VI. The good, the bad, and the fake
Le jour de l'introduction officielle des candidates au titre de Miss Fondatrice se profila rapidement, plongeant la moitié de l'école dans l'excitation la plus totale. Les candidates se présenteraient pour la première fois face au jury de l'élection et exposeraient devant l'école entière leurs programmes de campagne.
Millicent eut du mal à émerger de son lit, ce matin-là. Le dernier scarabée qu'elle avait consommé la veille avait eu des effets un peu trop intenses. Ce n'était pas la première fois qu'elle faisait un bad trip, loin de là. Cette fois cependant, l'expérience avait été particulièrement angoissante. Au lieu de noyer les souvenirs qu'elle tentait désespérément d'oublier, la drogue l'avait rendue paranoïaque et elle avait fait une crise de panique. Elle était restée prostrée pendant deux heures dans une salle de classe vide, envahie par des palpitations et des nausées horribles. Après quelques heures, elle avait finalement réussi à se relever pour regagner son dortoir.
C'était Pansy qui avait dû la secouer violemment pour la tirer de son sommeil profond. Millicent avait ouvert les yeux avec difficulté et son regard était tombé sur le visage paniqué de son amie.
« Par Salazar, Millie, tu m'as fait une peur bleue. Je commençais à croire que tu étais morte dans ton sommeil. » lança Pansy en en fronçant les sourcils, visiblement contrariée.
Millicent se releva avec difficulté. Ses membres étaient courbaturés, ses mouvements lents et hésitants, et sa bouche était pâteuse, comme chaque lendemain après ses cuites.
« Nous devons être en bas dans une demi-heure. » dit Pansy en se dirigeant vers sa commode, une fois rassurée sur l'état de son amie. « Bouge tes fesses molles. »
Trois quart-d'heures plus tard, elles rejoignaient la Grande Salle qu'on avait aménagé pour l'occasion spéciale. Sur toute la longueur de la pièce, un large podium d'un violet byzantin s'étalait jusqu'à une table au fond de la pièce, vraisemblablement celle du jury. De chaque côté du podium, des centaines de sièges s'étalaient les uns à côté des autres, formant des rangées parfaitement alignées. La plupart des chaises étaient déjà occupées.
Le panel de juges était présidé par McGonagall, et composé de quelques professeurs comme Sirius Black ou encore Severus Rogue. À en juger l'expression de son visage, ce dernier paraissait profondément ennuyé par cette responsabilité. Des juges externes avaient également été mandatés. Parmi eux, Millicent reconnut Rita Skeeter, une chroniqueuse spécialisée dans la presse à scandales.
Les candidates furent installées au premier rang, sur des sièges personnalisés où leurs noms apparaissaient.
« Qui sont ces personnes ? » demanda Tracey, en tendant la nuque pour observer le jury. « Je ne reconnais que les profs et Rita Skeeter. »
« Au bord de la table, c'est Cressida Warrington, la philanthrope la plus connue du pays. » informa Daphné sur le ton de l'évidence. « Et à côté d'elle, c'est Yolana Wilch, à la tête du plus gros fournisseur de nécessaires à potions. »
« Quelqu'un a fait ses devoirs. » commenta Pansy avec ironie.
Daphné ignora les paroles de Pansy et poursuivit :
« Et la dernière est Poppy Chapman, la CEO d'Epilvite, la marque de potions épilatoires. J'ai entendu la vieille McGo dire que c'était le sponsor officiel de l'élection, cette année. »
On entendit un raclement de gorge résonner dans toute la salle et Millicent reporta son attention sur le podium où un étudiant s'était présenté devant toute l'assemblée, sa baguette tendue près de sa nuque, pour amplifier la portée de sa voix.
« Bienvenue au lancement officiel de notre élection annuelle Miss Fondatrice, sponsorisée par Epilvite, la potion qui fera de vos poils un lointain souvenir ! Je suis Seamus Finnigan, votre hôte pour la journée. Cet évènement sera retransmis sur la radio Poudlard FM, disponible dans tout le château et Pré-au-Lard. »
On entendit des applaudissements et des sifflements parmi les élèves du public.
« Aujourd'hui, nous accueillons la crème de la crème de Poudlard. Les créatures les plus belles, les plus intelligentes et les plus populaires de notre noble école. Elles ont su vous convaincre mais sauront-elles convaincre le jury ? » continua Finnigan d'une voix dramatique.
« Il se prend vraiment trop au sérieux. » commenta Tracey, réprimant un rire.
