait. Il lui laissait néanmoins le choix, regagner sa place où accepter d'aller plus loin...
Hermione rejeta toute pensée raisonnable et glissa sa main sur la poitrine du jeune inconnu, lui abandonnant l'autre pour qu'il la guide une fois encore. Être si proche l'un de l'autre la rendait nerveuse quand bien même elle ne souhaitait pas l'être. Elle n'avait pas pour habitude de laisser ses émotions lui dicter sa conduite mais cette fois, elle ne pouvait faire autrement. En premier lieu parce qu'elle était au moins certaine de ne pas vouloir qu'il disparaisse.
Il avait fait preuve d'une imprudence folle en allant vers elle. Que se serait-t-il passé si elle l'avait reconnu ? Il n'y avait pas pensé une seule seconde. Quand il lui avait sourit et qu'elle avait répondu, il avait comprit qu'elle ne savait rien et cette révélation surprenante lui était apparue comme la plus séduisante des opportunités. Il avait prévu de ne partager qu'une danse avec elle mais il avait sous estimé ses capacités.
Il aurait pourtant dû savoir qu'avec elle, ce serait différent, qu'il ne pourrait pas agir à sa guise. Lorsqu'ils étaient confrontés l'un à l'autre, il se cachait derrière les insultes et les moqueries. Maintenant qu'elle était dans ses bras, son corps blotti contre le sien, il ne savait plus comment réagir.
Elle lui paraissait si vulnérable et confiante qu'il en éprouvait de la culpabilité. Elle s'attendait à ce qu'il reste auprès d'elle jusque la tombée des masques mais il ne pouvait s'y résoudre. Lui dévoiler son visage reviendrait à tout gâcher. Elle le détesterait davantage encore d'avoir joué avec elle et lui, ne supporterait pas de voir la déception sur son visage. La façon dont elle le regardait lui donnait l'impression que tout était possible, que ce soir, il n'était pas un vile Serpentard ou un Malefoy trop arrogant. Il était simplement lui même. Ce n'était qu'une illusion certes, mais il tenait à la vivre.
Le mal dont il avait souffert toutes ces années s'était enfuit comme un rêve, emporté au loin par ce bonheur fragile qu'il éprouvait à la sentir si proche. Elle passa ses bras autour de son cou et ce geste le confondit un bref instant avant qu'il ne la serre davantage contre lui. Il sentait son souffle contre sa nuque, son cœur battre tout contre lui, les frissons s'éveiller quand il effleurait la peau nue de son dos et il se surprit à souhaiter que le temps se glace pour les conserver tels qu'ils étaient en cette seconde.
Mais l'horloge insolente resta indifférente à sa prière silencieuse. La musique cessa, laissant à Dumbledore le loisir de lancer le décompte jusqu'au douze coups de minuit. Il ne su pas très bien ce qui le persuada de quitter la grande salle en entraînant Granger à sa suite. Il était déterminé à faire durer le mystère, à éterniser son rêve au possible. Elle le suivit en riant, lui posant des questions auxquelles il ne prit pas le temps de donner suite. Quand il s'arrêta sous l'arcade qui menait à la cour intérieur, Hermione lui lança un regard interrogateur.
-Qu'est-ce qui se passe ? Demanda-t-elle, déboussolée.
Il resta silencieux, la dévorant du regard, s'abreuvant de cette douce lueur qui donnait de l'éclat à ses prunelles d'ambre. Il avança une main vers son visage et défit le ruban qui retenait son masque, le laissant tomber sur le sol pavé. Elle ne bougeait pas, les yeux rivés au sien, le souffle court. À la voir ainsi, les cheveux défaits, les joues rosies par leur course folle, il sentit son cœur se serrer douloureusement. Elle voulut parler mais il apposa ses doigts sur ses lèvres pour l'en dissuader, il lui caressa la joue, dessina le contour de son visage et lui fit relever le menton. Elle répondit à son invitation muette et leva les yeux vers la branche de gui qu'il avait fait apparaître.
