1er septembre 1938, Poudlard Express
Quand la foule qui se massait sur le quai s'était faite trop dense pour qu'ils puissent encore y évoluer sereinement, Ariane attrapa la manche d'Edwin et ils grimpèrent ensemble dans le train, laissant aux elfes de maison le soin de les suivre avec leurs bagages. Sentant son anxiété se décupler à mesure qu'ils progressaient ensemble dans les couloirs bondés, Edwin s'en remit entièrement à Ariane qui fendait les groupes d'élèves avec une élégance qui avait quelque chose d'irréel pour sa taille. Son jumeau avait toujours trouvé que, d'eux trois, Ariane était celle qui avait le mieux su s'approprier la prestance légendaire de ses parents. Elle maîtrisait gestes et formules à la perfection, et, son visage, elle avait appris à le dompter au fil du temps : froid et peu avenant, il était comme une clé qui incitait tous ceux qui se trouvaient sur leur chemin à s'écarter pour leur ménager un passage.
- C'est dingue, grommela la fillette avec une moue boudeuse alors que, à nouveau, ils dépassaient un compartiment bondé. Il n'y en a plus un seul de libre ! Tant pis, essayons celui-là.
Alors qu'Edwin haussait les épaules, Ariane ouvrit la porte coulissante et toisa avec méfiance la petite fille qui s'y trouvait. Sans se soucier d'avoir l'air aimable, elle lui fit passer un véritable entretien et, une fois assurée de la qualité du sang et de la noblesse du nom de leur future camarade, elle daigna s'asseoir sur la banquette à ses côtés, non sans avoir dévisagé avec suspicion les taches plus sombres qui parsemaient le revêtement écarlate.
- Eloïse Carrow... répéta-t-elle une fois installée. Ta famille vient d'Irlande, non ?
Ariane connaissait les ramifications de la noblesse sorcière sur le bout des doigts. Les Carrow étaient loin d'avoir le rayonnement des Black ou des Malefoy, mais Edwin était persuadé que sa sœur aurait pu décliner leur devise, leur blason et le nom des familles auxquelles ils étaient affiliés sur le bout des doigts.
- Et vous, vous êtes qui ?
Maintenant qu'elle avait passé le test de validation d'Ariane, Eloïse paraissait se souvenir que rien ne l'obligeait à se laisser ainsi toiser.
- Ariane et Edwin. Martins.
Les yeux noirs, à moitié dissimulés derrière une frange toute aussi sombre, s'écarquillèrent alors que le patronyme résonnait dans le compartiment, puis Eloïse baissa la tête, comme vaincue par une supériorité souverainement établie. Satisfaite de sa reddition muette, Ariane sourit et, soudainement plus aimable, reprit la conversation sur un terrain moins formel.
Le courant semblant bien passer entre les deux filles, ou en tout cas suffisamment pour ne pas qu'il ait à se mêler à leurs bavardages qu'il trouvait plus qu'insipides, Edwin sortit un livre de la sacoche qu'il avait gardée avec lui et se plongea dans les aventures de Gwendoline la Fantasque alors que le train démarrait. Il sentit à plusieurs reprises le regard d'Eloïse s'attarder dans sa direction, mais ne daigna pas relever les yeux de sa lecture, tournant les pages avec une avidité qu'il n'aurait jamais pour les mondanités. Là où leur enfance recluse dans le fin fond du Yorkshire avait doté Ariane d'une curiosité sans bornes pour le monde extérieur, Edwin avait au contraire appris à se contenter de peu et, face aux milles réalités alignées sur les étagères de la bibliothèque du manoir, l'utilité des relations humaines ne lui avait jamais sauté aux yeux. Il avait Anthony et Ariane, ainsi que les elfes de maison au service de leurs parents, et cela lui suffisait amplement.
Il allait se lancer dans la lecture d'un nouveau chapitre lorsque la porte de leur compartiment s'ouvrit de nouveau, laissant apparaître les deux enfants qu'Edwin avait si longuement analysés sur le quai. Il déglutit en les reconnaissant. De près, l'aura qu'ils dégageaient était encore plus puissante. Un peu comme Ariane, la détermination qui flambait dans leurs regards forçait le respect et Edwin aurait presque pu incliner la tête si, alors que ces pensées traversaient son esprit, Eloïse ne s'était pas mise à glousser avant de se moquer des vêtements miteux qui recouvraient leurs corps menus, comme affaiblis par une malnutrition déjà trop poussée.
En voyant les yeux de la fille s'embuer, il eut envie de faire taire Eloïse, mais, constant qu'Ariane ne réagissait pas aux index blessants que sa nouvelle amie pointait sur les derniers arrivés, il retint l'exclamation qui menaçait de s'échapper de sa gorge. Quand le garçon serra les dents en murmurant « je te l'avais bien dit » plein d'amertume et que sa comparse tenta un dernier regard en sa direction pour obtenir son concours, Edwin releva le menton et s'efforça d'afficher un air indifférent. Il ne pouvait pas leur venir en aide et, par-dessus tout, il ne le voulait pas. Il n'avait pas à ressentir de la pitié pour des orphelins débarqués de Merlin seul savait où et qui, pour ce qu'il en savait, pouvaient très bien être des Nés-Moldus, de usurpateurs qui n'avaient rien à faire là. Il était le second fils des Martins. Son comportement se devait d'être digne de ce nom qu'il portait. Honneur, supériorité, vengeance. Cela devait devenir son mantra et il s'y accrocha comme un fidèle à sa prière.
