Mais comme à chaque fois qu’elle ouvrait un livre, son esprit se détachait de son corps pour aller voir ailleurs. Se perdre dans ses pensées, se terrer dans son monde, elle adorait ça. Elle appuyait sur « off » et son esprit se coupait de tout, s’évadant ailleurs, se plaisant à vagabonder au gré de ses envies.
Et à ce moment précis, elle était très loin de Poudlard, très loin de l’écosse… Elle était chez les siens. Le Clan McKinnon au complet lui tenait compagnie.
Erin était douée, elle faisait partie des meilleures élèves de sa promotion. Mais elle devait reconnaître qu'elle avait toujours été bien entourée, ayant toujours eu d'excellents exemples à suivre.
Toute petite déjà, elle avait pris exemple sur ses aînés :
Thomas McKinnon, d'abord. Capitaine et attrapeur de l'équipe de quidditch de Serdaigle, de sept ans plus âgé qu’elle. Thomas, le séducteur de ses dames. Avec lui, les petites amies avaient défilé très tôt. Beau, blond aux yeux bleus, musclé et une tête bien pleine, il avait su très tôt jouer de ses charmes. La noblesse irlandaise des McKinnon se conjuguait avec la force des bûcherons écossais, dont était issue la famille de Vesta Craig, leur mère. Craig… Un nom bien porté signifiant en gaélique, rocher. Oui ! Thomas était un roc.
Puis Marlène, poursuiveuse de la noble maison de Gryffondor, de cinq ans son aînée. Cette dernière tenait plus du côté de son père. D’une beauté plutôt ingrate, elle avait su très tôt se démarquer de par son agilité et sa souplesse. Elle grimpait sur les manèges les plus hauts, à même ses mains, sans assistance, sous le regard effaré de sa mère et les encouragements plein de fierté de son père. Une fleur qui s’était épanouie à l’entrée à l’âge adulte, en s’assumant. Aujourd’hui, elle était une jeune Londonienne accomplie : chef d’entreprise, femme d’affaires, elle savait où elle allait et ce qu’elle voulait. Et si parfois l’ambiance de la fête foraine lui manquait, celle de son Night-Club prenait rapidement la relève. Et un coup de transplanage et elle se retrouvait au milieu des siens, quand ce n’était pas Thomas ou un de ses cousins qui venait faire la fête dans son antre.
Oui, Erin les idolâtrait. Elle suivait leur trace avec fierté. Les McKinnon étaient répartis en fonction de leur qualité, sans jugement sur aucune des maisons. Le courage, la ruse, l’intelligence et le goût du travail. Tout était réuni dans leur petite communauté. Mais il le fallait bien, pour que le Pays des Merveilles reste en haut du classement des lieux de fête et de vie de Grand Bretagne. Des manèges toujours à la pointe de la technologie moldue, et des structures où se mêlaient l'illusion et la magie… Le tout avec accord du Ministère de la Magie et sous la surveillance accrue du département du détournement des objets moldus.
Quatre maisons, tout autant de qualité. Mais la petite Erin avait très tôt développé son sens du courage.
Pourtant ce soir-là, la veille de son entrée à Poudlard, elle était pleine d’angoisse. Le feu de camp était allumé, devant la caravane familiale, mais il ne la réchauffait pas…
- …31 Août 1971…
L’enfant de onze ans sursauta quand son frère attisa le feu d’un coup de baguette. Majeur, il ne se gênait pas pour user de la magie.
- Allons ! Ne panique pas ! Je suis sûr que tu accompliras l’épreuve de sélection avec brio. Aucun McKinnon n’a jamais échoué, ça ne va pas commencer par toi.
- Ça, c’est faux ! répliqua Marlène en prenant place à leurs côtés. L’oncle Erbert a échoué.
- Qui ça ? questionna l’enfant, craintive.
- Et oui… Qui ça ? Après avoir échoué, il a été banni de la famille, plus personne ne voulait le connaître. À onze ans, il s’est retrouvé exclu, à la rue… Cracmol qu’il était ! - Le ton de la voix de Marlène était parti dans le dramatique - Mais t’inquiète ! Tu y arriveras. - Elle fronça les sourcils, plantant son regard dans celui de sa benjamine. – Affronter un dragon, ça ne te fait pas peur ?
- Un dragon ? Erin cilla, choquée.
- Oui ! argua Thomas. Moi j’ai affronté un « Magyar à pointes » ! J’ai failli perdre un bras.
- Moi c’était une « Couleuvre des Montagnes ». Elle était magnifique, avec des reflets légèrement arc-en-ciel ! J’ai eu du mal à l’affronter mais j’ai réussi. La pauvre… Je l’ai gravement blessée…
- Mais… Mais… vous plaisantez là ?
