- C’est ça des sushis? S’interroge Alicia en regardant d’un air suspicieux les plats que Parvati vient de déballer sur la table basse du salon.
- Oui, sourit Parvati. Là tu as du saumon, les roses ici c'est du thon, et ceux qui sont ronds sont enroulés dans une algue. Tu peux les tremper dans cette sauce, c’est du soja salé.
- Et je suis censé faire avec ça ? Mais ils sont fous les Japonais d’utiliser des baguettes pour manger.
Parvati s’écroule de rire sur un des poufs disposés autour de la table lorsqu’elle comprend ce qui gêne Alicia.
- Les sorciers Japonais utilisent les mêmes bouts de bois que les moldus.
Rassurée Alicia prend en main les bouts de bois et essaya maladroitement d’imiter son hôte.
- Tu peux manger avec les doigts si tu veux, ça sera plus pratique. Pour tremper le sushi dans la sauce tu le retournes et trempes le poisson dans la sauce, il ne faut pas mouiller le riz.
Elle est mignonne Alicia à refaire exactement les mêmes gestes que Parvati avec application.
- Elle vient d’où cette cicatrice ?
Allongée sur le canapé, Parvati étalait ses jambes sur sa compagne. Alors qu’elle lisait paisiblement un livre, apprécia les légers effleurements d’Alicia sur sa cheville droite elle n’avait pas prêté attention au fait que sa robe était remontée laissant apparaitre sa cicatrice. Ce n’est pas qu’elle en avait particulièrement honte, mais elle avait pris l’habitude de la cacher avec ses éternelles bottines en cuir de dragon. Elle préférait éviter les questions gênantes ou de voir une ombre passer sur le visage des gens lorsqu’ils voyaient la grosse boursouflure rosée.
C’était surtout à sa soeur qu’elle cachait sa cicatrice. Lorsqu’elle l’apercevait elle semblait soudain à nouveau projetée en ce matin de 1998 lorsqu’elle marchait dans les décombres à sa recherche.
Elle n’avait pas vu la peur sur le visage de Padma alors que celle-ci scrutait chaque gravats, chaque coin de pénombre, chaque cadavre dans l’espoir, la peur, de l’apercevoir. Mais soudain, alors qu’elle voyait cette cicatrice, Parvati pouvait voir tout le désespoir qui avait saisi sa soeur ce matin-là.
- D’un canapé.
- Un canapé ? Répéta incrédule Alicia.
C’est vrai que sa cicatrice n’était pas aussi impressionnante que celles de Lavande. Elle ne suscitait pas autant l’admiration que celles d’autres qui avaient enduré un grand nombre de sortilèges et sévices du tant de Poudlard ou qui avaient réchappé à la mort sur le champ de bataille. Et souvent lorsqu’elle disait ce qui en avait été la cause elle observait les regards se détourner d’elle avec déception. Pourtant elle s’était battue ce jour-là. Mais elle avait comme preuve une cicatrice sur la cheville faite par un canapé.
- Il devait être sacrement agressif ce canapé n’empêche. Je vais te renommer ma guerrière au canapé la taquina Alicia dans l’espoir de dissiper son trouble.
- Je préfère Parvati la pourfendeuse de coussin en velours.
- Alors va pour ce titre, par contre il va falloir m’en trouver un maintenant.
- Hmm ça va être compliqué là.
- Tu as de la chance on est dimanche. On a toute la journée pour ça, conclut Alicia avec un clin d’oeil avant de retourner à ses caresses.
- Ouf c’était le dernier! J’ai cru qu’on y arriverait jamais râla Parvati.
Amusée Alicia lui dépose un baiser sur le bout du nez avant de renchérir.
- Maintenant il ne reste plus qu’à déballer.
- Oh non, maugrée à nouveau l’Indienne. Tu ne préfères pas que je nous fasse un thé ?
- Je te connais, si on fait ça après on ne sort pas du canapé pendant des heures. Alors où je range mon équipement de Quidditch ?
- Euh…je crois qu’on aurait dû faire de la place avant d’amener toutes tes affaires.
Un brin désabusées, les deux Gryffondors regardent l’appartement et toute la marée d’objets qui l’envahit.
- Eh ben on n'est pas sorti de l’auberge ! Rappelle-moi pourquoi j’aménage avec toi ?
- Parce que ta coloc t’a mise dehors maintenant qu’elle est fiancée ? Renchérit aussitôt Parvati avec son éternel sourire en coin.
- ça doit être ça, sinon pourquoi je m’infligerais un tel bazar.
- Mais tu l’aimes « mon bazar » rétorque à nouveau sa copine en mimant avec ardeur les guillemets de bazar.
Hilares elles se mettent à rire au milieu de tous ces cartons qu’elles ne savent pas où mettre. La tresse que Parvati avait nouée à la va-vite avec un cordon de cuir s’était défaite dans l’action. Sans doute était-il tombé dans l’escalier, après tout ça ne sera pas le premier qu’elle perd.
