Les personnages et l'univers HP appartiennent à JKR.
Bonjour,
Voici un petit texte écrit il y a un moment maintenant. J'espère que cette vision un peu en demi teinte du couple Harry/Ginny pourra vous plaire.
Bonne lecture ! ^^
Mais alors pourquoi ton soupir continu-t-il de résonner dans l’espace étroit ?
Un soupir persistant, récurrent. Un soupir que je ne connais que trop bien. Il remplit le mètre qui me sépare du vide qui se cache derrière la porte. Il camoufle la peur de ne pas avoir été à la hauteur. Tant que je peux entendre ce soupir qui surtitre l’impuissance, la résignation et la rancœur, je ne suis pas tout à fait seule. Je sais que l’espoir est permis, que le droit de croire à une vie à deux persiste dans la réalité. Malgré les remords, ce simple filet d’air fait vivre la possibilité, la faible probabilité qui maintient le pont fragile qui réunit nos deux univers. Figée, j’essaye de tenir à distance la folie qui ne cesse de tambouriner aux portes de mon esprit embrumé. Je ne veux pas la laisser m’emporter où tu ne pourrais plus me retrouver, là où il n’y aurait plus de retour en arrière possible. Alors je lutte pour faire revivre indéfiniment ces quelques secondes d’un soupir, rendant intemporel ce court instant.
Malheureusement, l’illusion s’estompe peu à peu en même temps que les larmes sèches sur mes joues. Malgré toute ma volonté pour faire vivre ce souvenir, il n’est bientôt plus qu’un écho qui perd de sa puissance dans le silence sournois de cette maison vide. Tout à coup, il ne reste plus que l’absence pour me tenir compagnie. Ça et une prise de conscience brutale. Je n’ai plus la force de feindre de ne rien avoir vu venir, et progressivement j’accepte l’anticipation de cet abandon.
Ces matins noirs où tu te contentes d’aller t’asseoir près de la fenêtre qui donne sur le jardin pour observer un spectacle qui n’existe plus, en sont un exemple flagrant. C’est la distance que tu m’imposes dans ces huis-clos avec toi-même qui nous a progressivement éloigné. Chaque jour, tu t’entêtes à conserver dans ton cœur tous les fantômes du passé. Tu ressasses toutes les nuits ce qui ne peut plus être changé et j’en ai assez de devoir recollé les morceaux. De devoir sans cesse retrouver le chemin vers ton âme. J’en arrive à douter d’être à la hauteur de tes maux. Je ne suis pas sûre de posséder la force nécessaire pour subir ce cycle infernal dans lequel tu nous entraines.
Harry réveille-toi ! ai-je envie de te hurler. Quitte ce monde fait d’ombres et de spectres. Rejoins-moi où je peux te prendre dans mes bras, te bercer et te prouver que tu n’es plus seul.
Mais les mots restent dans la prison de mes mâchoires.
Il y a des souvenirs que l’on voudrait oublier, des oublis que l’on préférerait avoir évité, des raisons qui justifient nos erreurs, des colères qui nous rongent longtemps après les cris, des peurs qui nous paralysent, d’anciens fantasmes qui ternissent la réalité. Contre tout cela je suis capable de me battre. Mais, il y a aussi ces instants où tu soupires, où le temps s’arrête juste quelques secondes et où tu t’enfermes dans une bulle impénétrable. Des moments qui semblent s’étirer comme la mare d’eau qui s’écoule du vase renversé près de moi. Durant ce laps de temps, le monde s’assombrit et une sécheresse irrespirable remplace tout l’oxygène. L’idée de bonheur cesse d’exister en même temps que ton regard se vide. Il y a une odeur désagréable qui s’échappe de ses secondes, un goût amer qui accompagne chaque bouchée de cette vie qu’on s’impose. Des regrets qui se greffent à l’air que j’inspire et qui ne veulent plus quitter mes poumons sans que les sanglots les accompagnent.
Trop longtemps, j’ai accepté de demeurer dans ton ombre, ne constituant qu’un faire-valoir aux yeux du monde impitoyable. N’étant que la petite amie du survivant, la fiancée chanceuse aux côtés du sauveur, la femme de l’Elu victorieux. Tout en sachant que tu n’es pas responsable, je n’ai pu empêcher l’éclosion d’une colère induite par mon désir d’indépendance, celui-là même qu’ils n’ont eu de cesse d’étouffer avec leurs qualificatifs. Rien n’a suffi à m’extirper de ce cercle infernal. Je n’étais pas une étudiante assez futée, pas une poursuiveuse assez percutante, pas une femme assez attentionnée pour mériter d’être reconnue comme un individu à part entière. J’ai encaissé tant que j’ai pu, mais leur aveuglement a eu raison de mon obstination. Mais bien plus qu’un oiseau blessé par leur chasse incessante, c’est ton entêtement et ton air morose qui a fini par creuser un vaste gouffre entre nous, un vide que je suis fatiguée de combler.
