Chaumière aux Coquillages,
25 décembre 2024.
Cher Léo (tu préfères prince charmant ?),
Joyeux Noël ! La Chaumière sous la neige, c’est toujours aussi magnifique et je regrette vraiment que tu ne sois pas là pour le 25 décembre. Faudrait peut-être songer à ce que tu viennes habiter en Angleterre, non ?
Je plaisante (enfin... pas tant que ça) ! Tu me manques affreusement et je suis un peu mécontente de ne pas avoir pu réserver un Portoloin pour Brest cette année. Quoique ... TU aurais pu faire le voyage quand même. Mais c’est pardonné, parce que, non seulement tu m’as offert un super cadeau (cette robe a dû te coûter une fortune. Tu es fou !) mais aussi parce que celui que tu vas avoir est tout aussi génial et que je suis toute excitée à l’idée de te l’envoyer. Je te vois déjà rire devant mon assurance. Je parle sérieusement et ce n’est pas du tout exagéré, je t’assure ! Tu verras, en ouvrant ta deuxième enveloppe, que j’avais raison.
Ça faisait quelques jours qu’on ne s’était pas écrit et tu n’imagines pas le plaisir que j’ai eu en voyant une lettre de toi sous le sapin. J’ai eu une pointe de culpabilité en me disant que j’aurais dû t’envoyer tout ça hier soir plutôt que ce matin (oui, onze heures, c’est encore le matin !) mais je suis sûre que tu ne m’en voudras pas.
Ici, il fait très froid et il neige sans arrêt depuis trois semaines. Autant te dire que l’ambiance de Noël a eu le temps de bien s’installer ! J’adore ce jour, pas pour les cadeaux comme tu le penses mais pour la famille. C’est tellement agréable de les retrouver tous ensemble et de profiter d’être avec eux. Ma grand-mère Molly aimerait te voir plus souvent, si tu savais tous les éloges qu’elle me fait quand elle parle de toi ! Même ma mère s’y met et tu sais qu’avec elle, ce n’est jamais gagné d’avance. Tu te fais une place dans la famille et ça me fait bien plus que plaisir.
Voir les plus jeunes de mes cousins ouvrir leurs cadeaux comme s’ils avaient cinq ans m’a totalement attendrie, tu sais ? Je ne te fais pas pression, ne t’inquiète pas, va ! Vingt-deux ans, c’est encore un peu jeune, tu ne crois pas ? Bon j’avoue, c’est un prétexte pour te parler d’autre chose (mais mes cousins et mon frère sont encore des gamins, ça c’est vrai par contre !). Plus sérieusement, il faudrait qu’on songe à choisir un endroit où vivre tous les deux, que ça soit en France ou ici n’a plus d’importance. La distance, c’est quand même difficile autant pour moi que pour toi et ça me déchire le cœur de ne te parler que par lettres la moitié de l’année. C’est Noël et même si je suis contente d’avoir vu ma famille, elle n’était pas au complet sans toi.
Et puisqu’on parle d’avenir, Victoire a fait une annonce hier soir. Je n’en reviens toujours pas mais elle va se marier ! Ça fait un sacré choc tout de même et en même temps, ça me rend heureuse. Ma grande sœur va se marier. Je vais l’écrire encore fois comme ça, ça rentrera autant dans ma tête que dans la tienne. Ma sœur va se MARIER. J’angoisse pour elle. Tu crois que je suis folle ? Vas y, dis- le. Promis, je te taperai sur la tête quand je viendrai te voir (et non, je n’ai pas oublié un mot, je te taperai vraiment sur la tête).
Au fait, tu es invité bien sûr. Teddy m’a donnée une carte d’invitation pour toi qui est dans la deuxième enveloppe. Rassure-toi, ce n’est pas ça ton cadeau ! Tu te dois de venir ici en juillet sinon je peux t’assurer que tu vas droit vers une mort lente et douloureuse... Non, vraiment, je n’aimerais pas que tu rates ce moment et puis je pense que tu ne seras pas contre de me voir ce jour-là mais aussi tout le reste des vacances d’été. Tu penses que tu pourras me supporter ?
