Des plumes de hiboux et de parchemin voletaient entre les malles et les chaudrons et les balais entassés. Le dernier jour de l'année laissait s'échapper hululement, croassement, miaulement et autres cris plus ou moins humains.
Amelia, à l'entrée du Poudlard Express, jouait son rôle de Préfète en s'assurant du bon déroulement de ce passage périlleux.
- Potter, pourquoi tu portes un manteau ? interrogea-t-elle avec suspicion le garçon qui lui avait donné des migraines toute l'année.
Le Gryffondor haussa les épaules avec désinvolture.
- Parce qu'il est beau. Pas vrai qu'il est beau, Patmol ?
Son ami approuva vivement et Amelia ne put s'empêcher de s'attarder une seconde de trop sur ce visage qui lui en rappelait un qu'elle connaissait désormais par cœur. Elle fit un pas en avant et pinça le col de Potter comme pour vérifier quelque chose.
- Eh ! Bas les pattes, sorcière ! s'écria-t-il de sa voix aigüe d'enfant. On touche pas à mon manteau préféré.
Amelia resta stoïque tandis que les trois amis du gamin riaient.
- Nous sommes en été, Potter, et la seule raison pour laquelle tu porterais un manteau est pour cacher un de tes méfaits. Je me trompe ?
La sècheresse de sa voix et le sérieux de son expression eut l'air de surprendre surprendre le garçon. Peut-être en faisait-elle trop. Peut-être aurait-elle du plaisanter avec lui, comme tous les élèves, et même les professeurs le faisaient déjà. Mais Amelia avait plusieurs wagons à contrôler et il lui fallait faire preuve d'efficacité. Et puis, elle se souciait toujours guère d'être appréciée.
Finalement, légèrement intimidé, Potter finit par céder. Il plongea sa main dans la doublure de son manteau et en sortit... un tableau. Un tableau dont l'occupant affolé criait les pires obscénités.
- C'est du vol, Potter, le réprimanda-t-elle durement tout en s'assurant de tenir droit le cadre. Et une agression envers un habitant légitime de Poudlard. Tu sais ce que le règlement de l'école prévoit contre ce type de méfaits ? Il dit que...
- On s'en fiche, Bones.
La vision de Bellatrix devant elle, lui parlant devant d'autres, la laissa tout simplement sidérée. Car depuis qu'elles se voyaient en secret, elles ne se parlaient plus en public. Elles ne se parlaient presque plus, d'ailleurs. Elles avaient laissé toutes leurs conviction pour laisser place à la certitude la plus forte, celle pour laquelle elles ne savaient plus ne pas se toucher. Celle qu'elles ne nommeraient pas.
- Je dois te parler, continua Bellatrix tandis que les autres élèves les considéraient d'un air intrigué. De l'horrible couleur de ta robe, ajouta-t-elle en guise de justification.
Amelia acquiesça avec suspicion et la suivit à l'écart non sans un regard réprobateur à l'adresse des quatre garçons de Gryffondor. Toute occupée à caler le tableau furieux entre ses bras, elle mit un instant à comprendre que Bellatrix lui mettait dans les mains un parchemin.
- Mon adresse, expliqua-t-elle.
- Tu veux qu'on s'échange des lettres ? s'étonna-t-elle en fronçant les sourcils sur les élèves qui les considéraient avec curiosité.
Bellatrix acquiesça avec agacement.
- Je te préviens, je n'aime pas écrire.
- C'est cohérent, commenta Amelia en souriant.
Bellatrix lui jeta un regard furieux qui dériva sur ses lèvres - lèvres qui s'étirèrent de plus belle. Bellatrix se ressaisit.
- Je vais faire mon entrée dans la haute société, dit-elle avec hauteur. Tu ne seras que le chaudron qui portera mes complaintes.
- Un chaudron plein de passion, ajouta Amelia l'air de rien avant d'éclater de rire devant son expression dégoûtée.
Sou fou rire ne tarit que lorsqu'elle remarqua que les autres élèves perplexes devant le spectacle surréaliste de Bellatrix et Amelia riant ensemble. La vision d'Amelia, tout simplement, faisant autre chose que froncer les sourcils.
Elles échangèrent un regard. Lourd. Elles avaient conscience que pour celles qu'elles étaient - deux sorcières exécrant la dissimulation - ce secret avait des allures de trahison.
- Je t'enverrai mon adresse, lui promit-elle.