Ne pas flancher.
La seule pensée qui me vient à l'esprit, la seule conviction pour ne pas tomber, pour ne pas s'arrêter. Avancer, encore, toujours. Continuer, sans fin, cette lutte interminable. Je ne compte plus, je ne cherche plus à comprendre, je perds seconde après seconde, minute après minute, heure après heure, les dernières lueurs, lueurs d'espoir. Mon courage s'envole, bien que maigre soit-il, l'adrénaline a quitté mon corps depuis longtemps déjà, mes forces disparaissent, enfoui au plus profond de ma personne.
J'ai peur, je tremble, je lutte, contre une volonté qui me fait défaut, contre le désespoir, grandissant. Je vacille. Ne plus voir, ces corps, sans vie, qui me frôlent, ces éclairs de couleurs si meurtriers, si néfastes. Ne plus entendre, ces cris, de douleur, qui agressent mes oreilles, ces appels, à l'aide, leur dernière parole. Il n'y a plus de différence, entre ami ou ennemi, entre bien et mal, entre sang-pur et sang-de-bourbe. Rien, il n'y a rien, juste une brume informe, indistincte, je devine que mes larmes en sont la cause, des larmes brulantes qui gâchent ma vue, qui gâchent ce joyeux paysage, ironie. Je suis seule, seule sans autre forme de compagnie que mes sordides pensées, triste solitude n'est-ce pas ?
J'interdis une nouvelle fois les pensées parasites d'envahir mon esprit troublé, déjà. Pourquoi suis-je ici ? Je ne fais rien sauf attendre un signe d'espoir déjà perdu, une raison de ne pas lâcher, de ne pas se faire tuer, d'une mort rapide et brutale. Ce n'est pas avec des si que l'on forge la vie, mais les doutes s'interposent. Si j'avais écouté les enseignants, si j'étais partie avec mes camarades de maison, la fabuleuse maison de Serpentard, grandeur et décadence au vue des cas qui composent une des quatre familles de Poudlard, si j'avais suivi sagement le mouvement de départ, si j'avais quitté l'école le plus rapidement possible quittant ce tourbillon infernal, qui m'entraine sans fin vers le fond. Mais il fallut que mon côté Gryffondor prenne le dessus, je ne suis pas très courageuse ni très loyale, je n'agis que rarement sans réfléchir, pourtant au vu de ma situation, déplorable, je ne peux affirmer avoir pris un temps de réflexion.
Je revois, scène après scène, ma détermination infaillible, ma stupidité invisible. On me dit que cela s'appelle du courage, du courage cela ? Je ne crois pas, c'est une idiotie. Un souvenir refait surface, mes yeux se voilent tandis que je revis mes derniers instants dans cette salle, qui m'avait accueillie depuis mes 11 ans...
Flash-Back
Un livre d'histoire de la magie dans les mains, je scrutais les élèves verts et argents. Ceux-ci discutaient, étudiaient ou s'amusaient, tout ceci dans un silence que je qualifierai de religieux. Depuis le temps je devrais être habituée à cette atmosphère, celle-ci était tellement pesante. Un froid avait été jeté ce début septembre, le soir de la rentrée, les Carrow étaient venus nous prévenir qu'aucun débordement ne serait accepté, ils nous avaient alors fait un petit discours sur l'importance de la tenue des élèves de la maison Serpentard, que le blason de celle-ci ne pourrait être taché par des morveux de tous âges confondus, que nous régnerons bientôt aux côtés du maître des Ténèbres, que nos désirs seront exaucés, et que les sang-de-bourbe rouleront à nos pieds. Ils étaient sortis de la salle en nous promettant de nombreuses surprises pour le lendemain.
La plupart des élèves de 7ème année avaient alors pris un air supérieur et nous avaient alors tendu leur bras gauche : la marque de Voldemort, des mangemorts y était apposée. Nous les regardions avec stupeur, ébahi mais peu étonné, tous les élèves depuis la 4ème année s'attendaient à cette situation. Malfoy avait alors pris la parole, nous promettant de nombreuses sanctions si leur statut de mangemort était découvert officiellement. Nous n'avions pas besoin de leur demander quelles seraient ces sanctions, nous les imaginions très bien, entre endoloris et autre magie noire.
Le lendemain matin était arrivé très vite, et nous pûmes constater l'étendue de la surprise que nous réservaient les Carrow : magie noire au programme et cours anti-moldus. Quelques Serpentards contestèrent les ordres des deux fous, ils en subirent les conséquences, une séance de torture pour chacun comprenant une somme conséquente de coupures recouvertes de sel. Après la mésaventure de quelques élèves verts et argents, plus personne n'enfreignit les règles des deux Carrow, les membres de l'Armée de Dumbledore exceptés, bien que leur nombre avait beaucoup diminué depuis l'année d'Ombrage. Il ne devait y avoir qu'une petite dizaine de griffons et quelques blaireaux et aigles. Au fil de l'année, les résistants se firent de moins en moins nombreux. Les cours des mangemorts devenaient de plus en plus effroyables, on nous demandait de jeter des doloris sur des animaux et même des élèves en retenue.
