Juillet 1997
La vie était douce. Il ne voulait pas se sentir mal d’être aussi heureux. Il prenait chaque miette de joie, tout ce qu’il pouvait.
Le déménagement s’était passé rapidement. Emy dormait ici maintenant quand elle n’était pas chez George ou au Terrier. Elle et Dora s’entendaient très bien, c’était si simple. Elles passaient même des moments sans lui, ce qui ne pouvait pas lui faire plus plaisir.
— Tu as ta baguette ? demanda Dora avant une après-midi shopping.
— Toujours dans ma poche arrière, dit Emy, ce qui les fit toutes les deux rire.
Il ne savait pas d’où venait cette blague, mais qu’importe, elles étaient heureuses et en bonne santé, c’était tout ce qu’il demandait.
Le mariage de Bill et Fleur approchait, Emy l’avait prévenu qu’ils risquaient de partir juste après. Elle, comme Harry, serait majeure, ils ne voulaient pas attendre plus longtemps.
Avec Dora, ils flirtaient beaucoup autour du mariage, moins des enfants, car ce n’était clairement pas pour maintenant. Mais souvent, dans la journée, elle disait qu’elle trouvait sa main vide sans bague. Puis ils s’embrassaient, les vêtements commençaient à tomber et Remus dirait alors :
— Pas avant le mariage, désolé…
Ils rigoleraient beaucoup et finiraient par faire l’amour.
Pour l’instant, elle en rigolait, mais il avait peur qu'elle commence à s’inquiéter. En réalité, s’il n’avait pas fait de demande à proprement parler, c’était parce qu’il n’avait pas encore parlé à Andromeda et Ted. Et il se sentait obligé de le faire, de leur dire la nature de ses sentiments à l’égard de leur fille, puis - et c’était petit-être un peu vieux jeu - demander s’ils acceptaient qu’il épouse Dora.
Il devait aussi en parler à Emy. Elle courait un peu partout cet été, mais elle faisait aussi attention à rester à la maison, avec lui et Dora. Maintenant qu’Hermione était au Terrier, les préparatifs de leur départ étaient plus compliqués avec Molly qui leur posait des questions tout le temps.
Cette après-midi, ils jouaient aux échecs. Enfin, elle le massacrait et lui stressait de sa réaction. Une fois qu’elle lui déclara qu’elle était contente pour lui, il se dit que c’était un peu idiot d’avoir autant stressé.
Maintenant les parents.
Le lendemain, Dora et lui allèrent chez les Tonks pour le déjeuner. Elle leur avait dit qu’ils sortaient ensemble, et d’après elle, tout allait bien pour eux. Il n’avait pas relevé, mais il connaissait suffisamment les Black pour savoir qu’il n’échapperait pas à une discussion avec Andromeda. Ted, quant à lui, il ne savait pas. Il le connaissait peu.
— Ça va aller, le rassura t-elle.
— Ouais… J’attends la conversation entre quatre yeux au moment où tu t'éclipses aux toilettes.
Elle leva les yeux au ciel en enfilant sa veste.
— Arrête de stresser, ils t’aimaient bien avant, ça n’a pas changé.
Il n’avait pas envie d’aborder ce sujet maintenant avec elle. Parce que si, quelque chose avait changé : maintenant le loup-garou sympa, sans emploi, partageait la vie de leur fille. Sans parler de la différence d’âge…
Le début du déjeuner se passa très bien. Ils parlèrent de plein de choses, outre la guerre, il pu parler football avec Ted, même si ça faisait un moment qu’il n’avait pas suivi l’actualité sport moldue. Puis Andromeda se leva pour ramener les plats.
— Je vais vous aider, dit-il avec politesse.
Dora avait prévu de faire de même, mais sa mère lui fit un grand sourire.
— Reste assise ma chérie, on peut s’en charger avec Remus.
Il déglutit, c’était le moment. Il se sentait comme un adolescent, c’était ridicule, elle n’allait pas le foudroyer d’un coup de baguette. Si ?
— Tu peux m’aider à couvrir ce plat, on va le ranger, et je vais sortir les coupelles pour le dessert.
Il s’exécuta, désireux de faire quelque chose pour ne pas trop stresser. Le silence entre eux était pesant, il ne comptait pas le rompre. Pour dire quoi exactement ? Il ne savait pas. Avec Ted, il se sentait plus à l'aise pour partager ses sentiments. Avec Andromeda, il voyait le clan Black même après tout ce temps, c’était impossible pour lui de ne pas le faire.
— Elle semble heureuse, dit-elle enfin.
— Vraiment ? demanda-t-il.
C’était sorti du cœur. Une question honnête et franche révélatrice d’une grande inquiétude. Il espérait vraiment que Dora était heureuse, il ne souhaitait que ça, qu’elle soit heureuse, elle le méritait tellement.
— Oui, ajouta Andromeda avec un sourire. Ce qui est un bon point, mais tu te doutes que j’ai des questions.
— Je vous écoute.
Il se blinda, il s’attendait à soit le sujet loup-garou, soit l’âge, soit Lyra. Lyra définitivement.
— Qu’en est-il de Lyra ?
Gagné.
— Je ne cesserai pas de l’aimer. Mais ça fait plus de quinze ans maintenant.
Elle soupira en essayant une tache invisible sur son comptoir.
— Oui, quinze ans… Je vous revois encore tous les deux au marché, puis les jumeaux quand vous étiez dans l’Ordre…
Il ne dit rien, il ne voulait pas trop revenir dans le passé.
— Comment est Emy ?
Il ne savait pas par où commencer. Il y avait tellement de choses en même temps.
