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Introduction : Cette histoire est la continuation des événements relatés dans Ginny la furie en sixième année, qui eux même faisaient suite au Journal de Ginny la furie que nous devons à Alysia.
Je vous conseille donc vivement de vous reporter à ces deux récits avant de commencer celui-ci.
Si vous préférez commencer par ce récit, je vous mets ci-dessous un bref résumé des épisodes précédents.
Ginny, qui vient tout juste d'avoir 16 ans, est complètement déchaînée et décide de se prendre en main pour convaincre son entourage qu'elle n'est plus une petite fille. Elle aura du mal à tenir ses bonnes résolutions d'autant que Harry Potter arrive au Terrier pour y passer un mois auprès de ses amis. Malgré les gaffes incessantes de l'adolescente, ce séjour rapprochera les deux jeunes gens.
Dès la rentrée à Poudlard, la jeune fille, encouragée par les relations qu'elle a noué avec le Survivant durant l'été, lui proposera de sortir avec elle. Bien qu'enclin à fuir toute relation amicale ou sentimentale à cause du destin qui l'attend, Harry accepte la proposition. Tout au long de l'année, les deux jeunes gens, confrontés à la guerre qui se déchaîne aux portes de Poudlard, vont mûrir, apprendre à assumer les responsabilités qui leur incombent et s'entraider pour faire face à l'adversité. Ces épreuves vont les rapprocher, et ils constituent un couple très uni quand Harry part affronter Voldemort.
L'action commence juste après que Harry, Ron, Hermione, Arthur, Lupin et Dumbledore soient allés rejoindre les Aurors et membres de l'Ordre qui doivent affronter Voldemort et ses Mangemorts. Ginny, sur la demande de Harry est restée au Siège (nom de la maison où se réunissent les membres de l'Ordre du phénix).
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Pendant un long moment, Ginny fixe l'endroit désormais vide où son fiancé, son père, son frère et ses amis se sont tenus.
C'est un tintement de vaisselle qui la tire de sa transe. Sa mère vient d'entreprendre de débarrasser la table du petit déjeuner. Ginny est tentée de lui conseiller de laisser faire les elfes, mais elle se rend compte que se lancer dans le ménage est pour Molly une façon de combattre l'angoisse et d'occuper son attente. En soupirant, elle commence à l'aider.
Après avoir astiqué la cuisine et fait les chambres, elles s'attellent à la préparation d'un repas léger. Mais ni l'une ni l'autre n'y font honneur, trop inquiètes pour avoir faim. Tout le temps du repas, elles se bornent à regarder manger Mondigus Fletcher et une femme dont Ginny ne connaît pas le nom, qui sont restés pour assurer la protection du Siège. Une fois la table à nouveau nettoyée, Ginny monte dans sa chambre pour remplir son journal intime, dans se douter qu'elle ne le rouvrira que vingt ans plus tard.
Quand elle redescend, elle trouve sa mère en train de faire voler les couteaux de cuisine autour d'un monceau de légumes. En réponse à son regard éberlué, cette dernière lui explique que "quand ils rentreront, ils auront sans doute très faim". Sans répondre, la jeune fille s'assoit dans un coin de la pièce et admire distraitement le ballet ménager.
Alors que Molly applique un sort de conservation à la trentaine de bocaux dûment remplis de soupe, le carillon du vestibule se fait entendre. Les deux femmes se précipitent. Seamus Finnigan et Parvati Patil viennent d'apparaître, encadrant un sorcier couvert de sang et de poussière.
"Où est Harry ?
- Qui a gagné ?, demandent simultanément les deux Weasley.
- C'est un vrai bordel, là-bas, répond Seamus d'une voix mal assurée. Je crois qu'on a gagné. Nous, on a rien vu. On était "en réserve". Mais maintenant, nous devons faire le tri, amener les blessés graves à Sainte Mangouste et ceux qui vont à peu près bien ici. Parvati, tu devrais rester sur place. Il faut des bras ici aussi."
Celle-ci hoche la tête, manifestement soulagée à l'idée de ne pas avoir à retourner d'où ils viennent. Sans perdre davantage de temps, Seamus confie le combattant à Ginny et transplane.