~*~
1er septembre 1938, Poudlard Express
Après s'être rapidement assurés que des employés du Poudlard Express avaient bien pris en charge leur malle respective afin de les mettre avec celles des autres jeunes sorciers, Lianna avait rapidement pris la main de Tom dans le but de suivre le petit garçon qui les avait fixés quelques minutes auparavant d'un air curieux. Elle venait de l'apercevoir se faire tirer par le bras par la petite fille qui se trouvait à ses côtés et qui affichait une certaine assurance qui la mettait un peu mal à l'aise. Mais Lianna affichait un petite sourire joyeux depuis quelques secondes car Liliane avait surement raison : ils étaient dans le monde des sorciers et, ici, ils n'avaient rien à craindre et devaient aller de l'avant.
Ils étaient différents de tous ces autres enfants. Ils seraient forcément acceptés parce qu'eux aussi avaient des pouvoirs magiques. La rouquine leur avait conté à quel point il était merveilleux d'avoir des amis, et Lianna voulait la croire, pour la simple et bonne raison que la jeune femme n'avait jamais cessé de croire en eux alors... elle voulait simplement essayer de faire connaissance avec des enfants sorciers.
- Tu n'as jamais été aussi pressée Li', bégaya Tom un peu époumoné alors qu'elle le tenait toujours par la main. Il portait un petit sac à dos où les uniformes scolaires qu'ils devaient revêtir dans le train avaient été soigneusement pliées par Liliane ce qui accentua son essoufflement, je sais que tu veux y croire et moi aussi j'aimerais croire aux paroles de Liliane, mais j'ai un mauvais pressentiment ... suivre ce garçon comme tu le fais est une mauvaise idée.
- Il avait l'air perdu un peu comme nous, se justifia Lianna sans se retourner vers Tom et continuant de le traîner entre les sorciers afin de pouvoir finalement monter dans cette locomotive rouge qui marquerait le début de leur nouvelle vie, on doit essayer de se faire des amis, ils sont des sorciers comme nous alors ... pourquoi ça ne marcherait pas cette fois ? lâcha-t-elle avec espoir.
La fillette ignora le soupir désespéré de son meilleur ami car elle voulait croire que leurs vêtements abîmés, signe de leur grande pauvreté, ou encore que les robes de sorciers de seconde main qu'ils avaient pu acquérir grâce à la bourse scolaire de Poudlard sur le chemin de Traverse ne voulaient strictement rien signifier aux yeux des sorciers et que donc, des notions telles que les catégories sociales n'avaient pas de grande importance dans le monde magique. L'angoisse que la petite fille avait un peu éprouvé en ce début de matinée se transformait petit à petit en excitation alors qu'ils pénétraient dans le train bondé par une foule de jeunes sorciers de tous âges.
En effet, l'espoir d'être accepté ne cessait de gonfler de plus en plus intensément dans sa jeune poitrine. L'allégresse qu'éprouvait désormais la petite fille finit par arracher un sourire au petit garçon qui aimait décidément la voir sourire de la sorte. C'est ainsi que lui aussi laissa momentanément tomber son masque de « protection » et qu'il profita de ses premiers pas dans le célèbre Poudlard Express, oubliant pourtant que de nombreux regards s'attardaient parfois bien curieusement sur eux.
Tom et Lianna virent au loin les deux petits enfants qu'ils suivaient rentrer dans un compartiment après que ces derniers eurent fendu les groupes d'élèves d'un air assuré et visiblement sans en éprouver aucune gêne apparente. Les deux orphelins s'excusèrent quant à eux poliment quand ils poussèrent certains de ceux-ci sans l'avoir fait exprès dû à leur petite taille, car Liliane leur avait dit d'être respectueux et gentils avec les autres, et que, c'était selon elle, de cette façon qu'ils seraient appréciés. Ils n'avaient pas à avoir peur d'être eux-mêmes avec les autres sorciers.
Quand ils arrivèrent finalement quelque peu haletants devant la porte du compartiment fermé, un sentiment d'appréhension traversa les deux jeunes orphelins alors qu'ils se jetaient tous deux un regard de connivence. En effet, l'envie d'acceptation était brusquement devenue aussi importante aussi bien pour l'un que pour l'autre. Ils voulaient décidément croire que Liliane avait raison et qu'ils devaient vraiment essayer de se mêler aux autres car, après-tout, pourquoi ne pourraient-ils pas avoir une chance d'être aimés, appréciés et heureux comme elle le leur disait si souvent ?
Lianna voulait se réveiller le lendemain matin, en se promettant d'écrire directement une lettre dès son réveil à l'adresse de l'institutrice afin de lui donner de bonnes nouvelles ! Elle voulait la rendre fière de ses efforts ! Ce qui, elle le savait, était également le cas de Tom. Et bien que celui-ci ait toujours vécu à l'orphelinat moldu de Wool, il aimait sincèrement la jeune femme pour qui il était prêt à laisser une seule et unique chance envers autrui. Lui qui ne croyait pourtant plus à ce genre de chose depuis bien longtemps, toujours déçu des dénouements provoqués par chacune de ses tentatives d'approche auprès des autres enfants alors qu'il n'était qu'un petit garçonnet en quête d'amitié.
Sortant de ses songes, Lianna jaugea encore pendant quelques secondes les silhouettes floutées par la vitre du compartiment et qui les séparaient des autres petits sorciers. Son coeur commença à cogner vigoureusement contre sa poitrine quand elle mit sa main sur la poignée de cette dernière, réfléchissant à vive à l'allure sur la façon d'entamer une conversation polie avec des enfants de leur tranche d'âge afin de s'assurer que ces derniers aient une bonne opinion des personnes qu'ils étaient.
- On va se faire de vrais amis, lâcha-t-elle avec une certaine assurance dans la voix alors que le train démarrait de la gare et prenait de la vitesse, on peut y arriver. Ensemble ? termina-t-elle les yeux brillants d'envie de rentrer dans ce compartiment.
- Ensemble. Comme toujours, Li', lâcha Tom, en mettant sa main libre sur celle de Lianna qui était déjà posée sur la poignée, on sera toujours ensemble quoi qu'il arrive. Oui... quoi qu'il arrive toi, tu seras toujours ma meilleure amie.
