James se tenait devant lui et Sirius pleurait, sans respirer - incapable de savoir si c’était de tristesse, de béatitude ou de folie.
James était à quelques pas de lui, dans la même pièce, RÉEL.
« Enfoiré, je pensais que tu étais mort. », réussit-il à déclamer entre deux sanglots. Il ne pouvait plus s’arrêter de chialer. Sa voix était déformée, son état pathétique, mais peu importait.
James souriait, lui. Il était beau, comme avant la guerre, avant l’horreur, avant les cernes et les yeux rougis d’avoir trop pleuré la mort de ses amis. Il était jeune et incandescent, il était parfait. Et Sirius l’avait toujours aimé, il le savait, plus que quiconque il l’avait aimé. « Ils ont dit que tu étais mort, que je t’avais tué » continuait-il en hoquetant, parce que ça avait été trop difficile à avaler, tout ce qu’ils avaient inséré dans son crâne, la culpabilité, le deuil, et que ses nerfs relâchaient enfin.
Le sourire de James se fit plus triste, mais son regard était déterminé lorsqu’il prononça la suite : « Je ne pourrais jamais t’abandonner Sirius. J’espère que tu le sais. » ; ça résonnait dans sa tête, ce « Jamais », cette promesse, à laquelle il avait envie de croire plus que jamais, justement.
« Je ne t’ai pas tué ? » demanda-t-il d’une voix rauque, et James répondit avec la même assurance : « Non, tu ne m’as pas tué ». Sirius lâcha alors la pression monstre qui s’était accumulée, comme s’il n’y avait plus aucun malheur dans ce monde maintenant qu’il se savait innocent.
— Et tu es là ?
— En chair et en os.
Il sourit alors, sincèrement, pour la première fois depuis une éternité.
— Putain. Tu m’as tellement manqué.
— Toi aussi, Patmol. Toi aussi.
James était fidèle à lui-même et, bon sang, il pouvait mourir en cet instant : James était vivant.
« Prends-moi dans tes bras », supplia Sirius, désespéré de sentir son cœur battre contre le sien.
Sirius ne suppliait jamais mais il avait un besoin immense de contact, de chaleur humaine, d’amour ; il tremblait du manque de l’autre.
« Je ne peux pas » répondit James et toute trace de bonheur s’enfuit d’un coup. « Comment ça, tu ne peux pas ? ». Le décor se fissurait, quelque chose coinçait, même le visage de James devenait plus étrange, mais il rayonnait toujours, dans le cœur de Sirius du moins. « Lily… » commença James et Sirius le coupa. « Ne me parle pas de Lily. Ça a toujours été toi et moi avant les autres, pourquoi me parles-tu de Lily ? Lily est morte et moi je t’aime, comme un amant déchaîné, je t’aime comme je n’ai jamais aimé. James, si tu le voulais, on pourrait se marier. Les mentalités ont changé, tu sais, et puis qu’est-ce qu’on s’en fout de ce qu’ils vont penser ? C’est juste toi et moi, contre le reste du monde s'il faut » Il se mit à genoux et James l’observait, les yeux ronds :
— Qu’est-ce que tu fais ?
— Veux-tu m’épouser ?
— Mais… nous sommes dans une prison.
Alors, brutalement, tout s’éclaircit. Le corps de James était en train de se décomposer, et Sirius ferma les yeux pour ne pas avoir à le voir, pour ne pas sentir son cœur se briser en mille morceaux, encore une fois, pour ne pas que la réalité le rattrape, et il répétait, sans arrêt : « Veux-tu m’épouser, veux-tu m’épouser, veux-tu m’épouser ? ».
Face à lui, le Détraqueur était prêt à aspirer son âme en réponse.
Et Sirius s’effondra.