Alors que mon réveil ne cessait de m’arracher les tympans, je me surpris à plaquer contre mes oreilles le coussin gigantesque que je tenais.
On était le 1 septembre 1977 ! J’entrais en septième année à Poudlard et pour couronner le tout, j’avais été nommée Préfète-en-Chef ! Et je restais là, dans mon lit, allongée, le réveil hurlant au lieu de me lever avec un dynamisme qui aurait ramené à la vie ce bon vieux Binns ?
Je réussis, grâce à une volonté surhumaine, à arrêter ce fichu réveil. Je retirai mon coussin de mon visage et soupirai en regardant le plafond.
Tout avait changé. Je n’étais plus celle que j’étais. La Lily Evans d’autrefois avait perdu son innocence. Le lys avait fané depuis ce terrible jour. Le 28 décembre1976.
Je secouai ma tête en me redressant. Ça n’était pas le moment de se laisser abattre. J’avais fait une promesse à mon père il y a tout juste un an, alors que je m’apprêtais à passer la barrière magique pour ma sixième année.
- Promets-moi de vivre pleinement, mon petit lys, m’avait-il dit, d’un ton affectueux mais le regard grave.
- Bien sûr, papa, avais-je répondu, pourquoi me poses-tu la question ?
- Ton monde est le nôtre, Lily. Ça a toujours été une évidence pour nous. Peut-être, n’y avons-nous pas notre place mais notre petite fille, elle, y est. Et on t’y protégera, malgré les temps sombres qui courent.
Je l’avais dévisagé sans comprendre. Comment pouvait-il savoir pour la menace qui planait sur notre monde depuis que Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom montait en puissance ? J’avais fait particulièrement attention à ce que mes parents ne sachent rien pour ne pas les inquiéter.
Pourtant, j’ai fini par lui promettre de vivre. De vivre réellement. Je ne pouvais donc pas faillir à cette promesse. Pas aujourd’hui.
Après l’attaque à Cokeworth, j’étais retournée à Poudlard où j’ai difficilement remonté la pente au fur et à mesure. Il était bien plus facile de se morfondre que d’avoir le courage de faire son deuil. Mais j’étais une Gryffondor. L’orgueil était ma ligne de conduite. Et avec l’aide de mes deux meilleures amies, Mary MacDonald et Alice Hodgkins, j’ai réussi à accepter leurs pertes.
Je me résolus finalement à sortir du lit et je me dirigeai vers la salle de bains de mon petit appartement située en plein la banlieue moldue de Londres.
Une demi-heure plus tard, je sortis fraîchement lavée, une serviette nouée sur la tête et une autre, bien plus grande, qui couvrait mon corps mince.
Je m’habillai à la hâte avec les vêtements que j’avais prévu la veille : jean, blouse blanche et veste bleu marine. J’épinglai mon insigne sur cette dernière avec un sentiment de fierté nouveau.
Je séchai mes cheveux à l’aide du sortilège adéquat et décidai de les laisser au naturel. Ce qui revenait à laisser mes cheveux ondulés tomber délicatement dans mon dos.
Je mis ma montre et constatai qu’il était déjà presque 10h. J’allais être en retard si je ne me dépêchais pas un peu plus !
J’avalai un rapide bol de Kellogg ‘s tout en pestant contre moi pour avoir décider de me lever à neuf heures !
Tandis que je faisais ma vaisselle, ma chouette vient se poser sur l’appui de la fenêtre par laquelle elle était partie, deux heures plus tôt pour aller se dégourdir les ailes avant d’être enfermée dans sa cage. Qu’elle n’affectionnait pas particulièrement, soit dit en passant.
Je fis une fois le tour de mon chez moi avant de décréter que tout était bien rangé et que je pouvais partir sans me tracasser.
Je mis Blanche dans sa cage. Je devrais plutôt dire que je l’ai forcée à y entrer. J’attrapai ma grosse valise et sortit de l’appartement en vérifiant trois fois que j’avais bien fermé la porte à double tour.
Je me rendis au garage pour pouvoir transplaner tranquillement sans Moldus pour me surprendre.
Je fermai les yeux en me promettant que cette année serait inoubliable ; c’était la dernière tout de même !
Je souris avant de sentir mon corps se tendre comme s’il passait au travers d’un long tuyau.
***
Je franchis la barrière magique et une joie immense m’envahit devant la grandeur du Poudlard Express qui se tenait devant moi.
Je retournai chez moi pour dix mois ! Mon cœur bondit dans ma poitrine.
Par Merlin, je ferai tout pour que cette année soit impossible à oublier !
J’allai donner ma malle et ma chouette au bagagiste.
En me retournant, je me heurtai à quelqu’un.
- Veuillez m’excuser, dis-je sans voir mon interlocuteur.