Et alors que les couloirs se vidaient doucement de tout élève, ils se sourirent mutuellement en guise d'encouragement. Les deux sorciers qui commençaient à éprouver de l'appréhension quant à la façon d'agir aimablement sans se faire rejeter pénétrèrent finalement dans ledit compartiment. L'espoir émanant d'eux était à l'instant si présent dans les moindres parcelles des pores de leur peau, qu'aucun des deux ne doutèrent une seconde que cela pourrait mal se dérouler.
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Tom avait beau se nourrir de l'espoir que dégageait de Lianna, c'est avec appréhension qu'il mit un pied dans le fameux compartiment, tenant toujours précieusement l'une des mains de sa meilleure amie qui était aussi fébrile qu'il ne l'était désormais. Il le ressentait aisément grâce à ses dons et aussi certainement car leurs deux mains liées étaient devenues moites. Le petit garçon analysa brièvement l'espace qui les entourait et ses yeux tombèrent en premier lieu sur l'enfant que son amie avait voulu suivre dès qu'elle l'avait aperçu sur la bordure du quai.
Un garçon qui, par ailleurs, disposait d'iris fort semblables à ceux de sa meilleure amie. Bien que lui savait parfaitement que celles de cette dernière étaient légèrement plus claires et brillantes que les yeux du jeune sorcier, habillé de vêtements qui ne laissaient aucun doute quant à sa richesse. Il se retint de sourire en coin quand il s'aperçut que ce dernier venait de déglutir étrangement en les apercevant car Tom allait vraiment essayer d'être dans son meilleur comportement si on lui laissait l'infime possibilité de lui laisser une chance, et ce, comme il l'avait par ailleurs promis à Liliane. Cette femme qu'il percevait depuis quelques années comme une figure maternelle et sur laquelle, il pourrait vraiment totalement se reposer dans le futur puisqu'en plus de cela, elle avait décidé d'entamer des démarches d'adoption pour eux ! Il n'y croyait toujours pas car s'était tellement irréaliste mais ... il était si heureux de cette nouvelle !
Liliane ne voyait pas le mal en eux et Tom avait une confiance inébranlable en cette dernière. C'est d'ailleurs ravi qu'il lui avait définitivement confié sa jeune amie Nagini avec qui ils avaient fait connaissance lors d'une sortie dans les bois du quartier avec l'adulte. Elle s'en occuperait pendant qu'eux seraient à Poudlard. Comme elle le faisait régulièrement depuis qu'il avait adopté l'animal. Et bien qu'éprouvant toujours une certaine appréhension avec ce reptile, elle avait accepté pour lui, lui promettant qu'elle en prendrait grand soin jusqu'à leur retour pour les vacances de Noël. Lui, il lui avait répliqué que si on l'ennuyait d'une quelconque manière, l'animal la défendrait car il le lui avait demandé. La rouquine avec souri en roulant des yeux, mais Tom se savait très sérieux car si une quelconque personne osait vraiment l'ennuyer, il ne doutait pas une seconde qu'il pouvait compter sur le reptile afin de défendre la jeune femme.
En pensant à tout cela, une étrange chaleur comprima de nouveau sa poitrine et il dut réprimer le sourire benêt qui menaçait d'éclore sur ses lèvres car il se devait de toujours rester un tant soit peu distant avec ces trois enfants qui avaient désormais leur visage rivé sur eux. Il devait vraiment essayer de garder encore un peu cette expression de dureté qu'il tentait d'aborder jusqu'à voir si cela valait la peine de se laisser aller avec ces autres jeunes sorciers qui, aux yeux des deux petits orphelins, étaient synonymes d'un futur bien meilleur qui serait rempli de joie et de bonheur.
Sous ses nombreuses pensées, Tom voulait définitivement démarrer une conversation sur de bonnes bases, mais pour l'instant, il continuait d'être malgré lui sur ses gardes à cause des déceptions que la vie lui avait envoyées en pleine figure par le passé. C'est pour cela qu'il essayait toujours d'afficher une certaine froideur à leur égard, afin qu'ils ne puissent pas utiliser ses sentiments et ses émotions pour le dénigrer et où lui faire du mal. Et... peut-être que si tout se déroulait pour le mieux, il pourrait éventuellement considérer par la suite ce garçon, assis avec un livre posé sur ses genoux, comme un potentiel futur ami.
Cependant, et alors qu'il se faisait la réflexion que même les deux petites filles se trouvant au côté du petit garçon pourraient elles aussi devenir des éventuelles amies, l'une d'entre elles se mit à glousser et à pouffer de rire en les pointant sans vergogne du doigt ce qui coupa net à toutes ses pensées positives. Tom eut l'impression qu'un énorme et douloureux bloc de pierre tombait lourdement au creux de son estomac. Et alors qu'il osait tourner ses iris noires vers Lianna qui venait d'ouvrir la bouche pour la refermer aussi vite qu'elle ne l'avait ouverte, il vit aisément ses yeux clairs se remplir de larmes. Les mots chuchotés sur leurs apparences vestimentaires respectives étaient terriblement blessants et Tom regretta immédiatement d'avoir osé penser durant une infime seconde qu'il pourrait avoir la possibilité de faire la connaissance de potentiels amis sur qui compter et se reposer à l'image de Lianna.
- Je te l'avais bien dit, siffla-t-il brusquement en la tirant légèrement par le bras, avisant le visage on ne peut plus indifférent de l'autre fillette.
