Anno domini 1000, 2 Août, Poudlard
Des cris de souffrance se faisaient entendre dans l'air. Ils se répercutaient en échos dans les sous-sols du Château de Poudlard, là où se situaient les appartements personnels d'Helga Poufsouffle. C'était avec un épais chiffon posé sur son front en sueur que cette dernière poussa une nouvelle fois, sous les conseils de la sage-femme qui lui demandait de réaliser un dernier effort. La douleur qu'elle ressentait était telle qu'elle écrasait la main de son amie restée à ses côtés afin de la soutenir dans cette nouvelle épreuve. Mais cela ne surpassait certainement pas les peines éprouvées par son cœur. Bien au contraire, délivrer cet enfant était des moindres si on la comparait à la tristesse qui l'accaparait depuis de longs mois.
L'Amour était un sentiment si beau et si destructeur à la fois. Il vous donnait de l'espoir, et vous faisait vous sentir important. Le bonheur que l'on pouvait éprouver quand celui-ci avait envahi notre être nous donnait un indescriptible sentiment de joie. Mais quand cette émotion commençait à se consumer telle une bougie prête à s'éteindre, il embarquait avec lui toute notion de félicité sur son passage, ne laissant au final que du désespoir et des cœurs meurtris pour l'éternité.
- Vous avez un fils, ma Dame.
Elle s'écroula sur son oreiller en inspirant et expirant de manière erratique, faisant se soulever irrégulièrement sa cage thoracique. Son amie passa doucement une main dans ses cheveux blonds tandis que la sage-femme s'occupait de donner les premiers soins à son fils, qui cria aussitôt à plein poumons. Cette dernière posa rapidement l'enfant sali par le sang sur la poitrine de la jeune mère et, avec un geste protecteur, l'entoura rapidement de ses bras, lui promettant silencieusement de le protéger au péril de sa vie.
Lui, le fruit de son Amour perdu à jamais.
- Quel bel enfant. Vous avez fait là un excellent travail, congratulations Helga, la félicita son amie. Mais évidemment, je ne doutais guère de vous, ajouta-t-elle d'une voix légèrement amusée.
Helga détourna ses yeux vert forêt du nourrisson, qui avait très vite entrepris de téter son sein douloureux, pour faire face aux iris bleu sombre et fatigués de Selwina. Cette dernière lui souriait mais son rictus n'atteignait pas ses pommettes, signe de sa propre tristesse qu'elle gardait profondément enfouie en elle. Cet air dénotait avec l'image du professeur strict qu'elle abordait auprès des étudiants du château. Cependant, et malgré ses airs parfois hautains hérités de son éducation, Helga savait que son amie était prête à tout donner pour le bien-être et la sécurité de leurs pensionnaires. Tout comme les autres Fondateurs. Du moins, cela avait été le cas encore quelques mois auparavant mais tout s'était effrité à la suite de multiples querelles qui avaient engendré d'importants conflits. Et ils s'étaient divisés, détruisant des affinités qu'ils avaient crues solides et incassables.
- Si je retrouve mon frère, je le tuerais de mes mains, ajouta-t-elle doucement, je vous en fais la promesse Helga.
- Nous savons toutes deux à quel point votre Magie est délicate quand vous êtes en colère, Selwina. Nous devrions tous aller de l'avant.
- Si je le trouve, il va m'entendre ! Croyez-moi mon amie, quoi que vous puissiez songer, il le paiera, affirma-t-elle en posant une main sur son bras. Je devrais prévenir Rowena et Godric de la naissance de votre progéniture pendant que notre servante, commença-t-elle, qu'Agathe..., se corrigea-t-elle en recevant le regard noir de la jeune mère.
Elle savait pertinemment ce qu'elle pensait des esprits arrêtés. Et il était bien de le lui rappeler de temps à autre malgré qu'elle fasse, de naissance, partie de la noblesse sorcière.
- ... termine de s'occuper de vous. Je suis certaine qu'ils attendent tout deux impatiemment dans le couloir. En fait, je sens vivement leur nervosité, ajouta-t-elle. Je vais donc les chercher.
Sans attendre de réponse de sa part, Selwina s'assura de son état de santé auprès de la sage-femme, qui s'activait à nouveau auprès de son fils et d'elle-même afin de leur prodiguer des soins, avant de tourner les talons. La jeune mère soupira tristement et embrassa avec tendresse son petit garçon sur le front. Salazar, son Amour d'enfance, était parti, aveuglé par ses idéologies en rapport aux êtres humains non dotés de Magie. Il l'avait laissée seule, pourtant il l'avait aimée. Elle le savait. Elle était une née-Moldue qui, malgré son statut de simple villageoise issue d'une famille pauvre, avait réussi à percer sa carapace. En l'abandonnant elle, il abandonnait également leur fils, la chair de sa chair. Et pourquoi ? Parce que son sang était apparemment souillé par le sien.
Elle n'avait pas compris pourquoi il avait commencé à adopter ce comportement si violent alors qu'elle le pensait apaisé de ses opinions racistes et honteuses. Celles-ci avaient été développées à cause de ses ancêtres.
Cependant, si la jeune femme avait su ce qu'il en découlait réellement, elle n'aurait certainement pas abandonné tout espoir de sitôt. Et pourtant, avec les connaissances qu'elle croyait détenir à ce propos, la sorcière en souffrait le martyre.
- Comment allez-vous le nommer, ma Dame ?
Alors qu'une nouvelle vague de tristesse l'accaparait sans crier gare, elle éclata finalement en sanglots face à cette simple question, sous les excuses répétées d'Agathe qui ne comprit pas ce moment de faiblesse, qui pourtant, meurtrissait douloureusement son organe vital. Ils devaient l'appeler Robin, si c'était un fils. Oui, Robin serait son prénom mais Salazar ne partagerait plus aucun moment de joie et de plénitude auprès d'elle et il ne connaîtrait certainement pas leur petit garçon. Il l'avait renié tel un déchet répugnant sans aucune importance. Il ne reviendrait pas. Il avait été catégorique. Épouser Helga avait été sa plus grande erreur. Parce que, et selon ses dires, elle était impure.
Helga Poufsouffle avait le cœur brisé.