Dans la mythologie coréenne, on entend souvent parler du Bonghwang. On dit qu’il possède le chef d’un faisan doré, le corps d’un canard mandarin, la queue d’un paon, les pattes d’une grue, le bec d’un perroquet et les ailes d’une hirondelle. Son corps symbolise les six corps célestes. La tête est le ciel, les yeux sont le soleil, le dos est la lune, les ailes sont le vent, les pieds sont la terre, et la queue représente les planètes. Ses plumes contiennent les cinq couleurs fondamentales : le noir, le blanc, le rouge, le bleu et le jaune.
Le Bonghwang a des connotations très positives. Il est le symbole de l’union du yin et du yang, chaque partie de son corps ayant sa spécificité. La tête incarne la vertu, les ailes le devoir, la queue la propriété, l’abdomen la croyance et la poitrine la miséricorde. Pour les Moldus, Bonghwang reste une légende, le roi des oiseaux, le maître des cieux. Mais pour les sorciers coréens, sa présence indique toute autre chose. Vous comprendrez en lisant ce qu’il suit.
Kim Min Jeong entamait la deuxième semaine de ses dix ans. Elle avait été gâtée pour son anniversaire, quoi de plus normale pour la fille unique du bras droit du Président de l’Alliance Magique de Corée et de l’une des chercheuses les plus brillantes du pays ? Elle avait reçu un Hanbok aux couleurs du soleil et tissé dans la plus fine des soies. Elle avait aussi eu un florilège de pinceaux et d’encres les plus pures qu’il soit pour exercer son talent d’artiste. C’était quelque chose de merveilleux, que ses peintures. Semblant parfois presque se mouvoir, elles faisaient la fierté de ses parents. Oui, Min Jeong avait été gâtée le jour de ses dix ans, mais tous ces présents, elle les aurait volontiers rendus contre la présence d’au moins un membre de sa famille. Lorsqu’elle s’était levée le matin, la maison était vide. Sur la table de la salle où elle prenait son repas, une note avait été laissée ainsi qu’une pile de cadeaux haute comme son ami Gong Yoo. Ils reviendraient le soir, souhaitant tout de même à leur fille le plus merveilleux des anniversaires. Les parents de Min Jeong n’avaient pas compris que l’amour d’un enfant ne s’achetait pas. Tout ce dont elle avait besoin, c’était de se sentir protégée et aimée. Heureusement, il y avait la vieille Kim qui veillait sur elle chaque jour de l'année.
Ce premier mars là, les cerisiers avaient déjà fleuri. Chaque année, une centaine d’enfants montaient au mont Toham pour visiter la grotte de Seokguram et la fillette de dix ans s’y rendit comme voulait la coutume avec sa classe. Son professeur, Madame Wang, leur avait expliqué les règles à respecter en insistant sur celles à ne surtout pas enfreindre. Tenant fermement la main de son camarade Gong Yoo, Min Jeong portait avec fierté son marcel rayé rouge et blanc que le petit garçon avait payé de sa poche. Elle adorait ce cadeau, même si elle savait pertinemment que ses parents refuseraient qu’elle le porte à leurs côtés. Tous les élèves de sa classe portaient le même blazer bleu marine dont l’écusson affichait un faucon aux griffes acérées et leur professeur tenait dans sa main un petit drapeau jaune pour qu’aucun de ses élèves ne la perde. Dans la foule de gamins qui s’amassaient ce jour-là, il était facile pour un élève de disparaître.
Alors qu'elle contemplait le soleil qui se reflétait sur les parois humides de la grotte, la petite fille sursauta. Au-dessus de sa tête, passa une ombre large et menaçante, invisible à celui qui n'y ferait pas attention. Min Jeong leva vivement la tête mais ne vit que le ciel d’un bleu très clair.
- Tu as vu ? demanda-t-elle à Gong Yoo en lui donnant un coup de coude. T’as vu ? T’as vu ?
Le petit garçon lui lança un regard agacé et se détacha d’elle. Il frotta ses côtes que sa brute d’amie avait frappées sans retenue.
- Non, j’ai rien vu ! Alors arrête ! geignit-il.
- Et toi, arrête de faire ton bébé, soupira la petite fille en levant les yeux au ciel. Allez viens ! On va voir ce que c’est !
- Ah non ! Moi je reste là. Si Madame Wang s’aperçoit qu’on est partis, on va se faire punir…
Min Jeong croisa les bras sur son torse et lui lança un regard sceptique.