- Mmmh sans doute, enfin c’est surtout toi que j’aime.
Parvati n’a pas besoin de rétorquer quelque chose, ses yeux parlent pour elle. Alors pour une fois elle ne cherche pas à avoir le dernier mot. Elle se contente d’embrasser Alicia qui a entre-temps passé une main dans ses cheveux.
- Aaaah !!
Un cri d’effroi déchire l’appartement dans lequel régnait un joyeux bazar. Bientôt suivi de bruit de pas, et de l’effondrement d’une pile de livres qui se trouvait sur le passage de la personne qui accoure vers la source du bruit.
- Mon niffleur qu’est ce qui se passe ? s’enquit Alicia avec inquiétude.
Trop préoccupée par ce qu’elle tenait à la main Parvati ne releva même pas le surnom qu’Alicia s’obstinait à lui donner depuis une semaine maintenant à cause de sa manie d’accumuler toute sorte d’objet dans leur antre. Surnom qui la laissait quelque peu perplexe, elle ne savait toujours pas si elle trouvait ça mignon ou non.
- Regarde ça !
Ce faisant Parvati montra enfin ce qu’elle avait à la main. Il s’agissait du nouveau magazine de Sorciere Hebdo sur la couverture duquel on pouvait lire :
Mesdames j’ai le regret de vous annoncer qu’Alicia Spinnet, une des poursuiveuses de l’équipe des Flèches d’Appleby n’est plus un coeur à prendre. En effet il semblerait que cette dernière ait trouvé l’amour en la personne de Parvati Patil, patronne du salon de thé « Pumpkin and Tea ». Si vous voulez en savoir plus sur cette idylle née courant du mois de novembre c'est en page 11.
- Ah… je vois, ne pus que dire Alicia en prenant le magazine dans ses mains.
- Tu vois ? C’est tout ce que ça te fait ?
- C’était à parier qu’un jour ils allaient parler de nous. C’est courant dans mon métier soupira la joueuse de Quidditch.
- Oui mais pas dans le mien. Je n’aime pas le fait que des gens lisent notre histoire.
- Mais enfin, Parv, tu lis tout le temps ce torchon.
À l’entente du mot torchon Parvati ne put retenir une grimace de mécontentement.
- Ils disent quoi sur nous ? Se reprit Alicia
- Je ne sais pas, je ne l’ai pas encore lu.
- On peut lire ça ensemble si tu veux lui proposa sa compagne en l’attirant vers le canapé.
- Je ne sais pas, je suis sûre que ça va être affreux.
- Mais non la rassura Alicia en embrassant ses cheveux. Tu veux que je le lise avant et si c’est horrible je le jette ?
- Oui, hoche de la tête Parvati.
Amusée Alicia s’assoit sur le canapé et commence sa lecture alors qu’à côté d’elle Parvati ne peut s’empêcher de jeter des coups d’oeil par dessus son épaule avant de se cacher les yeux.
Parvati est quelqu’un tout en dualité. Posée, aimant son intérieur cosy et coloré, joyeuse et enjouée, forte et magnétique, elle avait une personnalité solaire mais là elle n’avait plus l’impression d’avoir la femme badass dont elle était tombée amoureuse. C’est en rigolant intérieurement qu’Alicia voyait sa copine retomber en adolescence.
Aujourd’hui Parvati s’était mise en tête de lui apprendre à faire du chocolat chaud et du thé à l'Indienne. La cuisine c’était vraiment l’élément de Parvati. Impressionnée Alicia la regardait évoluer avec aisance au milieu des casseroles, bouilloire et ingrédient en tout genre. Elle hochait la tête à chaque indication et essayait de reproduire précautionneusement les mêmes gestes mais c’était sans compter sur sa maladresse habituelle. Lorsqu’elle n’était pas sur un balai la poursuiveuse avait la fâcheuse tendance de se cogner avec tout ce qui se trouvait de près ou de loin sur son passage.
Oups l’eau renversée, mince le lait qui s’échappe de la casserole. Et pourtant elles riaient, elles appréciaient ce moment malgré la cuisine qui semblait se transformer peu à peu en un énorme chantier.
Quand enfin les breuvages furent terminés et alors qu’Alicia allait les emporter sur la table basse, pour une dégustation bien méritée, Parvati l’interrompit.
Elle planta les deux bâtons de cannelle dans les tasses, recouvrit tout ça d’une épaisse chantilly, elle aussi maison. Elle avait réussi l’exploit de la préparer tout en surveillant en parallèle les péripéties d’Alicia.