Les heures suivantes sont consacrées à l'arrivée de blessés légers ou de soldats indemnes mais affamés et épuisés. La barrière anti-transplanage ayant été levée, il en arrive de partout. Heureusement, des bras secourables et des provisions font également leur apparition, permettant à Molly de faire face à cette affluence d'invités. Vers 23 heures le flux se tarit et Ginny et sa mère peuvent enfin échanger deux mots. Selon les informations qu'elles ont pu soutirer aux arrivants, Voldemort a bien été détruit, les pertes ont été lourdes et nul n'a pu leur donner de nouvelles de Harry, des Weasley ou d'Hermione. Elles délibèrent pour savoir si l'une d'entre elles doit se rendre à l'hôpital sorcier quand Bill arrive.
Comme les autres, sa robe est zébrée de traces brunes, boue et sang mêlés. Il est très pâle. Quand sa mère et sa sœur s'approchent de lui, il les serre contre lui. Voyant la panique monter dans leurs yeux il s'efforce de les mettre au courant.
- Je reviens de Sainte Mangouste... Harry a survécu, Hermione va bien. Ron... il a été blessé, mais on a bon espoir. Je n'ai pas vu les jumeaux mais j'ai rencontré quelqu'un qui m'affirme leur avoir parlé. Ils vont bien eux aussi."
Bill fait une pause. Pendant que Ginny se répète inlassablement "Harry a survécu", Molly pâlit peu à peu. Quand Bill l'attire à nouveau, les yeux emplis de larmes, elle sait que, finalement, cela a fini par arriver. Ginny contemple un moment sa mère et son frère, interdite. Qu'est ce qui ne va pas ? Harry est vivant !
Elle se remémore silencieusement ce que son frère vient de dire : Harry, Ron, Hermione, les jumeaux. Percy doit être au Ministère. Il manque...
"Papa !" s'écrie-t-elle.
Le regard noyé de son frère au dessus l'épaule de leur mère, fait pénétrer la nouvelle jusqu'à sa conscience. Elle inspire profondément, luttant contre les sanglots qui menacent de l'étouffer. Non, ce n'est pas possible. Pas son père. Lui qui est si bon, si doux, si généreux... Lui qui n'a rien d'un guerrier, comme a-t-il pu mourir à la guerre ?
Elle inspire de nouveau. Elle ne veut pas penser à cela maintenant. Elle va s'effondrer si elle y pense. Elle n'a pas le droit de craquer. Elle est certaine qu'Harry a besoin d'elle maintenant. Il a tué Voldemort, il a vu ses alliés mourir, il ne doit pas aller bien. Son devoir lui ordonne de mettre ses propres sentiments de côté et d'aller l'aider. Oui, c'est ce qu'elle va faire.
"Je dois aller voir Harry, dit-elle. Tout de suite."
Bill lui lance un regard choqué.
"C'est tout ce que tu trouves à dire ? Papa est mort !"
- Bill ! intervient Molly. Elle a raison. Notre premier devoir est d'aider les vivants. Moi, je veux voir Ron."
Bill les regarde un instant, comme s'il n'en croit pas ses oreilles.
"Mais vous n'avez pas l'air de vous rendre compte comment c'est dehors ! D'abord, il y a encore plein de Mangemorts en liberté, plus dangereux que jamais car ils n'ont plus rien à perdre. Ensuite, c'est la folie à l'hôpital. Les services sont débordés et ils n'ont pas besoin d'avoir les famille éplorées dans les jambes."
Sa mère ne prête aucune attention à ses protestations.
"Je vais voir Ellen Patil, déclare-t-elle. Elle devrait pouvoir me remplacer avec l'aide de ses jumelles. De toute façon, tout le monde est couché maintenant. Va chercher ta cape, ma chérie, continue-t-elle à l'intention de sa benjamine. Toi tu nous attend ici, conclut-elle d'un ton sans réplique en se tournant vers son aîné.
- Elle sont complètement folles", murmure ce dernier, pendant que les deux femmes s'élancent dans l'escalier.
Leur transplanage les amène directement dans le hall d'accueil de Ste Mangouste. La description que leur a faite Bill est largement en dessous de la vérité. Il règne dans l'endroit un chaos indescriptible. Dans un premier temps, Ginny est atterrée. Comme retrouver Harry dans un désordre pareil. Mais elle reprend vite confiance. Après tout, il n'y a que cinq niveaux à visiter, et l'endroit où l'on soigne le Survivant est sûrement gardé par des Aurors. Il suffit de repérer les fonctionnaires en faction pour découvrir dans quelle chambre il repose.
"Commençons par le quatrième étage", dit-elle simplement, en se dirigeant vers les escaliers, dédaignant les ascenseurs bondés. Sa mère décidée et son frère résigné lui emboîtent le pas.