- Pas du tout, répliqua Thomas, le plus sérieusement du monde. J’espère que tu as bien potassé ton manuel de sortilège de défense et d’attaque. En fonction de ceux que tu utiliseras, tu seras répartie. Le mieux c’est de l’aveugler !
- Non ! Brûle-lui les ailes, ça l’empêchera de voler. Il ne pourra plus rien contre toi, ajouta Marlène.
La petite Erin déglutit, sans trop savoir si elle devait y croire.
- Mais non… je veux dire, je n’ai pas le droit de pratiquer la magie, et je ne veux pas faire de mal à un dragon.
Thomas soupira alors.
- C’est dommage… Mais bon, je suis sûr que l’oncle Erbert voudra bien te loger quand tu reviendras de Poudlard, demain soir… son adresse doit se trouvait quelque part.
- ÇA SUFFIT VOUS DEUX !!!
Une voix forte et bourrue et les deux aînés se figèrent comme deux images moldues, tout en se lançant un regard très amusé. Vulcain McKinnon se cala devant sa benjamine. Une forte carrure, un regard sévère qui s’adoucit aussitôt, plein de tendresse.
- Tu veux savoir ce qui t’attend réellement ?
L’enfant acquiesça de la tête, sachant qu’elle pouvait faire confiance à son père, contrairement à ses aînés dont le passe-temps favori était de lui gâcher la vie. Vulcain leva la main dans un grand geste, attrapa son couvre-chef et lui posa sur la tête. Elle tressaillit, pétrifiée, attendant la suite mais rien…
- Un chapeau ?
- Non ! Pas un chapeau ! LE choixpeau ! précisa le père de famille. À la fondation de l’école, les quatre fondateurs se sont demandé comment répartir équitablement les élèves. Fallait-il leur laisser le choix de leur maison ? Était-ce à eux de sélectionner les enfants qui rejoindraient leur rang ? Non ! Il leur fallait une solution équitable, sans préférence, sans possibilités de tricher. Et le grand Godric Gryffondor a proposé d’enchanter son propre chapeau et de lui confier cette charge. Chaque fondateur a mis un bout de son esprit pour l’aider dans sa tâche. Godric Gryffondor...
- Si vous allez à Gryffondor, vous rejoindrez les courageux, les hardis et les plus forts, récita alors fièrement Marlène, jeune lionne de cinquième année.
- Rowena Serdaigle !
- Si vous êtes sage et réfléchi, Serdaigle sera votre ami, récita cette fois Thomas, qui venait de finir ses études dans cette noble maison.
- Helga Poufsouffle…
- Si à Poufsouffle vous allez, comme eux vous serez juste et loyal, ceux de Poufsouffle aiment travailler et leur patience est proverbiale, récita la mère de famille qui avait eu l’honneur de faire partie des jaunes et noir.
- Et enfin, Salazar Serpentard, pour les plus malins et ingénieux.
- Personne n’a été à serpentard ?
- Si, mes parents, confia le père de famille. Ils ont arboré leur blason avec fierté. Alors rassure-toi, ma belle. Le choixpeau saura parfaitement où te répartir pour que tu puisses briller parmi le monde de la magie.
- Évite quand même serpentard, argua Thomas. Cette maison n’est plus ce qu’elle était…
- La maison serpentard est tout à fait honorable, répliqua Vulcain McKinnon.
- Plus aujourd’hui, papa. Les Black, les Lestrange, les Carrow, les Dolohov, les Malfoy… Ils l’ont pourri de l’intérieur, répliqua Marlène, sous l’acquiescement de son frère. Les familles de sang-pur y font leur loi, et nous, on n’appartient pas à leur monde. Alors, évite cette maison !
Le regard du père de famille se fronça légèrement, sans rien ajouter. Un murmure commençait à s’élever du monde de la magie, un murmure annonçant un sombre présage. Il sourit à sa benjamine, rassurant.
- Peu importe ta maison, tu y brilleras, j’en suis sûr. Allez ! Tout le monde au lit. Demain, on se lève tôt.
- Non, pas moi, répliqua Thomas, sous le regard de la plus jeune de ses sœurs.
- Tu ne seras pas là ? Demain ? à la gare ?
- Non, pour une fois que je n’ai pas à me lever…
- Tu viendras avec nous ! ordonna le père de famille, d’une voix sans appel. On était tous là pour ta rentrée à Poudlard, tu seras là pour ta sœur.
Thomas blêmit, avant d’acquiescer doucement de la tête, sous le regard narquois de sa benjamine.
