Ginny croisa les bras sur sa poitrine, méfiante. Elle fronça les sourcils en voyant son frère l’ignorer et elle le fusilla du regard. Comme d’habitude, cela n’eut aucun effet et Bill lui tapota machinalement la tête. Elle s’écarta, de mauvaise humeur et sortit de la chambre de son aîné. Elle voulut claquer la porte mais se ravisa au dernier moment. La dernière fois, elle avait réussi à se coincer les doigts. Inutile de se faire humilier une deuxième fois.
Ginny descendit l’escalier pour aller demander des explications à sa mère mais au moment les jumeaux sortirent de la chambre de Percy en criant. Ginny les ignora, ils lui avaient fait le même coup la veille. Elle jouait avec son mini-balai en plastique et ils avaient débarqué avec des plumes sur la tête et de la peinture sur le visage. Ils avaient dansé autour d’elle en criant et en se tapant la bouche avant de repartir dans leur tipi. Enfin, leur chambre, mais depuis que leur père avait ramené une affiche moldue avec un homme debout – mais Ginny n’avait pas tout compris parce que son père avait dit que c’était un taureau assis – Fred et George avaient décidé de devenir des Scouts. Ou Siouts. Ou quelque chose comme ça. Elle avait décidé que ce n’était pas intéressant de toute façon.
La fillette s’arrêta au premier étage pour voir qui se trouvait dans le salon. Elle s’accroupit contre la rampe, se cachant ainsi derrière une guirlande dorée, et elle examina avec attention la pièce. Elle ne voulait pas que Charlie soit là. Ron, ce n’était pas grave, mais pas Charlie. Il remonterait tout de suite le dire à Bill sinon, et ça, Ginny ne le voulait pas.
En ne voyant personne, Ginny se releva et recroisa les bras sur la poitrine. Elle reprit son air boudeur et descendit dans le salon. Elle traversa la pièce pour rejoindre la cuisine où se trouvait sa mère mais un léger bruissement la fit se retourner. Personne. Suspicieuse, elle fit le tour du canapé sur la pointe des pieds. Et elle serra les poings en voyant Ron à genoux à côté d’une pile de chocolats.
« Je vais le dire à Maman. »
Ron leva la tête vers elle, apeuré, mais il se détendit en voyant qu’il s’agissait de sa petite sœur. Il l’invita à s’asseoir, un doigt sur la bouche pour qu’elle reste silencieuse. Ginny fronça les sourcils et s’accroupit à côté de lui.
« C’est à Fred et George. »
Ginny hocha la tête et prit un chocolat de la pile, par solidarité. Pour préparer leur retour de leurs aînés à la maison, les jumeaux avaient décidé de tester leurs trucs sur Ron et Ginny. Ces deux derniers avaient donc eu droit au calumet de la paix le jeudi – ce qui avait vraiment mis leur mère en colère –, au tir à l’arc le vendredi – et Ginny avait échappé de justesse au rôle du bison (et Ron lui en avait voulu pendant toute l’après-midi) – et les jumeaux avaient terminé leur spectacle la veille avec la danse de la pluie.
Ginny adorait les vacances de Noël parce que Bill et Charly – et Percy cette année – revenaient de Poudlard et lui racontaient tout mais elle détestait vraiment quand les jumeaux faisaient ça. C’était pareil pour les vacances d’été. Et c’était pire d’ailleurs parce qu’à Noël au moins, elle y avait moins de chance de découvrir un gnome dans son lit.
La fillette reprit un chocolat. Ils n’auraient qu’à dire que c’était Percy. Oui, voilà, c’était Percy qui avait mangé les derniers chocolats du calendrier des jumeaux. Ron approuva cette idée et ils se partagèrent le dernier.
« Maman ! »
Ron et Ginny échangèrent un regard paniqué. Percy arrivait dans le salon, sans doute pour se plaindre des jumeaux. Il ne fallait pas qu’il les découvre ou sinon il saurait que c’était eux qui avaient fini les chocolats. Les deux benjamins se recroquevillèrent derrière le canapé et attendirent en silence que Percy rejoigne la cuisine. Ils ne prononcèrent pas un mot avant que celui-ci n’en ressorte, tout aussi énervé qu’avant et ce ne fut qu’une fois qu’il eut disparu dans les escaliers que Ron et Ginny se détendirent.
« Comment tu as découvert la cachette ? », demanda Ron à voix basse.
Ginny haussa les épaules et ne répondit pas. Elle regarda Ron avec tout le sérieux dont elle était capable et elle lui chuchota, sur un ton solennel :
« Je me suis fâchée avec Bill. »
Ron haussa les sourcils, impressionné. Ginny était la préférée de Bill, tout le monde le savait.
« Pourquoi ? »
La fillette haussa les épaules.
« Il ne veut rien me raconter. »
Ron hocha la tête d’un air savant et donna le meilleur conseil qui soit à sa petite sœur.
« Il faut en parler à Maman. Maman a toujours raison. »
Ginny acquiesça et se releva. Elle passa la langue sur ses dents pour effacer les traces de chocolat et elle aida son frère à pousser les dernières miettes sous le canapé avant que celui-ci ne la suive dans la cuisine.