Au bout d'une heure de recherche, elle commence à se demander si elle a choisi la bonne méthode. Il n'y a que cinq niveaux, oui, mais ils sont immenses. Sans compter, qu'ils ne sont pas les seuls à rechercher Harry. Leur petite troupe a rencontré de trop nombreux journalistes errant comme eux dans les couloirs, à la recherche d'informations. L'état de Bill leur fait espérer être tombé sur un témoin de choix mais les yeux furieux et le rictus agressif de ce dernier décourage les plus tenaces. Finalement, ils finissent par croiser Hermione. Comme les autres, elle paraît avoir besoin d'un bon bain, a les yeux rougis, mais elle est indemne. Dès qu'elle les aperçoit, elle s'écrie :
"Oh Ginny, Dieu soit loué, tu es là !
- Où est-il ?"
Mais la jeune fille brune ne lui répond pas directement.
"Ron est dans cette chambre, Molly. C'est dur à voir. Mais il a de bonnes chances de s'en tirer."
Sans un mot, Mrs Weasley entre dans la chambre de son plus jeune fils. Hermione s'adresse alors à Bill.
"Tu devrais y aller aussi. Ce n'est pas un joli spectacle..." Sa voix se brise alors.
Bill acquiesce et suit sa mère, trop fatigué pour discuter.
Hermione saisit alors le bras de Ginny et sans un mot l'entraîne dans toute une série de couloirs. Finalement, elle pousse une porte marquée Buanderie, et, contournant les piles de linges, se plante finalement devant un placard miteux.
- Il y a un corridor juste derrière, murmure-t-elle. Il donne sur la porte de la chambre de Harry. Elle est gardée par des Aurors. Tu te rappelles de ton sortilège de discrétion ?"
La jeune rousse hoche la tête.
"Oui, mais je n'y suis jamais complètement arrivée.
- Ce n'est pas grave, j'étendrais le mien sur toi. Fais de ton mieux, c'est tout."
Soudain, Ginny a l'impression d'être seule. Aussi fatiguée qu'elle soit, Hermione arrive toujours à des résultats spectaculaires. La jeune Weasley se concentre, prononce la formule et entrouvre doucement la porte du placard. Elle se glisse doucement dans l'entrebâillement. Trois Aurors, l'air pas commodes, sont plantés devant une petite porte grise qui se fond presque dans le mur. Ils ne semblent pas avoir remarqué qu'ils ne sont plus seuls, et continuent tranquillement leur conversation. Bénissant Hermione, Ginny se faufile discrètement entre deux épaules musclées et abaisse la poignée de la porte qui lui fait face. Elle s'insinue ensuite furtivement dans la pièce suivante, songeant que la réputation des Aurors est peut être un peu usurpée. Repoussant le battant derrière elle, elle relève juste les yeux pour constater que trois baguettes sont pointées dans sa direction. Elle n'a pas le temps de faire le moindre geste avant d'être fauchée par un Stupéfix.
Quand elle reprend conscience, l'arrière de sa tête lui fait mal et elle a les oreilles bourdonnantes. Se rappelant de ses cours de Duel, elle essaye d'évaluer la situation avant de faire le moindre geste. Mais les trois personnes qui l'entourent semblent pertinemment savoir qu'elle a repris conscience.
"Comment allez vous, mademoiselle Weasley, dit l'un des hommes, lui tendant un bras secourable pour l'aider à se remettre sur pied.
- A merveille", répond-elle, essayant désespérément d'identifier son interlocuteur. Elle connaît ce grand homme noir, il fait partie de l'Ordre, mais il lui faut quelques secondes pour se rappeler de son nom.
"Bon sang, Shacklebolt, prononce assez rudement une voix féminine, on n'est pas à une réunion mondaine !
- Cette jeune dame ne représente aucun danger pour notre protégé, réplique tranquillement Kingsley Shacklebolt. Elle n'est pas journaliste non plus. Mademoiselle Virginia Weasley, je vous présente Daniela Freegarden et Peter Slave.
- Enchantée", réplique la jeune fille un peu perdue.
Elle regarde autour d'elle. Elle n'a pas l'impression d'être dans une chambre d'hôpital et Harry ne semble nulle part. Elle examine ses vis-à-vis. Shacklebolt a l'air de se demander ce qu'il convient de faire, et ses deux compagnons la toisent sans aucune aménité. Elle remarque qu'on l'a délestée de sa baguette.
