Ses yeux s’ouvrirent lentement, laissant passer le soleil filtrant à travers les volets. Il lui fallut quelques minutes pour immerger de son rêve fabuleux. Elle y retrouvait son amour et s’installait avec lui dans une jolie maison sur une colline éloignée de toute urbanisation. Elle revoyait leurs enfants courir sur cette colline, sauter dans le lac et nager en compagnie des poissons multicolores. C’est la vie qu’ils avaient choisis de se construire alors qu’ils n’étaient qu’adolescents, lorsqu’ils se baladaient dans les couloirs de Poudlard à la nuit tombée. Mais cette époque était révolue. Aujourd’hui ces projets étaient derrière eux, et elle ne pouvait plus que les rêver.
Après un long soupir elle se leva et se dirigea vers la cuisine où elle commença à préparer le repas de ses enfants tout en chantonnant. Après avoir rempli les sandwichs de jambon et de beurre, elle les enveloppa dans du papier et les rangea dans des sacs séparés. Elle trouvait cette situation presque hilarante. Elle qui autrefois avait combattu Voldemort aidé de ses amis et de son futur mari, se retrouvait aujourd’hui à faire des sandwichs à ses enfants sans l’aide de la magie. Cette décision de ne plus pratiquer la magie remontait à cinq ans. Elle ne voulait plus vivre au quotidien avec ce qui avait tué son mari. Sa quête en tant qu’auror avait fini par lui coûter la vie, laissant une femme et trois enfants derrière lui. En repensant à cette magnifique période, ses yeux se remplir de larmes. Elle s’essuya prestement les yeux, ne voulant pas effrayer ses enfants.
Quelques minutes plus tard ceux-ci daignaient finalement descendre de leur chambre. Après avoir attrapé leurs déjeuners ils coururent s’installer dans le bus qui les amenait à l’école. Ils firent un rapide signe de la main à leur mère qui leur souhaita une bonne journée et une bonne sortie au zoo. Elle aurait voulu accompagner la classe de ses enfants à cette sortie au zoo, mais son projet l’en empêchait. Une tristesse sans nom l’envahie. Elle avait manqué tous les évènements importants de la vie de ses enfants : leur première rentrée des classes, leurs premiers spectacles, leurs premiers émois amoureux. Depuis la mort de leur père, ils n’avaient plus qu’elle, mais elle savait qu’elle ne leur offrait pas tout l’amour dont ils avaient besoin. La peur l’envahissait lorsqu’elle regardait ses enfants dans les yeux, elle y voyait son mari et ne supportait pas cette image, même après cinq ans d’absence. Ses enfants ne comprenaient pas cette réaction et s’étaient éloignés de leur mère peu à peu. Aujourd’hui elle était décidée à changer, et ce changement passait d’abord par un retour à la magie. Cette envie de pratiquer à nouveau la magie l’avait envahie quelques jours plus tôt, alors que son fils de cinq ans était tombé dans les escaliers, se fracturant le crâne. Elle s’en était voulu de n’avoir pu l’aider rapidement, et elle avait dû l’emmener à l’hôpital où il avait été opéré. Cette perte de temps l’avait révoltée, et aujourd’hui elle était prête à retourner aux sources.
Après avoir avalé rapidement un café, elle prit sa voiture et se dirigea vers le Nord-Est de Londres. Là-bas elle trouva rapidement une place pour se garer, puis se dirigea vers la gare de King’s Cross. Toute son enfance lui remonta en mémoire. Cela faisait plus de dix ans qu’elle n’avait pas mis les pieds dans cette gare, mais son souvenir la porta jusque sur le quai entre les voies 9 et 10. Elle se demandait si elle avait encore la possibilité d’accéder à la voie 9 ¾, après avoir renié la magie durant toutes ces années. Elle ne préféra pas prendre de risque et reprit sa voiture pour se diriger cette fois vers le centre de Londres. Elle se gara devant un petit bar passant inaperçu dans la rue de Charing Cross Road. Elle entra, tremblant de tout son corps. Elle se dirigea vers l’arrière du bar, dans une petite cour donnant sur un mur en pierre qui ne présentait rien d’anormal, sans faire attention au patron du chaudron baveur qui lui demandait ce qu’elle désirait boire.
Lentement, elle sorti alors une baguette de son sac, cette baguette qui l’avait suivie de longues années avant qu’elle ne décide de la ranger dans une boîte de la cave avec toutes ses affaires de sorciers. Jamais elle n’avait voulu jeter cette boîte, mais jamais elle ne l’avait ouverte depuis dix ans, du moins pas avant le matin même.