La baguette à la main, Molly envoya les derniers ustensiles s’entasser dans l’évier. Elle vérifia la soupe pour le soir avant de se tourner vers les deux enfants.
« Qu’est-ce qu’ils ont encore faits, les deux autres ? »
Ginny secoua la tête.
« C’est Bill.
- Bill ? », demanda leur mère, surprise.
Ginny acquiesça et Molly leur fit signe de s’asseoir autour de la grande table. Elle agita sa baguette en direction de l’évier et la vaisselle commença à se laver d’elle-même. Elle se fit une place sur le banc entre ses deux derniers et leur demanda s’ils pouvaient lui raconter.
Ron haussa les épaules et dit que c’était Ginny et la fillette croisa les bras sur sa poitrine.
« C’est Bill. Il ne veut rien me raconter.
- C’est si grave, ma chérie ?
- Il ne veut même pas me dire pourquoi il écrit une lettre le premier jour des vacances.
- Oh.
- Il m’a dit que ce n’était pas mes affaires et que je comprendrais quand je serais grande. Mais je suis déjà grande. »
Molly sourit en voyant l’air boudeur de sa fille. Elle lui caressa les cheveux et chercha les mots pour la réconforter.
« Tu sais ma chérie, Bill veut parler de quand tu iras à Poudlard.
- Percy est pas grand comme Bill ou Charly », commenta Ron.
Sa mère le regarda et il baissa les yeux.
« Tu sais, c’est normal que Bill ne veuille pas tout te raconter. Non Ginny, ne prends pas cet air renfrogné, s’il te plaît. Il est grand maintenant, il a ses amis, il a peut-être une amoureuse et il y a des choses qu’il préfère peut-être raconter à ses amis.
- Non, Bill n’a pas d’amoureuse, d’abord.
- Comment tu le sais ?, demanda Ron, curieux.
- Il me l’aurait dit sinon, affirma Ginny en hochant la tête, ignorant le sourire de sa mère.
- Mais t’as dit qu’il ne voulait pas te raconter…
- Tu comprends rien, Ron, répondit sa sœur, énervée. Bill n’a pas le droit d’avoir une amoureuse, c’est tout !
- Ginny…
- Non Maman, il a pas le droit ! »
Sur ces mots, Ginny descendit du banc et sortit de la cuisine à grand pas. Elle remonta l’escalier, ignorant à nouveau Fred et George – que Charlie avait réussi à attacher contre une porte avec une des guirlandes de l’escalier et qui subissaient à présent la danse de la pluie que Charlie exécutait bien mieux qu’eux – et une fois dans sa chambre, elle bloqua la porte avec sa chaise. Elle n’était peut-être pas assez grande pour avoir les clés ou pour faire de la magie, mais elle était assez intelligente pour empêcher les gens d’entrer dans sa chambre.
Sans enlever ses chaussettes, elle se mit en boule dans son lit. Bill n’avait pas le droit d’avoir une amoureuse.
« Gin ? »
Ginny ouvrit brusquement les yeux. Elle resta immobile quelques secondes, le temps de réaliser qu’elle s’était bel et bien endormie. Elle se redressa juste assez pour vérifier que même si son frère essayait d’ouvrir la porte, la chaise n’avait pas bougé. Satisfaite, elle se réinstalla pour retrouver la position confortable dans laquelle elle était jusqu’à présent.
« Gin. »
Ginny releva la tête et écarquilla les yeux en voyant Bill debout à côté de son lit. Comment avait-il fait pour entrer ? A la fois furieuse et vexée, la fillette cacha sa tête sous la couverture. Bill éclata de rire et elle se sentit encore plus vexée.
« Gin, soeurette. Je suis désolé, la journée d’hier était très longue. Et les jumeaux sont fatigants, je voulais juste être un peu seul. »
Ginny poussa un grognement de mécontentement, tout en gardant le drap sur sa figure. Bill s’assit sur le lit et continua à parler.
« Mais tu peux me demander tout ce que tu veux, j’aime bien te parler de Poudlard.
- Tout ce que je veux ? »
Bill sourit en voyant sa sœur enfin apparaître. Il acquiesça et elle fronça les sourcils en notant la guirlande qu’il portait autour du cou. Il avait peut-être libéré les jumeaux de Charlie chef des Scouts.
« Maman dit que tu as une amoureuse. C’est pas vrai, hein ?
- Maman a dit quoi ? »
Ginny regarda son grand frère, soulagée.
« Je savais que tu n’avais pas d’amoureuse.
- Gin, ça te dérange que j’ai une amoureuse ?
- T’as pas le droit.
- Pourquoi, Gin ? Ça ne change rien. »
Ginny ne dit rien. Il avait une amoureuse. C’était sûr maintenant. Son désespoir dut se voir sur son visage parce que Bill lui prit la main.
« T’es toujours ma petite sœur chérie, tu sais. Jamais personne ne prendra ta place
- C’est vrai ? »
Bill hocha la tête et Ginny attendit quelques secondes pour être sûre qu’il ne mentait pas. Elle se redressa et le serra dans ses bras. Peut-être que si l’amoureuse de Bill restait toujours à Poudlard, Ginny pourrait l’accepter, Bill serait toujours à elle. Elle sourit et lui fit un bisou sur la joue.