— Ce n’était pas ta faute, me répète Hermione.
Je le sais, mais c’est plus fort que moi, je m’en veux, j’ai rattrapé Harry et je n’ai pas pensé à son balai. C’était à ma portée d’avoir les deux.
Et on a perdu le match, je suis dégoutée.
— Emy… tente une dernière fois Hermione.
Je ne me retourne pas et pars vers ma chambre. J’entends Ron qui lui dit de me laisser un peu de temps. Parfait.
Je prends des vêtements de rechange, et vais à la douche. Je me déshabille, et découvre de sublimes bleus tout le long de ma jambe droite et à l’épaule. C’est vraiment pas beau à voir. Quand je me glisse sous l’eau chaude, je réalise seulement à quel point j’étais gelée.
Je dois manger du chocolat.
*****
Malgré mon extrême fatigue, la nuit est courte, je me réveille avec un cauchemar, j’entends Lily encore et encore qui supplie… Voldemort de ne pas tuer Harry. Elle a aussi vu ma mère mourir…
Il faut que j’arrête de penser à ça.
Je me lève, m’habille rapidement et décide d’aller à l’infirmerie. Harry a entendu la même chose que moi dans le train, il a sûrement entendu aussi la même chose dans le stade.
Les couloirs sont vides, l’aube pointe le bout de son nez, j’espère qu’il est réveillé, sinon j’attendrai, de toute manière, ça aurait été impossible pour moi de me rendormir.
— Que fais-tu là toi ? s’exclame Mrs Pomfresh qui est déjà debout.
J’hausse les épaules, oui ça fait très ado comme réponse, mais c’est le mieux que j’ai.
— Je peux voir Harry ?
Elle me jauge un instant puis me laisse passer. Au moment où je passe devant elle, elle m’attrape la main.
— Tu as mis de la glace ?
— Non.
Mon poing est violacé de la dernière pleine lune. Elle palpe ma main un instant.
— Il faut te soigner, c’est important.
Elle part et revient avec une pommade qu’elle applique généreusement. Une sensation de chaud et de froid se diffuse immédiatement.
— C’est quoi ?
— Du baume du tigre. C’est moldu, il faut savoir prendre ce qu’il y a de mieux dans ce qu’on rencontre dans la vie. Ne garder que le meilleur…
L’effet est incroyable dans ma main, mais ça me pique aussi les yeux.
— Ne mets pas ça sur une plaie. Juste sur les muscles, tu vois, j’ai évité les égratignures, tu évites d’y toucher pendant un temps puis tu te laveras les mains, d’accord ?
— Oui, merci.
Elle me sourit puis je me dirige vers la chambre d’Harry. Je l’ai toujours appréciée, elle prend soin de moi depuis des années, et ne m’a jamais jugée. Elle a pour intérêt de soigner, rien d’autre. J’ai beaucoup d’estime pour elle.
— Emy ?
Harry se redresse péniblement et me fait un pâle sourire.
— Ça va ?
— C’est plutôt à moi de te demander ça…
Le poids d’Harry m’a entraîné au sol, d’une main, je gardais mon balai, je ne l’ai lâché que quand je suis tombée.
— Il paraît que c’était très impressionnant ce que tu as fait.
J’hausse les épaules, ma réponse favorite. Je remarque qu’il ne m’a pas répondu. Moi non plus d’ailleurs.
— Un professeur ou Dumbledore aurait réagi avant que tu touches le sol, c’était idiot de me jeter comme ça pour te récupérer, on a eu de la chance.
— Merci.
— D’avoir été idiote ?
Il rigole presque et je m’en réjouis. Je vois qu’il est peiné, ou perturbé, difficile à dire.
Par quoi ?
— Je suis désolée pour ton balai ?
— Et moi d’avoir fait perdre le match.
— Tu n’y étais pour rien.
— Je suis le seul idiot à m’évanouir quand ils arrivent.
— Alors on fait la paire d’idiots.
Nouveau sourire pour phrase à double sens.
— Je peux te demander quelque chose ?
— Bien sûr, dis-je en m'asseyant sur la chaise à côté de lui.
— Que ressens-tu quand tu es proche d’un détraqueur ?
Je ne peux pas lui mentir. Vraiment, cela me coûte tellement…
— Je revis mes pires cauchemars.
— Moi aussi. Je te comprends bien. C’est…
Sa voix se brise. Il semble réfléchir, je vois qu’il est tourmenté, ses yeux verts sont remplis de sombres pensées.
— Tu sais que tu peux tout me dire, dis-je en me penchant un peu vers lui.
— Tu promets de ne pas me juger ?
— Bien sûr.
— Tu as suivi cette histoire de Sinistros ?
— Dans la tasse de café ?
Je ne vois pas le rapport.
— Oui. Je l’avais vu avant. Deux fois, la première. Juste avant de me retrouver dans le Magicobus. J’ai vu une grosse forme, je suis tombé et c’est comme ça que je l’ai appelé. Par hasard.
— Et la deuxième ?
— Juste avant que les détraqueurs arrivent. J’ai vu une forme de chien près des gradins, un gros chien noir, c’était le Sinistros. Deux fois je l’ai vu, deux fois j’ai failli mourir juste après.