- T’es vraiment un froussard, Gong Yoo… Bon bah, j’y vais toute seule, alors !
Elle allait partir discrètement mais son ami la retint par le col de son blazer.
- Laisse-le-moi, se justifia-t-il face au regard sévère de Min Jeong. Comme ça, si quelqu’un te voit, il ne pourra pas savoir de quelle école tu es.
Louant son intelligence, la fillette se débarrassa de sa veste et frissonna un instant. Puis, vérifiant que l'attention de son professeur se portait encore sur la grande statue de lion qui se trouvait devant l'entrée de la grotte, elle quitta sa classe. Elle courut de toutes ses forces pour disparaître à l'orée de la petite forêt qui recouvrait le mont Toham. Une fois à l’abri de regards indiscrets, elle s'accorda un instant pour s'émerveiller de la musique des feuilles, secouées par le vent, et des dessins lumineux sur la mousse tendre du sol. Sous les arbres, tout était calme. Pourtant, un feulement sauvage retentissait plus loin, derrière elle. Sans prendre le temps d’avoir peur, elle se rua jusqu’à la source de ce bruit, avide de savoir. Elle devait étancher sa curiosité.
Au bout de quelques minutes à s’enfoncer plus profondément encore dans la forêt, elle s’arrêta à nouveau, des battements d’ailes lui parvinrent sur sa droite. Elle parcourut encore quelques mètres avant de le voir. C'était un animal étrange et envoûtant à la fois et Min Jeong fut comme ensorcelée par la lumière qui filtrait à travers ses plumes et son bec, son long et puissant bec qui semblait pouvoir l'avaler d'un coup. Elle n'avait pas peur, elle n'avait même pas envie de se méfier de lui. Alors, doucement, elle avança un peu plus et le dévora du regard. Oui, cet animal était tout sauf normal. Il volait comme un oiseau mais n’en était pourtant pas un. Il était immense et les différentes parties de son corps ne s’accordaient pas. L’animal feula à nouveau et Min Jeong recula d’un pas par réflexe. C’est vrai qu’il était très imposant, perché sur la branche d’un cerisier en fleur. Mais le plus dérangeant n'était pas son aspect si étrange non, le plus dérangeant était que le grand animal la fixait. Il ne semblait pas vouloir détacher son regard d'elle, suivant chacun de ses mouvements avec une attention peu commune chez les animaux.
- Qui es-tu ? demanda-t-elle de sa voix d’enfant.
Un silence suivit cette déclaration. L’animal descendit de sa branche et heurta le sol dans un bruit sourd. Lentement, il s’approcha de la petite fille, la surpassant d’un bon demi-mètre en hauteur. Il secoua ses ailes, ébouriffant les cheveux de Min Jeong qui rit en sentant le vent contre son visage. Elle ne bougea cependant pas, trop intimidée par la bête qui lui faisait face. Ce qui ressemblait à un immense oiseau baissa le coup et donna un coup de bec dans l’épaule de la petite fille. Min Jeong leva alors la main et prit un bâton qu’il lui tendait tout en caressant son cou de l'autre main, hypnotisée par la beauté irréelle de l’animal.
Puis, d’un coup, il donna une impulsion contre le sol et s’envola. Min Jeong le regarda partir, abasourdie. L’échange n’avait duré que quelques secondes, deux minutes tout au plus et pourtant, elle savait qu’elle s’en rappellerait toute sa vie. Elle regarda la branche de cerisier qu’elle tenait dans sa main. Une fleur y était encore accrochée.
- Tu ne dois laisser personne la toucher, fit alors une voix dans son dos.
Min Jeong sursauta et se tourna pour faire face à un moine. Il était plutôt mince et jeune, peint sur le modèle de tous les hommes de foi du temple qui se trouvait à côté de la grotte de Seokguram.
- Vous le voyez aussi ? demanda-t-elle, serrant la branche dans ses mains.
Le moine lui adressa un sourire protecteur et s’approcha. Arrivé face à elle, il s’accroupit et remit les cheveux de l’écolière en place.
- Oui, je le vois. Tu sais ce que c’est ?
Min Jeong fit non de la tête.
- On l’appelle Bonghwang. C’est un grand oiseau que seuls les sorciers peuvent voir. Tous les ans, lorsque les écoliers viennent visiter la grotte de Seokguram, il apparait aux enfants qui ont des pouvoirs. Ces enfants sont alors envoyés dans une école pour apprendre la magie.
- C’est une plaisanterie ? s’enquit Min Jeong incrédule. Les sorciers, ça n’existe pas…
- Et cet oiseau que tu as vu, juste à l’instant ? Tu y crois ?
