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News

132ème Nuit d'HPF


Chers membres d'HPF,


Nous vous informons que la 132e édition des Nuits d'HPF se déroulera le samedi 10 juin à partir de 20h. N'hésitez pas à venir découvrir les Nuits d'écriture en vous inscrivant ici !


Pour en savoir plus sur les Nuits, on vous explique tout sur ce topic.


A très bientôt !



De L'équipe des Nuits le 29/05/2023 11:41



Bonjour à tous et à toutes,

Les modératrices d'HPFanfiction vous informent que la liste de personnages a été étoffée de deux noms :

- Isla Black

- Personnage mystère, si vous voulez maintenir l'identité de votre personnage secrète jusqu'à la fin !

 

 


De L'équipe de modération d'HPFanfiction le 17/05/2023 17:11


131ème Nuit d'écriture


Chers membres d'HPF,


Nous vous informons que la 131e édition des Nuits d'HPF se déroulera le Vendredi 19 mai à partir de 20h. N'hésitez pas à venir découvrir les nuits et vous inscrire !


Pour connaître les modalités de participation, rendez-vous sur ce topic.


A très bientôt !



De L'équipe des Nuits le 02/05/2023 19:01


Sélections du mois


Félicitations à AlbusDumbledore, Amnesie et Samantha Black qui remportent la Sélection CrossOver !

Pour le mois de avril, venez lire la Sélection Concours HPF ! Vous pouvez découvrir onze histoires courtes, écrites dans le cadre des concours du forum, et voter jusqu'au 30 avril ici.

Qui veut lire sur Susan Bones, sur Gwendoline la Fantasque, sur Charlie Weasley, sur la Tante Muriel... ? Qui veut lire sur tous les Personnages secondaires et tertiaires de la saga ? La sélection du mois de mai ! Vous avez jusqu'au 30 avril pour proposer des textes (vos deux fanfictions favorites, ou votre favorite si elle fait plus de 5000 mots) sur ce thème. Pour ce faire, rendez-vous ici ou bien répondez directement à cette news.


De L'équipe des Podiums le 11/04/2023 11:47


Concours : Univers Alternatifs en folie !


Comment imaginez-vous Harry Potter dans l'univers des pirates ? ou dans un jeu de téléréalité ?

Fleur d'épine vous propose un nouveau concours "Univers alternatifs en folie" afin de répondre à ces questions. Vous aurez le choix entre plusieurs catégories d'univers alternatifs : Mafia AU, Pirates AU, Singer AU, University AU, TV Réalité AU et Fandom AU. Vous pourrez ensuite proposer un (ou plusieurs) texte(s) jusqu'au dimanche 26 juin à 23h59 . N'hésitez pas aller sur le topic du forum pour toutes informations supplémentaires ici.
A très bientôt !

De le 28/03/2023 18:47


Sélections du mois


Félicitations à Labige, Polock et Tiiki qui remportent la Sélection Hermione Granger !

Pour le mois de mars, venez lire la Sélection CrossOver ! Vous pouvez découvrir ces huit histoires et voter jusqu'au 31 mars ici.

Vous ne jurez que par HPF pour lire et écrire ? Venez en avril vous régaler avec une sélection de productions hpfiennes issues de nos Concours ! Vous avez jusqu'au 31 mars pour proposer des textes (vos deux fanfictions favorites, ou votre favorite si elle fait plus de 5000 mots) sur ce thème. Pour ce faire, rendez-vous ici ou bien répondez directement à cette news.


De L'équipe des Podiums le 14/03/2023 18:30


Dans l'Ombre de La Mémoire par CarolynEyes

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Imprimante
Table des matières

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Note de chapitre:

Bien le bonjour à toi jeune (ou moins jeune) sorcier, sorcière, cracmol ou moldu qui a eu la merveilleuse idée de cliquer sur cette histoire.

Cette fanfiction est un One Shot, elle est donc terminée et il n'est pas prévu qu'elle ait d'autres chapitres. Les événements de cinquième année se sont bel et bien déroulés et je n'ai pas changé la trame du jeu.

J'ai pris énormément de plaisir à écrire cette histoire qui m'a empêché à de nombreuses reprises de fermer les yeux la nuit et j'espère que vous l'apprécierez aussi.

Sur ce, je vous souhaite une excellente lecture.

 


 

 

Dans l’Ombre de la Mémoire

 

 

Ominis Gaunt ne savait pas exactement à quel moment la dynamique qui rythmait son amitié avec son ami d'enfance Sebastian et Jane, arrivée à Poudlard directement en cinquième année deux ans auparavant, avait commencé à changer. Tout ce qu'il savait c'était que depuis quelques mois ses séances de révisions, généralement accompagnées de ses deux amis, brillaient de par leur absence.

Mais ce n'était pas la seule chose qui avait changé, il arrivait à Sebastian de revenir à leur dortoir à des heures indues plusieurs soirs par semaine. Rien d'inhabituel en soi de la part de Sebastian, c'était plutôt les raisons qui le laissaient souvent perplexe. Une sombre histoire de paris avec Weasley, une manche de joute magique, une escapade à Pré-au-Lard... et dans tous ces cas de figure, tout s'improvisait de manière à ne jamais pouvoir le prévenir en amont de son absence. Mais le plus curieux était bien que Sebastian n'était pas le seul à disparaitre de la salle commune. Jane aussi. Au début, il pensait qu'elle passait quelques soirs dans son dortoir et même s'il avait voulu la voir, il n'aurait même pas pu aller la chercher (avec les marches enchantées, il n'y gagnerait qu'un tour de toboggan). Pourtant, jusqu'à maintenant, ils avaient toujours été inséparables. Une amitié cristallisée par le lot d'aventures et de drames qui avait parsemé leur cinquième année. Cependant, les semaines défilaient et il fut contraint d'admettre que ces disparitions soudaines les concernaient bel et bien tous les deux.

Ce matin-là, Ominis s'était levé en ayant la surprise de constater que le lit à côté du sien était occupé, ce qui n'avait pas été le cas avant qu'il ne se laisse emporter par le sommeil. L'heure du petit déjeuner approchait et après avoir fait sa toilette et enfilé son uniforme, il entreprit de réveiller son ami. Ominis entendait à la respiration de Sebastian qu'il était profondément endormi. Si l'éventualité de le réveiller gentiment lui effleura brièvement l'esprit, elle fut balayée par un sentiment d'amertume qui ne faisait que s'intensifier ces derniers temps. "Quel prétexte allait-il encore trouver pour justifier son absence d'hier soir ?". Il écarta les rideaux du lit à baldaquin de son ami, saisit l'oreiller et le tira d'un coup sec. Le résultat ne se fit pas attendre. Sebastian émit une longue plainte ensommeillée qui, contrairement à ce qu'il pensait, ne calma en rien sa contrariété.

- Debout, c'est l'heure du petit déjeuner.

Il n'obtint pour seule réponse qu'un long bâillement sonore. Cette situation se serait déroulée quelques semaines auparavant, il se serait sûrement amusé de son état, mais ce n'était plus le cas.

- Je t'attends dans la salle commune, dépêche-toi, j'ai faim.

Il entendit un vague grognement qu'il interpréta comme une réponse positive et quelques minutes plus tard, ils sortaient tous les deux de la salle commune de Serpentard en direction de la grande Salle.

- Tu comptes me dire où tu étais encore hier soir ? demanda Ominis d'un ton froid qu'il n'arrivait pas à contrôler.

La réponse de Sebastian ne se fit pas attendre.

- J'ai traîné dans la salle sur demande après le dîner et je n'ai pas vu le temps passer. Je suis tombé sur un labyrinthe de vieilleries et d'antiquités qui semblent avoir été amoncelées là au fil des ans depuis la création de l'école. J'ai bien cru que je n'en sortirai jamais ! J'ai trouvé le journal intime d'un professeur de potions du XVᵉ siècle. J'espérais y trouver des choses intéressantes, mais il ne faisait qu'écrire des poèmes douteux à la gloire de Pénélope, l'infirmière de l'école qui ne s'intéressait visiblement pas du tout à lui...