Je m'étais retrouvée une fois en retenue ne voulant pas exécuter le sort de torture sur des animaux innocents, et on m'avait alors menacé de me prendre mon insigne de préfète en chef. Je tenais plus que tout à ce titre, et je n'avais donc plus jamais contesté les décisions des Carrow. Je me faisais oublier et je cachais les erreurs des résistants comme je le pouvais. Les professeurs n'étaient au courant de rien, ceux-ci croyaient même que je faisais partie de la clique des mangemorts de 7ème année. Ils n'avaient jamais vu mes agissements et seulement deux ou trois élèves étaient au courant de mes gestes. On m'avait donné ce rôle suite à la non-venue de Granger, les mangemorts souhaitaient aussi que ce poste me rapproche des verts et argents de Voldemort. Je n'avais jamais puni ceux-ci, je savais cela inutile car les Carrow auraient tous deux vite fait d'enlever cette heure de retenue. Les gens appellent cela de la lâcheté, moi j'appelle cela de la réflexion, de l'intelligence et de l'ambition.
Suite à mes nombreuses réflexions intérieures, je me plongeais à nouveau dans mon livre d'histoire de la magie, une matière que j'appréciais malgré le professeur.
Je lisais attentivement un passage de mon livre de cours, sur un certain gobelin qui s'était révolté Vik le pouilleux, nom étrange, quand soudain le professeur Astoria, qui s'occupait de l'étude des runes, entra brusquement dans la salle. Elle appela alors les préfets des serpents, je me levais et allais la rejoindre, me questionnant sur la raison de cette entrée. Elle nous appris alors que nous devions réunir tous les élèves de Serpentard dans la grande salle malgré le couvre feu qui n'allait pas tarder à arriver. Nous sortîmes alors les élèves de leurs dortoirs, puis nous les avions réunis dans la salle commune. Beaucoup d'élèves nous questionnèrent mais nous ne pûmes leur répondre car nous n'en savions pas plus, certains rayonnaient, difficile de ne pas savoir lesquels.
Le professeur Astoria et moi en tête du cortège, nous avançâmes le long des couloirs de Poudlard jusqu'à atteindre la grande salle. Les trois maisons étaient déjà présentes ainsi que plusieurs adultes, il me sembla même voir les jumeaux Weasley. Nous nous assîmes à notre table habituelle en attendant un discours du professeur Rogue, quelle ne fut pas notre surprise en voyant McGonagall à la place du directeur et les Carrow absents ! Le professeur McGonagall entama alors un bref discours. Seule une phrase retint particulièrement mon attention : « Poudlard est attaqué par Voldemort ». L'animagus allait continuer de s'exprimer quand tout à coup une voix glaciale me pétrifia, le maître des Ténèbres était là à quelques mètres, bien qu'à l'extérieur du château. Le Lord nous demandait de lui ramener Harry Potter et il n'y aurait alors aucun blessé, aucun mort. La voix s'est alors tue, et une Parkinson hystérique exprima son accord en hurlant à qui voulait l'entendre que Potter était là dans cette salle. Je me retournais vers le Survivant, le scrutant, il me semblait qu'il avait perdu quelques kilos et que ses joues s'étaient creusées. Le professeur de métamorphose répondit froidement à la mangemorte, et incita les Serpentards à quitter le château. Au moment même où ces phrases furent prononcées je vis rouge : nous n'allions donc pas pouvoir nous battre, que les mangemorts partent c'était normal mais que les 7ème années de Serpentard doivent obligatoirement quitter l'école même s'ils ne partageaient pas les idées du mage noir, ça c'était impensable !
Les Serpents quittèrent plus ou moins rapidement la table. Seule Mathilda Perks, Grégory Sally et moi restèrent à notre table. Les adultes commencèrent à nous prendre brusquement les bras pour nous faire bouger. Je me levais alors avec Perks et Sally et nous nous dirigeâmes vers le professeur de métamorphose. Celle-ci nous regarda froidement et nous pria de nous mettre sur le côté. Les élèves trop jeunes des autres maisons partirent à la suite des Serpents. Les autres personnes se réunirent pour parler stratégie. Le professeur McGonagall se tourna ensuite vers nous :
« - Sortez du château immédiatement.
- Nous ne sortirons pas, nous voulons nous battre.
- Vous battre Miss Wright ? Contre nous bien sûr.
- Non, nous allons nous battre pour ce que nous croyons juste, pour honorer la maison Serpentard, pour monter à tous que nous ne sommes pas des lâches, des incapables, nous sommes fiers de notre maison.
- Pour ce qu'elle compose ?
- Vous voulez parler des mangemorts ?
