Fracas, vent, écume salée, bourrasques et feuilles tourbillonnantes, constituaient l’ambiance dans laquelle évoluait la jeune femme. Son écharpe en tartan était remontée au-dessus de son nez et sa main élégamment gantée tenait le col de son manteau contre sa bouche. Silhouette vacillante, menaçant de s’envoler au moindre coup de vent un peu trop fort, Fleur Delacour essayait tant bien que mal de se diriger vers le petit cottage au bord de la falaise.
Elle arriva enfin devant la porte de sa maison et toqua contre le panneau de bois, ses cheveux dorés voltigeant violemment autour de son visage. Un homme à la longue chevelure rousse lui ouvrit et l’attira rapidement à l’intérieur avant de l’embrasser vivement. Fleur décolla ses lèvres de celles de son mari et lui dit dans un sourire :
- Salut beau roux… Les enfants sont dans leur chambre ?
- Oui, Victoire s’amuse avec la fausse baguette que George lui a offerte l’année dernière, et Dominique et Louis sont absorbés dans leur jeu de construction magique, répondit Bill.
- On peut être sûr qu’ils en ont pour longtemps alors… murmura son épouse.
- Qu’entends-tu par là ?
Fleur répondit à son mari par des baisers de plus en plus langoureux, et passa sa main dans le dos de celui-ci. Ensuite, elle le serra plus fort contre elle afin qu’il fasse la même chose. Comprenant la demande, Bill se mit à lui souffler doucement dans le cou pendant que sa main droite traçait le contour de ses hanches. Ce n’était pas grand-chose, mais c’était divin pour Fleur ! Soudain, Bill arrêta tout et se recula. Fleur n’attendait qu’une chose : qu’il continue ! Aussi dans les yeux de son époux pouvait-on lire le plaisir de dominer la situation.
- Je n’irai pas plus loin tant que nous ne serons pas passés à la leçon numéro deux, expliqua celui-ci avec un sourire coquin.
Une petite pause chers lecteurs, s’il vous plaît. Je lis dans vos pensées « oh, encore un de ces PWP fort mal introduits, sans aucune originalité. Quel gâchis pour une fic de Noël ! ». N’êtes-vous pas en train de vous imaginer Bill donnant des cours de… (enfin, vous voyez bien ce que je veux dire) à Fleur ?Tut tut tut, mais où va le monde ?Lisez la suite de l’histoire et vous verrez….
Plus aucune félicité dans le regard de Fleur, mais de profonds reproches à la place.
- Oh non… Bill… Là maintenant c’est complètement inopiné ! Ta « leçon numéro un » d’hier était tout simplement une perte de temps. Non, tu exagères.
- Ca s’appelle du troc ma chère… Je tiens à ce que ton anglais soit parfait. C’est pour ton bien, tu me comprends. C’est donnant donnant.
- Voyons ! Tu sais pertinemment que je parle très bien anglais, tout le monde me le dit, s’offusqua Fleur sans aucune modestie.
- C’est uniquement pour ne pas être méchant avec toi qu’ils te le disent. Tu imagines si on apprenait que la famille Weasley est désagréable avec la femme de leur fils préféré ? Quelle honte ce serait…
- Bill, tu es tout simplement orrible. Je…
- Tu vois que tu as besoin de reprendre des leçons, darling, la coupa-t-il en esquissant un clin d’œil. Tu n’aurais pas dû me soudoyer pour que j’arrête de te donner des cours. Ton accent est loin de s’être amélioré avec les années ! Tu m’as avoué toi-même que tes premiers cours d’anglais avec moi avaient pour principal but de me séduire.
- Espèce de menteur ! répliqua l’accusée.
Néanmoins, ses joues rosissantes démentaient son attitude.
- Bon ok, mais une rapide leçon alors, continua-t-elle…
Ceci-dit, Fleur tira une chaise de sous la table et s’assit dessus avec résignation, les bras croisés sur sa poitrine. Elle planta ses yeux dans ceux de Bill et commença à user de son charme magique. « Merlin, remercie ma grand-mère d’avoir été une Vélane. Grâce à elle je vais sûrement échapper à ce stupide exercice. ». Ses cheveux se mirent à scintiller, ses yeux se tinrent d’un bleu plus profond et des ondes de désir émanèrent de tout son corps. Hélas, Bill ne plia pas.
- J’en étais sûr, ricana-t-il en se tenant debout devant la table, ses deux mains à plat sur la nappe.
Sa chemise était entrouverte. Il se mettait volontairement dans une position provocante, terriblement attirante aux yeux de sa femme.