Il avait la voix enrouée par un évident manque de sommeil et il l'entendait régulièrement se frotter les yeux. Pourtant, le ressentiment d'Ominis ne diminuait pas. Il passa le reste du trajet vers la Grande Salle à réfléchir à la manière d'aborder le sujet qui le taraudait tant avec ses amis. Il avait la nette impression d'être délaissé et il ressentait le besoin de leur en parler. Encore faudrait-il qu'ils réussissent à se voir tous les trois en dehors des cours. Ce qui était devenu très compliqué. Ils atteignirent la grande salle et s'installèrent à la table des Serpentard. En dépit de sa cécité, Ominis n'avait pas besoin de Sebastian pour savoir exactement où s'installer. Il n'avait pas besoin de voir où était installée Jane, il le ressentait. De la même manière qu'il n'avait besoin de personne pour savoir où se trouvait son meilleur ami d'enfance quand il se trouvait dans une pièce bondée. Sa magie avait remplacé ses yeux, il ne voyait pas, mais il avait appris à ressentir les subtiles variations de flux magiques chez les individus qu'il côtoyait quotidiennement.

Il prit place à côté de Jane qui, comme à son habitude, lui tendit une tasse de thé fumant et une assiette de toast. Jane avait toujours été serviable avec lui, il devait bien avouer que cela l'avait un peu dérangé au début. Il craignait qu'elle agisse ainsi par pitié ou inquiétude à l'idée que son infirmité l'empêche de se débrouiller seul. Cependant, leurs deux ans d'amitié lui avaient prouvé le contraire en de maintes occasions. Elle appréciait juste lui préparer son petit déjeuner, elle prenait plaisir à faire plaisir à ses proches. La gentillesse était une qualité qu'Ominis appréciait grandement chez Jane. Il se demandait souvent ce qui avait incité le Choixpeau à l'envoyer dans sa maison. Il n'avait jamais décelé chez elle une grande ambition et elle était trop honnête pour arriver à ses fins par la ruse. Ominis devait en revanche reconnaitre qu'elle était dotée d'une grande ingéniosité et que quand elle voulait quelque chose, elle se donnait les moyens de l'obtenir. Il restait tout de même persuadé qu'elle aurait été tout à fait à sa place à Poufsouffle. L'imaginer dans une autre maison que la sienne faisait toujours naître en lui des sentiments contradictoires. Il avait toujours souhaité le meilleur à ses amis et elle se serait sûrement sentie plus à son aise entourée de personnes partageant sa bienveillance. D'un autre côté, envisager l'éventualité d'être privé de sa compagnie réveillait systématiquement les protestations d'un animal au creux de son ventre qui ne se calmait qu'une fois qu'il pensait à autre chose. De toute façon, les choses étaient telles qu'elles étaient et rien, pas même les dérives de son imagination, ne pouvait remettre en question la présence de Jane dans son cercle d'amis.

Le ton de sa voix quand elle le salua lui rappela grandement celui de Sebastian. Elle aussi ne semblait pas avoir beaucoup dormi. Elle n'engagea pas la conversation, perdue dans la contemplation de son bol de café. Il espérait qu'elle le ferait. Qu'elle lui dirait d'elle-même où elle avait passé la soirée, mais pour la deuxième fois aujourd'hui, il allait devoir leur tirer les vers du nez.

- Je t'ai cherché dans la salle commune hier soir, dit-il.

Il y eut quelques secondes de battement. L'espace d'un instant, il se demanda si elle ne s'était pas réellement endormie devant son petit déjeuner puis il la sentit se tourner vers lui.

- Je ne me sentais pas très bien, commença-t-elle d'une voix lente. Je suis allée me coucher directement après le dîner.

Chaque mot paraissait lui coûter un effort considérable. Elle luttait visiblement contre le sommeil.

- Et tu vas mieux ? demanda-t-il sans réussir à masquer son inquiétude.

- Oui, mais je n'ai presque pas dormi, je suis épuisée...

- Tu es passée à l'infirmerie ?

- Je... Je savais que ça passerait tout seul.

Jane avait visiblement passé une nuit épouvantable et il n'avait pensé qu'à lui. Il se sentit soudainement honteux et la rancœur qui s'accumulait dans sa poitrine ses derniers temps se dissipa comme on dégonfle un ballon de baudruche. Le reste de la journée se passa agréablement. Jane et Sebastian insistèrent pour sortir dans le parc malgré les températures glaciales de l'hiver pour profiter d'une après-midi ensoleillée, fait relativement rare en cette période de l'année. Ominis n'aimait pas l'hiver. Il n'aimait pas le froid ni la sensation d'humidité qui imprégnait ses chaussures quand il marchait dans la neige. Il ne pouvait même pas profiter du spectacle soi-disant extraordinaire du manteau de neige qui recouvrait le château et qui le faisait scintiller dès qu'un rayon de soleil perçait les nuages. Selon lui, la neige n'avait d'attrayant que son aspect esthétique, le reste n'étant, en toute objectivité, que des inconvénients. Après le repas, ils s'installèrent dans les confortables sofas de leur salle commune et profitèrent du réconfort d'un bon feu de cheminée.

- Je crois que le plus drôle était le moment où il comparait ses cheveux à une fourrure de Boursouf et ses yeux à ceux d'un Éruptif ! rigola Sebastian qui reparlait des poèmes qu'il avait trouvés dans le journal intime.

Il tendit le bras vers le plafond en fixant un point invisible, son autre main sur sa poitrine et reprit d'une voix théâtrale.

- Pénélope, Ô Pénélope, tes yeux d'Éruptif me transpercent le cœur comme les serres d'un Hippogriffe !

- S'il lui a déjà lu un de ses poèmes, je comprends pourquoi elle ne s'est jamais intéressée à lui, constata Ominis en souriant.

Sebastian pouffa de rire.

- S'il vous plait, si un jour je deviens comme ça, enfermez-moi !

- J'imagine que ce que tu entends par "comme ça", c'est amoureux ? demanda Jane d'une voix acide.

- Dégoulinant de mièvrerie et incapable de penser à autre chose, oui.

Elle referma le livre qu'elle feuilletait d'un geste sec.

- Je pense que tu n'aurais jamais dû lire ce journal. Et encore moins te moquer de ce qu'il a pu ressentir.

Ce n'est qu'à cet instant qu'Ominis réalisa qu'elle n'avait pas pris part une seule fois à la conversation.

- Quel mal y a-t-il à penser à la personne qu'on aime ? Pas tout le monde n'a la chance de s'appeler Sebastian Pallow et de faire craquer toutes les filles de l'école avec quelques traits d'humour et un sourire charmeur. Il était amoureux, contrairement à ce que tu sembles penser, ça ne se contrôle pas !

Elle se leva brusquement du canapé et s'éloigna sans ajouter un mot. Ominis ne comprenait pas la raison de la colère de son amie. Certes, ce n'était peut-être pas la conversation la plus mature qu'ils aient pu avoir, mais sa réaction lui paraissait vraiment disproportionnée. Elle aurait très bien pu leur dire d'arrêter sans avoir besoin de s'énerver. Il entendit Sebastian pousser un long soupir et avant qu'il n'ait eu le temps de dire quoi que ce soit, il sentit les ressorts du canapé remuer une nouvelle fois.

- Jane ! Attends !

Les bruits de pas de Sebastian se mêlèrent au brouhaha de la salle commune et encore une fois, il se retrouva seul. Il mit un moment à analyser ce qu'il venait de se passer. Jane s'était-elle vraiment énervée parce qu'ils se moquaient des poèmes écrits par un professeur trois siècles auparavant ? Elle a parlé de l'attitude désinvolte de Sebastian à gérer sa vie sentimentale. Le désordre de sa vie amoureuse n'était un secret pour personne. Il était absolument incapable de penser à autre chose qu'enfreindre le règlement de l'école. Il était également délicat d'entretenir une relation en passant le plus clair de son temps libre en retenue. Parce que des retenues, Sebastian en avait un sacré palmarès à son actif, il en tirait d'ailleurs une très grande fierté. Ominis pensait surtout que ça signifiait qu'il se faisait attraper neuf fois sur dix, mais visiblement cette aura de bad boy rebelle de Serpentard plaisait beaucoup aux filles. Cependant, il avait remarqué que son ratio de retenues avait une très nette tendance à augmenter à chaque fois qu'il sortait avec une fille...