« Notre première candidate à la couronne s'autoproclame ''La Diseuse de Vérité''. Dans son temps libre, elle aime les couchers de soleil, les piscines à débordement, les vodka-jus de citrouille et les… »
« Finnigan ! » gronda McGonagall d'une voix outrée.
« Navré Professeur, c'était écrit sur la carte. » se justifia Finnigan en montrant ses notes, l'air désolé.
Des rires s'élevèrent dans l'audience.
« Des applaudissements pour… Pansy Parkinson ! » s'écria Finnigan d'une voix tonitruante.
Pansy rejoignit le podium d'une démarche assurée, soufflant des baisers à la foule sur son passage.
« Elle est tellement dramatique. » commenta Tracey.
« Pansy, si tu étais élue Miss Fondatrice, quelles seraient tes premières initiatives ? » demanda Finnigan.
« Nous subissons trop de stress dans la vie quotidienne. Tout le monde connaît les conséquences désastreuses du stress sur la santé physique et mentale. Les maladies cardiovasculaires, un système immunitaire affaibli, sans parler des problèmes de peau, de la prise de poids et du manque de libido. » énuméra Pansy avec sérieux.
Encore une fois, on entendit McGonagall émettre une exclamation mécontente.
« Je propose qu'on fasse des changements drastiques pour améliorer notre environnement. Pour commencer, diviser le nombre d'heures de cours hebdomadaires par deux afin d'aider notre cerveau encore en développement à se reposer. Ensuite, on devrait instaurer des matières plus utiles, qui nous aideront à développer des compétences essentielles dans la vie. Du genre, savoir s'habiller sans faire de faux-pas vestimentaires, ou encore apprendre à préparer les cocktails traditionnels. Oh ! Et il nous faudrait au moins deux heures de zumba par semaine pour tonifier les fessiers et combattre notre ennemie numéro une : la cellulite. » expliqua Pansy avec enthousiasme. « Je propose aussi qu'on change totalement l'uniforme réglementaire car ce gris ardoise est probablement la cause de plusieurs dépressions saisonnières. »
Tour à tour, les candidates se présentèrent sur le podium pour présenter leur programme de campagne ainsi que leurs motivations. Tracey Davis proposa que les draps des dortoirs soient changés au moins deux fois par jour. Elle suggéra qu'on engage une équipe spécialisée à temps plein contre la prévention et le contrôle des infections, ainsi que l'instauration d'un décret d'éducation destinant à obliger chaque élève à se laver les mains au moins six fois par jour afin de réduire les risques de propagation de germes.
Hermione Granger, dans un autre registre, quémanda l'introduction de cinq matières supplémentaires au programme scolaire, des heures d'ouverture plus longues pour la bibliothèque et un système de tutorat obligatoire pour tous les élèves.
« Je pense que l'éducation est primordiale et Poudlard devrait encourager et stimuler davantage les compétences intellectuelles de ses élèves. » indiqua-t-elle.
Pansy fit mine de bailler bruyamment, ce qui provoqua des rires partout dans la pièce. Hermione rougit mais elle continua son discours, tentant d'ignorer les frasques de Pansy.
Les juges (en particulier McGonagall) ne semblèrent pas apprécier la demande de Millicent d'autoriser les drogues douces comme la poudre de Billywig à Poudlard. Ils parurent outrés par le programme de Ginny Weasley qui proposait de supprimer l'élection de Miss Fondatrice dès l'année suivante, clamant qu'il s'agissait d'un concours « stupide et ringard qui perpétuait les préjugés misogynes de notre société patriarcale. » Sans surprise, toutefois, ils semblèrent boire les paroles de Daphné Greengrass.
« Le soin aux créatures magiques est un sujet qui me tient particulièrement à cœur. La forêt interdite est remplie d'espèces en voie de disparition. J'aimerais créer un abri pour ces créatures, entièrement géré par les étudiants de Poudlard, afin qu'elles puissent vivre en harmonie avec les humains, sans quitter leur habitat naturel. » indiqua-t-elle d'une voix confiante.
Luna Lovegood fut la dernière candidate à passer. Elle proposa de créer un club pour la Diversité et l'Inclusion, afin d'encourager la richesse culturelle de l'école et des élèves.
« C'est la première fois que je l'entends dire quelque chose qui a du sens. » commenta Tracey.