Je ne sais pas quoi dire. Le Sinistros, je le connais pour les histoires d’enfants, une sorte de vengeance du destin qui maudissait le méchant qui ne respectait pas la vie. De là à croire que cette légende est vraie…
— Tu penses que je vais passer le reste de ma vie à regarder par-dessus mon épaule avec la hantise de voir surgir cette bête ?
— Non… dis-je tout bas. I’ll always have your back.
Il me regarde attendant que je traduise. L’expression française m’est venue toute seule. Je ne sais pas pourquoi, ça fait si longtemps.
— Parce que je serai toujours là pour toi Harry. Je ne laisserai rien, ni personne s’en prendre à toi. Et tu peux compter sur Ron et Hermione aussi.
— Merci…
On reste un peu en silence, moi un peu gênée et émue de cette déclaration.
— Tu peux garder tout ça pour toi ? finit-il par dire.
Je lui fais un sourire et sers brièvement sa main.
- Évidemment.
*****
J’attends la fin de journée pour m’autoriser à voir mon père. Hermione et Ron m’ont laissé un peu d’espace, comprenant que cette défaite était un coup dur pour l’équipe.
Je me hâte dans les couloirs pour éviter de devoir m’expliquer auprès de Rusard. Il sait plus ou moins la vérité sur mon père et moi, mais je n’ai pas plus le droit de sortir dans les couloirs. Quand je frappe à la porte, je n’ai pas à attendre longtemps avant que mon père ouvre. Le service à thé est déjà sorti.
— Minerva était là juste à l’instant. Je finis par m’habituer à l’appeler par son prénom… Elle m’a expliqué ce qui s’est passé hier.
— Mmmh oui…
Je m’assois alors qu’il lance un autre thé et me tend un carré de chocolat.
— Comment tu te sens ?
— Ça va.
Piètre mensonge. Il n’est pas dupe.
— Et toi ?
Il n’ose pas insister. Notre relation est nouvelle, un peu instable et fragile. On marche un peu sur des œufs, on se jauge et on tente de retrouver nos positions.
Il s’étire en se levant.
— La potion tue-loup est une merveille. C’est incroyable.
Cette nouvelle me fait plaisir. La lycanthropie qu’il porte sur lui depuis son plus jeune âge a fait des ravages. Je ne vais pas lui parler de mes doutes concernant Hermione, ça l’inquiéterait pour rien. Je dois avant m’assurer qu’elle ne dira rien. Il s’assoit à mes côtés pour parler.
— Pourquoi je ne réagis pas comme toi ? dis-je.
— C’est une bonne question. Dès tout bébé, tu étais vraiment atypique. On avait une figure de comparaison avec Harry. C’était un bébé adorable, très sage, mais il dormait beaucoup, comme tous les bébés. Toi, non, tu babillais dans ton lit. Plus d’une fois, Lyra t’a retrouvée parfaitement éveillée avec tes peluches.
Il a un sourire doux, à la fois triste, à la fois heureux comme à chaque fois qu’il évoque ces souvenirs.
— Tous les enfants de loups-garous sont comme moi ?
— Aucune idée, je n’en ai jamais rencontré. Et puis tu es un cas à part.
Oui, drôle de famille, un père loup-garou, une mère animagus. Elle l’était devenue pour le soutenir dans ses transformations, c’est beau, très romantique.
On change de sujet et je lui explique le match et surtout son issue.
— En conclusion : Harry est très déçu de ne pas avoir attrapé le vif, tout le monde lui rappelle qu’il réagit mal face aux détraqueurs et en plus son balai a été brisé par le saule cogneur.
— Et toi ?
— Quoi moi ?
— Tu aimeras apprendre à faire face aux détraqueurs ?
Ne plus entendre la voix de Lily qui supplie Voldemort de ne pas la tuer ? C’est un grand oui.
*****
Je dors parfois avec George. En fait, ça s’est fait tout naturellement, on souhaitait dévier l’attention d’Hermione sur mes absences et les pleines lunes. Lee, Fred et l’autre personne dans leur dortoir, Henry Cole, ne sont dérangés par cela.
Et honnêtement, j’y ai pris goût de dormir avec lui.
Avoir sa chaleur, ne pas être seule quand je me réveille suite à un cauchemar, c’est une douce sensation d’être à deux.
Le lundi, les cours reprennent et on peut laisser dernière nous le match. Enfin, autant qu’on peut oublier cette défaite si amère. Je sens que la classe est inquiète de revenir en DCFM. Tout le monde souhaite autant que possible éviter de se retrouver avec Rogue pour d’autres cours que les potions. D’ailleurs, même les potions, certains s’en passeraient bien.
On entre en classe et je m’installe à côté d’Hermione, au premier rang.
— Il était vraiment malade, dit-elle tout bas à mon oreille.
Elle semble guetter ma réaction, peut-être qu’elle veut voir si j’ai compris la même chose qu’elle. À savoir, que notre professeur qui se tient en face de nous est un loup-garou.
— Oui, il a des cernes.
Je ne dit pas dire autre chose. Elle me regarde un instant, puis sort son manuel.
J’aimerais beaucoup savoir ce qui se passe dans sa tête.
*****
Hermione ne fait que travailler, ça m’inquiète un peu honnêtement. Elle dort de moins en moins et la quantité de devoirs ne fait qu’augmenter. Pourtant elle est super bien organisée, mais c’est juste que c’est trop. Même pour quelqu’un comme Hermione.
Mais j’ai promis de ne pas m’en mêler alors je ne dis rien.