L’homme semblait anticiper les réactions de la fillette comme s’il avait fait ça à de très nombreuses reprises. A nouveau Min Jeong hocha la tête silencieusement.
- Ne t’inquiète pas, continua l’homme, ton père et ta mère recevront une lettre. De toute façon, tes parents sont tous deux des sorciers, ça sera plus simple.
- Mes parents ?
- Oui, sourit l’homme sereinement.
- Mais pourquoi ils ne m’ont jamais rien dit alors ?
- En Corée, expliqua-t-il, il y a un Pacte de Confidentialité Magique qui fait qu’aucun sorcier ne peut parler de magie à quelqu’un qui n’est pas touché par la communauté. Même leurs enfants car, tant que nous ne sommes pas surs qu’ils soient des sorciers, cela contredirait le Pacte.
Min Jeong sourit à l’homme, mais ne comprenait pas un traître mot de ce qu’il racontait. Le moine eut l’air de le comprendre car il rit un instant avant de l’ébouriffer affectueusement.
- Tes parents t’expliqueront mieux que moi. Je n’ai pas trop le temps de rester. Sache juste que la branche que Bonghwang t’a donnée, ne dois être touchée par personne d’autre que toi jusqu’à ce que tu l'apportes au fabriquant. Tes parents t’y emmèneront. C’est un très vieux sorcier qui transforme les bâtons que le Bonghwang donne aux enfants en baguettes de sorcier.
- Personne ne doit la toucher à par moi ?
- C’est ça. Maintenant, je dois y aller. Il y a d’autres enfants qui m’attendent.
Il la salua, se courbant avec respect devant la petite sorcière puis partit. Mais avant qu’il ne disparaisse totalement derrière les arbres, Min Jeong lui cria :
- Vous êtes un sorcier, vous ?
L’homme sourit et sortit une baguette de sa manche. Sans se retourner, il l’agita en l’air avant de la ranger et partir. Min Jeong se demanda si tout cela n’était qu’une farce jusqu’à ce que l’air s’électrise. Il y avait quelque chose de changé autour d’elle. Tournant, elle s’aperçut qu’un étrange phénomène se passait. L’eau de la récente brume qui s’était fixée à la végétation s’élevait dans les airs. C’était magique. Dans chaque goutte d’eau en suspension, Min Jeong pouvait voir le soleil filtrer. La forêt semblait briller.
Lorsqu’elle rejoignit sa classe, Min Jeong se glissa jusqu’à son ami Gong Yoo discrètement. Il l’interrogea du regard mais elle lui fit comprendre qu’elle ne dirait pas un mot sans avoir enfilé son blason avant. Revêtue de son habit d’écolière, Min Jeong souffla. Elle ne risquait plus de se faire prendre.
- Alors, ton oiseaux imaginaire ? se moqua Gong Yoo. Tu l’as trouvé ?
- Oui ! affirma fièrement Min Jeong. Et il m’a donné ça !
Elle montra fièrement la branche que Bonghwang lui avait donnée. Son copain la regarda un instant avant d’exploser de rire.
- Tu racontes n’importe quoi… Un bout de bois ? C’est même pas une preuve ! Je suis sûr que tu es allée le cueillir toi-même !
- Tu te trompes, se récria la petite fille. C’est une baguette de sorcier !
Le garçon voulut s’emparer de la branche mais Min Jeong fit un pas en arrière pour lui échapper. Elle ne voulait pas qu’il touche sa future baguette. Toute cette agitation attira l'attention de leur professeur qui les rappela à l’ordre et les deux amis se turent, honteux de s’être faits remarquer.
Mais au fond, Min Jeong s’en fichait. Elle était une sorcière, quelqu’un d’à part, elle était comme ses parents. Enfin, elle allait avoir leur attention. Peut-être qu’ils l’aimeraient plus ? Elle l’espérait en tout cas. Quoiqu’il adviendrait, ce dont Min Jeong était sure, c’était que sa vie allait radicalement changer.
Note d'auteur :
Fic pour Zazou, j'espère que ça te plaira poulette... :) Et désolée du retard ! Hm... Oui oui, je vous jure que ça reste dans l'univers d'Harry Potter U__U Et, si vous aimez Min Jeong, vous pouvez aller lire Indignés, Aveugles & Meurtriers :) Bonne lecture !
Note de fin de chapitre :
Merci d'avoir lu ! N'hésitez pas à reviewer ;)
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