- En fait, tu peux être majeur et diplômé, devant papa, tu restes un gamin de cinq ans.
Erin sourit narquoise avant de regagner sa petite chambre.
Et en effet, le choixpeau n'avait pas hésité longtemps avant de la répartir dans la maison des rouges et ors. Quand elle s'était avancé dans l'allée centrale, perdue parmi les nouveaux, sous le regard plein de curiosité des élèves déjà présents, elle n'avait croisé que le regard de Marlène. Elle l'avait vu murmurer à ses amies : « c'est ma petite sœur », elle avait vu la fierté de prononcer ses mots. Dans le train, elle lui avait promis que, peu importe sa maison, elle serait toujours là pour elle. Mais c’était avec la plus grande des fiertés que la petite blonde de onze ans s’était assise parmi les gryffondors, Marlène applaudissant plus fort que les autres.
Elle avait rapidement fait connaissance avec une petite rousse, totalement perdue dans ce monde. Lily était née-moldue et elle appréhendait de vivre et de grandir ici, loin de sa famille. Alors elles s’étaient promis d’être des sœurs de courage l’une pour l’autre, d’être toujours là. Elles s’étaient toujours soutenues, dans tous leurs projets. Quand la rousse était devenue préfète, elles avaient fêté ça « Au pays des merveilles », quand la blonde avait été admise dans l’équipe de quidditch, elles avaient fêté ça au Pré-au-Lard, devant une bonne bièraubeurre.
Mais deux ombres avaient terni le beau tableau idyllique de leur amitié : Severus Rogue et Sirius Black. Aucune ne supportait le meilleur ami de l’autre. Elles s’étaient éloignées, elles s’étaient séparées. Mais là où la blonde avait trouvé du réconfort auprès des Maraudeurs, auprès de ses amies, des autres rouge et or, Lily, elle, s’était retrouvé isolée, mise de côté, les autres n’acceptant pas cette amitié avec le Serpentard.
Erin avait essayé d’être là, de la défendre, mais sans y parvenir, n'acceptant pas non plus. Comment défendre ce que l'on ne comprenait pas ?
Et puis il y avait eu ces deux événements tragiques : l’attaque de Mary par un groupe de Serpentard. La jeune fille refusait d’en parler, refusant de dire ce qu’elle avait vécu, dans la mesure où elle s'en souvenait. Elle avait comme un blocage sur cet événement. Mais elle avait passé deux semaines à Saint Mangouste, pour se reposer, pour reprendre ses esprits… oublier ce dont elle ne se souvenait pas. Ses parents avaient failli ne pas la laisser revenir.
Et ensuite, l’épisode des B.U.S.E.S : l’acte de non-retour de Rogue, cette insulte et Lily qui comprenait enfin qu’elle était sur la mauvaise route, dans le mauvais camp, qu'il n'y avait rien à sauver chez le vert et argent.
- Et aujourd’hui ?
Les lionnes formaient un groupe très soudé, avec quelques pièces rapportées : Karine Vance et Pandora Deligth traînaient souvent avec elle. Elles étaient toujours là les unes pour les autres.
La jeune fille sursauta, revenant dans son présent. Elle tourna la tête vers un brun aux gris qui avait été un temps son petit-ami. Elle lui sourit. Le jeune homme avait un air très concentré, les yeux sur un parchemin.
- J’ai besoin de ton aide.
- Dis-moi…
- Il faut que tu lises ce devoir et que tu m’aides à trouver une faute d’orthographe.
La blonde haussa un sourcil, prenant le parchemin dans les mains.
- C’est le tien ?
- Non, celui de Remus. Il a fait une faute d’orthographe et m’a mis au défi de la trouver. Sauf que je l’ai lu deux fois et je ne la trouve pas. J’ai besoin de ton œil de lynx, cet œil d'attrapeuse qui ne quitte jamais le vif d'or des yeux, malgré sa vitesse, malgré sa minuscule taille, malgré les cognards qui foncent sur elle, malgré....
La jeune fille plongea alors le nez dans ce parchemin, écoutant à peine le beau parleur. Ce baratin, elle le connaissait déjà.
- Ça va, épargne ta salive. C’est quoi le but du jeu ?
Ils avaient de drôle de lubies les maraudeurs. Elle leva les yeux vers le brun et face à cette petite lueur qui naquit dans son regard et ce petit sourire en coin, elle secoua la tête.
- Je ne veux pas savoir.
- Vaux mieux pas, non ! plaisanta-t-il, amusé. Bon tu trouves ? râla-t-il, avec impatience.
