Un vieux vase rouge, à peine plus gros qu'un Niffleur, pas beaucoup plus beau qu'un Scroutt à Pétard, trônait pourtant fièrement sur le bureau miteux au centre de la pièce. Fêlé, en prime, le vase. A l'image de son propriétaire, sans aucun doute.
« Albus Potter, tu peux me rappeler ce que je viens faire ici ? demanda pour la cinquième fois Rose Weasley.
- Chut ! Tais-toi, Rose.
- C'est vraiment important, ton truc ?
- Oui. Capital. Vital, même.
- Ecoute, il est presque minuit, je suis sûre que Rusard ne va pas tarder.
- Je n'en serai pas si sûr, si j'étais toi.
- Ah non ? Et pourquoi ? » demanda la rousse en fourrant dans ses bras une banane et trois pêches, prête à porter un des fruits à sa bouche. Quitte à être un intrus, autant se faire plaisir, pensa-t-elle.
« Rose ! Lâche ça tout de suite ! l'invectiva Melissa.
- En tout cas, ne mange rien ! l'appuya Kim.
- Pourquoi ? Je meurs de faim, moi ! » se plaignit Rose.
Ses deux amies la regardèrent, affichant une mine réprobatrice.
« Imagine que les fruits aient été empoisonnés ?
- Ou que Rusard ait mis du philtre d'amour dedans ?
- Melissa et Kim ont raison. Repose ça. intervint Albus, penché sous le bureau du concierge.
- Roh ! Bande de rabat-joies ! » maugréa Rose en reposant les fruits dans une coupe défraîchie, sur la petite table dans un coin de la pièce.
« Au fait, Albus, tu peux nous dire pourquoi tu es si sûr que Rusard ne débarquera pas d'ici... cinq minutes ? demanda Melissa.
- Facile. Mimi Geignarde m'a promis qu'elle le retiendrait, en hurlant et en pleurant jusqu'à ce qu'il s'occupe des toilettes bouchées à son étage.
- Mhh. Pas sûr qu'elle soit très convaincante. Rusard ne la porte pas dans son cœur. Et rappelle-moi ce qu'on fait ici ? demanda Rose pour la sixième fois.
- Toi, Melissa et Kim êtes venues m'accompagner pour qu'on trouve...
- Trouve quoi ? le presse Kim alors que le garçon s'est retourné pour fouiller sur une étagère.
- Nom du dieu de la Bièraubeurre ! Je trouve rien, ici !
- Laisse nous t'aider à chercher, ça ira plus vite. Proposa gentiment Melissa.
- NON ! PAS QUESTION ! Euh, je veux dire, c'est un truc personnel.
- Enfin, Albus, on va pas passer la nuit ici, non plus ! s'énerva Rose.
- Vous n'avez qu'à partir !
- Quoi ? Pas question ! C'est toi qui a la carte ! s'exclama Rose.
- A votre avis, pourquoi Rusard a une nuisette très courte en dentelle soigneusement dans son tiroir ? demanda Melissa qui avait décidé de fouiller avec Albus, malgré le refus de ce dernier.
- Aucune idée ! Mais c'est vraiment... répugnant ! jugea Rose, alors que Kim acquiesçait.
- Vous croyez qu'il l'a trouvée, ou qu'il la réserve pour une occasion spéciale ou que c'est juste pour son plaisir personnel ou alors il...
- Pitié, arrête de parler de ça, je crois que vais vomir, geignit Kim.
- Ah, j'ai trouvé ! » soupira Albus avant de placer subrepticement l'objet confisqué dans sa robe de sorcier.
« Pas trop tôt ! » pensa Rose. Les quatre Gryffondors sortirent précautionneusement du bureau du concierge, et se dirigèrent sur la pointe des pieds vers leur salle commune. Malheureusement...
