Voici un nouvel OS répondant aux prompts de LITS et Ao, sur le thème "Attente".
Un grand merci à Saam et Labige pour leurs conseils avisés !
Bonne lecture à tous !
Une femme est assise en face de moi dans la salle d'interrogatoire. Je me lève, frissonnant à cause de la fraîcheur de la pièce et me mets à faire les cent pas derrière mon bureau. Comme toujours lorsque je m'apprête à questionner quelqu'un, j'applique les conseils de Fol'Oeil. Faire patienter la personne, compter mentalement mes foulées, relever la tête pour toiser froidement son air gêné, retourner à la contemplation de mes chaussures, soupirer, ouvrir la bouche et puis la refermer.
La tension monte d'un cran avec le silence étouffant, le souffle de la quinquagénaire qui m'observe se fait plus fort. Je plisse les yeux en fixant les papiers sur le bureau pour donner l'impression que je réfléchis une dernière fois avant de me lancer :
« Vous savez pourquoi le bureau des Aurors vous a convoquée ? »
Elle fait non de la tête, visiblement intimidée. Je retiens un sourire satisfait. Surtout ne rien laisser paraître.
« Votre frère a été trouvé en possession d'un livre volé avant-hier, il dit que celui-ci vous appartient. »
Haussement de sourcils. Elle croit qu'elle peut feindre la surprise. Ils font tous ça quand ils se retrouvent face à un Auror suspicieux.
« C'est un livre sur une forme de magie très noire, il est rare et normalement protégé.
- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler, me répond-t-elle d'un ton serein.
- Croyez-moi, si ce n'était qu'une simple affaire de livre volé, nous n'aurions pas pris ce dossier en charge. Mais les faits sont plus graves : plus que le vol, la possession non-autorisée de livres de magie noire est un délit.
- J'en ai conscience, mais je n'ai jamais possédé un tel ouvrage.
- Bien, je termine un peu brusquement, je vais tout de même vous montrer ce livre. »
Et je sors. Je respire un grand coup une fois la portée refermée, je crois que je n'ai jamais trop aimé pratiquer les interrogatoires. Mais ce soir, je suis de service alors je m'engouffre dans la réserve. Tandis que je tripote machinalement divers objets, mes pensées défilent.
Les souvenirs brûlants de la nuit dernière m'envahissent. J'ai chaud. Et pourquoi suis-je dans cette pièce ? Je commence à trouver le temps long. Pourtant, je dois rester encore plusieurs heures ici, avant de rentrer chez moi. De retrouver Remus.
« Tonks ? »
Je sursaute avant de reconnaître la grande silhouette de Kingsley un peu plus loin, dans l'encadrement de la porte. Il me demande ce que je fais ici, assise dans le noir. Je balbutie que je cherchais une pièce à conviction et je l'attrape avant de quitter la pièce.
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A la fin de ma garde, je quitte le bureau des Aurors d'une démarche pressée. La soirée a été longue. Une fois dans l'aire de transplanage du Ministère, quelques secondes suffisent pour me retrouver rapidement devant l'entrée de mon immeuble.
Fébrile, je tente de garder mon calme tout en sortant mes clefs de mon sac. Je me sens comme quand j'avais quinze ans, comme si je découvrais les joies du premier baiser.
J'ouvre la porte le plus doucement possible, contrôlant mon envie d'annoncer mon arrivée à tue-tête. Je me contiens, de l'entrée jusqu'au salon, après m'être débarrassée de mes affaires, retenant presque mon souffle. Mais il n'est pas là, il doit être dans la chambre. J'étouffe un petit rire, à la fois impatiente et frivole. Je me précipite dans la pièce. Personne.
Sensation de vide. Je me mets à inspecter l'appartement . Au bout de quelques minutes, je me rends à l'évidence : Remus n'est pas là.
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Dimanche matin. Réunion de l'Ordre. Il fait terriblement froid dans la cuisine du square Grimmaurd, ou peut-être est-ce parce que je n'ai pas mangé la veille. Ou alors la solitude de ma nuit. Dumbledore arrive et chacun s'assied. Regard circulaire. L'absence de Remus n'inquiète personne. Au contraire, tout le monde est déjà en train d'écouter Fol'Oeil qui donne les instructions de la semaine. Je contiens sans mal une certaine colère et, quand la fin de la réunion arrive, je me dépêche d'intercepter Dumbledore avant qu'il ne parte.
« Où est Remus ? je lui lance sans vraiment réussir à cacher l'inquiétude qui se mêle à mon impatience.
- Je suis surpris, Nymphadora, commence-t-il en ignorant mon regard noir. J'aurais cru qu'il t'en parlerait.
- Où est-il ?
- S'il ne s'est pas chargé de te le dire, ce n'est pas à moi de le faire.
- Mais... »
Ecartant mes protestations d'un geste de la main, il se dirige vers la sortie de la maison. Je retourne dans la cuisine, froide et sombre.
« Personne d'autre que Dumbledore n'a l'air d'être au courant, m'avertit Molly tout en débarrassant la table. Mais généralement, quand l'un d'entre nous part en mission, lui seul le sait. »
En mission. Remus ne serait pas parti en mission pour l'Ordre sans m'en faire part.