Je fais des projets sur la comète, ce n’est pas dans mon genre pourtant. C’est peut-être le mariage de ma sœur qui me monte à la tête. Bref, passons, j’ai d’autres nouvelles à t’annoncer (ne lève pas les yeux au ciel, une fille parle beaucoup. C’est tout à fait naturel).
On vient de me proposer une mutation pour Oxford chez un biomage spécialisé dans les plantes médicinales. C’est une super nouvelle ! Mais je t’avoue que j’hésite grandement et j’ai besoin de ton avis. Mes parents m’y encouragent bien évidemment. Me voir quitter le nid familial et devenir réellement indépendante serait une grande joie mais j’ai quand même des appréhensions.
J’ai des économies et je pense que je pourrais trouver facilement un logement là-bas donc d’un point de vue purement pratique, je n’ai pas vraiment de soucis à me faire. J’ai peur de faire un mauvais choix parce que je me plais bien sur le Chemin de Traverse et tu sais que le changement m’angoisse. Tu penses que je serais capable d’occuper un poste beaucoup plus important que celui que j’exerce à l’heure actuelle ?
Ca m’agace de te parler de sujets aussi importants par le biais d’une lettre. J’aimerais t’en parler de vive voix mais monsieur n’a pas de cheminée chez lui ! J’arrive encore à plaisanter alors que j’aimerais te retrouver et discuter avec toi. Je sais déjà ce que tu me répondrais : « mieux vaut en rire qu’en pleurer n’est-ce pas ? ». Je dois avouer que tu as raison (pour une fois) donc laisse-moi rire de mon malheur en paix.
C’est un rideau de neige qui tombe à présent, ça m’impressionnera toujours. Tu es sûr que tu ne veux pas me faire une petite surprise et arriver en bonhomme de neige chez moi ? Ou en père Noël, je ne ferai pas de chichi, c’est promis ! D’ailleurs, remercie tes parents de m’avoir invitée chez eux pour le jour de l’an, ça me ferait très plaisir de les voir et de passer cette dernière fête ensemble. Mais si possible, je ne serai pas contre un tête-à-tête avec toi avant.
J’écris déjà depuis deux pages et tu dois t’ennuyer maintenant à force de me lire... Ouvre ton cadeau et ensuite continue la lecture de ma lettre. Mais ouvre ton cadeau en premier, sinon ça ne marche pas !
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Tu n’as pas triché ? Bon, supposons que tu n’aies pas triché.
J’espère que ce voyage en Suède te fait plaisir ! Je sais que tu voulais absolument y aller et quand j’ai vu cette annonce dans une vitrine du Chemin de Traverse, je me suis précipitée pour t’offrir ce voyage. Ça ne te dérange pas si je viens avec toi ? Il y a deux billets mais si tu préfères y aller avec ta mère... C’est ton choix, je ne le contredirai pas, bien sûr. Hum. Ce n’est pas grand chose mais j’espère que tu es content, je vais pouvoir t’embêter pendant deux semaines entières. Si c’est pas beau ça ! Et ne te fais pas de soucis, tout est déjà réglé comme du papier à musique, tout est déjà prêt, on a plus qu’à y mettre les pieds. Je sais, je suis une petite amie géniale n’est-ce pas ? Hahaha, pour une fois que je suis fière de moi, profites-en !
C’est bientôt la fin de ma lettre mais je t’avoue que je n’ai pas envie de la terminer. J’ai l’impression de te parler et mettre un point et ma signature sur cette lettre, c’est comme si on se disait au revoir. Mais je vais essayer de ne pas fondre en larmes, c’est Noël, je vais faire un effort. Allez, je te le dis une dernière fois avant de terminer. Tu me manques. Beaucoup.
Encore un très joyeux Noël,
Je t’aime.
Dominique.