Mais sa meilleure amie ne lui répondit pas et en guise d'un infime et dernier espoir, elle venait de poser ses iris embuées de larmes sur le petit garçon, souhaitant probablement ardemment qu'ils les accepteraient pour ce qu'ils étaient, et non pour l'image qu'ils renvoyaient sans qu'ils ne puissent vraiment y faire quelque chose pour y remédier. Mais celui-ci se contenta de relever la tête et afficha une expression de supériorité, comme s'il se savait bien mieux qu'eux alors qu'il ne les connaissait même pas ! Tom ressentit brusquement une étrange colère l'envahir, chauffant ses muscles au fer, et alors qu'il pressait plus vivement la main de sa meilleure amie en guise de réconfort, il l'entraîna avec lui en dehors de ce maudit compartiment. C'est à ce moment précis qu'il se jura intérieurement qu'il prouverait un jour - ou plutôt que Lianna et lui-même prouveraient un jour - à tous ces sorciers qu'ils n'étaient pas que des moins que rien élevés dans un orphelinat Moldu.
Quand Tom referma avec brusquerie la porte du compartiment derrière lui, la première chose qu'il fit malgré ses membres tremblants furieusement de colère, fut de se hâter vers Lianna qui venait de lâcher sa main afin de se précipiter un peu plus loin de ces enfants. Elle se laissa tomber contre le mur du couloir du Poudlard Express et, impuissant qu'il était, il la vit éclater en sanglots sans pouvoir rien faire pour éviter ces pleurs que des sorciers imbus d'eux-mêmes avaient injustement provoqués.
- Lianna ! s'exclama-t-il ahuri en se laissant tomber à ses côtés. Je suis désolé, fit-il en la prenant contre lui, je sais que tu y croyais bien plus fort que moi, souffla-t-il en l'enlaçant contre lui. Puis, il posa doucement son visage contre les cheveux noires et bouclés de son amie en guise de réconfort, ne les laisse pas gagner, tu vaux dix fois mieux que ces imbéciles. Je savais qu'on se ferait rejeter parce qu'on est toujours des pauvres et des orphelins. Nous ne sommes rien pour ces gens parce que, même ici, dans ce monde, nous avons toujours une différence que les autres pourront moquer, fit-il durement. Liliane croyait avoir raison parce qu'elle aussi a sa différence, mais elle a tort car si nous ne prouvons pas que nous sommes bien plus importants que tous les autres sorciers, nous n'aurons jamais notre place nulle part. Il va falloir que l'on fasse nos preuves.
C'est sous ces dernières paroles remplies d'amertume et de dureté qu'ils se firent tous deux intérieurement la promesse de ne plus jamais laisser personne s'approcher d'eux d'une quelconque manière afin de se protéger qui plus est, de ce qui pouvait les meurtrir. Après ce nouvel événement décevant, ils allèrent tous deux se changer dans les toilettes du train et rangèrent leurs vieux vêtements dans le sac à dos que portait Tom sur le dos depuis leur départ de l'orphelinat. Les deux amis passèrent l'ensemble de leur trajet en errant ici et là dans les couloirs du Poudlard Express sous le regard de la dame au chariot et de certains élèves avares de curiosité qui étaient brièvement de passage dans les lieux.
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1er septembre 1938, Grande Salle, Poudlard
Frigorifiés par le vent qui soufflait sur le Lac Noir, c'est glacé que les tous nouveaux élèves achevèrent leur traversée en barque depuis Pré-au-Lard. Harassé, Edwin n'avait plus qu'une idée : se glisser sous les draps bien chauds d'un baldaquin qui, il espérait, serait encadré de tentures vertes. Alors que la petite file de sorciers remontaient jusqu'au Hall du château, il s'efforça de gérer les tremblements de ses mains et essuya ses paumes devenues moites sur sa robe encore vierge de toute écusson. La cérémonie qu'il avait tant redoutée approchait et il ne se souvenait pas avoir un jour été plus nerveux.
Dans le Hall, le professeur Brûlopot qui les avait jusque-là escortés les confia au professeur Dumbledore. Un drôle de chapeau rapiécé qui donna des sueurs froides à Edwin sous le bras, le directeur adjoint les conduisit jusqu'à la Grande Salle où les plus grands étaient déjà installés. Il grimpa sur l'estrade, posa le chapeau sur un tabouret à trois pieds et, quelques secondes plus tard, la voix millénaire du Choixpeau leur souhaita la bienvenue en musique.
Edwin aurait voulu que sa chanson ne s'arrête jamais. Il n'était pas prêt à s'asseoir sur ce tabouret et Ariane dut le sentir car elle serra sa main jusqu'à ce que le premier élève soit appelé et rejoigne Poufsouffle. S'ensuivit alors un défilé de premières années qui, tour à tour, furent répartis plus ou moins rapidement dans les quatre maisons. Il applaudit mollement Euphemia MacMillan qui fut envoyée à Serpentard, puis le professeur de métamorphose appela Ariane et Edwin retint son souffle.
Sa jumelle s'avança d'un pas tranquille jusqu'à l'estrade et le chapeau eut à peine le temps de frôler sa tête qu'elle rejoignait déjà Euphemia et Eloïse qui, plus tôt, y avait été répartie, un sourire satisfait aux lèvres. Puis son nom s'échappa des lèvres de Dumbledore et il fit de son mieux pour contenir sa peur alors qu'il gravissait les quelques marches qui le séparaient de son destin.
Une fois assis sur le tabouret où tant d'autres l'avaient précédé, Edwin eut le temps de voir le sourire rassurant que lui adressait Anthony depuis la table des verts et argent avant que le feutre ne lui tombe sur le visage et que le Choixpeau n'entame son analyse.
« Pourquoi penses-tu à ce point que ta place est à Serdaigle ? »
Edwin sursauta. S'il savait que le Choixpeau usait la légilimencie pour scruter ses pensées, il ne s'était pas attendu à ce qu'il lui parle par ce biais.
