Les traîtres ont eu eux aussi, le droit à une sépulture.
Mais à quoi bon ? Qui viendrait rendre visite aux anciens suppôts de Lord Voldemort ? Ils n'ont plus de famille, plus d'amis. Et les seuls encore en vie, sont définitivement enfermés à Azkaban. C'est ainsi, le bien a vaincu le mal et ses partisans par la même occasion.
Alors, pourquoi suis-je ici ?
Je n'ai jamais eu de considération pour cet idiot. Il n'était qu'un abrutit sans cervelle qui se laissait embrigader sans réfléchir. C'est peut être pour ça que j'ai pris la peine de venir. Car, il n'avait tout simplement rien compris. Peut être avait-il eu besoin d’appartenir à un groupe et d'être reconnu. Il avait peut-être juste eu besoin de ne pas se sentir inutile.
Il voulait prouver à son Mangemort de père qu'il le suivait dans ses idéaux. Se voir confier une tâche par le grand Seigneur des Ténèbres, je sais à quel point ça peut être gratifiant. On se sent important, on pense être indispensable. Mais on se trompe. Car en réalité quoi qu'il arrive, nous ne sommes que des pions. Et les pions, tout le monde sait qu'on les sacrifie pour mieux défaire le roi adverse.
Cela, je l'ai bien compris lorsque Rogue a tué Dumbledore à ma place. Jamais je n'aurais pu le faire. Pourtant, je me suis entêté, pensant que je pourrais remonter dans l'estime de mon maître. Et c'est ce qui a provoqué la mort de Crabbe.
Si je n'avais pas été si aveuglé, je ne l'aurais pas emmené de force dans la Salle sur Demande et jamais, il n'aurait créé ce Feudeymon. Tué par son propre sortilège. Quelle ironie du sort...
Je m'avance à travers les allées vertes entrecoupées de tombes du vaste cimetière au sud de Pré-Au-Lard. Pourquoi ici ? C'est vrai, si proche de Poudlard, si proche du bien. Et pourtant si loin.
Ils n'ont pas mélangé les sépultures des bons et des méchants. Ils se pensent meilleurs ? Pourtant, les trois-quart d'entre eux n'ont rien fait. Immobilisés par leur peur, cloîtrés dans leurs abris, ils auraient tous pris le parti du vainqueur. Leur égocentrisme m’écœure. Leur couardise aussi. Ils osent fêter la Victoire, alors qu'ils n'ont rien risqué pour la mériter. Ils osent rejeter les ex-Mangemorts et leurs familles alors qu'ils auraient été prêts à nous lécher les pieds pour vivre.
Au fur et à mesure que je pénètre au cœur de la nécropole, les jolies tombes et les grands caveaux disparaissent. Puis, vient le tour des tombes abandonnées et abîmées. À l'orée de la Forêt Interdite, quelques tombes sont disposées dans des recoins sombres. Voilà où ils ont abandonné nos morts. Nous le méritons, n'est-ce pas ? d'être rejetés et isolés. Nous le méritons, d'être rabaissés au rang de moins que rien.
Je frissonne à cette pensée et ricane avec suffisance. Si un jour cette idée m’effleure réellement l'esprit, je me rends moi-même à Ste Mangouste pour m'y faire interner.
C'est la première fois que je viens. Je n'avais même pas assisté à l'enterrement. À ce moment, mon seul but était de m'éloigner de tout ce qui aurait pu me faire condamner. Car oui, contrairement à mon père, j'avais été gracié. Et pourtant, l'idée de devoir ma liberté à Potter me reste en travers de la gorge. Ce n'est pas parce que Voldemort a disparu que lui et moi sommes devenus amis.
Pourquoi devrais-je me rapprocher de lui ? Il représente tout ce que je déteste. Dès la première fois où je l'ai vu, dans la boutique de Madame Guipure, j'ai su que je ne l'aimerais jamais. Pourtant, lorsque j'ai appris qu'il s'agissait d'Harry Potter, j'ai fait un effort et lui ai tendu la main. Mais il a refusé, empêchant ainsi toute relation amicale entre nous.
Certes, je reste poli et fait bonne figure en publique. Mais... Si je connaissais ne serait-ce que les bases du vaudou, je me ferais une joie de le maudire et le torturer à l'aide d'une poupée à son effigie.
Elle est là, la tombe que je cherche. Cachée parmi tant d'autre aux aspects similaires. Elle est tordue et la pierre est à moitié penchée. Comme toutes celles des parias, elle n'est pas entretenue et, malgré les dix années depuis sa création, elle est déjà salle et abîmée à certains endroits. Heureusement, celle-ci n'a pas été touchée par les actes de vandalisme perpétués à l'encontre des sépultures des Mangemorts.
D'une écriture terne et à moitié illisible, le nom de Vincent Crabbe est écrit. En dessous, on peut lire les mots suivants :
Né le 26 avril 1979. Mort le 2 mai 1998.
Le mal s'est emparé de sa raison. Mais malgré cela, il ne méritait pas de mourir.
Qui mérite de mourir ? Pourtant, certains épitaphes sont bien plus cruels que celui-ci. Simplement qu'il était jeune. Jeune et bête. Et c'est sûrement pour cela qu'on lui a servi ces quelques lignes.