— Pour Dora et moi, elle est ok, elle est même contente pour nous. Elle s’en doutait depuis un moment.
— Elle est perspicace.
— Diablement intelligente, oui marmonna t-il ce qui la fit rire.
La gêne était un peu partie, puis le silence s’installa à nouveau. Il sentait qu’elle n’était plus si perturbée, mais elle n’avait pas donné sa bénédiction pour autant.
— Tu sais ce que je vais te dire ?
Elle voulait la jouer super honnête ? Elle n’allait pas être déçue.
— Probablement un « je vais te maudire sur cinquante générations si tu fais du mal à ma fille », répondit-il. Juste moi, ce serait bien, Emy n’a rien à voir avec tout ça.
Ça la fit rire.
— Quelque chose comme ça, oui. Je reste une Black d’une certaine façon.
Il ne risquait pas de l’oublier.
— On amène les desserts ?
La première étape était passée, incroyable, il ne pensait s’en sortir aussi bien, ne restait plus que le père. Il n’avait pas eu à faire tout ça avec Lyra, un souvenir remonta à la surface, Lily, jeune et nouvelle dans le monde des sorciers qui stressait pour un repas chez la grande famille de Sang-Pur Potter.
Maintenant, il comprenait.
Le dessert, puis le thé, il attendait le moment où Ted allait trouver un moment pour être seul. Ce fut Andromeda qui lui permit de le faire, elle invita Dora à l’aider à finir de ranger la cuisine, laissant les deux hommes dans le salon. Dora lui fit un clin d'œil d’encouragements qui lui réchauffa le cœur.
— Je crois que c’était un coup monté, déclara Ted en allant se chercher une bouteille de whisky moldu. Je te serre un verre ?
Il décida d’accepter, la Bête était tranquille pour aujourd’hui.
— Bon, fit Ted en vidant son verre. Je ne vais pas y aller par quatre chemins, tu as toi-même une fille, tu dois te douter de ce que je ressens quand la mienne me présente l’homme avec qui elle veut passer sa vie.
Il repensa à George. C’était un chouette gamin. Même quand il n’écoutait pas un mot en classe à Poudlard. Lui et Fred étaient assez terribles pour inventer des trucs délirants. Et c’était une bonne personne pour Emy, aucun doute là dessus. Remus but une gorgée de l’alcool.
— J’imagine que vous attendiez quelqu’un d’autre…
— Peut-être bien oui. Mais je veux surtout son bonheur. Et avec cette foutue guerre, je dois dire que je l’ai rarement vu aussi heureuse. Elle rayonne, c’est tout ce que je veux pour elle.
— J’ai longtemps hésité… Je suis un loup-garou, le monde sorcier est difficile pour les gens comme moi.
— Je sais, fit Ted. Je suis un né moldu qui a eu la bonne idée de tomber amoureux d’une Black. Il y avait une période, juste après qu’elle ait décidé de ne pas rentrer, on était terrorisé à l’idée qu’il la retrouve, me tue et décide de la marier de force à l’un de ces fous furieux.
Ils échangèrent un rire.
— On est d’accord sur ce point, sourit Remus.
— Elle était promise à Barty Croupton Junior, un mangemort qui a tué son propre père. Ça en dit long sur le bonhomme.
Dora avait dû lui raconter.
— Et Lyra ?
— Rabbastan Lestrange.
— Putain d’ordure.
Remus se détendit. Ted n’allait pas lui dire de ne plus s’approcher de sa fille, il en était sûr maintenant.
— Ted… J’aimerais épouser Dora…
Ted prit la bouteille et leur resservit chacun un verre.
— Il est bon, non ? Le whisky sorcier est bien trop brûlant, ta mère était une moldue, n’est-ce pas ?
— Oui, approuva t-il après une gorgée. Et honnêtement, je dois dire que je préfère la bière moldue.
Ça fit rire Ted.
— Ne le dis pas devant ma femme, elle désapprouverait.
Il tendit sa main à Remus qui s’en saisit.
— Bienvenue dans la famille.
•••
Il invita Dora au restaurant le lendemain, sortant le grand jeu : bouquet de fleurs, balade romantique sur les quais de la Tamise, là où il s’étaient embrassés pour la première fois, puis genoux à terre et bague dans un petit écrin.
— Dora, acceptes-tu de m’épouser et de faire de moi le plus heureux des hommes ?
Les passants, mélange de londoniens et touristes, s’arrêtèrent pour les regarder.
— Oui ! s'exclama-t-elle en se jetant à son cou.
Il l’embrassa sous les applaudissements de la foule. Puis elle enfila la bague et la montra au public qui les félicita un peu plus.
C’était un drôle de moment plein de joie partagée avec des inconnus, quelque chose d’absolument magique.
Ils rentrèrent, firent l’amour, puis décidèrent de ne pas attendre plus longtemps.
— On peut le faire ce week-end dans ce village charmant à côté de chez mes parents, dit-elle, ses cheveux roses entourant son beau visage.
— Ça me va, dit-il en l’embrassant à nouveau.
Ils organisèrent quelque chose de simple. Ils devaient avoir deux témoins, Remus choisit Emy, Dora demanda à sa meilleure amie, collègue et duo chez les aurors, Mina.
Dora portait une petite robe blanche et avait les cheveux tressés dans une petite couronne où des fleurs étaient piquées. C’était magnifique, elle était magnifique, il avait l’impression de ne jamais pouvoir perdre son sourire en la voyant le rejoindre en courant.
En costume brun, alors que Dora lui tenait la main, il se sentait prêt à commencer une nouvelle vie.
— Je vous déclare mari et femme, unis par les liens du mariage.
Il embrassa la mariée.