"Je veux le voir ! dit-elle fermement.
- C'est impossible. A moins que vous ne présentiez une autorisation signée par le Ministre lui-même, c'est hors de question ! riposte le cerbère en jupons.
- Il est au secret, explique plus doucement Shacklebolt.
- Je sais ce que c'est, répond la jeune femme luttant contre la fatigue et le découragement. Tout l'été j'ai été mise au secret moi aussi. Pour l'aider. Et je veux continuer. Demandez au professeur Dumbledore, je suis sûre qu'il vous dira de me laisser y aller.
- Dumbledore ne dira plus rien du tout", réplique sèchement Daniela Freegarden.
Il faut plusieurs secondes à Ginny pour comprendre ce que signifient ces paroles. Elle ferme un instant les yeux. Elle sait qu'elle aura encore à apprendre le décès d'autres personnes qu'elle a connu et apprécié. Elle avait toujours pensé qu'une fois Voldemort éliminé, ce serait fini. Mais non, elle s'est trompée. Une autre forme de bataille commence. Il va falloir à apprendre à vivre avec le néant là où l'on avait pris l'habitude de compter sur des proches et des amis.
Oh Merlin, mais comment Harry va réagir ? Lui qui se sent toujours si responsable de ce qui arrive ! Elle sent soudain enfler sa rage contre ces agent bornés qui l'isolent de ses amis alors qu'il en a sans doute désespérément besoin. Elle retient les injures qui lui montent aux lèvres, sachant que cela la desservirait. Mais qu'est ce que Hermione ferait dans une situation pareille ? Elle raisonnerait. Et bien il ne sera pas dit que Ginny Weasley ne sait pas raisonner.
Elle se tourne vers celui qui est le plus à même d'être sensible à ses arguments.
" Monsieur Shacklebolt, Harry aujourd'hui... a fait la guerre. Il a dû affronter un monstre maléfique et cruel. Il a vu des gens mourir. Vous n'avez pas le droit de le mettre à l'isolement comme si c'était lui le criminel. Vous n'avez pas le droit de l'empêcher de voir ses proches. Il a besoin d'eux plus que jamais."
L'homme contemple un instant l'adolescente, le visage impénétrable. Puis il fait signe à ses comparses, les entraînant quelques pas plus loin. Une discussion assez vive s'engage. Finalement, les trois gardiens reviennent vers la jeune fille qui essaye désespérément d'établir un autre plan d'action dans le cas où on lui signifierait son congé.
"Nous allons vérifier que vous ne portez sur vous aucun objet magique" dit la femme.
Ginny les remercie d'un signe de tête, tandis que l'homme qu'on lui a présenté sous le nom de Peter Slave dirige sa baguette vers elle, balayant tout son corps. Quand il arrive à hauteur de sa poitrine, il hausse les sourcils.
"Portez-vous un collier ?
- Euh… Ah oui !", se rappelle un peu tard Ginny en montrant l'amulette que Harry lui a offerte quelques mois auparavant.
Il l'examine rapidement.
"Il va falloir nous le confier. Votre anneau aussi."
Elle se dépouille à regret des deux cadeaux lui venant de Harry. Cela n'a pas d'importance, pense-t-elle. Ce qui compte, c'est que je puisse lui tenir la main, le prendre dans mes bras.
"Mademoiselle Weasley, reprend Shacklebolt, je préfère vous prévenir tout de suite. Il est inconscient. D'après ce que j'ai compris au charabia des guérisseurs, il n'est pas blessé mais son esprit est inaccessible.
- Inaccessible.. mais comment ?
- Je ne sais pas. Et je pense que nos grands pontes ne savent pas non plus. Il y en avait trois et ils n'avaient pas l'air d'accord."
La jeune femme hoche la tête, essayant de ne pas se laisser gagner par l'abattement.
"Où est-il demande-t-elle simplement
- Mais ici, très chère !"
Les trois gardiens pointent leur baguette vers un coin poussiéreux de la pièce miteuse où ils se trouvent. Se consultant du regard pour s'accorder, ils prononcent en même temps une incantation.
Tout à coup, la pièce se transforme et ressemble enfin à ce que l'on attend d'une chambre d'hôpital. Mais Ginny ne voit que le lit où repose celui qui est au cœur de ses préoccupations. Il paraît dormir, livide sur l'oreiller blanc. Il est vêtu d'une chemise d'hôpital immaculée, recouverte d'un drap d'une blancheur neigeuse. Seuls tranchent le noir de ses cheveux et la rougeur purulente de sa cicatrice.