Mais pourquoi Jane s'était-elle énervée ? Qu'est-ce qui aurait pu la vexer autant ? Était-elle amoureuse de quelqu'un en ce moment ? Serait-il possible qu'il s'agisse de... Un certain malaise le traversa. Elle l'avait qualifié de "charmeur", cela signifiait-il qu'il lui plaisait ? Non, c'était impossible. Depuis le temps qu'ils se connaissaient, il se serait forcément rendu compte de quelque chose. Rien dans leur attitude ne pouvait laisser supposer qu'il se passait quelque chose entre eux. Il se souvint après l'arrivée remarquée en cinquième année de Jane, avoir demandé à Sebastian à quoi elle ressemblait. La notion de beauté physique étant relativement abstraite pour lui, il s'attendait à des descriptions qui lui auraient indiqué si elle semblait plutôt de nature joviale ou au contraire austère et la seule réponse qu'il obtint fut un vague « Elle est jolie... » désintéressé, baragouiné entre deux bouchées de tourte aux rognons. La tourte aux rognons emportant haut la main le duel face à Jane dans l'ordre de priorité de Sebastian. Mais Jane était rarement aussi vindicative, elle n'avait vraiment pas dû apprécier qu'ils tournent en dérision les sentiments de quelqu'un d'autre. Peut-être écrivait-elle des poèmes, elle aussi ?

Le lendemain Ominis profita de son premier jour de weekend pour dormir jusqu'à une heure avancée de la matinée. Sebastian dormait profondément et il décida de ne pas le réveiller. La veille, il lui avait demandé s'il avait pu parler à leur amie, mais il avait éludé la question en prétendant être trop fatigué pour en parler. Ce fut durant l'heure du déjeuner qu'il obtint un semblant de réponse et de manière tout aussi inattendue que contrariante.

Sa cécité lui conférait une excellente acuité auditive, additionnée à une discrétion digne de celle d'une Demiguise. Rien n'était plus facile pour lui que d'écouter les conversations sans se faire remarquer (ce qui lui était fort commode pour savoir tout ce qu'il se passait et se disait dans la salle commune). Or, à cet instant précis, il n'eut pas besoin d'utiliser ses talents d'espionnage pour entendre ce que Imelda Reyes et ses copines, Mathilda Lawrence et Judith Clarkson, assises à sa gauche, avaient à dire. Elles discutaient assez bruyamment ou bien caquetaient, il n'avait pas encore décidé.

- On est d'accord, c'est suspect, constata Imelda, ce n'est pas la première fois qu'elle disparait la nuit. Et vous avez toutes vu ce qu'il s'est passé hier soir.

- La dispute ? répondit Clarkson. Oui, elle semblait fâchée. Elle est sortie de la salle commune avec Pallow sur ses talons et elle est revenue au dortoir juste avant que je ne m'endorme.

Cette information provoqua une nouvelle vague de gloussement.

- Ce n'est pas la première fois qu'elle disparait la nuit, et elle n'est pas rentrée au dortoir avant-hier soir, chuchota Lawrence. Je le sais parce que je me suis réveillée à trois heures du matin pour aller aux toilettes et son lit était toujours vide.

- Et qui d'autre est apparu en cours avec des cernes de trois miles de long le lendemain matin ? intérogea Clarkson en prolongeant ridiculement chaque syllabe de la question.

Imelda reprit d'un ton ferme.

- Ils sont toujours fourrés ensemble à faire des messes basses. À chaque fois que je ne la vois pas de la soirée étonnamment Pallow aussi disparait de la salle commune. Tout le monde a remarqué qu'il se passait quelque chose entre eux, il faudrait être aveugle pour ne pas s'en apercevoir !

"CLANG !"

Elles furent interrompues par un bruit de couvert qui rebondit sur de la porcelaine. De ce fait, la fourchette que tenait Ominis était maintenant quelque part sous la table. Il eut l'impression de recevoir un seau d'eau glacé sur la tête. Sa main toujours figée à l'endroit où il dirigeait sa fourchette avant de la lâcher. Il crut entendre Imelda lui dire quelque chose, mais ses oreilles semblaient avoir été bourrées avec du coton. Il sortit en trombe de la grande salle et laissa ses pas le guider vers le seul endroit où il voulait être à présent, la crypte.

Ce ne fut qu'une fois passé l'embrasure de la porte du passage secret que son cerveau qui, en premier lieu, avait refusé de traiter l'information s'était mis en marche. Passant et repassant les discussions qu'il avait eues avec Sebastian et Jane, faisant les liens avec celle qu'il venait d'entendre. Jane lui avait menti. Sebastian lui avait menti. Jane et Sebastian lui avaient menti. Peu importait la façon dont il tournait et retournait ces mots dans sa tête, aucune ne le libérait de l'étau qui enserrait sa poitrine. C'était même de pire en pire. Mais les connexions se faisaient. Tout était clair maintenant. Ces soirées à disparaitre tous les deux, cette impression d'être exclu de quelque chose sans réussir à mettre le doigt dessus, la dispute de la veille... Rien à voir avec ces fichus poèmes ! Elle était simplement vexée du désintérêt que portait Sebastian aux relations amoureuses et par extension, ces mots lui coutèrent, à la leur. Et comme l'avait si justement et douloureusement dit Imelda, il faudrait être aveugle pour ne pas s'en apercevoir.

Ominis passa le reste de la journée à faire les cent pas dans le silence de la crypte. Ses émotions passant de la colère à un sentiment sur lequel il préférait ne pas s'attarder, mais qui, en pensant à Jane, le rendait profondément triste. Non cette trahison le mettait bien trop en colère pour avoir le temps de ressentir autre chose. Passé l'heure du dîner, Ominis décida de retourner dans la salle commune pour confronter ses deux amis et ne fut pas surpris, mais pas moins irrité, de découvrir qu'ils étaient aux abonnés absents. Il fit donc ce qu'il regrettait de ne pas avoir fait plus tôt, il attendit. Les heures défilèrent et la salle commune se vida progressivement. Vingt-trois heures, minuit, une heure... À une heure et demie du matin, le dernier élève encore debout rejoint son dortoir. Deux heures, trois heures... et enfin à trois heures et quart, la porte de la salle commune s'ouvrit, se referma et des claquements de chaussures ainsi que des rires étouffés dévalèrent les marches du long escalier en colimaçon.

- ... il nous reste encore le haut de la tour d'astronomie et... les serres, énumérait Jane.

- Et ton interminable liste sera enfin terminée ? Vraiment ? répondit la voix moqueuse de Sebsatian.

- Je peux toujours rajouter de nouvelles étapes, tu sais ?

- Ça va, je ne vous dérange pas trop ? intervint Ominis en les faisant sursauter en bas de l'escalier.

Il y eut un instant de flottement et Sebastian commença d'une voix mal assurée.

- O-Ominis ? Tu... tu ne dors pas ?

- De toute évidence, railla-t-il.

Le silence n'avait jamais dérangé Ominis. Il aimait le calme, et il ne comptait pas le nombre de soirées passées tous les trois à lire, dessiner ou simplement se reposer sans échanger un mot. À cet instant, il détestait le silence qui s'étirait actuellement entre eux.

- Il va donc encore falloir que je vous pose la question ?

- Nous... nous étions en train de... marmonna Jane.

- Préparer vos prochains rendez-vous nocturnes ? termina-t-il à sa place.

- Non, non, pas du tout... Nous...

- Ne me mentez pas ! explosa Ominis. Par Merlin, je vous ai pris sur le fait et vous continuez de me mentir ! Je suis aveugle, pas stupide !

