Maman, Papa,
Cette nuit, j’ai encore fait un cauchemar. J’ai vu une lumière verte très forte qui m’a fait mal à la tête et je me suis réveillé en sursaut. J’ai pas crié parce que ça sert à rien, personne ne vient me voir de toute façon. Mais j’étais triste et j’ai pensé à vous. Je sais pas pourquoi, quand je fais ce rêve, je pense toujours à vous. Et je me demande pourquoi vous êtes pas là… Si c’est à cause de cette lumière verte.
Mais aujourd’hui j’ai huit ans, j’ai le droit de savoir. Alors, au petit déjeuner, j’ai demandé encore une fois à Tante Petunia pourquoi vous êtes plus avec moi.
Tante Petunia, elle aime pas les questions mais tant pis, moi, je veux savoir. Ce que je savais pas, c’est que je crois qu’elle aime encore moins cette question-là.
D’habitude, elle me dit juste de me taire, de pas poser de questions et elle me renvoie dans mon placard. Parfois, elle fait comme si je n’existais pas. Mais aujourd’hui, elle a carrément avalé son café de travers et c’est même remonté dans le nez. Elle a tout recraché par-là, c’était dégoutant.
Puis après, elle a dit que c’est moi qui devais nettoyer parce que c’était ma faute si c’était arrivé. Dudley a rigolé et il a fait exprès de renverser son chocolat chaud en disant que je l’avais bousculé. C’est pas vrai, mais ça sert à rien de discuter, alors… J’ai nettoyé.
Puis cette fois, je voulais vraiment qu’elle réponde à ma question. Je voulais vraiment savoir pourquoi je ne vous vois jamais et pourquoi je fais ce cauchemar avec cette lumière verte. Mais Tante Petunia criait, Dudley riait et personne me répondait.
Alors j’ai demandé encore et elle a pas fait pareil que les fois d’avant. Aujourd’hui, elle m’a regardé, longtemps, je n’ai pas trop compris pourquoi. Puis elle a dit que vous êtes morts dans un accident de voiture et que c’est ça qui a fait ma cicatrice. J’ai crié que c’était pas vrai, qu’elle était méchante et qu’elle mentait, je l’ai même tapée puis j’ai couru pour m’enfermer dans mon placard.
Maman, Papa, jusqu’à aujourd’hui, personne ne m’avait rien dit, alors je pensais qu’un jour vous reviendrez me chercher. Mais la mort, ça veut dire que ça n’arrivera pas. Alors, tout ça a fait que j’ai pleuré un peu, mais faut pas le dire à Dudley, il va se moquer. Et je n’ai pas envie qu’il se moque. Pas à cause de ça. Il peut se moquer à cause de mes cheveux qu’on n’arrive pas à coiffer, à cause de mes lunettes qui cassent tout le temps, à cause de mes habits trop grands… Ça, j’m’en fiche, mais pas parce que vous êtes morts et que je ne vous reverrai pas.
Tu sais, Maman, jusque-là j’aimais bien ma cicatrice. Elle est jolie en forme d’éclair. Personne en a une comme ça et je me disais qu’elle faisait que j’étais un super héros, comme dans les films que Dudley aime bien regarder à la télé. Mais maintenant je suis plus tellement sûr de l’aimer, ma cicatrice…
Tu sais, Papa, parfois j’entends ta voix et ton rire dans ma tête. Je sais pas si c’est vrai ou si j’invente, mais ça fait du bien. J’aime bien ton rire. Il me rend joyeux.
J’ai plein de questions, Maman, Papa. Pourquoi il se passe des choses bizarres quand j’ai peur ou que je suis en colère ? Tante Petunia dit que je ne suis pas normal et elle me punit tout le temps. Oncle Vernon aussi, il fait pareil. Ils ne répondent pas à mes questions, ils ne veulent pas que j’en pose.
Je veux savoir pourquoi j’arrive à faire toutes ces choses ! Pourquoi mes cheveux repoussent tout seuls quand Tante Petunia veut les couper ? Je suis content qu’ils repoussent, parce que ce n’était vraiment pas joli comme elle avait fait. Mais ce n’est pas très normal quand même, si ?
Puis comment ça se fait qu’un jour, alors que Dudley et ses copains voulaient m’attraper, je me suis retrouvé sur les toits de l’école ? Je voulais juste sauter derrière une poubelle pour me cacher… Ils n’ont pas pu m’attraper, peut-être parce qu’eux, ils sont trop gros et trop bêtes pour monter sur les toits… Je ne sais pas. Mais j’étais content, même si j’ai été puni après. Sauf que je n’ai plus jamais réussi à sauter aussi haut après…
Y a même une fois, Tante Petunia a voulu me faire enfiler un pull pas beau du tout, mais il a rétréci, encore et encore au point qu’elle arrivait plus à m’habiller avec. Là aussi j’étais content, en plus que je n’ai pas été puni parce que Tante Petunia a dit qu’il avait rétréci dans la machine à laver. Sauf que je sais bien que ce n’est pas vrai, que c’est moi qui a fait ça… Je ne sais pas comment, c’est vrai, et c’est bête parce que j’aimerais bien recommencer tous ces trucs parfois. Alors j’espère bien que quelqu’un un jour viendra m’expliquer comment j’arrive à faire tout ça.
Quelqu’un de gentil, de rigolo. J’aimerais bien qu’un jour quelqu’un vienne pour répondre à toutes ces questions et plus encore... Dis, Maman, Papa, tu peux faire que quelqu’un vienne m’expliquer tout ça ?