- Tu ne m’auras pas tant que tu ne sauras pas parler anglais à la perfection, continua-t-il. Bon, commençons. Lorsque tu rentres à la maison, ne dis pas « Salut beau roux » en français. Tu peux par exemple me dire : « Bonsoir mon amour. J’ai rêvé de toi pendant toute la journée. Je vais préparer le dîner et puis, pendant que tu prendras une tasse de thé ou de café que je t’aurais servie avec des biscuits, je ferai la vaisselle pour te tenir compagnie. »
- Comment oses-tu me traiter de la sorte ? C’est complètement machiste ! Tu n’es pas sérieux j’espère !
Fleur regarda son mari. Devinant la formidable envie de rire qui se cachait derrière ce sourire railleur, elle reprit plus calmement :
- En effet, tu te moques de moi. Je ne vois pas en quoi me dire ces idioties me fera acquérir un meilleur accent.
- Ca ne m’étonne pas que tu ne le vois pas. C’est pourtant évident : je t’apprends les bonnes manières – que tu connaissais sûrement déjà – avec la bonne prononciation, c’est l’objectif du jour.
- Oh arrête, je t’en prie ! Ce n’est pas drôle, et puis de toute façon, on dit que l’accent français est sexy, alors autant le garder…
- Parce que tu aimerais séduire d’autres hommes que moi ? Voyons chérie, tu n’as aucune chance.
- Tu crois vraiment ? rétorqua Fleur, un sourire moqueur aux lèvres.
- Ce que je crois surtout, c’est que tu as très envie de moi.
Bill s’interrompit et rougit, se rendant compte de ce qu’il venait de dire. Reprenant contenance, il se racla la gorge d’un air magistral et respira profondément, comme avant un discours de la plus haute importance : - Ahem… Trêve de plaisanteries. Ce que j’aimerais dire aussi, c’est que tu ne te rends pas compte à quel point ton accent frenchy a une mauvaise influence sur nos enfants !
Bill regarda fixement sa femme en attendant sa réaction, se retenant de pouffer de rire. Il adorait la faire tourner en bourrique : elle partait vraiment au quart de tour ! Fleur eut à peine le temps d’ouvrir la bouche pour répliquer que la porte de la cuisine s’ouvrit dans un grincement caractéristique pour laisser apparaître une petite tête blonde.
- Elo momy, lança Victoire à sa maman qui la regarda aussitôt d’un air attendri.
- Aaaah, voilà bien la preuve que je dis la vérité ! s’exclama Bill en pointant sa femme du doigt, dans un parfait geste théâtral. Quelle terrible prononciation, c’est affreux, continua-t-il d’un air faussement choqué en regardant sa fille cette fois.
- Papa n’est pas gentil de dire ça…
- C’est bien ma chérie, Victoire et maman ont raison : papa n’est pas gentil du tout, dit Fleur en prenant sa fille sur ses genoux.
- OH MON DIEU MAIS C’EST TERRIBLE ! s’écria le père en question.
- Qu’est-ce qu’il y a de si terrible à …
Mais Fleur n’eut pas le temps de finir. Bill se précipita tout affolé sur sa petite fille, mit ses mains sur ses oreilles et essaya ensuite de regarder à l’intérieur. Enfin, ayant terminé ces mimiques, il regarda Victoire avec inquiétude et lui dit :
- Dis-moi, tu n’as pas mal aux oreilles j’espère ? Si c’est le cas, il faut absolument appeler un Médicomage, ça peut être très grave !
- De quoi parles-tu ? s’enquit Fleur en se demandant à quoi jouait son mari.
- Tu viens de dire des choses absolument obscènes ! lui répondit ce dernier complètement outragé. Tu as prononcé « maman a raison » et « papa n’est pas gentil » dans la même phrase. Comment veux-tu que ta fille soit bien éduquée ?
Puis se tournant à nouveau vers la petite :
- Ce que maman vient de dire est très vilain, ce sont des énormes gros mots. Surtout ne les répète pas et oublie-les, je suis très sérieux. Sinon, tes oreilles vont souffrir d’entendre ces atrocités.
Victoire, ne sachant pas si c’était du lard ou du cochon, n’osait plus rien dire et se mit à regarder alternativement son père et sa mère avec incompréhension.
- Ma chérie, n’écoute pas ton père, il raconte n’importe quoi, c’est insensé, rétorqua Fleur. Tu ferais mieux de prendre ton bain à la place, on mange bientôt. Allez, va !
Une fois la fillette sortie de la pièce, Fleur mit ses mains sur ses hanches et fusilla Bill du regard. Celui-ci riait silencieusement en se tenant les côtes d’une main, l’autre placée devant sa bouche pour s’empêcher d’exploser de rire.