Une fois tous les programmes exposés, les candidates furent conviées sous un chapiteau dressé dans le parc afin de discuter avec les membres du jury, à l'occasion d'un cocktail dinatoire. Un groupe de candidates étaient attroupées autour de la journaliste Rita Skeeter, écoutant avec intérêt les conseils qu'elle délivrait.
« J'ai moi-même été élue Miss Fondatrice en 1968. » apprit-elle d'un ton prétentieux. « Élue à l'unanimité par le panel de juges. »
Pendant l'heure suivante, elle ne cessa de parler d'elle et de ses réalisations académiques et professionnelles. Millicent, elle, resta près du bar installé pour l'occasion, où des elfes de maisons passaient parmi les invités et les candidates pour s'assurer que tous leurs besoins étaient satisfaits. Elle se sentait encore nauséeuse et ses tremblements avaient repris. Elle dût faire preuve de toute sa concentration pour rester éveillée pendant que Pansy lui parlait. Elle se concentra sur la bouche de Pansy, qui remuait sans interruption depuis le début de la journée.
« Ce n'est pas ma robe que tu portes, pas hasard ? » demanda soudainement Millie, sortant de sa torpeur.
Son amie portait une robe polo courte bleue marine qui lui rappelait exactement celle qu'elle avait dans son dressing.
« Non, nous avons probablement la même. » répondit Pansy d'un ton évasif.
Pansy se tourna ensuite vers le bar où Lavande Brown et Éloïse Midgen discutaient avec animation.
« Princesse, si tu prenais vraiment cette élection au sérieux, tu ne prendrais pas ce deuxième muffin. » lança Pansy d'un ton faussement complaisant, à l'attention de Lavande Brown. « On a déjà un calmar géant dans le lac, pas besoin d'un deuxième. »
Le visage de Brown se décomposa et elle parut sur le point de fondre en larmes.
« Tu es en forme, aujourd'hui. » commenta Millicent avec un rire.
Pansy esquissa un rictus avant de se tourner vers Éloïse Midgen. Cette dernière, réalisant qu'elle serait la prochaine à recevoir son venin, s'empressa de s'éloigner de la table.
« C'est ma stratégie. Affaiblir psychologiquement mes concurrentes. Je donne une semaine à Brown avant qu'elle ne déclare forfait. » assura Pansy avec satisfaction. « Bon, je vais voir si on peut se faire servir un peu d'alcool, cette soirée est tellement barbante. Tu viens ? »
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Hermione Granger était aux anges. Si on lui avait affirmé qu'elle trouverait de l'intérêt à l'élection Miss Fondatrice quelques semaines plus tôt, elle aurait probablement levé les yeux au ciel. Elle était toutefois heureuse d'être dans la course.
Elle était entourée de femmes toutes aussi accomplies les unes que les autres et pouvoir discuter avec elles sur des sujets impactants et profonds la ravissait.
« C'est vraiment génial, tu ne trouves pas ? » demanda-t-elle avec enthousiasme à l'attention de Ginny Weasley, à ses côtés.
Cette dernière haussa les épaules, un air d'ennui profond sur le visage. Il était clair qu'elle était irritée par tout ce qui concernait l'élection et elle ne cherchait même pas à le dissimuler.
« Tu devrais voir le côté positif – nous n'aurions jamais eu l'occasion de rencontrer des femmes aussi fascinantes. » lança Hermione.
« C'est tellement fascinant d'entendre Rita Skeeter parler d'elle-même » commenta Ginny avec ironie.
« Sauf Skeeter, je te l'accorde. » concéda Hermione en jetant un regard sévère vers la journaliste qui racontait à Padma Patil en détail son couronnement, trente ans auparavant. « Mais Cressida Warrington et Poppy Chapman ? Elle a reçu le titre de la femme d'affaires de l'année, il y a quelque mois. Elle est vraiment un modèle pour toutes les sorcières de notre génération. »
Ginny haussa les épaules, visiblement peu intéressée par le sujet et Hermione cessa d'insister. Ces derniers temps, Ginny semblait constamment d'humeur massacrante. Elle était résolue à prendre sa revanche sur Daphné Greengrass et le reste de son clan. Hermione avait rapidement réalisé que ses tentatives pour dissuader Ginny étaient vaines et elle avait finalement abandonné. Même si elles ne se connaissaient que depuis quelques semaines, Hermione avait compris que Ginny était une fille obstinée et qu'elle n'était pas du genre à abandonner lorsqu'elle se mettait un objectif en tête.