« Je... je ne sais pas. »
« Tu es très intelligent et studieux pour ton âge, je ne le nie pas, mais ce n'est indéniablement pas ce qui te caractérise le mieux. »
Patient, Edwin attendit la suite.
« J'ai rarement vu autant d'ambition concentrée dans une seule personne. C'est incroyable d'avoir autant envie de faire ses preuves à onze ans. Autant envie de prouver sa valeur et sa digne appartenance à une lignée. Mais fais attention, jeune Edwin. Ressembler à ses parents, ce n'est pas une obligation. Tout n'est pas qu'une question d'honneur et d'héritage dans la vie. Surtout pas quand on a des capacités comme les tiennes. »
Sur ces paroles mystérieuses, la discussion s'arrêta et le Choixpeau scanda le nom de la maison des serpents. Pris d'un regain d'énergie, Edwin se leva et rejoignit la table où sa sœur et son frère étaient assis et trouva une place entre ce dernier et Euphemia, la première année qui avait été répartie juste avant Ariane.
- Tu vois, je t'avais bien dit qu'il ne fallait pas t'inquiéter ! s'exclama Anthony.
Edwin lui envoya un sourire rayonnant et reporta son attention sur la Répartition qui poursuivait son cours. Il s'écoula encore deux minutes avant que ceux qu'il cherchait du regard se fassent appeler l'une après l'autre. Tom Riddle et Lianna Sauwer lui semblèrent dotés d'une présence majestueuse sur ce ridicule tabouret de bois. Ils n'étaient plus les deux enfants perdus et humiliés par Eloïse dans le train, mais deux sorciers qui avaient tout autant leur place que lui dans ce château, tout autant cette irrépressible envie de faire leurs preuves. Peut-être que le Choixpeau leur tint le même discours qu'à lui. Il n'en saurait jamais rien. Mais ce qui resterait à jamais gravé au fer rouge dans sa mémoire, ce fut l'assurance avec laquelle ils rejoignirent la table des Serpentard à l'issue de leur entretien avec le vieux chapeau.
La Répartition prit fin rapidement et le professeur Dippet entama un rapide discours avant que des plats de toutes sortes n'apparaissent sur les tables sous les yeux ébahis d'Edwin.
- Tu verras, Nelly et Malia cuisinent bien, mais ça n'a rien à voir avec ce que tu vas manger ici ! lui glissa Anthony avec un clin d'œil.
Puis il fut pris à parti par ses camarades sur le classement de la ligue de Quidditch et de détourna son attention de son petit frère. Edwin se retrouva seul au milieu d'un océan d'élèves. Il était effrayé par tant de monde, n'ayant jamais été exposé à de telles foules, mais sa fierté l'empêchait de laisser paraître quoi que ce soit. Heureusement pour lui, il n'eut pas à faire le premier pas puisque son autre voisine se tourna vers lui avec un grand sourire.
- Je m'appelle Euphemia Macmillan ! s'exclama-t-elle avec entrain. Et elle c'est Haley Selwyn, ajouta-t-elle, présentant la petite blonde assise à ses côtés avec qui elle semblait avoir déjà fait connaissance.
D'abord surpris par tant d'excitation, Edwin se laissa vite gagner par la joie communicative d'Euphemia.
- Moi c'est Edwin, fit-il. Edwin Martins.
Parce que le Choixpeau pouvait bien dire ce qu'il voulait : il était le fils de ses parents et il le resterait à jamais.
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1er septembre 1938, Grande Salle, Poudlard
Tom et Lianna n'avaient pas apprécié comme ils se devaient la vue qu'avait eu à offrir le sublime paysage où se dressait majestueusement l'école de sorcellerie qui allait les accueillir. Ils avaient été bien trop occupés à s'ancrer dans leurs pensées respectives pour ne serait-ce que songer à la beauté de ce qui leur faisait face. Ils s'étaient tous deux retrouvés assis dans une barque, entourés de trois inconnus qu'ils avaient par ailleurs royalement ignorés et ... ils avaient même rembarré l'une des deux fillettes qui les accompagnait. Cette dernière et d'après ce qu'ils en avaient compris, se prénommait Doréa, mais ils ne lui avaient pas laissé le temps de continuer son début de monologue alors qu'elle leur demandait impétueusement quel était leur statut de sang et ce sous le regard courroucé des deux derniers accompagnants de la barque.
Lianna avait simplement détourné le regard, jaugeant les nombreuses barques qui avançaient dans un même mouvement, tout en mordant douloureusement ses lèvres afin de ne pas se laisser aller à la colère qui la rongeait désormais violemment de l'intérieur depuis quelques heures. Mais en quoi leur statut de sang regardait les gens ? N'y avait-il pas plus important que ces futilités ? De plus, pour qui se prenait encore cette petite fille pour leur parler de la sorte et avec tant de supériorité dans la voix ? Peut-être devrait-elle vraiment être ce monstre froid qu'on lui avait toujours décrit avec tant d'ardeur et que Liliane avait tort ?! Elle ne voyait plus que cette solution car elle n'était de toute façon rien aux yeux des autres.
Par ailleurs, quand ils avaient finalement décidé de faire subir quelques douloureux événements aux orphelins de Wool qui les avaient toujours maltraités, comme cette fois où ils avaient pendu le lapin de Billy à une poutre ou encore cette fois dans cette sombre grotte lors d'un voyage à la mer ou ils avaient fait du mal à Amy et Dennis... Lianna avait senti un étrange sentiment de satisfaction quelque peu malsain et perfide l'envahir à les regarder si apeurés et tétanisés. Elle avait aimé les voir souffrir tout comme Tom avait aimé disposer de cet avantage qu'ils pouvaient avoir s'ils le voulaient grâce à leurs pouvoirs magiques. Ils pouvaient vraiment faire du mal s'ils le voulaient.