— Comment elle fait ? me dit Ron qui l’observe lui aussi.
On a déjà eu cette conversation plein de fois. Ma réponse est toujours la même :
— Aucune idée. On fait une partie d’échecs ?
Il accepte sans problème. Hermione est trop occupée pour lui demander s’il a fait tous ses devoirs. On commence à jouer et on enchaîne les mouvements rapidement. Je sens le regard d’Harry sur moi de plus en plus lourd.
— Ça va ? dis-je.
— Vous savez, j’ai parlé avec le professeur Lupin à la fin du cours.
On hoche de la tête avec Ron.
— Et bien, il m’a parlé de mon balai, et il m’a expliqué qu’il existe un moyen de lutter contre les détraqueurs.
— En faisant ce qu’il a fait dans le train ? demande Hermione qui délaisse un instant ses devoirs.
— Oui. Il m’a dit qu’il était loin d’être un expert, mais finalement, il a accepté de m’apprendre à lutter contre eux.
Tu m’étonnes qu’il ne se sent pas à l’aise avec ces créatures… Dès que je pense à elles, je me tends, la pièce que je tenais de la main rouspète parce que je la sers trop fort et qu’elle souhaite revenir sur le plateau.
— Pardon, dis-je tout bas.
— Non, mais ! Ce ne sont pas des manières !
— Tais toi le pion, le gronde le fou.
— Et du coup Emy, il m’a dit que ce serait un projet pour plus tard, toi aussi, tu veux le faire ?
— Oui, oui, je veux bien.
— C’est une bonne idée, approuve Hermione. Ce doit être horriblement dur, mais le professeur Lupin saura très bien t’aider. Je ne m’inquiète pas pour toi.
Harry sourit doucement, oui, c’est une bonne nouvelle.
*****
— Emy, tu aimerais aller à Pré-au-lard ?
Quand Fred a ce regard, c’est qu’il prépare quelque chose. J’hausse les épaules sachant pertinemment que ça va l’agacer.
— Arrête, alors, dis-moi, tu aimerais ou pas ?
- Évidemment, dis-je en souriant.
Les jumeaux se regardent avec leur petit air de conspiration que je commence à bien connaître maintenant.
— Ok, répond Fred en se servant du jus d’orange.
— Quoi ok ?
— Ok, j’ai entendu ta réponse.
— Et tu ne vas rien dire de plus ? Mais c’est de la torture !
Je me tourne vers George alors que Fred est mort de rire.
— Ne la laisse pas te faire flancher !
— Mais oui, mais quand elle me regarde comme ça… soupire George.
Je vais gagner.
— Bon, Emy, tu veux un secret ? Et bien, il faut qu’on trouve Harry, et on va vous montrer un truc d’enfer !
J’ai gagné visiblement. Je me lève immédiatement avec mon plus beau sourire en direction de George. Promis, je n’use pas de mes charmes pour le faire fléchir.
— Tu fais quoi ? me dit-il.
— Bah, je vais chercher Harry.
— Pas besoin.
Encore ce sourire amusé. C’est quoi ce secret ? Je bouille d’impatience. Ils se lèvent et partent dans un petit coin caché.
— Regarde, me fait George.
Je suis contre lui alors qu’on se tasse pour qu’ils puissent dévoiler un parchemin caché dans leur poche. Rectification, un vieux bout de parchemin tout usé. Ils pointent de leur baguette la surface vierge puis prononcent rapidement une formule.
— Je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises.
Ils l’ouvrent tout aussi rapidement, mais je crois lire quelque chose.
— Attendez, c’est écrit…
— On va tout te montrer avec Harry, me dit Fred.
— Non, attends…
George saisit que ça ne va pas, il me montre la couverture recouverte d’une écriture ronde à l’encre verte.
« Messieurs Lunard, Queudver, Patmol et Cornedrue spécialistes en assistance aux Maniganceurs de Mauvais Coups sont fiers de vous présenter
LA CARTE DU MARAUDEUR »
— Ça va ?
— Et bien…
Mon père ne m’en a jamais parlé. Je ne comprends pas trop du coup. Pourtant je suis sûre que lui et ses amis se faisaient appeler les maraudeurs quand ils étaient à Poudlard. Il m’a raconté quelques histoires quand j’étais petite. Enfin je crois…
La coïncidence est trop grande pour que ça ne soit pas lui Lunard.
Mais alors Patmol, Cornedrue et Queudver seraient les autres ? Qui est qui ? Pourquoi ces drôles de surnoms ?
— Harry est près de la sorcière borgne, dit Fred qui étudie un plan du château. Méfait accompli.
— Emy ?
— Allons retrouver Harry.
Fred prend la tête, nous indiquant le chemin. Il connaît le château par coeur. George le laisse prendre de l’avance et passe un bras autour de mes épaules.
— Je crois que je connais une personne qui a fait cette carte. En fait, je pense que je les connais tous.
— Comment ça ?
— Mon père.
Sous la surprise, il s’arrête.
— Vraiment ? Déjà que je l’aimais bien comme prof, et venant de ma part, tu sais à quel point c’est rare ! Mais en plus, il aurait fait ce petit bijou ? Mais c’est un génie !
Je rigole en le voyant avec cet air ahuri. Fred voit qu’on ne le suit pas alors il fait machine arrière. Je lui explique rapidement et il a la même réaction que son frère.