Elle balaya la pièce des yeux et son regard s'attarda sur le professeur Black qui discutait avec McGonagall et un groupe de professeurs. Elle était fascinée par l'aura puissante et confiante qu'il dégageait. Lorsqu'il s'exprimait, il capturait toute l'attention de son audience. Sirius était un bel homme, il fallait l'avouer. Même Hermione n'était pas aveugle face à son charme.
Il tourna soudainement la tête dans sa direction et leurs regards se croisèrent. Hermione baissa les yeux, faisant mine de s'intéresser à une tâche sur le sol, sentant le rouge lui monter aux joues. L'idée d'avoir été surprise en train de lorgner sur son professeur de DCFM, assez âgé pour être son père, était terriblement embarrassante.
« Miss Granger ? » entendit-elle soudainement.
Elle releva la tête et croisa le regard ténébreux du professeur Black.
« C'était un programme très intéressant que vous nous avez présenté. Très réfléchi et intelligent. » dit-il.
Hermione sentit un lutin fou faire un bond dans son estomac. Il avait complimenté son idée de campagne. Elle avait presque envie de sautiller sur place.
« C'est un sujet qui me tient particulièrement à cœur. » expliqua-t-elle. « D'autre part, en tant que Née-Moldue, je trouve qu'il est d'autant plus important de dynamiser l'éducation magique pour les personnes qui n'ont pas été élevées directement dans ce milieu. »
Elle se lança dans un long discours sur l'importance de l'éducation dans la société pour la lutte contre la pauvreté, la compréhension interculturelle, la prise de décision et la pensée critique. Le professeur Black creusa des points importants dans son argumentaire et elle fut ravie d'en débattre. Aux alentours de huit heures, elle se rendit compte que la plupart des invités s'étaient retirés.
« Je me suis emportée, encore une fois. » commenta Hermione avec gêne.
« Ne vous excusez jamais d'être une jeune femme intelligente et cultivée. » lui conseilla le professeur Black en lui adressant un clin d'œil.
Ses mots provoquèrent un sentiment de chaleur dans la poitrine d'Hermione et elle n'eut pas la présence d'esprit de trouver une réponse adéquate pour le remercier. En plus d'être une autorité dans son domaine, Sirius Black était un homme incroyablement intelligent et les discussions qu'elle avait partagées avec lui s'étaient révélées particulièrement spirituelles.
Lorsqu'il esquissa un sourire, elle ne put s'empêcher de penser qu'il était également incroyablement attirant et immédiatement, elle se sentit honteuse. Après tout, cet homme était son professeur et il avait vingt ans de plus qu'elle. Pour être honnête, elle n'avait jamais été particulièrement intéressée par les garçons de son âge – les trouvant trop immatures.
« Vous êtes toujours intéressée pour m'aider à organiser l'atelier de Défense Contre les Forces du Mal ? » interrogea-t-il.
Hermione s'empressa d'acquiescer.
« Dans ce cas, passez dans mon bureau mardi soir, à huit heures. » déclara-t-il. « Bonne soirée, Miss Granger. »
Elle l'observa s'éloigner, ne pouvant s'empêcher de réprimer un petit sourire.
Le mardi suivant, elle engloutit son dîner à toute vitesse sous les regards perplexes d'Harry, Ron et Ginny.
« Tu essaies de t'étouffer ? » demanda Ginny, arquant un sourcil.
Hermione avala la dernière bouchée de son plat, mastiquant à peine le morceau de viande.
« J'ai …J'ai quelque chose à faire. » répondit-elle finalement, avant d'empoigner son sac et de quitter la table.
Pendant une fraction de secondes, elle avait failli leur avouer qu'elle avait rendez-vous avec le professeur Black. Toutefois, pour une raison obscure elle s'était retenue de le faire. Pourquoi n'avait-elle pas dit la vérité aux autres ? Après tout, elle ne faisait rien de mal.
Elle remonta son dortoir à toute vitesse, puis se changea, enfilant un chemiser blanc qu'elle avait acheté l'été dernier et qui flattait sa silhouette. Elle laissa ses longues boucles frisées tomber sur ses épaules, se vaporisa légèrement avec son parfum et s'observa quelques secondes dans le miroir, rougissant légèrement.
Pourquoi ressentait-elle le besoin de soigner son apparence ? Était-ce pour la même raison qu'elle n'avait pas osé dire la vérité à ses amis sur ses activités à venir ? Elle secoua la tête, se détournant de son reflet. Elle était ridicule. Sirius Black était son professeur. Certes, il l'avait déjà complimentée à deux reprises mais cela ne justifiait pas qu'elle se fasse des films aussi ridicules.