Elle s'approche doucement. Du premier coup d'œil, elle constate que son état est pire que tout ce qu'il a connu l'année précédente. Même après avoir défié Voldemort à la table des Serpentards, même après avoir indirectement assisté au meurtre de son oncle et sa tante, il n'avait pas été aussi... absent.
Attrapant sa main glacée, elle s'assoit sur une chaise installée au chevet du lit. De son autre main, elle caresse lentement ses cheveux et son visage inerte. Finalement, elle se penche pour faire reposer sa tête dans le creux de l'épaule du jeune homme, comme elle l'a fait tant de fois au cours des derniers mois pour s'endormir. A son tour, elle sombre.
"Que fait cette fille ici ? Comment est-elle entrée ?"
Une voix accusatrice et désagréable tire Ginny de sa torpeur. Elle se redresse vivement, grognant en réponse aux vives protestations de sa colonne vertébrale. Trois guérisseurs et deux infirmières l'encadrent, la regardant sévèrement.
"Cette jeune fille, répond Kingsley Shacklebolt, fait partie de la famille d'adoption de votre patient. Elle est venue lui rendre visite.
- Vous êtes là précisément pour interdire toute visite, il me semble.
- Nous sommes là pour soustraire ce garçon aux dangers d'une attaque de Mangemorts et à la curiosité des journalistes ou d'admirateurs trop enthousiastes. Mademoiselle Weasley n'appartient à aucune de ses catégories.
- Nous en reparlerons. En attendant faites-la sortir. Nous n'avons pas de temps à perdre.
- Je ne vous empêche pas de l'examiner !" réplique la jeune femme s'immisçant dans la conversation.
Elle se lève pour leur laisser la place, mais reste fermement plantée à deux mètres du lit, signifiant ainsi qu'elle n'a pas l'intention de quitter la pièce.
"Mademoiselle Weasley, pourra peut-être nous apporter des éléments intéressants sur le mental de notre patient", intervient un des guérisseurs.
Un peu mieux réveillée, Ginny s'aperçoit quelle connaît la personne qui vient de parler. Elle a de la chance, Sylvia Baker fait partie de l'équipe soignante.
- Vous n'allez pas recommencer, reprend sèchement le guérisseur-en-chef. Je ne vois pas pourquoi ce garçon fermerait volontairement son esprit. C'est sans doute Vous-Savez-Qui qui l'a attaqué et blessé mentalement !
- D'après le professeur Dumbledore, s'ingère Ginny, sa pratique de l'occlumencie l'a rendu imperméable à ce genre d'attaque."
Le guérisseur qui jusqu'alors n'était pas encore intervenu, semble s'intéresser pour la première fois à la discussion.
"Harry Potter pratique l'occlumencie ?
- Oui, depuis trois ans.
- Cela ne veut pas dire que Vous-Savez-Qui n'a pas réussi à vaincre ses défenses, oppose le guérisseur-en-chef.
- Non, mais l'impact d'une attaque est différent selon que l'esprit qui en est victime pratique ou non l'occlumencie.
- Si c'est effectivement Voldemort qui est responsable de son état, insiste Sylvia Baker.
- Mais enfin, pourquoi fermerait-il son esprit de lui-même ! explose le guérisseur-en-chef. Ce garçon est le plus grand héros de tous les temps ! Il doit être fier de lui !
- Mais pas du tout, s'écrie Ginny. Il a toujours détesté l'idée qu'il devrait tuer quelqu'un, même son pire ennemi. Et il a vu tomber de gens qu'il aimait et qui l'avaient protégé toutes ces années : Dumbledore, mon père..." La voix de la jeune fille se casse.
"Remus Lupin", complète le docteur Baker.
Ginny est atterrée par cette nouvelle. Le dernier des Maraudeurs...
"Quoiqu'il en soit, la piste de la légilimencie est la plus intéressante que nous ayons jusqu'à maintenant, reprend le guérisseur. Par contre, si effectivement, ce jeune homme a une pratique durable de l'occlumencie, il faut que nous trouvions un mage particulièrement puissant dans ce domaine."
Le guérisseur-en-chef ne répond pas, marquant ainsi son adhésion et Sylvia acquiesce de la tête. Les trois guérisseurs entreprennent ensuite d'examiner le malade.
"Etat stable", est le seul commentaire des patriciens.