— Putain ! Mais je l’adore !
Quand on rejoint Harry qui est effectivement dans le couloir de la sorcière borgne, les jumeaux se remettent tout juste de leur surprise.
Si cette carte peut nous faire sortir illégalement du château, je ne peux pas en parler à mon père. Alors les réponses à mes questions concernant ces maraudeurs attendront.
En attendant, cette carte, c’est une porte de sortie pour Harry et moi, nous pouvons aller à Pré-au-lard, c’est génial, non ?
*****
— C’est incroyable, répéta Harry pour la troisième fois.
Après un toboggan en pierre, nous sommes maintenant dans un passage plongé dans le noir.
Il faudra que je fasse attention à la carte après ça. Parce que si Harry ou Ron et Hermione voient que je rends visite au « Professeur Lupin » régulièrement, ils vont se poser des questions.
À juste titre.
— J’ai l’impression d’être dans un terrier de lapin géant.
— Après le serpent géant… marmonne t-il ce qui me fait rire.
— Regarde, il y a un escalier en pierre.
— Génial…
On commence à le monter, Harry est en tête. Je pensais qu’il serait plus court que ça, mais au bout d’un moment, j’ai l’impression qu’il n’en finit plus, ça donne un peu le tournis, ma main s’appuie sur la pierre rugueuse et je ne la quitte pas, monter comme ça dans un noir presque complet donne le tournis.
« Bam ! »
— Ouch.
— Ça va ?
— Oui, ma tête a heurté quelque chose… On dirait une trappe.
— Tu entends quelque chose ?
Silence total.
— Non, c’est bon, la voie est libre.
Je me faufile à côté de lui et l’aide à l’ouvrir, on se retrouve dans une cave. Elle n’est pas très poussiéreuse, elle doit souvent servir. Puis on entend une sonnerie et des voix.
Nous sommes dans la cave de la boutique Honeyduke !
*****
— Tu ne trouves pas ça irresponsable ? marmonne Hermione alors que les garçons marchent devant.
Je suis partagée. D’un côté, elle a raison, elle a très très souvent raison d’ailleurs. Mais d’un autre, Harry est si heureux de pouvoir venir ici, ça lui fait oublier le désastre du dernier match.
— On fait attention et on rentre avant la nuit, dis-je finalement.
Je sais qu’elle n’est pas d’accord, et au fond de moi, je sais très bien que ce n’est pas une bonne idée.
Mais on visite Pré-au-lard…
— Est-ce que ça vous dirait d’aller boire une Bièraubeurre aux Trois Balais ? propose Ron.
Nous sommes gelés, et ça me semble être une plutôt bonne option. Je les suis dans l’auberge et nous trouvons une petite table libre.
— Tout le monde a eu la même idée, commente Hermione alors que Ron part nous chercher nos chopes.
— Vous faites quoi d’habitude ?
— La dernière fois, on a été un peu partout pour tout découvrir. Et puis, on a passé beaucoup de temps à choisir ce qu’on allait vous ramener.
— Et tu as déjà pris les cadeaux de Noël pour être en avance, devina Harry.
Elle sourit devant nos airs amusés.
— Oui, j’aime m’organiser avant que ça ne soit trop tard.
— Ah oui ?
Elle allait répondre puis se reprit en voyant qu’Harry la faisait marcher. On rigole tous les deux.
— Et voilà !
Ron dépose quatre chopes et nous trinquons avant de déguster. C’est excellent et tout de suite, j’ai bien moins froid. Au même moment, je vois quatre personnes entrer dans l’auberge. Je manque de faire tomber ma chope, surprise par leur venue. Je n’ai pas l’autorisation d’être ici et le professeur McGonagall, le sait très bien. Cependant, c’est la présence de Fudge qui m’inquiète le plus. S’il me voit avec Harry, même s’il sait qu’on se côtoie, il pourrait remettre en cause tellement de choses. Comme la possibilité de revenir vivre avec mon père. Je plonge sous la table au même moment où Ron et Hermione appuient sur la tête d’Harry pour le faire disparaître lui aussi.
— Merde, murmure t-il.
— Ils ne nous ont pas vus.
Hermione fait déplacer le sapin discrètement alors qu’on voit leurs pieds se diriger vers une table voisine.
— C’est le dernier week-end du trimestre, ils voulaient en profiter…
Harry a raison, on a été idiots d’aller ici, avec le temps, professeurs comme étudiants se sont réfugiés ici.
— Ça va être chaud pour rentrer avant la nuit s’ils s’installent que maintenant, dis-je tout bas.
Hermione me touche l’épaule avec sa main, signe sûrement qu’on doit cesser de parler. Il ne nous reste plus qu’à écouter. Ils commencent la conversation en parlant de tout et de rien, notamment de la présence des détraqueurs dans le village.
— N'oublions tout de même pas qu'ils sont là pour vous protéger d'un danger encore plus grand. Nous savons tous de quoi Black est capable...
C’est Fudge qui parle, mon coeur bat la chamade, va t-il trop en dire ? Une petite voix au fond de moi serait bien contente qu’il dise toute la vérité comme ça. Je n’aurais pas à le dire moi, et comme cela Harry apprendrait toute la vérité sans que moi, je ne trahisse ma parole.
Scénario idéal : il sait tout, m’accepte et je retourne vivre chez mon père.