- - Ça n’est pas la peine de me vouvoyer, Evans, répondit une voix grave et séduisante.
- - Black, fis-je d’un ton mielleux tout en lui adressant un sourire ironique.
- - On s’est levée de bonne humeur ? Pour une fois que tu ne me cries pas après, mes oreilles ont dû mal à s’y faire, dit-il tout en joignant le geste à la parole.
- - Cette année, ça n’est pas Potter qui la première personne que je rencontre. Ce qui laisse présager que mon année sera la meilleure d’entre toutes.
- - Aie, intervient une deuxième voix en portant la main à son cœur.
- - Cependant, si c’est Sirius que tu as rencontré en premier, ça ne voudrait plutôt dire le contraire. Ta dernière année sera la pire d’entre toutes, ajouta James Potter, un sourire ironique plaqué sur le visage.
Je fis volte-face et rencontrai le regard du garçon le plus populaire de l’école. Si on fait abstraction de Sirius Black, bien sûr.
- Potter, le saluais-je normalement. Toujours dans les parages.
- - C’était une question ?
- - Non, plutôt une affirmation.
- - Je me disais bien que ça n’avait pas l’air d’une question. Répliqua-t-il, d’un ton ironique tout en regardant son meilleur ami.
- Vous ennuyez encore votre monde ? Demanda une voix grave et paternelle.
- Nous ? Fit Sirius d’un ton faussement blessé. Enfin, Henry !
- Jamais. Approuva James en secouant la tête.
L’homme qui venait d’interrompre notre gentil échange n’était, sans nul doute, le père de James Potter. Ce dernier lui ressemblait beaucoup, mêmes cheveux noirs ébouriffés, même allure, même regard flamboyant bien que le sien était bleu, même carrure. Bref, mon camarade de classe était son portrait craché sauf en ce qui concernait son visage.
Il se tourna ensuite vers moi et m’adressa un sourire bienveillant.
- Je me présente, me dit l’homme, me tirant de mes pensées. Je m’appelle Henry Potter. Je suis le père de James.
- Lily. Lily Evans. Répondis-je tout en serrant la main qu’il me tendait.
- Enchanté, Miss Evans. Fit-il en souriant avant de tourner son regard vers son fils qui lui leva les yeux au ciel.
Qu’est-ce que James avait bien pu lui raconter à mon sujet pour que son père le regarde avec un tel amusement ?
- Vous êtes incroyable ! Fit une nouvelle voix légèrement irritée, féminine, cette fois, en arrivant. Je tourne les yeux cinq secondes et voilà que vous avez tous déserter ! Vous ne pouvez pas faire ce qu’on vous demande pour une fois ?
Je regardai avec un mélange d’amusement et d’étonnement le visage de mes trois acolytes. James et Sirius avaient la mine légèrement déconfite tandis que M Potter regardait sa femme tout en lui souriant.
Visiblement, James avait la même manie que son père à sourire tout le temps. Même quand une remarque leur est faite.
- Je vous l’avais bien dit qu’elle n’apprécierait pas la blague, les garçons, glissa leur père.
- Ne faites pas le malin, mon cher. Vous les avez toujours encouragé ! Répliqua sa femme, d’un ton féroce.
- Doucement, chérie. Nous ne sommes pas seuls. Lui répondit-il, sans jamais perdre son sourire.
C’est à ce moment-là que la mère de James Potter remarqua ma présence. D’ailleurs, même moi, je me demandais pourquoi je n’avais pas pris congé plus tôt. C’est vrai, pourquoi restais-je là à parler avec deux garçons qui ont le don de m’exaspérer avec leurs bêtises ?
- Oh. Veuillez excuser mon comportement, s’excusa-t-elle.
- - Vous devez être Lily Evans, je me trompe ? Poursuit-elle, soudain beaucoup plus souriante.
- - C’est exact. Répondis-je poliment tout en haussant un sourcil en direction de Potter qui semblait trouver la couleur du train beaucoup plus intéressante.
- - Ravie de faire votre connaissance, je suis Louise Potter, la mère de James.
Louise Potter était une belle femme. Des longs cheveux châtains et bouclés, des yeux noisette que Potter avait hérités, des traits hauts, des pommettes saillantes et un sourire qui vous la rend directement sympathique. Visiblement, elle était issue d’une puissance famille de sorciers si on en jugeait par la chevalière qu’elle portait.
- Je vois que vous êtes Préfète-en-chef, me dit-elle tout en pointant mon insigne sur ma poitrine. J’en connais un qui va être ravi.
- - QUOI ? S’exclama James, en me regardant comme s’il ne m’avait jamais connue.
- - Ça n’était pas sensé être, Caroline MacLaggen de Serdaigle ? Cette fille est encore plus à cheval sur le règlement que notre chère Evans, poursuivit-il alors que Sirius éclatait de rire, son qui ressembla fort à un aboiement.
