Ça te prenait comme une bourrasque, un coup à la gorge, la fin du monde. Tu ne comprenais pas encore, mais tu sentais le mistral gronder dans tes poumons, si jeune.
Si jeune, déjà, tu avais froid. Les mains bleues. Les lèvres violacées. La voie lactée sous tes longs cils. Froid, froid comme l'hiver qui s'installe et qui reste, s'éternise.
Regulus, tes os, tu ne les sentais pas.
C'est le froid qui voulait ça.
Et lui brûlait vif contre toi, le monde, votre mère. Lui que tu appelais ton frère. Être de feu adulé.
Et sur vos frêles têtes tremblaient les couronnes d'épines. Tu savais qu'elles ne dureraient pas, sous la neige, qu'elles chancelleraient comme une bougie prête à s'éteindre.
Regulus, le cierge, c'était toi.
Et dans l'ardeur de ses prières, il étouffait les cendres de votre enfance. Peu à peu la suie obscurcissait ses souvenirs, et sa chaleur s'étiolait dans l'air, jusqu'à ce que tu ne sentes plus que le vent contre ta peau, le remous des larmes contre tes joues. Les bulles d'air enflaient dans ta poitrine, il s'incendiait. Les braises roulaient entre ses lèvres, tu te noyais en eaux glacées, sombrais, mourais,
Tu étais né pour ça.