Soudain j’entends la porte d’entrée grincer. Mes yeux encore humides ont du mal à distinguer ce qui apparaît dans l’encadrement de la porte. C’est la présence pesante de tes fantômes qui m’aide à réaliser que c’est toi.
« Harry ? », je murmure.
Je t’observe passer près de moi et t’installer à la table de la salle à manger. Je t’imite mécaniquement et suis tes mouvements de mes yeux rougis, pendant que tu enfouis ton visage dans tes mains. Un instant, tu observes le spectacle qu’offrent les fleurs noyées dans le couloir de l’entrée. Cela semble te rappeler mon énième crise de nerfs et ton abandon éphémère.
Tu soupires.
Je me rapproche doucement, mes bras s’enroulent autour de tes épaules affaissées. Je respire ton odeur et soudain je renoue avec le passé. Je me remémore les sourires éclatants qui suivaient systématiquement les regards timides au détour d’un couloir. J’entends les secrets qui construisaient une intimité unique. Je revis les baisers volés à l’insu d’un frère protecteur et la tiédeur de tes doigts qui s’enroulaient autour des miens. Cette résurrection momentanée me donne l’impression de redevenir la reine de ton royaume. La distance que tu m’imposes se délite et je retrouve mon âme dans tes veines. Et je me rends compte à quel point je me suis leurrée, à quel point du m’est indispensable, même si t’aimer m’est nocif.
« Excuse-moi de m’être emportée.», dis-je à ton oreille.
Après une courte réflexion, tes bras se resserrent autour de moi. J’ai envie de te tenir contre moi pour l’éternité, pour que plus jamais je ne perde ta trace.
« Si tu voyais ce que je vois dans mes cauchemars... Quand je revois ses yeux vides dans mes rêves, je me dis...».
Tu marques une pause. Je ne veux pas écouter tes récits macabres, je ne le supporte plus. Ne peux-tu pas simplement oublier pour mieux reconstruire ? Cependant, je n’ose intervenir de peur que tu décides de m’enlever cette attention que tu ne m’accordes que trop rarement. J’attends patiemment. Mon corps se mouvant au rythme de ta respiration profonde. Je peux sentir ton pouls qui bat la mesure contre ma joue. Mon esprit se languis déjà de la torture que tes accents absents produisent, quand tu reprends d’une voix à peine audible :
« Je me dis et si ? J’aurai pu...nan J’aurais dû accepter la victoire au Tournoi et empoigner cette coupe tout seul. Si j’avais su faire preuve d’orgueil, ce jour-là plus qu’aucun autre, cela aurait tout changé. Tout.
— Chut, dis-je en te berçant doucement. Cédric ne l’aurait jamais accepté, tu le sais bien. Tu n’aurais pas pu échapper à Voldemort. Ce n’était qu’un mauvais rêve.
— Ginny, reprend-il secoué par un séisme contre lequel je suis impuissante.
— Oui ?
— Tu crois qu’il aurait pu être heureux ?
— Je ne sais pas. Peut-être. Sûrement.
— Et nous deux, on est heureux ? »
Seulement quand tu me laisses t’aimer Harry, ai-je envie de répondre.
« Oui, c’est évident, nous sommes heureux. Nous sommes vivants.», ris-tu comme si ta question était absurde.
Je décèle l’amertume dans ton rire, mais au moins les tremblements ont cessé. Tu défaits le nœud de mes bras autour de toi et dépose un baiser sur mes doigts couvert de tâches de rousseurs.
L’orage est passé. Cela ne durera pas. Un jour, demain peut-être, tu te réveilleras et tu seras de nouveau perdu quelque part au milieu de tes cauchemars. Je devrais emprunter de nouveaux chemins pour te retrouver.
Hanter par des « si » perpétuels, des fantasmes d’un monde que tu pourrais refaire. L’image d’un héros qui ne peut dire adieu à hier, qui refuse de vivre aujourd’hui et qui n’envisage pas de lendemain. Voilà ce qu’il me reste chaque matin, ce que mes bras d’ordinaire féroce ne peuvent plus supporter. Je finis par m’imprégner de cette mélancolie, tant et si bien que j’ai peur de ne plus être en mesure de nous faire garder le cap.
Soupir.
Cette fois, c’est le mien.
Qu'en dîtes vous ? Pensez-vous que Harry soit plus ou moins heureux après la Guerre ? Votre avis m'intéresse, alors n'hésitez pas à me laisser un petit mot :D Merci pour votre lecture et à bientôt !