Pendant que le guérisseur-en-chef dicte ses instructions aux infirmières, le Dr Baker explique brièvement à Ginny que physiquement, Harry va bien. Par contre, il est mentalement absent. Elle montre à la jeune fille deux bracelets qui ont été mis aux poignets du jeune homme. Ces derniers lui donnent l'énergie dont il a besoin pour survivre.
"Où est sa gourmette ?" demande brusquement la jeune rousse.
En réponse au regard interrogatif de la guérisseuse elle explique de quoi il retourne.
"Je vais voir ce que je peux faire pour qu'on lui remette, lui assure Sylvia. Plus il y aura de liens entre Harry et ceux qu'il aime, plus on a de chances de le voir rapidement revenir à lui."
Après le départ du corps médical, Daniela Freegarden, la femme Auror, suggère à la jeune visiteuse de monter au salon de thé de l'hôpital pour y prendre son petit déjeuner. Eux-mêmes, fait-elle valoir, vont bientôt être relevés. Ils informeront l'équipe suivante pour qu'ils la laissent passer. Ginny se rend compte qu'elle meurt de faim. Elle n'a pratiquement rien mangé depuis la veille au matin. D'ailleurs, les deux infirmières qui sont restées sur place, dressent un paravent devant le lit de leur patient, s'apprêtant sans doute à lui faire sa toilette. Non que Ginny se sentirait gênée de voir le corps dénudé de son amant, mais il lui déplaît de le voir dans un tel état de dépendance. Oui, aller déjeuner et faire elle aussi un brin de toilette n'est pas une mauvaise idée.
On lui rend sa chaîne et son anneau et sa baguette, puis Kingsley Shacklebolt la raccompagne dans le corridor, la présente aux Aurors de garde et insiste pour qu'eux aussi passent la consigne à l'équipe montante. Elle le remercie et se rend aux toilettes des dames avant de se diriger vers la cafétéria. Elle y retrouve Hermione en train de tenter de convaincre Mrs Weasley de prendre un petit déjeuner consistant. Ginny les rejoint et leur demande comment va Ron.
"Ses blessures sont assez graves, explique Hermione. On les a soignées autant que faire se peut, mais tout dépend de sa résistance physique maintenant. Heureusement, l'entraînement que nous avons subi toute l'année et cet été nous a bien maintenu en forme. Et il a une bonne constitution. Par contre, il est possible qu'il lui reste des séquelles", conclut-elle un ton plus bas.
Les trois femmes restent quelques instants silencieuses avant qu'Hermione ne reprenne :
"Et Harry ?"
Ginny rapporte ce que lui avait expliqué Sylvia Baker et leur expose les mesures de sécurité mises en place.
"Nous ne pouvons pas aller le voir ? s'inquiète Molly
- Je ne suis même pas sûre de pouvoir y retourner, soupire sa fille.
- Molly, vous êtes restée debout toute la nuit. Il est temps d'aller vous reposer, s'interpose Hermione. Je resterai près de Ron. Je vous promet de vous envoyer un hibou ou d'aller vous chercher immédiatement s'il se réveille."
Ginny remarque alors qu'Hermione s'est changée. Elle a dû rentrer au Siège et prendre un repos bien mérité la nuit précédente.
Hermione s'adresse maintenant à elle :
"Toi aussi tu devrai rentrer Gin. Tu as passé toute la nuit ici après avoir passé des heures à t'occuper de ceux qui ont débarqué là-bas.
- C'est bon, j'ai un peu dormi cette nuit. Je passerai peut-être cet après-midi pour prendre une douche. Mais je veux retourner voir Harry auparavant. Je ne lui ai même pas parlé. Je voudrais essayer d'entrer en contact avec lui au moins.
- Comme tu veux. Je serai avec Ron, chambre 456. Molly, insiste-t-elle une fois de plus, vos fils ont besoin de vous. J'ai croisé les jumeaux ce matin au Siège. Ils vous attendent là-bas.
- Je vais rentrer, soupire Molly, mais promets-moi...
- Bien sûr. Je vous préviendrai le plus vite possible si son état évolue."
Molly redescend vers le hall d'accueil, seul endroit de l'hôpital d'où l'on peut transplaner. Ginny s'apprête à partir quand Hermione l'arrête. Elle lui demande si elle a lu la Gazette ce matin. Suite à sa réponse négative, elle lui en tend un exemplaire, ouvert à la troisième page. On peut y lire différentes listes de noms.