- Hey ! Il fait trois pages, je commence juste…
Un sac se posa à côté d’elle. Elle leva alors les yeux vers une jolie rousse.
- Salut. Vous faites quoi ?
- Mêle-toi de ta vie Evans, répondit le fils Black, d’une voix acerbe.
La préfète posa les yeux sur sa meilleure amie, se demandant alors pourquoi elle la vouvoyait… Soit reprenons !
- Tu fais quoi, Erin ?
- Je cherche une faute d’orthographe dans le devoir de Remus…
Lily se pencha aussi sur le parchemin, observant la suite de mots de pluriels, de singuliers, de sujets, de verbes et d’accords par dizaines.
- Là ! Il a mis un sujet au pluriel et le verbe est au singulier, déclara–t-elle.
Son œil de lynx était bien plus rapide et efficace que celui de la blonde. Mais aucune réaction de la part du jeune homme, qui releva les yeux sur sa meilleure amie.
- Alors ? Tu trouves ?
Erin sourit alors, voyant la rousse lever les yeux au ciel et se détourner d’eux.
- Là ! désigna-t-elle. Il a oublié de conjuguer le verbe avec son sujet.
Et le parchemin lui échappa des mains, le maraudeur déposant un baiser sur sa joue.
- Tu es la meilleure. Merci !
Il se releva, posant un regard étonné sur la préfète.
- Tiens Evans, ça fait longtemps que t’es là ?
Et il fila, la préfète prenant sa place, en marmonnant un « mais qu’est-ce qu’il m’énerve ! » à peine audible de la benjamine des McKinnon. Cette dernière déposa un baiser sur la joue de son amie.
- Merci ma Lily pour ton aide.
- Mais de rien, je serai toujours là pour toi, ma belle.
Oui ! Erin arrivait à concilier son amitié pour deux personnes qui se détestait plus que de raison. Mais elle n’était pas la seule. Remus vivait aussi ce dilemme et au vu de la petite lueur qui s’était logé dans le regard du brun, la relation entre les deux garçons venait de prendre une étrange tournure.
Sirius était gay. Un fait qui lui avait brisé le cœur. Elle avait été amoureuse, profondément. Ils étaient sortis ensemble en cinquième année, mais deux semaines pas plus. Il l’avait quitté, sans réelle raison. Elle en avait eu le cœur brisé. Mais il n’était pas amoureux, il avait prétendu être tombé sous le charme de Marlène. Elle l’avait pris à la rigolade, en plaisantant aujourd’hui, mais elle avait pleuré… longtemps… toute seule. Elle s’était faite une raison, redevenant son amie. Son cœur avait cicatrisé, son âme et leur amitié aussi.
Et elle avait pu réellement tourner la page l’été précédent, quand Marlène était venue la voir, un après-midi. Elle tenait le stand des auto-tamponneuses, son aînée s’étant installé dans la cabine, avec elle.
- Pourquoi tu as rompu avec Sirius ?
Elle avait haussé les épaules, sans répondre.
- Il était au San Farmin hier, il a fini dans les bras d’un bel américain aux yeux verts.
Elle lui avait annoncé sans détour, sans prendre de gant et la vérité l’avait frappé violemment, pire qu’un cognard. Sirius était gay ! Depuis toujours ! Elle n’avait été qu’un test, qu’un moyen de savoir ses préférences. Elle s’en était offusquée, mais Marlène l’avait calmée. À quinze ans, on est obligé de passer par là pour savoir ce que l’on est. Surtout quand on est un sorcier issu d’une famille aussi rétrograde que celle des Black.
- …Juillet 1976…
Erin tenait le stand de candy-floss, préparant une au fruit de la passion quand son regard se posa sur le duo le plus inséparable de Poudlard. Sirius Black et James Potter avançaient vers elle, se mettant à la file pour une gourmandise plus grosse que leur tête. Son regard se fit plus noir. Elle était agacée, très énervée. Elle exigea qu’on la remplace, arrivant au niveau des deux jeunes hommes.
- Capitaine, tu nous excuses, j’ai un truc à dire à celui-là !
Et sans attendre l’accord du capitaine, elle tira son ex-petit-ami à l’écart.
- Qu’est-ce qui t’arrive McKinnon ?
Sirius sourit, se demandant pourquoi son amie semblait si énervée.
- Tu passes de bonnes vacances ? demanda-t-elle, un peu froidement.
Elle avait du mal à accepter cette étrange situation et elle préférait crever le furoncle de suite. Elle avait besoin qu’il lui dise de lui-même, avec ses mots, sa voix. Autrement, elle n’arriverait jamais à y croire.
Le jeune homme lui adressa un doux sourire, les yeux pétillant de malice.