« Par Merlin ! Miss Peste nous suit ! Vite ! Dépêchons-nous ! » s'écria Kim en serrant timidement le bras d'Albus. Un rapprochement comme un autre. Mais la jeune brune profitait de l'occasion. Qui sait ? Peut-être qu'Albus se transformerait en prince charmant pour la sauver du dragon qui les poursuivait dans les tours. Enfin, pas d'un dragon... de Rusard.
« Je sais qu'il y a quelqu'un ! Arrêtez-vous, espèces de Veracrasses ! Je vous préviens, je vais vous retrouver. Et vous allez voir ce qui arrive aux intrus dans mon bureau ! »
Un éclair de lumière violette traversa le couloir.
« C'est pas vrai ?! Depuis quand il a une baguette ? Je croyais que c'était un Cracmol ? s'affola Melissa en courant plus vite.
- Oh ! C'est sans doute une invention d'oncle George pour les enfants ou pour le côté moldu de la boutique, je ne sais plus. Une fausse baguette qui envoie des jets colorés. Expliqua Albus.
- Oh non ! Ma chaussure ! pépia Kim alors qu'une de ses ballerines lui avait échappé.
- C'est pas vrai ! » râla Albus en baissant la tête alors qu'un jet de couleur orange siffla près de son oreille droite. Les cris du concierge se rapprochaient. « Accio chaussure de Kim ! » il la récupéra et lui tendit avec brusquerie en marmonnant qu'elle était vraiment stupide d'avoir perdu sa ballerine.
« Bon, pour le prince charmant, c'est pas gagné. Parce que, niveau courtoisie, on repassera ! » songea Kim en soupirant de dépit alors qu'Albus lui avait fait lâcher son bras.
« Si c'est une baguette avec un tant soit peu de magie, ça devrait marcher. EXPELLIARMUS ! » cria Rose.
Alors que le jouet pour enfant rejoignait les mains de la jeune fille et qu'un grognement énervé de leur poursuivant retentit derrière eux, ils accélérèrent l'allure jusqu'à la tour des Gryffondors. Rose balança la fausse baguette au détour d'un couloir.
Après dix minutes de course intense, ils atteignirent leur salle commune, rassurés et soulagés.
Kim et Melissa montèrent avec précipitation dans le dortoir des filles, à croire que Rusard était toujours à leurs trousses, tandis que Rose et Albus s'enfonçaient dans le canapé face à la cheminée.
« On l'a échappée belle ! soupira Rose.
- Ouais bon travail. Je t'en dois une.
- C'est cool que tu dises ça, parce que justement... j'aimerais bien savoir pourquoi j'ai risqué ma vie et celle de mes amies ce soir.
- Non, mais tu crois pas que tu exagères, là ? Risqué ta vie, tout de suite les grands mots...
- On parle de Rusard, quand même. Sans doute un des concierges les plus aigris et cruels de l'histoire de Poudlard.
- Pas faux. Mais non. Je ne te le dirai pas. » résista Albus.
Rose, mi-agacée, mi-intriguée, décida d'abandonner les négociations. Dans certains cas, la tactique diplomatique ne servait à rien. Il valait mieux... attaquer ! Elle se jeta sur son cousin et s'empara de l'objet qu'il cachait sous sa cape. Alors que ses joues prenaient une teinte écarlate, Albus se jeta sur elle pour récupérer son bien.
« Eye-Candy for Wizards, édition été ?!
- Rends-moi ça ! s'énerva Albus, très gêné, alors que Rose, stupéfaite, avait ouvert le magazine qu'elle tenait entre les mains.
- Nan mais dites-moi que je rêve ! Tu n'as pas osé ? ALBUS SEVERUS POTTER ! ESPECE DE... CRETIN DEGENERE ! Ne me dis pas que tu nous as fait sortir après le couvre-feu, pénétrer dans le bureau de Rusard, fouiller dans ce même bureau, courir dans tout le château, et tout ça pour récupérer un STUPIDE MAGAZINE COCHON ? ».