- Et tu trouves ça drôle ? s’énerva Fleur. Ah oui, c’est vrai que vous êtes très funny, vous les anglais !
- Deuxième obscénité de la soirée, mon amour. Décidément, les françaises sont bien plus dévergondées que ce que j’imaginais. Tu m’offenses gravement en me qualifiant d’anglais ! Ecossais je suis, ma chère. Ecossais.
- Mais qu’est-ce qui t’arrive ce soir, Bill ? Tu fais des plaisanteries complètement stupides, tu fais tout pour me mettre hors de moi. J’ai même envie de dire que tu te montres cruel !
- C’est sûrement mon côté obscur, la part de loup-garou qui sommeille en moi se réveille soudain. Tu ne peux en vouloir qu’à Greyback. Mais c’est dommage pour toi, il est déjà mort. Cependant, dis-moi, je croyais que tu trouvais que les loups-graou étaient garou ? Euh… non je veux dire que les loups-garou sont grrraaou…
En même temps qu’il disait cela, Bill s’avança vers sa femme en faisant mine de la griffer. Celle-ci ne put s’empêcher d’esquisser un sourire puis reprit son expression de colère tout en commençant à sortir du placard les affaires pour préparer le repas.
- Alors Fleur, la plus belle des presque-vélanes ne veut pas passer la nuit avec le plus beau des presque-loups-garou ?
- Tes idioties m’en ont ôté toute envie.
Entendant les paroles de sa femme, Bill leva les bras en signe de triomphe et sautilla de manière absolument ridicule et bruyante à travers la cuisine. Interceptant le regard dédaigneux de son épouse, il sourit, se tint bien droit puis s’inclina profondément en faisant des moulinets avec sa main droite et en prononçant en français « merci, merci, m’sieurs dames… merci ». Il continua son cinéma en tournant sur lui-même jusqu’à ce que les enfants, sentant l’odeur naissante du dîner, entrent dans la cuisine et le trouvent en train de faire le pitre.
- Pourquoi tu nous remercies Papa ? l’ interrogea Victoire qui commençait sérieusement à se demander si son père était devenu fou.
- Tu as fait un pestacle de clown ? s’enthousiasma le petit Louis.
- Mais non, il est juste très content, constata Dominique.
- Et dix points pour la petite Weasley ! s’exclama Bill en soulevant Dominique et en la faisant tournoyer dans l’espace qu’offrait la cuisine. Et sais-tu pourquoi je suis très content ? demanda-t-il.
- Enfin, Bill, tu ne vas pas leur raconter ça quand-même ! C’est insensé.
- Il n’y a pas que toi qui puisses me rendre très content, ma chérie. Les enfants, j’ai une bonne nouvelle à vous annoncer : Papa a eu une promotion à la banque !
Bill reposa Dominique à terre et serra ses trois enfants dans ses bras en jetant un regard en direction de Fleur. Sur le visage de celle-ci, l’étonnement succéda à la colère, vint ensuite la joie et enfin un certain embarras.
- Je… C’est génial, tu… tu ne me l’avais pas dit…
- C’est l’inconvénient quand on se jette immédiatement sur son mari sans lui demander comment sa journée s’est passée. Après, il a juste envie d’embêter sa femme, répondit Bill en souriant.
- Tu aurais très bien pu me le dire au lieu d’insister pour me donner ces stupides leçons et te moquer de moi !
- Mais tu m’as fait tellement rire que je ne pouvais que continuer. C’est tellement bon de pouvoir s’amuser juste en te faisant enrager, tu es si susceptible…
Il se releva, s’avança doucement vers Fleur et approcha ses lèvres de l’oreille de celle-ci. Il était redevenu l’homme calme qu’il était, mais gardant bien présente en lui une grande part de malice.
-…mais si adorable… lui murmura-t-il.
Et de la manière la plus tendre du monde, il déposa un très long baiser sur sa joue.
- Beeeeuuurk !
- Louis, tu es parfois vraiment bête, s’exaspéra Victoire.
Elle intercepta ensuite le regard de sa petite sœur et toutes les deux se mirent à glousser en chœur. Leur mère, qui avait fortement rougi, servit le repas et tout le monde se mit à table dans une ambiance joyeuse, discutant de la promotion de Bill, des bêtises de Louis et des bonnes notes de Dominique. Victoire, quant à elle, était pleinement rassurée de voir que son père n’avait pas du tout perdu la raison. « On a sûrement besoin d’avoir des moments où on rigole beaucoup pour rien » philosopha-t-elle en mangeant.