- Mais on n'a jamais pensé ça ! se défendit Jane.

Il aurait aimé pouvoir affirmer que leurs mensonges étaient la seule chose qui le mettait hors de lui or il y avait quelque chose d'autre. Quelque chose qui, de les savoir tous les deux, intensifiait sa colère. Cependant, sa fureur intérieure ne franchissait pas la barrière de ses lèvres, ces paroles étaient froides, acides.

- Alors pourquoi vous ne me dites pas la vérité ? Vous pensez que je le prendrai comment d'apprendre par quelqu'un d'autre que mes deux meilleurs amis me mentent depuis des semaines et sortent ensemble en cachette ? Mais visiblement me prendre pour un idiot était plus amusant que me dire la vérité ! Le gout de l'aventure, j'imagine.

- Ominis, il n'y a rien entre nous, bredouilla Jane d'une petite voix.

- Où est-ce que tu es allé chercher ça ? demanda Sebastian d'un rire qui sonnait faux à ses oreilles.

- D'une source plus fiable que vous deux visiblement. Vous serez content d'apprendre que vous n'aurez désormais plus besoin de me mentir pour passer du temps seul, car à partir de maintenant, vous le resterez tout le temps.

Ominis ne leur laissa pas le temps de répliquer quoi que ce soit et se dirigea vers son dortoir avec la ferme intention de ne plus leur adresser la parole. Il entendit les pas de Jane le poursuivre en l'appelant, mais il referma la porte de sa chambre, étouffant toutes tentatives de discussion. Il anticipa également le retour de Sebastian en tirant les rideaux de son lit à baldaquin. Ils s'étaient déjà disputé tous les deux, leur cinquième année avait eu son lot d'accrochages. Les avoir surmontés avait conforté Ominis de l'aspect inaltérable de leur amitié, seulement là, à cet instant précis, il sentait que quelque chose s'était brisé entre eux. Il lui en voulait, comme jamais il ne lui en avait voulu auparavant. En pensant à Jane, la colère céda sa place à la déception et à la tristesse. Elle qui était, selon lui, un modèle d'honnêteté et de sincérité. Elle qui avait toujours été de son côté à tenter de contenir les débordements de Sebastian, à apaiser les tensions entre eux, à toujours trouver les mots pour les tempérer. Celle dont les douces attentions quotidiennes le ravissaient plus qu'il ne l'admettrait jamais. Ominis était peut-être encore trop « garçon » pour interpréter les signaux que lui provoquait sa présence. Sûrement trop effrayé d'être rejeté, trop effrayé de la perdre, préférant faire abstraction de toutes ces sensations afin de ne pas défigurer leur amitié. Visiblement, ça n'avait pas été le cas de Sebastian. Sebastian avait toujours agi sans se soucier des conséquences, c'était d'ailleurs ce qui lui avait valu cette réputation de tête brulée favorite des Serpentard et surtout de bad boy cynique et désinvolte préféré de la gent féminine. Il avait toujours été amusé de la manière dont il arrivait sans même s'en apercevoir à captiver l'intérêt des filles comme des Niffleurs devant un tas de gallions. Aujourd'hui, cette capacité lui donnait envie de lui briser quelque chose sur la tête. Comment cela avait-il pu arriver ? Quand cela avait-il commencé ? À partir de quand, exactement, l'adolescent autocentré qu'était Sebastian avait commencé à s'intéresser suffisamment à quelqu'un pour délaisser leur amitié ? Lui dont les contraintes et les responsabilités qui incombent à un couple (aussi importantes soient-elles pour des adolescents de leur âge) avaient toujours été un obstacle insurmontable. Aucune de ses relations n'avait dépassé un mois, la plus longue ayant durée trois semaines et demie. Il n'aimait pas être restreint, dés que l'étiquette « Petit Ami Officiel » était apposée sur sa tête, il se désintéressait. Ce n'était plus aussi naturel qu'avant, selon lui. Les rendez-vous galants devenaient des obligations auxquelles il allait à reculons. À en croire la discussion qu'il avait interrompue, la liste des lieux où ils avaient eu des rendez-vous était longue, et ça n'avait pas l'air de lui déplaire plus que ça.

L'espace d'un instant, il aurait souhaité ne pas être aveugle. C'était une pensée qu'il avait eu un nombre incalculable de fois avant d'être scolarisé à Poudlard. Avant de tenir sa baguette entre ses doigts pour la première fois et de devenir parfaitement indépendant et autonome. Personne ne pouvait comprendre le lien qu'il y avait entre sa baguette et lui. Cette délivrance qu'elle lui avait apportée. Même si cette dénomination était incorrecte, car il n'existait aucun mot en anglais pour définir ce qu'il avait vécu ce jour-là chez Ollivander, il avait vu pour la première fois de sa vie. À partir de cet instant, il n'a plus jamais envié les yeux de qui que ce soit. Lui aussi voyait, des choses différentes certes, mais des choses que personne d'autre ne pouvait voir. Toutes les variétés de signatures magiques, les timides, les excentriques, les forces tranquilles, les explosives... Il cernait généralement bien les personnes, leur magie ne pouvait pas mentir. Pourtant, là, tout de suite, il aurait aimé ne jamais naître aveugle et voir les signaux qu'il n'avait pas remarqués, qu'il n'avait pas pu interpréter. Il avait entendu suffisamment de discussions de jeunes filles amoureuses dans la salle commune pour savoir comment ça se passait. Des jeux de regards, l'incapacité de quitter des yeux l'élu de son cœur, des joues qui rougissent, des sourires (Par Salazar, comment était-il censé s'apercevoir de ça au juste ?), des mains moites (Jane et Sebastian avaient toujours eu les mains parfaitement sèches !), des papillons dans le ventre (que viennent faire des insectes dans cette histoire ?). Tout à coup, il haïssait plus que de coutume sa famille de consanguins dégénérés. Ominis n'était pas idiot, il se doutait fortement que l'obsession malsaine qu'entretenait la famille Gaunt pour la pureté du sang était très certainement à l'origine de sa cécité. À se marier exclusivement entre cousins et voir même, plus rarement, entre frère et sœur. Il réprima un frisson de dégout.

Il ne se voilait pas la face pour autant, il n'avait jamais rechigné à profiter des privilèges que lui octroyait le nom des Gaunt au sein de la société sorcière. C'était grâce à l'influence de sa famille au sein du ministère qu'il pouvait continuer d'utiliser sa baguette en dehors de l'école pour pallier à sa cécité en dépit de la loi de restriction de l'usage de la magie chez les sorciers de premier cycle. Nul doute que la décision du conseil n'aurait pas été aussi clémente s'il avait été né moldu. Bien que décadente, sa famille inspirait encore le respect à quelques familles de sang pur et sa mauvaise réputation lui conférait une méfiance généralisée des élèves de l'école. Ça ne le dérangeait pas, il avait toujours aimé le calme que lui offrait Poudlard, cette notion était inexistante à la maison. Les journées étaient rythmées par les coups de sang et de colères de ses ainés, frustrés de constater la perte de leur aisance financière année après année et de voir leur train de vie changer. Paradoxalement, le calme était également de mauvais augure. Quand la maison était vide, Ominis savait très bien ce que sa famille faisait. La dernière fois que ça c'était produit, c'était pour fêter les fiançailles de Marvolo, l'ainé de la fratrie, avec une cousine germaine et quoi de mieux que torturer des Moldus pour fêter l'évènement ? Il gardait une honte profondément ancrée en lui depuis son "initiation" comme ses parents l'appelaient. Il pouvait encore sentir la douleur du sortilège de torture que lui avait infligée sa famille après son refus de participer et du sentiment de honte d'avoir cédé. Sebastian n'avait jamais compris pourquoi il ne se pardonnait pas ce qu'il s'était passé cette nuit-là, lui rappelant qu'à cet âge, lui n'arrivait toujours pas à faire ses lacets. Mais Ominis savait que pour que le sortilège Doloris fonctionne, il fallait le vouloir. Il n'oubliera jamais le dangereux cheminement de pensée qu'il a dû avoir pour réussir à torturer ces innocents. Il savait très bien qu'il serait à jamais hanté par les cris et les pleurs qu'il avait causés ce soir-là. Ominis enviait l'innocence dont jouissaient les élèves qui l'entouraient, la sienne avait été souillée par la magie noire avant même qu'il n'obtienne sa première baguette.