Quant à la réaction de Tom vis-à-vis de la petite fille, il s'était retenu de la pousser dans le lac, là où il lui semblait avoir vu l'une des fameuses tentacules du calamar géant par ailleurs mentionné dans L'histoire de Poudlard. Ce livre, ils l'avaient obtenu sur le chemin de Traverse lors de leurs achats en compagnie de leur futur professeur de métamorphose, Dumbledore.
Tom s'était contenté de lui répondre glacialement qu'elle avait intérêt à se la fermer avec ses idioties, si elle ne voulait pas finir la tête la première dans le Lac Noir. Cela avait étrangement eu le don d'alourdir l'atmosphère puisqu'il avait semblé aux deux orphelins que les trois petits sorciers qui les accompagnaient semblaient ressentir une étrange appréhension- dont la nature leur était inconnue - à leur égard. La suite du voyage s'était déroulée en silence, seulement interrompu par les vents violents qui mouvaient dangereusement les barques avançant magiquement vers le château.
Maintenant qu'ils suivaient en file indienne un certain professeur Brûlopot, ils étaient frigorifiés de froid, et Tom ne serait pas surpris s'ils attrapaient une grippe dans les jours qui suivraient. Les deux orphelins s'étaient bien blottis l'un contre l'autre dans la barque les menant au château, mais cela n'avait pas empêché le vent glacial de leur gifler les joues avec virulence, les faisant trembler de froid face à ce déchaînement météorologique. Tom soupira alors qu'ils étaient pris en charge par le professeur Dumbledore -qu'il reconnut rapidement avec sa barbe rousse - car Lianna ne pipait pratiquement plus un mot depuis leur mésaventure.
Elle était fermement plongée dans ses sombres pensées et il n'osait la déranger car elle transpirait de colère et de fureur. Elle paraissait extrêmement froide à l'inverse de ce qu'elle avait été quelques heures auparavant. Une fillette pleine de bonnes intentions et d'espoir. Mais ils feraient payer ces sorciers pour ne pas avoir acceptés leur main tendue, et ils regretteraient tous amèrement leurs moqueries.
- Tu imagines si on est pas ensemble dans la même maison ? lâcha Lianna d'une voix légèrement tremblante alors qu'ils rentraient dans cette immense Grande Salle au plafond époustouflant qui ne réussit pas à les émerveiller en raison des évènements qui avaient eu lieu en fin de matinée. On n'y a pas pensé !
Le visage du jeune garçon se glaça d'horreur devant ses propos. Pour lui, c'était simple, ils seraient toujours ensemble parce qu'ils se complétaient et il avait besoin de sa meilleure amie à ses côtés. Le fait de se séparer d'elle le terrifiait donc vraiment. Certes, ils se verraient et se côtoieraient dans les diverses maisons, mais ça ne serait simplement pas pareil. Ils avaient besoin de l'un et de l'autre. Il eut l'impression que sa cage thoracique se compressait péniblement en lui alors que les mots de Lianna ne cessaient de traverser en boucle son esprit. Plus rien ne l'intéressa autour de lui omis cette terrifiante constatation. Lui qui était auparavant en colère, amer et certainement plus vraiment stressé, angoissait désormais brusquement face à cette simple pensée !
- Ça... ça n'arrivera pas, je te le promets ! Toi et moi, on sera dans la même maison !
C'est pourtant à cause de cette constatation et de la peur d'être séparé de Lianna qu'il ne fit même pas attention à cette foule d'étudiants plus âgés déjà bien installés à leurs tables respectives et qui les dévisageaient tous curieusement alors que les premières années se positionnaient tous nerveusement devant une estrade où se trouvait une longue table dédiée aux professeurs. C'est aussi à cause de cela qu'il ne fit pas attention au discours du directeur Dippet, ni même au choixpeau rapiécé que Dumbledore avait posé sur un tabouret à trois pieds et qui s'était d'ailleurs mis à chanter sous l'expression de surprise de la plupart des nouveaux élèves. Non, Tom songeait à sa possible séparation avec sa meilleure amie de toujours, et il se fit la réflexion que Lianna devait certainement songer à la même chose au vu du teint blafard qu'elle abordait désormais sur son visage. Il n'osa pas pénétrer ses pensées pour l'apaiser car lui-même était anxieux à cette idée, et il ne contrôlait pas bien ce pouvoir quand il était angoissé, alors il se pencha simplement vers sa meilleure amie afin de lui chuchoter un conseil qui lui serait bien utile.
- Il faut que tu aies cet air confiant sur ton visage quand on va nous appeler pour nous répartir, lâcha-t-il soudainement. Ça va aller, tenta-t-il, rien ne doit nous atteindre quoi qu'il arrive, continua le sorcier en attrapant la main de son amie qu'il pressa doucement contre la sienne. Je ne t'abandonnerai pas.
Et alors que la cérémonie de la Répartition débutait, il fit à peine attention aux enfants qui défilaient à la chaîne devant leurs yeux, jusqu'au moment où le nom de ceux qui les avaient humiliés chacun à leur façon passèrent sous le Choixpeau magique. Martins, n'est-ce pas ? Et l'autre fille qui était passé bien avant eux était Eloise Carrow ? Les trois avaient terminé à Serpentard, l'une des maisons qu'ils avaient eu le plaisir de découvrir dans L'histoire de Poudlard. Mais peu importe leurs maisons, ils leur montreraient qui étaient Tom Riddle et Lianna Sauwer ! Leurs noms étaient fermement et définitivement marqués au fer rouge dans son esprit et, il en était certain, dans celui de son amie.
- Riddle, Tom, appela Albus Dumbledore en lisant un immense parchemin recouvert des noms des premières années.
Tom sortit brusquement de sa rêverie. Lianna pressa à son tour sa main en signe d'encouragement et il tenta à nouveau d'afficher un air froid et assuré afin de montrer aux élèves qui allaient se retrouver devant lui, et alors qu'il allait aller s'asseoir sur ce tabouret, qu'il n'avait pas peur d'eux.
