La chambre est vaste, béante. La chambre est calme, discrète. Elle chatoie. Les ombres grouillent, par milliard, sur le ciel clair. Elles rampent tout doucement au-dessus de l'aquarium vide, elles se prélassent, elles se glissent, s'enlacent, s'enlisent. Dominique les regarde, elle n'a pas peur, ce ne sont que des ombres de passage. Elles ne resteront pas – elles ne restent jamais.
Mais voilà leurs doigts immenses qui dépassent la protection de l'aquarium. Dominique ferme les yeux. Elle ne peut plus les voir.
La chambre est si vaste que Dominique n'est qu'un point, comme un petit voilier lâché dans une mer battante. Elle est déchaînée, cette nuit-là, la chambre de Dominique, déchaînée d'ombres qui viennent lui dire bonsoir – bonne nuit.
Elles tournoient alors, soudain, et seul l'aquarium reste immobile. Elles emportent tout, tout trop vite, le cœur, le ventre et les yeux de Dominique, elle les a rouvert, elle ne peut s'empêcher de les suivre.
Elle se redresse, repousse les couvertures de laine. Nichée dans son aquarium de vide, elle hésite à le quitter. Mais la chambre est si grande et il y a tant à explorer. La fenêtre est restée ouverte, les rideaux ne bougent pas. Il n'y a pas de vent ce soir, il n'y a pas de hurlements ; il n'y a que les doux bruits de la mer qui se déploie et qui s'abat sur le rivage.
Dominique pose son pied nu sur l'immense parquet de sa chambre. Sa chambre vaste, si béante. Elle se redresse, elle est debout. Les ombres l'évitent, elle est trop voyante, trop puissante. On dirait une petite luciole.
Elle fait quelques pas, les bêtes et les insectes viennent alors lui mordre les pieds. Elle reconnaît parmi ces traîtres son jeu de dominos. Tous se bousculent pour être le premier à lui croquer l'orteil et elle les recroqueville bien vite avant de se faire happer.
Tout ralentit alors. Les ombres s'immobilisent, les insectes se reculent. Dominique est debout, elle est reine, non plus intruse. Pourtant, elle les craint, ces gens qui lui tournent autour avec lenteur. Ils l'analysent, la déshabillent et l'ouvrent avec leur couteau. Elle se vide, ses boyaux glissent et elle les regarde flotter alors ; la chambre a pris l'eau. Elle est désormais mer déchaînée, mer battante.
Dominique continue, ventre à découvert, elle patauge. Derrière elle, l'aquarium s'est mis à flotter. Une vague vient combler le trou qu'on lui a fait et elle sent que son corps se noie.
Elle tend alors les bras vers le ciel blanc, où les ombres la contemplent, se noyant doucement.
Dominique est sur le point de mourir quand elle supplie les ombres de la transformer. D'être comme elles, de faire partie d'elles. Elle veut l'aisance de leur corps voluptueux, l'orage de leur colère quand elles sont excitées.
Elle a de l'eau jusqu'aux genoux et ne cesse de supplier. L'aquarium vient taper ses mollets, ballotté dans l'immensité de la chambre qui se met à rétrécir.
Le tourbillon les attire alors et Dominique continue de supplier, de vouloir, elle aussi veut s'enliser, se glisser, s'enlacer, se lasser. Vite, qu'elles la prennent, l'apportent, l'emmènent. Elle veut sortir d'ici, de cette chambre devenue trop petite.
Les bras se tendent enfin, Dominique sent les terribles tissus de leur ombre qui s'accrochent à ses poignets. Ses pieds quittent l'océan dévastateur, son aquarium se fait minuscule et elle se niche dans la poitrine des ombres qui se réjouissent.
Puis tout s'arrête. Tout redevient normal. La fenêtre est toujours ouverte ; il n'y a pas de vent, pas de hurlements. C'est une nuit calme. L'aquarium a retrouvé sa place, au milieu de sa chambre d'enfant et Fleur repose Dominique sur son matelas.
Elle lui souhaite une bonne nuit, de beaux rêves, de bien dormir. Puis elle ferme la porte et le dernier rayon de lumière s'éteint. En passant, elle a écrasé les boyaux de sa fille, balayés par les eaux.
Dominique reprend sa contemplation du plafond. Les ombres ne restent jamais bien longtemps - elles ne sont que de passage. Mais elle sait que, bientôt, elles reviendront.
Note d'auteur :
Bonjour à tous,
Voici un très court texte sur ma Dominique Weasley que j'ai écrit pour l'anniversaire de Luciana.
Je crois que je n'ai pas besoin de dire pourquoi j'ai choisi Dominique pour elle, et même si pour vous, c'est un peu flou, elle, elle comprendra. Parce que Luciana, c'est Dominique, tout simplement. Alors j'espère que ça te plaira, même si c'est court et un peu bancal, tu sais tout ce que j'en pense.
Joyeux anniversaire chica !
Note de fin de chapitre :
Voilà j'espère que ça vous aura plu et j'espère que ça t'auras plu aussi Luciana !
Merci d'avoir lu :)
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