Quand on arrive devant l’entrée du Ministère, je suis complètement figée par le stress et la longue chevauchée. Durant toute la durée du trajet, j’ai tenté de ne pas imaginer Sirius baignant dans une mare de sang au beau milieu d’une allée du Ministère.
Quand le Sombral se pose, je saute au sol et le remercie d’une caresse sur l’encolure. Puis je pars aider les autres à descendre. Pour Ron, Hermione et Ginny, je n’ose pas imaginer ce que c’était de voler ainsi dans le vide.
— Plus jamais, dit Ron qui tombe avant que je vienne l’aider.
Il se relève et marche vers la croupe du Sombral, se cognant dessus, ce qui le fait tomber à nouveau. Ça aurait pu être drôle si je n’étais pas aussi stressée.
— Plus jamais, jamais... Pire que tout...
Je pars alors vers la cabine téléphonique. Elle est petite, je ne sais pas si on va tous entrer.
— Venez, entrez ici, dit Harry.
Effectivement, on ne va pas tous entrer, je les laisse passer en premier, puis je me transforme pour me glisser entre leurs jambes.
— Celui ou celle qui est le plus près du téléphone compose six, deux, quatre, quatre, deux.
Quelqu’un doit réussir puisqu’on entend :
— Bienvenue au ministère de la Magie. Veuillez indiquer votre nom et l’objet de votre visite.
— Harry Potter, Emilynn Lupin, Ron Weasley, Hermione Granger, Ginny Weasley, Neville Londubat, Luna Lovegood... Nous sommes venus sauver quelqu’un à moins que votre ministère puisse s’en charger à notre place !
— Merci. Les visiteurs sont priés de prendre les badges et de les attacher bien en vue sur leurs robes. Les visiteurs sont priés de se soumettre à une fouille et de présenter leurs baguettes magiques pour enregistrement au comptoir de la sécurité situé au fond de l’atrium.
— D’accord ! Et maintenant, est-ce qu’on pourrait bouger un peu ?
Le sol se met à bouger et on descend dans la terre. L’atrium est vide quand on arrive. Je sors la première et reprends forme humaine. Deux fois en une soirée, c’est un record.
— Emy, dit Hermione en me tendant un badge.
« Emilynn Lupin, mission sauvetage »
— Ils sont sérieux ? je soupire en le mettant dans ma poche.
Heureusement ce matin j’ai mis un pantalon et pas une jupe. J’ai aussi les chaussures de ma mère, c’est parfait pour courir. On se hâte d’aller vers les ascenseurs, c’est bizarre que tout soit aussi vide. Je m’empresse d’appuyer sur le bouton pour descendre et trépigne d’impatience en entendant le mécanisme de l’ascenseur se mettre en marche.
Il s’ouvre, on entre, nouveau tapotement intempestif du bouton « Département des Mystères ».
— Come on, come one, come on…
** Aller, aller, aller…**
La porte s’ouvre dans un vacarme épouvantable. Et toujours aucun agent de sécurité. Je suis presque surprise de ne croiser aucun cadavre au sol.
— Allons-y, murmure Harry.
Nous sommes dans un couloir. Celui dont il rêve depuis des mois ?
— Bon, écoutez, dit Harry lorsqu’on arrive devant une porte. Peut-être que... que deux d’entre nous devraient rester ici pour... pour faire le guet...
— Et comment on s’y prendra pour te prévenir, si quelqu’un arrive ? demande Ginny. Tu seras peut-être à des kilomètres d’ici.
— On vient avec toi, Harry, dit Neville.
— Continuons, déclare Ron.
Je comprends qu’il ne veuille pas que tout le monde vienne. Mais ils sont grands et ont fait leur choix. Ils savent que Voldemort est là, ils savent à quoi s’attendre. Enfin, non, je ne pense pas qu’aucun de nous le sait. Disons que nous sommes tous sur le même niveau d’information.
On ouvre la porte, entrons, c’est une salle circulaire qui me donne une mauvaise impression.
— Fermez la porte, murmure Harry.
Au moment où Neville le fait, les portes tournent et on ne sait plus d’où on est venus. Je tends les bras, m’attendant à ce que le sol aussi bouge, mais non, ce n'est que les murs. Et maintenant il y a douze portes parfaitement identiques qui se tiennent devant nous.
— À quoi ça rime ? dit Ron, effrayé.
Lui aussi parle tout bas, comme si on allait alerter quelque chose d’horrible en parlant trop fort. Je me transforme en loup et tente de renifler les portes une à une pour savoir laquelle on vient de franchir. Mais… Je ne sens rien. Mes amis oui si je m’approche, les porte par contre rien. Alors que normalement, il devrait y avoir une effluve, quelque chose, une trace… C’est incompréhensible.
— Alors ? me dit Hermione quand je me retransforme.
— Rien.
— Comment on va faire pour ressortir ? demande Neville, mal à l’aise.
— Ça n’a pas d’importance pour l’instant, répond Harry avec force. Nous n’aurons pas besoin de sortir avant d’avoir retrouvé Sirius.
— Dans ton rêve, il se passait quoi ? je demande.
— Je… Je passais la porte située au bout du couloir en sortant de l’ascenseur et j’arrivais dans une pièce sombre. Celle-ci. Ensuite, je franchissais une autre porte qui donnait sur une salle où je voyais... des lumières briller. Essayons d’ouvrir des portes, je reconnaîtrai le bon chemin quand je le verrai. Venez.
Je tiens ma baguette bien devant moi quand il ouvre la porte. La pièce qu’on découvre est bizarre, comme tout ici, d’ailleurs. Elle est rectangulaire, avec un bac rempli de liquide vert foncé et des trucs blancs qui flottent.