La première liste recense le nom de la trentaine d'Aurors et membres de l'Ordre tombés au champ d'honneur. Ginny en connaît beaucoup : elle les a croisé dans les couloirs du siège les deux mois précédents ou en a entendu parler. Elle contemple avec tristesse les noms d'Albus Dumbledore, du Fillius Flitwick, Remus Lupin, Alastor Maugrey, et enfin Arthur Weasley. La seconde liste nomme ceux qui ont été blessés : elle y retrouve les noms de Drago Malefoy, Severus Rogue, Nymphadora Tonks et de Ron.
Les troisième, quatrième et cinquième listes contiennent les noms des morts, des blessés Mangemorts ainsi que celui de ceux qui ont été arrêtés. Elle apprend ainsi que Lucius Malefoy et le couple Lestrange ne sont plus. Goyle et Nott senior sont sans doute à Sainte Mangouste, sous bonne garde, espère-t-elle. Quand à Crabble et Parkinson Senior, ils devront sous peu répondre de leurs actes.
"Ni Harry, ni Voldemort ne sont cités, remarque enfin Ginny.
- Non, mais on parle d'eux en première page".
Effectivement, une photo du Survivant s'y étale, sous les gros titres annonçant la chute du Seigneur de Ténèbres.
"Inutile de lire l'article, lâche Hermione, ce n'est qu'un ramassis de sottises."
Ginny lui rend la gazette en silence, et elles se séparent. Ginny retrouve non sans mal le chemin de la chambre secrète. Les gardes du corridor, après l'avoir examinée sous toutes les coutures lui donnent une plaque qui, précisent-ils, doit être présentée à chaque fois qu'elle franchira le barrage. Ils l'introduisent ensuite dans la seconde pièce où les trois gardiens lui reprennent sa baguette. Elle parlemente un moment pour avoir le droit de garder ses bijoux et peut enfin s'approcher de Harry.
Son état est le même que la veille, il repose, toujours très pâle sur les draps blancs. Elle lui prend la main et commence à parler. Elle lui dit qu'il a été merveilleux, qu'il a accompli son devoir. Qu'elle comprend qu'il se sente accablé par la mort ce ceux qui sont de son côté, mais qu'il n'en n'est pas responsable Qu'ils ont fait leur choix comme lui et en ont accepté d'avance les conséquences. Qu'en agissant comme il l'a fait, il a évité des centaines d'autres morts et qu'il peut être fier de lui. Qu'elle-même est fière de lui et qu'elle l'aime.
En fin de matinée, Sylvia Baker revient avec la gourmette de Harry. Ginny la lui remet en place. La guérisseuse lui conseille de rentrer déjeuner au Siège, plutôt que de se restaurer sur place. Elle lui donne les indications nécessaires pour que la jeune femme puisse avoir les bonnes cordonnées en tête pour le transplanage, puis la quitte, ayant d'autres malades à visiter.
Quand Ginny arrive sans encombre au Siège, elle trouve tous ses frères et sa mère dans la cuisine. A les voir silencieusement réunis, la réalité qu'elle repousse depuis la veille s'impose à elle en force et c'est en larmes qu'elle étreint Bill, Percy, les jumeaux et Molly. Bien que Bill et les jumeaux aient été sur place, ils ne peuvent lui donner de précisions sur la façon dont cela s'était passé. La situation avait été confuse et chacun a lutté pour sa vie, trop loin de Harry et de sa garde rapprochée pour savoir comment s'est déroulée la bataille principale.
Ils l'informent que l'enterrement aura sans doute lieu le surlendemain. Mais ils iront auparavant à ceux de Dumbledore et de Lupin qui doivent se tenir dès le lendemain.
Mrs Patil, Parvati et Padma les rejoignent pour déjeuner. La plupart des hôtes de la nuit sont repartis chez eux, reposés, lavés, nourris. Seuls restent ceux dont le foyer a été détruit. Une fois restaurés, chacun des frère Weasley repart et Molly et Ginny retournent à l'hôpital. La jeune femme accompagne sa mère jusqu'à la chambre 456 pour voir son frère.
Elles y retrouvent Neville qui est venu voir Ron après être allé visiter ses parents. Sur le lit, seules les quelques mèches rousses qui échappent aux pansements permettent d'identifier la forme emmaillotée dans des bandelettes. Pendant que Molly parle au compagnon de classe de son fils, Ginny entraîne Hermione dans le couloir.
"De quelles genre de blessure souffre-t-il ?