Contrairement à certaines tombes qui sont bien trop fleuries, celle-ci est vierge de tout présent. En ce 2 mai 2008, personne n'est venu se recueillir sur cette tombe. Personne n'est venu commémorer sa mort. De toute façon, qui viendrait ? Son père est à Azkaban. Sa mère, morte. Il n'a plus de famille et n'a jamais eu d'amis.
Alors... pourquoi suis-je ici ?
Pour expier ma faute ? Pour me faire pardonner d'avoir causé sa mort ?
Je suis venu simplement pour faire cesser les cauchemars qui me hantent. Je suis ici pour ma conscience.
Je dépose un muffin sur la terre bosselée. Je sais, c'est ridicule. Pourtant, je sais qu'il aimait ça. Que ça... ? Non. Mais je n'ai jamais cherché à le comprendre et à le connaître. Dans mon esprit, je passais le premier et ce gorille n'était là que pour faire office de garde du corps.
D'un coup, je me sens idiot. J'aurais dû lui parler plus, chercher à le comprendre. Il était un de mes rares... amis ? Non, on ne peut pas parler d'amitié.
Pourtant, je suis là, à me balancer des regrets à la figure. Peut-être qu'au final, je l'appréciais un peu.
Mais de toute façon, il est trop tard. Il est mort.
Je regarde une dernière fois la tombe et fais demi-tour. Je retraverse tout le cimetière, laissant mon regard divaguer sur les dizaines de tombes lustrées et garnies. Alors, c'est ça que l'on gagne à être du ''bon côté'' ? Je préfère encore garder mes principes et mes croyances. À quoi bon être bien logé lorsqu'on ne peut plus en profiter ? Trop de superflu pour des personnes qui n'en mérite pas un dixième...
Arrivé au portail, je vois un homme entrer à son tour. Relevant le col de ma cape et enfonçant mon chapeau sur mes cheveux platines, j'enfonce ma tête entre mes épaules. Je sais, c'est plus qu'inhabituel de ma part. Mais je ne veux pas que quelqu'un me voit sortir de ce cimetière. Ils penseront que je suis attristé par la mort de Crabbe. Ou peut importe.
Plus je me rapproche de lui, plus l'homme me semble familier. Sûrement un ancien de Poudlard. Il a les cheveux courts et bruns et sa carrure est imposante. Une cicatrice de brûlure se dessine sur la partie gauche de son visage.
Goyle.
Alors il vient. Je m'étais trompé, Crabbe avait au moins un ami. Je me redresse, et le toise avec le dédain si caractéristique des Malefoy. Il me dévisage. Il m'a reconnu bien évidemment.
Goyle ralentit son allure et ouvre à plusieurs reprises sa bouche. Puis, ne semblant pas trouver les mots adéquates à cette situation, il se contente de me saluer de la tête et continue son chemin, sans s'arrêter à mon niveau.
Me pense-t-il responsable de la mort de son ami ? Sûrement. Dans ce cas, ma présence ici doit lui sembler déplacée.
Je n'ai rien contre ce type. Comme Crabbe, il a toujours suivi ce qu'on lui ordonnait. Moi y compris. Mais malgré ça, je trouve dommage d'avoir rompu nos liens. Si je me souviens bien, son père est lui aussi enfermé à Azkaban et il en a réchappé de justesse. Sûrement les médicomages qui l'ont présenté comme non responsable de ses actes. La débilité est un fléau qui terrasse de nombreux esprits. On n'y peut rien.
Je me retourne, le suivant du regard tandis qu'il se dirige vers l'endroit où je me trouvais il y a quelques minutes. Au fond, je sens comme une pointe de déception. C'est tout ? Ça s'arrête là ? Impossible.
C'est alors que je sors cette phrase idiote. Cette phrase qui montre que ces deux gorilles avaient tout de même une minuscule place dans mon cœur. Cette phrase qui montre que même à Serpentard, on a le sens de la loyauté. Ne serait-ce qu'un petit peu. Car, même si je l'ai mené en bateau pendant sept longues années, il est toujours resté à mes côtés. Et je m'en sens redevable.
Oui, je prononce d'une voix claire et forte la phrase qui changera notre avenir :
-Ça te dis d'aller boire un verre après ça ?
Goyle s'arrête et se retourne lentement pour me faire face. Il a un temps d'hésitation, puis m'adresse un sourire maladroit, ce qui fait friper son visage et sa large cicatrice.
Je déteste me l'avouer mais, j'en ai perdu un, je ne perdrais pas l'autre.
Note d'auteur :
Voilà donc une fic qui regroupe plusieurs OS. Chaque OS sera donc dédié à un personnage mort lors de la bataille de poudlard.
J'espère que ça vous plaira! Et si c'est le cas, vous savez ce qu'il vous reste à faire ;)
Note de fin de chapitre :
Voilà le premier chapitre !!
Et vous savez quoi? J'aime cette phrase : La débilité est un fléau qui terrasse de nombreux esprits. !!
C'est en me relisant que j'ai remarqué que j'avais écris ça!! En fait, je dois être sous LSD quand j'écris ou sous n'importe qu'elle autre drogue illicite. Mais je vais m'arrêter là, de peur de me faire repérer ;)
Voilà! Le prochain chapitre s’intitulera : Severus Rogue.
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