- Les meilleures de ma vie, si tu veux tout savoir. J’ai définitivement rompu avec les Black et j’ai migré chez les Potter.
- Je sais, le coupa-t-elle, sous un haussement de sourcil de ce dernier.
- Comment tu le sais ?
- Puisque tu es là, avec James. En temps normal, tu ne mets pas le nez dehors quand tu passes ton été chez les Black.
- En effet… Mais comment tu as su que tu pouvais m’écrire chez les Potter ? Tu savais que j’y étais avant de me voir ici…
- C’est ma sœur qui me l’a dit.
- Marlène ? Sirius cilla, un peu incrédule.
Comment Marlène pouvait-elle le savoir ? Erin inspira alors, las.
- Elle t’a vu, en compagnie de James, précisa alors la petite blonde, le cœur de plus en plus mal, une profonde envie de vomir lui prenant les entrailles.
- Ah OK.
L’explication tenait la route. Avec James, ils profitaient à fond de leurs journées, se baladant à Londres, allant assister aux matchs de Quidditch, les Faucons jouaient tous les weekends du mois de Juillet, c’était la fin de la saison et ils étaient en demi-finale. Plus que deux matchs pour pouvoir brandir la coupe de Quidditch du Championnat National d’Angleterre. Et lui, il assisterait à leur triomphe, enfin libre.
- Tu ne veux pas savoir où elle t’a vu ? questionna alors Erin, relevant son regard lagon sur lui.
- Hum… C’est important ?
- Assez… Elle t’a vu en boîte de nuit.
Le brun blêmit face à cette révélation, Non… Tout mais pas ça !
- Tu sais que ma sœur est gay. Elle a une petite amie officielle aujourd’hui - Sirius détourna les yeux, de plus en plus gêné. Ça, il le savait, mais il n’avait pas croisé Marlène au San Farmin, il en était persuadé. –Tu dois en revanche ignorer qu’elle est propriétaire d'une boîte de nuit londonienne.
Sur le coup, le jeune homme tourna vivement la tête vers elle, tel un chien limier qui venait de repérer un lapin égaré, prêt à lui bondir dessus et à lui ôter la vie. Il inspira.
- Laquelle ? questionna-t-il alors froidement, de plus en plus mal à l’aise.
- Le San Farmin. Si toi tu ne l’as pas vu, elle, elle t’a vu. Dans les bras d’un bel américain aux yeux verts à ce qu’il paraît.
Sirius détourna les yeux, posant son attention sur un des manèges les plus sensationnels du Pays des Merveilles, se mordant la joue intérieure, agacé.
- Pourquoi tu ne m’as rien dit, cracha la jeune fille, de plus en plus blessée. Quand tu as rompu, pourquoi tu ne m’as pas donné la vraie raison ?
- Parce que tu crois que c’est facile à avouer ? répliqua-t-il, froidement. Juste même à assumer ? À cette époque, je ne l’avais pas encore fait. Et si tu veux tout savoir, je ne l’ai su qu’à ma première sortie dans cette boîte. Alors ne joue pas la victime, Erin. Ça ne te concerne pas ! Marlène n’aurait même jamais du t’en parler. Elle n’avait aucun droit sur ça. C’est ma vie.
- Ta vie ? Je croyais que j’étais ton amie ! cracha-t-elle de plus en plus blessée, vexée par le si peu de considération que le jeune homme avait pour elle.
Le fils Black inspira, calmant sa colère. Il n’avait pas à s’en prendre à son amie.
- Oui… Bien sûr. Tu es et tu restes mon amie, ma meilleure amie même. Mais ne me reproche pas de ne pas t’en avoir parlé. C’est une partie de ma vie qui ne regarde que moi.
Elle releva son regard sur lui, de plus en plus blessée, les larmes commençant à lui brûler les yeux. Elle inspira, serra les poings avant de faire demi-tour et de lui tourner le dos.
- Donc en décembre, quand tu m’as séduite… Tu n’as jamais rien éprouvé pour moi ?
- Erin…
Il posa ses mains sur ses épaules, avant d’inspirer une bouffée d’air chaude, la canicule s’était abattue sur l’Angleterre. Ils avaient un bel été.
- Si, bien sûr. Je pensais éprouver des sentiments plus forts que notre amitié. Mais je n’ai pas pu me leurrer longtemps.
- Tu m’as utilisé… cracha-t-elle, pleine d’amertume.
- Arrête… Ne dis pas ça ! Tu es injuste. Marlène a eu des petits amis avant d’assumer ce qu’elle était ? Non ? – La jeune fille acquiesça doucement de la tête. – Est-ce qu’elle les a utilisés pour autant ?