— Qu’est-ce que c’est que ces machins-là ? murmure Ron.
— Sais pas, dit Harry.
— Tu crois que ce sont des poissons ? chuchote Ginny.
— Des larves d’Aquavirius ! s’exclame Luna avec un peu trop d’enthousiasme. Papa dit que le ministère élève...
— Non, la coupe Hermione. Ce sont des cerveaux.
Je frissonne et me recule.
— Sortons d’ici.
Harry approuve.
— Ce n’est pas par là, il faut essayer une autre porte.
— Ici aussi, il y a des portes, remarque Ron.
Mince, cet endroit est un vrai labyrinthe. Si chaque pièce a au moins 6 portes et qu’il y a 12 portes à l’origine, ça fait plus de 72 possibilités. Et cela sous-entendrait qu’il n’y a pas de portes dans les pièces qui suivent.
Alors que Luna s’apprête à fermer la porte, Hermione sort sa baguette et forme un X enflammé.
— Génial, dis-je.
On la ferme, les portes tournent alors que le X reste visible.
— C’était une bonne idée, approuve Harry. Essayons celle-ci, maintenant.
La prochaine pièce me donne encore plus la chair de poule. Elle est rectangulaire, en bas des gradins, il y a des grandes pierres qui forment une arcade. Je… J’entends des chuchotements.
— Je n’aime pas cet endroit, on sort, il n’y a personne, je murmure.
— Qui est là ? C’est toi, Sirius ? demande Harry.
Il ne m’écoute pas et descend les marches. Je le suis pour l’arrêter et le prends par le bras.
— Il n’est pas là, sortons.
— Toi aussi tu…
— Oui, on sort.
— Qu’est-ce que tu dis ?
— Personne n’a rien dit, Harry ! s’exclame Hermione qui semble encore plus inquiète par cette pièce que par les cerveaux dans le truc vert.
Les murmures continuent.
— C’est toi, Ron ?
— Je suis là, mon vieux.
— Vous n’entendez pas ?
— Si, on sort, je le supplie.
Les murmures entrent dans ma tête, la Bête est partie, ce n’est pas pour rien. Cet endroit est mauvais.
— Moi aussi, je les entends, dit Luna.
Merde alors. Encore un truc pour ceux qui ont vu la mort. Mais dans ce cas ces voix… C’est qui ? Quoi ?
— Il y a des gens, là-dedans !
— Qu’est-ce que tu veux dire par là-dedans ? s’énerve Hermione.
Il n’y a que elle, Ron et moi qui ne semblons pas fascinés par cette arche. Ginny l’est également, alors qu’elle ne voit pas les Sombrals… Ça ne fait aucun sens. Chacun de nous en prend un par le bras et nous les tirons en arrière.
— Harry, s’il te plait, le suppliés-je. Suis-moi. On doit trouver Sirius.
— Sirius, répète t-il. Oui…
Il fronce les sourcils et je sais qu’il est de nouveau avec moi.
— Allons-y.
On remonte les marches pour rejoindre les autres.
— À ton avis, c’était quoi, cette arcade ? demande Harry.
— J’en sais rien, je marmonne.
— C’est sûrement quelque chose de dangereux, dit Hermione en inscrivant un autre X.
On prend une nouvelle porte, mais elle ne s’ouvre pas.
— Qu’est-ce qui se passe ?
— Elle est... fermée à clé.
— C’est sûrement celle-là, alors ? Ce serait logique !
Je suis assez d’accord avec Ron. Sans se concerter, on sort notre baguette avec Hermione.
— Alohomora !
Rien. Et le couteau magique de Sirius ne fait rien non plus. Je suis à court de solutions.
— Bon, laissons cette pièce de côté, dit Hermione.
— Et si c’était la bonne ? intervient Ron.
— Impossible. Dans son rêve, Harry franchissait facilement toutes les portes…
— Vous savez ce qu’il y a peut-être, là-dedans ? demande Luna.
— Un gros truc à babille, sans doute, murmure Hermione.
J’ai un petit rire nerveux avec Neville. Le stress me démange tellement que j’ai mal au ventre. Je ne cesse de penser à la possibilité de Sirius torturé à quelques mètres de moi. Voldemort a t-il fait la même chose à ma mère ? Je sais, je ne devrais pas penser à ça mais…
J’ai envie de vomir.
Harry ouvre en même temps une nouvelle porte. Il y a plein de lumières, des pendules, des horloges, des réveils, il y en a partout. Et puis, on entend le cliquetis des mécanismes « tic, tac » incessant, comme le temps.
— C’est celle-ci !
— Tu es sûr ? je demande. Je ne vois pas d’allée.
— Oui, par ici. Il y a une autre salle.
Cette salle est emplie de magie, de belle magie, tout est lumineux, chaleureux, mais j’ai appris à me méfier de ce que je ne connais pas. Une fois, petite, j’avais trouvé dans les vieilles affaires de voyage d’oncle Jo une sorte de boîte à musique. Elle était en faite ensorcelée et j’ai été incapable de parler pendant plusieurs heures par la suite.
Des objets magiques à propos du temps, je préfère ne pas penser à ce qu’ils peuvent faire.
Mon cœur bat la chamade, j’avance la première, ma main serrée sur ma baguette, l’oreille aux aguets pour entendre le moindre cri. Harry a raison, il y a une porte. Je m’arrête devant pour m’assurer que tout le monde est prêt.
Cette salle est bien plus sombre que la précédente. On dirait une église immense, sauf qu’elle est remplie d’étagères recouvertes de globes en verre. Je frissonne en sentant le froid intense nous atteindre.
— Quatre-vingt-dix-sept, c’est bien ça ? je murmure.