C'est sous ces songes qu'il s'avança dignement sur l'estrade afin de s'asseoir sur le tabouret. Et tandis qu'il inspirait discrètement, il eut le temps d'apercevoir les prunelles de sa meilleure amie avant que sa vision ne soit assombrie par le choixpeau magique qui venait d'être déposé sur son crâne. Conscient que plus personne ne le voyait sous ce chapeau magique, Tom se permit alors de déglutir légèrement et il attendit patiemment le dénouement qu'allait énoncer cet intriguant objet magique.
« Je vois beaucoup de colère et de tristesse en toi, jeune Tom. »
Tom sursauta légèrement, en écoutant cette voix résonner dans son esprit sans qu'il ne s'y attende. Cet objet savait-il pénétrer les pensées comme Lianna et lui-même le faisaient entre eux ? Il ne voulait pas qu'il ressente tout ce qu'il éprouvait à l'intérieur de lui, c'était privé, et il ne voulait pas de moqueries supplémentaires même si elles étaient énoncées par un vieux chapeau magique, il n'en avait pas le droit !
« Cela s'appelle de la légilimencie », accorda l'objet. « Il est effectivement très impressionnant de savoir que ton amie et toi-même pouvez non seulement l'utiliser mais surtout le faire à un si jeune âge. Je n'ai aucunement l'intention de me moquer de toi. Tu ne mérites pas de ressentir une telle souffrance, mon garçon. »
« Contentez vous de me répartir saleté de chapeau, au lieu de lire mes pensées privées ! » siffla Tom dans son esprit. « Ça ne vous regarde pas ! »
« Comme je le disais, tu as beaucoup de colère en toi », continua le chapeau comme s'il n'avait pas été interrompu par la remarque de Tom. « Tu disposes déjà de capacités assez étonnantes pour ton âge. Tu es très rusé et ambitieux... Et, comme un des enfants que j'ai réparti un peu avant toi, tu désires ardemment faire tes preuves. Tu veux prouver que tu peux devenir quelqu'un d'important dans le monde des sorciers. Tu as tant envie de prouver ta valeur aux yeux des autres que c'est ... très impressionnant pour un garçon de onze ans. Mais tu dois aussi faire attention, je vois que tu ne crois plus vraiment en la bonté des gens qui t'entourent depuis un bon moment. Et pourtant, au plus profond de toi, tu sais que tu n'as juste pas réussi à trouver d'autres bonnes personnes à l'image de ton amie que tu aimes profondément ou de cette femme que tu considères comme ta mère. Elle a raison tu sais d'ailleurs, tu ne dois jamais cesser de croire Tom, même si c'est difficile et que tu ne te sens pas à ta place. Tu ne dois pas croire que tout est noir ou blanc. La colère et la haine peut nous pousser à faire des choses horribles, mais tu as des personnes sur qui compter, fit-il mystérieusement. Quand certaines choses n'auront plus de sens à tes yeux et que tu auras l'horrible impression de sombrer, pense à rallumer la lumière afin d'en éteindre les ténèbres. »
Secoué par son discours, Tom ne réagit pas devant ses propos et cligna des yeux afin de reprendre ses esprits.
« Sur ce », termina le Choixpeau, « il me semble que de par ton sang, et au vu de tes caractéristiques personnelles, je sais depuis le début où je dois t'envoyer. »
- SERPENTARD !
Perturbé par les paroles mystérieuses de ce vieil objet, Tom réussit malgré tout à descendre dignement du tabouret. Un sentiment de fierté le traversa alors qu'il se dirigeait vers la table qui l'applaudissait à tout rompre, car il était dans la maison qui lui avait semblé la plus digne de les accueillir Lianna et lui-même. En songeant à son amie de toujours, il lui renvoya un sourire encourageant alors qu'elle venait d'être appelée à son tour et que, lui, allait s'asseoir pour la première fois, au bout de la longue table des Serpentard.
Tom venait de décider à l'instant qu'il gravirait les échelons et que, quoi qu'il lui en coûterait, il se ferait respecter au sein de cette école. Il allait montrer qu'il était supérieur à tous ces sorciers et Lianna qui venait de s'asseoir dignement et à son image sur le tabouret, se tiendrait à ces cotés dans la réalisation de ce nouvel objectif. Il ignora le flot d'élève qui l'entourait, se concentrant intensément sur la petite silhouette amaigrie de sa meilleure amie. Il lui fallut attendre encore deux minutes avant qu'il ne s'autorise à laisser échapper un soupir de soulagement alors que le Choixpeau scandait « SERPENTARD ! », et qu'elle puisse ainsi le rejoindre avec assurance et occupé l'une des dernières places restantes qu'il venait de lui obtenir en repoussant un gamin un peu plus loin sur le banc.
- Je t'avais dit qu'on était pareil, lança Tom avec un petit sourire, en pressant joyeusement la main de son amie. On sera toujours ensembles. Maintenant, nous devons nous faire plus q'une place au sein de l'école. Ils auront si peur de nous que plus personnes n'osera nous embêter.
Lianna répondit avec un sourire étrange car oui, ils deviendraient les meilleurs sorciers de Poudlard et ce quelques soient les moyens possibles et inimaginables qu'ils pourraient utiliser.
- On sera les meilleurs sorciers de l'école, approuva-t-elle avec assurance.
