Rond comme une balle de tennis et aussi rapide que le vif d’or, ces deux adjectifs étaient ceux qui revenaient sans cesse lorsque l’on parlait de Coquecigrue. Pourtant, ce petit hibou, tout nouveau dans la famille Weasley depuis que Sirius Black l’avait recueillit au bord d’un ravin, victime de la malveillance de deux aigles royaux, était bien d’autres choses. Il avait une jolie couleur grise, identique aux grosses perles qui ornaient le cou de Mrs Weasley; était toujours près à aider son propriétaire, Ron, ou un de ses amis; et surtout, Coquecigrue n’était jamais fatigué.
Sans cesse, il volait comme une furie dans la maison, passant d’une pièce à l’autre en un claquement de doigts -de plumes, pardon- pour quémander une activité.
Sans cesse, son hululement aigu animait le vieux salon coloré où une bande de rouquins hurlait comme des babouins braillard, coincés dans un zoo.
Sans cesse, Coquecigrue se demandait si, un jour ou l’autre, il le remarquerait…
Car si la boule de plumes s’excitait autant, au point de se faire enfermer durant de longues heures dans une cage ronde, sous une cape qui sentait la transpiration, c’était uniquement dans le but d’attirer son attention. Que ses yeux à lui, jaune et globuleux, se posent enfin sur ses petites plumes que Coquecigrue nettoyait chaque matin pour mieux les faire frémir devant lui.
Majestueux, fier, ses longues plumes sombres blanchit par le temps, et le regard perçant, Errol passait le plus clair de son temps accroché à son perchoir, dédaignant tout ce qui pouvait bien se passer autour de lui. Pourtant, il fallait bien avouer que le vieux hibou n’était pas dupe du manège de celui qu’il avait baptisé le petit nouveau.
Sans cesse, il lui voyait passer et repasser devant ses yeux, la queue levée, les yeux écarquillés, le gésier dansant.
Sans cesse, il le sentait frémir d’émoi lorsque ses belles plumes grises frôlaient les siennes, déplumés.
Sans cesse, Errol sentait son propre plumage frétiller, et son gésier vibrer, lorsque le petit nouveau hululer de manière aiguë en direction de son perchoir.
Mais si Errol persistait autant dans le déni qui était devenu son quotidien, c’est parce qu’il se savait trop vieux pour s’émoustiller autant sur un joyeux luron. De loin, il aimait observer Coquecigrue battre des ailes, piaillant ses petites objections sur son maître, ce grand dadet aux yeux bleus. Il adorait aussi le voir lisser son plumage juste pour lui plaire… il n’en était pas peu fier, bien que, jamais, Errol ne succomberait. Cette boule de plume frémissante, alléchante, méritait bien mieux qu’un vieux croûton comme lui. Il lui fallait des plumes vives et vigoureuses, un bec fort et dur, et un gésier qui frémissait encore comme au premier jour…
Si Errol n’était pas aussi jaloux, il aurait sans doute présenter Coquecigrue à la belle Hedwige, mais le vieux hibou se résigna à le faire, profitant encore et encore de la parade nuptiale que le petit nouveau lui proposait tous les soirs dès la tombée de la nuit.