— Oui, répond Harry dans un souffle.
— Je crois qu’il faut aller à droite, chuchote Hermione. Oui... voilà le cinquante-quatre...
— Tenez vos baguettes prêtes, ajoute t-il.
— Je pourrais me transformer et partir devant.
Il secoue la tête.
— Tu ne pars pas seule.
— Je sais me défendre.
— On y va ensemble, dit-il en posant une main sur mon bras. Je ne te laisse pas seule.
— Allons-y, fait Hermione en me prenant la main.
Obligée de m’incliner, je commence à marcher dans l’allée. Je ne perds pas de temps à essayer d’observer ce qui m’entoure. Comme tout au Département des Mystères, j’ai un mauvais pressentiment.
Les yeux plissés, je tente de voir le plus loin possible. Il n’y a aucun bruit également, mais peut-être est-il inconscient, bâillonné, ou… Non, je ne veux pas y penser.
Quatre-vingt-quinze, quatre-vingt-dix-seize…
Nous y sommes, quatre-vingt-dix-sept. C’est vide, il n’y a personne. Non, ce n’est pas possible. Kreattur a dit qu’il n’était pas là. Il n’aurait pas pu mentir, si ? J’aurais dû lui parler moi-même en tant qu’héritière Black ? Non, non, il n’aurait pas fait ça. Sirius est ici, il est…
— Il est tout au bout, dit Harry. On ne peut pas bien voir d’ici.
Le cœur battant la chamade, je le suis entre les étagères immenses pleines de poussières. Il doit être près, tout près…
— Harry ? dit Hermione d’une voix timide.
Merde. Merde. Merde.
— Quelque part... par ici…murmure Harry.
Les larmes me montent aux yeux. De soulagement peut-être parce que Sirius n’est pas là, donc il est sûrement ailleurs, et vivant. Je ne vois pas de sang. S’il n’est pas là, où est-il ?
— Il est peut-être là... Ou là...
— Harry ? dit Hermione.
— Quoi ?
— Je... Je ne pense pas que Sirius soit ici.
— Comment ça ? je murmure.
Elle a son visage étendu par le stress et l’inquiétude, ses yeux fixent au loin, baguette tendue, elle surveille que personne n’arrive.
— On arrive trop tard, je dis. Ils l’ont peut-être emmenés, ils ont eu ce qu’ils voulaient et ils sont partis…
— Ton oncle ne parlerait jamais. Même sous la torture, souffle t-elle.
Je frissonne à nouveau.
— Harry ?
— Quoi ?
— Tu as vu ça ?
— Quoi ?
Harry rejoint Ron qui montre l’un des globes poussiéreux.
— Il... Il y a ton nom là-dessus.
— Mon nom ?
Je ne regarde pas cette foutue sphère, ni son étiquette. Je me transforme et hume l’air à la recherche d’un indice qui prouverait que Sirius était là.
— Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce que ton nom fait là-dessus ?
— Je ne figure pas sur les autres. Ni aucun d’entre nous.
Je ne suis pas idiote. Évidement que je pense à la possibilité qu’Harry s’est trompé. Que Voldemort l’a dupé et que tout cela était un piège. Mais je ne peux pas y croire, non, c’est imp…
— Harry, je crois qu’il ne faut pas y toucher, intervient Hermione.
— Et pourquoi pas ? C’est quelque chose qui me concerne, non ?
Une odeur. Je n’ai pas le temps de l’analyser. Je me retransforme immédiatement.
— Ne fais pas ça, Harry, dit Neville.
— Il y a mon nom dessus.
— On doit y aller, maintenant, je déclare.
Hermione tourne son visage angoissé vers moi alors qu’Harry se saisit de la sphère. Rien ne se produit, il ne devient pas un crapaud, ou disparaît dans une autre galaxie.
— Allons-y, dit-il.
Soulagée qu’il m’écoute, je pars vers la sortie, mais je n’ai pas fait deux pas, que je me retourne, ma baguette brandie.
— Bonsoir Emilynn, ça faisait longtemps.
J’ai l’impression que mon cœur loupe un battement. C’est Lucius Malefoy.
— Pas assez longtemps visiblement, je réponds froidement.
Je suis moi-même impressionnée par ma voix. Je suis morte de peur à l’intérieur, mais je ne veux pas qu’il le sente.
— Tu parles comme ta mère, avec beaucoup trop de sarcasme, réplique t-il. Trêve de plaisanteries, Potter maintenant retourne-toi lentement, gentiment, et donne-moi ça.
Ils sont une douzaine. Le double de nous.
— Où est Sirius ? lâche Harry.
— Le Seigneur des Ténèbres sait toujours comment faire !
C’est une femme qui a parlé. Quand elle s’approche, je sens une nouvelle vague de peur me saisir. C’est Bellatrix Lestrange, née Black.
— Salut Emilynn, enchantée de faire ta connaissance.
Je ne réponds pas. C’est le genre de personnage qui cherche à provoquer pour ensuite faire souffrir. Il y avait des filles comme ça à l’école. Parfaites en tout points, mais de vraies pestes qui savent parfaitement manipuler les autres pour leur faire croire que c’est eux le problème.
Merde Emy, reste concentrée. Mon cerveau part dans tous les sens.
— C’est vrai qu’elle lui ressemble, ajoute Bellatrix.
— Oui, fait Lucius en pinçant les lèvres. Potter, donne moi…
— Et c’est elle qui a causé la mort de ma chère tante Walburga ? Même sa mère n’a pas réussi à lui briser le cœur. Une vraie garce qui méritait de mourir comme elle l’a fait.
Emplie de colère, je tends plus haut ma baguette, prête à répliquer, mais je sens une main dans la mienne qui m’arrête. C’est Hermione.