- - Non. C’est moi qui ai reçu l’insigne. Répondis-je froidement.
- - Oh, Merlin, ce bon vieux Dumbeldore est trop fort. Ça promet, rigola Sirius.
- - Votre homologue masculin n’est autre que mon fils, Mlle Evans, m’éclaira Henry Potter.
Je me figeai sur place et regardai l’autre Préfet-en-Chef d’un air ébahi. James Potter, Préfet-en-chef ? Un Maraudeur ? Ce garçon qui n’en a rien à faire du règlement ? Le seul garçon qui a écopé du plus grand nombre de retenues de toute l’histoire de Poudlard ?
- - Et bien, lâchai-je, j’espère que ça t’aidera à avoir le sens des responsabilités cette année.
Sirius éclata de rire pour la deuxième fois en même pas deux minutes. Les parents de James s’autorisèrent un sourire alors que leur fils me toisait d’un œil mauvais.
- - Demande toi un peu pourquoi j’ai eu l’insigne alors que tu t’obstines à me prendre pour un sale type, répliqua-t-il, piqué.
Je dois admettre qu’il n’avait pas tort. Bien qu’il n’avait pas arrêté de me demander de sortir avec lui en cinquième année, je dois avouer que l’année dernière, il s’était calmé. Notre « relation » s’était améliorée d’ailleurs ; j’avais arrêté de lui hurler dessus à chaque occasion. De là, j’avais commencé à regarder James d’un autre œil. Il était d’une fidélité sans nom, avait un sens de l’amitié hors du commun et un esprit vif. Lorsque j’ai perdu mes parents, les Maraudeurs sont les seuls qui n’ont pas changé leur comportement vis-à-vis de moi, tout comme Mary et Alice.
- Bon, je vais aller voir après Mary et Alice. Je te retrouve dans le wagon pour les préfets, dis-je à l’adresse de mon homologue.
Ce dernier se contenta d’hocher la tête sans rien ajouter de plus. Je n’y comprenais plus rien, James Potter, susceptible ? Pourtant, c’était bien le dernier à prendre la mouche !
- Ravie de vous avoir rencontrer, M. et Mme Potter, ajoutai-je poliment en me tournant vers eux.
- Henry, je préfère.
- - Vous pouvez nous appeler par nos prénoms. Vous restez à Poudlard pour les vacances de Noël ? Me demanda Louise Potter, gentiment.
- - Oui, je ne reviendrai qu’à la fin de l’année.
- - Vous ne voulez pas venir passer les vacances de Noël avec nous ?
- - Maman ! S’exclama James, le regard ahuri.
- - Ne me parle pas sur ce ton, mon cœur. Et puis, vos amis viennent bien eux. Pourquoi pas Lily ?
- - Je vais y réfléchir, Louise, répondis-je mal à l’aise de l’appeler par son prénom et d’avoir reçu une telle invitation.
Je leur offris un dernier sourire avant de m’éclipser. Ouf ! Pourquoi avais-je soudain si chaud ?
- Tu m’as l’air bien gênée, fit une voix à côté de moi que je reconnaissais directement.
Je me tournai vers elle et je pris ma meilleure amie dans mes bras. Ça faisait du bien de se retrouver ! Même si la dernière fois qu’on s’était vue, c’était deux jours auparavant sur le chemin de Traverse.
- Je commence par où ? Dis-je en riant nerveusement. Le fait que je vienne de rencontrer les parents de Potter ? Que ce dernier est le Préfet-en-Chef ? Ou que je viens de recevoir une invitation pour passer les vacances de Noël chez eux ?
- - Eh bien, l’année commence fort ! Se moqua Mary, tout en éclatant de rire.
Je lui assénai une petite tape sur le bas en lui demandant de ne pas se moquer mais elle continua à me sourire de façon ironique. Mary était une superbe jeune fille. Elle avait des cheveux châtains clairs, des yeux bleus et un physique à en faire jalouser plus d’une. Elle était d’ailleurs poursuiveuse dans l’équipe de Gryffondor, aux côtés de James Potter et de William Grant. Du coup, elle était presqu’aussi célèbre que les Maraudeurs.
- C’est bien ce que je pensais, fit une voix amusée en arrivant à notre hauteur. Le rire de Mary s’entend jusqu’à l’autre bout du quai.
- - Alice ! M’exclamai-je, heureuse tout en la prenant dans mes bras.
- - Salut, Lil’s ! Salut Mary !