Cette triste rétrospective de sa vie ne fit rien pour améliorer son état général. Il finit par tomber de fatigue en tentant de tempérer en vain sa colère. Le lendemain, au réveil, Sebastian essaya plusieurs fois d'engager la conversation, mais Ominis ne céda pas. Il avait dit qu'il ne leur adresserait plus la parole, il s'y tiendrait. Ignorer Jane au petit déjeuner avait été plus facile que prévu car contrairement à Sebastian qui revenait sans arrêt à la charge, après lui avoir fait comprendre qu'ils n'avaient plus rien à se dire, elle avait sombré dans le mutisme. Il s'ensuivit les semaines les plus longues qu'il n'ait jamais vécu à Poudlard. Les vacances de Noël approchaient à grands pas ainsi que les inscriptions pour rester à l'école pendant les Fêtes. Les dix-huit ans d'Ominis arrivant la veille de Noël et connaissant sa famille ainsi que leur goût plus que discutable en matière d'animation, il estima plus sûr de s'y inscrire. Et puis, avec un peu de chance, ils oublieront même de lui envoyer une carte. Il apprit rapidement que Jane et Sebastian s'étaient également inscrits, rien de surprenant pour Sebastian depuis la mort de son oncle Solomon et le départ d'Anne qui refusait de le revoir. Par contre, Jane était toujours retournée chez elle pour fêter Noël en famille. Décidément, ils étaient vraiment devenus inséparables, pensa-t-il amèrement. Avec le temps, Sebastian avait arrêté d'insister et Jane n'avait jamais rien retenté depuis la scène du petit déjeuner. Il ne les croisait que rarement dans la salle commune et dans ces cas-là Ominis s'en allait ou faisait demi-tour.

Les vacances commencèrent enfin avec la charge de travail qui allait avec et autant dire que les professeurs avaient eu la main lourde. Avec les ASPIC à la fin de l'année, la pile de devoirs à faire lui donnait le tournis. Cependant, il dut admettre que sans les distractions perpétuelles de Sebastian, il avançait beaucoup plus vite qu'à l'ordinaire, tant est si bien que quand il se réveilla le matin du vingt-quatre décembre, il avait fini la majorité de son travail. Il ne lui restait plus qu'une quinzaine de centimètres de parchemin à écrire en défense contre les Forces du Mal sur les effets des sortilèges de soin et une rédaction en Histoire de la Magie sur les découvertes magiques majeures des sorciers de l'Égypte antique et leur influence sur les civilisations qui les ont succédé. Cependant, il ne s'attendait pas à ce que Sebastian lui tombe dessus avant même qu'il n'ait le temps de sortir de ses draps.

- Bien dormi ?

Ominis souffla, il ne voulait pas lui parler, mais Sebastian ne lui laissa pas le temps de répliquer et enchaîna.

- Écoute... je sais que tu ne veux plus nous parler, que ça ne sert à rien de discuter ou d'essayer de se justifier parce que, oui, on t'a menti, plus d'une fois même. Ça a dû être un sentiment terrible, et à ta place, j'aurais probablement été en colère aussi.

- C'est bien de le reconnaitre, mais...

- Mais, le coupa-t-il, j'aimerais que tu attendes d'avoir le contexte autour de ses mensonges, et là, et seulement là, tu pourras prendre la décision irrévocable de ne jamais plus nous adresser la parole.

Si Ominis n'avait pas été aveugle, il aurait certainement levé les yeux au ciel. Il se contenta donc de pousser un long soupire.

- Quel tragédien...

- La boîte est enchantée pour que les potions sortent dans un ordre bien précis, c'est celui dans lequel tu dois les boires.

- De quoi tu...

Avant même qu'il ne puisse finir sa phrase, il sentit la main de Sebastian saisir la sienne et y mettre un paquet de la taille d'une boîte à chaussure. Il dut la tenir à deux mains pour ne pas la renverser.

- Joyeux anniversaire Ominis.

La boîte était plutôt lourde et émettait des cliquetis de fioles qui s'entrechoquaient. Il entendit Sebastian s'éloigner et passer la porte de leur dortoir.

- On t'attendra dans la salle commune.

Ominis ne répondit rien, complètement sonné par ce qu'il venait de se passer. Qu'est-ce que ça voulait dire ? Quel contexte ? Comme en réponse à ses questions muettes, il sentit un tiroir de la boîte s'ouvrir sous ses doigts, lui permettant d'en sortir une fiole. Il posa la boîte sur son lit à côté de lui, tourna le bouchon avec une certaine appréhension et porta la potion à ses lèvres. Il ne savait pas à quoi s'attendre en le faisant, le gout était neutre, comme de l'eau et la texture était brumeuse. Cependant, il n'eut pas le temps de s'attarder davantage sur le gout, car une sensation inédite le submergea. Il se sentit soudainement éboulis et un instant plus tard, il se tenait face à quelqu'un, dans un environnement extraordinairement...coloré ? Il se sentit submergé par une myriade de couleurs, de détails, de texture... Habituellement, sa baguette lui permettait de discerner les formes de ce qui l'entourait, des lignes, comme des esquisses dessinées de son environnement dans un carnet de croquis. C'était ce qui lui permettait de se déplacer aussi aisément dans le château. Mais là, il ne comprenait rien, il voyait la personne devant lui, assise sur un lit, en train de le regarder. C'était une fille, dans un dortoir qui paraissait, dans la disposition des meubles, semblable au sien. Elle sourit et prit une grande inspiration.

- Bonjour Ominis.

C'était la voix de Jane. Le cœur d'Ominis rata un battement. Par Merlin, mais que se passait-il ?

- Si tu m'entends et si tu me vois, ça signifie que nous avons réussi. Que nos efforts ont porté leurs fruits. Tu dois très certainement te sentir complètement perdu à l'heure qu'il est, ne t'inquiète pas, je vais tout t'expliquer. L'année dernière, Sebastian et moi avons eu l'idée de te préparer un cadeau spécial pour tes dix-huit ans. L'idée folle de te permettre de voir, de pouvoir partager des souvenirs avec toi. Un peu comme avec une pensine. Mais le problème de la pensine est qu'elle recréé des souvenirs autour de nous sans permettre aux non-voyants de les voir. Il a donc fallu chercher une alternative. Ça a été très long, mais avec l'aide du professeur Sharp, nous avons réussi à créer une potion qui permet de partager nos souvenirs de nos yeux, à ta mémoire.

À ce moment-là Ominis comprit qu'il ne se tenait pas devant elle, mais qu'elle se regardait dans un grand miroir sur pieds installé devant son lit. Il n'en revenait pas, tant de lumière, couleur, tant de reflets et malgré toutes ces extraordinaires découvertes rien ne le détournait d'elle. Il reconnaissait les pleins et les déliés de son visage qu'il avait pu tracer avec ses doigts un jour pour avoir une idée de son visage. Il retrouvait les courbures de ses pommettes, l'ourlet de ses lèvres, la forme de ses yeux. C'était magnifique. Il la voyait, et il ne voulait plus rien regarder d'autre. Il se sentit brusquement jaloux de toutes ces personnes qui avaient déjà posé les yeux sur elle. De toutes celles qui ne réalisaient pas la chance qu'elles avaient de pouvoir la contempler au quotidien. Une vague d'émotion lui noua le ventre et lui serra la gorge.

- Ça nous a pris plusieurs mois, Sebastian était persuadé que Sharp refuserait de nous aider, mais il a immédiatement adhéré au projet. Après avoir perfectionné la recette, on s'est rendu compte que la potion était extraordinairement longue à faire et en parallèle, il fallait rassembler ou créer les souvenirs que nous voulions y ajouter. C'est la raison pour laquelle nous avons été si souvent absents ces derniers temps. Je vais passer le relais à Sebastian, tu peux maintenant boire la seconde potion. Et... Joyeux anniversaire !