— Donne-moi la prophétie, Potter.
— Je veux savoir où est Sirius !
— On doit trouver une diversion, murmure t-elle précipitamment.
— Je veux savoir où est Sirius ! répète Bellatrix en rigolant.
Ron esquisse un mouvement, mais comme pour moi, Harry l’arrête.
— Ne tente rien. Pas encore…
Nouveau rire.
— Vous l’entendez ? Vous l’entendez ? Il donne ses instructions aux autres mômes comme s’il pensait pouvoir se battre contre nous !
— Je sais que Sirius est ici, je sais que vous l’avez fait prisonnier !
Cette fois-ci, ce sont eux tous qui rigolent.
— Il serait temps que tu apprennes à faire la différence entre la vie et les rêves, Potter, dit Lucius. Donne-moi cette prophétie ou nous devrons nous servir de nos baguettes.
Nous sommes tous baguette brandie et aucun d’eux ne fait un geste pour nous désarmer. Et Lucius est particulièrement insistant sur cette sphère qu’il appelle prophétie.
Oh, mais…
— Donne-moi la prophétie et il ne sera fait de mal à personne.
— Oui, bien sûr. Je vous donne cette... prophétie, comme vous dites, et ensuite vous nous laissez tranquillement rentrer à la maison, c’est ça ?
— Accio proph...
— Protego !
La sphère reste en place.
— Je t’avais dit de ne pas faire ça ! Si jamais elle se casse...
Ok, alors tant qu’on a la prophétie, ils ne tenteront rien. Et elle n’a de valeur que si elle reste intacte. Pourquoi ? Que se passe-t-il si on casse une sphère/prophétie ?
— Tu as besoin d’arguments plus convaincants, sans doute ? dit Bellatrix en s’approchant. Très bien... Prends ma petite nièce, ordonne-t-elle à l’un des Mangemorts. On va la torturer devant lui. Je m’en charge.
Je sens une main me tirer en arrière et tout le monde faire un cercle autour de moi.
— Si vous voulez attaquer l’un d’entre nous, il faudra d’abord casser cette sphère, dit Harry. Je ne pense pas que votre patron sera très content si vous revenez sans elle. Au fait, de quel genre de prophétie s’agit-il ?
Les étagères autour de nous sont recouvertes de prophéties. Et si on les faisait tomber ? Un sort puissant et puis… J’ai aucune idée du résultat, mais la meilleure option qu’on a pour faire diversion et prendre de l’avance pour s’échapper. Je pourrais dire aux autres de courir pendant que je fais tomber les étagères, puis je me transforme pour les rattraper. Je ne me suis jamais autant transformée en aussi peu de temps, mais je sens que je peux le faire.
— Quel genre de prophétie ? Tu plaisantes, Harry Potter.
— Non, je ne plaisante pas du tout. Comment se fait-il que Voldemort ait tellement besoin de ça ?
— Tu oses prononcer son nom ?
— Oui. Je n’ai aucune difficulté à dire Vol...
— Ferme-la ! Tu oses prononcer ce nom avec tes lèvres indignes, tu oses le souiller avec ta langue de sang-mêlé, tu oses...
— Vous saviez que lui aussi était un sang-mêlé, comme vous dites ? Oui, la mère de Voldemort était une sorcière, mais son père un Moldu... ou peut-être vous a-t-il dit qu’il était de sang pur ?
— Stupéf…
— NON !
L’éclair de magie frappe une étagère et comme pour confirmer mon hypothèse, des sortes de fantômes apparaissent, murmurant des mots incompréhensibles. C’est parfait comme diversion. On n’aura pas mieux.
— NE L’ATTAQUE PAS ! NOUS AVONS BESOIN DE LA PROPHÉTIE !
— Étagère, je murmure.
— Il a osé... Il ose... ! Il reste là à... Répugnant bâtard...
— Démolissez-les, murmure à son tour Harry.
Il a pensé à la même chose.
— ATTENDS QUE NOUS AYONS LA PROPHÉTIE !
Lucius le regarde, interdit.
— Dumbledore ne t’a donc jamais expliqué que la raison pour laquelle tu as cette cicatrice au front se trouve au Département des mystères ?
De quoi il parle ? Harry se recule et sa main se serre sur la mienne.
— Je... quoi ? Qu’est-ce qu’elle a, ma cicatrice ?
— Ainsi, Dumbledore ne t’a jamais rien dit ? Voilà la raison pour laquelle tu n’es pas venu plus tôt, Potter. Le Seigneur des Ténèbres se demandait pourquoi tu n’étais pas tout de suite accouru quand il t’a montré dans tes rêves l’endroit où elle était cachée. Il pensait qu’une curiosité naturelle te pousserait à vouloir entendre la formulation exacte...
— Quelqu’un a fait une prophétie sur Voldemort et sur moi ? Et il m’a poussé à venir la chercher pour lui ? Pourquoi ne pouvait-il la prendre lui-même ?
— La prendre lui-même ? s’esclaffe Bellatrix. Le Seigneur des Ténèbres arrivant au ministère de la Magie alors qu’ils ont l’amabilité d’ignorer son retour ? Le Seigneur des Ténèbres se montrant à visage découvert devant les Aurors, alors qu’ils sont en train de perdre leur temps à rechercher mon cher cousin ?
— Et donc, il vous fait faire son sale boulot, c’est ça ? dit Harry qui me serre brièvement la main.
C’est maintenant.
— Un… je murmure aux autres.
— Comme lorsqu’il a envoyé Sturgis... commence Harry.
— Deux…
— … et Moroz pour essayer de la voler ?