Drago guettait sa réaction, s'interdisant d'aller plus loin si elle se montrait un tant soit peu réticente mais quand elle lui adressa un sourire timide, il sentit toute appréhension le déserter. Il l'enlaça étroitement et posa ses lèvres sur les siennes. Elles étaient aussi douces qu'il l'avait imaginé et bien plus encore. Ce baiser avait le goût de ces plaisir légers qui font se sentir en vie.
Il s'écarta d'elle à regret et, tandis qu'Hermione trouvait appui contre le mur de pierre, les paupières closes, les lèvres offertes, il s'efforça de graver cet image dans son esprit. Les applaudissements et les cris de joie retentirent au loin, et pour lui s'achevait la parade. Il se pencha vers elle et dit dans un souffle :
-Joyeux Noël, Granger.
Ces mots prononcés, Drago s'éclipsa par les jardins, l'obscurité, complice de sa fuite, lui prodigua la plus sûre des couvertures. Il marcha d'un pas vif jusqu'au mur de pierres à demi-enseveli par la neige qui délimitait la cour intérieure. Là, loin des effusions festives, loin de sa partenaire aux yeux d'ambre, il laissa la tristesse le submerger. Il n'avait pas le choix. Lui révéler son identité c'était s'exposer et il ne souhaitait pas qu'elle le sache vulnérable et puis, nul doute qu'elle le détesterait en apprenant qui il était réellement. Elle ne saurait jamais rien.
Le rêve s'était enfuit, lui laissant sur la langue une saveur des plus amères et il se retrouvait seul une fois de plus, avec ses espoirs brimés au fond des poches et le poids de cet amour sur les épaules. Il ne lui restait plus qu'à préserver ces souvenirs. Emporter ces heures de bonheur volé à un autre, celui qu'il ne serait sans doute jamais libre d'être. Et, les garder jalousement, jusqu'à ce que le temps et le chagrin les ternissent.
Hermione inspecta les couloirs, retourna à la salle de bal, sonda la foule remuante de danseurs mais ne trouva aucune trace de son mystérieux cavalier. Elle s'adossa alors contre le chambranle de la grande porte, sa main tremblante pressée contre son cœur fou et observa ses camarades sans vraiment les voir. Elle avait peine à croire qu'il ait pu disparaître de cette façon ! La perspective de ne plus jamais le revoir l'emplissait de chagrin. Comment ferait t-elle à présent pour le reconnaître ? Elle n'avait pas même vu son visage.
La jeune fille pensa soudain qu'il ne voulait certainement pas qu'il la retrouve. Pour lui, dont elle ne connaissait rien, cela avait peut être était une distraction comme une autre. C'est le cœur lourd que la Gryffondore regagna son dortoir. Elle eut grand peine à trouver le sommeil, hantée par les souvenirs de cette soirée féerique qui s'était terminée si brutalement.
Le jour succéda à la nuit et les premières raies de lumière s'insinuèrent dans la chambre de la jeune préfète qui avait finit par s'endormir. Le réveil fut difficile et autant dire qu'elle ne se sentit pas la gaieté d'un lutin du Père Noël en voyant le cadeaux amassés au pied de son lit. Elle attrapa les premiers paquets, les ouvrit et l'attention de ses amis lui arracha un pauvre sourire.
Elle s'habilla sans grand entrain, boucla sa valise pour être fin prête à quitter le château plus tard et s'efforça de redonner un peu de couleur à ses joues avant de descendre déjeuner. Harry et Ginny étaient déjà là, prit dans une conversation de plus vives au sujet du match de Quidditch qu'ils organisaient pour ceux qui, comme eux, resteraient à l'école. En incorrigible paresseux, Ron devait encore ronfler comme une bûche puisque Lavande était attablée avec les sœurs Patil un peu plus loin.
Hermione s'efforça de sourire, mais le cœur n'y était pas et l'appétit manquant cruellement, elle s'appliqua couper son œuf en menus morceaux avec une précision que Ginny ne manqua pas de trouver inquiétante.
-Est-ce que ça va Hermione ? Demanda son amie.
-Oui, parfaitement ! Répondit t-elle précipitamment. C'est juste que je n'ai pas très faim.
Harry se pencha vers elle, et lui lança avec un clin d'œil espiègle :
-Tu vas nous dire qui était l'heureux élu qui t'a fait dansé toute la soirée ?