- Il a reçu simultanément des Doloris, des sortilèges d'éclatements, et des sorts de brûlure. Il a donc eu des dégâts internes du fait de l'éclatement de vaisseaux et de muscles et des brûlures externes. Ses nerfs mis a vif n'ont rien arrangé."
Hermione se retourne vers le mur, comme si elle ne pouvait soutenir le regard douloureux de Ginny.
"C'est de ma faute, souffle-t-elle. Il essayait de me protéger. Moi je ne me préoccupais que de Harry. C'est pour cela qu'il..."
Elle ne peut continuer, étouffée par les sanglots. Ginny la prend dans ses bras en se demandant si tous les combattants qui ont survécu sont ainsi rongés par la culpabilité.
C'est finalement accompagnée de sa mère et d'Hermione que la benjamine des Weasley repart voir Harry. Il leur faut longuement parlementer mais finalement, les trois femmes sont introduites auprès du malade. Elles lui répètent une fois de plus combien elles l'aiment et combien elles attendent avec impatience qu'il se réveille. Puis Ginny reprend sa veille solitaire, seulement entrecoupée par les visites des médecins et des infirmières.
Vers 19 heures, elle va prendre un repas rapide à l'étage supérieur. Alors qu'elle revient vers la chambre, elle croise une femme qui ne lui est pas inconnue. Mais celle-ci a le temps de disparaître au détour d'un couloir avant que Ginny ne l'identifie. Elle vient de croiser Narcissa Malefoy. Elle inspecte rapidement plusieurs chambres avant de retrouver celui qu'elle recherche.
"Bonjour Drago, dit-elle au blond qui contemple le plafond, le visage fermé.
"Décidément, où que j'aille il faut que je tombe sur des Weasley ! Suis-je condamné à devoir vous supporter à vie ?
- Et même au delà, réplique amèrement Ginny. Les cimetières en sont pleins."
A peine a-t-elle prononcé ces paroles qu'elle le regrette. Après tout, lui aussi vient de perdre son père. Certes, ils n'étaient pas en très bons termes, mais c'était son père quand même. Doit-elle lui présenter ses condoléances ? Il résout la question en changeant de conversation.
" Et comment va le balafré ?
- Toujours inconscient.
- Rien de bien nouveau en somme."
Ginny renonce à s'offusquer. Malefoy a énoncé sa moquerie sans passion. Comme s'il s'était senti obligé de répondre par une insulte pour faire honneur à sa réputation. A son tour la jeune fille passe à un autre sujet.
- Tu te sens comment ?
- Mmmh, j'adore cet endroit. Un peu plus petit que le manoir Malefoy mais infiniment moins sinistre."
Ginny se demande si sa visite est une bonne idée finalement. Elle ne se sent pas apte à soutenir une conversation malefoyenne. Alors qu'elle s'apprête à tourner les talons, Drago la prend par surprise :
"C'est si moche que ça ?
- Personne ne le sait. Qu'est ce qui s'est passé, Drago ? Qu'est ce qu'il a vécu hier ?"
Le blond reste instant silencieux.
"Je ne sais pas exactement. Ils sont longtemps restés enfermés dans une bulle magique, et personne ne pouvait entendre ce qu'ils se disaient. J'ai l'impression que le Seigneur des ténèbres a proposé un défi à Potter. Un combat mental magique. Sans baguettes. D'ailleurs, je ne sais pas comment Saint Potter a gagné car pour ce qui est de la torture mentale, il n'arrive pas à la cheville de l'autre fou furieux. Mais une chose est sûre : beaucoup de pièces ont été sacrifiée avant la fin de la partie.
- Tu dis ça comme s'ils avaient joué aux échecs !
- Tu ne savais pas que Voldemort adorait comparer la guerre à une partie d'échecs ?
- Tu veux dire que Voldemort aurait proposé à Harry l'équivalent d'une partie d'échec, dont l'enjeu était la vie de ses amis ?
- C'est une possibilité. Mais si c'est bien ça, il faut croire que le grand méchant a sous-estimé son adversaire ! Et qu'aussi étonnant que cela puisse paraître, il semble qu'au bout de sept ans, ton frère ait réussi à inculquer les bases de ce jeu au Cicatrisé. Un vrai miracle !"
Ginny sent la fatigue s'abattre sur elle comme une chape de plomb. Elle a manifestement atteint ses limites. Marmonnant un vague "Bonsoir" elle repart vers la chambre de Harry, s'écroule sur le lit que Kingsley Shacklebolt lui a obligeamment fait apparaître et s'endort instantanément.