— Très bien, Potter, bien raisonné… Mais le Seigneur des Ténèbres sait que tu es intell...
— Trois. Reducto !
Nos six sorts résonnent en même temps. Harry s’est baissé à temps pour que nous puissions attendre les étagères le plus proches. Tout explose et des silhouettes blanches apparaissent, créant un mur blanc. Pas le temps de voir le résultat plus longtemps, nous courrons tous dans la direction opposée aux Mangemorts. D’autres étagères tombent les unes sur les autres, créant un effet domino parfait pour nous faire gagner plus de temps.
J’entends un « Stupéfix », les voix des prophéties, des bruits de verre cassé… C’est impossible de savoir à l’avance si quelqu’un me suit. Un éclair verre frappe l’étagère à côté de moi, je plonge sur le côté, me retrouve face à une porte et l’ouvre pour tout de suite me réfugier dans cette pièce. J’espère qu’il y a une autre porte au bout qui me mènera à la pièce principale. C’est un putain de labyrinthe ici.
Cette pièce est un immense reflet. On dirait des miroirs, mais leur surface semble miroiter, comme s’ils étaient liquides, je n’ose pas les toucher. Le cœur battant, terrifiée à l’idée qu’on m’ait suivie ici, je tente du mieux que je peux d’avancer dans cette pièce sans heurter un mur.
— Petite Emilynn ?
Oh merde, c’est l’autre folle. Je me mets à quatre pattes et avance le plus vite possible. Je découvre de nouvelles surfaces lorsque je me heurte à l’une d’elles dans un bruit sourd.
« Cling ! »
Le miroir à côté de moi est brisé par un sort de Bellatrix. Donc c’est liquide en apparence comme de l’eau, mais se casse comme un miroir ? Putain de cauchemars.
Je continue d’avancer, le sol est couvert de bouts de verre, je retiens un cri de douleur quand je m’en plante dans la main. Derrière moi, j’entends des pas.
— Tu ne crois pas que tu es assez grande pour ne plus jouer à cache cache ? Je croyais que tu étais une saloperie de Gryffondor, montre moi que tu es courageuse et viens me…
Elle pousse un cri. Pourquoi ? Qu’est-ce qui s’est passé ?
Franchement, je m’en fous, j’avance le plus vite possible. Une porte ! Je me relève et l’ouvre.
C’est du vide. Non. C’est un monde à l’envers. Je la referme immédiatement. Quand je me retourne, un drôle de brouillard avance vers moi, me coupant la route vers la pièce des prophéties. Je ne pense pas que je devrais également le toucher. Je n’ai pas entendu Bellatrix depuis son cri. Peut-être est-elle partie. Peut-être est-elle inconsciente ou morte.
Merde.
Je vais continuer, traverser cette pièce, oui, voilà ce que je vais faire.
J’ai peur pour les autres, j’espère qu’ils ont réussi à s’en sortir, que personne n’est blessé ou pire… Je déteste avoir été obligée de me séparer d’eux.
Le brouillard est insidieux, il avance comme des tentacules, c’est difficile d’avancer vite sans se prendre les miroirs bizarres et en continuant de les éviter. Inévitablement, l’un des bouts du brouillard me touche au poignet. La douleur est vive, ma tête tourne et je ne peux pas retenir un cri de surprise. Des cloques recouvrent mon poignet, je dois avancer plus vite. Je me mets à courir et par miracle, une nouvelle porte apparaît sur la droite au bout d’une allée de miroirs. Je l’ouvre et tombe sur la salle noire aux multiples portes.
Il n’y a plus les croix d’Hermione. Est-ce que c’est la même salle ou un double destiné à me rendre folle ?
Je ne peux pas rester là à ne rien faire. Si je trouve la sortie, je vais chercher l’Ordre ou Dumbledore. Et sinon, je cherche les autres. J’en ouvre une au hasard et entre. C’est celle de l’arche, Harry est en bas alors que cinq Mangemorts lui font face.
Sur ma gauche une porte s’ouvre et d’autres Mangemorts entrent. Je me transforme immédiatement pour éviter leurs sorts et cours à l’opposé pour descendre les gradins et rejoindre Harry. Sous ma forme de louve, je suis bien plus rapide, et je me retransforme en humaine, sans qu’aucun sort ne m’atteigne.
— Je comprends mieux pourquoi il voulait perdre son temps avec toi, déclare Bellatrix. Petite Emilynn est une animagus. Ou une loup-garou. On ne sait pas. Mais c’est fort utile.
Harry est debout sur une pierre, la prophétie serrée contre lui, sa baguette tendue devant lui.
— Pars Emy.
J’ai moi aussi ma baguette devant moi.
— Pas sans toi.
— Oh, c’est mignon, ricane Bellatrix. Mais tu es aussi idiote que ta mère, prête à mourir pour lui. Lâche ta baguette et nous serrons cléments avec toi. En souvenir de ton héritage Black.
— Allez vous faire foutre, je réponds le corps tendu.
Ils sont nombreux, je les surveille un à un pour anticiper un mauvais coup.
Bellatrix rigole.
— Potter, c’est la fin du chemin, pour toi, dit Lucius. Maintenant, donne-moi cette prophétie, comme un gentil garçon.
— Laissez... Laissez les autres repartir libres et je vous la donnerai !
Nouveaux rires.
— Tu n’es pas en position de marchander, Potter. Vois-tu, nous sommes dix et vous êtes deux... Dumbledore ne t’aurait-il pas appris à compter ?
Un sort fuse vers moi, je hurle « Protego » et profite de la distraction pour sauter rejoindre Harry sur son caillou. Plusieurs autres choses se passent en même temps, Neville arrive et Bellatrix s’écrie :
— NE LES TUEZ PAS !
