« Fred, Georges, dépêchez s'il-vous-plaît, nous partons dans les marais ! »
Molly Weasley agita sa baguette d'un geste sec auquel l'immense maison biscornue au toit de chaume répondit par la fermeture coordonnée de toutes les portes et fenêtres, en un drôle de claquement musical. La bâtisse, bien que d'aspect peu symétrique, trônait au centre d'une immense prairie herbeuse depuis plusieurs générations déjà. Ses murs en bouse de honfleur séchée ondulaient au gré du vent, sa toiture massive en pur bois de saule cogneur luttait en un grondement inquiétant, auquel fort heureusement plus aucun membre de la famille Weasley ne prétait attention.
« Oui petite maman ! » lancèrent en chœur les deux rouquins dégingandés.
La petite troupe se mit en route en direction du Sud. La progression n'était pas aisée. En ce début de printemps le sol gorgé d'eau se dérobait sous les pieds, gardant prisonnières les godillots trop grands des jumeaux. Ces derniers s'en donnaient à chœur joie pour asperger d'eau leur petite sœur Ginny, qui pour seul moyen de défense poussait de petits cris suraigus en appelant sa mère.
« Allons, allons, du calme les garçons, vous allez faire fuir les chardons sauteurs, vous savez bien à quel point ils sont craintifs ! »
« Nous y voilà » déclara Mr Weasley après quelques minutes de marche. « Je compte sur vous pour récolter un grand nombre de nénuphars à pistil d'or, nous les vendrons un bon prix pour acheter vos manuels scolaires. Et n'oubliez pas que ces fleurs sont très fragiles et détestent qu'on les regarde directement ! Si vous êtes trop brutaux, elles vous éclateront au visage.»
Toute la famille se mit joyeusement au travail. La cueillette allait bon train, quelques explosions de paillettes dorées résonnaient régulièrement.
Tout à coup un cri strident déchira l'air. Tous levèrent le nez en direction de la jeune Ginie, pétrifiée, les bras figés en l'air et la bouche grande ouverte. Un pouffement de Fred brisa le silence, et George alla retirer l'énorme crapaud gluant qu'il avait sournoisement glissé sous le col de chemise de sa sœur.
« Oh mais voilà ton prince charmant, ma belle Ginny, tu devrais peut-être l'embrasser » ricana-t-il en agitant la pauvre bestiole sous le nez de la jeune fille, qui vira au rouge écarlate.