Luna ne savait pas quoi faire. Devait-elle suivre son cœur ou sa raison ? Elle n’en savait rien. Devant elle était posé une plume imbibée d’encre, laissant des traces sur un parchemin vierge. Elle ne parvenait pas à prendre la plume dans les mains. Elle ne parvenait pas à écrire. Pour la première fois depuis des années, elle avait peur. Peur des conséquences que cela pourrait engendrer. Elle n’avait jamais fait cela auparavant, ne sachant trop pourquoi. Mais aujourd’hui c’était important, elle devait se concentrer. Machinalement, elle joua avec les morceaux de légumes accrochés à son cou. Tout le monde le critiquait ce collier. Mais elle, elle savait les pouvoirs qu’il pouvait avoir. Après tout tant pis pour les autres, s’ils ne voulaient pas comprendre c’était leur problème. Ils n’étaient pas assez ouverts d’esprit.
L’inspiration ne venait pas. Alors elle laissa le parchemin s’imbiber de tâches d’encre et quitta la salle commune. Ses pas la conduire à l’extérieur du château. Elle se dirigea vers la lisière de la forêt interdite, alors que le soleil lui caressait le visage, tandis que ses pieds profitaient du contact chaud avec l’herbe verte. Elle savait qu’ils la trouvaient tous bizarre. Le fait qu’elle marche pieds nus en était la preuve irréfutable. Mais Luna aimait bien ce contact avec la nature. Pourquoi changerait-elle ses habitudes pour eux ?
Elle aperçut au loin ce qu’elle était venue chercher et s’en approcha. Toute une famille de Sombrals se tenait là, couchés à l’ombre des arbres. Ils ne s’enfuirent pas quand Luna s’en approcha. Lentement, elle retira la viande crue contenue dans son sac et leur jeta à bout de bras. Un bruit se fit entendre derrière elle, mais elle ne se retourna pas. Elle savait que c’était Harry. Il se rapprocha d’elle et s’inquiéta de ses pieds nus. Lui non plus ne semblait pas comprendre le rapport qu’avait Luna avec la nature. Elle le rassura. Elle n‘avait pas froid. Puis la conversation tourna autour d’Harry. Il se sentait seul. Personne ne semblait croire au retour de Voldemort, et par conséquent tout le monde mettait en doute sa parole. Luna le rassura une fois de plus : elle et son père le croyait. Et ils n’étaient surement pas les seuls, mais c’est ce que Voldemort voulait lui faire croire. Suite à ces paroles qui se voulaient réconfortantes, Harry sembla retrouver un minimum de confiance en lui.
Luna se détourna légèrement et continua à nourrir les Sombrals. Avant de partir, Harry déposa un baiser sur sa joue. Luna ne montra pas son désarroi et ne se retourna pas lorsqu’il s’éloigna. Elle était encore moins confiante que quelques heures auparavant. Elle doutait de plus en plus de ce qu’elle souhaitait faire. Pourquoi écrire une lettre à Harry lui racontant tout ce qu’elle ressentait ? Après tout, la situation actuelle lui plaisait, elle n’avait pas besoin de plus ! Pourtant, son cœur lui demandait plus. Elle avait besoin d’écrire cette lettre, enfin prouver au monde entier qu’elle avait des sentiments, qu’elle ne se fichait pas de tout !
Alors une idée lui vint en tête. Elle finit de donner à manger aux sombrals puis regagna lentement le château. A quoi bon courir ? Son parchemin et sa plume n’allaient pas partir de toute façon. Elle n’était pas pressée. En passant devant un buisson elle remarqua un petit oiseau tombé au sol qui ne semblait pas bouger. Elle prit le temps de s’accroupir à côté de lui et le prit dans les mains. Il ne respirait plus. Alors elle le porta au lac noir et le fit boire. Lentement le petit oiseau retrouva ses esprits puis s’envola. Luna le regarda longtemps, avant qu’il ne disparaisse à l’horizon. Un sourire sur les lèvres elle reprit le chemin du château en chantonnant. Mais après tout pourquoi rentrer maintenant ? Le soleil était haut dans le ciel, elle voulait profiter au maximum de cette belle journée. Elle se trouva alors un petit coin tranquille et s’assit dans l’herbe. Elle ouvrit son sac et en sorti un exemplaire du Chicanneur qu’elle lut jusqu’à ce que le soleil disparaisse à l’horizon, rejoignant le petit oiseau partit quelques heures plus tôt.
Au diner, elle s’assit seule à une table. Elle préférait faire ainsi. Comme ça, personne n’était obligé de lui parler et ça lui convenant parfaitement. Elle prit le temps de déguster chaque met qui était servi. La plupart des élèves mangeaient rapidement. Elle n’en voyait pas l’utilité. Ils n’avaient rien de particulier à faire après et ne profitaient pas du bon repas. Encore une fois, Luna se sentit heureuse de pouvoir profiter du repas seule, avec personne pour la critiquer.