Mais Fudge s’interrompt et la peur reprend le dessus. Je dois rester réaliste, jamais les autres me pardonneront pour tous les secrets. Madame Rosmerta dit qu’elle ne comprend pas comment Sirius a pu passer dans le camp de Voldemort.
J’en connais un qui est tout aussi chamboulé… Même douze ans après.
— Vous ne connaissez pas la moitié de l'histoire, Rosmerta, dit Fudge. Les gens ne savent pas le pire.
— Le pire ? Pire que d'assassiner tous ces malheureux ?
— En effet.
— Je n'arrive pas à le croire. Qu'est-ce qui pourrait être pire ?
Une douleur dans la main me fait réaliser que je sers tellement les poings que j’en ai coupé ma circulation sanguine. Harry ne perd pas une miette de ce qui se dit à côté…
— Vous avez dit que vous vous souveniez de lui quand il était à Poudlard, Rosmerta ? dit le professeur McGonagall. Et vous vous rappelez qui était son meilleur ami ?
Oh non…
— Bien entendu. On ne voyait jamais l'un sans l'autre. Je ne compte plus les fois où ils sont venus ici... Ils me faisaient rire ! Ah ça, on peut dire qu'ils faisaient une belle équipe, Sirius Black et James Potter !
Harry lâche sa chope qui tombe par terre avec un bruit sonore. Moi, j’ai les larmes aux yeux. Il faut que je me ressaisisse, qu’on parte d’ici, ils vont trop parler.
— Justement. Black et Potter, les chefs de leur petite bande. Tous les deux très brillants, bien sûr – exceptionnellement brillants, en vérité – mais je crois que jamais aucun élève ne nous a causé autant d'ennuis que ces deux-là.
— Je n'en suis pas sûr, dit Hagrid avec un petit rire. Fred et George Weasley peuvent également prétendre au titre.
— On aurait dit que Black et Potter étaient deux frères ! intervint le professeur Flitwick. Absolument inséparables ! Avec Lyra, c’était un vrai trio.
— Sans aucun doute, dit Fudge. Potter avait une confiance absolue en Black. Et c'était toujours vrai quand ils ont quitté l'école. Black était témoin au mariage de James et de Lily. Si Lyra était la marraine d’Harry, le parrain, c’était son frère, Sirius. Harry ne sait rien de tout cela, bien sûr. Vous imaginez l'effet que ça lui ferait ?
Je voudrais disparaître. Je prie pour qu’ils ne citent pas mon nom ou celui de mon père. J’aimerai effacer la dernière heure et ne pas à entendre tout ça. C’est la pire manière de l’apprendre pour Harry. Je ne suis pas pour les mensonges, mais à voir son visage, tout ça, c’est beaucoup à encaisser.
Je loupe la suite, c’est Flitwick qui parle maintenant.
— Alors, Black est devenu le Gardien du Secret des Potter ? dit Madame Rosemerta.
— Le choix s’est tout de suite dévié sur Lyra bien sûr, elle avait déjà été l’une de leur cible. Et puis, elle venait elle aussi d’accoucher. Bien entendu, James Potter a affirmé à Dumbledore que Black aurait préféré mourir plutôt que de révéler où ils se trouvaient et que Black avait lui-même l'intention de se cacher. Pourtant, Dumbledore restait inquiet. Je me souviens de l'avoir entendu proposer à Potter de devenir lui-même le Gardien du Secret.
— Il soupçonnait Black ?
— Il était persuadé qu'un proche des Potter informait régulièrement Vous-Savez-Qui de leurs déplacements. En fait, il pensait depuis longtemps que quelqu'un nous trahissait en fournissant des renseignements à Vous-Savez-Qui.
— Mais James Potter a insisté pour choisir Black comme Gardien du Secret ?
Je suis perdue. Est-ce si mal de dévoiler toute la vérité ? Devrais-je expliquer la suite à Harry après cela ? Fudge me croira t-il quand je dirai n’avoir rien dit à Harry lorsqu’ils réviseront mon cas ? Est-ce pour cela qu’ils voulaient que je garde le secret ? Pour protéger Harry ?
— Misérable traître abject et répugnant ! s’exclame Hagrid me faisait sursauter.
— Chut !
— Je l'ai vu ! grogna Hagrid. Je dois être la dernière personne à l'avoir rencontré avant qu'il tue tous ces gens ! C'est moi qui suis allé chercher Harry dans la maison de James et Lily après leur assassinat ! Il y avait leurs corps au sol, et celui de Lyra. Sa propre soeur, bon sang ! Elle était froide et distante, on ne peut pas revenir là-dessus, mais elle venait d’être maman, il était son jumeau, il devait le savoir qu’elle serait là ! J’ai tiré Harry des ruines, le pauvre malheureux. Il avait une grosse plaie sur le front et ses parents étaient morts... Et voilà que Sirius Black apparaît sur la moto volante qu'il utilisait pour se déplacer. Je ne me suis jamais demandé pourquoi il était là. J'ignorais qu'il avait été le Gardien du Secret de James et de Lily. J'ai pensé qu'il venait simplement d'apprendre ce qui s'était passé et qu'il était aussitôt accouru pour voir s'il pouvait se rendre utile. Il était pâle et tremblant. Et vous savez ce que j'ai fait ? J'AI CONSOLÉ CE TRAÎTRE ASSASSIN !
