Même si je devais me réjouir pour cette soit disant bonne nouvelle, après tous mes efforts, l’idée d’avoir une petite sœur ne m’enchantait pas plus que ça. J’en avais peur. Car j’avais toujours été la plus petite, celle à qui on pardonnerait tout, celle qui cherchait à attirer l’attention sur elle. Mais j’avais toujours cherché à paraître plus grande, car j’étais la plus jeune. Seulement, ce jour-là, je ne voulais rien de tout ça. Car après noël, tout ce que je voulais, c’était de repartir chez ma mère. Oui, car mes parents étaient divorcés… Alors je repris mon souffle, en regardant par la fenêtre, puis, je passai une de mes mèches derrière mon oreille. Il neigeait beaucoup ce 27 décembre.
Mon père me demanda si les cadeaux que j’avais reçus me plaisaient. J’hochai machinalement la tête, accompagné d’un beau sourire, pour lui exprimer mon épanouissement. Je me mis sur la pointe des pieds pour attraper un chocolat qui se trouvait là. J’observai quelques instants le sapin joliment décoré en pensant qu’il fallait vraiment décrocher cette étoile. Mon père refit surface avec une toute autre expression sur son visage. Il me tendit ma grosse doudoune ainsi que mes bottes de neige. Il prit la parole d’un air quelque peu inquiet :
« Clara, commença-t-il en un souffle, dépêche-toi, elle va accoucher. »
Puis je compris « qu’elle » avait gagné. Oui, ma belle-mère, je la détestais. Car elle allait offrir une chose de plus à mon père. Autrement dit, une raison de plus pour qu’ils restent ensemble. J’enfilai ce que mon père m’avait passé, je traversai ensuite notre coure recouverte de neige. Papa avait déjà mis le moteur en route. Je m’installai à l’arrière en fixant ma belle-mère qui me semblait vraiment bizarre. Elle ne respirait pas comme d’habitude.
Nous n’habitions pas très loin de l’Hôpital. Rapidement, nous arrivions à destination. Tout ce passa assez vite après notre arrivé. Papa me prit à part en me disant qu’il fallait que je reste dans la salle d’attente jusqu’à ce qu’il revienne me chercher. Je ne pus retenir ma question plus longtemps :
« Elle va s’appeler comment ? Demandais-je d’une voix apaisé
_Prudence, t’aimes bien ?
_Oui. »
Je m’installai alors sur l’une des chaises qui se trouvait devant moi. Je finis par m’endormir. Bien sûre, à sept ans, on s’endort facilement, et n’importe où. Même sur une chaise.
On me secoua, en chuchotant mon prénom, comme si personne ne devait l’entendre. Je reconnue la voix de mon père. Je me levai, droite, tel un piquet. Papa me prit par la main en m’emmenant devant une salle. Il me dit d’entrer, mais de ne pas faire trop de bruit. Puis je la vue. Ce ne fut pas merveilleux comme moment, c’était magique. C’était fou. Prudence se trouvait dans les bras de la personne que je haïssais le plus, pourtant, je la voyais déjà rayonner. Je fis un pas, puis un autre, jusqu’à la voire sous mon nez. Ma belle-mère me la tendit, comme si elle voyait des étoiles pétiller dans mes yeux. Je l’avais dans mes bras. Puis je sentie qu’elle dégageait quelque chose de tellement spéciale. Je lui fis mon plus beau sourire, en la regardant dormir. Comment pouvait-elle être aussi belle, en ayant un monstre pour mère ? Soudain, elle ouvrit ces yeux. Je m’entendis à ce qu’elle pleure, seulement rien. Elle me regarda aussi dans les yeux. Je la redonnai à sa mère qui devait tendre ses bras depuis une heure. Lorsque Prudence revint dans les bras de sa mère, elle pleura. Cela me fit étrangement sourire. Je sortie de la salle le sourire aux lèvres. Je le savais au plus profond de moi-même. Il fallait être à la hauteur de ce petit ange. De Prudence, ma sœur.