— Neville... non... retourne auprès de Ron…
— SDUBÉVIGZ !
Son visage est en sang, il ne peut pas prononcer de sort correctement. D’un coup de baguette, un Mangemort le maîtrise.
— C’est Londubat, n’est-ce pas ? dit Lucius. Ta grand-mère a l’habitude de perdre des membres de sa famille pour les besoins de notre cause... Ta mort ne représentera pas un grand choc pour elle.
— Londubat ?
En voyant le grand sourire de Bellatrix, mon coeur se serre. Putain, on ne peut par partir maintenant, pas avec Neville ensaucissonné, et Ron semble t-il ailleurs. Et les autres alors ?
— J’ai eu le plaisir de rencontrer tes parents, mon garçon.
— JE LE ZAIS BIEN !
Il se débat avec rage.
— Que quelqu’un le stupéfixe ! s’énerve un Mangemort.
— Oh, non, non, non. Voyons plutôt combien de temps peut tenir Londubat avant de s’effondrer comme ses parents... À moins que Potter préfère nous donner la prophétie ?
— Ne t’approche pas de lui ! je m’écris. Prends-moi à la place !
— Emy, non, fait Harry.
— DE LA DODDE ZURDOUT BAS ! DE LA DODDE ZURDOUT BAS, HARRY !
Je cours vers Neville, alors qu’elle lance un Doloris, mais Lucius me jette un sort qui me projette au loin. J’ai mal partout, je ne pense qu’à une chose : me relever le plus vite possible. Je loupe mon coup une première fois, m’effondrant lamentablement au sol à cause du choc. Les cris de Neville sont horribles.
« Stupéfix ! »
Mon sort heurte le Mangemort le plus proche et il s’effondre au sol, Lucius se tourne vers moi, prêt à me jeter lui aussi un sort, mais au même moment la porte s’ouvre en haut et cinq membres de l’Ordre entrent. Dont mon père et Sirius.
Une bataille est un moment confus. Tout se mélange, tout est flou, tout se passe en même temps. Je ressens mille fois plus les émotions, passant de la peur, à la joie, au soulagement, à la peur à nouveau.
Je laisse les membres de l’Ordre et les Mangemorts à leur bataille, je cours rejoindre Neville qui rampe au sol. Harry me rejoint en même temps.
— Tu n’es pas blessé ?
— Don, répond Neville alors que je l’aide à se relever.
— Et Ron ?
— Je grois gu’il va bien... Il ze baddait doujours aveg le zerveau guand je zuis bardi...
— Quel cerveau ?
Un sort explose à côté de nous avant que les garçons aient le temps de me répondre. Harry et moi, nous nous mettons de chaque côté de Neville pour l’aider à gravir les marches sauf qu’une personne attrape Harry en arrière. Je lâche Neville et fonce vers le Mangemort.
Je suis à court d’idées, je pense à la première chose qui me vient en tête et donne le plus fort coup de pied que je peux entre ses jambes. Il pousse un cri ridicule et s’effondre au sol.
Harry à bout de souffle me regarde avec un air surpris.
— Allons-y.
— Bien… Joué…
— Ouais, approuve Neville.
Je regarde autour de moi, les Mangemorts sont bien plus que les membres de l’Ordre. Ils vont forcément se faire dominer à un moment ou un autre.
— Harry, tu pars avec Neville, faites-sortir les autres. Je reste ici.
— Non, Emy, tu…
— Harry, Voldemort veut te tuer pour des raisons qui me dépassent. Tu pars d’ici maintenant !
— Tarentallegra !
Un sort heurte Neville qui se met à danser frénétiquement. Dolohov s’approche.
— Et maintenant, Potter…
— Protego !
— Accio proph...
Sirius surgit de nulle part et heurte Dolohov pour le projeter au loin. S’ensuit un duel de magie que je ne pensais pas possible. Ils ne parlent pas, c’est sortilège sur sortilège. Tout se passe très vite, c’est fascinant.
Je n’ai pas le temps de rester à regarder, j’ai pris ma décision, je vais les aider à combattre. Je cours vers mon père qui est en face de deux Mangemort, ils ne me voient pas arriver, j’en profite.
— Petrificus Totalus !
L’un d’eux tombe au sol violemment et mon père en profite pour prendre le dessus sur l’autre qui recule à chaque pas. Lui aussi ne parle pas quand il jette ses sorts, c’est un avantage indéniable.
— Emy, pars d’ici avec Harry et Neville ! me crie mon père.
Le ton dans sa voix ne me donne pas envie de discuter. Il m’a rarement ordonné quelque chose. S’il le fait, c’est que c’est grave. Alors j’obéis sans discuter. Harry est déjà en train d’aider Neville à se relever. Lucius s’apprête à se jeter sur eux.
— Non... Laissez-moi... Neville, attrape-la !
— Impedimenta !
Il est projeté en arrière vers Sirius et Bellatrix qui se battent sur le socle de pierre. Une main se pose sur mon épaule, je sursaute, prête à jeter un sort, mais c’est mon père.
— Rassemblez les autres et partez tous !
— O… Ok…
Harry passe un bras sous l’épaule de Neville et je me précipite pour le soutenir de l’autre côté. Il est encore en prise du sort de danse, les jambes bougent dans tous les sens, c’est difficile de le porter. Je suis en sueur à le soutenir sur les premières marches. On ne pourra pas faire tout l’escalier comme ça.
— Viens ! Essaye simplement de pousser avec tes jambes.
Harry est arrivé à la même conclusion. On ne va pas y arriver si Neville ne marche pas un peu. Je continue de mettre toute l’énergie que j’ai pour le soulever quand je sens que les deux garçons se sont arrêtés. Je me retourne pour voir un peu plus bas une silhouette d’un blanc nacré s’élever dans les airs. La prophétie est tombée et s’est cassée.