Hermione piqua un fard, ne sachant pas quoi lui répondre mais avant qu'elle ne puisse avouer la triste vérité, Ginny asséna un coup de coude à son petit ami et accentua son geste d'un regard noir.
-Bon, bon, j'ai compris ! Bredouilla-t-il, penaud.
Hermione n'était pas dupe, elle savait que si Ginny avait empêché Harry de la questionner, c'était avant tout pour avoir l'exclusivité de la confidence. En songeant qu'elle devrait raconter ce qui s'était passé, elle se sentie honteuse car elle avait le sentiment d'être tombée dans une de ces manœuvres de séduction cliché. Nauséeuse, elle s'empressa de quitter la table, prétextant ne pas être fin prête pour son départ. De retour dans sa chambre, Hermione tomba assise sur son lit et poussa un soupir à fendre l'âme. Elle n'était qu'une idiote. Elle aurait dû se méfier quand il avait refusé de lui décliner son identité !
Mais qu'importe les reproches qu'elle se faisait à présent, elle n'en était pas moins mal. Elle attrapa sa valise, la fit rouler jusque dans le couloir et posa la cage de Pattenrond dessus. Alors qu'elle balayait la pièce des yeux pour s'assurer qu'elle n'avait rien oublié, elle vit une enveloppe noire posée sur le tapis là où les elfes avaient déposé ses cadeaux de Noel à son réveil. Elle était cependant persuadé que celui-ci n'y était pas auparavant...
Elle prit le courrier et le décacheta fébrilement. L'expéditeur y avait glissé un objet ... Elle secoua l'enveloppe et une bague argent lui tomba dans le creux de sa paume. Une chevalière d'homme plus précisément, orné d'une émeraude sur laquelle des armoiries étaient gravées. Intriguée, Hermione tourna et retourna le bijou entre ses doigts. Elle regarda de nouveau dans l'enveloppe et en sortit une petite carte dorée sur laquelle deux phrases avaient été tracées à l'encre noire :
Hermione dû s'appuyer contre le baldaquin de son lit pour ne pas s'écrouler. En lisant ses mots, un poids énorme s'était envolé de sa poitrine. Cela ne pouvait être que lui ! Elle reporta de nouveau son attention sur la bague. Avait t-il donc si peu d'estime de lui-même pour douter qu'il puisse lui plaire ? La jeune fille sortit de sa chambre a toute allure, un sourire immense sur le visage. Il n'y avait qu'un seul endroit où elle pouvait trouver à quelle famille appartenait ces armoiries ! La bibliothèque.
Le peu de temps et surtout, l'impatience rendit les recherches d'Hermione difficiles. Elle passa une demi heure à parcourir des ouvrages, plus imposants les uns que les autres et à chaque fois qu'elle trouvait un emblème ressemblant, elle se sentait submergée par l'euphorie pour finir déçue et horriblement frustrée. Elle commençait sérieusement à perdre espoir, songeant que son cavalier mystérieux lui avait fait une farce quand elle tomba sur les armoiries recherchées.
Elles avaient été élaborées en 1765 par un dénommé Abraxas Mal... Hermione tomba lourdement sur sa chaise, ses yeux agrandis par la stupeur fixés sur le nom griffonné à l'encre décolorée.
Ce timbre de voix suave, ces lèvres fines qui lui avaient tant de fois craché des injures. Elle aurait pourtant dû les reconnaître d'emblée... L'attraction qu'il exerçait sur elle avait émoussé son discernement. Mais comment aurait t-elle pu seulement imaginer qu'un être aussi profondément exécrable que Malefoy puisse se comporter ainsi avec elle ?
Hermione ne su pas ce qui lui faisait le plus de mal, l'intense sentiment de trahison qu'elle ressentait ou la déception, vive et assassine. Elle aurait dû penser en premier lieux à tout ce qu'il lui avait fait subir et bannir jusque la moindre émotion éprouvée à son encontre mais ce n'était pas le cas. Ils avaient dansé ensemble une bonne partie de la nuit, il l'avait serré dans ses bras, il l'avait embrassé et qu'importe les raisons qu'elle s'inventait pour justifier son comportement, elle ne pouvait nier qu'il l'avait séduite.