Durant tout le chemin menant au bureau du professeur, elle se mordit nerveusement la lèvre.
« Détends-toi, Hermione. » pensa-t-elle en arrivant devant la porte.
Elle frappa contre le bois brun et attendit patiemment, les battements de son cœur s'accélérant soudainement. Pourquoi était-elle si nerveuse ?
Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvrit, laissant apparaître le visage séduisant du professeur Black.
« Miss Granger, entrez. » l'accueillit-il en souriant.
Lorsqu'elle entra dans le bureau, passant devant lui, elle put sentir son parfum – un effluve aux accents épicés qu'elle trouva entêtante. Incertaine de la conduite à tenir, elle resta debout en plein milieu du bureau, attendant ses instructions.
Le bureau était plus vaste qu'elle ne l'avait imaginé. Un large bureau se dressait au centre de la pièce, devant une bibliothèque gigantesque remplie d'ouvrages. Sur le mur, un vieux canapé en cuir. Partout, dans la pièce, on apercevait des objets magiques.
« Des objets amassés durant ma longue carrière d'Auror. » indiqua le professeur Black en suivant son regard.
« Est-ce que ça vous manque ? » demanda Hermione avec curiosité.
« Parfois, oui. L'excitation, l'adrénaline d'être sur le terrain. C'est un sentiment…indescriptible. » dit-il, semblant plongé dans ses pensées. « C'était une profession qui collait parfaitement à ma personnalité. »
Elle l'imaginait parfaitement sur le champ de bataille, occupé à combattre des criminels, sa longue chevelure virevoltant autour de son visage tandis qu'il neutralisait des mages noirs.
« Puis, je suis monté en grade, ce qui signifiait plus de paperasse et plus de gestion humaine. » expliqua-t-il. « J'avais besoin de changement et le professeur Dumbledore m'a proposé le poste. Je ne suis pas encore certain que l'éducation soit ma voie, mais ça vaut le coup d'essayer. » dit-il avec sincérité, lâchant un rire grave.
« Je trouve que vous êtes un excellent professeur. » assura Hermione. « J'adore vous écouter et… »
Elle s'interrompit, embarrassée. Elle avait l'impression d'être l'une de ses groupies qui pullulaient son cours.
« Merci, Miss Granger, c'est flatteur. Surtout de votre part. » déclara-t-il avec un sourire en coin.
Elle se détendit et lui rendit à son tour son sourire.
« Je vous en prie, installez-vous. » indiqua-t-il en lui désignant le canapé à sa gauche. « Je peux vous offrir une tasse de thé ? »
« Hm, oui, avec plaisir. » répondit Hermione un peu trop précipitamment avant d'aller s'asseoir sur le canapé qu'il avait désigné.
Quelques instants plus tard, il la rejoignit sur le sofa et lui tendit une tasse de thé.
« L'objectif de l'atelier est d'accorder une préparation supplémentaire pour les élèves qui souhaitent s'engager dans une carrière d'Auror à la fin de leur cursus. Le concours d'entrée est l'un des plus difficiles. » expliqua-t-il avec sérieux.
Hermione posa sa tasse de thé sur la table la plus proche, puis extirpa de son sac une plume et un parchemin afin de prendre des notes.
« L'atelier aura des places limitées – cinq places maximum. J'ai besoin de vous pour organiser la première sélection. Qu'en pensez-vous ? » demanda-t-il.
« Je pense qu'il serait intéressant de faire une épreuve pratique, et une autre théorique. Pour la théorie, je propose de mettre en avant un sujet que nous n'avons pas encore abordé en cours. Vous ne voulez que les meilleurs, n'est-ce pas ? Donc des élèves proactifs, qui se sont probablement déjà renseignés sur le reste du programme. » énuméra-t-elle d'une voix.
Elle lui détailla le plan qu'elle imaginait pour la première sélection.
« Vous venez juste d'improviser ces idées ? » demanda-t-il, mi-surpris, mi-amusé.
Hermione hocha la tête. Pendant les deux heures suivantes, ils mirent en place un plan complet pour les sélections. Elle apprécia sa manière d'être à l'écoute et ouvert aux idées qu'elle proposait. Elle finit par se détendre et se sentit moins intimidée face à lui. Elle avait l'impression de pouvoir être elle-même sans être gênée ni devoir réprimer son intelligence comme à chaque fois qu'elle interagissait avec ses condisciples.