Après avoir tapoté quelques coups de sa baguette sur le mur, celui-ci s’ouvrit, laissant entrevoir le chemin de traverse. Elle s’avança, et une fois de plus son passé lui sauta à la gorge. Elle avait oublié ce monde parallèle, où tout était fait pour rêver. Elle reconnue chaque boutique comme si elle les avait quitté la veille. Elle prit plaisir à déambuler dans la rue, redécouvrant le monde des sorciers à chaque pas. Elle s’en voulu alors d’avoir privé ses enfants de ce monde. Après la mort de leur père, elle avait tout fait pour leur cacher ce qu’elle était, et ce qu’ils pouvaient devenir. Elle les avait élevés comme des mouldus, pensant leur éviter tous les soucis qu’elle avait pu avoir dans sa vie. Mais cet acte, qui lui paraissait évident il y a quelques années, ne l’était plus à ce moment même. Dévastée par le remord, elle s’assit sur un banc faisant face à l’ancienne boutique d’Ollivander et se prit la tête entre les mains pour pleurer. Elle entendit alors des voix au loin.
« Tu es sure ?
-Oui oui je t’assure que c’est elle ! »
Les voix se rapprochèrent, et elle consentie à lever la tête. Ce qu’elle vit l’empli de joie.
« Ron ? Hermione ? C’est bien vous ?
-Luna ! Mon dieu c’est bien toi. »
Les trois amis s’embrassèrent, heureux de se retrouver après tant d’années. Après les embrassades, Luna remarqua les enfants accompagnant le couple.
« Les enfants, je vous présente Luna Lovegood, on était à l’école ensemble quand nous étions plus jeunes ».
Les trois enfants saluèrent Luna avant de partir rapidement regarder la vitrine des balais. Ron et Hermione s’assirent à côté de Luna et la regardèrent, compatissants.
« Ca fait tellement longtemps…commença Hermione.
-Oui je sais j’aurais dû vous appeler je suis désolée.
-Non ne t’inquiète pas on comprend tout à fait. Nous ne t’avons pas appelé non plus de toute façon nous sommes aussi fautifs. Comment vont tes enfants ?
-Ils vont bien. Enfin je crois… »
Luna recommença à sangloter. Hermione s’approcha d’elle et lui posa la main sur l’épaule. Elle savait que Luna avait vécue de terribles épreuves et qu’elle avait besoin de soutien. Elle savait également qu’elle avait choisi de renier la magie depuis des années et se demandait ce qu’elle pouvait bien faire sur le chemin de traverse, mais préféra attendre avant de lui demander. Ron tenta également de la réconforter.
« Tu sais Luna, je ne prétends pas savoir ce que tu peux ressentir. Mais Harry était mon meilleur ami et ça m’a fait beaucoup de peine de le perdre aussi. Ce que je veux dire c’est qu’on a également ressenti énormément de tristesse à sa mort, et que si tu as besoin de soutien, tu sais que nous sommes là.
-C’est gentil. »
Pas une seule fois elle n’avait prononcé le nom d’Harry depuis sa mort. L’entendre de la bouche de quelqu’un d’autre ne faisait que l’achever. Mais elle se reprit rapidement et expliqua à Ron et à Hermione sa décision de reprendre la magie et de la faire découvrir à ses enfants. Ces derniers approuvèrent son choix et lui proposèrent leur aide, que Luna accepta volontiers.
La journée se passa tranquillement. Les trois amis se redécouvrir, partageant leurs souvenirs communs, tout en prenant soin de ne pas évoquer Harry. Le soir venu, Luna dû se résoudre à rentrer afin de retrouver ses enfants. Après de grandes embrassades, ils se promirent de se revoir souvent, et Luna fut invitée à diner le lendemain avec ses enfants, ce qu’elle accepta à grande joie.
Sur le chemin du retour, elle eut l’impression d’avoir vécue la journée la plus forte en émotion depuis la mort d’Harry. Elle pensait à la façon de parler à ses enfants de ce monde merveilleux, lorsqu’une voiture venue de nulle part la percuta de plein fouet du côté conducteur. Elle fit plusieurs tonneaux avant de se stabiliser. Luna fut transportée à l’hôpital et prise en charge directement. Mais tous les essais pour la ramener ne suffirent pas et son esprit quitta lentement son corps. Elle observa alors son corps de loin, allongée sur ce lit d’hôpital, et se dit qu’elle aurait préféré mourir en tant que sorcière.
Luna se releva d’un bond, faisant trembler le lit. Un bras sorti délicatement de la couverture et l’enlaça.
« Qu’est-ce qu’il se passe ma chérie ?
-Non non ce n’est rien rendors-toi. »
Harry ferma les yeux et se rendormi aussitôt. Luna, encore tremblante, se blotti contre lui, avec un vague souvenir d’avoir vécu un terrible cauchemar.