Tout en lui l'avait envoûté, son sourire espiègle, l'éclat de ses yeux quand il la regardait, sa façon de la toucher... Hermione fronça les sourcils. Ce n'était pas ce genre de pensées qu'elle devait avoir pour lui, ce n'est pas cela qu'elle était sensée ressentir ! Mais tout son esprit ne parvenait pas à étouffer ses émotions. C'était trop tard. Il avait eut raison d'elle dés la première danse et, quand il avait prit ses lèvres, c'était son cœur qu'il avait dérobé.
Elle avait découvert une facette de Malefoy qu'elle n'aurait en aucun cas soupçonné et, plus effrayant encore, il avait su éveiller en elle des sensations qu'elle n'avait jamais expérimenté auparavant. Viktor l'avait toujours embrassé avec cette fougue qui se voulait être de la passion et elle avait cru reconnaître les empreintes du désir mais ce qu'elle avait ressentit dans les bras de Malefoy était très différent. Pour une jeune fille telle qu'Hermione, qui faisait des livres le socle de ses connaissances en toute matière, l'inconnu avait des allures d'épouvantard.
La jeune fille songea un moment qu'il s'était peut être joué d'elle mais cela lui semblait improbable... Le Malefoy qu'elle connaissait ne se serait jamais aventuré à la toucher, elle, la «Sang de Bourbe» et s'il avait cherché à lui faire un mauvais tour, n'aurait t-il pas ôté son masque ? Il avait tout fait pour qu'elle ne découvre pas qui il était, comme s'il n'assumait pas lui-même ses actes et s'il lui avait envoyé sa bague, il avait néanmoins voulut la dissuader de le rechercher.
Hermione se sentait soudain en colère. Elle lui en voulait de lui avoir tourné la tête pour finalement l'abandonner et surtout de lui faire ressentir des émotions aussi violentes et douloureuses. Il n'avait pas le droit de se faire passer pour quelqu'un d'autre et de jouer avec ses sentiments. Son mépris et ses insultes, n'avaient été qu'une façade. Ne pouvait t-il pas faire comme tout le monde et ne pas se conduire en lâche ?
Mais, parallèlement, Hermione songea que s'il avait assumé son inclinaison pour elle, ses amis et surtout sa famille ne l'auraient certainement pas toléré. Que savait t-elle au fond de celui qu'il était ? Tout ce qu'elle pensait connaître de lui jusqu'à aujourd'hui s'avérait faux et à en juger par la façon charmante dont il s'était comporté la veille, elle était loin de la vérité. Hermione était complément perdue.
Drago était d'une humeur noir. Quiconque avait osé le contrarier ce matin en avait fait les frais. Il traversa le coursive du train de sa démarche désinvolte, gratifiant d'un regard méprisant ceux qui osaient se trouver sur son passage. Crabbe et Goyle étaient partis du château en avance pour lui garder son compartiment favori et il espérait que ces deux abrutis n'avaient pas permis à Parkinson de s'incruster.
Quand il était descendu déjeuner ce matin, il n'était déjà que peu disposé à l'enthousiasme d'après-fête. Il avait passé la nuit à cogiter et, bien qu'il se soit sentit un peu coupable d'avoir prit la poudre d'escampette en abandonnant Granger, il avait convenu qu'il avait fait au mieux. Pourtant quand il l'avait vu à la table des Gryffondores, il avait sentit sa détermination faillir. Il n'avait pas pensé qu'elle soit si affectée par son comportement et la voir ainsi, les yeux cernés, un sourire crispé sur les lèvres... Il avait craqué.
Il savait avoir tout à perdre en se révélant mais il s'était raccroché à l'espoir que peut être... Mais qu'importe, c'était stupide. Affreusement stupide. Il se consola en se disant qu'il pourrait toujours démentir et clamer qu'on lui avait volé sa bague. Une maigre échappatoire certes mais qui croirait que lui, Drago Malefoy, était amoureux de la Miss-Je-Sais-Tout de Poudlard ? Personne.
