Que faisait-elle devant la grosse dame ? Pourquoi faisait-il si sombre ? Pour quelle raison le couloir était-il désert ?
La dernière chose dont Ginny se rappelait avec exactitude c’était d’avoir écrit dans son journal après le dîner. Elle s’était confiée à Tom à propos de l’accident de Harry lors du match de Quidditch, et de l’intention de Colin d’aller lui rendre visite à l’infirmerie. D’ailleurs, son camarade lui avait proposé de l’accompagner auprès du blessé. Elle avait alors été prise d’une soudaine colère qui ne lui ressemblait pas. Une pensée affreuse avait alors traversé son esprit « Comme si j’allais accompagner un vulgaire un sang de bourbe ! » Elle avait dû se mordre la langue pour s’empêcher de le dire.
Cette réflexion était si dérangeante qu’elle avait ressenti le besoin urgent de se confier à Tom, elle ne se reconnaissait pas. Elle se fichait du statut du sang comme de sa première chemise, et l’exubérance de Colin avait le don de lui rendre le sourire. Alors pourquoi cette haine soudaine ? Dans le fond, elle aimait bien son camarade, alors elle ne comprenait pas ce qui lui avait pris. Elle avait prétexté une soudaine fatigue pour décliner l’offre et s’était empressée de rejoindre le dortoir pour écrire à Tom, elle lui avait exposé ses peines, ses interrogations et lui avait su trouver les mots pour la faire déculpabiliser.
C’est à force d’entendre cette expression, qu’elle t’est venue naturellement, il est évident que tu ne le pense pas, d’ailleurs tu ne l’a pas prononcé. Ton ami n’en a rien su, et n’en saura jamais rien. Quant à ta colère, c’est simplement par ce que tu estimes que Harry a besoin de repos. Demain tu auras oublié cet incident et tu parleras de nouveau à ton camarade.
Elle ne se souvenait même pas avoir refermé son journal…
L’instant suivant elle était devant l’entrée de sa salle commune et plusieurs heures semblaient s’être écoulées. Ce n’était pas la première fois qu’une telle chose se produisait. Qu’elle perdait des heures entières de sa vie. Elle avait tenté d’en parler avec Percy, mais elle n’avait pas su trouver les mots pour que son ainé comprenne son mal-être, alors elle s’était retrouvé avec les oreilles fumantes. Les jumeaux c’était impensable ils prendraient la situation à la légère, et la taquineraient en disant qu’elle devait passer ce temps à rêvasser à propos de Harry. Quant à Ron… Ron qui pensait qu’elle était juste peinée à cause de son attrait pour les chats, avait voulu la consoler après l’attaque de miss Teigne, mais elle ne pouvait pas lui faire part de ses craintes, surtout qu’il était toujours avec Harry et qu’elle n’osait pas parler devant celui-ci.
— Alors, ce mot de passe ? s’impatienta le portrait. J’ai pas que ça à faire !
— Pardon, Anthochère.
— C’est bon entre !
La salle commune était particulièrement vide. Quelle heure pouvait-il bien être ? Ginny regarda l’horloge au-dessus de la cheminée. Il était bien plus de minuit, alors qu’il était huit heures du soir lorsqu’elle avait commencé à écrire dans son journal. Qu’avait-elle fait pendant ces heures dont elle ne se rappelait plus rien ? Cela avait-il un lien avec les agressions ? Elle avait peur de découvrir qu’elle était responsable. Surtout en repensant à cette insulte qu’elle avait failli proférer à l’encontre de son camarade, alors qu’elle n’avait jamais cru en la supériorité des sang-purs. Se pourrait-il qu’elle soit l’héritière ? Pourquoi elle et non ses frères ? Non ça n’avait pas de sens… alors pourquoi ?
Elle était épuisée, elle ne trouverait pas de réponses à ces questions dans cet état. Une bonne nuit de sommeil était nécessaire pour y voir plus clair. Elle monta discrètement dans son dortoir pour ne pas réveiller ses compagnes, et se glissa le plus vite possible dans le lit. Elle n’aspirait plus qu’à sombrer dans le monde des rêves.
Le lendemain matin dès qu’elle mit un pied dans la salle commune, elle remarqua une certaine excitation parmi les première année. Elle s’approcha d’Emy.
— Que se passe-t-il ?
— Il n’est pas rentré de la nuit, apparemment, son lit était intact quand les autres se sont levés !
— Qui ça ? demanda Ginny.
— Mais Colin !!
Le cœur de Ginny loupa un battement, elle ne put s’empêcher de penser à cette nouvelle absence, à cette balade nocturne qu’elle avait faite mais dont elle ne gardait aucun souvenir. Pourquoi n’était-elle pas dans son dortoir ? Etait-elle finalement sortie avec Colin pour rendre visite à Harry ? Où pouvait bien être Colin dans ce cas ? Avait-elle était le témoin de quelque-chose ? Avait-elle subit un Oubliette pour la faire taire ? Si c’était cela, ce ne devait pas être la première fois qu’elle était victime de ce sortilège, sans doute était-elle proche de l’Héritier, et si celui-ci maîtrise l’Oubliette il devait être dans les années supérieures et à part ses frères elle n’avait aucun contact parmi les plus âgés. Une chose était sûre, il y avait quelque chose de pas net derrière cette histoire.
De retour dans la salle commune, après le petit déjeuné, elle entendit Harry, qui revenait de l’infirmerie, expliquer que Colin avait été conduit auprès de lui au milieu de la nuit, pétrifié, comme la chatte de Rusard. Le sang quitta soudainement visage de Ginny, elle se laissa tomber dans le fauteuil le plus proche, la respiration saccadée. Chaque fois qu’elle avait une perte de mémoire un événement lié de près ou de loin avec la chambre des secrets avait lieu… Exception-faite du jour où elle avait trouvé des plumes de poulet sur sa robe, ce qu’elle n’arrivait toujours pas à s’expliquer. Elle avait forcément quelque chose à voir avec les attaques. Elle se disait que sa théorie faisant d’elle l’Héritière n’était pas si incongrue ? Elle avait eu un accès de colère contre Colin, elle était sortie la nuit passée, Colin était pétrifié… Mais, dans ce cas pourquoi ne se souvenait-elle de rien ?
Mais à qui pouvait-elle se confier ? Elle avait déjà exclu ses frères. Les professeurs ? Non ils contacteraient ses parents qui la rapatrieraient à la maison, en la prenant pour une petite chose fragile. Il ne fallait pas que ses parents apprennent cela, elle voulait rester à Poudlard, elle allait tout faire pour comprendre ce qui se passait. Elle était à Gryffondor après tout. Oui, elle allait mener sa petite enquête, c’était la meilleure solution.
Fière de sa nouvelle résolution, elle monta dans son dortoir et s’installa à son bureau pour se confier à Tom. Elle remarqua que son journal n’était pas dans le tiroir habituel, elle avait dû le déplacer pendant son absence mais elle le trouva dans son sac, choisit une plume qu’elle trempa dans l’encrier, certaine que Tom l’aiderait à y voir plus clair.