- Non… Bien sûr que non… Mais…
- Sincèrement Erin, si entre nous ça n’a pas marché, c’est que les filles ne m’attirent pas. Tu es belle, intelligente, tu adores faire la fête, faire des blagues, tu es fan de quidditch. Tu veux même devenir joueuse professionnelle. Tu es la meilleure attrapeuse que l'équipe n’ait jamais eue. Tu as tout pour plaire. Tu es quasiment moi au féminin. Si ça n’a pas marché entre nous… C’est que ça ne pourra marcher avec aucune.
Erin se passa le dos de la main sur les joues, essuyant ses larmes. Elle avait le cœur brisé, une seconde fois. La première fois quand ils avaient rompu. Elle avait attendu ce moment depuis sa troisième année, depuis qu’elle avait commencé à lui trouver beaucoup de charme, depuis qu’elle avait commencé à fondre devant son regard. Elle était amoureuse. Et quand ils avaient rompu, ça avait été le drame de sa vie. Oui, Erin McKinnon était amoureuse de son meilleur ami… Et aujourd’hui, même si ça n’avait pas marché la première fois, elle prenait conscience qu’il n’y aurait jamais de seconde fois. Elle se retourna vers lui, une profonde douleur dans le regard, mais elle la chassa, un sourire naissant sur ses lèvres.
- C’est vrai ça. Je suis ta femme idéale.
- Mais je n’aime pas les femmes.
- Personne n’est parfait… souffla-t-elle.
- Bah oui, il faut bien un défaut en chacun, mais alors c’est le seul. Je n’en vois pas d’autre…
- C’est le pire de tous…
- Pas pour un bel américain.
Ce bel américain, elle le détestait déjà. Erin secoua la tête.
- Je dois y retourner. Tiens - Elle lui tendit un passe-droit.- manège gratuit pour vous.
- Ah merci, c’est sympa. – Il reposa les yeux sur elle, un tendre sourire aux lèvres - Tu m’en veux ?
- Non… Bien sûr que non. Au moins, si ça n’a pas marché entre nous, ce n’était pas de ma faute.
Et se disant, elle s’éloigna, le cœur un peu moins brisé, mais quand même en miettes.
Sirius posa les yeux sur une caravane, où James s’était adossé, attendant, les mains dans les poches, le regard rivé sur lui. Il vint à sa rencontre.
- Tu as tout entendu ?
Il acquiesça de la tête.
- Marlène n’est pas tenue au secret professionnel sur les membres qui fréquente son club ?
- À priori non, cracha le brun aux yeux gris, dépité. J’espère qu’Erin sait mieux tenir sa langue qu’elle…
- Elle est amoureuse…
- Qui ça ?
- Erin… C’est évident.
- Oui, mais ce n’est pas réciproque. Je fais quoi ? Je coupe les ponts avec elle et je perds mon amie ? Tu perds ton attrapeuse. La meilleure que l’on ait eue depuis un moment.
- En effet… Bah reste son meilleur ami.
- Je vais essayer d’être moins sexy, moins canon, moins séduisant, mais ça va être dur. Tout est à l'état naturel chez moi.
James lui donna une claque derrière la tête, le faisait taire, Sirius s’écartant dans un éclat de rire.
- Essaye déjà d’être moins idiot et moins arrogant.
- Bizarrement, je ne me sens pas concerné par ces défauts.
Il désigna le manège à sensation qui donnait le vertige rien qu’à le regarder un sourire aux lèvres.
- On se le tente ?
- Grave !
Erin revint dans son présent, dans cette salle commune, aux côtés de sa meilleure amie, le cœur serré. Elle avait tourné la page, elle avait accepté le fait que Sirius était gay, qu’elle ne serait jamais rien de plus qu’une amie pour lui. Mais parfois, comme à ce moment précis, ça faisait encore un peu mal. Sirius semblait s’assumer de plus en plus, au point d’entretenir une relation plutôt malsaine avec un autre gryffondor.
Remus… Était-il lui aussi gay ? Ce serait une étrange coïncidence quand même… Mais dans tous les cas, elle aurait préféré ne pas savoir, ne pas participer… Et si elle souhaitait à son meilleur ami d’être heureux, elle voulait être tenue loin de leurs petits jeux salaces.
- Ça va ? Lily l’observa, inquiète.
Elle acquiesça de la tête, même si le cœur n’y était pas.
- Ça fait longtemps que tu sais pour Sirius? questionna-t-elle, un peu étonnée que son amie soit dans cette confidence.
- Quelques semaines...
