Salazar était épuisé. Avec sa troupe, il avait voyagé avec une cadence qui n'avait rien à envie aux armées les plus tenaces. Le mage employait systématiquement la magie pour brouiller les pistes. Il espérait bien que ça suffirait. Les serpents et le baron Renart n'avait plus entendu parler de Gryffondor. Leurs efforts avaient porté leurs fruits. Le mercenaire avait été distancé et avait perdu leur trace. Un soulagement !
Le bois de Poufsouffle n'était plus qu'à une lieue, un peu au nord. C'était là leur seule indication. Salazar ne connaissait même pas le nom de la guérisseuse. Il n'y avait pas le choix, il faudrait questionner les habitants de la région. La petite troupe s'arrêta à quelques centaines de mètres d'un village. Renart aperçut un bâtiment qui surplombait les quelques fermes. Cela ressemblait à une auberge.
Même si tous salivaient à l'idée d'un repas chaud, il ne fallait pas attirer l'attention. Salazar maîtrisait quelques illusions qui feraient l'affaire. Les enfants Black avaient été déclarés morts et pouvait venir. Le baron français avait tenté de convaincre son ami mais Salazar avait été inflexible. Son ignoble accent français le trahirait aussitôt, quant à les accompagner sous sa forme de goupil était impensable. Ils seraient désignés comme sorciers avant même de s'asseoir. Serpentard désigna quand même l'archer du groupe. Il pouvait aisément passer pour un garde du corps.
Une fois les illusions parfaitement tissées, les quatre compagnons se mirent en route. Salazar poussa la porte de la taverne en hésitant. Un grand silence méfiant les accueillit. Les étrangers n'étaient jamais bien accueillis. Salazar s'installa à une table qui lui donnait une vue d'ensemble sur l'auberge. Elle était suffisamment proche de la porte, d'une fenêtre et de la porte menant aux cuisines si la fuite s'avérait nécessaire.
Sans tenir compte des regards, le mage invita l'aubergiste à s'approcher. La petite femme rondelette vint prudemment. Il lui commanda une miche de pain noir, un brouet et de la viande séchée. Il évita l'hydromel par prudence. Les quatre voyageurs accueillirent avec joie le retour de la petite femme. Ils dévorèrent plus qu'ils mangèrent le repas puis dialoguèrent avec la propriétaire des lieux. Ils apprirent rapidement qu'elle avait quatre enfants, avait toujours vécu dans son village et que la guerre qui touchait le comté de Serpentard ne s'étendait pas jusque chez elle. Les rares soldats qu'elle avait vu, étaient à la recherche de sorciers en fuite. Mais c'était déjà il y a plusieurs mois. Si l'aubergiste était volubile, les voyageurs furent nettement plus avares en informations. Mais la conversation s'éternisa et la propriétaire fit assez vite confiance à « la bonne tête » de ses visiteurs.
« Ces sorciers, il parait qu'ils étaient à la recherche d'une guérisseuse. C'est bien ça ? finit par demander Salazar.
— C'est ce que pensais ces soldats, reconnut-elle.
— C'est ce que je pense aussi. Voyez-vous, c'est Caïus Black qui nous a envoyé par ici. »
L'aubergiste se figea. Elle dévisagea soigneusement ses clients. Les seuls qui restaient puisque Salazar avait gentiment patienté que les autres s'en aillent avant d'aborder cette délicate question.
« Que voulez-vous à Helga ? interrogea-t-elle méfiante.
— Un refuge temporaire. Et savoir où sont mes alliés survivants tout simplement.
— Qui êtes-vous ? » interrogea-t-elle.
Pour la première fois, elle prêta réellement attention à l'apparence des visiteurs. Si les vêtements étaient rustiques et pouvaient passer pour modestes, le maintien de Salazar et des deux enfants Black étaient clairement aristocratique. On ne camouflait pas une éducation aussi facilement.
« S'il vous plait, supplia Selena. Nous sommes traqués depuis des semaines.
— Vous ne vous êtes toujours pas présentés, contra-t-elle.
— Vous non plus, répondit Salazar. Et je crois savoir pourquoi. Votre magie est discrète mais… mais je sens de la pratique régulière. Vous êtes Helga du bois de Poufsouffle, n'est-ce pas ? »
La femme plongea la main dans sa besace et en retira un poudre verdâtre. Salazar avait déjà une dague à la main et les doigts de Selena luisaient de magie.
« Qui êtes-vous ? répéta-t-elle fermement.
— Salazar de la maison Serpentard, Alban et Selena de la maison Black et Bror le chasseur.
— Vous paraissez bien vivante pour une femme violée et tuée, remarqua Helga.
— Peut-être parce que c'est un bon prétexte pour convaincre tout le monde que Salazar est un odieux mage noir.
— Il y a aussi des rumeurs très crédibles de massacres de soldats dans les marais, rétorqua-t-elle menaçante.
— Et si je ne l'avais pas fait, il y aurait eu des rumeurs très crédibles de massacres de sorciers dans les marais » siffla Salazar avec fureur.
Helga allait répondre quand la porte pivota. Malgré l'heure tardive, trois hommes pénétrèrent dans l'auberge. Tous les trois portaient une épée suspendue au ceinturon. Ils s'affalèrent sans grâce sur la table voisine de celle de Salazar.
« Bonsoir ma Dame. Que reste-t-il à manger ? » lança le rouquin qui semblait diriger la bande.
Selena et Salazar détaillaient silencieusement les tenues des nouveaux venus et cela n'augurait rien de bon. Finalement le jeune Serpentard tenta le tout pour le tout.
« Seraient-ce les armoiries des Gryffondor que vous portez ? » demanda-t-il en se forçant à sourire.