Je me mords l’intérieur de la bouche pour ne pas pleurer. C’est trop dur d’entendre tout ça à nouveau. J’ai les cris de Lily qui résonnent dans ma tête. L’éclair vert…
— Hagrid, je vous en prie ! Parlez moins fort !
— Comment pouvais-je savoir que ce n'était pas la mort de Lily, de James et de sa sœur qui le bouleversait ? Tout ce qui lui importait, c'était le sort de Vous-Savez-Qui ! Alors, il m'a dit: « Donne-moi Harry, Hagrid, je suis son parrain, je m'occuperai de lui. » Il avait sa nièce dans ses bras, elle, elle ne bougeait pas, ne pleurait pas, elle aurait aussi pu mourir ce jour-là. Seulement moi, j'avais reçu des instructions de Dumbledore et j'ai répondu à Black: « Non, Dumbledore a dit que Harry devait être confié à sa tante et à son oncle. » Black a essayé de discuter, mais il a fini par abandonner. Il m'a proposé sa moto pour emmener Harry. « Je n'en aurai plus besoin, maintenant », m'a-t-il dit. J'aurais dû me douter qu'il y avait quelque chose de louche. Pourquoi me donner cette moto qu'il aimait tellement ? Pourquoi n'en aurait-il plus besoin ? Mais il pleurait, je croyais qu’il était bouleversé.
Harry est blanc comme un linge alors qu’Hagrid continue son histoire. Mon corps tremble de peur à l’idée qu’ils finissent par dire mon nom. Il y a beaucoup d’élèves autour de nous, ils doivent l’éviter pour cela.
— Mais ne savait-il pas que sa sœur et sa nièce se trouvaient dans la maison ? dit Madame Rosmerta.
— C’est ce que nous avons essayé de savoir. Les aurors l’ont interrogé, il n’a jamais décroché un mot. Même quand le mari de Lyra est passé le voir…
— Ah oui, c’est…
— Chut, la coupa McGonagall.
Petit silence.
— Ils étaient si proches pourtant, reprend-elle. Jamais je n’aurais cru… Elle qui a si bien tourné, et lui, il aurait fini par la trahir, elle et James et Lily ? C’est insensé. Encore aujourd’hui, la vérité est dure à croire…
Je mets ma tête entre mes genoux et pose mes mains sur mes oreilles. Je n’en peux plus, j’aimerais sortir de cette auberge, j’aimerais respirer à nouveau, cesser tout cela. J’entends le nom de Peter, mon père n’est toujours pas cité sûrement pour la même raison que moi. Les élèves autour pourraient entendre, ils sont discrets… Enfin pas vraiment, ils déballent toute la vérité alors que nous sommes cachés juste derrière un sapin de noël.
Le souffle me manque, la petite bulle dans laquelle je me plonge est pour éviter de perdre le contrôle. Inspirer, expirer. Rien d’autre. J’ai peur, j’ai si peur de quand on quittera cet endroit. Devrais-je en parler à mon père ? Tout comme la carte ?
Je ne sais pas.
Je reste un moment, coupée du reste, à me focaliser sur ma respiration. La Bête est pourtant repartie, mais je ne veux pas prendre de risque et puis, je ne veux plus les entendre. Mes yeux sont fixés sur leurs pieds qui finissent pas bouger. Signe qu’ils quittent la taverne.
La tête de Ron et Hermione apparaissent sous la table et regardent Harry. Il a les lèvres serrées et est encore plus pâle que tout à l’heure. Ils sont tous choqués par ces révélations, que je sois perturbée n’est pas suspect. De toute manière, j’aurais été incapable d’agir normalement.
Harry ne prononce pas un mot quand on repart rapidement vers le château. On agit en mode pilotage automatique. Les mêmes questions tournent en boucle dans ma tête. Quand nous arrivons, je décide de ne rien dire à mon père. Cela n’apporterait rien. Tout comme la carte. Si Sirius tente à nouveau de venir dans le château, je lui en parlerai peut-être.
Et est-ce que je dis la suite de la vérité à Harry ? Que le bébé avec lui, c’était moi ? Quand nous nous retrouvons dans le tunnel du château et qu’il me tend sa main pour m’aider à sortir, je croise son regard et j’ouvre la bouche.
Ça y est, je vais lui dire.
Puis il lâche ma main, referme le passage et commence à marcher. Le moment est passé. Je me décide à ne rien dire. Je continuerai à garder le secret. Au fond de moi, le doute persiste, je ne sais pas du tout si je fais bien de ne rien lui dire.
Et la peur est grande.
*****
La nuit est rude, je me réveille tout le temps en sursaut suite à un cauchemar. Je ne m’en rappelle pas, mais la sensation très désagréable de peur et de la tristesse ne me quitte pas vraiment. Le lendemain matin, au petit déjeuner, Ron et Hermione m’accompagnent. Harry dort encore paraît-il.
— Il doit nous parler, quand il se réveille, on lui demande ce qu’il pense. Il ne peut pas être tout seul à ressasser encore et encore ces mauvais souvenirs.
— Hier, il n’a pas répondu quand je l’ai appelé, indique Ron. Il dormait peut-être.
Il n’y croit pas et nous non plus.
— Il n’empêche que cette histoire est terrible, reprend Hermione. C’est normal s’il est bouleversé.
- Le meilleur ami de ses parents qui les trahit et cause leur mort, oui, tu m’étonnes, dit Ron et reposant sa tartine.