« Wow, il se fait tard, je n'ai pas vu passer le temps. » s'exclama-t-il soudainement, jetant un regard vers sa montre. « Je ne vais pas vous retenir plus longtemps. Même heure la semaine prochaine ? »
Hermione acquiesça.
« Parfait, laissez-moi vous raccompagnez à votre salle commune. » proposa-t-il
« Oh non, ce n'est vraiment pas la peine, professeur. » indiqua-t-elle en rougissant. « C'est seulement à cinq minutes. »
Il n'insista pas et elle se sentit soulagée. Que penserait-on si on la voyait seule en compagnie d'un professeur à une heure aussi tardive ? Elle savait à quelle vitesse les ragots de Poudlard se propageaient. Elle ne voulait pas donner l'occasion aux Quatre de la harceler davantage. Même si Hermione ne faisait rien de mal, elles se feraient un plaisir d'inventer toutes sortes de rumeurs grotesques et toute l'école suivrait dans la foulée.
« Bonne soirée Miss Granger. » la salua le professeur Black, refermant la porte derrière lui.
Hermione resta immobile pendant de longues secondes, devant la porte, confuse par la réalité qui la frappa de plein fouet.
Elle avait le béguin pour un professeur.
Destinatrices : Les meilleures amies de Tracey
Daphné écrit :
C'est bientôt l'anniversaire de notre Cece nationale. Des idées de cadeaux ?
Pansy écrit :
Aww, notre vierge effarouchée favorite grandit tellement vite ! Je suggère qu'on se cotise pour lui offrir un Vibralai. Le dernier modèle, Vavavroom, à trois vitesses.
Millicent écrit :
Je confirme, c'est ce qui se fait de mieux sur le marché. Super efficace.
Daphné écrit :
Aussi attentionnée soit cette idée, je pense que Tracey s'évanouirait sur place si on lui offrait un vibromasseur.
Millicent écrit :
Crois-moi, une fois qu'elle aura essayé cette merveille, elle s'évanouira – de plaisir.
« Ma jolie, tu as déjà pris ta pause, si je me souviens bien. Les clients attendent, on se dépêche ! » s'exclama une voix, la sortant de ses pensées.
Pansy sursauta et referma son journal d'un coup sec, s'empressant de le ranger dans le sac posé à ses pieds. Elle leva les yeux vers Madame Ursula, sa patronne, qui l'observait avec sévérité, les bras croisés. Madame Ursula adorait les fanfreluches, les manucures exubérantes et se parfumait avec des litres d'un parfum à la cerise qui écœurait Pansy. Elle se plaisait à s'inventer des origines et des liens de parenté avec des sorciers illustres. Elle semblait persuadée d'être un modèle d'élégance et de classe car elle passait sa vie à suivre les vies des célébrités et des sorciers fortunés dans les pages Société de journaux féminins. Elle tentait de reproduire leur langage, leur habillement et leur style de vie mais le résultat était bien différent de la réalité.
« Ce n'est pas la charité, ici. On ne te paye pas à lire, trésor. » continua Ursula d'un ton sévère.
« Oui, oui. » répondit Pansy en serrant les dents. « Désolée, j'arrive tout de suite. »
« Oui, qui ? » demanda Ursula.
« Oui, Madame Ursula. » répondit Pansy, à contrecœur.
« Voilà qui est mieux. Maintenant je veux voir un sourire sur ton petit minois. Les clients aiment les filles heureuses. » rappela Ursula avant de disparaître des vestiaires.
Pansy jura et se tourna vers le miroir afin de repasser son bâton de rouge à lèvres sur sa bouche. Elle observa son reflet pendant quelques secondes, réprimant l'envie de pleurer. Elle portait une robe lui arrivant au milieu de cuisses d'un rouge vif, ainsi que des escarpins de la même couleur. Son visage arborait un maquillage surchargé. Elle inspira profondément, et détourna les yeux, ne supportant pas la vulgarité de son apparence. Elle se releva, plaquant un sourire forcé sur ses lèvres désormais vermeilles et traversa le vestiaire pour rejoindre la salle principale de l'établissement.
Les lumières étaient tamisées et on entendait une musique lente résonner dans la salle. Des tables rondes et des canapés en velours violets étaient disposés un peu partout. Sur la piste, des couples dansaient de manière rapprochée et langoureuse.
Le profil des couples était identique. Des femmes superbes, jeunes, attirantes se déhanchant sensuellement aux côtés d'hommes bien plus âgés, ivres pour la plupart et tenant à peine debout. Certains couples étaient retranchés sur des canapés, plus en retrait, dissimulés par le faible éclairage, dans des positions un peu trop proches pour être appropriées.