Elle lui offrit un sourire éclatant, il y eut un nouveau flash lumineux et son environnement habituel reprit le contrôle de ses sens. Il se passa quelques secondes où il eut besoin de reprendre son souffle. Sans lui laisser le temps de repenser à ce qu'il venait de vivre, le second tiroir s'ouvrit, il attrapa la bouteille qu'il vida sans aucune hésitation. Un nouveau flash, une nouvelle personne. Sebastian. Il en eut le souffle coupé. Il l'aurait reconnu même si Jane ne lui avait pas dit qu'il le allait rencontrer dans cette potion. Il n'avait pas besoin d'entendre sa voix pour le reconnaitre, c'était lui, il l'entendait à sa respiration qui l'accompagnait au quotidien depuis sept ans maintenant, à ces taches de rousseur et ce sourire en coin que tout le monde lui décrivait.

- Salut Ominis, j'arrive pas à croire que je vais faire ça. Tu sais, des fois, je me dis que tu as de la chance de ne pas voir Jane, elle fait vraiment peur quand elle veut. J'espère aussi que ça va marcher parce que je ne dois pas avoir l'air malin à parler tout seul devant un miroir. Bref, je pensais que ce serait plus mémorable de te lancer directement les souvenirs au visage, mais Jane tient absolument à faire une introduction pour ne pas te brusquer.

Il leva les yeux au ciel.

- J'ai donc toute une liste de choses à dire, il secoua un morceau de parchemin qu'il avait dans les mains, pour être sûr que je n'oublie rien et que je suive le plan.

Il fit un sourire en coin qui n'annonçait rien de bon.

- Alors, la boîte contient six potions, celle-ci est la seconde. À partir de la suivante, nous allons te partager des souvenirs de moments que nous avons passés tous ensemble et aussi des souvenirs avec Anne avant l'arrivée de Jane. Nous n'avons pas réussi à mêler nos souvenirs dans une seule et même potion, donc à chaque flacon son possesseur de souvenir. Le prochain contiendra les souvenirs de Jane, celle d'après les miens et ainsi de suite. Évidemment, nous avons dû faire des choix, nous ne pouvions pas tout mettre, chaque flacon ne peut contenir qu'une quantité et durée limitée de souvenirs. Ah, et ne crois pas ce qu'elle a pu te dire, cette potion n'est pas juste longue à préparer, c'est un véritable cauchemar. Nous nous sommes dits que six devrait suffire, même si on en a gâché deux juste pour parler et que l'on aurait simplement pu tout t'expliquer après...

Sebastian poussa un soupir exaspéré.

- Alors, qu'est-ce que tu attends ? Potion numéro trois !

Ominis ne se fit pas attendre et à peine eut-il porté la potion à ses lèvres qu'il ressentit l'éblouissement auquel il commençait à devenir coutumier. Il était dans la salle commune des Serpentard, il reconnaissait la disposition des meubles et les vitres magiques qui donnaient sur le lac noir, pour la première fois la couleur verte était autre chose qu'un mot pour lui. Il reconnut Sebastian, enfoncé dans un canapé, un livre ouvert sur les genoux, discuter avec quelqu'un à côté de lui. Quelqu'un dont le rire sonnait étrangement familier à ses oreilles. Il lui fallut quelques secondes avant de se souvenir qu'il voyait le monde à travers les yeux de Jane et que la personne qui rigolait à côté de Sebastian, c'était lui. Il se découvrait pour la première fois de sa vie. Il n'aurait su dire si ce qu'il voyait lui plaisait ou non, c'était simplement lui. Il était curieux pour Ominis de voir l'image qu'il renvoyait, mais il n'y porta pas plus d'attention, préférant se concentrer sur tout le reste. Tout lui semblait extraordinairement chargé de détails, les peintures, les colonnes, les vitraux. Il sourit en voyant un groupe de première année ameuté devant les vitres dans l'espoir de voir passer une sirène ou le calamar géant.

Il eut à peine le temps de regarder à nouveau vers Sebastian que le décor se dilua pour laisser place à un autre. À la vue de la quantité de nourriture disposée devant lui, il comprit qu'ils étaient désormais dans la grande salle. Il se tenait juste à la droite de Jane et mangeait son assiette de toast matinal habituel. Sebastian qui se tenait en face d'elle lui fit un clin d'œil complice et se tourna vers la grande salle en levant théâtralement les bras. Son regard parcourut la grande salle des yeux, c'était absolument merveilleux. Les vitraux représentant les quatre maisons brillaient de mille feux, réfléchissant leur couleur sur les tables des professeurs. Des centaines de bougies illuminaient le brouillard matinal du plafond enchanté qui flottait au-dessus de la tête des nombreux élèves amassés autour des tables. Il n'aurait jamais imaginé qu'il puisse exister autant de couleurs différentes. Encore une fois, le paysage changea, il fut ébloui par une lumière aveuglante qui lui réchauffait les joues. Ces pieds étaient dans l'eau, près de la berge où Sebastian était assoupi à l'ombre d'un arbre, près de deux paires de souliers. Il se voyait à côté de Jane qui lui tenait la main en marchant tranquillement dans l'eau. Il se souvenait de ce jour-là, c'était l'été dernier juste avant la fin de l'année. Il faisait tellement chaud qu'ils n'avaient pas résisté à l'envie d'aller se tremper les pieds dans le Lac Noir. Ominis pouvait entendre le fil de la conversation qu'ils partageaient. Ils parlaient, ou plutôt, il l'écoutait parlé, des plantes aquatiques qu'ils pourraient trouver dans le lac. Son regard changea de direction et ce qu'il vit lui donna le tournis. Poudlard était immense. Ses tours dirigées vers le ciel semblaient s'étirer à l'infini. Mais sa contemplation de l'école prit rapidement fin, car un filet d'eau fraiche lui éclaboussa le visage. Il sourit à ce souvenir, il se souvenait avoir trouvé un moyen efficace de la faire arrêter de parler de ses plantes. Elle explosa de rire et l'arrosa à son tour.

Le retour à la réalité se passa en douceur, les mains tremblantes, il saisit la bouteille suivante. Il se retrouva dans une salle bruyante et chaleureuse, une bière au beurre entre les mains. Les Trois Balais. Il entendait clairement la voix de Sebastian qui parlait, comme si c'était la sienne, commander une seconde tournée à Sirona qui slalomait entre les tables. Jane était à côté de lui, en train de picorer des cacahuètes. Il s'aperçut aussi que Sebastian était grand et que ça changeait beaucoup sa perception des visages. Jane lui sembla soudainement très petite comparée à eux, et sa masse de cheveux qui cascadait dans son dos lui provoquaient l'envie irrépressible d'y passer les doigts. Il la quitta des yeux presque à regret pour voir Sirona déposer trois pintes devant eux en leur offrant la tournée. Ce genre d'attention n'était pas rare depuis que Jane et Sebastian avaient débarrassé Pré au Lard de ce troll en cinquième année.

Encore une fois le décor changea, il entendit le bruissement de la neige sous ces chaussures et se retrouva dans le parc. Jane était entre Sebastian et lui, les tenants chacun par un bras. Sebastian et elle l'écoutaient se plaindre du froid et de la neige, elle jeta une œillade complice à Sebastian qui regarda le château recouvert d'une épaisse couverture de neige scintillante sous le soleil. Il dut fermer un peu les yeux pour ne pas être ébloui, mais il s'habitua rapidement à la lumière et il put rapidement profiter pleinement du spectacle. Il admit qu'il aurait pu rester ici des heures à contempler le paysage, mais le souvenir s'effaça pour en laisser place à un nouveau.