— Harry, je zuis désolé ! Je zuis vraibent davré, Harry, je de voulais bas...
— Ça n’a pas d’importance ! coupe Harry en me jetant un regard. Essaye simplement de te remettre debout et filons de...
— Dubbledore !
— Quoi ?
— Dumbledore ! je m’écrie.
Son arrivée change tout le cours du combat. Les Mangemorts sont plus dispersés, comme mués par une peur commune. Mon père se bat toujours en bas contre un Mangemort cagoulé, tout comme Kingsley. Dora est allongée au sol et je ne vois pas Maugrey. Et puis il y a Sirius et Bellatrix. Il se baisse pour éviter un sort et éclate de rire.
— Allons, tu peux faire mieux que ça !
Un autre sort le frappe en pleine poitrine.
Je ne soutiens plus Neville.
Le rire de Sirius est figé sur ses lèvres alors qu’il tombe en arrière si lentement, mais à la fois bien trop rapidement. Je sens mes jambes me lâcher quand je vois son corps traverser le voile déchiré suspendu à l’arcade.
Je n’oublierai jamais son regard.
Ni le cri de joie de Bellatrix.
Ni le cri d’Harry.
— SIRIUS !
Je ne connais pas les pouvoirs de cette arche. Mais je sais que Sirius est mort.
Sirius est mort.
Je peine à reprendre mon souffle, je m’agrippe à l’une des pierres à côté de moi pour ne pas tomber.
Et Harry qui hurle.
— SIRIUS !
Il court en bas, mais mon père le retient. Qu’espère t-il ? Faire remonter le temps ? Non. Les morts sont morts. La magie n’y peut rien.
— Eby… Ze suis déso…
Je n’arrive pas à écouter, je vois juste Bellatrix qui est toujours debout face à l’arche. Neville continue de me parler, mais ce n’est que du bruit, je ne comprends rien. J’inspire, mon souffle se bloque dans ma gorge et je sens que je commence à suffoquer.
Sirius est mort.
Je me mets à tousser, courbée en deux, je crispe ma main sur mon cœur. L’autre est toujours posée sur la pierre, son contact froid, c’est la réalité.
Sirius est mort.
Je n’arrive pas à pleurer, non.
— SIRIUS ! SIRIUS !
Je relève la tête. Mon père retient toujours Harry. Kingsley se bat contre Bellatrix. Maugrey est aux côtés de Dora. La plupart des Mangemorts ont pris la fuite.
— IL – N’EST – PAS – MORT ! SIRIUS !
Je ferme les yeux alors que mon souffle est court et saccadé. Je dois me relever. On doit toujours partir d’ici. Je réunis toutes les forces que je peux pour pousser sur mes jambes et me tenir debout. J’entends un cri, Bellatrix court dans les gradins vers la sortie. Dumbledore lui jette un sort qu’elle évite à la dernière seconde. Elle va s’échapper. Non, elle ne peut pas faire ça.
— Harry... Non ! crie mon père.
Je me transforme et traverse la pièce en longeant les pierres, je croise Harry qui s’est aussi jeté à sa poursuite.
— Emy !
Nous sommes dans la salle aux cerveaux, Bellatrix jette un sort et le liquide du réservoir explose. Je redeviens humaine pour éviter un cerveau et plonge au sol. La substance verte est visqueuse, mais rien ne se produit quand je la touche à main nue. Je me remets sur pieds et cours derrière Harry qui la suit vers la salle noire. La porte se referme derrière nous et tout se met à tourner.
— Fuck ! je m’écris.
— Où est la sortie ?! Par où sort-on d’ici ?
C’est comme si la pièce l’avait entendu et lui répondait en ouvrant la bonne porte. Je me précipite la première et appuie frénétiquement sur le bouton d’appel de l’ascenseur comme quelques minutes (heures ?) auparavant.
Des portes s’ouvrent, Harry se jette sur le bouton « Atrium ». On ne parle pas, ne nous regardons pas, on reprend notre souffle, la main serrée sur notre baguette, prêts à bondir pour la rattraper avant qu’elle s’échappe.
Elle est presque à la cabine téléphonique quand les portes s’ouvrent. Les bruits de nos pas l’alertent, elle nous jette un sort, nous forçant à nous réfugier derrière la fontaine de la Fraternité magique. Le sort nous rate et j’entends qu’elle a cessé de courir.
— Tu as changé d’avis petite Emilynn ? Tu veux nous rejoindre ?
— Jamais ! je crie. Allez au diable !
— Allez, allez, sortez de là ! Sinon, à quoi ça sert de me courir après ? Je croyais que vous étiez là pour venger mon cher cousin !
Harry se lève et jette un sort.
— Endoloris !
Je me lève à mon tour pour la voir tomber au sol, mais elle ne crie pas de douleur.
— C’est la première fois que tu lances un Sortilège Impardonnable, n’est-ce pas, mon garçon ? Il faut vraiment vouloir la souffrance de l’autre, Potter ! Et y prendre plaisir. La juste et sainte colère n’aura pas beaucoup d’effet sur moi. Demande à Emilynn, elle connaît la douleur, n’est-ce pas ? Laisse-moi te montrer comment faire, je vais te donner une leçon.
Elle jette un sort et on se baisse pour l’éviter. Une fois que je vois le sort s’écraser au loin, je me relève, baguette au poing.
— Stupéfix !
— Protego !
Elle est plus rapide que nous. Je me cache à nouveau derrière la fontaine.
— Potter, je vais te laisser une chance ! Donne-moi la prophétie – fais-la rouler vers moi – et je t’accorderai peut-être la vie sauve !