- Il y a quoi entre Sirius et Remus ?
La préfète ne répliqua rien. Elle n'en avait pas le droit, même si Sirius ne semblait pas faire un grand secret de l'évolution de leur relation. Face au silence de son amie, Erin baissa les yeux, son regard se posa sur le feu.
- Je le déteste… confessa-t-elle alors, meurtrie.
Cette blessure était fermée, mais il lui arrivait parfois de se rouvrir.
- Il n’a rien fait… Erin.
- Je sais, mais j’aurais tellement aimé que… qu’il ne soit pas ce qu’il est…
- Je sais bien... - Lily l’observa, peinée. Elle sourit, sachant très bien comment remonter le moral de la belle demoiselle - Je me demande ce que vous avez toutes avec lui. Il est tellement arrogant, tellement imbu de lui-même. Je suis sûr qu’il est persuadé que la terre ne tourne que pour lui et que le soleil ne se lève que pour illuminer sa journée. À mon avis, il a préféré Gryffondor à Serpentard pour prendre de la hauteur et être plus accessible pour les dieux ! Et cette façon qu’il a de croire que tout lui est dû. Il doit souffrir d'un trouble de la personnalité narcissique, si tu veux mon avis. Le meilleur en tout ! Et quand il réussit, il doit s’étonner que la gazette du sorcier ne vienne pas faire un éloge sur lui. Et puis son regard… Ce gris… Ça fait flipper non ? J’ai l’impression qui me lacère l’âme, quand il me regarde. Pire que sa langue… Il n’ouvre la bouche que pour cracher du venin. Et puis franchement, il n’est pas si mignon que ça. Quand il sera vieux et chauve, il aura beaucoup moins de charme, crois-moi.
La benjamine des McKinnon sourit, relevant les yeux sur sa meilleure amie, approuvant d’un signe de tête.
- Et je suis meilleure que lui au quidditch.
- Bien sûr ! Il n’arriverait même pas à repérer le Vif d’Or. C’est pour ça qu’il est poursuiveur, il lui faut une balle aussi grosse que sa tête pour pouvoir la saisir et s’amuser avec.
- Merci, je vais mieux.
Elle se redressa, un grand sourire aux lèvres. Lily Evans était la meilleure pour descendre Sirius Black en flèche et lui trouvait tous les défauts du monde. La blessure se refermait aussitôt. Le pansement Evans était le plus efficace contre le charme sensuel de beau brun. Elle se leva, quittant la salle commune, faisant signe à la préfète de la suivre. Une fois dans leur dortoir, en tête-à-tête, elle se tourna vers la rousse, un peu étonnée.
- Comment tu l'as su, pour Sirius ?
La préfète haussa les épaules. Remus lui avait confié mais au cours de conversation privée.
– Je l'ai su, c'est tout. Toi, tu le sais depuis les vacances d'été ? - Sous l'acquiescement de la jeune femme, elle fronça les sourcils, mécontente – Alors pourquoi tu continues de jouer avec lui ? Tu te fais du mal pour rien…
Erin cilla, un peu étonnée. Du mal ? Elle sourit alors, légèrement amusée.
– Tu crois que je suis toujours amoureuse de lui ?
– Oui... Ton petit jeu à la Noël... Tu trouves que c'est amical comme comportement ?
La blonde sourit, narquoise.
– Bien sûr ! Je profite juste de la situation, mais sans aucune illusion. J'avoue que j'ai été amoureuse, que quand il a rompu, j'ai eu le cœur brisé. Mais aujourd'hui, j'ai tourné la page, même si parfois j'ai des petites rechutes. Je sais que je n'ai jamais eu aucune chance avec lui. Et je sais qu'aucune femme n'aura jamais aucune chance avec lui. Mais ça me plaît que le reste de Poudlard pense le contraire. Et lui, ça l'aide à éloigner les soupçons. J'adore les regards meurtriers que l'on me lance quand je suis dans ses bras. Et je ne suis pas contre un peu de tendresse de temps en temps. Ce jeu de séduction est plaisant en soi-même.
– Mais...
– Rassure-toi, Lily. Je ne suis plus amoureuse. Je me dis que ma situation aurait pu être bien pire que ça. Tu sais que Marlène a mis du temps à assumer ce qu'elle était.
– Elle était fiancée, c'est ça ?