Il était désormais dans la crypte à jouer au baveboules avec une fille qui n'était pas Jane. Encore une fois, il n'eut pas besoin d'entendre sa voix pour la reconnaitre. Anne. Il sentit des larmes lui picoter les yeux. L'entendre rire à nouveau, avant la malédiction qui la priva de Poudlard, avant toute cette souffrance, avant les dérives de Sebastian, avant la perte de Solomon. Il se voyait jouer avec insouciance avec elle, revivant une époque à jamais révolue. Il aimerait pouvoir intervenir dans ce souvenir, la prévenir et changer le cours de choses, mais avant qu'il puisse étudier plus longtemps la question, l'environnement changea. Ils étaient à la finale de Quidditch de l'année précédente. L'attrapeuse de Serpentard effectuait une formidable plongée en piquet vers le sol et quelques secondes plus tard Imelda Reyes et son équipe étaient rassemblées au centre de terrain, portant l'attrapeuse qui brandissait une boule dorée fermement serrée entre ses doigts sous les acclamations euphoriques de leur maison. Le souvenir se dilua et Ominis fut de retour dans son dortoir.

Il ne lui restait plus que deux potions à boire. Ne réfléchissant pas davantage, il déboucha la suivante. Ils étaient tous les trois dans un couloir désert de l'école, Jane passa plusieurs fois devant la tapisserie de Barnabas le Follet et une porte se dessina dans le mur d'en face, leur donnant accès à la Salle sur Demande. Le royaume aménagé de Jane. Il voyait à nouveau à travers ses yeux et après le point de vue de Sebastian, il ne put s'empêcher de penser à quel point le monde paraissait grand quand on était petit. Ils passèrent devant un petit salon, devant les plantes chéries de son amie, ses postes de potions et entrèrent dans un de ses vivariums. Il se retrouva rapidement au centre de l'attention de créatures en tout genre qui, dans ces souvenirs, l'avaient toujours superbement ignorée quand il y avait mis les pieds. Des Niffleurs des Fléreurs et des Boursoufs venaient se lover à ses pieds, l'empêchant de faire un pas sans trébucher, des Hippogriffes fendaient les cieux pour rejoindre leur soigneuse et lui tirer les manches de sa robe de sorcier pour réclamer de l'attention. Elle revint vers eux avec deux Niffleurs et les mit précipitamment dans leur bras.

- Je vous présente Ronron et Harry, occupez-vous d'eux le temps que j'aille voir si mon bébé Grapcorne va bien, ils m'empêchent de travailler !

Avant même qu'elle n'eût terminé sa phrase, Harry avait escaladé les épaules de Sebastian pour s'assoir sur le haut de sa tête et Ronron, qui s'était débarrassé de la cravate d'Ominis, avait déboutonné le haut de sa chemise et tirait de toutes ses forces sur le pendentif en or qu'il avait autour du cou. Ominis comprit alors le fou rire qui la prit ce jour-là.

Ils se trouvèrent désormais en salle de potion, le professeur Sharp parcourait la salle en surveillant les concoctions des élèves et en s'arrêtant de temps à autre pour donner des conseils quand une puissante explosion résonna dans la salle de classe.

- WEASLEY !!!

Classe de Botanique, Jane l'aidait à rajouter du terreau autour de son chou mordeur de Chine. Sebastian s'amusait à narguer le sien en mettant un doigt entre sa mâchoire et à le retirer juste avant qu'elle ne se referme sur lui. Il se retrouva en cours d'histoire de la magie, se voyant dormir à côté de Jane qui luttait contre le puissant des somnifères de l'école, le professeur Binns. Le paysage se dilua à nouveau et les effets de la potion se dissipèrent. Il tenait à présent le dernier flacon entre ses doigts. Les derniers souvenirs qu'il verrait seraient ceux de Sebastian. Il était impatient de voir ce qu'il allait y découvrir, mais cela signifiait aussi que ce serait le dernier. Que le retour à la réalité serait définitif. Il retira lentement le bouchon et avala le liquide d'un trait. Il eut la surprise de se retrouver face à Sebastian, dans leur dortoir, comme dans la seconde potion. Il avait la même attitude nonchalante qui le caractérisait, si ce n'est que de légères ombres lui cernaient les yeux, lui donnant l'air fatigué.

- Salut Ominis, au risque de me faire disputer par Jane pour ne pas avoir suivi scrupuleusement ce qu'elle avait prévu pour cette potion, j'ai décidé de prendre quelques libertés. Je compte sur toi pour ne pas m'attirer d'ennui.

Il sourit tristement à son reflet.

- Ces souvenirs ne concernèrent qu'une seule et même personne. J'espère juste que tu comprendras... Enfin, bref... tu verras bien de toute façon. Et si après ça tu ne comprends toujours pas, c'est qu'on ne peut vraiment plus rien faire pour toi.

Le paysage changea. Le soleil déclinant teintait le ciel d'un extraordinaire camaïeu de couleur qui lui coupa momentanément le souffle. Le télescope à côté de Sebastian lui indiqua qu'ils étaient en haut de la tour d'astronomie. Jane se tenait à sa droite, accoudée à la balustrade. Ominis constata qu'il ne faisait visiblement pas partie de ce souvenir. À y regarder de plus près, Jane ne semblait pas profiter du spectacle.

- Je te promets que tout va s'arranger, dit Sebastian en posant une main sur son épaule.

Son visage était aux antipodes de celui qu'il avait pu voir à travers tous ces souvenirs. Il avait perdu son sourire qui, jusque-là, ne l'avait jamais quitté. Ses joues et son nez étaient rougis. Ses lèvres se pincèrent et elle détourna le regard quand les larmes qui remplissaient ses yeux débordèrent sur ses joues.

- Viens là.

Sebastian passa un bras par-dessus ses épaules et la serra contre lui. Un sanglot s'échappa de sa gorge quand elle répondit à son étreinte. Le cœur d'Ominis se serra douloureusement dans sa poitrine. Qu'est-ce qu'il venait de voir ? Un nouveau souvenir le remplaça, ils étaient tous les trois dans la bibliothèque à faire leurs devoirs. Jane semblait perdue dans l'étude contemplative du profil d'Ominis, sa plume figée à quelques centimètres de son parchemin jusqu'à ce qu'elle croise le regard de Sebastian et qu'elle ne reprenne précipitamment son écriture.

Ils étaient maintenant assis dans la crypte, éclairés par la lumière rougeoyante et vacillante des braseros suspendus. Son meilleur ami les regardait tous les deux, assis l'un à côté de l'autre. Jane avait les genoux remontés sur la poitrine, sa tête était tournée vers lui, reposant entre ses bras à l'écouter parler de ce qu'il souhaiterait faire l'année suivante. Un vague sourire étirait ses lèvres, son visage exprimait une tendresse qu'il n'avait encore jamais vu dans les souvenirs de Sebastian quand elle se tournait vers lui. Ce fut le moment que choisit son ami pour attraper un petit caillou sur le sol et le lancer sur elle, lui provoquant un sursaut. Ses joues prirent une teinte qui lui rappela le coucher de soleil qu'il avait vu du haut de la tour d'astronomie. Elle formula un « Quoi ? » silencieux, qui déclencha le rire de Sebastian et la confusion de l'Ominis du passé.

Le parc, une chaude journée d'été, toujours à l'ombre du même arbre, ils étaient allongés dans l'herbe. Il reconnut sa silhouette assoupie et cette fois encore, elle ne le quittait pas des yeux se risquant même à passer timidement les doigts dans ses cheveux. Sebastian émit une fausse quinte de toux et elle retira sa main, comme si son contact l'avait brulé.

- Il avait une... une feuille dans les cheveux, balbutia-t-elle dans un ton faussement détaché.

- Bien sûr, railla Sebastian.

À partir de là, les souvenirs allaient si vite qu'il peinait à suivre, perdu dans un tourbillon de regards tournés vers lui qui s'estompaient et se redessinaient dans un lavis. Dans la salle commune, en cours de sortilège, de potion jusqu'à ne plus pouvoir discerner les lieux qui les entouraient, il ne voyait plus que ces pupilles et ce sourire tendre qui ne le quittaient jamais... Puis tout à coup, tout se stabilisa et il était dans leur salle commune vidée de ses occupants, en plein milieu d'une dispute.