Alice Hogkins était discrète, légèrement maladroite, qui me ressemblait beaucoup. Tout comme moi, elle était studieuse, intelligente et n’appréciait pas d’être le centre de l’attention. Pourtant, malgré son caractère, Alice était douée dans plusieurs cours comme la défense contre les forces du mal, la métamorphose ou encore les potions. Elle envisageait depuis des années de devenir Auror et donnait tout pour pouvoir réaliser son rêve. Il n’existait pas plus déterminée et têtue qu’Alice.
- Allez, venez, il est temps de monter dans le train, leur dis-je.
En traversant le Poudlard Express à la recherche d’un compartiment, nous discutions joyeusement sur ce qu’elles avaient fait de leurs vacances. Mary avait parcouru l’Angleterre afin de se renseigner sur le Quidditch et avait une information des plus croustillantes à nous révéler - mais pas question de le dire maintenant, on allait devoir attendre. Alice, pour sa part, avait passé ses vacances à découvrir quelques pays d’Europe, comme la France ou l’Italie.
- Il n’y a que les Maraudeurs dans celui-là, me résignai-je, tous les autres sont pleins. Et puis, Potter et moi devrons vous quitter donc autant que vous passez le trajet avec des personnes avec lesquelles vous vous entendez bien.
- - Y a que toi qui ne t’entend pas avec eux, tu sais, me dit Alice.
- - Encore faut-il qu’elle le veuille bien, ajouta Mary, un léger sourire en ouvrant le compartiment.
- - Alors, les filles, on veut passer le trajet avec les garçons les plus cools de Poudlard ? Dit Sirius, en nous regardant entrer.
- - Pour ma part, je m’en passer, répondis-je en lui souriant, je suis venue chercher Potter. Il faut qu’on aille dans le compartiment réservé aux préfets.
- - D’accord, me dit le concerné, en se levant. Je te suis.
- - Tu es Préfète-en-Chef, Lily ? Se réjouit Remus Lupin, le seul des Maraudeurs que j’affectionnais particulièrement.
- - Oui, lui répondis-je chaleureusement.
- - Félicitations ! Je t’étais sûr que tu l’aurais.
- - Merci, Remus. Je suis désolée de devoir passer en un coup de vent mais je te promets qu’à Poudlard, je rattraperai ça et tu me raconteras tes vacances.
- - Sans problème, Lily.
- Je regardai James me fixer d’un drôle d’air avant de lui demander :
- Tu es prêt ?
Il hocha à nouveau la tête, sans m’adresser la parole.
Je le regardai, surprise. Qu’est-ce qui n’allait pas chez lui ?
Espérons que Dumbeldore ait fait un bon choix en nous mettant ensemble. Sinon, les deux Préfets-en-Chef qui passent leurs temps à se disputer, on va perdre toute crédibilité !
- Oh ! Attendez avant de vous en aller ! James, j'avais une question ! S'écria Mary.
Tout le monde se tourna vers elle, les sourcils levés, pourquoi était-elle si excitée ?
- Je t'écoute, fit celui-ci, en lui souriant amicalement.
- Cet été, j'ai visité l'Angleterre de fond en comble, et je suis passée dans toutes les villes où le Quidditch a laissé sa marque. Vous auriez dû voir ça ! il y avait même une salle à Oxford avec les portaits de ceux qui ont inventé le Quidditch et toutes leurs règles, les différents prototypes de souaffle, et..
- Mary, l'interrompit James, viens en au fait.
- Ah oui, désolée, je m'emballe encore, dit-elle d'un ton excité.
- Ta famille a fait fortune dans le commerce de Souaffle ! S'écria-t-elle les yeux brillants et le sourire victorieux.
- C'est exact, répondit son capitaine, mon arrière-arrière-arrière grand-père a commercialisé le premier souaffle. Ensuite, chacun de mes ancêtres s'est retrouvé à la tête de l'entreprise familial et aujourd'hui, c'est un cousin éloigné qui a reprit l'entreprise. Mon père voulait être Auror.
- Pas étonnant alors que tu sois le meilleur ! Ria Alice. Si tu descends du tout premier gars qui était assez fou pour concevoir le premier souaffle !
- Wouaw, Cornedrue, je l'ignorais, fit Remus, admiratif.
- Je sais, j'ai tenu ça secret longtemps. Mais bon, comme vous venez à Noël chez moi, on en saurez un peu plus sur la famille Potter. Enfin, à part Patmol bien sûr.
- D'accord, moi, je viens direct ! S'enthousiasma Mary. Et Lily aussi ! Une invitation par les parents d'un ami, ça ne se refuse pas !
Je restai bouche bée un instant. Bien sûr, Mary avait toujours fait son possible pour nous rapprocher Potter et moi mais là, elle dépassait les bornes.
- Mary, sifflai-je, tu n'as pas à décider pour moi. Et j'ai dit que j'y réfléchirai.
- Bon, il est temps qu'on y aille, Potter, déclarais-je en sortant.
- Je te suis, Evans.