Pansy scanna la pièce de son regard sombre et s'approcha du bar lorsqu'elle distingua un homme seul. Elle s'installa à ses côtés, lui flashant un sourire charmeur. L'homme était un sorcier d'une quarantaine d'années au ventre bedonnant et à la calvitie naissante. Le profil type des clients de l'établissements. Il l'observa de haut en bas, l'air appréciateur.
« Je peux t'offrir un verre ? » demanda-t-il.
« Avec joie. » répondit Pansy. « Hydromel blanc demi-sec. »
L'homme héla le barman pour commander. Pansy remarqua immédiatement que l'homme venait de commander un verre d'un whisky-pur-feu particulièrement onéreux et qu'une montre coûteuse habillait son poignet. Si elle jouait bien ses cartes, ce serait une soirée rentable pour elle.
Elle décroisa puis recroisa ses jambes d'un geste lent, consciente du regard de l'homme sur ses cuisses nues.
« C'est quoi ton petit nom ? » demanda l'homme en la lorgnant sans vergogne.
Il n'avait même pas levé les yeux de son décolleté lorsqu'il lui posa la question.
« Daisy. » mentit Pansy.
« Une vraie petite fleur, Daisy. Moi, c'est Lotharius. » répondit-il.
Leo, le barman, posa leurs boissons devant eux, envoyant un clin d'œil à Pansy au passage.
« Enchantée, Lotharius. » dit-elle d'une voix suave, en se penchant sur lui. « Dites m'en plus sur vous. »
Cela faisait près de six mois que Pansy travaillait au Flamant Rose, un bar à hôtesses situé dans une rue excentrée de Pré-au-Lard. Son rôle était simple. Elle devait discuter avec les clients et s'assurer qu'ils boivent les consommations aux prix exorbitants que proposait l'établissement. Pansy les écoutait avec attention, les flattait de temps à autres, et flirtait outrageusement. Elle s'assurait surtout que ni son verre, ni celui du client ne soient vides. C'était la règle numéro un de Madame Ursula.
Parfois, les clients aimaient lui raconter leur journée difficile au travail ou encore leurs problèmes maritaux. Elle rencontrait beaucoup d'hommes au Flamant Rose. Des médicomages, des politiciens, des avocats et même des aurors.
Son salaire fixe n'était pas extraordinaire. L'argent se faisait principalement sur les commissions. Lorsqu'un client commandait une bouteille ou une boisson onéreuse, elle gagnait un pourcentage sur celles-ci.
Au début, elle avait mis du temps à s'ajuster à la profession. Ses premiers jours, elle s'était retrouvée saoule au bout d'une heure à peine. Puis, Augustina, l'une de ses collègues plus expérimentées, lui avait enseigné quelques combines du milieu. Il fallait s'assurer de vider le verre dès que le client avait le dos tourné.
Pansy restait relativement distante avec les clients. Certaines des filles, elles, n'avaient pas autant de scrupules. Elles n'hésitaient pas à laisser les clients les peloter de manière indécente. D'autres quittaient même le bar en compagnie de certains clients et il ne fallait pas être un génie pour savoir ce qui se passait ensuite. Afin de garder leur intérêt et s'assurer qu'ils continueraient à consommer, Pansy autorisait parfois les clients à lui toucher l'épaule ou le bras quand ils s'adressaient à elle. Jamais plus.
Si quelqu'un lui avait dit quelques mois plus tôt qu'elle se retrouvait à presque vendre son corps pour gagner de l'argent, elle aurait bruyamment ri au visage de la personne. Un an auparavant, elle avait été un membre de la jeunesse dorée britannique. L'époque où ses parents étaient encore outrageusement riches. Celle où elle vivait dans un Manoir luxueux dans l'Oxfordshire et recevait tout ce que son cœur désirait.
Puis les problèmes d'argent de son père avaient commencé. Pius Parkinson avait perdu beaucoup d'argent à cause d'investissements douteux et en quelques mois, ils avaient dû vendre leur maison pour rembourser ses dettes colossales. Cela n'avait pas été suffisant alors Pansy et sa mère avait dû donner leurs vêtements et accessoires coûteux pour pallier la dette. Ils avaient emménagé dans un cottage minable à Cornwall.
