Les hiboux avaient pris leur envol. Le professeur Minerva McGonagall observait leurs silhouettes disparaître, au fur et à mesure que le crépuscule se proclamait roi de l’horizon. La nouvelle année commençait déjà à se préparer avec comme inauguration officielle, la distribution des lettres. Les petits sorciers attendaient avec impatience ce message, synonyme à la fois d’une nouvelle aventure à venir, de rencontres mais aussi de craintes et de nervosité. Et puis, il y avait les autres, ceux qui allaient découvrir leur nature de sorciers. Minerva avait minutieusement préparé la délégation qui s’occupait de l’annonce de cette nouvelle pour le moins bouleversante. Il fallait à la fois de la pédagogie mais aussi, et surtout, une ouverture d’esprit qui manquait durant l’année précédente.
Minerva frissona. Elle avait parcouru les lettres parmi les premières années. Dix. C’était le nombre de nés-Moldus qui feraient leur rentrée cette année. Une petite fille juive, aînée d’une famille de trois enfants. Un petit garçon, Haru si elle se souvenait bien, unique fils d’une mère célibataire. Peut-être que le père était sorcier mais l’ancien régime n’aurait pas pris en compte cette possibilité, trop occupé à éliminer le plus grand nombre de nés-Moldus possible. La reprise du pouvoir par Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom avait été brève si on la comparait à sa première tentative mais le nombre de victimes, sorciers et Moldus, avait été trop grand. Il était toujours trop grand. Elle pensa à certains Gryffondors dont on avait retrouvé les corps avant qu’ils ne puissent passer une autre année à Poudlard. À cette élève de Serdaigle, brillante en Métamorphose – elle avait obtenu un Optimal à ses B.U.S.E. !- qu’elle ne reverrait plus jamais à ses cours. Et enfin, les élèves qui s’étaient battus lors de la bataille de Poudlard. Ceux-là, qui avaient péris, elle ne les oublierait jamais. Peu importait leur maison, jamais sa fierté n’avait été aussi grande que lorsque ses élèves, qu’elle avait vu grandir, évoluer, mûrir, se perfectionner, ceux-là plein d’humanité, avaient choisi de se battre pour défaire Voldemort afin de faire triompher la justice et l’égalité dans le monde des sorciers. Ce jour-là, elle ne l’oublierait jamais. Minerva se détourna de la fenêtre et s’assit à son nouveau bureau. Le plan de travail était ordonné, ne montrant que le strict minimum, à savoir une plume, de l’encre et des parchemins. On pouvait aussi observer une photo d’elle en compagnie des élèves de Gryffondor l’année où ils avaient gagné la Coupe de Quidditch. Minerva se trouvait au centre, droite comme un piquet. Autour d’elle, évoluaient des sorciers de tout âge, riant de bonheur ou pleurant de joie. Elle jeta un coup d’œil à la photo et un bref sourire apparut sur son visage. Il faudrait qu’elle l’enlève de son bureau si elle ne voulait pas qu’on l’accuse de favoritisme envers les Gryffondors. Mais la rentrée était encore loin et elle pouvait s’en délecter pour un certain moment.
Les derniers mois avaient été épuisants. Suite à la bataille de Poudlard, elle avait endossé le rôle de directrice temporaire tout en continuant à assurer ses cours afin que les adolescents puissent passer leurs examens. Certains, cachés pour échapper aux autorités, étaient revenus vers la fin de l’année et avaient dû rattraper tous les cours qu’ils avaient manqués. Puis, pendant les vacances, il avait fallu rechercher un nouveau professeur de Défense contre les Forces du Mal qui, elle espérait, allait durer plus d’une année. Trouver un nouveau professeur de Métamorphoses maintenant qu’elle ne pouvait plus occuper ce poste s’était avéré être plus compliqué que prévu– aucun ne possédait les compétences nécessaires requises à ce noble travail. Il y avait aussi Horace qui réclamait moins d’heures de cours et donc un remplaçant qui pourrait s’occuper des premières, secondes, troisièmes et quatrièmes années. Enfin, la recherche d’un professeur d’Étude des Moldus avait tout simplement été un cauchemar. Nombreux étaient ceux qui pensaient que Voldemort était encore vivant : occuper une place aussi ouvertement amical envers les Moldus signerait leur arrêt de mort. Minerva avait malgré tout persévéré et les résultats avaient enfin portés leur fruit. Elle avait été élue directrice officielle de Poudlard vers la mi-juillet et tous les problèmes semblaient résolus. D’autres apparaîtraient sans doute mais aucuns ne paraissaient insurmontables. Minerva s’accorda une petite minute de satisfaction, envahie par une fierté pour le moins inhabituelle même si bienvenue. Elle observa une nouvelle fois son bureau. C’était reparti pour une nouvelle année…