Parvati avait toujours aimé les choses jolies, et ses préparations étaient toujours plus que simplement bonnes. C’était quelque chose qu’Alicia trouvait fou. Dans son métier on n’était que dans la pratique, il fallait gagner point, on n'avait pas le temps pour faire du beau on assurait le spectacle en étant efficace. Parvati aimait ce que les gens trouvaient superficiel. Leur appartement empli de bibelots en tout genre en était le parfait exemple. Et au final Alicia trouvait ça poétique la façon de voir de sa compagne. Il suffisait parfois de quelques marshmallows roses sur une couche de chantilly pour rendre une boisson plus agréable qu’elle ne l’était déjà.
- Mais il est moche.
- Justement c’est ça qui est marrant.
- Mouais.
- Fais pas la moue on va t’en trouver un autre. Tu n’es pas obligée de prendre celui-là.
- Je préfère, je ne veux pas porter ce truc. Par Morgane il chante en plus, s’écrit Parvati. Repose le tout de suite.
Morte de rire Alicia ré appuie sur la truffe du renne qui orne le pull en laine avant de l’approcher de sa copine.
- Tu es sûre que tu ne veux pas de Rudolf le renne ? Regarde, il est choupi avec son nez rouge.
- Hors de question que je débarque devant tes parents avec un renne qui chante et qui a une truffe qui s’illumine. J’aurais l’air de quoi ?
- De quelqu’un avec un pull ringard.
- Ben voilà ! Je ne veux pas que lors de notre première rencontre tes parents me voient comme ça.
- Mais justement c’est le but. On fait un concours de pull de Noël moche.
- Je peux quand même en avoir un plus joli. Je ne compte pas le gagner votre concours.
Lorsque ses parents avaient appris que la petite amie de leur fille passait Noël seule, comme dans sa famille on ne le fêtait pas, ils avaient insisté pour l’inviter à diner. Depuis, Parvati était stressée ce qu’Alicia trouvait adorable, même si elle passait depuis son temps à essayer de la rassurer.
- Ok ok. Tu as gagné je le repose. On va t’en trouver un plus joli.
- Qu’est-ce que tu en penses de celui-là ?
- Tu te moques de moi là ?
Alicia venait d’attraper un pull rouge sur lequel un sapin vert était dessiné, sapin sur lequel des pompons étaient accrochés pour représenter des décorations.
Une légère tape sur la tête, un rire qui résonne dans le magasin, un chant de Noël qui crachote dans les haut-parleurs, et les regards amusés des quelques clients par cette matinée de décembre, il y avait pire comme moment.
- Et celle-là ?
- Mouais
- Mais pourquoi tu ne l’aimes pas ?
- Elle est trop orange.
- Mais comment une citrouille peut être trop orange s’interroge incrédule Alicia.
- Je ne sais pas, mais en tout cas elle l’est.
Gros soupir, Alicia lève les yeux au ciel, amusée, avant de s’écrier « mais qu’ai-je fait au ciel pour mériter ça ? » crie-t-elle tout en levant les bras au ciel.
- Mais ça ne va pas de hurler comme ça. Les gens vont nous prendre pour des folles, crie à son tour Parvati.
- Je suis en train de le devenir là. Celle-ci est trop orange. Les autres n'étaient pas assez rondes, trop grosses, il y en avait même une qui avait des verrues, la prochaine elle va avoir quoi ?
- Je veux juste que notre citrouille soit parfaite. ça sera notre première citrouille d’Halloween à toutes les deux.
- Mais elle le sera, vu que ça sera la nôtre. Tu ne préfères pas qu’on adopte une petite citrouille délaissée que personne ne veut et qui complexe ?
- Mouais, murmure doucement Parvati à moitié convaincue.
- On peut en prendre une chacune si tu préfères. Comme ça il y en aura deux sur le balcon.
Le sourire qui éclaire le visage de Parvati vaut un oui. Ni une ni deux elle s’élance dans une direction à la recherche de sa citrouille parfaite. Amusée, Alicia la regarde s’éloigner dans les allées et se pencher pour regarder entre les feuilles les courges avant de se relever en marmonnant.
- À ton avis elle lui a trouvé quoi à celle-ci ? Bon allé ma cocotte tu viens avec moi, tu n’es pas du tout trop orange.
- Celui-là, s’interroge la jeune femme.
- Mouais, répond sa compagne en faisant la moue.
- Alicia c’est le quinzième sapin qu’on regarde. Qu’est ce qui ne va pas sur celui-là, souffle, dépitée, l’Indienne.
- Il n’est pas assez touffu.
- Mais il est très bien.
- Ah ! Quand madame trouve une citrouille trop orange c’est normal mais que je trouve ce sapin pas assez touffu non ?
- Ah non tu ne vas pas me ressortir cette histoire hein. Il y a prescription c’était l’an dernier.
- Oh si, crois-moi tu n’as pas fini d’en entre parler pendant des années.
- Des années ? Interroge doucement Parvati.
- Oui, ne compte pas te débarrasser de moi avant au moins soixante-dix ans, lui sourit-elle.