Après plusieurs heures elle se dirigea finalement vers sa salle commune et monta directement se coucher. Elle aimait bien se coucher tôt, ainsi ses rêves venaient la chercher plus rapidement, et elle pouvait s’évader comme bon lui semblait. Plus que ce qu’elle ne le pouvait dans la vie réelle. Alors que ses yeux se fermèrent lentement, et que son esprit l’emmenait vers de vertes prairies fleuries, une pensée fugace la traversa : « Je crois que j’ai oublié quelque chose. Mais quoi ? »
Le lendemain matin, elle mit du temps à immerger de son doux rêve. C’était toujours ainsi. Elle préférait les rêves à la réalité. Et alors ? Qui-a-t-il de si beau dans la réalité pour qu’elle mérite qu’on s’y intéresse ? Elle préférait tout voir en songe. Ainsi, elle n’était jamais déçue.
Elle s’habilla lentement, toujours cette impression d’oubli la taraudant. Au bout de quelques minutes elle eut finalement un déclic : la lettre ! Son idée de la veille ! Elle descendit à la salle commune et retrouva sa plume et son parchemin, couvert de tâches d’encre. Mais elle ne s’en préoccupa pas. Elle attrapa la plume entre ses doigts et commença à écrire.
Cher Harry,
Si tu reçois cette lettre c’est que ton esprit est pur. Les dieux te l’on envoyé car tu es une belle personne. C’est tout ce que j’espérais.
Crois-tu à la magie, la réelle ? Tu crois la connaître mais ce n’est pas le cas. Elle est en chacun de nous, plus que ce que tu ne peux imaginer. Dans chaque arbre un esprit se cache. Dans chaque brin d’herbe la vie est présente. Le soleil est la démonstration de l’amour que nous renvoie la nature. La nature est amour. Tout ce que ressent la nature, nous pouvons le ressentir les uns envers les autres. Mais il faut avoir l’esprit ouvert. Je ne sais pas si tu le possède mais je l’espère. Je partagerais volontiers mon esprit avec toi, mais tu dois te forger le tien. Ouvre-toi. Laisse l’amour entrer en toi tu y découvriras plus que ce que tu imagines. Si tu laisses cet amour te porter, alors tu deviendras quelqu’un d’exceptionnel.
Je ne sais pas si tu recevras un jour cette lettre mais ce n’est pas important. L’important c’est que je l’ai écrite. Pour toi. Pour nous. Pour notre futur à tous. Chacun d’entre nous doit s’ouvrir à la nature. J’aurais aimé que tu sois le premier. C’est l’avenir qui en décidera. Que l’on soit ensemble ou non.
Au potentiel receveur de cette lettre : je souhaite que le message ne se perde pas. Faites-le passer au monde entier, pour que chacun se souvienne que l’on peut aimer au plus profond de nous-même. Que le monde entier sache qu’une petite lettre peut tout changer, lorsqu’elle est écrite avec le cœur.
Je souhaite que cette lettre voyage et qui sait ? Peut-être qu’un jour elle reviendra au point de départ. Peut-être qu’un jour le destinataire initial recevra cette lettre. Elle t’appartient Harry. Et j’attendrai de voir si les dieux t’envoient vers moi.
A bientôt, cher destinataire, qui que tu sois. Vis tes rêves et ne t’occupe pas de ce que les autres peuvent penser de toi. C’est ta vie fais-en ce que tu souhaites.
Luna
Luna posa sa plume et regarda sa lettre. Elle en était fière, même si elle savait pertinemment qu’elle se perdrait quelque part, dans un océan ou dans le désert. Peu importe. Elle faisait ce qu’elle avait à faire. Elle plia le papier plusieurs fois, pour obtenir un minuscule petit morceau, attrapa sa baguette et se dirigea vers le bord du lac. Là-bas, elle vérifia que personne ne viendrait la déranger et sortit la baguette de sa poche. Elle prononça une formule et fit apparaître un petit ballon rouge. Elle l’arrangea pour qu’il vole longtemps avant d’éclater, et attacha sa lettre au bout grâce à un bout de ficelle. Elle se tenait droite, le ballon rouge au bout duquel pendait la lettre dans sa main. Puis au bout de quelques minutes elle se décida à le lâcher. Le ballon s’éleva lentement dans le ciel, perturbant des groupes d’oiseaux en formation. Luna s’assit dans l’herbe et regarda le ballon s’éloigner. Longtemps. Jusqu’à ce que celui-ci disparaisse. Luna resta assise à regarder le ciel vide. Elle se demandait où son message allait bien pouvoir atterrir. En plein centre-ville ? Directement devant la porte d’une maison ? En Antarctique ? Ou peut-être même dans l’espace ? Qu’importe. C’était une idée saugrenue d’envoyer un tel message. Mais tant pis, c’était son idée. Qu’elle soit bonne ou mauvaise Luna se sentit libérée d’un poids qu’elle seule semblait comprendre.
La nuit tomba et Luna ne bougea toujours pas. Un sourire aux lèvres elle s’allongea, regardant les étoiles briller dans le ciel. Peut-être que son ballon naviguai à travers toutes ces lueurs. Elle n’en savait rien mais se plaisait à y penser. Alors qu’elle fermait les yeux pour continuer de rêver, un petit ballon rouge éclata dans le ciel d’Europe. Une lettre se retrouva seule dans la nuit, volant à travers les nuages, ne sachant où elle allait atterrir.