La nuit était tombée dans la périphérie de Londres et les passants commençaient à se faire de plus en plus rares, principalement dans les petites rues habituellement très fréquenté en plein jour. Rapidement on ne put distinguer qu’un homme, un chapeau melon sur le crane, qui avait adopté une allure rapide et se retournait fréquemment. Suspect, me diriez-vous ? C’est aussi ce que trouvait Molly Weasley. Mais ça ne l’étonnait pas. Après tout, elle avait été engagée pour ça. Après une énième volteface pour s’assurer qu’il n’était pas suivit (ne jamais sous-estimer les « gamines » de 21 ans, qui ont l’air bourré dans la rue), il pénétra dans une petite maison. Plus délabré, on ne faisait pas, la maison tombait complètement en ruine. Mais Molly se doutait que ce n’était qu’une apparence. L’intérieur devait être proprement aménagé, du moins assez pour un détourneur de fond travaillant à ses heures perdu au Ministère. Son père, Perceval Weasley, (Percy pour les intimes) Ministre de la Magie, leur avait confié cette mission, celle de surveiller plusieurs suspects, dont Mr Owel et déterminer qui était celui qui s’était servi dans la caisse du Gouvernement.
On aurait pu croire qu’il était facile de suivre les traces et de retrouver le coupable, après tout, n’étaient-ils pas des sorciers ? Malheureusement, rien n’avait permis de trouver une quelconque piste. Pas la moindre trace digitale, ni le moindre sort employé. Et rien pour savoir qui était derrière tout ça. A part l’instinct du paternel. Après trois suspects innocentés, Molly avait enfin retrouvé la trace du détourneur de fond. Et sans l’aide de Fred, pour une fois. Une lueur de satisfaction passa dans ses yeux noisette. Il ne restait plus qu’à forcer sa maison pendant qu’il serait au travail, rien de plus facile. Remettant une mèche de cheveux auburn derrière ses oreilles, elle se remémora l’emploi du temps de son suspect et transplana à l’agence pour faire son rapport.
Fred Weasley soupira. Ça faisait maintenant trois-quarts d’heure que Molly aurait dû rentrer. Son suspect devait rentrer chez lui aux alentours de 22h45, et il était presque minuit. Bon d’accord, il était 23h32. Il n’empêchait qu’elle aurait dû être arrivé, avoir écrit son rapport et l’avoir réveillé pour qu’ils rentrent chez eux. Au lieu de ça il commençait à se ronger les ongles. Après tout, c’était quand même un métier à risque. Molly aurait pu tomber sur une victime (ou plutôt un coupable) d’une enquête et se retrouvait peut être morte dans une ruelle sombre et dégradée. Ou elle s’était faite enlevé. Ou bien … Fred détestait s’inquiéter. Il préférait passer pour l’insouciant de service, celui qui mordait la vie à pleine dent et s’amusait d’un rien. C’était un peu son caractère, d’ailleurs, mais ce n’était pas totalement la vérité. Après tout, il était détective, alors il en avait vu passé des choses difficiles. Entre les meurtres à résoudre (on ne faisait pas souvent appel à eux pour ces cas-là, sauf quand la famille de la victime s’en mêlait, ou quand les Aurors ne trouvaient vraiment aucune piste), les adultères à dévoiler, les fraudes à exposer, la vie n’était pas rose tous les jours. Mais il aimait ça, ce sentiment qu’il frisait le danger sans être totalement dedans. Il lui courait après, mais ne le rattrapait que rarement. Il regarda encore sa montre et se leva. S’il fallait attendre, autant le faire avec un bon café. Alors qu’il lançait la machine en route (manuellement, comme ça, ça lui occupait les mains), un gros CRACK se fit entendre. Il soupira de soulagement et se retourna.
-Eh bien ! T’en as mis du temps.
-Désolé, mais il est sorti plus tard que prévu, et en plus il s’est fait accosté par un abruti qui lui …
-Molly, pourquoi as-tu une bouteille de Whisky-Pur-Feu dans la main ?
La voix de Fred s’était faite froide. C’était l’une des règles, ne jamais boire pendant les heures de travail, ça pouvait être dangereux. Si jamais elle avait trainé dans un bar et l’avait fait attendre pour ça, elle allait le regretter.
-Couverture, cousin. Tu sais, la fille bourré qui recherche sa maison dans les quartiers paumé sans qu’on la remarque, parce qu’elle chante à tue-tête et qu’elle ne peut décidément pas être en train de prendre les gens en filature, et bah c’est moi.
Fred esquissa un léger sourire, qu’il tenta d’effacer avant que sa cousine le remarque.
-Trop tard, je l’ai vu. Avoue que c’est la couverture parfaite !
-J’espère pouvoir te voir comme ça un jour. Mais pour en être sûr, je me chargerais de te faire boire. Comme ça tu pourras être sûr d’avoir l’air naturel, avec une réelle expérience.
Molly secoua la tête, amusée. Elle savait qu’il s’était inquiété, même s’il ne l’avouerait jamais à personne. Elle s’approcha de lui et l’embrassa sur la joue.