- ...je le prendrai comment d'apprendre par quelqu'un d'autre que mes deux meilleurs amis me mentent depuis des semaines et sortent ensemble en cachette ? Mais visiblement me prendre pour un idiot était plus amusant que me dire la vérité ! Le gout de l'aventure, j'imagine.

Jane semblait s'être pris un coup de massue sur la tête.

- Ominis, il n'y a rien entre nous, se justifia-t-elle d'une voix étranglée.

- Où est-ce que tu es allé chercher ça ? rigola Sebastian comme s'il venait d'entendre la blague la plus ridicule de sa vie.

- D'une source plus fiable que vous deux visiblement. Vous serez content d'apprendre que vous n'aurez désormais plus besoin de me mentir pour passer du temps seul, car à partir de maintenant, vous le resterez tout le temps.

Il vit sa silhouette faire demi-tour, presque immédiatement suivi par celle de Jane qui disparut à sa suite dans le couloir menant aux chambres des garçons.

- Ominis, attends ! Je t'en prie !

Les supplications de Jane s'éloignèrent et le souvenir se dilua lentement, le faisant reprendre pied avec la réalité. Il était de retour dans le dortoir des garçons de septième année, l'esprit bouillonnant encore habité par ce qu'il venait de vivre. Il n'arrivait pas à faire le tri, ignorant dans quel ordre traiter toutes ces informations. Il posa la boîte et les flacons désormais vides au pied de son lit et s'allongea en se tenant la tête. C'était incroyable. Réalisaient-ils qu'ils venaient de lui offrir le plus bel anniversaire de sa vie ? Son esprit était encore submergé d'un océan de couleurs, de lumières et de paysages qu'il n'oublierait jamais. Mais, il dut admettre que la dernière potion avait presque effacé toutes les autres dans son esprit. Que la plus belle des découvertes qu'il avait faites n'était pas Poudlard, ni les trois balais et encore moins les salles de cours, mais bien, et même si cette pensée le fit rougir, la couleur de ses yeux. Il devait les retrouver. Il troqua rapidement son pyjama pour une tenue plus convenable et se dirigea discrètement vers la salle commune. Peu d'élèves restaient pour les vacances de Noël et il fut soulagé de constater que personne d'autre n'était encore levé. Sebastian faisait les cent pas devant la cheminée tandis que Jane était assise dans le fauteuil à côté de lui. Ils ne parlaient pas, attendant dans un silence anxieux.

- On pourra dire que vous m'en avez fait voir des vertes et des pas mûres depuis qu'on se connait tous les trois...

Il laissa intentionnellement sa phrase en suspens le temps de franchir les derniers mètres qui le séparait de ses amis.

- ... Mais je dois reconnaitre que là, vous avez fait très fort. Vous êtes complètement fous...

Il leva les bras et les saisit dans une longue étreinte qu'ils lui rendirent avec ferveur.

- Pourtant jusqu'ici le vert t'a toujours bien réussi, tu ne trouves pas ? ne put s'empêcher d'ajouter Sebastian.

- Je suis désolé pour tout ce que vous ai dit, s'excusa-t-il en ignorant la remarque de Sebastian. J'étais en colère. J'étais...

Jaloux. Mais il était hors de question qu'il l'admette.

- Ne t'inquiète pas, je comprends, reprit son ami. Moi aussi à ta place, je n'aurais pas supporté de devoir passer moins de temps avec moi... Aïe !

Jane lui avait enfoncé son coude dans les côtes.

- Toutes les potions ont bien fait effet ? demanda-t-elle d'un ton inquiet.

- Oui, toutes.

Elle poussa un long soupir de soulagement.

- J'ai eu peur d'avoir mis trop de poudre de corne de Bicorne dans la potion numéro six, j'étais un peu distraite en la faisant et ça aurait affecté la durée des effets. Tu as bien pu voir notre sortie au chemin de traverse en début d'année ? C'était le dernier de la liste.

- Heuu...

Ominis sentit une douleur fulgurante lui traverser le tibia. Sebastian venait de lui donner un coup de pied. Il se rappela alors des souvenirs que contenait le dernier flacon, il sentit son sang affluer à ses joues, et bredouilla un « Oui oui, bien sûr.. », peu convaincant. Jane sembla mettre sa réaction sur le compte de l'émotion et n'y porta pas plus d'attention. En revanche, il n'avait pas besoin de le voir pour deviner quel insupportable sourire s'étirait sur le visage de son ami.

- Bon, c'est pas tout, mais que diriez-vous de discuter de tout ça devant un bon petit déjeuner ? Je suis affamé ! s'exclama Sebastian en s'engouffrant dans les escaliers d'un pas vif.

Ils le suivirent tranquillement, le laissant prendre la tête du trio. Sur le chemin qui menait à la grande salle, Ominis se rendit compte de la proximité de Jane, à côté de lui. Les souvenirs de la dernière potion affluaient dans son esprit et il sentit les battements de son cœur s'emballer. Il eut soudainement très envie de prendre sa main dans la sienne, mais la présence de Sebastian, cumulé à sa propre anxiété, retint son geste. Il ne voulait pas que son ami le voit et en profite pour le charrier. Mais comme s'il avait lu dans ses pensées, il s'arrêta précipitamment devant eux alors qu'ils s'apprêtaient à quitter les cachots et s'exclama : « J'ai oublié ma baguette dans le dortoir ! Allez-y, je reviens ! ».

Il entendit l'écho de ses pas descendre les escaliers au pas de courses et disparaitre au détour d'un couloir. Ominis ne put s'empêcher de penser qu'il était très mauvais comédien, mais il fut tout de même reconnaissant de l'initiative.

- Il a peur de se faire agresser par ses œufs brouillés ? se moqua Jane qui n'avait pas décelé la supercherie.

Ils reprirent leur chemin, Ominis ralentit volontairement le pas pour se laisser un peu plus le temps de rassembler son courage. Il entendait le bruissement de tissus de leur manche qui se rencontraient puis la sensation de sa main qui frôlait la sienne. Et doucement, tout doucement, la gorge sèche et ignorant les battements assourdissants de son cœur dans sa poitrine, il glissa ses doigts le long de la paume de sa main. La réponse de Jane fut immédiate, il sentit ses doigts se mêler aux siens, ce ne fut qu'à ce moment-là qu'il réalisa qu'il avait oublié de respirer. À la respiration précipitée de Jane, il supposa que c'était probablement aussi son cas. Ils s'étaient arrêtés de marcher, chacun attendant visiblement quelque chose de l'autre, mais trop intimidé pour oser se lancer. Jane fut la plus téméraire, de sa main libre, elle parcourut lentement le long de sa joue et sentit son souffle se rapprocher du sien. L'espace d'un instant, il se demanda si elle le regardait de la même façon que dans les souvenirs de la potion numéro six. Il espérait que non. Parce qu'il voulait un regard qui n'appartiendrait qu'à lui. Un regard que personne d'autre ne pourrait entrevoir. Avec douceur, il laissa glisser ses doigts le long de sa mâchoire pour relever sa tête vers lui et se pencha sur ses lèvres. Quand elle répondit à son baiser, il crut que sa poitrine allait exploser, incapable de contenir le tambourinement de son cœur et cette impression de sentir ses pieds quitter le sol. Après un moment qu'il aurait été absolument incapable d'estimer, il la sentit sourire contre ses lèvres.

- Sebastian n'a pas oublié sa baguette n'est-ce pas ?

- Non, avoua-t-il.

 

 

Note de fin de chapitre :


 

Je vous remercie d'être arrivé jusque-là et j'espère que vous avez apprécié votre lecture.

N'hésitez pas à laisser une review pour me dire ce que vous en avez pensé. Est-ce que, comme Ominis, vous vous êtes fait avoir où vous doutiez-vous qu'il se passait autre chose ? C'est la première fois que je mène une histoire à son terme et j'espère que le plot twist, les émotions et l'humour fonctionnent. 

À bientôt, j'espère !

- Nox !

 

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