Il en était là de ses réflexions quand la porte d'un compartiment s'ouvrit et que celle qui occupait ses pensées surgit devant lui. Sur le coup, il s'arrêta, s'efforçant de garder un visage neutre. Elle leva les yeux vers lui et en croisant son regard, il devina qu'elle savait. Les secondes s'égrenèrent avec une lenteur douloureuse. Elle finit par froncer les sourcils et Drago sentit son cœur se déchirer. Il passa prés d'elle en prenant garde de ne pas la frôler et continua sa route, la gorge nouée.
Il avait misé et perdu. Cela lui faisait un drôle d'effet. Il eut presque envie de rire de lui-même, de sa triste bêtise, de sa intolérable naïveté...
-Malefoy !
Ce nom dans sa bouche s'était toujours apparenté à une injure mais pas cette fois. Sa voix n'avait rien de venimeux, elle était simplement empreinte d'indignation. Drago ne se retourna pas, il était pétrifié. Le courage n'avait jamais été sa qualité première. Allait t-elle lui faire une scène en public ? Dans ce cas là, il ne se sentait vraiment pas d'attaque. Il était trop tôt.
-Malefoy, cesses de jouer les trouillards et regarde moi quand je te parle ! Reprit t-elle, intransigeante.
Irrité, il se retourna et la toisa d'un œil noir, se demandant comment elle pouvait être aussi agaçante et charmante tout à la fois. Elle s'avança vers lui avec un tel élan et une telle assurance qu'il crut bon de reculer d'un pas mais cela ne changea rien à l'affaire puisqu'elle vint se planter à quelques centimètres de lui. Il la dépassait d'une tête mais la façon dont elle le fixait était si intimidante qu'il eut l'impression d'être dominé malgré sa taille.
-Je te donne une minute pour t'expliquer, fit t-elle sèchement.
Il arqua un sourcil et répondit avec un sourire moqueur :
-Je ne vois vraiment pas de quoi tu parles.
Il s'était attendu à ce qu'elle s'énerve, à ce qu'elle insiste mais certainement pas à ce qu'elle lui colle sa main dans la figure.
-Ça c'est pour t'être conduit comme un lâche et ne pas avoir eut le courage de me dire ce que tu avais sur le cœur !
Drago, effaré, tâtait sa joue brûlante sans parvenir à prononcer le moindre mot et si la gifle d'Hermione l'avait prit de cours, il ne pu rien faire non plus pour parer à la suite. Elle lui adressa un sourire et avant qu'il puisse comprendre ce qu'elle avait en tête, elle lui prit le visage entre les mains et pressa ses lèvres contre les siennes. Elle interrompit son baiser un moment et ajouta d'une voix que l'émotion rendait à peine audible :
-Et ça, c'est pour récompenser ton initiative de séduction affligeante !
Voilà qu'elle se moquait de lui. Il n'en prit cependant pas ombrage car elle l'embrassa de nouveau. Curieusement, il fut beaucoup plus vif à réagir. Après une seconde de flottement durant laquelle il se demanda s'il n'était pas en proie à une hallucination, il répondit au baiser qui lui était donné, refermant ses bras sur la taille de la jeune fille.
S'il avait été moins occupé, il se serait sans doute rendu compte que la plupart des élèves s'étaient rués hors des compartiments pour les épier avec des yeux ronds comme des soucoupes mais il était devenu complètement imperméable à ce qui l'entourait. Voldemort lui-même aurait pu surgir dans ce train pour le menacer, il n'aurait pas délaissé sa belle.
La minute d'après, ils sortaient du train, main dans la main, indifférents aux sifflements de leurs camarades. Elle, pensait que ses parents comprendraient parfaitement qu'elle ait préféré rester au château avec son petit ami. Lui, ne voyait vraiment pas quel projet plus attrayant l'attendait au manoir. Ils étaient à mi chemin quand il sentit ses doigts échapper aux siens. Il se tourna vers elle, l'interrogeant du regard et elle se mordit la lèvre avant de bredouiller, contrite :
-Je viens de gâcher ton Noël en famille.
Il eut un sourire, un de ceux qu'il ne réservait qu'à elle et dit sur un ton amusé :
-Honnêtement, Granger, je m'en contre fiche. Tout ce que je veux pour Noel, c'est toi.