~*~
1er septembre 1938, Grande Salle, Poudlard
Lianna détestait les bruits des rumeurs des conversations que la foule d'élèves provoquait autour d'elle. Elle ne supportait d'ailleurs déjà plus les cris des plus petits à l'orphelinat pour la simple et bonne raison qu'elle était jalouse de l'attention que ceux-ci engendraient chez les frères et soeurs alors qu'elle n'en avait jamais eu droit. Plus petite, elle aimait se faufiler et regarder les bébés dans la grande nurserie de l'orphelinat et ce, dans le but d'essayer de les faire rire quand ils pleuraient à pleins poumons. Cependant, ayant été prise à diverses occasions par ces hommes et ces femmes de Dieu, qui n'avaient cessé de lui répéter que sa monstruosité n'avait pas à se frotter à l'innocence et la pureté des petits, elle avait fini par abhorrer les pleurs d'enfants en bas âge.
La Répartition avait rapidement pris fin quelques dizaines de minutes après qu'elle fut passée sous le Choixpeau. Le professeur Dippet avait entamé un rapide discours avant que des plats de toutes sortes n'apparaissent sur les tables et ce sous les yeux ébahis des nouveaux étudiants de Poudlard.
Après qu'elle se soit assise auprès de Tom qui avait expressément fait dégager un autre petit garçon un peu plus loin sur le banc afin de lui laisser de la place, ils avaient brièvement discuté de la façon dont ils devaient aborder les choses désormais. Plus de confiance en personne. Plus de gentillesse. Une froideur absolue envers les autres était de mise. Ils seraient studieux. Ils se surpasseraient et seraient aimé de l'ensemble du camp professoral. Les autres sorciers finiraient par en être jaloux. Oui, tels étaient leurs objectifs principaux !
Sous ces promesses qu'ils s'étaient faites par le biais de la légilimencie afin de n'être écouté de personne, ils avaient entamé « silencieusement » le dîner, en profitant malgré tout de tous ces mets qui leur étaient proposé, eux qui n'avait jamais vraiment eut l'occasion de manger à leur faim au sein de l'orphelinat, en profitait largement.
Depuis qu'ils venaient d'échanger quelques paroles sur leur entrevue avec le Choixpeau Magique, Lianna s'était replongée dans ses pensées, se posant une multitude de questions vis-à-vis de sa propre discussion nébuleuse avec l'objet en question. Le choixpeau lui avait expliqué d'un air mystérieux que ses pensées étaient troubles et confuses. Il lui avait dit de ne pas se laisser manger par la colère, et qu'elle était assez rusée et ambitieuse pour devenir quelqu'un d'important au sein de la société. Ensuite, et c'était ce qui la troublait particulièrement, il lui avait demandé si elle était de la même famille qu'un ancien Serdaigle du même nom de famille qu'il avait eu un jour à répartir mais dont il avait oublié le prénom. Elle avait répondu d'une voix faible qu'elle ne savait pas car elle n'avait aucune famille. Elle lui avait alors assuré qu'elle vivait dans le monde moldu et que ce n'était donc pas possible.
Du moins, c'était ce que la fillette croyait fermement. Après une très brève hésitation avec ladite maison des « aigles », apparemment d'une grande intelligence, le Choixpeau avait décréter que son envie de faire ses preuves ainsi que sa ruse était ce qui allait l'envoyer dans la même maison que son meilleur ami. Il avait terminé son monologue avec une phrase mystérieuse qui ne cessait de tourner en boucle dans son esprit et qui lui donnait un début de mal de tête « Entre les ténèbres et la lumière, il n'y a qu'un pas pour toi. Ton destin dicte tes pas depuis la nuit des temps, et tes pensées parfois contradictoires pourront t'emmener sur des chemins nébuleux provoqués par celui-ci ». Tom avait beau de lui dire que ce « truc moisi » était défectueux et qu'à lui aussi il lui avait énoncé des paroles étranges, elle demeura perturbée quelques instants encore.
- Hé, vous deux, pourquoi vous restez silencieux ? les héla une voix pleine d'entrain.
Elle sortit brusquement de ses pensées alors qu'un fantôme passait littéralement devant ses yeux afin de poursuivre son chemin vers d'autres de ses compères. Puis, elle cligna des yeux lorsqu'elle se rendit compte qu'on s'adressait à elle. À quelques places de Tom et d'elle-même, se trouvait une fille cheveux châtains qui n'avait cessé de parler avec enthousiaste et de faire connaissance avec tout le monde depuis qu'elle se trouvait assise à cette table. Elle espérait certainement se faire le plus d'amis possible songea Lianna avec amertume. Encore une fois, elle attendait le flot de moqueries dont ils seraient les victimes d'ici quelques secondes avec et pour la première fois, une étrange indifférence.
- Qu'est-ce que tu nous veux ? cracha Tom à sa place, en se penchant à son tour sur le devant de la table afin d'apercevoir la fillette, qui se trouvait un peu plus loin d'eux. Un conseil, tais-toi avant de dire une bêtise que tu pourrais regretter, et ne nous adresse pas la parole, lâcha le petit garçon froidement.
Les quelques élèves plus âgés qui les entouraient furent apparemment stupéfaits de la réparti de son ami car certains écarquillèrent les yeux. Mais elle s'en fichait car c'était après-tout ce qu'il fallait faire pour ne plus se faire marcher sur les pieds. Et elle fut ravie d'apercevoir un semblant de peur traverser les yeux marron de cette petite fille pleine de vie. C'était limite ... amusant.
- Il a raison... Euphemia, c'est ça ? Evitez de leur parler, regardez leur robe de sorcier : elles sont de seconde main... Ce sont certainement des Nés-Moldus et des pauvres qui plus est... C'est dégoûtant. Ils ne sont pas dignes de se retrouver à cette table.
Les rires fusèrent alors autour des dires de la petite Eloïse Carrow. Et alors que même Tom baissait honteusement et momentanément les yeux sur son assiette, se faisant ridiculiser devant une partie de la table des Serpentards, Lianna serra la mâchoire de colère et se promis à son tour de lui faire subir mille et une torture dès qu'elle en aurait la possibilité.