— Dans ce cas, vous allez devoir me tuer parce que la prophétie n’existe plus !
À quatre pattes, je commence à faire le tour de la fontaine pour la prendre par surprise.
— Quoi ? Qu’est-ce que tu veux dire ?
Elle a peur.
— Elle est cassée ! je crie. C’est pourtant simple à comprendre.
— MENTEURS !
J’entends Harry rigoler, je m’apprête à me redresser pour jeter un sort à Bellatrix, mais un sort me touche en plein dans le dos.
La douleur me ramène immédiatement des années en arrière. Je sais que j’ai la bouche ouverte, que je crie, mais je n’entends rien. Je veux juste fuir cette douleur. Partir.
J’ai mal putain, j’ai si mal.
Stop !
La pression s’arrête et je peux à nouveau respirer. Je me penche sur le côté, prise de soubresauts, j’ai envie de vomir. Je crache juste un peu de bille. Où est ma baguette ? J’ai dû la lâcher, elle…
— Vraiment, Black ?
Je relève les yeux vers cette grande silhouette mince capuchonnée. Il est impressionnant. Impossible de ne pas avoir peur en le voyant.
— Je m’appelle Lupin.
Réponse idiote, insensée, inutile. Pleine d’arrogance. Mais c’est tout ce que j’ai alors que le plus grand mage noir de tous les temps se tient devant moi.
Il tend sa baguette et un sort fuse vers moi. Si rapide que je n’ai pas le temps de rouler sur le côté pour l’éviter. Il atteint mon genou et je hurle sous le coup de la douleur.
J’entends Harry crier mon nom, Voldemort et Bellatrix parler, mais je n’arrive pas à me concentrer pour écouter. Je suis paralysée par la douleur, toute ma jambe est douloureuse. Je finis par risquer un regard, je vois en premier le sang, une mare de sang s’étaler autour de la zone de mon genou. Le tissu noir de mon pantalon me cache les dégâts, mais je sais déjà que c’est mauvais.
Je perds beaucoup de sang et je ne peux pas bouger ma jambe, faites le calcul, il n’est pas bon.
Quand le sorcier de la statue (il est vivant ?) passe devant moi pour foncer sur Voldemort, je me rends compte que j’ai perdu la notion du temps. Et que je suis maintenant au milieu d’un nouveau champ de bataille.
Je dois bouger, et vite.
— Emy. Viens, Emy, tu peux bouger ?
Harry se penche vers moi et pâlit en voyant le sang.
— Non.
— Désolé, murmure t-il.
Pourquoi désolé ?
Puis il me traîne à l’abri derrière la statue et je comprends ses excuses. En me traînant, ma jambe bouge et la douleur est insupportable. Je me mords les lèvres au sang pour ne pas crier. Une traînée de sang me suit. Merde, merde, merde.
— Harry… je dis quand il me place contre le bassin, de l’autre côté du combat.
— Ne parle pas, ça va aller, Dumbledore est là…
— Je vais perdre connaissance… dis-je en luttant contre les taches noires et le monde en noir et blanc.
Il y a aussi des paillettes. Putain. Je cligne des yeux et fixe ma jambe.
— Fais un garrot… Je vais me vider de mon sang.
— Ok… Ok… Putain…
Il hoche la tête et dénoue sa cravate. Quand il me soulève la jambe, je pousse un grognement.
— Désolé, désolé…
Avant de serrer, il me regarde droit dans les yeux.
— Tu restes avec moi.
Je mords la manche de mon pull quand il referme le nœud. Le cri est étouffé, mais les étoiles reviennent.
— Emy, reste avec moi.
Du bruit, des lumières retentissent autour de nous. Il y a même le sorcier de la statue qui nous protège de son corps. Je n’arrive pas à me concentrer, comprendre pourquoi il est là, j’ai mal, j’ai si mal.
— Emy, ne ferme pas les yeux, me dit Harry avec une voix implorante.
— J’ai froid.
C’est vrai, j’ai très froid. Et il y a beaucoup trop de paillettes autour de moi.
— Putain, ne me fais pas de blagues, reste avec moi, s’il te plait.
Il se redresse pour regarder par-dessus la fontaine. Mon cerveau divague, je ne parviens pas à réfléchir. Et c’est quoi tout ce bruit ?
— Attention !
Je ferme les yeux, juste un instant, j’ai trop froid et la fatigue aussi…
— Emy, raconte moi ce que tu as répondu à la question quatre.
Il me secoue, je rouvre les yeux.
— À la question quatre d’Histoire de la magie, tu te rappelles ?
Bien sûr que oui, c’était tout à l’heure. Ou hier ? Je ne sais plus.
— Oui, oui…
— C’était quoi ?
Je me concentre, visualisant la feuille devant moi. À chaque fois que mes yeux se ferment, il me secoue un peu. J’arrive finalement à m’en rappeler.
— À votre avis… La législation sur les baguettes… Magiques… A-t-elle favorisé les émeutes… De gobelins au… Au… XVIIIe siècle ou… Au contraire… A-t-elle permis… De mieux les contrôler ?
— Oui, voilà, cette question. Tu as répondu quoi ?
Qu’est-ce que j’ai répondu déjà ?
— Je… J’ai dit que oui.
— Et l’argumentaire ? demande t-il en regardant au loin le combat qui se mène.
Il se tourne à nouveau vers moi, alors que le monde devient de plus en plus noir.
— Emy ? Tu as mis quoi à l’argumentaire ?
Je ferme les yeux, incapable de répondre.
— Emy ?
Il me secoue, j’ai mal, j’aimerais lui dire de me laisser tranquille, mais…