Ça lui coupe l’appétit, ce n’est pas commun.
— Emy, tu ne dis rien, ça va ?
Le ton d’Hermione est doux. Je la rassure d’un sourire.
— Je peux comprendre Harry, il n’a pas connu ses parents et quand il en apprend un peu plus, c’est une sombre histoire de trahison. Black est son plus proche parent. On ne veut pas être affilié au meurtrier de ses parents.
— C’est Tu-sais-qui qui les a tués.
— C’est pareil, dis-je un peu trop sèchement.
L’action de Sirius les a tués. Il le savait parfaitement.
— Pardon, reprends-je.
— Ce n’est rien.
— Et Lyra Black ? Vous en aviez déjà entendu parler ?
— Non, jamais, dit Hermione. Pas plus que Sirius Black avant son évasion. Aucun livre d’histoire les évoque…
Elle fronce les sourcils.
— Ah, mais si, ils mettent toujours Lyra B. Jamais je n’aurais cru que son nom est Black. C’est toujours rapidement évoqué.
— C’était sa sœur jumelle, rappelle Ron. Je ne vois pas Fred et George se trahir mutuellement.
— Surtout qu’il y avait sa nièce. Un autre enfant était avec Harry. C’est terrible… répète à nouveau Hermione.
Je bois une nouvelle gorgée de thé pour dissimuler mon trouble. On part faire nos devoirs après le petit-déjeuner, aucun de nous n’a le cœur pour faire autre chose. Et Harry ne descend toujours pas. Cependant, je vois bien que Ron est dans ses pensées plus qu’il ne travaille. Seule Hermione s’est plongée dans le travail. En même temps, vu tout ce qu’elle a à faire…
— Bonjour, c’est cool le château vide comme ça !
George vient nous saluer. Je quitte ma mine soucieuse et me réjouis d’échanger quelques banalités avec lui. Hermione ne parle pas de la carte, mais on sent que le sujet lui brûle les lèvres. Je finis par partir faire un tour avec lui, j’en profite ainsi pour tout lui expliquer. Nous nous arrêtons vers la forêt interdite, on a une vue sur la vallée qui s’étend près des arbres sombres. C’est le coin le plus reculé et le plus tranquille du parc. Plein de gens viennent ici pour faire… Des choses. Mais c’est l’hiver, et avec le froid, on est tranquilles.
— Alors comment ça va ?
— Bah, je ne sais pas trop, on en parlera à Harry quand il descendra.
Il y a un peu de soleil qui réchauffe un peu malgré le vent glacial. C’est agréable, on s’assoit sur l’un des gros rochers, blottis l’un contre l’autre.
— Et toi alors ?
Il soupire un peu.
— Les BUSES me gavent…
Son air fatigué me surprend un peu. Il a toujours paru s’en soucier comme de sa première chaussette. C’est à dire pas du tout.
— La pression est là, même si on voudrait s’en moquer, ils ne cessent de nous répéter qu’on doit réviser, travailler et que sans ça, on n’arrivera à rien dans la vie. Ça peut en motiver certains, pour moi, ça me donne l’effet inverse.
— Tu veux les passer ?
J’espère ne pas le vexer avec la question, il a toujours semblé s’en moquer, mais qu’il soit si préoccupé me met le doute.
— Non, pas tellement, je m’en fous. C’est que je suis fatigué de leur discours répété à longueur de temps. Dis-toi qu’à chaque cours, ils nous le ressortent. Alors même si tu veux t’en moquer, tu ne peux pas au bout d’un moment… C’est fatiguant…
Le voir si abattu me fait de la peine, je prends son menton entre mes doigts et me penche sur ses lèvres. Nous nous embrassons longuement, nos doigts étroitement liés. Je n’ai plus si froid, lui non plus semble t-il avec ses joues rouges et ses yeux pétillants.
— Ça marche bien pour aller mieux et oublier les cours.
— Les bisous ?
— Oui, recommence pour voir.
Je me penche à nouveau…
*****
Quand je reviens dans la salle commune accompagnée de George, Harry est avec Ron et Hermione. La conversation est tendue.
— Black ne vaut pas la peine qu'on meure à cause de lui, dit Ron.
George passe une main dans mon dos. Je le rassure d’un sourire, ça va aller, je me blinde et les rejoins. Lui, il doit prendre son train pour rentrer pour les vacances, Molly voulait les voir pour Noël.
Harry a le visage fermé et a une tête de celui qui a très mal dormi.
— Vous savez ce que j'entends, chaque fois qu'un Détraqueur s'approche de moi ?
Il ne me regarde pas, il fixe Ron et Hermione qui semblent inquiets de sa réponse. J’enlève lentement mon manteau et mon écharpe tout en écoutant.
- J'entends ma mère qui hurle et qui supplie Voldemort. Et si vous aviez entendu votre mère crier comme ça, quelques instants avant sa mort, vous ne l'oublieriez pas facilement. Et si vous découvrez que quelqu'un qui était censé être son ami l'avait trahie et livrée à Voldemort...
Il entend les mêmes choses que moi, j’en étais sûre.
- Tu n'y peux rien du tout ! s’exclame Hermione. Les Détraqueurs vont capturer Black et il retournera à Azkaban. Bien fait pour lui !
