Louis et Scorpius sont allongés par terre, main dans la main. L'herbe verte leur chatouille la nuque et, de temps en temps, de petites bêtes qu'ils ne se donnent plus la peine d'identifier entreprennent l'ascension de leurs deux corps rapprochés, de leur peau hérissée par la fraîcheur de la nuit.
Sans bouger, ils contemplent le ciel.
Ils se sont amusés à en reconnaître les étoiles, les planètes. Ici Vénus, là la Grande Ours. Les savoirs de l'un en Astronomie viennent combler les lacunes de l'autre. Des fois, Louis fait une prédiction de bonne femme buveuse de thé ; Scorpius se moque souvent de la divination. Louis a choisi cette option parce qu'il n'avait pas d'idée, pas d'ambition. Ah ça, il en a, de l'ambition, il la revendique, Scorpius Malefoy ! Des fois, Louis le fixe, se demande s'il ne va pas finir par le distancer avec ses grands rêves et ses grands gestes, ses yeux pleins d'étoiles lorsqu'il pense à l'avenir.
Louis n'aime pas penser à l'avenir. Poudlard est douillet, Poudlard est simple. C'est son foyer, là où il se sent en paix. Et puis, il y a Scorpius.
« Hé. Ça, c'est Uranus. »
Scorpius lève un bras perpendiculaire à son corps. Louis suit la direction de son doigt tendu, mais il ne parvient pas à savoir quel astre il montre. Alors il acquiesce. Des fois, Louis lâche prise, parce qu'il se dit que ça n'avancerait à rien de savoir. De savoir si Scorpius le quittera un jour. Pour un beau métier, une belle maison... Une belle femme ?
Il frissonne.
Lorsque Louis cale sa joue sur son épaule, Scorpius se tend. Il affecte un flegme qu'il ne ressent jamais en la présence du joli blond. En réalité, tout saute en la présence de Louis. C'est comme si son cerveau se remplissait de pétards qui se mettaient à exploser les uns après les autres. Il lui faut un certain temps pour que son cœur reprenne un rythme normal. Son dos, ses fesses, se laissent glisser contre l'herbe fraîche de cette nuit sans lune.
Juste à côté de lui, le lac s'étire en des milliers de ridules paisibles. Scorpius en caresse la surface, dérange tout. Des fois, il se dit qu'il a tout bouleversé dans la vie de Louis. Que celui-ci devient trop dépendant. Que lui-même ne sait plus quel est son rôle. Au début, ça paraissait simple. L'aimer, de toute ses forces, et puis l'aimer encore. Et à présent, son amour n'a pas faibli. Il se demande simplement s'il n'a pas pris une place de grand frère protecteur dans le cœur de Louis.
L'avenir lui fait peur. Oh bien sûr, il y a tous ces projets qui mûrissent doucement sous sa tignasse blonde, presque blanche. Des projets qui animent les petites fourmis dans son ventre, qui lui arrachent un sourire. Et entre toutes ses envies se glisse une ombre, sournoise. Celle de Louis. Et il se dit, qui lâchera le premier ? Et il se demande. Est-ce que j'en ai envie ?
Scorpius bat des paupières. La main de Louis est apparue dans son champ de vision, qui recouvre le ciel comme pour l'emporter avec lui, qui se referme dessus. Ses longs doigts agrippent les bouts de lumière, et Scorpius ne peut détacher ses yeux de ce toucher lumineux.
« Ce serait quand même vraiment bien si on pouvait plonger dedans.
- Se noyer dans les étoiles, il y a pire comme destin, » admet Scorpius.
Le bras de Louis retombe contre son flanc. Il le ramène près de son visage, ses jambes aussi, comme une boule, et se blottit un peu plus contre Scorpius.
« Ce qu'il nous faudrait, c'est une clé. »
Une clé pour quoi ? se demande Scorpius, les yeux dans les étoiles. Pour ouvrir, ou pour refermer ?
Pour partir, ou pour rester ?