- C'est exact, tous les Serpentards de dernière année sont mangemorts.
- Faux ! Je ne suis pas une sbire du mage noir, et mes deux compagnons non plus.
- Ah bon, avez-vous une preuve ? »
Suite à ces mots je remontais ma manche gauche, Sally et Perks m'imitèrent, nos bras étaient intacts, blancs, sans aucune marque.
« - Vous êtes certainement des traitres, vous allez nous jeter un sort de magie noire dans le dos.
- Et pourquoi ferions nous cela ?
- Pour obéir aux ordres de Voldemort.
- Je n'ai jamais vu le mage noir, en quoi cela vous dérangerez que l'on se batte, nous sommes contre leurs idées, nous savons très bien que les né-moldu ont autant de capacités que les sang purs, Granger par exemple.
- Pourquoi êtes-vous aussi déterminés, pourquoi ne partez-vous pas ?
- Nous voulons redorer notre blason, pour faire comprendre à tous que nous ne sommes pas des lâches. Pour prouver notre place dans cette maison, les qualités de cette maison sont la ruse, l'ambition, la détermination et nous agissons comme de vrais Serpentards, ce sont les mangemorts qui sont à côté des valeurs de notre maison.
- Bien, vous avez l'air d'avoir mûrement réfléchi. Mais pourquoi ne pas avoir suivi les autres, pourquoi n'avoir rien fait tout au long de l'année ?
- Nous avons agi professeur, nous avons aidé les plus démunis, nous avons sauvé des élèves de longues séances de torture. Grâce à mon rôle de préfète en chef, j'ai pu agir discrètement, en utilisant la ruse pour me sortir des mauvais pas. J'ai sauvé plusieurs fois les membres de l'Armée de Dumbledore, sans que ceux-ci ne s'en rendent compte.
- Vous pouvez combattre, mais nous vous aurons à l'œil. Prenez garde à vos arrières."
Chacun se mit alors à son poste, attendant le moment fatidique, la fin du compte à rebours. La voix du maître des Ténèbres emplit tout le parc, nous faisant sursauter. Je sentais dans mon dos les regards attentifs des adultes. Les mangemorts avancèrent vers nous après avoir détruit les défenses de l'école. Il étaient une centaine même plus, je ne pouvais tous les apercevoir, les géants se joignirent à eux pendant que j'apercevais quelques loups-garous dans leurs rangs.
Le combat commença, j'enchainais ma liste de sorts, entre stupéfix et expelliarmus. Je me battais à l'arrière, voyant les sorciers tomber en première ligne. J'avais peur mais l'adrénaline aidant je combattais sans m'arrêter. Les minutes passaient ainsi, je fus obligée de me replier dans le château. Les couloirs étaient vides mais ils se remplissaient au fur et à mesure. Les combats continuaient, je sentais par moment un sort me frôler, je possédais quelques coupures légères et je devenais de moins en moins résistante. Je voyais les corps tomber près de moi, autour de moi, une jeune femme métamorphomage tomba suite à l'Avada de Bellatrix Lestrange. Il ne restait plus que deux ou trois sorciers et Lestrange. Je pris la fuite.
Fin du Flash Back
Voilà, je suis là, fatiguée de courir pour sauver ma vie. Mes larmes coulent abondamment le long de mes joues pâles. J'ai peur, je veux arrêter, je veux que cela cesse, je veux dormir. Mais je ne peux pas, je ne dois pas, je n'en ai pas le droit, la permission. Il faut continuer, il ne faut pas pas baisser les bras. Ne jamais flancher.
Continuer, encore, toujours... Un rire hystérique me sort de ma léthargie, je me retourne prête à affronter mon adversaire, Bellatrix Lestrange. Cette folle ricane.
« -Cela n'a pas l'air d'aller ma jolie, viens, on va jouer, on va faire un jeu très drôle, le jeu du chat et de la souris, tu connais ?
- Non
- Tu vas apprendre, alors. Mais dis-moi, que fait une élève de Serpentard dans la bataille et contre nous. Rejoins moi, tu vas aimer le pouvoir.
- Et faire partie de ses sbires, de ses pions, non merci.
- Comment oses-tu ? Sale petite garce ! Cours tant que tu peux. Je suis le chat, tu es la souris, je te laisse 20 secondes pour courir. 1, 2, 3..."
Je n'attends pas la fin du compte à rebours, je cours comme une folle et pars me cacher. J'entends ses pas qui se rapprochent, lentement. Elle parle, mais je ne l'entends pas, trop concentrée sur ses gestes. Elle est maintenant très proche, trop même. Je décide alors le tout pour le tout, à quoi bon attendre la mort sans rien tenter ? Je cours à l'autre bout de la salle suite à une poussée de courage.
Un rire suraigu m'agresse les oreilles.
Il ne faut pas flancher.
Je ne vis pas l'éclair vert m'atteindre.