Badaboum !
Allongée sur le ventre, Hermione regardait avec désolation les livres qui s'éloignaient d'elle en glissant sur le sol du couloir. Autour d'elle, les rires s'étaient élevés dans une explosion joyeuse.
Avec un soupir exaspéré, la jeune sorcière se releva avec autant de dignité dont elle était encore capable. Elle avait de l'entraînement. Depuis ce matin, elle s'était prise les pieds neuf fois dans un obstacle invisible.
D'un geste vif, elle ouvrit son sac en toile et commença la cueillette de ses grimoires étalés sur toute la longueur du couloir. Elle réussit à entrer les deux tiers de ses livres dans sa besace. A chaque chute, deux livres de plus refusaient de rejoindre les autres dans leur bagage.
Un sifflement échappa à ses lèvres peu habituées à un tel manque de maîtrise de soi. D'un regard, Hermione embrassa les spectateurs de sa neuvième chute. Des regards envieux, des moues boudeuses, des narines frémissantes : qu'avait-elle bien pu faire pour créer autant d'animosité autour d'elle ?
Hermione ne s'attarda pas davantage à de si basse considération. Elle hissa la lanière de son sac jusqu'à son épaule, cala sa pile de livres sous son autre bras et repartit à travers les couloirs en direction de la grande salle.
Ses pimbêches n'allaient pas gâcher sa journée et encore moins l'empêcher de prendre le roboratif petit déjeuner qui lui permettrait de débuter sereinement une bonne journée d'étude.
Hermione posa ses livres sur un banc, s'installa en face de Ron qui la gratifia d'un regard sévère. Elle se tourna vers Harry à la recherche d'une réponse. Mais le champion de la coupe des maisons semblait se passionner pour une tranche de bacon posée en équilibre sur un toast.
« Je suis ravi de voir que ta nuit de marivaudage ne t'a pas complètement détourner de nous et des études, siffla Ron entre ses dents.
— Ma nuit de...
— Inutile de répondre, coupa Ron. Tu n'as pas à nous rendre des comptes. Tu as tout à fait le droit de te comporter comme la plus dévergondée des gourgandines. Après tout c'est ta vie. Mais tout de même, te jeter à la tête et dans le lit de l’Ennemi. J'aurais pensé que tu aurais plus de respect pour Harry.
— Mais de quoi... » commença Hermione dont la cuillère pleine de confiture s'était figée au dessus de son toast.
Effarée, elle regarda Ron se lever et glisser jusqu'à la porte avec une démarche de cardinal en pleine grande messe. Hermione se tourna vers Harry, qui n'avait pas eu le temps de détourner son regard et regrettait amèrement d'avoir levé la tête de son assiette.
« De quoi parle t'il ? demanda Hermione. Qu'est ce que c'est que cette histoire ?
— Je n'ai pas bien compris, bafouilla Harry d’une petite voix aigue, tandis que son regard effaré cherchait un élève, un professeur, une chouette, une cuillère, n'importe quoi même, qui aurait pu le sortir de ce mauvais pas.
— Alors Granger ? interrompit la voix traînante de Drago. On visite le dessous des robes des sangs pures. Cela doit te changer de l'odeur de porcherie dans laquelle tu as grandi. Il faut espérer que l'odeur de Krum finira par masquer la tienne. Nous pourrions enfin suivre un cours en entier sans avoir à nous boucher le nez. »
Avant qu'Hermione n'ait eu le temps de répondre. Drago et sa suite ricanante avaient disparu. La jeune fille se tourna vers Harry.
« Quelqu'un t'aurait vu avec Viktor Krum dans une salle de classe, » dit précipitamment Harry, enfin soulagé d'avoir trouvé une réponse.
Convaincu que cela ferait cesser les questions de son amie, Harry plongea à nouveau dans ses oeufs brouillés et son lard cuit. Avec douleur, il sentait sur sa nuque le regard de son amie qui n'en avait pas fini.
« Oh ! Hermione, salua Ginny avec la première mine ravie qu'Hermione voyait de la journée. Je suis contente de te trouver. Pansy Parkinson a fait courir la rumeur que tu aurais agrémenté le séjour de Viktor Krum à Poudlard par des gâteries très personnelles dans une salle de classe abandonnée.
— Quoi ? Mais c'est totalement faux, s'exclama Hermione horrifiée, qui comprenait enfin les croches pattes et les regards jaloux qu'elle essuyait depuis le matin.
— C’est bien dommage, constata Ginny suffisamment fort pour être entendu de la chevelure hirsute de Ron qui dépassait d'une armure. Avec les mufles et autres trolls mal peignés que tu te traînes comme ami depuis ton entrée à Poudlard, je venais te féliciter d’avoir enfin oser prendre du temps et de te faire plaisir. »