– À deux semaines du mariage. Tout était prêt, tout était fait, signé, acté. Elle n'avait plus qu’à enfiler sa robe et dire oui. Et là, PAF !!! Elle annule tout, elle avoue qu'elle n'aime pas les hommes, qu'elle préfère les femmes et disparaît. On est resté deux semaines sans nouvelles d'elle. Mes parents n'ont jamais eu aussi peur. Ça a fait un vrai scandale dans ma famille et je ne te raconte pas du côté du fiancé. Ils ont eu du mal a accepté qu'elle soit gay. C'est pour ça qu'elle a quitté le Pays des Merveilles pour Londres. Elle y a fait sa vie, assumant enfin ce qu'elle était réellement.
Lily écouta attentivement les explications de la jeune fille. C’était la première fois qu’elle se confiait sur ce passage de sa vie. Il y a deux ans, au cours de l’été, elle faisait partie des invités au mariage. Elle avait juste reçu un hibou lui signifiant que le mariage était annulé.
- Je me dis que j'aurais pu être à la place du futur marié. Que si Sirius avait refusé l'évidence longtemps, j'aurais réellement pu envisager une vie à deux, un mariage... des enfants. J'aurais pu me réveiller à deux semaines du mariage et tomber dans un véritable cauchemar. Sirius a beaucoup de défaut, mais au moins, il ne sait vivre que dans la vérité. Il n'a pas joué avec moi, il a mis fin à notre relation dès qu’il s’est rendu compte de ses préférences. Et j'ai pu tourner la page. Mais rassure-toi, je ne suis plus amoureuse. Sauf parfois, j'avoue que je rechute, mais tu es là pour me remettre dans le droit chemin. Je sais qu'un jour, je rencontrerai mon homme idéal. J'espère juste que cette fois, il sera hétéro.
- Et moins arrogant… moins prétentieux… plus sympa,… plus gentil… plus aimable.
- Ça va Lily. Je suis plus dépressive.
- Oh mais ce discours-là, c'était juste pour mon plaisir à moi, railla-t-elle, avant de s'installer sur son lit, son manuel de métamorphose dans les mains.
Erin l’observa alors, amusé. Elle sourit, plein d’ironie à son tour. Il était peut-être temps que ces deux-là fasse la paix. Car au fond, le proverbe moldu ne dit-il pas : qui aime bien, châtie bien ?
- C'est marrant ça, vous ne vous appréciez pas et pourtant, vous vous ressembler beaucoup.
En tournant une page, préfète l’abîma sous le choc de cette réplique. Elle posa un regard horrifié sur sa meilleure amie. Comment pouvait-elle dire une chose pareille ? Sur le coup, on aurait pu croire que la benjamine des McKinnon l’avait insulté.
- Moi ? Je ressemble à Black ? Ça ne va pas non ?
- Mais si, Evans, tu ne peux pas le nier. Vous avez les mêmes meilleurs amis : Remus et moi. Vous êtes courageux, vous ne vous laissez pas marcher sur les pieds, et n'avez pas peur de vos opinions. Vous allez au-devant des responsabilités.
- Je peux savoir quelle responsabilité assume Black ? À part lancer une balle dans des anneaux ?
- Il s'est opposé à sa famille. Il a renié en bloc leurs croyances, leurs idéaux, il a vu la vérité dans le flot de leurs mensonges. Comme toi, tu as vu notre monde, tu as ouvert les yeux au-delà de la barrière qui nous séparait. Je suis sûr que tu n'imagines pas une seule seconde l'enfer qu'il a vécu à chaque retour de vacance, détesté par sa famille, ses parents. Cloîtrer loin de tout. Sa mère a scellé les fenêtres de sa chambre à la glu perpétuelle pour être sûr qu'il ne s'enfuit pas. Il était même persuadé que sa famille ne le laisserait jamais revenir en seconde année.
Lily l'écouta, fronçant légèrement les sourcils. Erin lui en apprenait beaucoup sur le jeune homme, elle n'avait jamais réfléchi à ce que Sirius Black avait dû endurer juste pour avoir le droit de porter le blason des Gryffondors. La haine de sa famille, elle connaissait un peu le sujet avec sa sœur. Pétunia la détestait et elle lui faisait comprendre à chaque rencontre. Mais au moins, elle avait toujours eu le soutien de ses parents.
- Ne soit pas trop dur avec lui, il est peut-être arrogant et prétentieux, mais il a grand cœur, il est loyal et fidèle. Je sais que je peux compter sur lui. Comme je sais que je peux compter sur toi. Tu as aussi un grand cœur, tu es tout aussi loyale et fidèle en amitié.
- Hum... peut-être, mais on ne se ressemble pas tant que ça.
La blonde sourit, pleine de malice. Un jour, ces deux-là ne pourraient que reconnaître qu'ils avaient beaucoup de points communs. Une profonde amitié pourrait même les lier s’ils se donnaient la peine de mettre leur rancœur passée de côté.