-Rêve Freddy, rêve, parce que je ne te laisserais pas faire. Maintenant bois ton café et laisse-moi faire mon rapport.
La jeune fille s’installa à son bureau pendant que son cousin finissait de faire le café. Il s’installa face à elle et sirota sa tasse en l’attendant. Personne, en les regardant, n’aurait pu imaginer qu’ils étaient cousins. Si Molly avait hérité de la légendaire tignasse rousse, un peu moins étincelante que les générations d’avant, Fred, lui avait surtout hérité de sa mère, de ses cheveux noirs et de sa peau métisse. Il arrivait souvent que, pour empêcher un prétendant un peu trop insistant ou une petite copine un peu trop possessive, les deux cousins se servent de leurs différences physiques pour se faire passer pour un couple. Mais généralement, cela finissait par la main de Molly sur la joue de Fred.
Ça ne les empêchait pas de s’adorer. Il n’avait jamais été plus proche l’un de l’autre que des autres membres de la famille, durant leur enfance, mais leur passion pour les énigmes les avaient rapproché, à tel point qu’il avait maintenant du mal à se voir comme de simples cousins. Il est vrai qu’être un Weasley n’était jamais simple, surtout quand il s’agit de la famille, mais maintenant, leur lien ressemblait plus à celui de Rose et Albus qu’à cette dernière et Louis, par exemple. Non pas que Rose n’aimait pas Louis. Seulement, elle préférait Albus, pour des raisons évidentes, la principale étant qu’ils avaient le même âge. Molly et Fred, eux, se voyait presque comme un frère et une sœur. Ils ne s’embarrassaient plus de courtoisie pour faire passer leurs message. C’était d’ailleurs très souvent le cas lorsque Molly traversait le couloir de l’immeuble pour aller toquer à l’appartement de Fred et lui proposer de manger avec elle. L’état dans laquelle elle retrouvait la pièce l’horrifiait toujours autant et elle n’hésitait pas à le faire remarquer à son cousin.
Fred pensait à tout ça en souriant. La veille encore, elle lui avait crié dessus, hurlant qu’il était un véritable « porc », et qu’il aurait dû jeter ses boites de pizza depuis au moins un mois. Elle exagérait, comme toujours. Après tout, il ne les avait que depuis deux semaines et demie, et ça n’avait pas empêché sa copine de venir lui rendre visite. Bon d’accord, ça ne l’avait pas non plus empêcher de le larguer, mais les boites de pizza n’y étaient pour rien.
-C’est bon, j’ai fini.
-Pas trop tôt.
-La ferme ! T’es prêt ?
-Depuis plus d’une heure.
-Alors on y va.
Ramassant ses affaires, Molly se dirigea vers la porte. Fred sourit en la laissant passer la première, pour pouvoir fermer leur agence. Malgré tout ce qu’il pouvait dire, il aimait se chamailler avec elle, à plus de minuit dans la rue, tout en lui reprochant le fait que sans elle, il se serait couché plus tôt.
-En tout cas, se moqua-t-elle, ce n’est pas à cause de moi que tu vas te lever tôt, mais à cause de ton annonce.
-Hein ?
Elle esquissa un sourire.
-Je savais que tu aurais oublié. Demain, tu rencontres le nouveau stagiaire à 7h30, pour le briffer sur le fonctionnement et l’amener sur le terrain.
-Tu rigoles ?
-Non. Et je te rappelle que dans deux mois, on en aura un autre, de la part du Ministère.
-Ils veulent m’achever ! Quatre employés ça me suffit !
-Trois employés et une directrice adjointe, s’il te plait.
-Si ça te fait plaisir. Mais pourquoi j’ai fait une annonce ?
Elle leva les yeux au ciel. Fred avait légèrement tendance à oublier qu’ils étaient vraiment, mais alors VRAIMENT surchargé de missions. Et qu’une dizaine se trouvait mise en suspens parce que personne ne pouvait s’en charger.
-Réfléchis, avec un peu de chance ça te reviendra. Mais j’avoue que je ne parierais pas la-dessus.
-Misère ! s’exclama Fred. Attends 7h30, tu dis ?
-Ouaip Monsieur.
-Shiote ! Ça veut dire que je ne vais dormir que 6h30 ?
-Non. Entre 5h et 6h. Tu dois être là-bas à 7h30 pile.
-Shiote, répéta-t-il. Molly je te déteste. T’aurais vraiment pas pu rentrer plus tôt ? Ou me le rappeler hier, ça m’aurait évité de me coucher à 4h. Je vais mourir demain !
-Je passerais dans ta chambre à 7h20 pour te sortir du lit, alors ne te plains pas.
-J’aurais jamais cru qu’un jour je pourrais râler parce que le business marche, marmonna-t-il, pendant que Molly éclatait d’un rire cristallin.
Et c’est dans la joie et la bonne humeur qu’ils arrivèrent devant leur immeuble, sans avoir remarqué la présence discrète qui les observait à quelques mètres de là.