Pansy n'avait jamais parlé à son entourage des problèmes financiers de sa famille. Elle avait continué à prétendre qu'elle vivait dans un luxe indécent. Même ses meilleures amies n'étaient pas au courant. Elle ne pourrait pas supporter l'humiliation qui accompagnerait la déchéance de sa famille. Pour garder les apparences, elle devait constamment mentir autour d'elle. Par exemple, faute de moyens, elle avait dû prétexter un jeûne intermittent pour ne pas assister au dîner qu'avait proposé Daphné. Puis, pour éviter de devoir payer le brunch hors de prix que proposait Mi- Citrouille Mi-Raisin, elle s'était assurée de prendre quelques mèches de cheveux sur la brosse de Millicent le matin même afin d'organiser le scandale au restaurant.
Lorsque les problèmes de son père avaient commencé, Pansy avait dû chercher un travail en urgence pour pouvoir continuer à payer sa scolarité à Poudlard. Dans le journal, elle avait vu une offre pour un poste de serveuse. Les missions du poste s'étaient révélées toutefois bien différentes du contenu de l'annonce.
Même si l'emploi était dégoutant, il était arrangeant et les horaires étaient flexibles. Elle se faisait assez d'argent pour ne travailler qu'une ou deux nuits par semaine. En travaillant dans un restaurant ou un pub traditionnel, elle aurait probablement dû travailler tous les soirs de la semaine pour gagner le même montant.
Le Flamant Rose lui permettait également de ne pas croiser les gens qu'elle connaissait à Pré-au-Lard. Ursula n'autorisait que les clients d'au moins vingt-cinq ans à entrer dans l'établissement, contrairement aux hôtesses qui étaient parfois à peine majeures. Cela assurait à Pansy de ne pas rencontrer l'un de ses condisciples. Cela aurait été une situation profondément humiliante.
Madame Ursula était très à cheval sur les règles. Trois manquements au règlement et elle vous mettait à la porte. Si vous ne génériez pas assez de revenus pour son business, elle vous mettait également à la porte.
Toutes sortes de filles travaillaient au Flamant Rose. Elles venaient de couches sociales diverses et de cultures variées. Tous les physiques étaient représentés. Des minces, des rondes, des plates, des blondes, des brunes, des rousses, des noires, des asiatiques, des vieilles, des naturelles, des refaites, des transsexuelles, des courtes et des grandes. Madame Ursula se vantait régulièrement de son ''catalogue'' de filles. Comme le terme n'était pas des plus flatteurs, elle avait opté pour une appellation un peu plus politiquement correcte : les Beautés d'Ursula.
« Il y en pour tous les goûts. » lui avait expliqué Ursula lors de son premier jour de travail au Flamant Rose. « Tu auras ton petit succès ici, tu verras. Ils adorent les écolières. Et tu as un petit air exotique, ils raffolent de ça. »
Pansy reporta son attention sur Lotharius qui commençait déjà à montrer des signes d'ivresse. Elle tenta de réprimer son dégoût profond tandis qu'il postillonnait près de son visage, lui racontant la manière dont il avait bouclé un gros contrat dans la journée, sous le nez de l'un de ses rivaux.
Apparemment, Lotharius Burke avait un poste à responsabilités au Ministère, au sein du Département des Sports Magiques. Il sembla à tout prix vouloir se justifier de ses visites dans l'établissement. Sa femme était frigide, disait-il, et son corps n'était plus le même après trois enfants.
Mais il ne fallait pas s'y méprendre, non. Lotharius clamait aimer les femmes classes. Pas les ''putains vulgaires qu'on pouvait coincer sur l'Allée des Embrumes pour quelques gallions''. Il aimait les parfums de créateur, les brushings parfaits, les cuisses fermes et les poitrines qui tenaient seules. Et Lotharius était prêt à y mettre le prix.
Pansy eut envie de vomir lorsqu'il lui demanda comment elle était épilée là-dessous. Mais elle prit sur elle, et lui adressa un sourire charmeur. Après tout, le client était roi. Surtout lorsqu'il était fortuné.
La soirée passa lentement et aux alentours de deux heures du matin, elle empocha la bourse remplie de gallions que lui tendit Madame Ursula et la fourra dans son sac.
Elle rabattit sa capuche sur sa tête, puis se dirigea vers le château, prête à reprendre le masque qu'elle revêtait devant tout le monde. Celui d'une fille forte, sûre d'elle, à qui tout souriait et à qui tout le monde voulait ressembler.
Le masque qui l'empêchait de montrer ce qu'elle était vraiment.