— Tu as entendu ce que Fudge a dit. Black n'a pas été affecté comme les autres prisonniers par son séjour à Azkaban. Pour lui, ce n'est pas un châtiment aussi terrible que pour les gens normaux.
— Et alors ? Qu'est-ce que tu es en train de nous dire ? demande Ron. Tu veux quoi ? Tuer Black ?
— Ne sois pas stupide. Harry ne veut tuer personne, n'est-ce pas, Harry ?
Il ne répond pas et finalement se tourne vers moi. La Bête est proche, sent-il que je suis tendue ? Il semble sonder pour savoir dans quel camp je suis. Pas besoin d’être un génie pour savoir ce qu’ils se sont dits avant que j’arrive. Ils lui ont demandé s’il comptait retrouver Sirius.
— J’ai regardé le livre que m’a offert Hagrid avec les photos de mes parents. Il y est, il est sur les photos, tout content, tout sourire, on ne le reconnaît pas. Mais elle, Lyra Black, elle n’y est pas. C’est ma marraine et je ne sais rien d’elle. Juste qu’elle s’est faite trahir par son frère jumeau et qu’elle a donné sa vie pour ma mère et moi.
Je comprends une chose : la boîte de pandore a été ouverte, maintenant, il cherche à tout comprendre. J’aimerais lui dire de cesser, que mon père se heurte à cette énigme depuis des années et que la réponse reste inconnue…
— Malefoy est au courant, reprend-il soudainement. Vous vous souvenez de ce qu'il m'a dit pendant le cours de potions ? « Si j'étais toi, j'essaierais de le retrouver moi-même... Je me vengerais. »
— Tu vas suivre les conseils de Malefoy au lieu des nôtres ? s'indigne Ron. Écoute-moi... Tu sais ce qu'a reçu la mère de Pettigrow quand Black en a eu fini avec lui ? Papa me l'a raconté : l'Ordre de Merlin, première classe, et un doigt de son fils dans une boîte. C'était le plus gros morceau qu'ils aient retrouvé de lui. Black est fou et dangereux...
Je ferme les yeux un instant. C’est affreux.
— Le père de Malefoy a dû lui dire ce qui s'est passé. Il faisait partie des intimes de Voldemort...
— Tu ne voudrais pas plutôt dire « Tu-Sais-Qui » ?
— ...Et donc, les Malefoy savaient que Black travaillait pour Voldemort...
— Et Malefoy serait ravi que tu sois réduit en petits morceaux, tout comme Pettigrow ! Essaye de comprendre : Malefoy espère que tu seras tué avant le match de Quidditch entre Gryffondor et Serpentard.
Ron et Harry ne s’écoutent pas. Il y a un fossé entre eux. Ron ne peut pas comprendre Harry. Il a grandi entouré, aimé. Aucun secret planait au-dessus de lui. Hermione a compris que ça ne servait à rien de parlementer, elle s’est tue, mais soudain, ça semble être de trop pour elle. Ses yeux sont brillants de larmes.
— Harry, s'il te plaît, je t'en prie, sois raisonnable. Black a fait quelque chose d'horrible, absolument horrible, mais ne te mets pas en danger, c'est ce que Black veut... Harry, tu tomberais directement entre ses mains si tu essayais de le retrouver. Ni ton père, ni ta mère n'auraient voulu qu'il te fasse du mal, n'est-ce pas ? Jamais ils n'auraient voulu que tu partes à sa recherche !
— Je ne saurai jamais ce qu'ils auraient voulu ou pas, puisque, par la faute de Black, je n'ai jamais eu l'occasion de leur parler.
Oh putain. Le silence qui suit est lourd. Je dois m’asseoir, j’ai peur de ne plus pouvoir tenir debout. La pression est forte, j’ai envie de me coucher et de dormir jusqu’à l’été pour sortir de tout ça.
Ron essaie de changer de conversation, il parle des vacances, mais Harry l’interrompt et se tourne vers moi.
— Et toi alors ? Tu en penses quoi ?
Ah ! La question à mille gallions. Qu’est-ce que j’en pense ?
— Je suis toute aussi indignée que toi…
Mmmh, peut-être pas la meilleure chose à dire, s’ils se mettent en tête de chercher ce bébé qui était avec lui, c’est moi qui vais passer des jours heureux.
— Je comprends que tu sois aussi remonté. Vraiment Harry. Mais qu’est-ce que tu veux faire ? Aller le chercher ?
Il ne répond pas.
— Mais, si jamais on se retrouve devant lui un jour, je te promets que je t’aiderai…
— À quoi ? dit Hermione surprise de ma réponse. À faire justice ?
Harry a un regard noir et elle n’ajoute rien de plus.
— C’est qui ce bébé qui était avec moi ? Je ne le savais pas…
— C‘est les vacances ! On est presque à Noël ! Si on allait faire un tour chez Hagrid ? dit Ron pour changer de sujet. Il y a une éternité qu'on ne l'a pas vu !
— Non, dit aussitôt Hermione. Harry ne doit pas quitter le château...
— Bonne idée, allons-y, dit Harry en se levant. J'en profiterai pour lui demander pourquoi il ne m'a jamais parlé de Black quand il m'a raconté l'histoire de mes parents !
Si tu espérais qu’il change de sujet, c’est loupé Ron, et je ne peux que comprendre Harry.
Je les suis vers la cabane d’Hagrid avec dans la bouche un goût amer.
Celui de la trahison.